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CAPP/JURITEXT000046991437.xml | AFFAIRE : No RG 21/01687 - No Portalis DBWB-V-B7F-FTXZ
Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Saint-Denis en date du 23 Août 2021, rg no 20/00088
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANT :
Monsieur [P] [Y] [K]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Xavier BELLIARD de l'AARPI BELLIARD-RATRIMOARIVONY, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)
Association PTI COLIBRI
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentant : Me Caroline AMIGUES-OLIVIER, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/8415 du 16/12/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)
Clôture : 16 Février 2022
DÉBATS : En application des dispositions des articles 786 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Février 2022 en audience publique, devant Alain LACOUR, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Monique LEBRUN, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 5 mai 2022 prorogé au 5 juillet et au 13 juillet 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Alain Lacour
Conseiller : Philippe Bricogne
Conseiller : Laurent Calbo
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 juillet 2022
Greffier lors des débats : Mme Monique Lebrun
Greffier lors du prononcé par mise à disposition : Mme Delphine Grondin
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Monsieur [P] [Y] [K] a été engagé par l'association Pti Colibri le 4 juin 2019 suivant un contrat à durée déterminée de six mois à temps partiel en qualité de chargé de mission valorisation du patrimoine.
2. Par lettre du 8 août 2019, il a été convoqué à un entretien préalable à une mesure de licenciement fixé le 16 août 2019.
3. Par lettre du 2 septembre 2019, le contrat de travail de Monsieur [P] [Y] [K] a été rompu pour faute grave, constituée par :
- la réalisation d'heures complémentaires non demandées par l'employeur,
- une absence injustifiée les 6 et 11 juillet 2019,
- un comportement inadapté envers des bénévoles le 30 juillet 2019,
- un non-respect des missions confiées,
- une insuffisance professionnelle.
4. Sur requête de Monsieur [P] [Y] [K], le conseil de prud'hommes de Saint-Denis a, par jugement du 23 août 2021 :
- dit que la rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée de Monsieur [P] [Y] [K] repose sur une faute grave,
- dit que la demande de dommages et intérêts de Monsieur [P] [Y] [K] pour rupture anticipée de son contrat de travail est infondée ainsi que ses demandes indemnitaires et de remise de documents sociaux y afférentes,
- condamné l'association Pti Colibri à verser à Monsieur [P] [Y] [K] la somme de 54,00 € net à titre de dommages et intérêts pour perte du mécanisme de la garantie santé et des garanties de prévoyance complémentaire,
- débouté Monsieur [P] [Y] [K] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté l'association Pti Colibri de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- mis les dépens à la charge de Monsieur [P] [Y] [K].
5. Par déclaration parvenue au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion le 29 septembre 2021, Monsieur [P] [Y] [K] a interjeté appel de cette décision.
6. Par ordonnance du 25 octobre 2021, le président de la chambre sociale a fixé l'affaire à bref délai.
7. Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 24 novembre 2021, Monsieur [P] [Y] [K] demande à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il :
* a dit que la rupture anticipée de son contrat de travail à durée déterminée de repose sur une faute grave,
* a dit que sa demande de dommages et intérêts pour rupture anticipée de son contrat de travail est infondée ainsi que ses demandes indemnitaires et de remise de documents sociaux y afférentes,
* a condamné l'association Pti Colibri à lui verser la somme de 54,00 € net à titre de dommages et intérêts pour perte du mécanisme de la garantie santé et des garanties de prévoyance complémentaire,
* l'a débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- statuant à nouveau,
- dire et juger la rupture anticipée de son contrat de travail à durée déterminée est abusive,
- condamner l'association Pti Colibri à lui verser les sommes suivantes :
* 4.236,26 € à titre de rappel de salaire, à raison de la rupture anticipée abusive,
* 788,52 € à titre d'indemnité de fin de contrat,
* 1.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour perte du mécanisme de portabilité de la garantie santé et des garanties de prévoyance complémentaire,
* 1 .500,00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance,
* 1 .500,00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel,
- condamner l'association Pti Colibri à lui remettre, sous astreinte de 10,00 € par jour de retard et par document, à compter de la mise à disposition de l'arrêt, les deux documents modifiés suivants :
* reçu pour solde de tout compte
* attestation destinée à Pôle Emploi
- condamner l'association Pti Colibri aux entiers dépens.
8. À l'appui de ses prétentions, Monsieur [P] [Y] [K] fait en effet valoir :
- qu'un contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu que pour faute grave ou en cas de force majeure,
- que l'employeur n'a subi aucun grief de ses heures supplémentaires, récupérées avec l'accord de son supérieur hiérarchique,
- que le vague à l'âme manifesté lors d'une réunion suite aux remontrances de son employeur ne saurait être interprété comme un manque de professionnalisme et constitutif d'une faute grave,
- qu'il n'a jamais refusé d'exécuter les tâches confiées,
- que l'insuffisance professionnelle alléguée ne peut pas être constitutive d'une faute grave,
- que la rupture du contrat de travail à durée déterminée est intervenue tardivement,
- qu'il est victime de la dégradation de ses relations avec un autre salarié,
- que l'association Pti Colibri a fait fi de ses obligations de souscription à la mutuelle santé de l'entreprise et, par suite, des mécanismes de portabilité des garanties frais de santé et de prévoyance complémentaires.
9. L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 16 février 2022.
10. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la caducité de la déclaration d'appel
11. L'article 911 du code de procédure civile dispose que, "sous les sanctions prévues aux articles 905-2 et 908 à 910 (caducité de l'appel, irrecevabilité des conclusions), les conclusions sont notifiées aux avocats des parties dans le délai de leur remise au greffe de la cour. Sous les mêmes sanctions, elles sont signifiées au plus tard dans le mois suivant l'expiration des délais prévus à ces articles aux parties qui n'ont pas constitué avocat ; cependant, si, entre-temps, celles-ci ont constitué avocat avant la signification des conclusions, il est procédé par voie de notification à leur avocat.
La notification de conclusions au sens de l'article 910-1 faite à une partie dans le délai prévu aux articles 905-2 et 908 à 910 ainsi qu'à l'alinéa premier du présent article constitue le point de départ du délai dont cette partie dispose pour remettre ses conclusions au greffe".
12. En l'espèce, par courrier adressé aux parties le 13 mai 2022 via RPVA, il a été demandé leurs observations sur la caducité de la déclaration d'appel encourue en vertu de cet article faute de notification des conclusions dans le délai d'un mois à l'avocat constitué.
13. Le conseil de Monsieur [P] [Y] [K] fait observer qu'il ignorait la constitution de son confrère pour l'association Pti Colibri avant de lui signifier ses conclusions et celui de l'intimée indique avoir régularisé une constitution le 26 novembre 2021 et qu' "un message est normalement automatiquement envoyé à l'adresse mail de l'avocat adverse".
14. Il ressort de la procédure que, suite à l'appel formé le 29 septembre 2021 par Monsieur [P] [Y] [K], le président de la chambre sociale a orienté l'affaire en circuit court le 25 octobre 2021. L'appelant a signifié la déclaration d'appel à l'association Pti Colibri personnellement le 23 novembre 2021 avant de déposer ses conclusions le 24 novembre 2021 et de les signifier à l'intimée personnellement le 16 décembre 2021, puis via RPVA à l'avocat constitué le 3 janvier 2022.
15. Si l'avocat de l'association Pti Colibri a dénoncé sa constitution au greffe, via RPVA, le 26 novembre 2021, il ressort de l'examen de l'événement que celui-ci n'a pas été mis en copie de l'appelant, ce qui autorisait donc ce dernier, qui ignorait la constitution de son adversaire, à signifier ses conclusions à l'intimée elle-même, formalité effectuée dans les délais requis.
16. Il s'ensuit que la caducité de la déclaration d'appel ne peut pas être constatée.
Sur la demande de rabat de l'ordonnance de clôture
17. L'article 802 proscrit le dépôt de conclusions après l'ordonnance de clôture, leur irrecevabilité pouvant être prononcée d'office, mais l'article 803 permet la révocation de l'ordonnance de clôture en cas de survenance d'une cause grave, au besoin après l'ouverture des débats.
18. En l'espèce, pour solliciter la révocation de l'ordonnance de clôture du 16 février 2022 et permettre à la cour d'accueillir ses conclusions en réplique, le conseil de l'association Pti Colibri, dans des conclusions déposées au greffe via RPVA le 19 février 2022, reproche à celui de l'appelant de ne pas lui avoir communiqué ses écritures avant de les signifier directement à sa cliente tout en omettant de signaler le délai pour conclure dans l'acte de signification, les conclusions de Monsieur [P] [Y] [K] lui ayant finalement été communiquées le 17 février 2022, soit postérieurement à l'ordonnance de clôture, ce qui ne lui aurait pas permis de répondre en temps et en heure.
19. Toutefois, l'avocat de l'association Pti Colibri, qui ne sollicite pas la nullité de la signification des écritures adverses, ne caractérise aucune cause grave dès lors qu'à défaut de pouvoir justifier de la dénonciation d'une constitution auprès de son confrère, fût-ce seulement par acte du palais, il ne saurait se plaindre de la signification des actes de procédure à sa cliente en ses lieu et place, laquelle ne lui aurait pas permis de répliquer en temps utile.
20. Il n'y aura donc pas lieu à révocation de l'ordonnance de clôture.
Sur le licenciement
21. L'article 1243-4 du code du travail dispose, en son 1er alinéa, que "la rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée qui intervient à l'initiative de l'employeur, en dehors des cas de faute grave, de force majeure ou d'inaptitude constatée par le médecin du travail, ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat, sans préjudice de l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L. 1243-8".
22. L'article L. 1243-8 prévoit que, "lorsque, à l'issue d'un contrat de travail à durée déterminée, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation.
Cette indemnité est égale à 10 % de la rémunération totale brute versée au salarié.
Elle s'ajoute à la rémunération totale brute due au salarié. Elle est versée à l'issue du contrat en même temps que le dernier salaire et figure sur le bulletin de salaire correspondant".
23. En l'espèce, le lettre de licenciement du 2 septembre 2019 est rédigée en ces termes :
"Suite à notre entretien qui s'est tenu le samedi 24 août 2019, nous vous informons de notre décision de vous licencier pour les motifs suivants :
- Réalisation d'heures complémentaires non demandées par l'employeur hors du temps de travail,
- Absences répétées sans accord de l'employeur (06/07/19 et 11/07/19),
- Comportement inapproprié envers les bénévoles lors de l'atelier du mardi 30 juillet 2019,
- Tâches demandées par le conseil d'administration non accomplies,
- Insuffisance professionnelle.
Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien au sein de l'association est impossible. Votre licenciement prend donc effet immédiatement, sans indemnité de préavis ni de licenciement".
24. Outre le fait que l'association Pti Colibri n'a pas valablement conclu et n'a donc communiqué aucune pièce pour justifier de la prétendue faute grave, les seuls griefs allégués pouvant être qualifiables de faute grave sont les "absences répétées" et le "comportement inapproprié".
25. Concernant les absences répétées, il ressort des SMS produits par Monsieur [P] [Y] [K] que son supérieur hiérarchique avait été prévenu de ses temps de récupération pour les deux journées concernées mais qu'il se plaignait simplement de l'être au dernier moment. Concernant le grief de comportement inapproprié, non précisé dans la lettre de licenciement, les premiers juges se sont déterminés à partir d'une attestation qui "certifie que, lors de la session des "femmes de l'océan indien" le 30 juillet 2019, Monsieur [P] [Y] [K], chargé d'intervenir sur les actions proposées dans le cadre du projet TIKATSOU 2019, a fait preuve d'un désintérêt total envers les participants, n'a donné, lors de ses rares interventions, aucune information sur les actions proposées, était sur la défensive, et n'a fait preuve d'aucun professionnalisme nécessaire pour évoluer dans l'association", considérations qui, à les supposer établies, ne relèvent pas de la faute grave.
26. Il s'ensuit que le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a dit que la rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée de Monsieur [P] [Y] [K] repose sur une faute grave, la cour, statuant à nouveau, disant que le licenciement de Monsieur [P] [Y] [K] est abusif.
27. Alors que son contrat de travail avait vocation à se terminer le 4 décembre 2019, Monsieur [P] [Y] [K] a été injustement licencié le 2 septembre 2019, de sorte qu'il a droit, conformément aux dispositions de l'article L. 1243-4 du code du travail, à la rémunération à laquelle il pouvait prétendre jusqu'à son terme, soit la somme de 4.236,26 € calculée par le salarié sur la base de son dernier salaire brut de 1.352,00 €.
28. Il conviendra d'y ajouter l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L. 1243-8 du code du travail, calculée par le salarié à hauteur de 10% des sommes qu'il aurait dû percevoir durant l'exécution de son contrat de travail à durée déterminée (7.885,26 €), soit 788,52 €.
Sur l'absence de contrat de prévoyance complémentaire
29. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale, "à moins qu'elles ne soient instituées par des dispositions législatives ou réglementaires, les garanties collectives dont bénéficient les salariés, anciens salariés et ayants droit en complément de celles qui résultent de l'organisation de la sécurité sociale sont déterminées soit par voie de conventions ou d'accords collectifs, soit à la suite de la ratification à la majorité des intéressés d'un projet d'accord proposé par le chef d'entreprise, soit par une décision unilatérale du chef d'entreprise constatée dans un écrit remis par celui-ci à chaque intéressé".
30. L'article L. 911-8 dispose en son 1er alinéa que "les salariés garantis collectivement, dans les conditions prévues à l'article L. 911-1, contre le risque décès, les risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou liés à la maternité ou les risques d'incapacité de travail ou d'invalidité bénéficient du maintien à titre gratuit de cette couverture en cas de cessation du contrat de travail, non consécutive à une faute lourde, ouvrant droit à prise en charge par le régime d'assurance chômage".
31. En l'espèce, l'association Pti Colibri ne justifie pas avoir affilié Monsieur [P] [Y] [K] à sa mutuelle santé, ce qu'elle a d'ailleurs reconnu à la lecture du jugement pour avoir accepté de l'indemniser à hauteur du montant alloué à ses salariés pour sa participation à la mutuelle complémentaire, à savoir 18,00 € par mois.
32. Ce chef du jugement, qui a limité l'indemnisation du salarié à 3 x 18,00 €, sera infirmé dès lors que c'est l'absence de portabilité de la garantie, qui est au maximum de 12 mois et dont Monsieur [P] [Y] [K] n'a pas bénéficié, qui doit être indemnisée.
33. Il sera en conséquence alloué à Monsieur [P] [Y] [K] la somme de 500,00 € à titre de dommages et intérêts en compensation du préjudice ainsi subi.
Sur la remise des documents sous astreinte
34. Il conviendra de faire droit à la demande de remise des bulletins de salaire et des documents de fin de contrat sous astreinte, dans les conditions décrites au dispositif du présent arrêt.
Sur les dépens
35. L'association Pti Colibri, partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
36. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la partie condamnée aux dépens prend en charge les frais irrépétibles exposés par la partie adverse dans les proportions que le juge détermine.
37. En l'espèce, il convient de faire bénéficier Monsieur [P] [Y] [K] de ces dispositions à hauteur de 2.000,00 € pour ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par arrêt mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du Code de procédure civile,
Dit n'y avoir lieu à caducité de la déclaration d'appel,
Dit n'y avoir lieu à révocation de l'ordonnance de clôture,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Dit que le licenciement de Monsieur [P] [Y] [K] est abusif,
En conséquence,
Condamne l'association Pti Colibri à payer à Monsieur [P] [Y] [K] les sommes de :
- 4.236,26 € (quatre mille deux cent trente six euros et vingt six centimes) à titre de rappel de salaire, à raison de la rupture anticipée abusive,
- 788,52 € (sept cent quatre vingt huit euros et cinquante deux centimes) à titre d'indemnité de fin de contrat,
Condamne en outre l'association Pti Colibri à payer à Monsieur [P] [Y] [K] la somme de 500,00 € (cinq cents euros) à titre de dommages et intérêts pour perte du mécanisme de portabilité de la garantie santé et des garanties de prévoyance complémentaire,
Condamne l'association Pti Colibri à remettre à Monsieur [P] [Y] [K], sous astreinte de 10,00 € (dix euros) par jour de retard et par document, dans le mois suivant la signification du présent arrêt et pendant une durée de six mois après quoi il sera de nouveau statué, les deux documents modifiés suivants :
- reçu pour solde de tout compte
- attestation destinée à Pôle Emploi
Condamne l'association Pti Colibri aux dépens de première instance et d'appel,
Condamne l'association Pti Colibri à payer à Monsieur [P] [Y] [K] la somme de 2.000,00 € (deux mille euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.
Le présent arrêt a été signé par M. Philippe BRICOGNE, conseiller, pour le président empêché, et par Mme Delphine GRONDIN, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le conseiller pour le président empêché
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CAPP/JURITEXT000046991436.xml | COUR D'APPEL
BASSE - TERRE
No RG 22/716
No Portalis DVB7-V-B7G-DO2C
ORDONNANCE DU 13 JUILLET 2022
Dans l'affaire entre d'une part :
Monsieur [V] [U]
né le [Date naissance 1] 1991 à [Localité 4] (Haïti)
de nationalité haïtienne (passeport numéro GV4647784)
se déclarant hébergé chez [Adresse 21]
assisté de Mme [W] [D] épouse [V] dit [S], interprète en langue créole,
comparant, assisté de Maître Laurent HATCHI, avocat au Barreau de la Guadeloupe,
Appelant le 11 juillet 2022 à 13h24 d'une ordonnance rendue le 8 juillet 2022 à 15h50 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Fort-de-France ;
et d'autre part,
Monsieur le Préfet de la Martinique,
qui a transmis par courriel un mémoire en défense daté du 12 juillet 2022,
non comparant et non représenté,
Le ministère Public
Représenté par Monsieur Eric RAVENET, substitut général,
*************
Nous, Emmanuel PLANQUE, conseiller à la Cour d'appel de Basse-Terre, délégué par ordonnance de Monsieur le premier président pour statuer en matière de rétention administrative, assistée de Monsieur Armélida RAYAPIN, greffier,
Vu le procès-verbal d'interpellation de Monsieur [U] [V] le 6 juillet 2022 à 6h40 ;
Vu le procès-verbal de notification du placement en mesure de retenue de l'intéressé le 6 juillet 2022 à 6h45 ;
Vu l'arrêté du préfet de la Martinique no2022045-002 du 14 février 2022 prononçant l'obligation de quitter le territoire français de Monsieur [U] [V], dans un délai de trente jours, avec interdiction de retour pendant une durée de 2 ans ;
Vu la décision du préfet de la Martinique no2022187-001 de placement au centre de rétention administrative de l'intéressé en date du 6 juillet 2022 ;
Vu le procès-verbal de notification de ses droits en rétention en date du 6 juillet 2022 à 17h45;
Vu l'ordonnance du 8 juillet 2022 rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre ordonnant la prolongation de la rétention administrative de l'intéressé pour une durée maximale de vingt-huit jours ;
Vu l'appel interjeté à l'encontre de cette ordonnance suivant courriel du 11 juillet 2022 à 13 heures 24 par Monsieur [U] [V] ;
A l'audience qui s'est tenue publiquement au palais de justice de Basse-Terre le mercredi 13 juillet 2022 à 08 heures 30, ont été entendus Monsieur l'avocat général et Monsieur [V], assisté de son conseil ;
Suivant la déclaration d'appel précitée, Monsieur [V] demande sa remise en liberté et, à défaut, son placement sous le régime de l'assignation à résidence puisqu'il est détenteur d'un passeport et justifie d'un hébergement en Martinique.
Il argue de moyens non soulevés devant le premier juge suivant lesquels il a été maintenu à l'aéroport de la Martinique dans une zone d'attente, du 6 juillet 2022 16h45 au 8 juillet 2022 au soir, sans avoir pu exercer des droits dont il disposait en situation de rétention administrative, notamment celui de pouvoir bénéficier de l'assistance d'une association sur place pour contester ce placement.
A l'audience, il a en outre soulevé le moyen tiré de l'irrégularité de son contrôle d'identité au regard des dispositions des articles 78 du Code de procédure pénale et L812 du CESEDA.
Monsieur le préfet de la Martinique conteste l'ensemble de l'argumentation de Monsieur [U], rappelant que son placement en retenue administrative lui a bien été notifiée dès 6h45 le 6 juillet 2022 et exposant que le local de rétention administrative de l'aéroport [2] du [Localité 10] remplit l'ensemble des conditions requises par le CESEDA pour permettre à la personne retenue d'y exercer ses droits.
Il soutient enfin que l'intéressé ne dispose pas de garantie de représentation au regard de l'adresse très imprécise qu'il a donnée aux autorités lorsqu'il a été interpellé et entendu, de sorte que la confirmation de la décision querellée s'impose.
Monsieur l'avocat général demande de voire rejeter le moyen tiré de l'irrégularité du contrôle d'identité, celui-ci ayant été opéré en application des dispositions de l'article 78-2 alinéa 12 5o et demande en conséquence la confirmation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ordonnant la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [V].
1/ Sur la recevabilité de l'appel,
Conformément aux dispositions de l'article R743-10 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui statue sur une demande relative à la rétention d'un étranger est susceptible d'appel dans les 24 heures de son prononcé par déclaration motivée.
Le délai prévu est calculé et prorogé conformément aux articles 640 et 642 du Code de procédure civile.
L'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Fort-de-France querellée a été rendue le vendredi 8 juillet 2022 à 15h50, de sorte que le délai d'appel expirant en principe le samedi 9 juillet 2022 à 15h50 a été prorogé de quarante-huit heures.
L'appel de Monsieur [V] ayant été formé le 11 juillet 2022 à 13h24 est donc recevable.
2/ Sur la mesure de rétention administrative,
Il est constant qu'en application des dispositions de l'article 563 du Code de procédure civile, les moyens de défense tirés d'irrégularités antérieures au placement en rétention au fond peuvent être invoqués pour la première fois en cause d'appel.
Monsieur [V] est donc recevable à invoquer devant la présente juridiction des moyens qu'il n'avait pas soulevés devant le juge des libertés et de la détention de Fort-de-France.
Il ressort de la lecture du procès-verbal d'interpellation de l'intéressé en date du 6 juillet 2022 à 6h40 que celui-ci s'est effectué dans le centre-ville du [Localité 10], dans le cadre d'un contrôle d'identité au titre de l'article 78-2 alinéa 12 5o du Code de procédure pénale.
Ces dispositions précisent que :
« L'identité de toute personne peut (également) être contrôlée, selon les modalités prévues au premier alinéa du présent article, en vue de vérifier le respect des obligations de détention, de port et de présentation des titres et documents prévus par la loi :
5o En Martinique, dans une zone comprise entre le littoral et une ligne tracée à un kilomètre en deçà, ainsi que dans une zone d'un kilomètre de part et d'autre de la route nationale 1 qui traverse les communes de [Localité 20], [Localité 9], [Localité 15] et [Localité 10], de la route nationale 2 qui traverse les communes de [Localité 18], [Localité 11], [Localité 14], [Localité 8] et [Localité 3], de la route nationale 3 qui traverse les communes de [Localité 14], [Localité 8], [Localité 3], [Localité 6] et [Localité 7], de la route nationale 5 qui traverse les communes de [Localité 10], [Localité 5], [Localité 17], [Localité 19], [Localité 16] et [Localité 13], de la route nationale 6 qui traverse les communes de [Localité 5], [Localité 10], [Localité 15], [Localité 12], [Localité 17], [Localité 19], [Localité 16] et [Localité 13] et de la route départementale 1 qui traverse les communes de [Localité 15], [Localité 12]. »
Le contrôle d'identité, et partant le placement en retenue, de Monsieur [U] [V] est donc parfaitement régulier.
Aux termes du premier alinéa de l'article L612-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), « L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. »
L'article L612-2 du même Code dispose que « par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire (notamment s'il) existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ».
L'article L612-3 précise que :
« Le risque mentionné au 3o de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :
1o L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
2o L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
3o L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;
4o L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;
5o L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;
6o L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;
7o L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ;
8o L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3o de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5. »
L'article L731-1 dispose quant à lui que :
« L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants :
1o L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins d'un an auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ;
2o L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction de retour sur le territoire français prise en application des articles L. 612-6, L. 612-7 et L. 612-8 ;
3o L'étranger doit être éloigné pour la mise en oeuvre d'une décision prise par un autre État, en application de l'article L. 615-1 ;
4o L'étranger doit être remis aux autorités d'un autre Etat en application de l'article L. 621-1 ;
5o L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction de circulation sur le territoire français prise en application de l'article L. 622-1 ;
6o L'étranger fait l'objet d'une décision d'expulsion ;
7o L'étranger doit être éloigné en exécution d'une peine d'interdiction judiciaire du territoire prononcée en application du deuxième alinéa de l'article 131-30 du code pénal ;
8o L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction administrative du territoire français.
L'étranger qui, ayant été assigné à résidence en application du présent article, ou placé en rétention administrative en application des articles L. 741-1 ou L. 741-2, n'a pas déféré à la décision dont il fait l'objet ou, y ayant déféré, est revenu en France alors que cette décision est toujours exécutoire, peut être assigné à résidence sur le fondement du présent article. »
L'article L740-1 explique que « l'autorité administrative peut, dans les conditions prévues au présent titre, placer en rétention un étranger pour l'exécution de la décision d'éloignement dont il fait l'objet. »
L'article L741-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que :
« L'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.
Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3. »
L'article L741-3 du même Code précise que « un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet. »
Il ressort de la procédure que Monsieur [U] [V] est de nationalité haïtienne et, selon ses déclarations, vit sur l'île de la Martinique depuis plusieurs mois à une adresse relativement imprécise.
Il fait l'objet à la fois d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire national qui lui a été notifié le 21 février 2022 et d'une décision de rejet de sa demande d'asile émanant de la Cour nationale du droit d'asile en date du 20 mai 2022.
Il admet qu'il ne bénéficie d'aucun document l'autorisant à séjourner sur le territoire martiniquais, reconnaît avoir aucune attache familiale sur ce territoire, se déclarant célibataire tout en précisant avoir deux enfants vivant en Haïti.
Il a fait l'objet d'un placement en rétention administrative au Local de Rétention Administrative (LRA) situé à l'aéroport [2] du [Localité 10] et l'ensemble de ses droits en rétention lui ont bien été notifiés le 6 juillet 2022 à 16h45, par le truchement d'un interprète.
La présente juridiction ne constate en conséquence aucune irrégularité procédurale de nature à porter grief à l'intéressé et il convient en conséquence de confirmer la décision querellée en ce qu'elle a déclaré la procédure de placement en rétention régulière.
3/ Sur la prolongation de la mesure de rétention administrative,
L'article L742-1 du CESEDA dispose que :
« Le maintien en rétention au-delà de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, dans les conditions prévues au présent titre, par le juge des libertés et de la détention saisie à cette fin par l'autorité administrative. »
Compte-tenu de ce qui précède, il est établi qu'il existe pour Monsieur [V] des perspectives raisonnables d'éloignement vers son pays d'origine et que cette reconduite peut s'exécuter à bref délai.
S'il dispose effectivement d'un passeport haïtien no GV4647784 valide jusqu'au 5 mars 2028, ce dernier n'a pas pu faire l'objet de vérifications dans la mesure où lors de son audition, l'intéressé a indiqué qu'il ne souhaitait pas le remettre à l'autorité administrative dans l'hypothèse d'une assignation à résidence.
Par ailleurs, l'hébergement allégué apparaît être de circonstance, puisqu'il n'a pas été en mesure d'en donner une adresse précise et en a « proposé » une seconde au cours de l'audience, sans possibilité toutefois de vérification.
Les conditions ne sont donc pas réunies pour envisager son assignation à résidence, laquelle ne permettrait pas, en l'état, de garantir efficacement l'exécution effective de l'obligation de quitter le territoire français qui lui a été notifiée.
Aussi, il convient de faire droit à la requête de Monsieur le préfet tendant à voir prolonger la mesure de rétention administrative dans les conditions prévues à l'article L742-3 du CESEDA, soit pour une période de vingt-huit jours à compter de l'expiration du délai initial de quarante-huit heures.
PAR CES MOTIFS,
Nous, Emmanuel PLANQUE, conseiller, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président, assistée de Armélida RAYAPIN, greffier,
Statuant publiquement, par décision réputée contradictoire et rendue en dernier ressort, après débats en audience publique,
Déclarons recevable l'appel de Monsieur [V] [U] formé à l'encontre de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Fort-de-France en date du 8 juillet 2022 ;
Confirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Fort-de-France en date du 8 juillet 2022 en ce qu'elle a déclaré la procédure régulière et a ordonné la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [V] [U], pour une durée maximale de vingt-huit jours ;
Disons que la présente ordonnance sera notifiée aux parties intéressées par tout moyen par le greffe de la cour d'appel et sera transmise à Monsieur le procureur général ;
Fait à BASSE-TERRE le 13 juillet 2022 à 11 heures 00
La greffière Le magistrat délégué
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CAPP/JURITEXT000046991422.xml | AFFAIRE : No RG 21/00033 - No Portalis DBWB-V-B7F-FPOA
Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Tribunal de Grande Instance de SAINT-DENIS en date du 09 Décembre 2020, rg no 19/843
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANTE :
ASSOCIATION DE GESTION POUR L'INSERTION ET LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE SOCIAL ET URBAIN , en son représentant légal
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par M. [C] muni d'un pouvoir
La caisse générale de sécurité sociale de la Réunion prise en la personne de son directeur en exercice
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Philippe BARRE de la SELARL PHILIPPE BARRE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 mars 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Nadia HANAFI, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 9 juin 2022, mise à disposition prorogée au 13 juillet 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 JUILLET 2022 ;
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Faisant valoir des difficultés de trésorerie ayant entraîné du retard dans le paiement des cotisations sociales exigibles au titre de l'emploi de personnel salarié, l'association gestion insertion développement économique, social et urbain (ci-après l'Agidesu) a sollicité auprès de la commission de recours amiable, par courrier du 28 mai 2018, la remise des majorations de retard et des pénalités décidées pour les périodes d'août à septembre 2017.
2. Le 25 octobre 2018, la commission de recours amiable a accordé la remise des majorations de retard initiales pour la somme de 4.753,00 €, les pénalités et majorations étant ramenées à un montant de 12.580,12 €.
3. Le 25 février 2019, l'Agidesu a porté sa contestation devant le pôle social du tribunal de grande instance de Saint-Denis de La Réunion.
4. Par jugement du 9 décembre 2020, le tribunal a confirmé la décision de remise partielle des majorations de retard et de rejet des pénalités prises par la commission de recours amiable le 25 octobre 2018 et a condamné l'Agidesu au paiement de la somme de 12.580,12 € au titre des périodes d'août 2017 à décembre 2017.
5. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion parvenue le 6 janvier 2021, l'Agidesu a interjeté appel de cette décision.
6. Les parties ont été convoquées par lettre recommandée avec avis de réception du 29 mars 2021 à l'audience du 7 septembre 2021.
7. L'affaire a été plaidée à l'audience du 22 mars 2022 et mise en délibéré au 9 juin 2022, prorogé au 27 juin 2022.
8. L'Agidesu demande à la cour de lui accorder une exonération à titre gracieux, faisant valoir des décalages dans le versement des subventions, une situation économique délicate à l'époque concernée, l'impact de la crise sanitaire et une santé financière encore fragile.
9. La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 31 janvier 2022, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- déclarer irrecevable l'appel interjeté par l'Agidesu,
- subsidiairement,
- constater que la remise des majorations de retard complémentaires ne peut être effectuée que lorsque le paiement des cotisations afférentes a été intégralement fait dans les 30 jours suivant la date de leur exigibilité ou en cas de force majeure ou de cas exceptionnels, ce qui n'est pas le cas en l'espèce,
- confirmer la décision querellée,
- débouter l'Agidesu de ses demandes,
- condamner l'Agidesu à lui payer la somme de 3.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
10. À l'appui de ses prétentions, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion fait en effet valoir :
- que le jugement entrepris, improprement qualifié, n'était pas susceptible d'appel,
- que la déclaration d'appel ne mentionne pas les chefs du jugement expressément critiqués,
- que la remise des majorations de retard initiales et de pénalités est subordonnée à la notion de bonne foi, qui s'apprécie au regard du comportement du cotisant face à ses obligations sociales de déclaration et de paiement de ses cotisations sociales à leur exigibilité et elle ne peut être effectuée que lorsque le paiement des cotisations afférentes a été intégralement fait dans les 30 jours suivant la date de leur exigibilité ou en cas de force majeure ou de cas exceptionnels, ce qui n'est pas le cas en l'espèce,
- que l'Agidesu est coutumière du fait.
11. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées ainsi qu'à la note d'audience figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de l'appel
12. Aux termes de l'article R. 244-2 du code de la sécurité sociale, "les tribunaux judiciaires spécialement désignés statuent en dernier ressort, quel que soit le chiffre de la demande, lorsqu'ils sont saisis de recours contre des décisions prises en application de l'article R. 243-20 (demande gracieuse en remise totale ou partielle des majorations et pénalités) et du II de l'article R. 133-9-1 (demande de remise, par le débiteur de bonne foi, de la majoration de 10 %)".
13. En l'espèce, la contestation de l'Agidesu ne porte que sur une demande de remise des majorations et pénalités qui ne lui a été accordée que partiellement.
14. C'est donc improprement que le jugement entrepris est qualifié de "premier ressort".
15. L'appel de l'Agidesu sera déclaré irrecevable.
Sur les dépens
16. L'Agidesu, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
17. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la partie condamnée aux dépens prend en charge les frais irrépétibles exposés par la partie adverse dans les proportions que le juge détermine.
18. En l'espèce, l'équité commande de ne pas faire application de ces dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Déclare irrecevable l'appel interjeté par l'Agidesu,
Condamne l'Agidesu aux dépens d'appel,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, président de chambre, et par Mme Nadia HANAFI, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991434.xml | AFFAIRE : No RG 21/01111 - No Portalis DBWB-V-B7F-FSHK
Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Pole social du TJ de SAINT DENIS en date du 02 Juin 2021, rg no 21/00212
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANT :
Monsieur [O] [T]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Iqbal AKHOUN de la SELARL IAVOCATS & PARTNERS, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Caisse CAISSE INTERPROFESSIONNELLE DE PREVOYANCE ET D'ASS URANCE VIEILLESSE
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentant : Me Patrice SANDRIN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Delphine GRONDIN, greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 5 Juillet 2022 prorogé au 13 Juillet 2022;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 Juillet 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Par acte d'huissier du 25 février 2021, la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse (ci-après la CIPAV) a délivré à Monsieur [O] [T] deux contraintes du 10 juillet 2019 et du 23 septembre 2019 pour un montant respectif de 26.069,21 € et de 21.606,43 € auxquelles ce dernier a fait opposition par courrier recommandé avec avis de réception du 9 avril 2021 au greffe du pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion, en exposant qu`il n'a pas pu faire opposition dans les délais impartis au motif qu'iI aurait été hospitalisé lors de la crise sanitaire, puis contraint à une septaine, et en précisant qu'il dépendrait du régime social des indépendants et non de la ClPAV.
2. Par jugement du 2 juin 2021, le tribunal a :
- déclaré Monsieur [O] [T] irrecevable en son opposition,
- condamné Monsieur [O] [T] aux entiers dépens,
- dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- rappelé que la décision est exécutoire de droit à titre provisoire.
3. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 23 juin 2021, Monsieur [O] [T] a interjeté appel de cette décision.
4. Les parties ont été convoquées par lettre recommandée avec avis de réception du 9 juillet 2021 à l'audience du 2 novembre 2021.
5. L'affaire a été plaidée à l'audience du 11 avril 2021 et mise en délibéré au 5 juillet 2021 prorogé au 13 juillet 2022.
6. Monsieur [O] [T] déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 28 février 2022, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- dire son appel recevable et bien fondé,
- lui donner acte de son désistement d'instance,
- lui donner acte de ce qu'il sollicite de la CIPAV la remise des majorations, pénalités et intérêts de retard.
7. À l'appui de ses prétentions, Monsieur [O] [T] fait en effet valoir :
- que son opposition était recevable dès lors qu'il justifie d'un cas de force majeure,
- qu'il cotisait régulièrement auprès du RSI, de sorte qu'il ignorait que les cotisations retraite devaient être payées auprès de la CIPAV,
- qu'il a fini par payer les cotisations dues mais demande, compte tenu de sa bonne foi, la remise des majorations, pénalités et intérêts de retard.
8. La CIPAV déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 3 décembre 2021, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- confirmer purement et simplement la décision entreprise,
- en conséquence,
- au visa des dispositions des articles 122 et suivants du code de procédure civile,
- la recevoir en sa fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l'opposition et l'y déclarer bien fondée,
- au visa des dispositions de l'article R. 133-3 du code de la sécurité sociale,
- déclarer Monsieur [O] [T] irrecevable en ses oppositions formées à l'encontre des contraintes des 10 juillet 2019 et 23 septembre 2019, signifiées par actes d'huissier du 25 février 2021, pour tardiveté,
- subsidiairement,
- dire et juger que le paiement des cotisations appelées est obligatoire,
- au visa des dispositions de l'article R. 133-3 du code de la sécurité sociale et des dispositions de l'article R. 142-20 du code de la sécurité sociale,
- valider la contrainte en date des 10 juillet 2019, signifiée le 25 février 2021 à Monsieur [O] [T], portant sur la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2016 et du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2017, en son entier montant de 26.069,21 € au titre des exercices 2016 et 2017,
- valider la contrainte en date du 23 septembre 2019, signifiée le 25 février 2021 à Monsieur [O] [T], portant sur la période du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2018, en son entier montant de 21.606,43 € au titre des cotisations et majorations de retard de l'exercice 2018,
- condamner Monsieur [O] [T] au paiement desdites sommes et aux frais de recouvrement, conformément aux articles R. 133-6 du code de la sécurité sociale et 8 du décret du 12 décembre 1996,
- débouter Monsieur [O] [T] de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires,
- condamner Monsieur [O] [T] à lui payer la somme de 3.500,00 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Monsieur [O] [T] aux entiers frais et dépens de l'instance.
9. À l'appui de ses prétentions, la CIPAV fait en effet valoir :
- que le délai pour former opposition expirait le 12 mars 2021, de sorte que l'opposition pratiquée le 9 avril 2021 est nécessairement irrecevable,
- que Monsieur [O] [T] est affilié à la caisse à compter du 1er janvier 2016, en qualité de conseil en gestion exerçant en libéral, conformément aux articles R.641-1, 11o du code de la sécurité sociale,
- que les contraintes délivrées sont régulières,
- que l'article D. 642-2 du code de la sécurité sociale prévoit l'application des majorations de retard en cas de non-paiement des cotisations aux échéances fixées par les statuts de la caisse, le taux de ces majorations étant également mentionné dans ses statuts et repris au bas de la mise en demeure adressée à Monsieur [O] [T].
10. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées ainsi qu'à la note d'audience figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le désistement
11. Aux termes de l'article 403 du code de procédure civile, "le désistement de l'appel emporte acquiescement au jugement. Il est non avenu si, postérieurement, une autre partie interjette elle-même régulièrement appel".
12. En l'espèce, il convient de considérer le "désistement d'instance" de Monsieur [O] [T] comme un désistement d'appel.
13. Il n'y a pas lieu de lui "donner acte de ce qu'il sollicite de la CIPAV la remise des majorations, pénalités et intérêts de retard", dès lors que l'intimée n'a pas entendu, en toute hypothèse, donner suite à cette demande.
Sur les dépens
14. L'article 405 dispose que "les articles 396, 397 et 399 sont applicables au désistement de l'appel".
15. L'article 399 prévoit que "le désistement emporte, sauf convention contraire, soumission de payer les frais de l'instance éteinte".
16. En l'espèce, il conviendra de condamner Monsieur [O] [T], qui se désiste, aux dépens d'appel.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
17. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la partie condamnée aux dépens prend en charge les frais irrépétibles exposés par la partie adverse dans les proportions que le juge détermine.
18. En l'espèce, il convient de faire bénéficier la CIPAV de ces dispositions à hauteur de 2.000,00 €.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Donne acte à Monsieur [O] [T] de son désistement d'appel,
Condamne Monsieur [O] [T] aux dépens d'appel,
Condamne Monsieur [O] [T] à payer à la CIPAV la somme de 2.000,00 € (deux mille euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, Président de chambre, et par Mme Delphine GRONDIN, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991420.xml | AFFAIRE : No RG 21/01968 - No Portalis DBWB-V-B7F-FUIM
Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Pole social du TJ de SAINT-DENIS en date du 27 Octobre 2021, rg no 21/00060
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANTE :
Organisme CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA REUNION (CGSSR) Pôle expertise juridique santé
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Isabelle CLOTAGATIDE KARIM de la SCP CANALE-GAUTHIER-ANTELME-BENTOLILA, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
S.A.S. LE RECIF
[Adresse 2]
[Localité 3]
Non représentée
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Delphine GRONDIN, greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 5 juillet prorogé au 13 juillet 2022;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 JUILLET 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Madame [E] [P], salariée au sein de la S.A.S. Le Récif, a déclaré à la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion avoir été victime d'un accident du travail survenu le 2 juillet 2020. Un certificat médical initial, établi le 3 juillet 2020, fait état d'un "état de détresse psychologique lié à un stress aigu sur son lieu de travail".
2. L'employeur a établi une déclaration d'accident du travail le 3 juillet 2020.
3. Par décision du 16 juillet 2020, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion a pris en charge l'accident de Madame [E] [P] au titre de la législation professionnelle.
4. Le 21 septembre 2020, la S.A.S. Le Récif a contesté l'opposabilité de la décision de prise en charge de cet accident du travail devant la commission de recours amiable, qui n'a pas statué dans le délai légal.
5. Par requête déposée le 1er mars 2021, la S.A.S. Le Récif a alors saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion pour contester cette décision de rejet implicite.
6. Par une décision du 30 avril 2021, la commission de recours amiable a entre-temps rejeté le recours de la S.A.S. Le Récif.
7. Par jugement du 27 octobre 2021, le tribunal a :
- déclaré inopposable à la S.A.S. Le Récif la décision de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion de prendre en charge, au titre de la législation professionnelle, l'accident dont a été reconnue victime Madame [E] [P] le 2 juillet 2020,
- condamné la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion aux dépens,
- débouté la S.A.S. Le Récif de sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- rappelé que le jugement est exécutoire de plein droit a titre provisoire.
8. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 16 novembre 2021, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion a interjeté appel de cette décision.
9. Les parties ont été convoquées par lettre recommandée avec avis de réception du 29 décembre 2021 à l'audience du 1er mars 2022.
10. L'affaire a été plaidée à l'audience du 11 avril 2022 et mise en délibéré au 5 juillet 2022 prorogé au 13 juillet 2022.
11. La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 25 février 2022, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- infirmer le jugement litigieux en ce qu'il a déclaré inopposable à la S.A.S. Le Récif la prise en charge de l'accident de travail de Madame [E] [P] survenu le 2 juillet 2020,
- statuant à nouveau,
- constater que sa décision du 16 juillet 2020 a été prise d'emblée après réception du certificat médical initial et de la déclaration d'accident du travail, du fait de l'absence totale de réserves de la S.A.S. Le Récif,
- constater l'absence d'obligation, pour la caisse, de mettre en oeuvre une instruction contradictoire,
- prendre acte du fait que Madame [E] [P] a pu bénéficier, à bon droit, de la présomption d'imputabilité instituée par l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale,
- constater que la S.A.S. Le Récif ne rapporte pas la preuve que les lésions ont une cause totalement étrangère au travail,
- confirmer sa décision du 16 juillet 2020 de prise en charge, au titre de la législation sur les risques professionnels, du sinistre dont a été victime Madame [E] [P] le 2 juillet 2020 et la déclarer parfaitement opposable à la S.A.S. Le Récif,
- confirmer la décision explicite de rejet de la commission de recours amiable rendue en séance du 30 avril 2021,
- rejeter toute demande de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile articulée à son encontre,
- débouter la S.A.S. Le Récif de toutes ses demandes, fins et conclusions articulées contre elle.
12. À l'appui de ses prétentions, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion fait en effet valoir :
- que l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale institue une présomption d'imputabilité de l'accident au travail qui doit bénéficier à Madame [E] [P], la charge de la preuve contraire incombant à la S.A.S. Le Récif qui a procédé par simples allégations devant les premiers juges,
- que la mise en oeuvre d'une instruction contradictoire par la caisse n'est obligatoire que si l'employeur émet des réserves motivées au cours de la procédure de prise en charge, ce qui n'est pas le cas de la S.A.S. Le Récif.
13. La S.A.S. Le Récif, bien que régulièrement convoquée pour avoir signé le 30 décembre 2021 l'avis de réception portant convocation, n'a pas comparu.
14. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées ainsi qu'à la note d'audience figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la qualification d'accident du travail
15. Aux termes de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, "est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise".
16. Cet article édicte une présomption d'imputabilité au travail d'un accident survenu au lieu et au temps du travail, qui s'applique dans les rapports du salarié victime avec la caisse mais également en cas de litige entre l'employeur et la caisse.
17. Pour que la présomption d'accident du travail trouve à s'appliquer, il convient cependant que le salarié qui se prétend victime d'un accident du travail ou la caisse subrogée dans les droits de celui-ci démontre la matérialité d'un fait soudain survenu au temps et au lieu du travail, ayant entraîné des lésions constatées médicalement.
18. Les déclarations de la victime ne suffisent pas à elles seules à établir le caractère professionnel de l'accident.
19. En cas de contestation, la caisse reste tenue de faire la preuve de la matérialité de l'accident allégué sur les temps et lieu de travail malgré l'absence de réserve de l'employeur accompagnant la déclaration d'accident du travail.
20. En l'espèce, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion produit en tout et pour tout :
- le certificat médical initial établi par le Dr. [Z] [B] le 3 juillet 2021, soit le lendemain de l'accident du travail allégué, faisant état d'un "état de détresse psychologique liée à un stress aigu sur son lieu de travail",
- une déclaration d'accident du travail faite par la S.A.S. Le Récif le même jour sans réserve évoquant une "discussion avec son supérieur hiérarchique" et une "altercation orale",
- un courrier de "notification de prise en charge" du 16 juillet 2020.
21. Ces pièces ne suffisent pas à caractériser l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail au sens des dispositions de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale. La présomption d'imputabilité ne peut en effet reposer sur les seules déclarations de Madame [E] [P].
22. Si l'absence de réserve de la part de la S.A.S. Le Récif dans sa déclaration d'accident du travail permettait à la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion de s'exonérer de la procédure contradictoire prévue aux articles R. 441-11 et suivants du code de la sécurité sociale, il lui appartenait, devant la faiblesse des éléments communiqués, de diligenter l'enquête prévue au dernier alinéa de R. 441-11.
23. Il conviendra donc de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré inopposable à la S.A.S. Le Récif la décision de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion de prendre en charge, au titre de la législation professionnelle, l'accident dont a été reconnue victime Madame [E] [P] le 2 juillet 2020.
Sur les dépens
24. La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, en matière sociale et en dernier ressort, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, Président de chambre, et par Mme Delphine GRONDIN, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991408.xml | ARRÊT No22/397
R.G 19/03004 - No Portalis DBWB-V-B7D-FJHH
G.F.A. VITIS VINIFERA
S.A.S. NACC
Société CAISSE D'EPARGNE -CEPAC
RG 1ERE INSTANCE : 18/01297
COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS
ARRÊT DU 22 JUILLET 2022
Chambre civile TGI
Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT PIERRE en date du 13 SEPTEMBRE 2019 RG no 18/01297 suivant déclaration d'appel en date du 21 NOVEMBRE 2019
APPELANTE :
G.F.A. VITIS VINIFERA
[Adresse 3] à [Localité 6]
[Localité 5]
Représentant : Me Jean claude DULEROY, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
INTIMEES :
S.A.S. NACC
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Olivier CHOPIN de la SELARL CODET-CHOPIN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Société CAISSE D'EPARGNE -CEPAC
[Adresse 7]
[Localité 1]
Représentant : Me Mikaël YACOUBI de la SELARL GAELLE JAFFRE ET MIKAEL YACOUBI, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
CLOTURE LE : 11 MARS 2021
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 785 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 Mars 2022 devant la cour composée de :
Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Madame Magali ISSAD, Conseillère
Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.
A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 10 Juin 2022 puis le délibéré a été prorogé au 22 Juillet 2022.
Greffier lors des débats :Madame Alexandra BOCQUILLON, Adjointe administrative.
Greffier lors de la mise à disposition : Mme Nathalie TORSIELLO, Greffière
ARRÊT : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 22 Juillet 2022.
EXPOSE DU LITIGE
Le GFA VITIS VINIFERA (le GFA) a été constitué le 29 novembre 2005, suivant acte reçu par Maître [H] avec pour associés:
-La SEFAR 889 parts
-La SAFER 27 parts
-M. [Y] 90 parts
-M. [W] 15 parts.
Par acte authentique du même jour, le GFA a acquis 15 parcelles situées sur la commune de [Localité 5] pour la somme de 102.100 euros correspondant au montant du capital apporté par les associés, comportant une clause organisant la régularisation de la vente par l'immatriculation de la société dans un délai expirant le 30 décembre 2005.
L'immatriculation du GFA n'est intervenue que le 7 décembre 2006.
Le 8 juin 2015, en garantie des condamnations de M. [Y] à lui payer la somme globale de 64.040,21 euros par arrêts de la cour de céans des 10 décembre 2012 et 15 novembre 2013, la Banque de la Réunion (BR) a fait inscrire une hypothèque judiciaire sur les 15 parcelles précitées à hauteur de ses droits indivis au service de la publicité foncière de [Localité 8] sous les références 2015 V 1107.
Par délibération du 23 décembre 2015, l'assemblée générale du GFA a voté la reprise des engagements antérieurs à son immatriculation, pris en son nom.
Par acte d'huissier en date du 17 mai 2018, le GFA a fait assigner la CEPAC, venant aux droits de la BR, devant le tribunal de grande instance de St Pierre aux fins de radiation sous astreinte de l'hypothèque judiciaire grevant les 15 parcelles sises à Cilaos.
La NACC est intervenue volontairement à l'instance, expliquant que les créances détenues par la CEPAC lui avaient été cédées avec leurs accessoires.
Elle a argué du défaut d'intérêt à agir du GFA dès lors que faute d'avoir été immatriculé avant le délai imparti par l'acte de vente, les parcelles litigieuses étaient devenues propriété de ses membres fondateurs à hauteur de leurs droits indivis.
Par jugement du 13 septembre 2019, le tribunal de grande instance de Saint-Pierre a:
-Déclaré irrecevable l'action du GFA lequel est dépourvu de qualité pour agir;
-Condamné le GFA à payer à la SAS NACC une somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et la même somme à la CEPAC sur le même fondement;
- Condamné le demandeur aux dépens.
Par déclaration en date du 21 novembre 2019, le GFA a interjeté appel du jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 22 juin 2020, le GFA sollicite la Cour de :
- Infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Saint-Pierre le 13 septembre 2019;
Et statuant à nouveau
- Juger recevable et bien fondée son action à l'encontre de la CEPAC et la NACC;
En conséquence :
- Ordonner, à leurs frais exclusifs, la radiation de l'inscription d'hypothèque judiciaire prise par la BR aux droits de laquelle vient la CEPAC et la SAS NACC, portant sur les immeubles situés sur la Commune de [Localité 5] et référencée auprès du Service de la Publicité Foncière 2015 V 1107;
- Juger que la radiation de l'hypothèque judiciaire prise sur les parcelles susmentionnées lui appartenant en pleine propriété devra intervenir dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir;
- Juger qu'à défaut, une astreinte de 150 € par jour de retard sera due par la CEPAC et la SAS NACC;
- Débouter la CEPAC et la SAS NACC de l'ensemble de leurs demandes;
- Condamner solidairement la CEPAC et la SAS NACC à lui payer la somme de 4.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile;
- Condamner la CEPAC et la SAS NACC aux entiers dépens d'appel et de première instance.
Le GFA fait valoir qu'il est propriétaire des parcelles et qu'il a donc qualité et intérêt à agir en mainlevée de l'hypothèque. L'appelant prétend que le dépassement du délai de reprise automatique de l'acte de vente conclu en son nom et à son bénéfice avant son immatriculation n'est pas une cause automatique du transfert de la propriété du bien dans le patrimoine des associés fondateurs mais que ces derniers devaient manifester clairement leur volonté de transfert de propriété à leur profit en faisant publier le défaut d'immatriculation de la société en cause au fichier immobilier.
Il considère donc que son immatriculation tardive n'interdit pas la reprise de l'acte d'acquisition passé à son profit tel qu'elle a été opérée le 25 décembre 2014 puis constatée par acte notarié publié en 2016. Elle en déduit qu'elle est réputée propriétaire des parcelles dès l'origine et que M. [Y] n'a jamais été propriétaire indivis des parcelles contestées.
Il rappelle que conformément à l'article 2430 du Code civil la mention de subrogation aux privilèges et hypothèques est une condition nécessaire pour rendre le transfert de l'hypothèque au cessionnaire de la créance, en l'espèce la SAS NACC, opposable aux tiers de sorte qu'elle est fondée à diriger son action contre la CEPAC, cette mention étant absente sur les bordereaux d'hypothèques produits par les sociétés NACC et CEPAC.
Il expose qu'il n'a agi avec aucune intention frauduleuse, s'étant toujours considéré comme le propriétaire des parcelles et les exploitant depuis 2005 en les louant à des fermiers.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 10 novembre 2020, la CEPAC venant aux droits de la BR sollicite de la Cour de :
A titre liminaire,
-Constater que la clause de reprise de l'acte de vente du 29 novembre 2005 stipule que la reprise par le GFA de l'acquisition portant sur les parcelles de terrain, objets du litige, est expressément conditionnée à une immatriculation du groupement, au plus tard le 30 décembre 2005.
-Constater que l'immatriculation du GFA n'est intervenue que le 07 décembre 2006, soit près d'un an après l'expiration du délai imparti.
-Constater alors que le bien objet du présent litige est définitivement devenu la propriété des membres fondateurs du GFA, indivisément entre eux dans la proportion de leurs droits dans le capital social, conformément aux stipulations de l'acte de vente.
En conséquence
-Confirmer le jugement contradictoire rendu en première instance par le tribunal de grande instance [devenu tribunal judiciaire] de St Pierre (Réunion) le 13 septembre 2019 dans toutes ses dispositions, notamment en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes formées par le GFA à son encontre;
A défaut, dans le cas où le jugement entrepris était infirmé et les demandes formées par le GFA étaient déclarées recevables,
A titre principal,
-Rejeter les demandes formées par le GFA à son encontre car non fondées;
-Déclarer inopposable l'acte intitulé « DEPOT DE KBIS et REPRISE DES ENGAGEMENTS » publié le 19 janvier 2016, à la demande du GFA, au service chargé de la publicité foncière de [Localité 8] sous les références volume 2016 P no264.
En tout état de cause,
-Condamner le GFA à lui payer la somme de 4.000,00€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits, le cas échéant au profit de la SELARL Gaëlle Jaffre-Mikael Yacoubi.
La CEPAC fait valoir que la reprise de la vente immobilière au nom et pour le compte du GFA est conditionnée à une immatriculation de la société au plus tard le 30 décembre 2005, par des dispositions dérogeant aux dispositions de l'article 1843 du code civil, lesquelles n'imposent aucun délai de reprise des engagements souscrits. Elle considère que les parties se sont entendues pour sanctionner le défaut d'immatriculation dans le délai dont elles ont convenu et que l'immatriculation de la société n'étant intervenue que près d'un an plus tard, soit le 7 décembre 2006, elle n'a pu conformément aux stipulations de l'acte de vente, produire son effet dès le 29 novembre 2005 au profit du GFA.
Elle précise que faute d'immatriculation dans le délai prévu, le bien objet du présent litige est définitivement devenu la propriété des membres fondateurs du GFA, indivisément entre eux, sans qu'une régularisation postérieure ne puisse porter effet et que le GFA est ainsi dépourvu de toute qualité à agir en radiation de l'inscription d'hypothèque judiciaire définitive. Elle ajoute que la publication du défaut d'immatriculation stipulé par la clause n'a qu'une valeur déclarative et quelle ne conditionne pas le transfert de propriété du bien aux associés.
Elle ajoute que l'action du GFA est en outre irrecevable à son encontre dès lors qu'elle a cédé sa créance envers M. [Y] et ses accessoires à la NACC par acte du 17 juin 2016 et que cette cession lui est opposable en application de l'article 1690 du code civil.
Subsidiairement, au fond, elle reprend son argumentaire tiré de l'absence de possibilité de régularisation de la vente au cas d'espèce. Elle ajoute que la reprise des engagements ne lui est pas opposable car frauduleusement organisée par M. [Y], ancien gérant, et le GFA.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 19 mai 2020, la SAS NACC sollicite la cour de:
- Confirmer l'entier jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Saint-Pierre le 13 septembre 2019.
- Déclarer irrecevable l'action du GFA lequel est dépourvu de qualité pour agir.
- Débouter le GFA de l'ensemble de ses demandes;
-Déclarer inopposable l'acte intitulé «Dépôt de Kbis et reprise des engagements» publié le 19 janvier 2016 à la demande du GFA, au Service de la Publicité Foncière de [Localité 8] volume 2016 P numéro 264;
En toute hypothèse,
- Condamner le GFA à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
La société NACC fait valoir que le contrat subordonne la reprise automatique de la vente par le GFA aux conditions :
-d'être immatriculé au plus tard le 30 décembre 2005 ;
-de publier sans délai cette immatriculation au bureau des hypothèques compétent.
Elle soutient que le GFA ne démontre pas son immatriculation au plus tard du 30 décembre 2005 mais s'appuie sur une publication d'un dépôt de Kbis et reprise des engagements en date du 19 janvier 2016. Elle estime que le GFA n'est pas propriétaire des biens objet de l'inscription d'hypothèque judiciaire et qu'il n'est donc pas en mesure de solliciter la radiation de l'inscription d'hypothèque judiciaire.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure en application de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 11 mars 2021.
Par arrêt avant dire droit du 26 novembre 2021, la cour a rouvert les débats sans révoquer l'ordonnance de clôture, invité les parties à former leurs observations sur les points de droit suivants et renvoyé l'affaire à l'audience du 11 mars 2022 pour être plaidée:
- L'intérêt à agir n'étant pas subordonné à la démonstration préalable du bienfondé de l'action, la cour interroge les parties sur la portée des argumentaires développés sur la fin de non –recevoir tirée du défaut de qualité à agir du GFA faute de justifier de sa qualité de propriétaire des terrains hypothéqués.
- Eu égard aux cas dans lesquels le juge peut radier une hypothèque, la cour sollicite les éclaircissements des parties sur l'opérance des débats sur la qualité de propriétaire du GFA des parcelles litigieuses lors de l'inscription de l'hypothèque, et, indirectement, du bienfondé de l'inscription de propriété desdites parcelles.
Par observations du 16 décembre 2021, le GFA expose à la cour qu'il a intérêt à agir en radiation de l'hypothèque comme titulaire d'un acte d'acquisition des parcelles.
Il indique en outre qu'ainsi qu'il a été jugé à plusieurs reprises que la radiation d'une hypothèque peut être motivée par le défaut de titre du débiteur sur les biens objets de l'hypothèque pour l'application de l'article 2443 du code civil, l'existence de l'hypothèque étant conditionnée par le rapport de droit initial entre le créancier et le débiteur.
Par courrier déposé le 17 décembre 2021, la CEPAC fait observer que, même si l'intérêt ou la qualité à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bienfondé de l'action, en l'espèce, le défaut de justification par le GFA de sa qualité de propriétaire des terrains hypothéqués n'implique pas d'examiner le bienfondé de l'action du GFA.
Elle ajoute que la demande en radiation est infondée dès lors que le bien objet du litige est la propriété de l'ensemble des membres fondateurs du GFA.
Par conclusions du 16 décembre 2021, la NACC énonce que le GFA n'a pas intérêt à agir faute d'être propriétaire du bien hypothéqué et que c'est à bon droit qu'elle a publié son inscription sur ce bien appartenant indivisément à M. [Y].
MOTIFS DE LA DECISION.
Sur la recevabilité de l'action du GFA.
Vu l'article 31 du code de procédure civile;
Le GFA sollicite la levée d'hypothèque prise sur un bien pour lequel il dispose d'un acte d'acquisition notarié, dont la portée est contestée.
Le GFA dispose donc d'un intérêt à agir, la question du bienfondé de l'argumentaire du GFA revendiquant la propriété du bien hypothéquée relevant du fond de la demande en radiation de ladite hypothèque.
Le jugement entrepris sera ainsi infirmé en ce qu'il a déclaré le GFA irrecevable à agir en radiation de l'hypothèque prise sur les 15 parcelles litigieuses.
La fin de non-recevoir doit ainsi être écartée.
Sur le bienfondé de la demande de radiation.
La cour relève qu'elle est saisie sur le fond d'une demande de radiation d'une hypothèque qualifiée de "définitive" par les intimées.
Aux termes de l'article 2443 du code civil, "La radiation doit être ordonnée par les tribunaux, lorsque l'inscription a été faite sans être fondée ni sur la loi, ni sur un titre, ou lorsqu'elle l'a été en vertu d'un titre soit irrégulier, soit éteint ou soldé, ou lorsque les droits de privilège ou d'hypothèque sont effacés par les voies légales".
Les cas dans lesquels la radiation peut être ordonnée par le juge se limite ainsi aux vices, erreurs ou extinction du titre en vertu duquel est prise l'inscription hypothécaire.
La contestation du bienfondé de l'enregistrement de propriété de l'immeuble sur lequel est inscrit l'hypothèque est un moyen inopérant au soutien d'une demande de radiation d'hypothèque.
En outre, à supposer même que, dans sa motivation, la cour considère que le GFA était propriétaire des parcelles litigieuses au jour où l'inscription hypothécaire a été prise, nonobstant la mention contraire de l'ordre no17 du registre foncier de [Localité 8] Vol. 2006 P no169 du 10 avril 2009 faisant figurer les fondateurs du GFA comme propriétaires des parcelles litigieuses (pièce 3 GFA), cette considération serait sans emport direct sur l'existence de cette mention sauf à contrevenir au principe de perpétuité et d'intangibilité des registres publics détenus par le service de la publicité foncière.
Aussi, en l'espèce, pour solliciter la radiation de l'hypothèque prise sur 15 parcelles de la commune de [Localité 5], le GFA ne peut utilement soutenir que ces parcelles lui appartenaient à la date de l'inscription d'hypothèque bien qu'enregistrées au service foncier comme propriété indivise de M. [Y].
En conséquence, la demande du GFA doit être rejetée.
Sur les dépens et les frais irrépétibles.
Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile;
Le GFA, qui succombe, est condamné aux dépens.
L'équité commande en outre de le condamner à verser à la CEPAC la somme de 3.000 euros et à la NACC, 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement et contradictoirement en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;
- Infirme le jugement entrepris;
Statuant à nouveau,
- Déclare l'action du GFA recevable;
- Déboute le GFA de sa demande de radiation de l'hypothèque,
- Condamne le GFA à verser à la CEPAC la somme de 3.000 euros et à la NACC la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel;
- Condamne le GFA aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Nathalie TORSIELLO, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT Signé
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CAPP/JURITEXT000046991409.xml | ARRÊT No22/391
No RG 21/00842 - No Portalis DBWB-V-B7F-FRRS
S.C. [Localité 36]
S.A.R.L. CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN
S.A.R.L. CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN, ES QUALITE DE MANDATAIRES SPECIAL DES HERITIERS [JD] [N]
S.A. CBO TERRITORIA
S.A. BOURBON
RG 1èRE INSTANCE : 20/01987
COUR D'APPEL DE SAINT- DENIS
ARRÊT DU 22 JUILLET 2022
Chambre civile TGI
Appel d'une décision rendue par le tribunal judiciaire DE SAINT-DENIS en date du 23 février 2021 RG no: 20/01987 suivant déclaration d'appel en date du 11 mai 2021
APPELANTS :
Madame [J] [SA]
[Adresse 7]
Représentant : Me Jacques HOARAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [NB] [LO]
[Adresse 9]
[Localité 34]
Représentant : Me Jacques HOARAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [LM] [LO]
[Adresse 9]
[Localité 34]
Représentant : Me Jacques HOARAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [JD] [WP] [LO]
[Adresse 24]
[Localité 31]
Représentant : Me Jacques HOARAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [DI] [LO]
[Adresse 9]
[Localité 34]
Représentant : Me Jacques HOARAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [T] [SA] épouse [IK]
[Adresse 23]
[Localité 34]
Représentant : Me Jacques HOARAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [DS] [SA]
[Adresse 23]
[Localité 34]
Représentant : Me Jacques HOARAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
INTIMEES :
S.C. [Localité 36]
[Adresse 6]
[Localité 29]
Représentant : Me Alexandre ALQUIER de la SELARL ALQUIER & ASSOCIÉS, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
S.A.R.L. CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN
[Adresse 25]
[Localité 32]
Représentant : Me Fabrice SAUBERT de la SCP GAILLARD - SAUBERT, Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION - Représentant : Me Jean-daniel DECHEZELLES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
S.A.R.L. CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN, ES QUALITE DE MANDATAIRES SPECIAL DES HERITIERS [JD] [N]
[Adresse 25]
[Localité 32]
Représentant : Me Fabrice SAUBERT de la SCP GAILLARD - SAUBERT, Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION - Représentant : Me Jean-daniel DECHEZELLES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
S.A. CBO TERRITORIA
[Adresse 35]
[Localité 34]
Représentant : Me Flora PARAVEMAN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
S.A. BOURBON
[Adresse 5]
[Localité 4]
non comparante non représentée
CLÔTURE LE : 10 février 2022
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 804 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 Mars 2022 devant la Cour composée de :
Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Madame Magali ISSAD, Conseillère
Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.
A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 10 juin 2022 puis prorogé au 22 Juillet 2022.
Greffier: Madame Alexandra BOCQUILLON, ff.
ARRÊT : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 22 Juillet 2022.
EXPOSE DU LITIGE :
Suivant titre du 15 novembre 1919, [EL] [F] [N] a reçu la propriété d'un terrain bâti, lieudit [Localité 36], commune de [Localité 34], d'une superficie de 3 hectares 28 ares 94 centiares, tel qu'il figure sur le document d'arpentage des 19 et 26 octobre 1919. Elle est décédée le [Date décès 3] 1931 sans que sa succession n`ait été réglée.
Entre 1922 et 1924, Madame [EL] [F] [N] avait réalisé huit ventes consécutives sur cette parcelle dont la suivante :
1/ Par acte du 19 mai 1924, à Monsieur [KU] [KT] [SA] et son épouse, Madame [XK] [IJ], "une portion de terrain non bâtie située à [Localité 40] lieudit [Localité 36] d'une superficie de quarante-huit ares soixante-douze centiares et six cent millièmes."
Le 15 janvier 1965, les huit héritiers de Monsieur et Madame [SA] ont fait établir un plan de partage en vue de se répartir une partie du terrain litigieux.
Lors de la mise en place du cadastre rénové dans le département de la REUNION en 1978, les propriétés appartenant aux ayants-droit de Madame [N] et des époux [SA] ont été cadastrées ensemble, sous les références Section AR no [Cadastre 10] et [Cadastre 12], sans répartition de leurs propriétés respectives.
Au mois d'août 1987, cinq héritiers des époux [SA] ont fait établir un nouveau plan de partage par le cabinet [DS] [AF], géomètre expert, en vue de se répartir le terrain litigieux pour une surface totale de 18.850 m2.
Le 15 septembre 2004, les parcelles cadastrées Section AR no [Cadastre 10] et [Cadastre 12] ont été incluses par erreur dans les opérations d'apport partiel d'actifs consentis par la société BOURBON à la société CBO TERRITORIA.
Le 13 septembre 2005, le cabinet [DS] [AF], géomètre-expert a établi un procès-verbal de délimitation No 2718 G au profit de la succession [SA], afin de réunir les parcelles AR no [Cadastre 10], AR [Cadastre 12], AR [Cadastre 26], AR [Cadastre 27] et AR [Cadastre 28], et de les voir référencées sous le no AR [Cadastre 11], ce procès-verbal No 2718 G faisant l'objet d'un rejet définitif total par le service de la publicité foncière le 8 novembre 2005, les parcelles AR no [Cadastre 10] et AR no [Cadastre 12] étant précédemment identifiées par erreur comme appartenant à la société CBO TERRITORIA.
Cependant en dépit de ce rejet, les parcelles AR no [Cadastre 10], AR [Cadastre 12], AR [Cadastre 26], AR [Cadastre 27] et AR [Cadastre 28] ont été publiées par erreur au cadastre, sous la référence unique AR [Cadastre 11].
Selon un procès-verbal de délimitation en changement de limites établi par Monsieur [DS] [AF], et déposé au Centre des impôts fonciers de [Localité 32] le 26 septembre 2005, les héritiers [SA] ont sollicité la division de la parcelle réunie sous le no [Cadastre 11], en 9 parcelles numérotées [Cadastre 13] à [Cadastre 14] afin de se les répartir, demande non suivie d'effet.
Au cours de l'année 2013, les héritiers [SA] se sont entendus avec leur voisin, Monsieur [FI] [VW], afin d'effectuer une opération immobilière sur la parcelle AR no [Cadastre 11] de sorte que le 24 décembre 2013, Monsieur [FI] [VW] a sollicité en qualité de représentant de la SCCV CORAIL BLEU, l'obtention d'un permis de construire sur ladite parcelle, en vue de la construction de 42 logements. Cette demande, complétée les 21 mars et 4 juin 2014, était accordée le 19 juin 2014.
Projetant ainsi la vente de la parcelle AR no [Cadastre 11] au profit de Monsieur [VW], les consorts [SA] ont entrepris des démarches afin de se faire titrer.
En vue de la liquidation de la succession des époux [KU] [SA], leurs héritiers ont confié, dès lors, en 2014, à Me [VV] [VA], notaire, l'établissement à leur profit d'un acte de notoriété de prescription acquisitive de ce "surplus " de terrain. C'est dans ce contexte, que le 24 juin 2016, le notaire des consorts [SA], Maître [VV] [VA], Notaire à [Localité 39] a mandaté la SARL CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN «CGOI» pour procéder à l'établissement de la dévolution successorale résultant du décès de Monsieur [KU] [KT] [SA], survenu le [Date décès 16] 1963 à [Localité 34].
Les recherches ont conclu à ce que les héritiers des époux [SA] n'étaient propriétaires que d'une surface totale limitée à 4.872 m2 située sur les parcelles initialement cadastrées Section AR no [Cadastre 10] et AR no [Cadastre 12], AR no [Cadastre 26], AR no [Cadastre 27] et AR no [Cadastre 28], devenues Section AR [Cadastre 11], puis Section AR [Cadastre 10], AR [Cadastre 12], AR [Cadastre 17] à AR [Cadastre 18], et que le surplus de terrain, d'une surface de 14.441 m2, demeurait la propriété des héritiers de Madame [N].
Mais les héritiers [SA] ont constaté que leur unité foncière, alors cadastrée sous les références AR no [Cadastre 10] et AR no [Cadastre 12], avait été enregistrée, suite à une erreur, au Service de la Publicité Foncière de Saint-Denis au nom de la société "CBO TERRITORIA" par suite d'un apport partiel d'actifs que lui a fait la société GROUPE BOURBON par actes des 4, 7 et 25 février 2005.
Me Patrick [VA] a, alors, réclamé par courriel du 24 mai 2019, pour le compte de ses mandants, la restitution de ces biens "d'une surface de 19.313 m2" en lui spécifiant qu'ils disposaient "d'un titre antérieur à (sa) publication".
Mais, à la réception de la copie de l'acte notarié rectificatif daté du 15 juillet 2019, les héritiers de la succession des époux [KU] [KT] [SA] ont découvert :
- premièrement, qu'il avait été établi, non pas sur la base des réclamations de leur notaire, mais sur celle des revendications de M. [HP] [ZV] qui a prétendu être leur mandataire,
- deuxièmement, que celui-ci y a revendiqué :
* la propriété de la parcelle cadastrée AR numéro [Cadastre 10], comme formant partie de la parcelle objet de l'acte de vente du 19 mai 1924 acquise par les Epoux [SA],
* la propriété de la parcelle cadastrée AR numéro [Cadastre 12], comme étant le surplus de la parcelle objet de l'acte de partage du 15 novembre 1919, appartenant à Mme [N]",
- troisièmement, que leurs deux terrains, alors cadastrés AR no [Cadastre 11] avait fait l'objet, d'une part, d'un plan intitulé " état des lieux" établi par la Sarl OIT, géomètre, sur mandat de M. [HP] [ZV], d'autre part, d'une division cadastrale en quatre parcelles à faire enregistrer au cadastre sous les références AR no [Cadastre 19], AR no [Cadastre 20], AR no [Cadastre 21] et AR no [Cadastre 22] et, que l'acte indiquait que les parcelles AR no [Cadastre 19] (03 ares 33 centiares) et AR no [Cadastre 21] (19 ares 21 centiares) étaient attribuées aux consorts [SA], et que celles cadastrées AR no [Cadastre 20] (94a 89ca) et AR no [Cadastre 22] (67ca) étaient attribuées aux héritiers de la succession de [JD] [N], alors qu'ils n'avaient donné mandat à M. [HP] [ZV] ni pour les représenter lors de l'établissement de l'acte rectificatif, ni pour déclarer qu'ils agissaient en intérêts communs avec des tiers soit les héritiers de la succession [N], ni pour faire un "état des lieux" de leurs deux terrains, ni pour les diviser en quatre parcelles, ni pour renoncer à leurs droits de propriétaires dudit "surplus" de terrain, ni pour en transférer sa propriété à ces derniers.
Le 9 août 2019, ils ont constaté l'affichage d'un arrêté municipal no 20190902 du 7 août 2019 sur leur terrain AR no [Cadastre 11], accordant à la SCCV [Localité 36] l'autorisation de l'aménager.
Par requête devant le tribunal administratif de Saint-Denis, certains indivisaires ont demandé l'annulation de cet arrêté portant atteinte à leur droit de propriété.
L'instance est actuellement pendante devant la juridiction administrative.
Les héritiers [SA] ont alors fait assigner à jour fixe la société anonyme CBO TERRITORIA, la société anonyme BOURBON, la SCCV [Localité 36], Monsieur [HP] [ZV] et la Sarl CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN devant le tribunal de grande instance de Saint-Denis aux fins de (en substance) :
- Juger que les requérants, es qualité d'héritiers des époux [KU] [KT] [SA] - [XK] [IJ], sont les propriétaires indivis, par prescription acquisitive, du terrain resté la propriété de feue [EL] [F] [N] à la date de son décès, inclus dans les terrains cadastrés AR no [Cadastre 10] et AR no [Cadastre 12], AR no [Cadastre 26], AR no [Cadastre 27], et AR no [Cadastre 28], ou encore référencés AR no [Cadastre 11], commune de [Localité 34],
- Prononcer l'annulation de l'acte authentique dressé le 15/07/2019 par Me [W] [YY], notaire à [Localité 32], à la requête des sociétés CBO TERRITORIA et BOURBON portant rectificatif des titres de CBO TERRITORIA des 4 février 2005, 7 février 2005 et 25 février 2005, le tout publié au service de la publicité Foncière de [Localité 32] le 02/03/2005, volume 2005 p, numéro 1675).
A tout le moins juger que l'acte notarié rectificatif du 15 juillet 2019 n'est pas opposable aux requérants, es qualité d'héritiers de la succession des époux [KU] [KT] [SA] - [XK] [IJ],
- Constater qu'une partie des terrains cadastrés section AR no [Cadastre 10] et AR no [Cadastre 12], AR no [Cadastre 26], AR no [Cadastre 27] et AR no [Cadastre 28], ou encore référencés AR no [Cadastre 11], commune de [Localité 34], lieudit [Localité 36], leur propriété, est occupée sans droit ni titre par la SCCV [Localité 36],
- Juger qu'en transférant une partie de leurs terrains sis à [Localité 34], cadastrés AR no [Cadastre 10], AR no [Cadastre 12], AR no [Cadastre 26], AR no [Cadastre 27] et AR no [Cadastre 28], ou encore AR no [Cadastre 11], désignée sous les références AR no [Cadastre 20] et AR no [Cadastre 22] dans leur acte notarié rectificatif du 15 juillet 2019, les sociétés CBO TERRITORIA et BOURBON ont commis une faute leur causant préjudice, et en réparation, les condamner solidairement à leur payer la somme de 150.000 euros à titre de dommages intérêts au titre de leur préjudice matériel, et celle de 150.000 euros au titre de leur préjudice moral,
- Juger que M. [HP] [ZV] et la SARL CABINET GENEALOGIQUE de L'OCEAN INDIEN ont commis des fautes, en violant délibérément leurs droits de propriété sur leurs terrains cadastrés AR no [Cadastre 10], AR no [Cadastre 12], AR no [Cadastre 26], AR no [Cadastre 27] et AR no [Cadastre 28], ou encore AR no [Cadastre 11], en les divisant en quatre parcelles qu'ils ont fait publier au service du cadastre sous les numéros AR no [Cadastre 19], AR no [Cadastre 20], AR no [Cadastre 21] et AR no [Cadastre 22], en se prévalant frauduleusement de la qualité de mandataire des héritiers de la succession des époux [KU] [KT] [SA] / [XK] [IJ] auprès des sociétés CBO TERRITORIA et BOURBON ;
- Condamner solidairement M. [HP] [ZV] et la SARL CABINET GENEALOGIQUE de I'OCEAN INDIEN à leur payer la somme de 200.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice matériel et celle de 200.000€ en réparation de leur préjudice moral,
- Juger que la SCCV [Localité 36] a commis des fautes leur ayant causé de graves préjudices et la condamner à leur payer la somme de 200.000 € à titre de réparation de leur préjudice matériel et celle de 200.000€ en réparation de leur préjudice moral, Etc..
Par jugement en date du 23 février 2021, le tribunal judiciaire de Saint-Denis a statué en ces termes :
- DIT n'y avoir lieu à écarter les dernières conclusions des demandeurs ainsi que les pièces produites pour violation du principe du contradictoire,
- DECLARE irrecevables la demande de nullité de l'acte rectificatif du 15/07/2019 et de celles à l'encontre de Monsieur [HP] [ZV] à titre personnel,
- DECLARE irrecevables les demandes des intervenants volontaires, ès qualité d'héritiers de la succession [N],
- DEBOUTE les parties de l'ensemble de leurs demandes tant principales que reconventionnelles,
- DIT n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du CPC,
- CONDAMNE in solidum Madame [J] [SA], Monsieur [NB] [LO] Monsieur [LM] [LO], Madame [JD] [WP] [LO], Monsieur [DI] [LO], Madame [T] [SA] épouse [IK], Monsieur [DS] [SA] aux dépens.
Madame [J] [SA], Monsieur [NB] [LO] Monsieur [LM] [LO], Madame [GA] [LO], Monsieur [DI] [LO], Madame [T] [SA] épouse [IK], Monsieur [DS] [SA] ont interjeté appel par déclaration déposée par RPVA au greffe de la cour le 11 mai 2021.
L'affaire a été renvoyée à la mise en état par ordonnance du 12 mai 2021.
Les appelants ont déposé leurs premières conclusions par RPVA le 10 août 2021.
La SCCV [Localité 36] a déposé ses premières conclusions d'intimée le 30 septembre 2021, comme la société CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN à titre personnel et en qualité de mandataire des héritiers de Madame [JD] [N].
La société CBO TERRITORIA a déposé ses conclusions d'intimée par RPVA le 14 octobre 2021.
La société BOURBON n'a pas constitué avocat.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 25 novembre 2021, avec effet différé au 10 février 2022.
Malgré plusieurs avis, le dossier des appelants n'a été déposé que le 14 juin 2022.
Aux termes de leurs conclusions responsives et récapitulatives déposées par RPVA le 24 novembre 2021, les appelants demandent à la cour de :
- Confirmer le jugement du 23 février 2021 en ce qu'il a déclaré irrecevables les 39 intervenants volontaires en leurs demandes, ès qualité d'héritiers [N] ;
- Prononcer l'annulation de l'acte authentique dressé le 15 juillet 2019 par Me [W] [YY], notaire à [Localité 32], à la requête des sociétés CBO TERRITORIA et BOURBON portant rectificatif des titres de CBO TERRITORIA des 4 février 2005, 7 février 2005 et 25 février 2005, le tout publié au Service de la Publicité Foncière de Saint-Denis le 2 mars 2005, volume 2005 p, numéro 1675,
- A tout le moins, juger que l'acte notarié rectificatif du 15 juillet 2019, en cours de publication depuis le 25 juillet 2019 sous la référence 2019 P 4427, n'est pas opposable aux demandeurs, ès qualités d'héritiers de la succession des époux [KU] [KT] [SA]-[XK] [IJ] ;
- Condamner les sociétés anonymes CBO TERRITORIA et BOURBON à rectifier leurs titres établis par actes authentiques en date des 4 février 2005 7 février 2005 et 25 février 2005, le tout publié au Service de la Publicité Foncière de Saint-Denis le 2 mars 2005, volume 2005 p, numéro 1675, en ce qu'ils déclarent que par suite de l'apport partiel d'actifs, la société anonyme CBO TERRITORIA est la propriétaire des terrains cadastrés section AR no [Cadastre 10] et AR No [Cadastre 12], commune de [Localité 34].
- A tout le moins, la cour d'appel jugera que les sociétés CBO TERRITORIA et BOURBON devront rectifier leur acte notarié rectificatif du 15 juillet 2019 par le retrait des dispositions énoncées sous les titres : « V1 -division cadastrale - Plan de bornage ??, puis, « AFFECTATION DES PARCELLES OBJET DU RECTIFICATIF ??, et « ENREGISTREMENT - PUBLICITE ?? (voir pages 4 et 5) et ce sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard, durant deux mois, passé le délai de trente jours après la date de la signification de l'arrêt à venir.
- Ou encore, il est demandé à la cour d'appel de juger, par arrêt à publier au Service de la Publicité Foncière, que dans les dispositions de cet acte notarié du 15 juillet 2019, énoncées sous les titres: « VI -division cadastrale - Plan de bornage ??, puis, « AFFECTATION DES PARCELLES OBJET DU RECTIFICATIF ??, et « ENREGISTREMENT- PUBLICITE ?? (voir pages 4 et Ss), ne sont pas opposables aux consorts [SA].
- Juger que l'arrêt à intervenir sera publié au Service de la Publicité Foncière de Saint-Denis pour valoir titre de propriété au profit des requérants, ès qualités d'héritiers de [KU] [KT] [SA] et de son épouse née [XK] [IJ], respectivement décédés les [Date décès 16] 1963 et [Date décès 15] 1964 à [Localité 34].
- Ordonner à la SCCV [Localité 36] d'enlever, sur leur assiette, le panneau d'affichage du permis d'aménager qu'elle obtenu par arrêté municipal no 20190902 en date du 7 août 2019, ainsi que tous objets et constructions qu'elle a installés sur leur sol et dans leur sol et de cesser toute publicité de leur commercialisation en lots à bâtir,
- Juger que ces contraintes faites à la SCCV [Localité 36] seront assorties d'une astreinte de 5.000 euros par jour de retard à compter du lendemain de la signification du jugement à intervenir.
- Juger qu'en transférant une partie de leurs terrains sis à Sainte-[JD] (97438), cadastrés AR no [Cadastre 10], AR no [Cadastre 12], AR no [Cadastre 26], AR no [Cadastre 27] et AR no [Cadastre 28], ou encore AR no [Cadastre 11], désignée sous les références AR no [Cadastre 20] et AR no [Cadastre 22] dans leur acte notarié rectificatif du 15 juillet 2019, les sociétés CBO TERRITORIA et BOURBON ont commis une faute causant préjudice aux requérants, et en réparation, les condamner solidairement à leur payer la somme de 150.000 euros à titre de dommages intérêts au titre de leur préjudice matériel, et celle de 150.000 euros au titre de leur préjudice moral.
- Juger que la SARL CABINET GENEALOGIQUE de l'0CEAN INDIEN ainsi que les trente-neuf personnes intervenantes volontaires susnommées ont commis des fautes envers les demandeurs ce, en violant délibérément leurs droits de propriété sur leurs terrains cadastrés AR no [Cadastre 10], AR no [Cadastre 12], AR no [Cadastre 26], AR no [Cadastre 27] et AR no [Cadastre 28], ou encore AR no [Cadastre 11], en les divisant en quatre parcelles qu'ils ont fait publier au service du cadastre sous les numéros AR no [Cadastre 19], AR no [Cadastre 20], AR no [Cadastre 21] et AR no [Cadastre 22], en se prévalant frauduleusement de la qualité de mandataire des héritiers de la succession des époux [KU] [KT] [SA]/[XK] [IJ] auprès des sociétés CBO TERRITORIA et BOURBON lors de l'établissement de l'acte notarié rectificatif du 15 juillet 2015, en y faisant transférer la propriété de la partie de leurs biens ainsi cadastrée sous les références AR no [Cadastre 20] et AR no [Cadastre 22] aux héritiers de la succession [EL] [F] [N] qu'ils ont créé et constitué propriétaires du bien que les requérants ont régulièrement acquis par prescription trentenaire depuis l'année 1932, en vendant - ès qualité de mandataire desdits héritiers - à la SCCV [Localité 36] cette partie de leur bien immobilier, en autorisant celle-ci à l'aménager en 36 lots à bâtir ainsi qu'à les commercialiser, et en faisant opposition auprès des notaires à l'établissement leur acte authentique de prescription acquisitive de leur terrain.
- Condamner la SARL CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN à payer aux appelants la somme de 200.000 € à titre de dommages intérêts en réparation de leur préjudice matériel, et celle de 200.000 euros en réparation de leur préjudice moral.
- Juger que Madame [JD] [RF] [JZ], Madame [TM] [EB] [Z], Monsieur [PK] [K] [A], Monsieur [DT] [A], Madame [GU] [ZT] [A], Madame [RZ] [JD] [WR] [A], Madame [GB] [JF] [A], Monsieur [IL] [RE] [XL], Madame [NC] [XL], Monsieur [RD] [AG] [V], Monsieur [M] [GW] [XL], Madame [Y] [JD] [XL], Monsieur [KS] [G] [XL], Monsieur [ZU] [MH] [XL], Madame [XJ] [LL] [XL], Madame [CZ] [NA] [CY], Madame [GB] [TL] [GV], Monsieur [GW] [AV] [CY], Monsieur [DH] [E] [CY], Madame [YF] [CY], Monsieur [TN] [U] [CY], Madame [TO] [ED] [NW] [CY], M. [VX] [HP] [OO] [U] [YG], Monsieur [ST] [OP] [CY], Madame [VC] [JD] [EC], Madame [HR] [L] [CY], Madame [PL] [SS] [CY], Madame [UI] [CY], Monsieur [KU] [AR] [CY], Madame [JD] [VC] [EM] [CY], Madame [EL] [LN], Madame [DJ] [JD] [SU] [LN], Madame [UG] [LN], Monsieur [JX] [DS] [LN], M. [AU] [PJ] [GW] [LN], Madame [DU] [CY], Madame [O] [FF] [CY], Madame [NV] [TL] [CY], Madame [RY] [A], ont commis des fautes envers les demandeurs ès qualités d'héritiers de la succession des époux [KU] [KT] [SA] et les condamner solidairement à leur payer les sommes de 50.000 euros au titre de leur préjudice moral et 25.000 euros au titre de leur préjudice financier.
- Juger que la SCCV [Localité 36] a commis des fautes ayant causé de graves préjudices aux demandeurs et la condamner à leur payer la somme de 200.000 € à titre de dommages intérêts en réparation de leur préjudice matériel, et celle de 200.000 euros en réparation de leur préjudice moral.
Par conclusions No 2 déposées le 7 février 2022, la société CBO TERRITORIA demande à la cour de :
- VOIR CONFIRMER le jugement rendu par le tribunal Judiciaire de Saint-Denis du 23 Février 5-20:21, y ajoutant, que l'irrecevabilité de l'action en nullité, dont se prévalent les consorts [SA] et [LO], est irrecevable, ce qui dispensera la Cour d'aller plus loin dans l'argumentaire développé par les appelants.
- S'ENTENDRE CONDAMNER conjointement et solidairement, les consorts [SA] et [LO] à payer à la Société CBO TERRITORIA la somme de 10.000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel, ainsi qu'à supporter les dépens.
L'intimée plaide qu'elle n'a commis aucune faute avant l'acte rectificatif attaqué ni après puisque cet acte n'est pas translatif de propriété.
Elle précise même qu'elle a demandé au notaire d'établir cet acte rectificatif puisque des portions de terrain lui ont été attribuées à tort alors qu'elles appartenaient à des tiers et non au GROUPE BOURBON puis à CBO TERRITORIA.
En fonction de l'analyse du titre du revendiquant, la Société CBO TERRITORIA a chargé l'étude notariale [W] [YY], d'établir un acte rectificatif à l'apport partiel d'actifs de 2005 et ainsi, exclure les parcelles revendiquées de son patrimoine.
La société CBO TERRITORIA soutient aussi que l'acte rectificatif mentionne à tort que Monsieur [HP] [ZV] revendiquait une partie de la parcelle AR [Cadastre 11] pour le compte des consorts [SA], alors qu'il s'agissait en fait des consorts [N], étant cependant fait observer que cette erreur ne modifie pas l'objet de l'acte rectificatif dont il est question.
Enfin, elle indique qu'elle ne se sent pas autorisée à participer à la réponse qui pourra être donnée par la cour quant à déterminer qui doit faire rentrer dans son patrimoine les parcelles AR no [Cadastre 12] et AR no [Cadastre 12].
Par conclusions déposées le 30 septembre 2021, contenant appel incident, la société CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN « CGOI », en son nom personnel et en qualité de mandataire spécial de 39 ayants droit de Madame [EL] [F] [N], demande à la cour de :
- RÉFORMER le jugement rendu le 23 février 2021 par le Tribunal judiciaire de SAINT-DENIS en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes des intervenants volontaires, es qualités d'héritiers de la succession [N] ;
- REFORMER le jugement rendu le 23 février 2021 par le Tribunal judiciaire de SAINT-DENIS en ce qu'il a débouté le Cabinet Généalogique de l'Océan Indien de ses demandes, tant en son nom propre, qu'es qualités de mandataire des héritiers [N] ;
- CONFIRMER le jugement rendu le 23 février 2021 par le Tribunal judiciaire de SAINT-DENIS pour le surplus.
- DÉCLARER le Cabinet Généalogique de l'Océan Indien en son nom propre et es qualités de mandataire des ayants droit de Madame [N] recevable et bien fondé en son appel incident;
- DÉCLARER les demandes des ayants droit de Madame [N] représentés par le Cabinet Généalogique de l'Océan Indien recevables ;
- CONDAMNER les consorts [SA] à payer au Cabinet Généalogique de l'Océan Indien agissant en son nom propre la somme de 50.000€ à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
- CONDAMNER les consorts [SA] à payer au Cabinet Généalogique de l'Océan Indien es qualités de mandataire des héritiers [N] la somme de 50.000€ à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
- CONDAMNER les consorts [SA] à payer au Cabinet Généalogique de l'Océan Indien agissant en son nom propre une somme de 5.000€ au titre de l'article 700 du CPC ;
En tout état de cause :
- DÉBOUTER les consorts [SA] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
- CONDAMNER les consorts [SA] à payer au Cabinet Généalogique de l'Océan Indien, ès qualités de représentant des héritiers [N], une somme de 10.000€ au titre de l'article 700 du CPC ;
- CONDAMNER les consorts [SA] aux entiers dépens de l'instance.
Les intimés évoquent une contradiction du jugement en ce qu'il a fait droit aux demandes des consort [SA], considérant que les ayants-droit de Madame [N], représentés par le CGOI, étaient irrecevables en leurs demandes au motif qu'ils n'avaient pas accepté la succession dans le délai de trente ans de l'ancien article 789 du Code civil, de sorte qu'ils devaient être réputés renonçant.
Dans le même temps, le tribunal rejetait les demandes des consorts [SA] visant à se voir déclarer propriétaires par usucapion des parcelles litigieuses.
Par cette décision, parfaitement fondée, le tribunal a constaté l'absence de droits des consorts [SA] sur la parcelle litigieuse. En conséquence, à défaut de détenir des droits sur cette parcelle, les consorts [SA] ne justifient d'aucun intérêt leur permettant d'opposer aux consorts [N] les règles relatives à la prescription extinctive. Les juges ne pouvant pas relever d'office la prescription extinctive, ainsi que l'a rappelée la Cour de cassation, ces règles ne pouvaient en aucune manière être opposées aux ayants-droit de Madame [N].
L'intimée précise que les seuls successibles de Madame [N] s'avéraient être des cousins aux 5ème et 6ème degrés, lesquels, compte tenu de leur éloignement généalogique de la défunte, ignoraient jusqu'à son existence même. Par conséquent, les ayant droits de Madame [N] n'étaient en mesure ni d'accepter, ni de renoncer, à des droits successoraux qu'ils ignoraient légitimement puisqu'ils ignoraient non seulement l'ouverture de la succession, mais également la consistance et l'étendue de leurs droits.
L'existence de leurs droits successoraux ne leur a été révélée que par les travaux menés par le CGOI, initialement mandaté par Maître [VA] afin de déterminer l'assiette des droits des consorts [SA].
La découverte du titre de propriété de Madame [N] par le CGOI à l'occasion de ces travaux, a conduit à la ratification de contrats de révélation de succession entre le généalogiste et les ayants-droit de Madame [N]. (Pièce no 13 : contrats de révélation de droits successoraux). Ce n'est qu'à cette occasion, que les héritiers de Madame [N] ont découvert l'existence de celle-ci, ainsi que des droits qui leurs revenaient. Ces révélations ont eu lieu entre le 6 février 2017 et le 31 août 2017. Le délai de prescription extinctive n'a donc commencé à courir à l'égard des ayants-droit de Madame [N], qu'à la date de la conclusion de ces contrats et donc respectivement pour chacun d'eux, entre le 6 février 2017 et le 31 août 2017. (Pièce no 13) En conséquence, les règles relatives à la prescription extinctive ne sauraient leur être opposées puisque leurs demandes formées par conclusions notifiées à l'occasion de la mise en état du 27 octobre 2020 l'ont donc été dans les délais requis. Les ayants-droit de Madame [N] ont donc qualité et intérêt à agir pour faire valoir leurs droits, de sorte que leurs demandes sont parfaitement recevables.
A titre surabondant, les intimés considèrent que la juxtaposition des solutions retenues par le tribunal aboutit à une situation totalement incohérente, puisque, à suivre les juges du premier degré, le rejet de l'ensemble des demandes principales et reconventionnelle évince de fait tout propriétaire des parcelles litigieuses, et ce, alors même qu'existe un titre de propriété au nom de Madame [N].
Les intimés plaident ensuite l'absence de prescription acquisitive au profit des héritiers [SA].
Selon eux, les éléments dont se prévalaient les consorts [SA] n'établissaient pas une possession continue, non équivoque, publique, et à titre de propriétaire, en réalisant des actes matériels de possession sur la partie de terrain revendiquée. Ils ne disposent donc d'aucun titre, leur permettant de revendiquer la qualité de propriétaires sur l'ensemble des parcelles. Il résulte en effet du constat d'Huissier de Maître [UH], que le terrain litigieux est inoccupé, et non-entretenu, de sorte qu'ils ne possèdent pas le terrain de manière non équivoque et à titre de propriétaire. (Pièce no 8)
Selon les intimés, durant des années, les consorts [SA] ne se sont pas acquittés des taxes fiscales relatives au terrain litigieux, de sorte qu'ils ne possèdent pas le terrain de manière paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire. Le bornage réalisé contradictoirement le 16 juillet 2018 par le Cabinet OIT, n'a reçu aucune opposition quant au fait que la parcelle AR no [Cadastre 11] est mentionnée comme appartenant à la succession [N], de sorte que les consorts [SA] ne possèdent pas le terrain de manière publique, non équivoque, et à titre de propriétaire, et pour cause, la société CBO étant titrée sur ceux-ci, à l'époque dudit bornage. Si la famille [SA] a habité sur la portion de terrain acquise par acte du 19 mai 1924, ce qui n'est pas contesté, elle n'a pas occupé de manière continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire, le surplus de parcelle objet du présent litige. Les consorts [SA] produisent des plans de partage datés de janvier et août 1987 dressés par Monsieur [DS] [AF], géomètre, à la demande de cinq héritiers des époux [SA], en vue de se répartir une partie du terrain litigieux pour une surface totale de 18.850 m2 (Pièces adverses no 34 et 35). Ces documents établis sur la base des seules affirmations des consorts [SA], démontrent uniquement que les intéressés se sont de nouveau entendus pour se partager le surplus de terrain ne leur appartenant pas, en violation flagrante des droits des ayants-droit de Madame [N]. Ce projet de partage porte au demeurant sur une surface de 18.850 m2, de sorte qu'il ne saurait fonder les demandes des requérants portant sur la totalité de la parcelle litigieuse dont la surface s'élève à 19.313 m2. En conséquence, ce document ne saurait, ni leur conférer un titre de propriété, ni démontrer une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire depuis plus de trente ans.
Les intimés affirment que le plan de bornage de 2004 établi par le même géomètre [AF], est tout autant dépourvu de toute valeur probante minimale, en ce qu'il doit être à nouveau rappelé, qu'un tel plan consiste uniquement à valider des limites géométriques, mais en aucun cas, à attester de l'identité des propriétaires du bien, au-delà d'ailleurs du rejet de cet acte, comme des autres, par le service de la publicité foncière.
Par ailleurs, ils rappellent que ce procès-verbal No 2718 G a fait l'objet d'un rejet définitif total par le service de la publicité foncière le 8 novembre 2005, les parcelles AR no [Cadastre 10] et AR no [Cadastre 12] étant identifiées par erreur comme appartenant à la société CBO TERRITORIA. (Pièce No 4 : état hypothécaire) ; que les consorts [SA] produisent également un procès-verbal de délimitation en changement de limites no 2729 W, établi par Monsieur [DS] [AF], et déposé au Centre des impôts fonciers de [Localité 32] le 26 septembre 2005 (l'on notera pour l'anecdote que Monsieur [AF] semble être quasiment au service exclusif d'une partie des consorts [SA]) (Pièce adverse no 39). Pour les intimés, ce document, établi sur la base des seules affirmations des consorts [SA], démontre une nouvelle fois que les intéressés se sont de nouveau entendus pour se partager le surplus de terrain ne leur appartenant pas, en violation des droits des ayants-droit de Madame [N]. Ainsi, l'étude de la chronologie de l'ensemble de ces projets établit que les intéressés ont multiplié les manoeuvres frauduleuses afin de s'attribuer la propriété du terrain litigieux.
Les intimées contestent les demandes des Consorts [SA] tendant à engager la responsabilité délictuelle du CGOI, en son nom personnel, mais également ès qualité de mandataire des héritiers [N], au motif tiré de ce qu'il aurait commis de prétendues manoeuvres frauduleuses pour les déposséder de leur bien, et utilisé une fausse qualité de mandataire.
Selon les intimées, pour la première fois en cause d'appel, les consorts [SA] ajoutent à cette demande fantaisiste, une demande de condamnation des « 39 intervenants volontaires » à leur verser « 50.000 € pour préjudice moral et 25.000 € pour préjudice financier. » Cette prétention nouvelle ne pourra qu'être déclarée irrecevable, et en toute hypothèse, mal fondée.
Par conclusions déposées par RPVA le 30 septembre 2021, la SCCV [Localité 37] demande à la cour de :
- CONFIRMER le jugement entrepris par le Tribunal Judiciaire de Saint-Denis en date du 23/2/2021 (RG no 20/01987) en ce qu'il a débouté les Consorts [SA]-[LO], appelants et demandeurs en première instance, de leurs demandes, fins et conclusions ;
En conséquence et statuant à nouveau :
- DÉBOUTER les appelants de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- JUGER les appelants mal fondés dans leur demande au titre de la prescription acquisitive,
SUR L'APPEL INCIDENT
- INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SCCV [Localité 36] de ses demandes reconventionnellement formulées en première instance ;
En conséquence, et statuant à nouveau :
- PRONONCER l'irrecevabilité partielle de l'action formée à l'encontre de la SCCV [Localité 36] au titre de la demande d'annulation de l'acte authentique du 15 juillet 2019 ;
- JUGER fautive l'attitude des appelants dont il découle les préjudices ;
- CONDAMNER solidairement les appelants à payer à la SCCV [Localité 36] au titre de la réparation des préjudices :
- La somme de 866.733,06 € au titre de la perte de chance de faire une marge nette,
- La somme de 42.671,86€ au titre des différents frais engagés,
- La somme de 150.000 € au titre du préjudice moral.
En tout état de cause :
- CONDAMNER solidairement les appelants à payer à la SCCV [Localité 36] la somme de 72.364,29 € HT au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- CONDAMNER solidairement les appelants aux entiers dépens et distraire au profit de la société ALQUIER et ASSOCIES qui a pourvu sur son affirmation de droits,
- ORDONNER l'exécution provisoire de la décision à intervenir
L'intimée fait valoir que les appelants ne démontrent pas remplir les conditions de la prescription acquisitive. Ils ne justifient pas de l'occupation trentenaire dont ils se prévalent, ni d'une possession continue, non interrompue, paisible, non équivoque et publique. Les témoignages produits n'attestent pas d'une occupation des consorts [SA] au-delà de la surface de 4.872 m² dont ils sont propriétaires. Il ne ressort d'aucune attestation que les appelants occuperaient, depuis plus de trente ans la totalité de la parcelle d'une surface de 19.313 m².
La SCCV [Localité 36] forme un appel incident en ce que le jugement entrepris a rejeté ses demandes reconventionnelles.
La SCCV [Localité 36] réclame l'indemnisation de ses préjudices car elle se retrouve, eu égard aux actions en justice engagées par les appelants, paralysée dans son activité.
Elle considère que les recours des appelants tant devant le tribunal judiciaire que devant la juridiction administrative n'ont pour unique objet que de faire obstacle à la réalisation du projet de la SCCV [Localité 36].
Les dépenses qu'elle a engagées pour cette opération immobilière s'élèvent à la somme totale de 3.881.984,10 €. Elle aurait dû retirer des recettes à hauteur de 4.822.389,47€. Ainsi, la marge nette de la SCCV [Localité 36] devait être de 866.733,06 €.
Elle demande en outre à la cour de condamner solidairement les appelants à payer à la SCCV [Localité 36] la somme de 42.671,86€ au titre des frais engagés et de 150.000 € au titre du préjudice moral.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées, figurant au dossier de la procédure, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile.
La cour rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou de « dire et juger » qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.
En outre, en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n'examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.
Les appelants, Madame [J] [SA], Monsieur [NB] [LO] Monsieur [LM] [LO], Madame [GA] [LO], Monsieur [DI] [LO], Madame [T] [SA] épouse [IK], Monsieur [DS] [SA], seront dénommés ci-dessous et par commodité « les héritiers [SA] ».
Les intimés sont d'une part, la société CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN « CGOI », en son nom personnel et en qualité de mandataire spécial de 39 ayants-droits de Madame [EL] [F] [N]. Ces trente-neuf ayants droits seront dénommés sous le vocable « ayants droits de Madame [N] ».
Le vocable société CGOI désignera dans l'arrêt, la société CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN en son nom personnel et sa qualité de mandataire spécial de 39 ayants-droits de Madame [EL] [F] [N].
Sur le fond, les Héritiers [SA] agissent en annulation de l'acte authentique dressé le 15 juillet 2019 par Me [W] [YY], notaire à [Localité 32], à la requête des sociétés CBO TERRITORIA et BOURBON portant rectification des titres de CBO TERRITORIA des 4 février 2005, 7 février 2005 et 25 février 2005, le tout publié au Service de la Publicité Foncière de Saint-Denis le 2 mars 2005, volume 2005 p, numéro 1675.
Subsidiairement, ils demandent de juger que l'acte notarié rectificatif du 15 juillet 2019, en cours de publication depuis le 25 juillet 2019 sous la référence 2019 P 4427, ne leur est pas opposable, ès qualités d'héritiers de la succession des époux [KU] [KT] [SA]-[XK] [IJ].
En première instance, ils avaient fait assigner les défendeurs en demandant au tribunal de grande instance de «juger que les requérants, es qualité d'héritiers des époux [KU] [KT] [SA] - [XK] [IJ], sont les propriétaires indivis, par prescription acquisitive, du terrain resté la propriété de feue [EL] [F] [N] à la date de son décès, inclus dans les terrains cadastrés AR no [Cadastre 10] et AR no [Cadastre 12], AR no [Cadastre 26], AR no [Cadastre 27], et AR no [Cadastre 28], ou encore référencés AR no [Cadastre 11], commune de [Localité 34], »
En cause d'appel, les appelants, bien que déclarés irrecevables en leur demande de nullité de l'acte rectificatif du 15/07/2019 et de celles à l'encontre de Monsieur [HP] [ZV] à titre personnel, formulent leurs demandes en faisant valoir qu'ils sont propriétaires de la totalité de la parcelle qualifiée d'unité foncière d'abord cadastré section AR no [Cadastre 10] et AR no [Cadastre 12], puis, AR [Cadastre 11], enfin AR no [Cadastre 20] et AR no [Cadastre 22], commune de [Localité 34].
Les appelants ne mènent directement pas une action en revendication de propriété en contestant le compromis de vente conclu entre la SCCV [Localité 36] et la succession [N] par acte authentique dressé par Maître [R] [C] les 18, 26 décembre 2018 et 23 mai 2019.
La cour observe à cet égard que ce titre (pièce No 3 de la SCCV [Localité 36]) n'a pas été publié par la volonté des parties (page 39 de l'acte) tandis que, malgré la durée de l'instance, sa régularisation n'a pas été produite par les parties en cours d'instance tandis que le permis d'aménager a pourtant été accordé le 7 août 2019 par le Maire de [Localité 34] sur un terrain cadastré AR [Cadastre 11], selon demande déposée le 3 avril 2019, soit avant que le compromis de vente n'ait été approuvé par l'ensemble des héritiers [N] (Pièce no 1 de la SCCV [Localité 36]).
LA SCCV [Localité 36] conteste la prescription acquisitive invoquée par les appelants en considérant qu'ils ne justifient pas de l'occupation trentenaire dont ils se prévalent, ni d'une possession continue, non interrompue, paisible, non équivoque et publique, au-delà de la surface de 4.872 m² dont ils sont propriétaires mais pas pour la totalité de la parcelle d'une surface de 19.313m².
Par ailleurs, les ayants droits de la succession [N] et le cabinet de généalogie CGOI font aussi grief au jugement querellé d'avoir déclaré leurs demandes irrecevables au motif que les Héritiers [SA] ne justifient pas d'une possession continue, non équivoque, publique et à titre de propriétaire.
Le premier juge a déclaré irrecevables la demande de nullité de l'acte rectificatif du 15/07/2015 et de celles à l'encontre de Monsieur [HP] [ZV] à titre personnel, présentées par les Héritiers [SA], ainsi que les demandes des intervenants volontaires, es qualité d'héritiers de la succession [N], faute de qualité et intérêt pour agir, l'acte de notoriété établi à leur égard datant du 27/04/2018.
Les appelants ne forment plus aucune demande à l'encontre de Monsieur [HP] [ZV] en cause d'appel. Il n'y aura donc pas lieu de statuer de ce chef.
Sur le dépôt tardif du dossier de plaidoirie des appelants :
Selon le dernier alinéa de l'article 912 du code de procédure civile, dans tous les cas, les dossiers, comprenant les copies des pièces visées dans les conclusions et numérotées dans l'ordre du bordereau récapitulatif, sont déposés à la cour quinze jours avant la date fixée pour l'audience de plaidoiries.
En l'espèce, le dossier des appelants n'a pas été déposé dans les délais avant l'audience, ni au cours de l'audience, mais tardivement pendant le délibéré après un avis RPVA adressé à leur Conseil le 24 mai 2022, lui laissant un nouveau délai jusqu'au 4 juin 2022, imposant à la cour de proroger le délibéré au-delà de la période de service allégé de l'hiver austral.
Sur les fins de non-recevoir :
Aux termes de l'article 31 du code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.
Il résulte de ce texte que l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action.
Sur la recevabilité de la demande de nullité de l'acte rectificatif du 15 juillet 2019 :
Le premier juge a considéré que les Héritiers [SA], tiers à l'acte régularisant un apport partiel d'actifs entre deux sociétés tierces, ne pouvaient agir en nullité de cet acte.
La SCCV [Localité 36] plaide pour la confirmation de cette fin de non-recevoir.
La société CGOI conclut à la confirmation du jugement tout en soutenant que l'acte modificatif contesté permet d'exclure les parcelles cadastrées Section AR no [Cadastre 10] et [Cadastre 12], comprises par erreur dans une opération d'apport partiel d'actifs consenti par la société BOURBON à la société CBO TERRITORIA.
Une telle annulation de l'acte rectificatif aurait pour conséquence, que les parcelles AR no [Cadastre 10] et AR no [Cadastre 12] reviendraient à la société CBO TERRITORIA, laquelle a expressément reconnu qu'elle n'en était pas propriétaire. Selon l'intimée, les consorts [SA] ne pourront qu'être déboutés de leur demande qui, si elle devait être déclarée bien fondée, les priverait des droits qu'ils revendiquent sur les parcelles litigieuses.
Les appelants considèrent qu'ils disposent de la qualité et de l'intérêt à agir puisqu'ils sont à la fois propriétaires titrés d'une partie des parcelles litigieuses et qu'ils revendiquent la propriété du reste par l'effet de la prescription acquisitive.
Ainsi, compte tenu de leur qualité alléguée de propriétaires des parcelles litigieuses, les Héritiers [SA] sont naturellement concernés par l'acte d'apport partiel d'actifs conclu entre la société GROUPE BOURBON et la société CBO TERRITORIA puisque figurent parmi ces actifs les parcelles dont ils revendiquent la propriété.
Sans préjudice du bienfondé de leur action, il convient de la déclarer recevable et d'infirmer le jugement querellé de ce chef.
Sur la recevabilité de l'action des ayants-droit de Madame [EL] [N] :
Le jugement entrepris a déclaré irrecevables les demandes des intervenants volontaires, es qualité d'héritiers de la succession [N] au motif qu'ils auraient perdu leur qualité et leur intérêt à agir compte tenu du délai écoulé entre le décès de leur auteur en 1931 et l'acte de notoriété établi à leur égard dressé le 27 avril 2018, de plus de trente ans pour faire valoir l'option successorale prévue par l'ancien article 789 du code civil.
Les appelants, dans le dispositif de leurs dernières conclusions, ne visent ni la confirmation ni l'infirmation du jugement dont appel en ce qui concerne l'irrecevabilité des demandes des ayants-droit de Madame [EL] [N].
La SCCV [Localité 36] n'évoque pas non plus la question de la recevabilité de l'action des ayants-droit de Madame [N].
La société CGOI a formé appel incident en son nom propre et en qualité de mandataire des ayants-droit de Madame [EL] [N].
Elle rappelle une ancienne jurisprudence précisant que, passé le délai de prescription, l'héritier prétendu inactif doit être considéré étranger à la succession et son défaut de qualité peut, conformément à l'article 2225, lui être opposé par toute personne y ayant intérêt. Mais, dans un arrêt du 17 mars 1987, la première chambre civile de la Cour de cassation a précisé que les juges ne peuvent relever d'office la prescription de l'article 789. Or, en retenant que les consorts [SA] n'établissaient pas de possession continue, non équivoque, publique et à titre de propriétaire, en réalisant des actes matériels de possession sur la partie de terrain revendiquée, et les a déboutés en conséquence de l'ensemble de leurs demandes, le tribunal a constaté l'absence de droits des consorts [SA] sur la parcelle litigieuse, et donc d'invoquer la prescription extinctive retenue d'office et à tort par le premier juge.
En outre, les intimés font valoir les dispositions de l'ancien article 781 du code civil ainsi que la jurisprudence de la Cour de cassation qui admet que « l'ignorance légitime de l'ouverture d'une succession, à l'exclusion de celle de l'existence d'un successible, peut suspendre le délai de la prescription extinctive trentenaire prévu à l'article 789 du code civil. »
En l'espèce, la société souligne que les ayants-droit de Madame [N] ignoraient complètement l'existence de la succession de cette dernière compte tenu de son décès survenu en 1931, du fait qu'elle était célibataire et sans descendance, que ses ascendants étaient eux-mêmes décédés au jour de son décès, et que leur éloignement « généalogique » au 5ème ou 6ème degrés de succession leur interdisait de connaître leur qualité héréditaire.
Au surplus, ils ignoraient aussi la consistance du patrimoine de la défunte puisque son titre de propriété du 15 novembre 1919 n'avait pas été publié.
Enfin, les parcelles litigieuses figuraient par erreur dans le patrimoine de la société GROUPE BOURBON ou la société CBO TERRITORIA, acte publié régulièrement jusqu'à la rectification du 15 juillet 2019.
Ceci étant exposé,
L'article 784 du code civil, dans sa version applicable au litige, antérieure à la réforme issue de la loi no 2006-728 du 23 juin 2006, entrée en vigueur le 1er janvier 2007, prévoit que la renonciation à une succession ne se présume pas.
Aux termes de l'article 789 du code civil, dans sa version antérieure à la réforme issue de la loi no 2006-728 du 23 juin 2006, entrée en vigueur le 1er janvier 2007, la faculté d'accepter ou de répudier une succession se prescrivait par le laps de temps requis pour la prescription la plus longue des droits immobiliers (soit trente ans).
Ce délai trentenaire est sujet aux causes légales de suspension ou d'interruption de la prescription. Mais si l'ignorance de l'ouverture d'une succession peut empêcher de courir la prescription extinctive, c'est à la condition que le successible ait une juste raison d'ignorer la naissance de son droit.
Madame [EL] [N] est décédée le [Date décès 3] 1931 sans que sa succession n`ait été réglée. Les droits successoraux des éventuels héritiers de Madame [EL] [N] ne pouvaient plus en principe être invoqués après le [Date décès 3] 1961.
Mais, selon les dispositions de l'article 781 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi no 2006-728 du 23 juin 2006 applicable en l'espèce, lorsque celui à qui une succession est échue est décédé sans l'avoir répudiée ou sans l'avoir acceptée expressément ou tacitement, ses héritiers peuvent l'accepter ou la répudier de son chef.
La jurisprudence considère que l'effet de la prescription est de rendre le successible étranger à la succession, lequel est donc réputé renonçant.
Seule l'ignorance légitime de l'ouverture d'une succession peut suspendre le délai de la prescription extinctive trentenaire de l'article 789 du code civil (Cass. 1re civ., 7 juin 2006- Juris-Data no 2006-033858).
En l'espèce, il résulte des débats et des pièces produites que c'est le cabinet de généalogie CGOI qui a découvert l'existence de la succession litigieuse qui n'avait jamais été réglée, à la suite du mandat qui lui avait été confié le 24 juin 2016 par Maître [VA], notaire saisi par les Héritiers [SA], dans le but de déterminer l'assiette des droits des Consorts [SA], notamment sur le terrain litigieux, à la suite du décès de Monsieur [KU] [KT] [SA], survenu le [Date décès 16] 1963 à [Localité 34].
Ainsi, les intimés, ayants-droit de Madame [EL] [N], n'ont pu avoir connaissance de leurs éventuels droits successoraux qu'à partir de la ratification des contrats de révélation de succession avec la société CGOI entre le 6 février 2017 et le 31 août 2017.
Face à ce motif légitime, les appelants n'apportent pas la preuve que les ayants-droit de Madame [N] auraient pu connaître l'existence de leurs droits successoraux allégués trente ans avant leur intervention volontaire par conclusions devant le tribunal de grande instance de Saint-Denis de la Réunion.
En conséquence, sans préjudice du sort de leur action au fond, il convient d'infirmer le jugement querellé et de déclarer recevable l'intervention volontaire des ayants-droit de Madame [EL] [N], leur action successorale n'étant pas prescrite en raison du motif légitime résultant de leur impossibilité de connaître l'existence de l'ouverture de la succession de Madame [EL] [N] avant 2017.
Sur la propriété de la parcelle litigieuse et la prescription acquisitive des appelants :
1/ Sur la consistance de la parcelle initialement reçue par Madame [EL] [N] en vertu du partage successoral de la propriété de Monsieur [B] [N] :
Les parties ne contestent pas que Madame [EL] [F] [N] est devenue propriétaire d'une portion de terrain d'une surface totale de 32.894 m2 à la suite du partage successoral de la propriété de Monsieur [B] [N], selon acte reçu par Maître [H], Notaire à [Localité 32] le 15 novembre 1919.
A cet égard, le plan d'arpentage établi par l'arpenteur (signature illisible), annexé au procès-verbal de mesurage et de partage en date des 19 et 26 octobre 2019, déposé à l'étude de Maître [H] (pièce No 5 de CBO TERRITORIA), confirme que la parcelle attribuée à Madame [EL] [N] était bien traversée par un chemin coupant ainsi en deux la parcelle en question.
Par acte du 19 mai 1924, transcrit à la conservation des hypothèques le 23 mai 1924, volume 906, no 6 (pièce No 2 des appelants), Madame [EL] [F] [N] a vendu à Monsieur [KU] [KT] [SA] et son épouse, Madame [XK] [IJ], « une portion de terrain non bâtie située à [Localité 40] lieudit [Localité 36] d'une superficie de quarante-huit ares soixante-douze centiares et six cent millièmes??, soit 4.872 m2, « à prendre dans un terrain plus vaste d'une surface totale de 19.313 m2, appartenant à la venderesse » dont les limites de voisinage sont établies dans l'acte.
Il résulte de ces actes que les Héritiers [SA] sont titrés pour une surface certaine de 4.872 m² et pas au-delà.
Selon le rapport de Monsieur [HP] [ZV] en date du 27 février 2017, établi à la demande de la famille [SA] (pièce No 1 de CGOI), après avoir vendu d'autres parcelles par actes des 23 octobre 1922, 1er mai 1923, 15 novembre 1923 et 23 septembre 1924, pour une surface totale cumulée de 8.598 m², il restait donc à Madame [EL] [N] la propriété d'une parcelle mesurant 19.424 m² sur le lieudit [Localité 36] à [Localité 34] lors de son décès.
Le rédacteur du rapport conclut que cette parcelle est alors cadastrée Section AR No [Cadastre 11] pour une contenance de 19.313 m², correspondant à peu près à la contenance calculée plus haut.
Cette conclusion est corroborée par le plan d'arpentage et son actualisation résultant de la pièce No 5 de CBO TERRITORIA qui ajoute au plan initial de partage les nouvelles parcelles résultant des différentes ventes réalisées par Madame [EL] [N] avant son décès.
Toutefois, la mention relative au numéro du cadastre pour cette parcelle, soit AR [Cadastre 11], frappée à la machine et non calligraphiée, n'est pas d'origine car elle a été rajoutée.
A cet égard, la société GTOI évoque, dans ses écritures, sa pièce no 4, correspondant à une demande de renseignement adressée au Service de la publicité foncière par la SARL OIT le 14 août 2017. Or, l'intimée affirme que ce document établit que le procès-verbal No 2718 G visant à créer la parcelle AR No [Cadastre 11] a fait l'objet d'un rejet définitif le 8 novembre 2005, sans que cela résulte clairement du document produit.
Cette situation est confirmée par la demande de modification parcellaire présentée par le cabinet de géomètre [DS] [AF] pour le compte de la succession [SA] [KT] le 15 septembre 2005, tendant à unifier les parcelles AR [Cadastre 10], [Cadastre 12], [Cadastre 26], [Cadastre 27] et [Cadastre 28] en une seule parcelle AR No [Cadastre 11] (pièce No 6 de CBO TERRITORIA) qui n'a pas reçu de réponse positive.
Lors de cette demande, le plan proposé présente la parcelle AR [Cadastre 12] comme celle située au Sud-Ouest de l'ancien chemin traversant la propriété litigieuse restant au décès de Madame [EL] [N] tandis que les autres parcelles référencées se situaient au Nord-Est.
Par ailleurs, les parties produisent un extrait cadastral évoquant l'existence d'une parcelle AR No [Cadastre 11] qui figure dans la plupart des plans réalisés par les géomètres saisis, voire même dans le procès-verbal de bornage préparé par la SARL OIT à la requête de la société CGOI (pièce No 9 de CGOI), dans l'acte rectificatif du 15 juillet 2015 et dans l'acte de vente dressé en décembre 2018 par Maître [R] [C], concernant une parcelle de terrain nu de 14.209 m² à prendre sur la parcelle AR no [Cadastre 11] d'une superficie de 19.313 m².
Pourtant, aucune des parties ne démontre l'existence de « l'unité foncière AR [Cadastre 11] » contrairement à ce qu'a conclu Monsieur [HP] [ZV] dans son rapport du 27 février 2017 comme dans le rapport de l'IRFR du 9 mai 2019, encore validé par Monsieur [HP] [ZV] (pièce No 8 de CBO TERRITORIA), ceux-ci se limitant à la seule mention réglementaire du cadastre, insuffisante à établir à elle seule la propriété d'un bien.
En outre, les appelants invoquent la prescription acquisitive de la totalité de la parcelle. A cette fin, ils produisent de nombreuses attestations destinée à démontrer qu'ils sont devenus propriétaires des parcelles cadastrées Section AR no [Cadastre 10], AR [Cadastre 12], AR [Cadastre 26], AR [Cadastre 27] et AR [Cadastre 28], sises à [Localité 34], lieudit [Localité 36].
Les Héritiers [SA] soutiennent que leurs auteurs ont usucapé depuis l'année 1932, la partie de l'unité foncière AR [Cadastre 11] (devenue les parcelles AR [Cadastre 10], [Cadastre 26], [Cadastre 27] et [Cadastre 28]), et AR [Cadastre 12], après le décès de Madame [JD] [N] en 1931.
Ils considèrent que, passé le délai de trente ans après le décès de Madame [N], alors que personne n'avait accepté sa succession, l'unité foncière litigieuse a été enregistrée comme la propriété des Consorts [SA] dès le mois de janvier 1965. En outre, aucune revendication de cette succession n'est intervenue avant 2019.
Les Héritiers [SA] soutiennent qu'ils ont acquis par prescription le surplus des parcelles litigieuses, d'une superficie de 14.209 m² selon les actes susvisés, alors que leurs auteurs, Monsieur [KT] [SA] et son épouse, Madame [XK] [IJ], avaient acquis auprès de Madame [EL] [N] une parcelle non bâtie de 4.872 m² le 18 mai 1924, « à prendre dans son bien » d'une plus grande contenance.
Les appelants affirment qu'au décès de Monsieur [KT] [SA] et de son épouse, Madame [XK] [IJ], respectivement le [Date décès 16] 1963 et le 20 septembre 1964, ceux-ci avaient déjà acquis la propriété par prescription trentenaire conformément aux articles 721 et 2258 du code civil.
Pour en justifier, ils produisent plusieurs attestations, énumérée dans le bordereau de communication de pièces :
Attestation de Mme [YE] [OR]
Attestation de Mme [II] [NW]
Attestation de Mme [J] [DH]-[SA]
Attestation de Mme [DH] [ZA].
Attestation de Mme [LO] [JD] [WP].
Attestation de M. [MI] [WS] [GW].
Attestation de M. [PI] [KU].
Attestation de M. [MI] épouse [VB].
Attestation de Mme [HO] [JY].
Attestation de Mme [JD] [YZ] [BD] épouse [I].
Attestation de Mme [D] [NX] épouse [S].
Outre ces attestations, les appelants versent aux débats selon le BCP :
- Imprimé no 6463 du Centre des Impôts Foncier de [Localité 32] édité le 31.10.2005 Document d'arpentage no 2729 W enregistré le 26.9.2005 au Centre des Impôts Foncier.
- Titre de propriété de M. [EW] [GX] du 24 janvier 1969
- Titre de propriété des époux [PK] [GC] [VW] du 5 décembre 1974
- Trois attestations d'abonnement au service des eaux délivrées par la société CISE REUNION.
- Documents fiscaux au nom de la succession [KU] [SA], et taxes foncières payées par [SA]
- P-V de constat du 21. 12. 2017 prouvant l'occupation de l'unité foncière AR no [Cadastre 11]
- Relevé de propriété en date du 13 juillet 2021 des parcelles AR no [Cadastre 10] et AR no [Cadastre 12] au nom des consorts [SA].
L'ensemble de ces documents doit être analysé afin de vérifier si les conditions de la prescription acquisitive sont réunies, étant aussi rappelé que les délais pour prescrire de leurs auteurs s'ajoute à ceux des appelants.
Aux termes de l'article 2261 du code civil, pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire.
Charge de la preuve :
La charge de la preuve incombe au demandeur à l'action en revendication. C'est à celui qui se prétend propriétaire de prouver la réalité de son droit. S'il ne peut fournir cette preuve, son action est vouée à l'échec même si le défendeur, en possession du bien se contente d'une attitude purement passive et n'offre aucun élément de preuve de son propre droit.
La prescription acquisitive ne peut opérer qu'en présence d'actes matériels de possession accomplis par l'occupant à titre de propriétaire pendant la durée requise et dont l'existence doit être caractérisée par le juge.
En l'espèce, les premiers, revendiquant la propriété du surplus de la parcelle acquise par Monsieur [KT] [SA] et Madame [XK] [IJ], sont les héritiers [SA].
Ceux-ci prétendent que, depuis l'année 1932, leurs aïeux (les époux [KU] [KT] [SA]) et eux-mêmes ont accompli jusqu'à ce jour, des actes matériels de possession du terrain désigné comme ayant été la propriété de Mme [N], avec la volonté constante, de façon publique, ininterrompue, paisible et non équivoque, de se comporter en seul propriétaire, sans jamais avoir été troublés dans leur possession par un quelconque fait juridique contraire de tiers. Ils ajoutent que les époux [SA]- [IJ] étaient, aux dates de leur décès, déjà propriétaires par prescription acquisitive, du surplus des terrains AR no [Cadastre 10] et AR no [Cadastre 12], commune de Sainte-[JD], avec effet rétroactif à l'année 1932.
Pour contester les effets de la prescription acquisitive alléguée, les Héritiers [N] et leur mandant, font valoir que les documents correspondant aux lieux d'habitation occupés par les consorts [SA] ne sauraient démontrer une occupation de l'intégralité du terrain car ils ne concernent pas le surplus de la parcelle en cause et ne sauraient conférer aux consorts [SA] un titre de propriété sur ce terrain, ni même démontrer une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaires, depuis plus de trente ans.
Ils rappellent que c'est par erreur que le terrain de 19.313 m2 existe sous la référence cadastrale AR no [Cadastre 11] et que le procès-verbal No 2718 G visant à créer la parcelle AR no [Cadastre 11] a fait l'objet d'un rejet définitif total par le service de la publicité foncière le 8 novembre 2005. Le fait que des documents fiscaux aient été édités au nom de [SA], pour une parcelle AR no [Cadastre 11], ne fait pas pour autant de Monsieur [SA] le propriétaire de la totalité du terrain litigieux pour une surface de 19.313 m².
Selon les intimés, les consorts [SA] produisent également des avis de taxes foncières établis au nom de la succession de [SA] [KT], portant sur les années 2008, 2009, 2016, 2017, 2018. Néanmoins, les ayants-droit de la succession [SA] étant propriétaires d'une portion de terrain d'une surface de 4.872 m2, ils sont nécessairement redevables d'une imposition à ce Titre.
Les avis d'imposition ne précisent en tout état de cause pas l'assiette d'imposition sur laquelle ils portent, et sont, en toute hypothèse, antérieurs à trente ans. Ils considèrent en outre que le défaut de paiement des taxes foncières contribue à démontrer qu'ils n'ont pas agi à titre de propriétaires de la parcelle en cause. Les intimés produisent un constat d'huissier établissant que la parcelle cadastrée par erreur Section AR numéro [Cadastre 11] est inoccupée et non clôturée, que la végétation est abondante, révélant une absence totale d'occupation et d'entretien du terrain appartenant aux ayants-droit de Madame [N] (Pièce no 8 des intimés).
Ceci étant exposé,
Pour démontrer la continuité de la possession de la totalité des parcelles litigieuses, les appelants produisent de nombreuses attestations.
Ils font valoir que leurs auteurs ont d'abord cultivé ces parcelles en cannes à sucre et produits maraîchers, puis, à la suite d'un cyclone ayant détruit leur maison, ils ont construit une maison au même lieu de celle qu'occupait Madame [JD] [N] dont l'emplacement figure sur le plan d'arpentage (Pièce 1 des appelants).
Mais, en raison du long temps écoulé depuis les années 1932 à 1962, les appelants admettent qu'ils ne sont pas en mesure de justifier les faits matériels et actes juridiques par lesquels leurs parents et aïeux ont accompli des actes traduisant leur volonté de se comporter comme les seuls propriétaires du terrain.
Ils plaident néanmoins que personne, autre que les époux [KU] [KT] [SA] – [XK] [IJ] ou leurs héritiers n'aurait occupé ces parcelles ni les aurait revendiquées.
Selon les appelants, le plan daté du 15 janvier 1965 (Pièce No 4) établit qu'après le décès de [XK] [IJ], Veuve de [KU] [SA], ses huit enfants ont confié au géomètre [AF] la mission de faire un relevé des biens immobiliers qu'ils recevaient en héritage, et de leur présenter un plan de partage en huit lots.
Cependant, le plan de partage dressé le 15 janvier 1965, invoqué par les appelants pour justifier de la possession continue de l'ensemble de la parcelle, d'une superficie totale de 18.850 m2, contredit leur allégation car la parcelle partagée en huit lots représente seulement une superficie de 5.110 m² (Pièce No 4 des appelants).
La pièce No 6 des appelants, présentée à tort comme la « matérialisation sous la forme d'une unité foncière des deux terrains cadastrés AR o [Cadastre 10] et AR no [Cadastre 12] », est datée du 13 septembre 2005, soit plus de 40 ans après le plan d'arpentage dressé le 15 janvier 1965. Elle ne permet pas d'établir une possession continue entre 1931 et 1961.
Les extraits cadastraux versés aux débats concernent une parcelle No AR [Cadastre 11] qui n'a pas été constituée juridiquement. En outre, ils concernent des périodes postérieures à celle comprise entre 1931 et 1961.
Le compromis de vente dressé par Maître [C] désigne la parcelle vendue comme étant une portion de 14.209 m² à prendre dans la parcelle AR [Cadastre 11], d'une contenance de 19.313 m². Il y est stipulé que le bien est matérialisé en teinte jaune au plan de bornage établi par la SARL OIT le 16 juillet 2018 tandis qu'un extrait de plan cadastral de la parcelle AR [Cadastre 11] est annexé.
Ces mentions sont en contradiction avec la réalité du procès-verbal de bornage et de reconnaissance de limites (pièce No 14 de la SCCV [Localité 36]) qui s'est achevé par des procès-verbaux de carence.
De plus, la lecture du plan de bornage préconisé révèle aussi une difficulté relative à l'hypothèse que la parcelle acquise par les époux [SA] en 1924 aurait été morcelée en deux portions de part et d'autres du chemin traversant la parcelle initiale, ce qui ne résulte nullement de l'acte de vente en question.
En effet, le géomètre présente le fonds des héritiers [SA], d'une superficie de 4872 m² comme étant située au Nord-Est de la parcelle pour 3034 m² et au Nord-Ouest pour une surface de 1838 m², semblant ainsi faire correspondre l'acte de vente du 23 mai 1924 avec la réalité observée sur le terrain litigieux.
Or, il est peu crédible de considérer que les époux [SA] ont voulu acquérir auprès de Madame [N] en 1924 une parcelle de 4872 m² dont l'assiette aurait été dissociée en deux éléments, option qui ne résulte d'aucun élément versé aux débats. Il n'existe non plus aucun indice corroborant ce fait en analysant les autres parcelles vendues par Madame [N] avant son décès.
D'ailleurs, le plan cadastral annexé à la demande de permis d'aménager, intitulé PA 97441819D0001 (pièce No 1 de la SCCV [Localité 36]) représente une la parcelle acquise par le requérant comme étant bien insérée au milieu d'une large parcelle, entre celle située au Nord-Est d'une superficie manifestement plus vaste que celle présentée dans le plan de bornage et d'une parcelle plus petite située au Nord-Est, correspondant aux habitations actuelles d'une partie des héritiers [SA]
De plus, le rapport de l'IRFR du 9 mai 2019, validé par Monsieur [ZV] (pièce No 9 de la SCCV) précise en page 4 que « l'acte rectificatif a également permis la publication d'un document d'arpentage contenant la division cadastrale des parcelles AR [Cadastre 10] et AR [Cadastre 12] afin de les réattribuer aux bon propriétaires. » Il en conclut que la nouvelle division cadastrale apparaît désormais comme la scission de la parcelle AR [Cadastre 10] en deux parcelles AR [Cadastre 19] et AR [Cadastre 20] et de la parcelle AR [Cadastre 12] devenant AR [Cadastre 21] et AR [Cadastre 22], chacune des deux parcelles ainsi divisées étant attribuée respectivement au Héritiers [N] et aux Héritiers [SA].
Or, le plan cadastral figurant au dossier des appelants (Pièce no 1) au verso du plan d'arpentage de 1919, indique qu'il a été rédigé à partir du plan d'arpentage réalisé par OIT le 19 juin 2018.
Cette seule mention établit que le géomètre OIT a retenu, seulement quelques semaines après le rapport de l'IRFR, le plan d'arpentage évoqué dans le rapport en se fondant sur l'acte notarié rectificatif intervenu pourtant postérieurement le 15 juillet 2019.
De surcroît, deux projets d'état des lieux ont été réalisés par OIT pour définir l'emprise de la parcelle nommée faussement AR [Cadastre 11] (pièce No 34 des appelants). Chacun des projets présente des parcelles différentes pour les héritiers [SA], dont un exemplaire retient bien une parcelle unifiée de 4872 m² au Nord-Est et une parcelle de 1838 m² au Nord-ouest, ce qui tend à confirmer qu'aucune certitude ne résultait des travaux de ce géomètre.
Du côté des appelants, le projet établi en 1987 par le Cabinet [AF] (pièce no 34 des appelants), démontre que les Héritiers [SA] avaient prévu de se partager la totalité de la parcelle entre cinq personnes : M. [DI] [LO], Mme [X] [JE], Mme [J] [SA], Mme [OP] [DR] et Melle [T] [SA] pour une superficie totale à répartir de 18.850 m² dont 7.509 m² de ravine et 270 m² de chemin en indivision.
Le nouveau plan de bornage et de partage, réalisé par Monsieur [AF] de nouveau, qui a été réitéré en 2004 et signé par les Héritiers [SA] mais s'est aussi achevé par un procès-verbal de carence en mars 2007 (pièce No 36 des appelant) en raison d'un refus de validation par Monsieur [AL] [JE] en 2006 et de la carence de Madame [TM] [SA] que devait faire signer Madame [T] [IK].
Les Consorts [SA] sont présentés alors comme les propriétaires des parcelles cadastrées AR [Cadastre 10], AR [Cadastre 12], AR [Cadastre 26], AR [Cadastre 27] et AR [Cadastre 28], sans que l'origine des titres de propriété ne résulte de la lecture du plan et du procès-verbal de bornage.
Ce plan reprend une surface de 18.046 m² en présentant les constructions édifiées sur la parcelle dont l'attribution était envisagée pour les Héritiers [LO] issus de la succession de Mme [AB] [SA].
Sur l'occupation par les Héritiers [SA] :
Le constat d'huissier dressé le 9 février 2018 à la requête des Héritiers [N] mentionne qu'une partie de la parcelle est bien occupée par les Héritiers [SA] tandis que la partie centrale de la parcelle définie comme « AR [Cadastre 11] » par l'huissier instrumentaire, est inoccupée et non clôturée.
Cependant, s'agissant d'une partie de terre en friche avec une végétation abondante, l'absence d'entretien de ce terrain ne constitue pas à elle seule la preuve d'un abandon ou d'une non occupation.
Les attestations versées aux débats permettent de corroborer les prétentions des Héritiers [SA].
Ainsi, l'attestation datée du 24 février 2020, rédigée par Madame [YE] [FH] Pièce No (23 des appelants) indique que ce témoin, née en 1965, a résidé sur un des terrains voisins de l'unité foncière litigieuse et avoir toujours fréquenté la famille [SA] depuis l'âge de 12 ans, soit depuis 1977 au moins sans aucune discontinuité.
Madame [II] [NW] (Pièce no 24), née en 1944, déclare être venue vivre dans le quartier en 1976 lorsqu'elle a acquis un bien immobilier dans la rue Lebreton, et avoir toujours connu la famille [SA] sur le terrain litigieux, confirmant ainsi une possession paisible, non équivoque, à titre de propriétaire depuis cette date.
Monsieur [WS] [MI] (pièce No 28), atteste que, né en 1971 ? il a toujours vu la famille [LO] (les Héritiers [SA]), occuper le terrain (AR [Cadastre 12]), borné au sien.
L'attestation de Monsieur [KU] [PI] (Pièce No 29 des appelants) permet de retenir que ce témoin, né en 1950, témoigne que les Héritiers [SA] (qu'il nomme la famille [LO]C) ont toujours occupé le terrain situé à côté du sien (c'est-à-dire AR [Cadastre 12]) et évoque une possession du bien depuis plus de 30 ans.
Madame [FH] [VB] (Pièce No 30) atteste qu'elle s'est installée à la [Localité 36] de [Localité 34] depuis 1995, sur une parcelle voisine de celle des Consorts [LO] (Héritiers [SA]). Depuis son plus jeune âge, elle connaissait cette famille qui vivait sur la parcelle contigüe.
Enfin, l'attestation du 20 février 2020, de Madame [I] (Pièce No 32 des appelants) confirme que ce témoin, né en 1943, ayant résidé dans le quartier en cause depuis « 57 ans » a toujours connu la famille [LO] (Héritiers [SA]) occuper la parcelle litigieuse.
Toutefois, la plupart de ces attestations manquent de précision sur l'étendue exacte de la parcelle occupée par les Héritiers [SA].
Sur la demande d'annulation de l'acte rectificatif contenant apport partiel d'actifs de la société GROUPE BOURBON à la société CBO TERRITORIA :
Les appelants affirment dans leurs écritures qu'ils ont découvert, à la réception de l'acte rectificatif litigieux avait été dressé avec l'intervention de la Sarl «C.G.O.I», agissant en qualité de mandataire « des héritiers la succession [N]», mais aussi sous la fausse affirmation qu'elle était aussi le mandataire "des héritiers de la succession des époux [SA] [KU] [KT]", en exécution desquels :
Premièrement, elle a revendiqué,
- la propriété de la parcelle cadastrée AR numéro [Cadastre 10], comme étant, pour partie, la parcelle acquise par les époux [SA] le 8 mai 1924 (v. pièce 2) ;
- la propriété de la parcelle AR no [Cadastre 12], comme étant, avec le surplus du terrain AR no 93, le terrain des héritiers de la « succession [N] ?? [voir page 4 de l'acte] ;
Deuxièmement, qu'elle a fait dresser- par la société OIT, géomètre (16) - un plan de division de leur unité foncière en quatre parcelles à enregistrer sous les références cadastrales AR no [Cadastre 19], AR no [Cadastre 20], AR no [Cadastre 21] et AR no [Cadastre 22] et le plan annexé [voir pages 4 et 5 de l'acte] ;
Troisièmement, qu'elle a déclaré au notaire instrumentaire [voir page 5 de l'acte] que :
o Les terrains AR no [Cadastre 20] et no [Cadastre 22] que figure le plan qu'il lui a remis, appartiennent à la « succession [N] ?? et que les autres désignés sous les références AR no [Cadastre 19] (3a 33ca) et AR no [Cadastre 21] (19a 21ca) sont la propriété des consorts [SA] alors qu'ils ne lui ont donné aucun mandat.
La société CGOI expose quant à elle avoir été mandatée par le notaire des Héritiers [SA], Maître [VV] [VA], le 24 juin 2016, pour procéder à l'établissement de la dévolution successorale résultant du décès de Monsieur [KU] [KT] [SA], survenu le [Date décès 16] 1963, dans le cadre du projet de la vente de la parcelle AR no [Cadastre 11] au profit de Monsieur [VW], les Consorts [SA], parfaitement conscients de ce qu'ils ne pourraient justifier d'aucun droit sur le bien précité, essayant ainsi de se faire titrer.
Ceci étant exposé,
A partir des éléments historiques relatés par les parties, la cour observe que Maître [C], notaire chargée de la succession [SA], a adressé un courrier daté du 4 juin 2019 à Maître [YY], le notaire chargé de dresser l'acte d'apport partiel d'actifs par la société GROUPE BOURBON à la société CBO TERRITORIA.
Dès le 12 juin 2019, Maître [YY] alertait la société CBO TERRITORIA et préconisait la rédaction d'un acte rectificatif afin d'exclure les parcelles AR [Cadastre 10] et AR [Cadastre 12] de ces apports. Il expliquait que « lors de la mise en place du cadastre, les propriétés respectives de Mme [N] et M. [SA] ont été englobées dans les parcelles AR [Cadastre 10] et AR [Cadastre 12] ». Par le même courrier, le notaire annonçait qu'un document d'arpentage serait établi aux frais des ayants-droit [N]-[SA], lequel serait aussi soumis à la signature de CBO TERRITORIA (Pièces no 1 et 2 de CBO).
Il résulte aussi des pièces versées aux débats que, depuis qu'elle a été informée par le notaire, la société CBO TERRITORIA a toujours admis qu'elle n'est pas propriétaire des parcelles AR No [Cadastre 10] et AR No [Cadastre 12], confirmant que c'est à la suite d'une erreur que, le 15 septembre 2004, ces deux parcelles ont été incluses dans les opérations d'apport partiel d'actifs consentis par la société BOURBON à la société CBO TERRITORIA.
Ainsi, en procédant à la rectification de l'acte authentique contesté par les Héritiers [SA], la Société CBO TERRITORIA n'a fait qu'abandonner légitimement les parcelles sur lesquelles elle ne revendique aucun droit.
Or, les appelants, en agissant pour annuler cet acte, semblent s'opposer inutilement à l'abandon justifié de ces parcelles par la société CBO TERRITORIA.
Si leur demande était accueillie, la société CBO serait maintenue en qualité de propriétaire des parcelles cadastrées AR [Cadastre 10] et AR [Cadastre 12] alors qu'elle ne les revendique pas et contredit aussi la revendication des Héritiers [SA].
Mais cet acte dressé le 15 juillet 2019, qui se présente comme un simple acte rectificatif de l'acte d'apport partiel entre la SARL GROUPE BOURBON ET la SARL CBO TERRITORIA, crée en réalité de nouveaux effets juridiques à l'égard des tiers, en particulier ceux qui sont les véritables propriétaires des parcelles intégrées à tort dans les biens transférés par l'acte authentique rectifié du 7 février 2005, publié le 2 mars 2005 au Service de la publicité foncière de Saint-Denis, Volume 2005 P, numéro 1675.
En effet, après l'exposé de l'historique des opérations de transfert, l'acte authentique contesté, en page 5, contient une clause « d'affectation des parcelles objet du rectificatif », mentionnant que les parcelles AR [Cadastre 20] et AR [Cadastre 22], issues de la division de la parcelle AR [Cadastre 10], restent la propriété de Madame [N] [JD] [AY] [F], tandis que les parcelles AR [Cadastre 19] et AR [Cadastre 21], issues de la division de la parcelle AR No [Cadastre 12] restent la propriété des époux [SA], le tout en vertu de la vente du 28 mai 1924.
Au surplus, l'acte litigieux ne mentionne pas que la société CGOI y serait intervenue au titre d'un mandat donné par les Consorts [SA] contrairement à ce qu'ils prétendent. En effet, en page 4 de l'acte, relatif à l'historique des faits, une mention erronée indique que Monsieur [ZV], généalogiste successoral, est le mandataire des héritiers des successions des époux [SA] et de Madame [N].
Même si cette mention erronée est critiquable en raison de l'absence de mandat donné par les appelants au cabinet de généalogie, il est aussi établi que celle-ci a bien agi sur mandat du notaire des Consorts [SA], notamment en alertant le notaire ayant dressé l'acte de cession des actifs de la société GROUPE BOURBON en faveur de la société CBO TERRITORIA.
De l'ensemble de ces éléments confus, la cour retient la nécessité d'ordonner une expertise contradictoire afin de lui permettre de statuer en pleine connaissance de cause, les informations apportées par les parties étant soit erronées, soit parcellaires.
Ainsi, aucune des parties ne peut préciser l'assiette des parcelles qu'ils revendiquent, sauf à soutenir pour les Consorts [SA] qu'ils sont devenus propriétaires de la totalité de la parcelle appartenant encore au patrimoine de Madame [F] [N] à son décès en 1931.
De plus, la société CBO TERRITORIA ne produit pas l'acte initial de transfert d'actifs avec la société BOURBON du 25 février 2005 alors que l'acte rectificatif attaqué mentionne que les parcelles litigieuses y figuraient, ce que la cour ne peut pas vérifier.
A cet égard, aucune des parties n'apporte de précisions sur les causes éventuelles de l'erreur d'affectation de la parcelle dénommée AR [Cadastre 11] sans comprendre comment le cadastre a pu créer administrativement cette parcelle.
Au surplus, la cour observe que Maître [VA], agissant pour le compte des Héritiers [SA] appartient à la même SCP que Maître [R] [C], qui a passé le compromis de vente entre les Héritiers [N] et la SCCV [Localité 36], ce qui peut expliquer les interrogations des Héritiers [SA] qui reprochent à la SARL CGOI d'avoir revendiqué un mandat de leur part.
Enfin, les attestations produites par les parties et les différents plans versés aux débats devraient permettre de préciser les assiettes des parcelles litigieuses et de fixer les emprises des constructions qui y sont édifiées, ce qu'aucune des parties n'a pu proposer.
En application des articles 143 et 144 du CPC, le juge peut ordonner une expertise en tout état de cause, à la demande des parties ou d'office sans avoir à solliciter les observations de celles-ci.
En conséquence, en application des articles 7, 8 et 10 du code de procédure civile, la cour décide d'ordonner avant dire droit une expertise judiciaire confiée à deux experts dont l'un sera extérieur au ressort de la cour d'appel, compte tenu des nombreuses difficultés constatées dans la réalisation du cadastre mais aussi dans l'interprétation des titres en cause, y compris celui attaqué du 15 juillet 2019.
Compte tenu des nombreuses questions soulevées, le délai d'exécution de l'expertise sera exceptionnellement allongé tandis que les frais de l'expertise seront partagés à égalité en quatre parts revenant aux Héritiers [SA] pour un quart, aux Héritiers [N] pour un quart, à la SCCV [Localité 36] pour un quart, au Cabinet CGOI pour un quart.
Conformément aux prescriptions de l'article 281 du code de procédure civile, si les parties viennent à se concilier, l'expert constate que sa mission est devenue sans objet ; il en fait rapport au juge.
Les parties peuvent demander au juge de donner force exécutoire à l'acte exprimant leur accord.
Toutes les demandes seront réservées.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par décision réputée contradictoire et mixte
INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a accueilli les fins de non-recevoir relatives ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés :
DECLARE RECEVABLE la demande d'annulation de l'acte authentique rectificatif dressé le 15 juillet 2019 ;
DECLARE RECEVABLES les demandes des intervenants volontaires, ès qualité d'héritiers de la succession [N] ;
Statuant à nouveau et AVANT DIRE DROIT,
REVOQUE l'ordonnance de clôture ;
ORDONNE une expertise confiée à DEUX experts
1/ -2019 [MG] [FG]
Expert inscrit sur la liste de la Cour de cassation
[Adresse 30]
Tél : [XXXXXXXX01] - Fax : [XXXXXXXX02] - Mail :
[Courriel 38]
2/ M. [P] [KU]
Expert inscrit sur la liste de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion
[Adresse 8] - [Localité 33]
Dit qu'après acceptation, l'expert aura pour mission de :
- se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission, en particulier le plan de bornage,
- se rendre sur place à [Localité 34], [Localité 36] ;
- visiter les lieux,
1/ Sur l'occupations des lieux :
- Relater l'historique de la parcelle initialement cédée par Madame [EL] [F] [N] le 19 mai 1924, à Monsieur [KU] [KT] [SA] et son épouse, Madame [XK] [IJ] ;
- Préciser l'évolution des références cadastrales de la parcelle litigieuse et de la parcelle acquise par les époux [SA] en 1924, notamment en tenant compte de toutes les tentatives de partage et de numérotation ou de division;
- Présenter l'état de la parcelle, notamment en décrivant l'implantation des constructions actuelles en indiquant les conditions d'installation des occupants (notamment période approximative de leur établissement) ;
- Présenter l'état actuel de la partie centrale de la parcelle litigieuse ;
2/ Sur l'historique des titres :
- Etablir la chronologie des événements ayant conduit au compromis de vente entre les Héritiers [N] et la SCCV [Localité 36] ;
- Préciser le rôle de chacun des acteurs ayant conduit à l'acte rectificatif de transfert d'actifs entre la société CBO TERRITORIA et la SARL BOURBON en analysant l'acte initial de transfert daté du 25 février 2005 ;
3/ Sur l'emprise des constructions :
- Présenter un schéma ou un plan actualisé destiné à déterminer les parties inoccupées de la parcelle initiale d'environ 19.000 m² ;
- Décrire le cas échéant les travaux réalisés par la SCCV [Localité 36] en précisant l'assiette sur laquelle elle a procédé à des travaux ;
4/ Fournir tous éléments techniques et de fait de nature à permettre, le cas échéant, à la juridiction compétente, de déterminer les responsabilités éventuellement encourues et d'évaluer, s'il y a lieu, tous les préjudices subis ;
Dit que l'expert effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile, qu'il pourra, conformément aux dispositions de l'article 278 du code de procédure civile, s'adjoindre d'initiative un sapiteur dans une spécialité distincte de la sienne,
Dit qu'en cas d'empêchement ou de refus de l'expert, il sera procédé à son remplacement par ordonnance sur requête ;
Dit qu'en cas d'application de l'article 281 du code de procédure civile, si les parties venaient à se concilier, l'expert constatera que sa mission est devenue sans objet et en fera rapport à la cour ou au juge chargé du contrôle des expertises ;
Fixe à la somme de 8.000 euros la provision à valoir sur la rémunération des deux experts qui devra être consignée à parts égales entre les Héritiers [SA], les Héritiers [N], la SCCV [Localité 36], le Cabinet CGOI, entre les mains du régisseur d'avances et de recettes de la cour d'appel, dans le délai de SIX SEMAINES à compter de la présente décision, sans autre avis et accompagnée d'une copie de la présente décision ;
Dit que les deux experts devront dresser leur rapport et le déposer au greffe dans les DOUZE MOIS de leur saisine ;
Désigne le magistrat chargé du contrôle des expertises pour contrôler l'expertise et à défaut tout autre magistrat désigné par l'ordonnance de service ;
Renvoie l'affaire à la mise en état du 08 décembre 2022 à 9h00
RESERVE TOUTES LES DEMANDES
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Madame Alexandra BOCQUILLON, faisant fonction de greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE signé LE PRÉSIDENT
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CAPP/JURITEXT000046991421.xml | AFFAIRE : No RG 21/00553 - No Portalis DBWB-V-B7F-FQ3K
Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Pole social du TJ de SAINT DENIS en date du 04 Mars 2021, rg no 20/00704
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANTE :
S.A.S. GRANDS TRAVAUX OCEAN INDIEN prise en la personne de son représentant en exercice
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentant : Me Céline CAUCHEPIN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
La caisse générale de sécurité sociale de la Réunion
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentant : Me Isabelle CLOTAGATIDE KARIM de la SCP CANALE-GAUTHIER-ANTELME-BENTOLILA, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 mars 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Nadia HANAFI, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 9 juin 2022 mise à disposition prorogée au 13 juillet 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 JUILLET 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Par lettre recommandée avec avis de réception du 15 octobre 2020 reçue au pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion le 16 octobre 2020, la société GTOI a contesté une décision de rejet implicite de la commission médicale de recours amiable de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion qui, par décision du 18 mars 2019, avait fixé à 15% le taux d'incapacité permanente partielle de l'un de ses salariés, à savoir Monsieur [O] [R] [S], résultant d'une maladie professionnelle.
2. Le tribunal a ordonné une consultation médicale sur pièces confiée au Dr. [U] [Z], dont le rapport, déposé le 19 décembre 2020, conclut à un taux d'incapacité permanente partielle de 15%.
3. Par jugement du 4 mars 2021, le tribunal a :
- dit que le taux d'incapacité permanente partielle résultant de la maladie professionnelle subie par Monsieur [O] [R] [S] est maintenu à 15%,
- dit que ce taux est opposable à son employeur, la société GTOI,
- condamné la société GTOI aux entiers dépens,
- débouté la société GTOI de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les frais de consultation seront pris en charge par la caisse d'assurance maladie,
4. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 29 mars 2021, la société GTOI a interjeté appel de cette décision.
5. Les parties ont été convoquées par lettre recommandée avec avis de réception du 1er avril 2021 à l'audience du 5 octobre 2021.
6. L'affaire a été plaidée à l'audience du 22 mars 2022 et mise en délibéré au 9 juin 2022, prorogé au 27 juin 2022.
7. La société GTOI déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 5 octobre 2021, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris,
- statuant à nouveau,
- dire et juger que le taux d'IPP de 15% alloué à Monsieur [O] [R] [S] dans les suites de son accident du travail du 11 juillet 2016 a été surévalué par le médecin conseil de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion,
- ce faisant et statuant à nouveau sur le taux d'lPP,
- à titre principal,
- entériner le rapport du Dr. [D] [G] en ce qu'il considère que le taux d'lPP de 15% alloué à Monsieur [O] [R] [S] dans les suites de son accident du travail du 11 juillet 2016 est disproportionné au regard des lésions déclarées,
- en conséquence,
- juger que dans les rapports entre la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion et elle, le taux d'IPP de 15% était injustifié et aurait dû être de 8% au plus, avec toutes ses suites et conséquences de droit,
- à titre subsidiaire,
- ordonner une expertise judiciaire, à la charge de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion, afin de déterminer le taux d'incapacité permanente partielle de Monsieur [O] [R] [S],
- y ajoutant,
- condamner la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion à lui payer la somme de 2.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
8. À l'appui de ses prétentions, la société GTOI fait en effet valoir :
- que l'état séquellaire mis en évidence par les pièces transmises ne saurait justifier l'attribution d'un taux d'incapacité permanente partielle qui excéderait 8%,
- que, le cas échéant, en l'absence d'expertise opposable, une mesure d'expertise judiciaire s'impose.
9. La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 6 décembre 2021, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris,
- débouter la société GTOI de toutes ses demandes, fins et conclusions articulées à son encontre.
10. À l'appui de ses prétentions, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion fait en effet valoir :
- que l'évaluation de l'incapacité permanente partielle doit se faire en lecture du barème indicatif d'invalidité annexé à l'article R. 434-32 du code de la sécurité sociale,
- que le médecin-conseil ainsi que le médecin expert sont parvenus aux mêmes conclusions, à savoir que Monsieur [O] [R] [S] présentait des séquelles de lombalgies avec persistance de douleurs et impotence fonctionnelle justifiant l'attribution d'un taux d'incapacité permanente de 15%.
11. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées ainsi qu'à la note d'audience figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'incapacité permanente partielle
12. L'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale dispose en son 1er alinéa que "le taux de l'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité".
13. L'article R. 434-32 précise que la caisse primaire se prononce sur l'existence d'une incapacité permanente au vu de tous les renseignements recueillis et des barèmes indicatifs d'invalidité dont il est tenu compte pour la détermination du taux d'incapacité permanente d'une part en matière d'accidents du travail et d'autre part en matière de maladies professionnelles.
14. L'annexe I de l'article R. 434-32 prescrit que "les éléments dont le médecin doit tenir compte, avant de proposer le taux médical d'incapacité permanente, sont donc :
1o La nature de l'infirmité. Cet élément doit être considéré comme la donnée de base d'où l'on partira, en y apportant les correctifs, en plus ou en moins, résultant des autres éléments. Cette première donnée représente l'atteinte physique ou mentale de la victime, la diminution de validité qui résulte de la perte ou de l'altération des organes ou des fonctions du corps humain. Le présent barème doit servir à cette évaluation.
2o L'état général. Il s'agit là d'une notion classique qui fait entrer en jeu un certain nombre de facteurs permettant d'estimer l'état de santé du sujet. Il appartient au médecin chargé de l'évaluation d'adapter en fonction de l'état général, le taux résultant de la nature de l'infirmité. Dans ce cas, il en exprimera clairement les raisons.
L'estimation de l'état général n'inclut pas les infirmités antérieures - qu'elles résultent d'accident ou de maladie - ; il en sera tenu compte lors de la fixation du taux médical.
3o L'âge. Cet élément, qui souvent peut rejoindre le précédent, doit être pris en considération sans se référer exclusivement à l'indication tirée de l'état civil, mais en fonction de l'âge organique de l'intéressé. Il convient ici de distinguer les conséquences de l'involution physiologique, de celles résultant d'un état pathologique individualisé. Ces dernières conséquences relèvent de l'état antérieur et doivent être estimées dans le cadre de celui-ci.
On peut ainsi être amené à majorer le taux théorique affecté à l'infirmité, en raison des obstacles que les conséquences de l'âge apportent à la réadaptation et au reclassement professionnel.
4o Facultés physiques et mentales. Il devra être tenu compte des possibilités de l'individu et de l'incidence que peuvent avoir sur elles les séquelles constatées. Les chiffres proposés l'étant pour un sujet normal, il y a lieu de majorer le taux moyen du barème, si l'état physique ou mental de l'intéressé paraît devoir être affecté plus fortement par les séquelles que celui d'un individu normal.
5o Aptitudes et qualification professionnelles. La notion de qualification professionnelle se rapporte aux possibilités d'exercice d'une profession déterminée. Quant aux aptitudes, il s'agit là des facultés que peut avoir une victime d'accident du travail ou de maladie professionnelle de se reclasser ou de réapprendre un métier compatible avec son état de santé".
15. L'annexe poursuit :
"3. Infirmités antérieures.
L'estimation médicale de l'incapacité doit faire la part de ce qui revient à l'état antérieur, et de ce qui revient à l'accident. Les séquelles rattachables à ce dernier sont seules en principe indemnisables. Mais il peut se produire des actions réciproques qui doivent faire l'objet d'une estimation particulière.
a. Il peut arriver qu'un état pathologique antérieur absolument muet soit révélé à l'occasion de l'accident de travail ou de la maladie professionnelle mais qu'il ne soit pas aggravé par les séquelles. Il n'y a aucune raison d'en tenir compte dans l'estimation du taux d'incapacité.
b. L'accident ou la maladie professionnelle peut révéler un état pathologique antérieur et l'aggraver. Il convient alors d'indemniser totalement l'aggravation résultant du traumatisme.
c. Un état pathologique antérieur connu avant l'accident se trouve aggravé par celui-ci. Etant donné que cet état était connu, il est possible d'en faire l'estimation. L'aggravation indemnisable résultant de l'accident ou de la maladie professionnelle sera évaluée en fonction des séquelles présentées qui peuvent être beaucoup plus importantes que celles survenant chez un sujet sain. Un équilibre physiologique précaire, compatible avec une activité donnée, peut se trouver détruit par l'accident ou la maladie professionnelle".
16. Enfin, l'annexe précise :
"3.2 RACHIS DORSO-LOMBAIRE.
Si le rachis dorsal est un segment pratiquement rigide et participant peu aux mouvements, la pathologie traumatique du rachis lombaire est fréquente. Aussi, est-il indispensable de tenir compte des données rhumatologiques les plus récentes de la pathologie discale et non discale lombaire.
Pour éviter les interprétations erronées basées sur une fausse conception de l'image radiologique, il faut définir avec soin les données objectives de l'examen clinique et, notamment, différencier les constatations faites selon qu'elles l'ont été au repos ou après un effort.
L'état antérieur (arthroses lombaires ou toute autre anomalie radiologique que l'accident révèle et qui n'ont jamais été traitées antérieurement), ne doit en aucune façon être retenu dans la génèse des troubles découlant de l'accident.
Normalement, la flexion à laquelle participent les vertèbres dorsales et surtout lombaires est d'environ 60o. L'hyperextension est d'environ 30o, et les inclinaisons latérales de 70o. Les rotations atteignent 30o de chaque côté.
C'est l'observation de la flexion qui donne les meilleurs renseignements sur la raideur lombaire. La mesure de la distance doigts-sol ne donne qu'une appréciation relative, les coxo-fémorales intervenant dans les mouvements vers le bas. L'appréciation de la raideur peut se faire par d'autres moyens, le test de Schober-Lasserre peut être utile. Deux points distants de 15 cm (le point inférieur correspondant à l'épineuse de L 5), s'écartent jusqu'à 20 dans la flexion antérieure. Toute réduction de cette différence au-dessous de 5 cm atteste une raideur lombaire réelle.
Persistance de douleurs notamment et gêne fonctionnelle (qu'il y ait ou non séquelles de fracture) :
- Discrètes 5 à 15
- Importantes 15 à 25
- Très importantes séquelles fonctionnelles et anatomiques 25 à 40.
À ces taux s'ajouteront éventuellement les taux estimés pour les séquelles nerveuses coexistantes.
Anomalies congénitales ou acquises : lombosciatiques.
Notamment : hernie discale, spondylolisthésis, etc. opérées ou non. L'I.P.P. sera calculée selon les perturbations fonctionnelles constatées".
17. En l'espèce, les premiers juges ont considéré que Monsieur [O] [R] [S], né le [Date naissance 2] 1959, a travaillé comme ferrailleur au sein de la société GTOI et qu'il résulte notamment de la consultation médicale ordonnée par le tribunal, que le salarié présente une hernie discale L4-L5 sciatique gauche, avec boiterie modérée sans amyotrophie
ni quadricipitale ni des mollets, symptomatologie compatible avec un taux d'incapacité permanente de 15%. Il s'agit de séquelles d'une maladie professionnelle traitée orthopédiquement.
18. Le rapport du Dr. [Z] a été notifié le 9 janvier 2021 au Dr. [G], médecin désigné par la société GTOI. Ce dernier a pu le discuter puisqu'il a émis un mémoire le 14 janvier 2021 aux termes duquel il conteste les "modalités uniquement subjectives de sa détermination en l'absence de toute donnée objective d'examen clinique et notamment d'amyotrophie ou de modification de l'examen neurologique des membres inférieurs, en l'absence de toute donnée électromyographique, en l'absence soulignée de toute participation active de la victime à l'évaluation de son préjudice et en I'absence de tout traitement antalgique décrit au-delà de la date de la consolidation médico-légale". Il conclut à une incapacité permanente partielle de 8% "en référence au barème indicatif d'invalidité des accidents du travail et des maladies professionnelles sur la base de critères d'appréciation recueillis selon les règles de bonne pratique en usage de la profession".
19. Toutefois, le rapport du Dr. [Z] vient en complément de celui du médecin-conseil qui a confirmé "une lombalgie chronique invalidante algique majorée par les efforts, une irradiation radiculaire sur le trajet sciatique gauche confirmée cliniquement avec hernie foraminale gauche au contact de la racine L4 L5. La station debout prolongée est douloureuse, le patient est algique avec réveils nocturnes. Il prend régulièrement des antalgiques niveau 2. La participation active du patient est limitée par la douleur et l'examen passif suffit à confirmer (l'examen) clinique. Le traitement antalgique sera à l'évidence poursuivi après la consolidation devant ses symptômes évoluant depuis deux ans". Il a conclu à la "persistance des douleurs notamment et gêne fonctionnelle importantes" pour une incapacité permanente partielle de 15%.
20. La fixation de l'incapacité permanente partielle à 15% tant par le médecin-conseil que par l'expert judiciaire est compatible avec l'annexe rappelée plus haut (bas du barème pour les douleurs et gênes qualifiées d'importantes).
21. Sans qu'il soit utile de procéder à une nouvelle expertise puisqu'il est tenu compte des observations du Dr. [G] qui ne permettent pas de remettre en cause l'analyse du Dr. [Z], il conviendra de confirmer le jugement en toutes ses dispositions.
Sur les dépens
22. La société GTOI, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
23. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la partie condamnée aux dépens prend en charge les frais irrépétibles exposés par la partie adverse dans les proportions que le juge détermine.
24. En l'espèce, la société GTOI, partie condamnée aux dépens, n'est pas éligible à ces dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la société GTOI aux dépens d'appel,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, président de chambre, et par Mme Nadia HANAFI, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière, Le président,
|
CAPP/JURITEXT000046991435.xml | AFFAIRE : No RG 21/00836 - No Portalis DBWB-V-B7F-FRRH
Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de SAINT-DENIS en date du 21 Avril 2021, rg no 21/00411
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANT :
Monsieur [T] [L]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Robert FERDINAND, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA REUNION (C.G.S.S.R.)
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Patrice SANDRIN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Delphine GRONDIN, greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022 prorogé au 13 juillet 2022;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 Juillet 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Par acte d'huissier du 5 mars 2020, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion a fait délivrer à Monsieur [T] [L] une contrainte du 3 mars 2020 pour un montant de 77.514,00 € à laquelle ce dernier a fait opposition par courriers recommandés avec avis de réception des 16 et 20 mars 2020 devant le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Denis.
2. Par jugement du 21 avril 2021, le tribunal a :
- ordonné la jonction des affaires no 20/285 et no 20/287 au bénéfice du no 20/285,
- rejeté la demande de transmission de la question préjudicielle formulée par Monsieur [T] [L],
- débouté Monsieur [T] [L] de ses demandes,
- déclaré la mise en demeure valable et régulière,
- déclaré la contrainte valable et régulière,
- condamné Monsieur [T] [L] au paiement à la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion de la somme de 77.514,00 €,
- laissé les frais de signification de la contrainte et les frais nécessaires à son execution à la charge de Monsieur [T] [L],
- débouté Monsieur [T] [L] de sa demande au titre des dommages et intérêts,
- condamné Monsieur [T] [L] aux entiers dépens,
- condamné Monsieur [T] [L] au paiement à la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion d'une somme de 1.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté Monsieur [T] [L] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rappelé que la décision est exécutoire de droit à titre provisoire.
3. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 11 mai 2021, Monsieur [T] [L] a interjeté appel de cette décision.
4. Les parties ont été convoquées par lettre recommandée avec avis de réception du 14 mai 2021 à l'audience du 2 novembre 2021.
5. L'affaire a été plaidée à l'audience du 11 avril 2022 et mise en délibéré au 5 juillet 2022, prorogé au 13 juillet 2022.
6. Monsieur [T] [L] déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 22 février 2022, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- infirmer la décision attaquée en toutes ses dispositions,
- statuant à nouveau,
- dire non valides la mise en demeure et la contrainte délivrées,
- débouter la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion de sa demande en paiement de la somme de 77.514,00 € pour cette raison et en raison également de la prescription,
- condamner la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion aux entiers dépens.
7. À l'appui de ses prétentions, Monsieur [T] [L] fait en effet valoir :
- que la mise en demeure est irrégulière en raison de l'omission des mentions obligatoires des dispositions des articles L. 111-2 et L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration (absence de nom et de signature du directeur de l'organisme social),
- que l'annulation de la mise en demeure entraîne nécessairement celle de la contrainte,
- que la majorité des sommes contenues dans la contrainte sont frappées de prescription.
8. La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 29 mars 2022, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
- débouter Monsieur [T] [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
- condamner Monsieur [T] [L] au paiement de la somme de 2.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Monsieur [T] [L] aux entiers dépens, dont les frais de signification de la contrainte et de toutes les procédures accessoires.
9. À l'appui de ses prétentions, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion fait en effet valoir :
- que, si l'article R. 244-1 du code de la sécurité sociale régit l'envoi des mises en demeure, celle adressée au redevable doit préciser la dénomination de l'organisme de sécurité sociale qui l'a émise, mais aucun texte n'exige qu'elle soit signée par le directeur de cet organisme, ce qui est le cas du RSI,
- que la mise en demeure contenait toutes les précisions sur la période de
cotisation, sur les montants et sur les majorations de retard,
- que Monsieur [T] [L], qui a sollicité une demande de délai et effectué des paiements a, à chaque fois, interrompu la prescription.
10. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées ainsi qu'à la note d'audience figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la validité de la mise en demeure
11. L'article L. 111-2 du code des relations entre le public et l'administration prévoit que "toute personne a le droit de connaître le prénom, le nom, la qualité et l'adresse administratives de l'agent chargé d'instruire sa demande ou de traiter l'affaire qui la concerne ; ces éléments figurent sur les correspondances qui lui sont adressées. Si des motifs intéressant la sécurité publique ou la sécurité des personnes le justifient, l'anonymat de l'agent est respecté".
12. L'article L. 212-1 prévoit en son 1er alinéa que "toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci".
13. Toutefois, ces obligations ne sont pas prescrites à peine de nullité et aucun texte n'exige spécialement la signature du directeur de l'organisme de sécurité sociale dans la mise en demeure adressée au redevable.
14. En l'espèce, il importe peu que les 4 mises en demeure du 12 juillet 2011, la mise en demeure du 14 novembre 2011 et la mise en demeure du 13 février 2012 adressées à Monsieur [T] [L] ne soient pas signées du directeur de l'organisme émetteur, dès lors que le RSI est parfaitement identifié comme étant l'organisme demandeur, dont les coordonnées sont indiquées.
15. Bien que ce moyen ne soit pas repris en cause d'appel, il convient d'ajouter que les mises en demeure sont conformes aux dispositions de l'article R. 244-1 du code de la sécurité sociale puisqu'elles précisent "la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent".
16. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré régulières les mises en demeure adressées à Monsieur [T] [L].
Sur la validité de la contrainte
17. L'article R. 133-3 du code de la sécurité sociale dispose en son 1er alinéa que, "si la mise en demeure ou l'avertissement reste sans effet au terme du délai d'un mois à compter de sa notification, les directeurs des organismes créanciers peuvent décerner, dans les domaines mentionnés aux articles L. 161-1-5 ou L. 244-9, une contrainte comportant les effets mentionnés à ces articles. La contrainte est notifiée au débiteur par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception ou lui est signifiée par acte d'huissier de justice. La contrainte est signifiée au débiteur par acte d'huissier de justice ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. À peine de nullité, l'acte d'huissier ou la notification mentionne la référence de la contrainte et son montant, le délai dans lequel l'opposition doit être formée, l'adresse du tribunal compétent et les formes requises pour sa saisine".
18. En l'espèce, la contrainte du 3 mars 2020 délivrée pour un montant total de 77.514,00 € portant sur les cotisations des années 2008 à 2011, signifiée le 5 mars 2020 et faisant suite à des mises en demeure régulièrement adressées à Monsieur [T] [L], est également régulière.
19. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré régulière la contrainte signifiée à Monsieur [T] [L].
Sur la prescription
20. L'article L. 244-11, dans sa version antérieure à la loi no 2016-1827 du 23 décembre 2016, dispose que "l'action civile en recouvrement des cotisations ou des majorations de retard, intentée indépendamment ou après extinction de l'action publique, se prescrit par cinq ans à compter de l'expiration du délai imparti par les avertissements ou mises en demeure prévus aux articles L. 244-2 et L. 244-3".
21. L'article L. 244-3 du code de la sécurité sociale, dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 2017, prévoit que "les cotisations et contributions sociales se prescrivent par trois ans à compter de la fin de l'année civile au titre de laquelle elles sont dues. Pour les cotisations et contributions sociales dont sont redevables les travailleurs indépendants, cette durée s'apprécie à compter du 30 juin de l'année qui suit l'année au titre de laquelle elles sont dues".
22. Conformément au 3o du IV de l'article 24 de la loi no 2016-1827 du 23 décembre 2016, les dispositions qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent à compter du 1er janvier 2017 aux créances ayant fait l'objet de mises en demeure notifiées avant cette même date, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
23. Aux termes de l'article 2240 du code civil, "la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription".
24. En l'espèce, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion verse aux débats :
- les 4 mises en demeure du 12 juillet 2011, la mise en demeure du 14 novembre 2011 et la mise en demeure du 13 février 2012 portant sur les cotisations des années 2008 à 2011,
- une notification d'échéancier du 29 juillet 2015 suite à une demande de délais de paiement,
- une notification de déchéance des délais de paiement du 2 février 2016,
- la contrainte du 3 mars 2020 délivrée pour un montant total de 77.514,00 € (couvrant les périodes concernées par les 4 mises en demeure),
- la signification de cette contrainte effectuée le 5 mars 2020.
25. Seule la date du 29 juillet 2015 doit donc être considérée comme nouveau point de départ du délai de prescription dès lors qu'elle correspond à la reconnaissance de sa dette par Monsieur [T] [L] via l'adoption d'un échéancier, la preuve des paiements effectués en exécution de cet échéancier n'étant ensuite pas rapportée.
26. Par application des nouvelles dispositions sur la prescription, l'action en recouvrement des cotisations sociales, qui expirait initialement le 29 juillet 2020, s'est trouvée limitée par une prescription triennale à compter du 1er janvier 2017, soit jusqu'au 31 décembre 2019.
27. La signification de la contrainte du 3 mars 2020 ayant été effectuée le 5 mars 2020, soit au-delà du 31 décembre 2019, l'action de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion doit être considérée comme prescrite.
28. Le jugement sera infirmé pour le surplus et la cour, statuant à nouveau, déclarera prescrite l'action de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion.
Sur les dépens
29. La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion, partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
30. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la partie condamnée aux dépens prend en charge les frais irrépétibles exposés par la partie adverse dans les proportions que le juge détermine.
31. En l'espèce, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion, condamnée aux dépens et seule partie à en demander le bénéfice, n'est pas éligible à ces dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné la jonction des affaires no 20/285 et no 20/287 au bénéfice du no 20/285, rejeté la demande de transmission de la question préjudicielle formulée par Monsieur [T] [L] et déclaré régulières les 4 mises en demeure délivrées le 12 juillet 2011, la mise en demeure du 14 novembre 2011 et la mise en demeure du 13 février 2012 portant sur les cotisations des années 2008 à 2011, ainsi que la contrainte du 3 mars 2020 signifiée le 5 mars 2020,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau,
Déclare prescrite l'action de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion,
Condamne la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion aux dépens de première instance et d'appel,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, président de chambre, et par Mme Delphine GRONDIN, geffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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R.G : No RG 19/00055 - No Portalis DBWB-V-B7D-FDO6
COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS
ARRET DU 15 JUILLET 2022
Chambre civile TI
Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE SAINT-PIERRE en date du 17 SEPTEMBRE 2018 suivant déclaration d'appel en date du 14 JANVIER 2019 rg no 17/000557
APPELANTS :
Madame [O] [N] [A] épouse [B]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentant : Me Amel KHLIFI ETHEVE de la SELARL AMEL KHLIFI-ETHEVE ET ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/000424 du 04/02/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)
Monsieur [I] [E] [U] [B]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentant : Me Amel KHLIFI ETHEVE de la SELARL AMEL KHLIFI-ETHEVE ET ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/000425 du 04/02/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)
Monsieur [P] [H]
[Adresse 1]
[Localité 3] (HAUT-RHIN)
Représentant : Me Brigitte MAURO de la SELARL BRIGITTE MAURO - BÉATRICE FONTAINE, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
Clôture: 28 avril 2022
DÉBATS : en application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 27 Mai 2022 devant Monsieur Martin DELAGE, Président de chambre, qui en a fait un rapport, assisté de Mme Véronique FONTAINE, Greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 24 juin 2022. Le délibéré a été prorogé au 15 Juillet 2022.
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Monsieur Martin DELAGE, Président de chambre
Conseiller : Monsieur Cyril OZOUX, Président de chambre
Conseiller : Madame Nathalie COURTOIS, Présidente de chambre
Qui en ont délibéré
Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 15 Juillet 2022.
EXPOSE DE LA PROCEDURE
1. Aux termes d'un acte reçu par Maître [T] [G], notaire à [Localité 6], en date du 11 juillet 2012, Monsieur [P] [H] est propriétaire d'une parcelle de terrain à bâtir située au [Adresse 2], sur la commune de [Localité 5].
2. Monsieur [H] a autorisé Monsieur [I] [B] à entreprendre toutes les démarches relatives à l'acquisition, et à la construction d'une maison individuelle sur cette parcelle.
3. Monsieur [H] a acheté ce fonds afin de permettre à sa fille, Madame [O] [N] [A] épouse [B], et son gendre Monsieur [I] [E] [U] [B], d'y faire construire leur résidence principale avant qu'il leur en soit fait donation, en contrepartie du remboursement progressif du prêt immobilier contracté par Monsieur [H].
4. Suivant exploit de Maître [V] [Z], huissier de Justice, en date du 04 juillet 2017, Monsieur [P] [H] a attrait les époux [B] devant le tribunal d'instance de SAINT-PIERRE afin de faire valoir l'occupation sans droit ni titre des époux [B]
et solliciter tant la libération des lieux que le paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle
d'un montant de 1 000 €.
5. Par jugement en date du 17 septembre 2018, le Tribunal d'instance de SAINT-PIERRE a :
- Écarté l'exception de nullité de l'assignation soulevée par les époux [B] ;
- Déclaré recevable l'action aux fins de résiliation de bail introduite par M. [P] [H];
- Prononcé la résiliation du bail verbal conclu entre, d'une part, M. [P] [H]
et, d'autre part, M. [I] [B] et Mme [O] [A] épouse [B] relatif au
logement situé [Adresse 2], avec effet à ce jour ;
- Ordonné en conséquence à M. [I] [B] et Mme [O] [A] épouse [B]
et à tout occupant de leur chef de libérer les lieux dans le délai de quinze jours à compter de la
signification du présent jugement ;
- Dit qu'à défaut pour M. [I] [B] et Madame [A] épouse [B] d'avoir volontairement libéré les lieux dans ce délai, M. [P] [H] pourra faire procéder à leur expulsion ainsi qu'à celle de tout occupant de leur chef, deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux, y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique dans le respect des dispositions de l'article L. 412-1 du Code des procédures civiles d'exécution ;
- Dit que le sort des meubles restant dans les lieux loués sera alors réglé conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du Code des procédures civiles d'exécution ;
- Condamne M. [I] [B] et Mme [O] [A] épouse [B] à payer à M. [P] [H] une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant de 800 €, à compter du prononcé de la présente décision et jusqu'à la date de libération effective et définitive des lieux, remise des clés comprise ;
- Condamne in solidum M. [I] [B] et Mme [O] [A] épouse [B] aux
dépens de l'instance.
6. Les époux [B] ont interjeté appel de cette décision le 14 janvier 2019.
7. Avant dire droit, la Cour a ordonné une mesure de médiation, et confié cette mesure au centre de médiation des barreaux et solutions amiables, maison de l'avocat et du droit, [Adresse 4].
8. A la suite de cette médiation, les époux [B] demandent à la Cour de bien vouloir :
INFIRMER le jugement du Tribunal d'instance de SAINT-PIERRE en date du 17 septembre 2018, en ce qu'il a écarté l'exception de nullité de l'assignation, déclaré recevable l'action aux fins de résiliation de bail de Monsieur [P] [H] et ordonné l'expulsion des époux [B] ;
En conséquence, statuant à nouveau,
A titre liminaire :
PRONONCER la nullité de l'acte introductif d'instance de Monsieur [P] [H], en date du 04 juillet 2017 et DEBOUTER Monsieur [P] [H] de l'ensemble de ses demandes ;
A titre principal
HOMOLOGUER les points d"accord tels qu'ils ont été trouvés en médiation à savoir :
Les parties se sont réunies en médiation et ont trouvé des points d'accord qu'il convient d'homologuer :
Dans le cadre d'une location-accession, les époux [B] verseront à Monsieur [H] un loyer mensuel de 1 000 € qui constituera une épargne sur l'achat de la maison d'une valeur de 380 000 €.
Une fois le capital totalement versé, les époux [B] deviendraient propriétaires.
En cas de décès avant règlement total de la valeur de la maison, pour en devenir propriétaires, les époux [B] devront verser aux 2 autres enfants de Monsieur [H] les 2/3 du solde restant dû, toujours sous forme de loyer.
Si les époux [B] devaient être en retard dans le règlement de 2 loyers, ils s'engagent à quitter leur logement dans un délai de 90 jours après un commandement de payer, resté sans effet. Dans un délai maximal de 180 jours à compter de leur départ, Monsieur [H] reversera aux époux [B] les sommes épargnées par eux au titre des loyers qu'ils auront versés.
Un contrat de location-accession signé par Monsieur [H] et les époux [B] sera établi par un notaire. Un état des lieux sera réalisé par un huissier de justice et joint au contrat de location-accession. Les frais d'actes seront pris en charge pour moitié par chacune des parties.
A titre subsidiaire, sur le droit d'occupation :
ORDONNER la poursuite du contrat de location des époux [B] s'agissant uniquement du terrain situé au [Adresse 2], sur la commune de [Localité 5], et ainsi sans considération des constructions, en contrepartie d'un loyer mensuel d'un montant de 100 € à verser à Monsieur [H] ;
JUGER que le bail arrivera à expiration, à compter du remboursement intégral du prêt immobilier de Monsieur [H] en lien avec l'acquisition du terrain ;
A titre infiniment subsidiaire, si la libération des lieux est ordonnée:
ATTRIBUER la propriété des constructions édifiées sur le terrain situé au [Adresse 2], sur la commune de [Localité 5], au profit des époux [B] ;
CONDAMNER Monsieur [H] à verser aux époux [B] une somme de 190 000 € en remboursement des constructions édifiées ;
AUTORISER les époux [B] à opposer à Monsieur [H] un droit de rétention sur les constructions jusqu'à complet paiement de la somme de 190 000 € ;
FIXER l'indemnité mensuelle d'occupation à hauteur de 100 €, en l'absence de l'évaluation d'un Expert, à compter de la décision à intervenir ;
ACCORDER un délai de 06 mois aux époux [B] pour quitter les lieux à l'issue de l'exercice du droit de rétention ;
En toute hypothèse :
CONDAMNER Monsieur [P] [H] aux entiers dépens, outre les frais relatifs à l'estimation de l'office notarial à hauteur de 280 € ;
Faisant application des articles 35 et 37 de la loi 11o 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique,
CONDAMNER Monsieur [P] [H] â payer à la SELARL AMEL KHLIFI-ETHEVE une somme de 4 000 € (QUATRE MILLE EUROS) au titre des frais de défense.
9. Monsieur [P] [H] demande à la Cour de :
- DEBOUTER Monsieur [I] [B] et Madame [O] [A] épouse [B] de leur demande d'homologation de points d'accord.
- CONSTATER que Madame [O] [B] née [A] a manqué à son engagement contractuel envers Monsieur [H] et qu'elle ne bénéficie d'aucun droit au maintien dans sa maison.
- EN CONSEQUENCE,
CONFIRMER le jugement du Tribunal d'instance de SAINT PIERRE du 17 septembre 2018 en ce qu'il a :
- Ordonné en conséquence à M [I] [B] et Mme [O] [A] épouse [B] et à tout occupant de leur chef de libérer les lieux dans le délai de quinze jours à compter de la signification du présent jugement
- Dit qu'à défaut d'avoir volontairement libéré les lieux dans ce délai, M [H] pourra faire procéder à leur expulsion ainsi qu'à celle de tout occupant de leur chef, deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux, y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique dans le respect des dispositions de l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution
- Dit que le sort des meubles restant dans les lieux loués sera alors réglé conformément aux dispositions des articles L 433-1 et L 433-2 du code des procédures civiles d'exécution
- Condamné M [I] [B] et Mme [O] [A] épouse [B] à payer à M [P] [H] une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant de 800 euros à compter du prononcé de la présente décision et jusqu'à la date de libération effective et définitive des lieux, remise des clés comprise
- Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires
- Rejeté la demande au titre de l'article 700 du CPC
- Condamné in solidum M [I] [B] et Mme [O] [A] épouse [B] aux dépens de l'instance
Y AJOUTANT :
- ASSORTIR la condamnation d'avoir à libérer les lieux d'une astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir.
- CONDAMNER solidairement Monsieur [I] [B] et Madame [O] [A] épouse [B] au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du CPC et aux dépens de l'instance
- DEBOUTER Monsieur [I] [B] et Madame [O] [A] épouse [B] de toutes demandes plus amples ou contraires.
Vu les conclusions d'appel récapitulatives prises pour Monsieur [I] [B] et Madame [O] [A] épouse [B] déposées et notifiées par RPVA le 22 février 2022,
Vu les conclusions No 5 prises pour Monsieur [P] [H], déposées et notifiées par RPVA le 16 mars 2022,
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens et prétentions.
MOTIFS DE LA DECISION:
SUR LA RECEVABILITE DE L'ASSIGNATION:
10. Monsieur [I] [B] et Madame [O] [A] épouse [B] soutiennent qu'il y aurait lieu de constater la nullité de l'assignation pour vice de forme parce qu'elle ne contiendrait pas «les diligences entreprises en vue de parvenir à la résolution amiable du litige » visées à l'article 56 du code de procédure civile.
11. La Cour relève que dans son assignation Monsieur [H] a expliqué qu'il avait tenté de résoudre à l'amiable son litige, notamment par l'intermédiaire de son avocat, Me [R], dont il a produit les courriers.
12. En application des dispositions de l'article 127 du code de procédure civile, le juge peut proposer aux parties qui ne justifieraient pas de diligences entreprises pour parvenir à une résolution amiable du litige une mesure de conciliation ou de médiation.
13. La Cour a ordonné cette mesure de sorte que Monsieur et Madame [B] ne justifient d'aucun grief
14. Ce moyen entre en voie de rejet, la décision sera confirmée sur ce point.
SUR LA DEMANDE D'HOMOLOGATION DES POINTS D'ACCORD TROUVES EN MEDIATION:
15. Monsieur [H] a accepté de participer à une mesure de médiation. Il a aussi accepté de renoncer à sa demande d'expulsion si sa fille et son mari signaient avec lui un contrat d'accession à la propriété. S'agissant d'un acte obligatoirement notarié, il avait été convenu que les époux [B] demandent à un notaire de le rédiger.
16. Monsieur et Madame [B] ne justifient pas de cette démarche de sorte qu'aucun accord ne peut aboutir et la cour ne peut donner force exécutoire à un accord de principe dont les modalités n'ont pas été précisées et qui ne pourrait être exécuté.
17. Il ne sera pas fait droit à la demande d'homologation formée par les appelants.
SUR LA DEMANDE D'EXPULSION:
18. Dans son assignation du 4 juillet 2017 Monsieur [H] a exposé qu'il avait acquis un terrain à bâtir sur lequel il avait fait construire une maison à l'aide d'un emprunt bancaire et qu'il l'avait mise à la disposition des époux [B] en contrepartie de leur prise en charge de ses mensualités d'emprunt.
19. Il avait fait cela pour aider sa fille adoptive et son gendre qui n'avaient pas la possibilité d'emprunter. Il était officiellement l'emprunteur mais c'étaient eux qui devaient rembourser l'emprunt. Très rapidement le couple ne lui a plus rien versé et Monsieur [H] a été dans l'incapacité de faire face à ses échéances. Son banquier a prononcé la déchéance du terme de son contrat et a exigé le remboursement intégral de son emprunt avec des intérêts et des pénalités.
20. Le tribunal qui a constaté que Monsieur [H] déclarait sans être contredit pas les époux [B] qu'ils ne lui versaient plus rien « depuis plus d'un an » a pu juger au visa de l'article 1353 du code civil que ces derniers ne justifiaient pas du paiement de leurs loyers et qu'il s'agissait d'un manquement grave à leurs obligations contractuelles justifiant la résiliation de leur bail.
21. La décision sera confirmée en ce qu'elle a ordonné l'expulsion des époux [B].
SUR LA DEMANDE DE DELAIS POUR QUITTER LES LIEUX:
22. En application de l'article L.4l2-3 du Code des procédures civiles d"exécution, le juge qui ordonne l'expulsion peut accorder des délais aux occupants de lieux habités chaque fois que le relogement des intéressées ne peut avoir lieu dans des conditions normales.
23. Les époux [B] ne justifient d'aucun règlement depuis l'assignation du 4 juillet 2017. Ils ont dès lors bénéficié de larges délais. Leur demande sera rejetée.
SUR L'INDEMNISATION DES CONSTRUCTIONS:
24. Monsieur et Madame [B] demandent à titre subsidiaire à être indemnisés de la construction qu'ils ont réalisés sur le terrain.
25. Selon les dispositions de l'article 555 du code civil, lorsque les plantations, constructions et ouvrages ont été faits par un tiers et avec des matériaux appartenant à ce dernier, le propriétaire du fonds a le droit, sous réserve des dispositions de l'alinéa 4, soit d'en conserver la propriété, soit d'obliger le tiers à les enlever.
Si le propriétaire du fonds exige la suppression des constructions, plantations et ouvrages, elle est exécutée aux frais du tiers, sans aucune indemnité pour lui ; le tiers peut, en outre, être condamné à des dommages-intérêts pour le préjudice éventuellement subi par le propriétaire du fonds.
Si le propriétaire du fonds préfère conserver la propriété des constructions, plantations et ouvrages, il doit, à son choix, rembourser au tiers, soit une somme égale à celle dont le fonds a augmenté de valeur, soit le coût des matériaux et le prix de la main-d'oeuvre estimés à la date du remboursement, compte tenu de l'état dans lequel se trouvent lesdites constructions, plantations et ouvrages.
Si les plantations, constructions et ouvrages ont été faits par un tiers évincé qui n'aurait pas été condamné, en raison de sa bonne foi, à la restitution des fruits, le propriétaire ne pourra exiger la suppression des dits ouvrages, constructions et plantations, mais il aura le choix de rembourser au tiers l'une ou l'autre des sommes visées à l'alinéa précédent.
26. Monsieur [H] considère que cette demande est nouvelle et donc irrecevable.
27. En application des dispositions de l'article 566 du code de procédure civile, les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire. En l'espèce, la demande de Monsieur et Madame [B] apparaît être la conséquence de l'expulsion dont il font l'objet. Cette demande apparaît recevable.
28. Monsieur [H] ne demande pas la suppression des constructions. Il convient dès lors en application du texte susvisé de faire droit à la demande des époux [B] à être indemnisés.
29. Madame [B] soutient qu'elle a effectué pour 34.805,02 euros d'achats pour la construction qu'elle occupe. Elle fournit les justificatifs correspondants. Il sera fait droit à cette demande. Il en est de même pour les plantes évalués à 3 140 euros. Monsieur [H] sera condamné à verser à Monsieur et Madame [B] la somme de 37.945,02 euros.
30. Elle soutient en revanche que 7 010 heures de travail ont été consacrées à la construction entre 2010 à 2019 qu'elle évalue à la somme de 112 762 €. Cette somme n'apparaît cependant pas justifiée, cette demande sera rejetée. En effet, il n'est pas contestable et parfaitement justifié que Monsieur [H] a financé les travaux. Son contrat de construction avec l'entreprise ECRCR du 14 février 2012 a pour objet la construction d'une maison individuelle et il représente un montant de travaux de 190 000,61 € TTC comprenant les missions suivantes :
Terrassement
Gros-oeuvre
Charpente Couverture
Second oeuvre
Menuiseries intérieures
Revêtements de sol et muraux
Assainissement
Seuls les travaux d'électricité et la pose des menuiseries aluminium ont été exclus de ce marché et confiés à d'autres entreprises. Monsieur [H] justifie ainsi avoir financé le terrain et les travaux réalisés en 2012 et 2013 et avoir versé la somme de 349 999, 20 € (dont 239 440 € pour les travaux) soit la quasi-totalité des 350 000 € de l'emprunt contracté pour son projet immobilier auprès de la Banque BARCLAYS. Cet investissement correspond à l'évaluation du bien réalisé par un notaire en octobre 2019 à la somme de 370 000 euros (pièce adverse Q).
Sur les demandes annexes et les dépens:
31. Aucune considération d'équité ne commande qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans la présente instance.
Monsieur et Madame [B] qui succombent supporteront les dépens.
PAR CES MOTIFS:
La Cour d'appel de Saint Denis, statuant par décision contradictoire et en dernier ressort,
Confirme en toutes ses dispositions la décision du tribunal d'instance de Saint Pierre en date du 17 septembre 2028,
Y ajoutant,
Rejette la demande d'homologation des points d'accords trouvés en médiation,
Condamne Monsieur [P] [H] à verser à Madame [O] [N] [A] épouse [B] et Monsieur [I] [E] [U] [B] somme de 37.945,02 euros, (trente sept mille neuf cent quarante cinq euros deux centimes),
Déboutes les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
Condamne Madame [O] [N] [A] épouse [B] et Monsieur [I] [E] [U] [B] aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Martin DELAGE, Président de chambre, et par Mme Véronique FONTAINE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE signé LE PRÉSIDENT
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CAPP/JURITEXT000046991431.xml | AFFAIRE : No RG 20/01203 - No Portalis DBWB-V-B7E-FMUV
Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Pole social du TJ de SAINT-DENIS DE LA REUNION en date du 24 Juin 2020, rg no 19/1893
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANTE :
ASSOCIATION SAINT FRANCOIS D'ASSISE (ASFA)
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentant : Me Thomas HUMBERT, avocat au barreau de PARIS et Me REMONGIN avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
LA CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA REUNION
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Isabelle CLOTAGATIDE KARIM de la SCP CANALE-GAUTHIER-ANTELME-BENTOLILA, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Delphine GRONDIN, greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 5 Juillet 2022 prorogé au 13 juillet 2022;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 JUILLET 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Par requête adressée le 16 octobre 2019 au secrétariat du pôle social du tribunal de grande instance de Saint-Denis de La Réunion, devenu tribunal judiciaire à compter du 1er janvier 2020, l'association Saint-François d'Assise a contesté une décision de la commission de recours amiable de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion relative à l'opposabilité d'une décision de reconnaissance d'une maladie
professionnelle affectant l'une de ses salariées.
2. Par jugement du 24 juin 2020, le tribunal a :
- confirmé la décision de la commission de recours amiable de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion relative à l'opposabilité de la décision de reconnaissance d'une maladie professionnelle affectant l'une
des salariées de l'association Saint-François d'Assise,
- constaté que cette décision est opposable à l'association Saint-François d'Assise,
- condamné l'association Saint-François d'Assise aux dépens.
3. Par déclaration du 16 juillet 2020 parvenue au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion le 23 juillet 2020, l'association Saint-François d'Assise a interjeté appel de cette décision, avant de le réitérer par déclaration du 18 mars 2021 réceptionnée le 25 mars 2021.
4. Les parties ont été convoquées par lettre recommandée avec avis de réception du 8 mars 2021 à l'audience du 4 mai 2021 où les instances no 21/542 et 20/1203 ont été jointes sous ce dernier numéro.
5. L'affaire a été plaidée à l'audience du 11 avril 2022 et mise en délibéré au 5 juillet 2022 prorogé au 13 juillet 2022
6. L'association Saint-François d'Assise déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 29 novembre 2021, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- juger recevable et bien fondé son appel,
- constater que la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion a violé les dispositions des articles R. 441-11 et suivants du code de sécurité sociale,
- en conséquence,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a confirmé la décision de la commission de recours amiable de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion relative à l'opposabilité de la décision de reconnaissance de la maladie professionnelle de Madame [I] [Y],
- statuant à nouveau,
- infirmer la décision de la commission de recours amiable du 31 janvier 2020,
- juger que la décision de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion du 9 mai 2019 prenant en charge, au titre de la législation professionnelle, la pathologie du 21 janvier 2019 de Madame [I] [N] [Y] lui est inopposable.
7. À l'appui de ses prétentions, l'association Saint-François d'Assise fait en effet valoir :
- qu'elle a régularisé un second appel précisant les chefs du jugement critiqués, ce qu'elle pouvait faire à tout moment s'agissant d'une procédure orale,
- que la caisse, qui ne lui a jamais transmis la déclaration de maladie professionnelle et le certificat médical initial et qui ne l'a jamais informée de la clôture de l'instruction, de la possibilité de consulter de façon effective le dossier ni de la date à laquelle elle entendait prendre sa décision, n'a pas respecté son devoir d'information tel qu'il résulte de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale puisqu'elle se contente de produire un courrier sans justification de son envoi et encore moins de sa réception, alors que la reconnaissance de la maladie professionnelle de sa salariée a des conséquences très lourdes pour elle.
8. La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 18 novembre 2021, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- in limine litis,
- juger que l'acte par lequel l'association Saint-François d'Assise a interjeté appel le 16 juillet 2020 du jugement entrepris est dépourvu d'effet dévolutif,
- juger qu'il n'y a pas lieu de statuer,
- constater que la seconde déclaration d'appel du 18 mars 2021 est intervenue tardivement, après le terme du délai d'appel, de sorte qu'aucune régularisation n'est possible,
- à titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la cour ne retient pas le moyen tiré de l'absence d'effet dévolutif,
- constater qu'elle a respecté toutes les obligations que la procédure met à sa charge au regard du principe du contradictoire,
- dire et juger que sa décision du 9 mai 2019 de prise en charge de la pathologie de Madame [I] [Y] au titre de la législation sur les risques professionnels est parfaitement opposable à l'association Saint-François d'Assise,
- confirmer la décision explicite de rejet de la commission de recours amiable du 31 janvier 2020,
- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
- en tout état de cause,
- rejeter toute demande de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile articulée à son encontre,
- condamner la partie qui succombe aux dépens,
- débouter l'association Saint-François d'Assise de toutes ses demandes, fins et conclusions articulées contre elle.
9. À l'appui de ses prétentions, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion fait en effet valoir :
- que l'acte d'appel initial ne comporte aucune mention des chefs du jugement expressément critiqués, alors que le second est fait au-delà du délai d'appel,
- qu'elle a parfaitement respecté son obligation d'information, la production d'une simple copie informatique du courrier, sans signature ni accusé de réception, faisant foi,
- qu'il n'existe aucune obligation pour l'organisme de sécurité sociale de communiquer à l'employeur les éléments du dossier de son salarié par voie postale, ni de mentionner dans le courrier de clôture les éléments susceptibles de faire grief à l'employeur qui, s'il n'entame aucune démarche pour consulter le dossier mis à sa disposition, ne peut soulever
l'inopposabilité pour non-respect du contradictoire.
10. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées ainsi qu'à la note d'audience figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'effet dévolutif de l'appel
11. Par application combinée des articles 562 et 933 du code de procédure civile et de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en matière de procédure sans représentation obligatoire, la déclaration d'appel qui omet d'indiquer les chefs du jugement critiqués doit s'entendre comme déférant à la connaissance de la cour d'appel l'ensemble des chefs de ce jugement.
12. En l'espèce, l'association Saint-François d'Assise ayant interjeté appel le 16 juillet 2020 à l'encontre du jugement du 24 juin 2020 rendu en matière de sécurité sociale pour laquelle la représentation n'est pas obligatoire, elle est réputée avoir déféré l'ensemble des chefs du jugement entrepris à la connaissance de la cour.
13. Contrairement à ce que soutient la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion, l'acte d'appel a donc opéré effet dévolutif de l'ensemble des chefs de jugement entrepris.
Sur l'opposabilité à l'association Saint-François d'Assise de la décision de la reconnaissance de la maladie professionnelle de Madame [I] [Y]
14. L'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, dispose en son 1er alinéa que "la caisse dispose d'un délai de trente jours à compter de la date à laquelle elle a reçu la déclaration d'accident et le certificat médical initial ou de trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu le dossier complet comprenant la déclaration de la maladie professionnelle intégrant le certificat médical initial et le résultat des examens médicaux complémentaires le cas échéant prescrits par les tableaux de maladies professionnelles pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie".
15. L'article R. 441-11 prévoit que "la victime adresse à la caisse la déclaration de maladie professionnelle. Un double est envoyé par la caisse à l'employeur à qui la décision est susceptible de faire grief par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception. L'employeur peut émettre des réserves motivées. La caisse adresse également un double de cette déclaration au médecin du travail.
(...) En cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés".
16. Aux termes de l'article R. 441-13, "le dossier constitué par la caisse primaire peut, à leur demande, être communiqué à l'assuré, ses ayants droit et à l'employeur, ou à leurs mandataires".
17. Enfin, il ressort de l'article R. 441-14 que, "dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R. 441-11, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13.
La décision motivée de la caisse est notifiée, avec mention des voies et délais de recours par tout moyen permettant de déterminer la date de réception, à la victime ou ses ayants droit, si le caractère professionnel de l'accident, de la maladie professionnelle ou de la rechute n'est pas reconnu, ou à l'employeur dans le cas contraire. Cette décision est également notifiée à la personne à laquelle la décision ne fait pas grief".
18. En l'espèce, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion produit trois lettres adressées à l'association Saint-François d'Assise au [Adresse 2] :
- l'une du 5 mars 2019 intitulée "transmission d'une déclaration de maladie professionnelle" et ainsi libellée :
"L'assuré(e) cité(e) en référence a établi une déclaration de maladie professionnelle, dont je vous adresse copie en application de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale.
Cette déclaration m'est parvenue, accompagnée du certificat médical indiquant épicondylite coude gauche, le 5 mars 2019.
L'instruction de ce dossier est en cours et une décision devrait être prise à cet égard, dans le délai de trois mois à compter de la date mentionnée ci-dessus, en application de l'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale.
Dans l'hypothèse où un délai complémentaire serait nécessaire au traitement de ce dossier, je ne manquerais pas de vous en aviser, en application de l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale.
Je vous saurais gré de bien vouloir transmettre un exemplaire de la déclaration de maladie professionnelle et le courrier joint, au médecin du travail attache à votre établissement".
- l'autre du 18 avril 2019 intitulée "consultation du dossier avant décision sur maladie professionnelle" et ainsi libellée :
"Je vous informe que l'instruction du dossier est maintenant terminée.
Préalablement à la prise de décision sur le caractère professionnel de la maladie "Tendinopathie des muscles épicondyliens du coude gauche" inscrite dans le "TABLEAU No 57 : Affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail" qui interviendra le 9 mai 2019, vous avez la possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier.
À cette date une notification de la décision prise vous sera adressée
Avant de vous déplacer et afin de vous accueillir dans les meilleures conditions, je vous invite à prendre un rendez-vous auprès de nos services".
- la dernière du 9 mai 2019 intitulée "notification de prise en charge d'une maladie professionnelle dans le cadre des tableaux" et ainsi libellée :
"Le dossier de votre salarié(e) a été examiné dans le cadre du 2ème alinéa de l'article L.461-1 du code de la sécurité sociale. Il ressort que la maladie Tendinopathie des muscles épicondyliens du coude gauche inscrite dans le TABLEAU No 57 : Affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail est d'origine professionnelle.
Cette maladie est prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels.
Si toutefois, vous estimez devoir contester cette décision, vous devez adresser votre réclamation motivée, accompagnée de ce courrier, de préférence par lettre recommandée avec accusé de réception, à la commission de recours amiable de notre organisme situé :
Secrétariat de la Commission de Recours Amiable de la Caisse d'Assurance Maladie, [Adresse 1], dans les deux mois suivant la réception de cette lettre, en joignant tout élément que vous jugerez utile pour l'examen de votre recours".
19. Il ressort des pièces produites par la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion que l'association Saint-François d'Assise a d'abord répondu au courrier initial du 5 mars 2019 puisqu'une déclaration de l'employeur a été renseignée sans réserve le 2 avril 2019, lequel courrier reprenait la teneur du certificat médical initial.
20. Concernant le courrier du 18 avril 2019 relatif à la consultation du dossier, dès lors que la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion a estimé utile de devoir instruire le dossier, obligation lui était faite de l'envoyer à l'association Saint-François d'Assise par tout moyen propre à lui permettre de justifier de sa réception par l'employeur.
21. En application de l'article 1315, devenu l'article 1353 du code civil, il appartient à la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion de justifier du fait par lequel elle prétend s'être libérée de son obligation.
22. Or, force est de constater que la caisse se borne à présenter une copie informatique, non signée et non envoyée en lettre recommandée avec avis de réception, de la lettre de notification de clôture de l'instruction.
23. Si la preuve de l'existence d'un document peut être rapportée par la présentation d'une copie, celle-ci doit en être la reproduction non seulement fidèle mais également durable. L'écrit sous forme électronique ne vaut preuve qu'à condition que son auteur puisse être dûment identifié et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
24. Il ne peut ensuite être fait aucune déduction de la reconnaissance par l'association Saint-François d'Assise de la réception de la transmission initiale de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion du 5 mars 2019 et de la lettre de notification de prise en charge du 9 mai 2019.
25. Il conviendra donc d'infirmer le jugement et, statuant à nouveau, de juger que la décision de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion du 9 mai 2019 prenant en charge, au titre de la législation professionnelle, la pathologie du 21 janvier 2019 de Madame [I] [N] [Y] est inopposable à l'association Saint-François d'Assise.
Sur les dépens
26. La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion, partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Dit que la cour est saisie de l'ensemble des chefs du jugement entrepris,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Dit que la décision de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion du 9 mai 2019 prenant en charge, au titre de la législation professionnelle, la pathologie du 21 janvier 2019 de Madame [I] [N] [Y] est inopposable à l'association Saint-François d'Assise,
Condamne la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion aux dépens de première instance et d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, Président de chambre, et par Mme Delphine GRONDIN, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991425.xml | AFFAIRE : No RG 21/00034 - No Portalis DBWB-V-B7F-FPOC
Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Pole social du TJ de saint denis en date du 09 Décembre 2020, rg no 20/00527
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANTE :
Madame [V] [B]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Normane OMARJEE de la SELARL KER AVOCATS, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
Organisme CGSSR (CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA REUNION)
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Isabelle CLOTAGATIDE KARIM de la SCP CANALE-GAUTHIER-ANTELME-BENTOLILA, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Delphine GRONDIN, greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022 prorogé au 13 juillet 2022;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 JUILLET 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Par requête du 5 août 2020, Madame [V] [B], chargée de délégation à la société Profil Oi suivant contrat de travail à durée indéterminée du 5 juin 2021 avant d'être promue directrice d'agence à compter du 1er décembre 2017, a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Saint Denis de La Réunion aux fins de contester la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion portant sur sa demande de prise en charge d'un accident du travail qui serait survenu le 25 novembre 2019.
2. En effet, un certificat médical initial de constat des lésions avait été établi le 25 novembre 2019 mentionnant une « crise de céphalées + palpitation en rapport avec un trouble de l'adaptation au travail ».
3. Suite à la déclaration d' accident du travail établie par l'employeur le 27 novembre 2019 avec réserves, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion avait diligenté une enquête administrative avant de refuser de reconnaître le caractère professionnel de l'accident aux motifs « qu'il n'existe pas la preuve que l'accident invoqué se soit produit par le fait ou
à l'occasion du travail ni même de présomptions favorables précises et concordantes en cette faveur ».
4. La commission de recours amiable a entre-temps rejeté la demande de Madame [V] [B] par décision du 28 août 2020.
5. Par jugement du 9 décembre 2020, le tribunal a :
- débouté Madame [V] [B] de sa demande tendant à voir ordonner le sursis à statuer jusqu'à la clôture de l'enquête préliminaire,
- débouté Madame [V] [B] du recours formé à l'encontre de la décision de rejet de la commission de recours amiable de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion,
- condamné Madame [V] [B] aux entiers dépens,
- débouté Madame [V] [B] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
6. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 8 janvier 2021, Madame [V] [B] a interjeté appel de cette décision.
7. Les parties ont été convoquées par lettre recommandée avec avis de réception du 29 mars 2021 à l'audience du 7 septembre 2021.
8. L'affaire a été plaidée à l'audience du 11 avril 2022 et mise en délibéré au 5 juillet 2022 prorogé au 13 juillet 2022.
9. Madame [V] [B] déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 6 septembre 2021, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il :
* l'a déboutée de son recours formé contre la décision de rejet de la commission de recours amiable de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion,
* l'a condamnée aux dépens,
* l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de
procédure civile,
- statuant à nouveau,
- à titre principal,
- juger qu'elle a été victime d"un accident du travail qui bénéficie de la présomption d'imputabilité,
- juger que la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion doit prendre en charge son accident de travail au titre des risques professionnels,
- à titre subsidiaire,
- juger qu'elle a été victime d'un accident du travail et qu'elle démontre le lien entre l'accident et l'origine professionnelle,
- juger que la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion doit prendre en charge son accident de travail au titre des risques professionnels,
- en tout état de cause,
- condamner la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion à lui payer la somme de 2.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion aux dépens,
- débouter la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion de loensemble de ses demandes fins et conclusions.
10. À l'appui de ses prétentions, Madame [V] [B] fait en effet valoir :
- que, depuis 2019, elle est victime d'un harcèlement managérial qui est allé jusqu'à une agression le 25 novembre 2019, entraînant un malaise et un trouble anxio-dépressif qui a abouti à une déclaration d'inaptitude du 10 mars 2020 et à un licenciement le 30 avril 2020,
- que son agression a bien eu lieu aux temps et lieu de son travail, puisqu'elle s'est déroulée au sein de son agence et qu'elle est le fait de la fille de son employeur, ce qui entraîne une présomption d'imputabilité,
- qu'elle a d'abord été victime d'une « mise au placard » par suppression de ses responsabilités et de ses fonctions commerciales, puis d'une surcharge de travail, avant d'être définitivement victime de ces tensions professionnelles.
11. La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 2 septembre 2021, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- constater que Madame [V] [B] ne rapporte pas la preuve de l'existence et de la matérialité d'un fait accidentel survenu le 25 novembre 2019 aux temps et lieu de travail,
- constater la dégradation progressive de l'état de santé de Madame [V] [B],
- prendre acte du fait que l'absence de preuve de la survenance d'un fait accidentel le 25 novembre 2019 aux temps et lieu de travail et l'apparition progressive du mal-être font échec au bénéfice de la présomption d'imputabilité posée par l'article L. 411-11 du code de la sécurité sociale et font obstacle à toute qualification d'accident du travail,
- confirmer sa décision du 14 février 2020 de refus de prise en charge du sinistre déclaré par Madame [V] [B] au titre des risques professionnels,
- dire et juger que sa décision du 14 février 2020 est fondée et parfaitement opposable à Madame [V] [B],
- confirmer la décision explicite de rejet rendue par la commission de recours amiable le 28 août 2020,
- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
- rejeter toute demande de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile articulée à son encontre,
- condamner la partie qui succombe aux dépens,
- débouter Madame [V] [B] de toutes ses demandes, fins et conclusions articulées contre elle.
12. À l'appui de ses prétentions, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion fait en effet valoir :
- que, pour bénéficier de la présomption d'imputabilité au travail, encore faut-il que la victime puisse établir la réalité d'un fait accidentel survenu au temps et sur le lieu du travail à l'origine d'une lésion, alors que les allégations de Madame [V] [B] ne sont corroborées par aucun élément objectif et que la victime évoque elle-même une dégradation progressive de sa situation professionnelle,
- qu'en matière de lésions psychologiques, l'exigence d'un fait soudain et anormal exclut de la qualification d'accident du travail les pathologies et lésions apparues progressivement puisqu'est exigée une brutale altération des facultés mentales de la victime, ce qui n'est pas le cas du simple échange hiérarchique invoqué par Madame [V] [B].
13. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées ainsi qu'à la note d'audience figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'accident du travail
14. Aux termes de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, « est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise ».
15. Une dépression nerveuse soudaine intervenue après un événement particulier peut être prise en charge au titre de la législation sur les accidents du travail, de même que des troubles psychologiques (stress nécessitant un traitement psychologique) consécutifs à un choc émotionnel, mais, pour que le traumatisme psychologique subi par un salarié puisse être qualifié d'accident du travail, il doit être établi que l'arrêt de travail prescrit a été causé par une brutale altération des facultés mentales, par exemple en relation avec le harcèlement invoqué, par suite d'un événement anormal.
16. En l'espèce, Madame [V] [B] a présenté le 25 novembre 2019 une « crise de céphalées + palpitation en rapport avec un trouble de l'adaptation au travail ». Le médecin consulté mentionne une tension artérielle de 14/6 et une « patiente en pleurs pendant toute la consultation ».
17. Madame [V] [B] ne produit aucun témoignage direct des faits qu'elle présente de la façon suivante dans sa déclaration d'accident du travail : « Alors que je travaillais sur mon ordinateur dans mon bureau, la fille de mon employeur [O] [W], s'impose par surprise pour me parler. Elle m'insulte et m'humilie sur un ton irrespectueux remettant en cause mes qualités professionnelles mais aussi personnelles. Puis s'en suit une brutale altercation où elle me séquestre dans mon bureau m'empêchant pendant au moins 15 min de sortir en continuant ses injures jusqu'à ce que j'appelle son père (mon employeur) en pleurs au téléphone pour qu'elle me laisse m'en aller. En état de choc psychologique, je m'effondre en larmes, toute tremblante avec de violents maux de tête et des palpitations ».
18. La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion a été amenée à effectuer une enquête administrative, de laquelle il ressort :
- le témoignage de Madame [O] [W], directrice commerciale de la société Profil Oi, qui indique : « Je supervise les opérations fonctionnelles, organisationnelles et commerciales de l'entreprise. Dans le cadre de mes fonctions, je suis amenée à intervenir dans toutes les agences du réseau. J'étais ce jour-là présente en agence BTP [Localité 5] pour du renfort opérationnel. À mon initiative, un point matinal avait été fait en présence de Madame [B] et Madame [J] sur les dossiers d'activité en cours afin de démarrer la semaine. Durant toute la matinée, à part cette réunion de lancement, je n'ai eu aucune relation protocolaire (réunion, entretien...) avec Madame [B] hormis quelques échanges courants (pour exemple, "souhaites-tu prendre l'appel ?", "sais-tu où se trouve le dossier des CV ?"). Durant toute la matinée, Madame [B] était dans son bureau, porte fermée au téléphone. J'ai pu le constater car le bureau de Madame [B] est une pièce surélevée entièrement vitrée et isolée (...) les autres bureaux gravitent autour en open space. J'étais installée sur un bureau à droite. Je suis revenue de la pause déjeuner aux alentours de 13h45. Madame [B] n 'était pas en agence. Elle est arrivée vers 14h15-30. Vers 15h00, je vois Madame [B] partir de l'agence en ayant un bref échange avec Madame [J]. Madame [B] revient en agence aux alentours de 16h00. On se croise au niveau de l'accueil. Je lui demande alors de façon spontanée où est-ce qu'elle était partie. Je lui demande ensuite si on pouvait faire le point sur tout ce qui s'est passé dans la journée et notamment tous les dossiers qui sont restés en suspens et en attente de réponse. Elle me dit qu'elle doit terminer certaines choses et fait signe dès que c'est ok. Je repars à mon bureau. 15 à 30 minutes plus tard, je la vois ranger ses affaires et partir. Je me lève de mon bureau pour aller à sa rencontre. Arrivée à sa portée (à la porte de son bureau), je lui demande "où est-ce que tu vas ?". Elle me répond "en rendez-vous clientèle" sans explications complémentaires. Je lui réponds "[V], tu ne vas pas partir comme ça, j'aimerais que tu restes pour élucider pas mal de problématiques de gestion. Tout à l'heure tu es partie sans rien expliquer. Le minimum de courtoisie serait d'avoir une démarche d'information". En même temps, elle est en train de fermer la porte de son bureau à clé. Je suis étonnée et lui demande pourquoi elle ferme son bureau à clé. Je l'informe qu'aucun bureau au sein des agences n'est fermé à clé au sein de Profil Oi. Je lui demande par conséquent de laisser la porte ouverte et de me donner les clés par la même occasion (pour des raisons de sécurité). Madame [B] montrait des signes d'agacement. Elle entre de nouveau dans son bureau, hésitante dans sa volonté de me donner les clés. J'entre un peu plus dans son bureau et attends de voir ce qu'il va se passer. Elle me dit "j'ai un coup de fil à passer" et me ferme la porte au nez. Je repars à mon bureau pour ne pas réagir à chaud. Une fois sa conversation téléphonique, elle a quitté son poste de travail. La voyant partir en flèche, je lui dis "tu pourrais dire au revoir à l'équipe [V]" ».
- le témoignage de Madame [K] [J], chargée de recrutement, qui relate : « J'étais présente à l'agence du [Localité 5] le 25/11/2019 de 8h00 jusqu'à au moins 17h00. Ma hiérarchie m'a demandé de travailler en renfort sur l'agence du [Localité 5] à compter du 25/11/2019. Madame [B] est la seule personne disposant d'un bureau fermé sur le site du [Localité 5] mais j'étais positionnée sur le bureau de l'accueil. J'ai rapidement discuté avec Madame [B] en début d'après-midi. Elle m'a informé qu'elle partait en clientèle au cas où j'aurais besoin d'elle. J'ai effectivement vu Mesdames [W] et [B] discuter au retour de cette dernière alors qu'elles se trouvaient au niveau de la porte d 'entrée. À aucun moment je n'ai entendu des élévations de voix ou une altercation. Madame [W] a demandé à Madame [B] des explications sur son absence du bureau. Madame [B] a ensuite récupéré ses affaires et a quitté le bureau dans la foulée. De mon point de vue, il ne s 'est rien passé d'inhabituel ce jour-là ».
- le témoignage de Monsieur [S] [E], informaticien, qui mentionne : « Je ne peux pas affirmer la date exacte des faits qui sont relativement anciens. Je suis un prestataire extérieur à l'entreprise et suis intervenu sur le site à 15h00 jusqu'aux alentours de 17h00. J'étais installé au bureau de test qui est situé à gauche en entrant. C'est un bureau ouvert et on entend toutes les discussions si on écoute. J'avais une visibilité sur le bureau central, celui de Madame [B] et sur l'open space. À un moment, je vois Madame [B] sur le départ. Je me souviens qu'à un moment donné, durant un bref instant, elles étaient sur le pas de la porte du bureau de Madame [B] mais je ne me rappelle pas si la porte était ouverte ou fermée. Je travaillais et je n'ai pas suivi ni écouté tout ce qu'elles se sont dit. J'ai entendu Madame [W] lui dire qu'elles n'avaient pas terminé leur discussion, qu'elle avait encore besoin d'elle. Elle lui a aussi demandé de ne pas partir, de laisser les clés et de dire au revoir à l'équipe. Madame [W] a rejoint son bureau et Madame [B] est partie malgré les demandes de Madame [W]. Il n'y a eu ni éclats de voix ni insultes et je n'ai pas le souvenir d'avoir vu Madame [B] pleurer ».
19. Il en ressort que, si une vive discussion a eu lieu, la preuve d'une altercation, d'insultes, voire d'une agression, comme l'a ressentie Madame [V] [B], n'est pas établie au lieu et au temps du travail.
20. Madame [V] [B] produit elle-même une attestation (non datée) de Madame [Z] [M], psychologue clinicienne, qui certifie « suivre sur le plan psychologique Madame [V] [B] depuis le mois de février 2019 à un rythme hebdomadaire, (laquelle) souffre d'un syndrome d'épuisement professionnel, d'un "burn out". Le syndrome anxio-dépressif est majeur avec les signes cliniques suivants :
- un trouble du comportement alimentaire sur un mode boulimique ayant entraîné une augmentation de 23 kilos en une année
- d'importants troubles du sommeil (réveils nocturnes)
- une alopécie vient d'être découverte
- un état de stress chronique
- une perte de confiance en elle et une baisse de l'estime de soi
- une fatigue extrême liée au surmenage ».
21. Madame [V] [B] s'estime victime de harcèlement depuis le début de l'année 2019, par suite de l'arrivée de la fille de son employeur dans le management de la société. Si la remise en cause professionnelle semble-t-il exigée par Madame [O] [W] a pu progressivement la fragiliser, aucun événement anormal et soudain, durant la journée du 25 novembre 2019, n'a pu faire dégénérer le harcèlement invoqué en accident du travail.
22. En outre, alors que les lésions figurant sur le certificat médical initial du 25 novembre 2019 reposent sur les propres déclarations de la salariée au praticien après avoir quitté son poste, il résulte des témoignages directs de la journée de travail de Madame [V] [B] que leur manifestation soudaine sur le lieu et au temps du travail n'a été constatée par aucun des salariés présents.
23. Il conviendra donc de confirmer le jugement entrepris.
Sur les dépens
24. Madame [V] [B], partie perdante, sera condamnée aux dépens.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
25. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la partie condamnée aux dépens prend en charge les frais irrépétibles exposés par la partie adverse dans les proportions que le juge détermine.
26. En l'espèce, Madame [V] [B], qui est la seule à en demander le bénéfice alors qu'elle est condamnée aux dépens, n'est pas éligible à ces dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne Madame [V] [B] aux dépens d'appel,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, Président de chambre, et par Mme Delphine GRONDIN, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991424.xml | AFFAIRE : N RG No RG 20/01024 - No Portalis DBWB-V-B7E-FMHY
Code Aff. : ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de SAINT-DENIS (REUNION) en date du 10 Juin 2020, rg no 18/00280
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANT :
Monsieur [M] [W] [A]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Pauline BARANDE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Caisse GROUPAMA OCEAN INDIEN (CAISSE REGIONALE D'ASSURANC ES MUTUELLES AGRICOLES DE L'OCEAN INDIEN)
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Jean-Pierre GAUTHIER de la SCP CANALE-GAUTHIER-ANTELME-BENTOLILA, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Clôture : 7 mars 2022
DÉBATS : En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 avril 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Delphine GRONDIN, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022, mise à disposition prorogée au 13 juillet 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
Greffier du prononcé par mise à disposition au greffe : Nadia HANAFI
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 JUILLET 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Par une requête enregistrée au greffe le 29 juin 2018, Monsieur [M] [W] [A] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Denis de La Réunion aux fins de faire :
- constater qu'il exerce les fonctions de "responsable d'activités commercial" depuis le 1er août 2011 au sein de la Compagnie Groupama Océan Indien,
- ordonner son positionnement dans la classe 6 à compter du 1er août 2011,
- condamner la Compagnie Groupama Océan Indien à lui verser les sommes suivantes :
* 19.939,11 € à titre de rappel des salaires de juin 2015 à mai 2018,
* 1.993,91 € au titre des congés payés afférents,
* 5.000,00 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du défaut d'application de la classification correspondant aux fonctions occupées,
* 3.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
2. Par jugement du 10 juin 2020, le conseil, dans sa formation de départage, a :
- déclaré les demandes de Monsieur [M] [W] [A] irrecevables à raison de la prescription de l'action,
- en conséquence,
- rejeté la demande de dommages et intérêts présentée par Monsieur [M] [W] [A],
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté toute autre demande,
- condamné Monsieur [M] [W] [A] au paiement des entiers dépens,
- constaté l'exécution provisoire de plein droit.
3. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 13 juillet 2020, Monsieur [M] [W] [A] a interjeté appel de cette décision.
4. Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 2 février 2022, Monsieur [M] [W] [A] demande à la cour de :
- infirmer dans toutes ses dispositions le jugement entrepris,
- statuant à nouveau,
- déclarer recevables ses demandes,
- constater qu'il exerce les fonctions de responsable d'activités commercial depuis le 1er août 2011, ce dont il n'a eu connaissance qu'à
compter du 29 novembre 2016, date à laquelle la direction a consulté le CHSCT (où il siégeait) sur son projet de réorganisation du marché entreprise et collectivité,
- ordonner son positionnement dans la classe correspondante, à savoir la classe 6,
- condamner la Compagnie Groupama Océan Indien à lui verser les sommes suivantes :
* à titre principal :
34.074,33 € à titre de rappel de salaires (somme à parfaire),
3.188,36 € au titre des congés payés afférents (somme à parfaire),
* à titre subsidiaire, si la cour considère qu'il y a lieu d'arrêter les rappels de salaire à la date du 31 août 2020 :
31.719,21 € à titre de rappel de salaires,
2.981,21 € au titre des congés payés afférents,
- en tout état de cause :
5.000,00 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral résultant du défaut d'application de la classification correspondant aux fonctions occupées,
3.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter la Compagnie Groupama Océan Indien de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la Compagnie Groupama Océan Indien aux dépens de première instance et d'appel.
5. À l'appui de ses prétentions, Monsieur [M] [W] [A] fait en effet valoir :
- que son rattachement à la direction commerciale et la nature des fonctions occupées depuis le 1er août 2011 justifient qu'il soit positionné depuis cette date dans la famille professionnelle « distribution » - fonction générique : « responsable d'activités commercial » - classe 6, à l'instar de son collègue Monsieur [I] [N] qui exerce les mêmes fonctions que lui,
- que la prescription ne l'empêche pas de solliciter le paiement d'un rappel de salaire sur les trois années précédant la saisine du conseil de prud'hommes, d'autant plus qu'il n'a eu connaissance de la classification de son poste qu'en 2016,
- que le juge doit s'attacher aux fonctions réellement exercées, en témoigne sa fiche métier,
- qu'il a en charge la responsabilité d'une activité, celle du marché des entreprises et des collectivités sur tout le département, avec gamme de produits assurantiels particulièrement large, adaptable en fonction du client concerné, que l'on peut opposer à la clientèle plus restreinte et aux produits plus standardisés de la classe 5,
- que ses responsabilités et son autonomie relèvent davantage de la classe 6,
- que, dans l'organigramme de la direction commerciale, il est le seul à être positionné en classe 5,
- que l'employeur ne saurait justifier son positionnement en classe 5 par ses prétendues lacunes, lesquelles ne sont nullement démontrées et tente vainement d'accroire que sa situation professionnelle serait « tout à fait comparable » à celle de Madame [T] [X], classée 5,
- qu'en considérant qu'il ne relèverait pas de la classe 6 parce qu'il serait
placé sous l'autorité du directeur commercial, la Compagnie Groupama Océan Indien ajoute un critère d'accès à la fonction générique de « responsable d'activités commercial » - classe 6 qui n'est pas prévu par le texte conventionnel,
- que les « pratiques » d'un employeur, aussi pérennes soient-elles, n'ont pas pour effet de faire échec à l'application des textes conventionnels plus favorables,
- que la récente diffusion d'emploi de la Compagnie Groupama Océan Indien concernant un responsable commercial recruté à la classe 6 correspond à la description de son poste,
- que, quand bien même il effectuerait en partie les missions d'un « responsable d'activités commercial » - classe 6 et les missions d'un « responsable secteur commercial » - classe 5, son poste devrait en tout état de cause être rattaché à la fonction générique « responsable d'activités commercial » - classe 6,
- que le fait qu'il occupe depuis le 1er septembre 2020 le poste de référent technique professionnels, entreprises et prévention, suivant une lettre-avenant au contrat de travail du 17 août 2020 n'emporte aucune renonciation de sa part à son classement rétroactif en classe 6,
- qu'il subit un préjudice moral du fait de l'attitude volontaire de son employeur conduisant à le priver de ses droits.
6. Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 31 janvier 2022, la Compagnie Groupama Océan Indien demande à la cour de :
- à titre principal,
- confirmer le jugement entrepris ayant déclaré les demandes de Monsieur [M] [W] [A] irrecevables en raison de la prescription de son action,
- y ajoutant,
- condamner Monsieur [M] [W] [A] au paiement de la somme de 5.000,00 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,
- à titre subsidiaire,
- débouter Monsieur [M] [W] [A] de ses demandes,
- y ajoutant,
- condamner Monsieur [M] [W] [A] au paiement de la somme de 5.000,00 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel,
- à titre infiniment subsidiaire,
- limiter les sommes allouées à Monsieur [M] [W] [A] à titre de rappels de salaire pour la période du 1er juin 2015 au 31 août 2020 à la somme de 8.599,18 €, outre 787,03 € au titre des congés payés afférents.
7. À l'appui de ses prétentions, la Compagnie Groupama Océan Indien fait en effet valoir :
- que les demandes de rappels de salaires formulées par Monsieur [M] [W] [A] ne sont que la conséquence de sa demande principale en reclassification, laquelle est prescrite, rien ne lui permettant de reporter le point de départ du délai de prescription de deux ans, qui a commencé à courir à compter de la date à laquelle il a signé l'avenant à son contrat de travail le 21 juillet 2011,
- que le rattachement à une fonction générique n'est pas lié à la position occupée par le salarié dans l'organigramme, Monsieur [M] [W] [A] n'étant pas le seul salarié directement rattaché au directeur commercial à relever de la classe 5,
- que c'est au regard de l'expérience antérieure acquise par Monsieur [I] [N], qui venait d'une autre entité du groupe, Groupama d'Oc, que la décision a été prise de lui maintenir, à titre individuel, la classe dont il disposait alors chez son précédent employeur,
- que, si la classification du salarié dépend des fonctions réellement exercées par le salarié, c'est la convention collective qui détermine le rattachement de ces fonctions à un niveau donné,
- que Monsieur [M] [W] [A] n'a fait l'objet d'aucun traitement discriminatoire en étant rattaché à la classe 5, dès lors qu'il s'agissait de la classe de rattachement de son prédécesseur,
- que les missions de Monsieur [M] [W] [A] telles que décrites dans l'avenant à son contrat de travail du 21 juillet 2011, répondent tout autant à la définition de la fonction générique de responsable de secteur commercial qu'à celle de responsable d'activités commercial,
- qu'en tant que responsable de marché entreprises et collectivités, le périmètre des fonctions de Monsieur [M] [W] [A] est bien celui d'un responsable de secteur commercial,
- qu'outre le fait que Monsieur [M] [W] [A] n'encadre qu'un seul collaborateur, les comptes-rendus de ses entretiens d'évaluation témoignent d'une gestion purement technique et opérationnelle, la dimension stratégique échappant au poste du salarié qui ne dispose d"aucune délégation de pouvoirs,
- que les performances commerciales de Monsieur [M] [W] [A] depuis 2018 ont eu tendance à diminuer et se sont inscrites à un niveau inférieur aux attendus de son poste et aux objectifs fixés,
- que le fait que Monsieur [M] [W] [A] soit aujourd'hui le seul à couvrir un marché spécialisé sur l'ensemble du département de La Réunion ne saurait conduire à remettre en cause la notion de secteur commercial,
- que le rattachement du salarié à la fonction générique de responsable de secteur commercial classe 5 est conforme aux pratiques existantes au sein du groupe,
- que, non seulement il n'est pas démontré que Monsieur [M] [W] [A] exerce des missions excédant celles d'un responsable de secteur commercial, mais surtout, il n'est nullement établi que ses missions de responsable d'activités commercial représenteraient son activité dominante,
- que Monsieur [M] [W] [A] a quitté ses fonctions de
responsable du marché entreprises et collectivités le 31 août 2020 pour prendre un poste de référent technique professionnels, entreprises et prévention au sein d'une autre direction, un avenant à son contrat de travail actant du rattachement de ce nouveau poste à la fonction générique chargé d'études et de conception, poste rattaché à la classe 5,
- que les calculs de rappel de salaire effectués par Monsieur [M] [W] [A] sont erronés,
- qu'elle a procédé à une exécution loyale et non fautive de ses obligations contractuelles.
8. L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 mars 2022.
9. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la prescription
10. Aux termes de l'article L. 1471-1 du code du travail, "toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit. (Ces dispositions) ne sont toutefois pas applicables aux actions en réparation d'un dommage corporel causé à l'occasion de l'exécution du contrat de travail, aux actions en paiement ou en répétition du salaire (...)".
11. L'article L. 3245-1 prévoit que "l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat".
12. Ces dispositions sont issues de la loi no 2013-504 du 14 juin 2013. Conformément à l'article 40-II de l'ordonnance no 2017-1387 du 22 septembre 2017, elles s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de publication de ladite ordonnance, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
13. L'ancien article L. 3245-1 disposait que "l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par cinq ans conformément à l'article 2224 du code civil".
14. En l'espèce, il importe peu que la demande de Monsieur [M] [W] [A] soit fondée sur un avenant du 21 juillet 2011 qui lui permettrait de solliciter son positionnement en classe 6 au lieu de la classe 5 à compter de cette date, dès lors qu'il en déduit une demande de rappel de salaire à compter du 1er juin 2015.
15. Compte tenu d'une demande formée le 29 juin 2018, elle se trouverait effectivement prescrite pour les salaires échus au 29 juin 2015, ce qui autorise Monsieur [M] [W] [A] à agir en rappel des salaires à compter du 1er juin 2015.
16. Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a déclaré prescrite l'action de Monsieur [M] [W] [A].
17. Statuant à nouveau, la cour déclarera l'action de Monsieur [M] [W] [A] recevable.
Sur la demande de positionnement à la classe 6
18. Lorsqu'il est saisi d'une contestation sur la qualification attribuée à un salarié, le juge doit se prononcer au vu des fonctions réellement exercées et les comparer à la grille de la convention collective.
19. L'article 30 de la convention collective nationale des sociétés d'assurances du 27 mai 1992 relatif à la classification des fonctions des salariés dispose :
"1. Toutes les activités professionnelles ou "fonctions" exercées par les salariés relevant de la présente convention font l'objet d'un classement. Ce classement est opéré dans chaque entreprise selon les principes et modalités inscrits dans l'annexe I.
2. Ce classement détermine le montant de la rémunération minimale annuelle (RMA) garantie à chaque salarié.
3. Par fonction, il faut entendre tout ensemble d'activités professionnelles ou de missions confiées ou susceptibles de l'être à une même personne selon le dispositif d'organisation adopté par l'entreprise.
4. Au-delà de la période de mise en application, les questions ayant trait à la classification sont de la compétence, selon leur nature, soit de la commission "Emploi - Formation" du comité d'entreprise, soit des délégués du personnel".
20. L'annexe 1 de la convention collective expose notamment :
- que la classification des fonctions vise à répondre à deux sortes de préoccupations :
* positionner les fonctions les unes par rapport aux autres selon des règles communes et donner ainsi un support aux rémunérations minimales professionnelles applicables dans toutes les entreprises,
* fournir un outil d'évaluation des fonctions, suffisamment universel et souple pour prendre en compte la diversité des activités et des modes d'organisation existant dans l'assurance ainsi que l'évolution des qualifications (moyen de promouvoir et de faciliter la gestion prévisionnelle des emplois). Une telle démarche nécessite en effet une analyse suivie du contenu réel des fonctions en utilisant comme outils les 5 critères suivants : formation/expérience, conception/résolution de problèmes, dimension relationnelle, autonomie, contribution) et en déterminant pour chacun de ces critères des degrés allant de 1 à 6 ;
- que la classification des fonctions est constituée de 7 classes numérotées de un à sept dans l'ordre croissant des compétences qu'elles requièrent et que les entreprises sont tenues de ranger chaque fonction dans l'une de ces classes pour que chaque salarié ait la garantie de rémunération minimale fixée pour sa classe de fonction par l'annexe II.
21. L'article 15 du chapitre II de l'accord national sur le statut conventionnel du personnel Groupama du 10 septembre 1999 prévoit une grille de classification des fonctions génériques par famille professionnelle et par classe. La famille professionnelle de la distribution recense les 7 classes suivantes :
"Classes Distribution :
1 Agent commercial
2 Commercial généraliste
3 Commercial spécialisé
4 Animateur commercial
5 Chargé d'affaires - Responsable de secteur commercial
6 Responsable d'activités commercial
7 Responsable de domaines d'activités".
22. Le poids relatif retenu pour chacun des 5 critères prévus à la convention collective est le suivant :
- formation/expérience = 25%
- conception/résolution de problèmes = 20%
- autonomie = 20%
- dimension relationnelle = 20%
- contribution = 15%
23. Aux termes de l'article 16 de l'accord national du groupe, "lorsqu'un salarié effectue des missions relevant de deux fonctions génériques différentes, celui-ci doit être rattaché à la fonction qui correspond à son activité dominante en temps. En cas de durée équivalente, le salarié est rattaché à la fonction de la classe la plus élevée".
24. Il ressort de la fiche métier du responsable d'activités commercial éditée par la Compagnie Groupama Océan Indien qu'il assure la responsabilité commerciale d'une ou plusieurs activités sur un ou plusieurs départements.
Son cadre d'intervention est le suivant :
- il élabore et met en oeuvre le plan d'actions, il en négocie les moyens nécessaires à sa réalisation ;
- il dispose le cas échéant de toute liberté d'action dans la constitution, l'organisation et le fonctionnement de l'équipe encadrée ;
- l'importance des moyens mis à sa disposition suppose la mise en oeuvre d'une gestion anticipatrice à moyen et long terme qui engage l'entreprise sur le plan économique et social.
La fonction consiste, pour parvenir à la réalisation du plan d'actions, à "animer et gérer un champ d'activités, à mettre en oeuvre des outils et techniques complexes adaptés, à réaliser des études et des analyses prospectives, à concevoir ou adapter ou maintenir des solutions généralisables à l'ensemble de l'entreprise".
Ses principales missions sont les suivantes :
- élaborer, mettre en oeuvre et suivre le plan d'actions commercial d'un ou plusieurs départements ;
- organiser, manager et animer la ou les équipes de travail du champ d'activité ;
- participer à l'élaboration, au suivi et à l'évolution des politiques commerciale, marketing ou institutionnelle de l'entreprise ;
- mettre en oeuvre les moyens nécessaires à l'amélioration de la qualité du service et des produits ;
- organiser et animer des instances institutionnelles ou participer à la vie des structures locales.
25. La fiche métier du "responsable de secteur commercial" - classe 5 rappelle quant à elle que cette fonction consiste à élaborer et mettre en oeuvre le plan d'action ; il en négocie les moyens nécessaires à sa réalisation. La pertinence des procédures de gestion mises en place, les
choix et options de travail retenus, la qualité et l'efficacité du management, les décisions opérationnelles impactent les résultats de l'entité de travail, voire ceux de l'entreprise.
Ses principales missions consistent à :
- coordonner et suivre une ou plusieurs activités, réalisation d'analyses et mise en place de technique spécifiques : adaptation de solutions existantes, construction et mise en place de solutions nouvelles voire innovantes ;
- élaborer, mettre en oeuvre et suivre le plan d'actions d'un secteur commercial ;
- recruter, encadrer, animer et former une équipe de commerciaux ;
- participer à la réalisation du plan d'actions commercial ;
- réaliser la gestion commerciale et/ou administrative du secteur ;
- contrôler et analyser la réalisation des objectifs commerciaux ou qualité prévus dans le plan d'actions commercial ;
- rendre compte d'informations sur le marché, la concurrence, la technique d'assurance ;
- développer l'image de l'entreprise au niveau local et participation à l'animation institutionnelle.
26. En l'espèce, aux termes de l'avenant à son contrat de travail daté du 21 juillet 2011, Monsieur [M] [W] [A] a été affecté au sein de la direction commerciale en qualité de responsable du périmètre
d'activité "souscription des entreprises et collectivités" à compter du 1er août 2011 sous l'intitulé de poste "responsable du marché des entreprises et des collectivités" mais a cependant été positionné dans la famille professionnelle : "distribution" - fonction générique : "responsable secteur commercial" - classe 5.
27. Cet avenant a confié à Monsieur [M] [W] [A] "la responsabilité d'organiser et de piloter", sous l'autorité de Monsieur [Z] [R], l'activité du marché des entreprises et des collectivités avec pour missions :
- de construire et de mettre en oeuvre les plans d'actions, l'accompagnement des collaborateurs et le suivi individuel et collectif de la performance en s'assurant du respect des règles techniques de souscription et de la qualité du portefeuille ;
- d'animer des réunions d'équipe, d'effectuer les entretiens d'évaluation et de déterminer les besoins de formation ;
- d'assurer la surveillance des risques lourds en relation avec la direction métier de GSA, d'analyser les résultats de son activité et d'alerter la hiérarchie sur les dossiers importants ou sensibles.
28. Ce faisant, Monsieur [M] [W] [A], qui a remplacé dans ses fonctions Monsieur [L] [D], rémunéré à la classe 5, ne figure pas dans l'organigramme de la Compagnie Groupama Océan Indien sous la rubrique "responsable secteur commercial" dont la supervision est confiée à Madame [F] [Y] mais au sein de la direction commerciale dirigée par Monsieur [Z] [R]. Le fait qu'il s'y trouve en compagnie de trois collègues positionnés en classe 6 n'est toutefois pas, à lui seul, déterminant pour qualifier sa classe d'appartenance, pas davantage que le fait qu'il siège au comité de souscription et au comité de développement de l'entreprise, sa présence se justifiant par sa responsabilité du marché des entreprises et des collectivités et, partant, la présentation de l'instruction de ses dossiers.
29. La première différence entre le "responsable d'activités commercial" et le "responsable de secteur commercial" est que le premier participe à l'élaboration de la stratégie commerciale et institutionnelle de l'entreprise, là où le second se contente de la décliner pour le secteur d'activités dont il a la charge. Or, l'avenant au contrat de travail de Monsieur [M] [W] [A] ne lui confie que des missions opérationnelles et non stratégiques, fussent-elles concernées par l'activité sensible du marché des entreprises et des collectivités, secteur dont il a le monopole sur l'ensemble du département, ce critère n'étant toutefois pas déterminant puisqu'il convient de parler de "secteur d'activité" davantage que de "secteur géographique". Ce caractère purement opérationnel apparaît nettement à la lecture des campagnes d'évaluation de Monsieur [M] [W] [A] versées aux débats par la Compagnie Groupama Océan Indien.
30. La seconde différence entre les deux responsabilités réside dans la délégation de pouvoirs confiée au responsable d'activités commercial. Il n'est pas contesté que, si Monsieur [M] [W] [A] instruit les dossiers relevant de son secteur d'activité, seul Monsieur [Z] [R] détient une délégation de pouvoirs de Monsieur [J] [V], directeur général de la Compagnie Groupama Océan Indien. Il est justifié de plusieurs échanges entre Monsieur [M] [W] [A] et Monsieur [Z] [R] dans lesquels le premier soumet au second des "préconisations", demande son accord pour un geste commercial ou encore sollicite sa signature pour un contrat, ce qui évoque une autonomie très relative, la seule délégation reçue de Monsieur [Z] [R] concernant la validation des marges de négociation individuelle accordée de façon résiduelle dans une note technique no 11/2014.
31. Pour le surplus, outre le fait que Monsieur [M] [W] [A], qui n'a compté que jusqu'à trois collaborateurs, ne démontre pas qu'il exercerait des missions excédant celles d'un responsable de secteur commercial, il est encore moins établi que ces missions représenteraient son activité dominante.
32. Par ailleurs, la production, par Monsieur [M] [W] [A], d'offres d'emploi en classe 6 concernant un responsable de marché particuliers dans le secteur Nord ou d'un responsable commercial marché entreprise en classe 6 dans le secteur Centre-Atlantique ne sauraient servir de comparaison avec sa situation personnelle à La Réunion en termes de taille (nombre de collaborateurs, portefeuille).
33. Enfin, la comparaison avec le statut de Monsieur [I] [N], responsable pôle courtage professionnel entreprise et collectivités, est tout aussi vaine, dès lors que c'est au regard de l'expérience antérieure acquise par l'intéressé, qui venait d'une autre entité du groupe, que la décision a été prise de lui maintenir, à titre individuel, la classe 6 dont il disposait déjà chez son précédent employeur, ainsi que la Compagnie Groupama Océan Indien en justifie.
34. Il en est de même de la situation de Monsieur [C] [G], responsable du marché assurances collectives, qui était positionné en classe 6 jusqu'à son départ de l'entreprise le 31 décembre 2018, ce qui n'était le cas ni de son prédécesseur, Madame [H] [S], ni de son successeur, Monsieur [B] [K], tous deux positionnés en classe 5. Le choix de la classe 6 pour Monsieur [C] [G] relevait des compétences particulières de l'intéressé dont le parcours (ancien directeur de cabinet de courtage en assurances collectives, inspecteur régional courtage assurances collectives) le qualifiait particulièrement.
35. Concernant Madame [F] [Y], elle a toujours été positionnée en classe 6, mais dans un poste différent de celui occupé par Monsieur [M] [W] [A] puisqu'il comporte notamment l'encadrement d'une équipe de 6 responsables de secteurs relevant de la classe 5.
36. À l'inverse, Madame [T] [X], qui était jusqu'au 31 décembre 2018 responsable de l'animation des courtiers pour le marché des particuliers et qui a été promue depuis le 1er janvier 2019 au poste de responsable courtage marché des particuliers relève également de la classe 5, avec une situation tout à fait comparable à celle de Monsieur [M] [W] [A].
37. Il conviendra donc de débouter Monsieur [M] [W] [A], qui ne justifie pas exercer des fonctions relevant de la classe 6 ni d'un traitement inégalitaire, de l'ensemble ses demandes.
Sur les dépens
38. Monsieur [M] [W] [A], partie perdante, sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
39. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la partie condamnée aux dépens prend en charge les frais irrépétibles exposés par la partie adverse dans les proportions que le juge détermine.
40. En l'espèce, l'équité commande de ne pas faire application de ces dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Déclare recevable l'action de Monsieur [M] [W] [A],
Déboute Monsieur [M] [W] [A] de ses demandes,
Condamne Monsieur [M] [W] [A] aux dépens de première instance et d'appel,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, Président de chambre, et par Madame Nadia HANAFI, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
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CAPP/JURITEXT000046991430.xml | AFFAIRE : No RG 18/00810 - No Portalis DBWB-V-B7C-FAQ2
Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT PIERRE en date du 25 Avril 2018, rg no F 17/00175
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANTE :
Association pour la gestion du Régime de Garantie des créances des salariés, association déclarée, dont le siège est au [Adresse 3], agissant poursuites et diligences de son Président, par l'UNEDIC en qualité de gestionnaire de l'AGS en application de l'article L.3253-14 du Code du Travail, domicilié en son établissement du Centre de gestion et d'étude AGS de [Localité 8],
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représentant : Me Nathalie JAY, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
Monsieur [M] [X]
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentant : M. [Z] [G], défenseur syndical ouvrier
Maître [Y] [C] de la SELARL [Y] [C], mandataire judiciaire, es qualité de liquidateur de l'E.U.R.L. AREBAT, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de SAINT- DENIS DE LA REUNION sous le numéro B 507 587 574,
[Adresse 2]
[Localité 5]
Non représenté
Clôture : 2 septembre 2019
DÉBATS : En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 mars 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Nadia HANAFI, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 9 juin 2022, mise à disposition prorogée au 13 juillet 2022;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 JUILLET 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Monsieur [M] [X] a été embauché par l'E.U.R.L. Arebat en qualité d'ouvrier maçon, selon contrat à durée indéterminée à effet au 1er juillet 2015. Il a pris acte de la rupture de son contrat de travail par lettre du 4 février 2016. Il a également fait l'objet d'un licenciement par lettre du 15 février 2016.
2. Saisi par Monsieur [M] [X], qui sollicitait un arriéré de salaires, des indemnités de préavis et pour les congés payés afférents, une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement et des dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail, le conseil de prud'hommes de Saint-Pierre de la Réunion, par jugement rendu le 25 avril 2018, a :
- fixé les créances de Monsieur [M] [X] à l'égard de l'E.U.R.L. Arebat aux sommes suivantes :
* 1.741,75 € bruts au titre du salaire du mois de janvier 2016,
* 1.741,75 € bruts à titre d'indemnité de préavis,
* 174,17 € bruts à titre de congés payés sur préavis,
* 6.000,00 € bruts à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,
* 600,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné la délivrance des bulletins de paye des mois de janvier à mars 2016, d'une attestation destinée à Pôle Emploi et d'un certificat de travail, sous astreinte de 50,00 € par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification du jugement,
- dit que la garantie due par l'association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés -ci-après l'AGS- est plafonnée et ne comprend pas les créances au titre des frais non répétibles d'instance et des dépens,
- débouté Monsieur [M] [X] du surplus de ses demandes.
3. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 24 mai 2018, l'AGS a interjeté appel de cette décision.
4. Par ordonnance du 7 mai 2019, le conseiller de la mise en état a :
- dit que la constitution de Monsieur [U] [K] dans les intérêts de Monsieur [M] [X] est régulière,
- déclaré irrecevables les conclusions et pièces communiquées par Monsieur [M] [X] le 18 février 2019,
- condamné Monsieur [M] [X] aux dépens de l'incident.
5. Par arrêt avant dire droit du 28 septembre 2021, la cour a :
- invité les parties à s'expliquer sur la recevabilité de l'appel en l'absence de l'E.U.R.L. Arebat qui dispose d'un pouvoir propre et en raison de l'indivisibilité du litige,
- renvoyé l'affaire à l'audience du 23 novembre 2021,
- dit que l'arrêt vaut convocation des parties en justice,
- réservé tous les chefs de demande ainsi que les dépens.
6. Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 1er décembre 2021, l'AGS demande à la cour de :
- sur la procédure,
- constatant que :
* le jugement lui-même mentionne comme seules parties l'AGS, Maître [C] représentant l'E.U.R.L. Arebat et Monsieur [M] [X],
* la déclaration d'appel reprend strictement l'indication des parties portée sur la décision attaquée,
* le liquidateur a qualité à représenter la société liquidée judiciairement pour ce qui concerne les actions patrimoniales et les demandes d'inscription de créance, même si la liquidation n'emporte plus dissolution de la société,
* l'erreur éventuelle commise dans la désignation de l'intimé dans la déclaration d'appel ne constitue pas une irrégularité de fond affectant la régularité de l'appel,
* à défaut de grief démontré, aucune irrecevabilité n'est encourue,
- déclarer recevable l'appel de l'AGS formalisé par déclaration d'appel du 24 mai 2018,
- en tout état de cause, faire droit à la demande de renvoi pour permettre la régularisation de l'appel par citation extra-judiciaire de l'E.U.R.L. Arebat,
- au fond,
- infirmer la décision attaquée en ce qu'elle a :
* fixé les créances de Monsieur [M] [X] à l'égard de l'E.U.R.L. Arebat aux sommes suivantes :
1.741,75 € bruts au titre du salaire du mois de janvier 2016,
1.741,75 € bruts à titre d'indemnité de préavis,
174,17 € bruts à titre de congés payés sur préavis,
6.000,00 € bruts à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,
600,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
* ordonné la délivrance des bulletins de paye des mois de janvier à mars 2016, d'une attestation destinée à Pôle Emploi et d'un certificat de travail, sous astreinte de 50,00 € par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification du jugement,
- statuant à nouveau,
- constatant que Monsieur [M] [X] se trouvait en congés payés du 1er janvier au 17 janvier 2016 inclus et que, ne pouvant se prévaloir d'un droit à véhicule de fonction, il ne s'est plus tenu à la disposition de l'employeur après cette date,
- constatant que Monsieur [M] [X] n'a pas travaillé du 18 au 31 janvier 2016, l'employeur constatant son absence lui ayant fait sommation de reprendre son poste,
- débouter Monsieur [M] [X] de sa demande à titre de salaire pour le mois de janvier 2016,
- dire sans effet le licenciement intervenu postérieurement à la prise d'acte,
- constatant qu'aucune preuve n'est apportée du manquement de l'employeur à une obligation de sécurité (le véhicule incriminé ne lui appartenant pas),
- constatant que Monsieur [M] [X] ne s'est pas tenu à la disposition de l'employeur, n'a pas travaillé en janvier 2016, et qu'il n'a pas démontré qu'un retard de paiement d'une moitié de salaire éventuellement due aurait été pour lui d'une gravité telle qu'il aurait interdit la poursuite du contrat de travail,
- dire que la prise d'acte de la rupture est imputable au salarié et qu'elle produit les effets d'une démission,
- débouter Monsieur [M] [X] de l'ensemble de l'intégralité de ses demandes liées à une rupture imputable à l'employeur (notamment indemnité compensatrice de préavis, indemnité pour non-respect de la procédure et dommages et intérêts),
- subsidiairement, si la prise d'acte était déclarée fondée sur des faits suffisamment graves de l'employeur,
- constatant l'absence de production aux débats d'élément de preuve relatifs à la situation personnelle et matérielle du demandeur permettant d'évaluer les préjudices qu'il invoque sans autre précision,
- réduire considérablement l'indemnité réclamée à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- confirmer la décision attaquée pour le surplus,
- sur sa garantie,
- dire que la décision à intervenir ne lui sera opposable que dans les seules limites de sa garantie légale prévue aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail,
- en conséquence, dire que sa garantie est plafonnée, toutes créances
avancées pour le compte du salarié, à l'un des trois plafonds définis à l'article D. 3253 du code du travail,
- exclure de sa garantie les créances résultant de la rupture initiée par Monsieur [M] [X], soit l'indemnité compensatrice de préavis,
l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement, les dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, l'indemnité compensatrice de congés payés et l'indemnité pour travail dissimulé,
- exclure de sa garantie les créances éventuellement inscrites au titre des frais irrépétibles, des dépens, en paiement d'une astreinte et en délivrance des documents.
7. À l'appui de ses prétentions, l'AGS fait en effet valoir :
- que le jugement ne mentionne pas l'E.U.R.L. Arebat à partir du moment où elle était représentée par son liquidateur, de sorte qu'elle ne pouvait donc pas l'inclure parmi les intimés dans sa déclaration d'appel, aucun grief n'étant par ailleurs établi et une régularisation étant toujours possible,
- que Monsieur [M] [X] réclame son salaire de la première quinzaine de janvier 2016 alors qu'il n'a pas travaillé, la caisse des congés payés du BTP étant responsable du paiement de cette période de congés,
- que Monsieur [M] [X] ne saurait reprocher à son employeur l'état d'un véhicule appartenant à un de ses collègues, utilisé pour se rendre à son travail, ce fait étant en toute hypothèse insuffisant pour refuser de se rendre à son poste, le salaire pour la seconde quinzaine du mois de janvier 2016 n'étant donc pas dû,
- que le licenciement intervenu postérieurement à la prise d'acte est nécessairement sans effet,
- que la prise d'acte s'analyse en une démission lorsque les faits, que doit prouver le salarié, ne sont pas d'une gravité suffisante, le doute profitant à l'employeur,
- que Monsieur [M] [X] a obtenu une indemnité équivalente à plus de 4 mois de salaire alors qu'il ne compte que 7 mois d'ancienneté.
8. La S.E.L.A.R.L. [Y] [C], à qui la déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées à personne morale le 17 septembre 2018, n'a pas constitué avocat.
9. L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 février 2022.
10. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de l'appel
11. L'article 553 du code de procédure civile dispose qu' "en cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel de l'une produit effet à l'égard des autres même si celles-ci ne sont pas jointes à l'instance ; l'appel formé contre l'une n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance".
12. En l'espèce, il ressort de la procédure de première instance que Monsieur [M] [X] a d'abord saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Pierre le 23 mars 2016, alors que l'E.U.R.L. Arebat était in bonis, l'affaire étant finalement, après plusieurs renvois, radiée le 5 juillet 2017 par suite de défaut de comparution du demandeur, avant d'être ré-enrôlée suivant requête du 16 août 2017, avec mise en cause de I'AGS et de la S.E.L.A.R.L. [Y] [C], désignée en qualité de liquidateur de l'E.U.R.L. Arebat suivant jugement du tribunal mixe de commerce de Saint-Pierre du 1er mars 2017.
13. Le litige entre Monsieur [M] [X] et l'E.U.R.L. Arebat est né avant l'ouverture de la procédure collective, en sorte que la société dispose d'un droit propre à se défendre contre le jugement rendu le 25 avril 2018. Pourtant, l'acte d'appel de l'AGS désigne uniquement en qualité d'intimés la S.E.L.A.R.L. [Y] [C] ès qualités de liquidateur de l'E.U.R.L. Arebat et Monsieur [M] [X].
14. La circonstance que le jugement entrepris ne mentionne pas, au rang des défendeurs, l'E.U.R.L. Arebat, est inopérante, dès lors qu'il s'évinçait de sa seule lecture que cette dernière disposait d'un droit propre à le critiquer en sa qualité de partie, en vertu de l'article L. 237-2 du code de commerce.
15. Par ailleurs, le litige présentant un caractère d'indivisibilité entre l'E.U.R.L. Arebat et son liquidateur la S.E.L.A.R.L. [Y] [C] et aucune régularisation n'étant possible, il conviendra de déclarer l'appel de l'AGS irrecevable.
Sur les dépens
16. L'AGS, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, en matière sociale et en dernier ressort, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Déclare l'appel de l'AGS irrecevable,
Condamne l'AGS aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, président de chambre, et par Mme Nadia HANAFI, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière, Le président,
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CAPP/JURITEXT000046991418.xml | Copies exécutoires République française
délivrées aux parties le : Au nom du peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 5
ORDONNANCE DU 15 JUILLET 2022
(no391/2022, pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 22/11262 - No Portalis 35L7-V-B7G-CF7DX
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 25 Mai 2022 TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS - RG no 22/51862
Nature de la décision : Contradictoire
NOUS, Catherine BRUNET, Présidente de chambre, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assisté de Samia BOUGUEROUCHE, Greffière.
Vu l'assignation en référé délivrée le 30 juin 2022 à la requête de :
S.A.S. VIAE FRANCE
[Adresse 6]
[Localité 8]
Représentée par Me David LACAZE du PARTNERSHIPS HERBERT SMITH FREEHILLS PARIS LLP, avocat au barreau de PARIS
Monsieur [H] [P]
[Adresse 4]
[Localité 9]
Représenté par Me Romain LESUEUR, avocat au barreau de PARIS, toque : A0292
Madame [F] [V] épouse [P]
[Adresse 4]
[Localité 9]
Représentée par Me Romain LESUEUR, avocat au barreau de PARIS, toque : A0292
Monsieur [T] [P]
[Adresse 2]
[Localité 11]
Représenté par Me Romain LESUEUR, avocat au barreau de PARIS, toque : A0292
Madame [G] [P]
[Adresse 7]
[Localité 10]
Représentée par Me Romain LESUEUR, avocat au barreau de PARIS, toque : A0292
Monsieur [M] [P]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représenté par Me Romain LESUEUR, avocat au barreau de PARIS, toque : A0292
EXPOSE DU LITIGE:
Et après avoir appelé les parties lors des débats de l'audience publique du 13 Juillet 2022 :
Mesdames [F] et [G] [P] et Messieurs [H], [T] et [M] [P] (les consorts [P]) ont donné à bail commercial à la société par actions simplifées unipersonnelle VIAE FRANCE des locaux moyennant un loyer annuel de 160 000 euros, hors charges et hors taxes, payable trimestriellement d'avance, ce par acte sous seing privé du 2 juin 2021.
Les bailleurs ont accordé à la société une franchise de loyers de six mois à charge pour celle-ci de réaliser des travaux d'aménagement.
Par acte d'huissier du 19 novembre 2021 remis à personne morale, les consorts [P] ont fait délivrer à la société VIAE FRANCE un commandement de payer, visant la clause résolutoire insérée au bail, pour une somme de 20 833 euros au titre de l'arriéré locatif.
Par acte d'huissier du 28 janvier et 21 mars 2022 , les consorts [P] ont fait assigner la société VIAE FRANCE devant la juridiction des référés du tribunal judiciaire de Paris.
Par ordonnance de référé rendue le 25 mai 2022, le président du tribunal judiciaire de Paris a :
- constaté l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 20 décembre 2021 ;
- ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux dans les 48 heures de la signification de la présente ordonnance puis sous astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard durant trois mois, l'expulsion de la SASU VIAE FRANCE et de tout occupant de son chef des lieux situés à [Adresse 1], si besoin avec le concours de la force de publique et l'assistance d'un serrurier ;
- dit, en cas de besoin, que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désigné par elle et qu'à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l'huissier chargé de l'exécution, avec sommation à la personne expulsée d'avoir à les retirer dans un délai de quatre semaines à l'expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de l'exécution, ce conformément à ce que prévoient les dispositions du code des procédures civiles d'exécution sur ce point ;
- fixé à titre provisionnel l'indemnité d'occupation due par la SASU VIAE FRANCE, à compter de la résiliation du bail et jusqu'à la libération effective des lieux par la remise des clés ou l'expulsion, à une somme égale au montant du loyer contractuel, outre les taxes, charges et accessoires ;
- condamné par provision la SASU VIAE FRANCE, à payer en deniers ou quittances aux consorts [H], [F], [T], [G] et [M] [P], la somme de 115.465,87 euros correspondant aux loyers, charges, taxes, autres accessoires et indemnités d'occupation au 1er avril 2022 (deuxième trimestre 2022 inclus), avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation ;
- condamné la SASU VIAE FRANCE aux entiers dépens, en ce compris le coût du commandement de payer visant la clause résolutoire en date du 19 novembre 2021 ;
- condamné la SASU VIAE FRANCE à payer aux consorts [H], [F], [T], [G] et [M] [P], la somme de 1.200 euros par application desdispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- rejeté toute autre demande plus ample ou contraire.
La société VIAE France a interjeté appel de cette décision le 24 juin 2022.
Par acte du 30 juin 2022, elle a assigné les consorts [P] devant le premier président de la cour d'appel de Paris en référé aux fins d'arrêt de l'exécution provisoire. Elle demande au premier président de la cour d'appel statuant en référé de :
- arrêter l'exécution provisoire attachée la décision du 25 mai 2022 du tribunal judiciaire de Paris ;
- condamner in solidum [H], [F], [T], [G] et [M] [P] à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civil ainsi qu'en tous les dépens.
A l'audience du 13 juillet 2022, elle a réitéré et soutenu oralement les termes de son assignation.
Aux termes de leurs conclusions visées par le greffier et soutenues oralement le 13 juillet 2022, les consorts [P] demandent au premier président de la cour d'appel de Paris de :
- les juger recevables et bien fondés en leurs demandes ;
- juger que la société VIAE FRANCE ne justifie pas de l'existence d'un moyen d'annulation ou de réformation de l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris en date du 25 mai 2022 (RG no 22/51662) ;
- juger que la société VIAE FRANCE ne prouve pas que l'exécution provisoire de l'ordonnance des référés du 25 mai 2022 (RG no 22/51662) risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la date de son délibéré ;
- débouter la société VIAE FRANCE de l'ensemble de ses demandes ;
- condamner la société VIAE FRANCE à leur verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société VIAE FRANCE aux entiers dépens de l'instance.
Sur la demande de suspension de l'exécution provisoire
La société VIAE FRANCE soutient que l'exécution provisoire doit être arrêtée car il existe des moyens sérieux d'annulation et de réformation de l'ordonnance et qu'elle subirait des conséquences manifestement excessives en raison de cette exécution provisoire. S'agissant des moyens sérieux d'annulation et de réformation de l'ordonnance, elle fait valoir que le principe de la contradiction n'a pas été respecté, que les conditions de la procédure de référé n'étaient pas réunies et qu'elle remplissait les conditions lui permettant d'obtenir des délais. Concernant les conséquences de l'exécution provisoire, elle invoque une situation économique relativement difficile et une altération de manière grave et profonde de son organisation si l'exécution provisoire de la décision n'était pas suspendue. Elle ajoute que les actionnaires de la holding du groupe VIAE en France, la société VIAE GROUPE SA, ont décidé d'augmenter son capital.
Les consorts [P] font valoir en premier lieu que la société qui a comparu sans conclure n'a pas fait valoir d'observations sur l'exécution provisoire de sorte qu'elle n'est recevable à obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire qu'en raison de l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et de conséquences manifestement excessives révélées postérieurement au 25 mai 2022. Ils soutiennent l'absence de moyens sérieux de réformation, le principe de la contradiction ayant été selon eux respecté ainsi que les conditions du référé, la société n'ayant pas formulé de demande de délai et la juridiction lui ayant permis de justifier d'un paiement afin de lui accorder des délais de paiement. Ils font valoir une absence de conséquences manifestement excessives pour la société et des conséquence excessives les concernant en cas de suspension de l'exécution provisoire en ce que le loyer constitue une créance alimentaire pour un d'entre eux, handicapé à plus de 80%.
Aux termes de l'article 514-3 du code de procédure civile, dans sa version applicable aux instances introduites devant les juridictions du premier degré à compter du 1er janvier 2020, qu'en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.
Les conséquences manifestement excessives s'apprécient en ce qui concerne les condamnations pécuniaires par rapport aux facultés de paiement du débiteur et aux facultés de remboursement de la partie adverse en cas d'infirmation de la décision assortie de l'exécution provisoire.
Le risque de conséquences manifestement excessives suppose un préjudice irréparable et une situation irréversible en cas d'infirmation.
En l'espèce, la décision assortie de l'exécution provisoire est une ordonnance de référé. Par application des dispositions de l'article 514-1 du code de procédure civile, le juge ne peut écarter l'exécution provisoire de droit lorsqu'il statue en référé. Dès lors, l'obligation de faire valoir des observations en première instance sur l'exécution provisoire à peine d'irrecevabilité ne peut pas être opposée à la société VIAE FRANCE puisqu'en tout état de cause, le juge ne pourrait pas écarter l'exécution provisoire.
S'agissant des moyens sérieux invoqués par la société VIAE France, aux termes des dispositions combinées des articles 14 et 16 du code de procédure civile, nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée et le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.
Un moyen sérieux ne peut pas être retenu au titre d'un manquement au principe de la contradiction alors qu'il résulte des dires concordants des parties, des termes de l'ordonnance de référé et des pièces produites aux débats que :
- l'affaire a été évoquée à deux reprises les 14 mars et 11 avril 2022 ;
- la société VIAE FRANCE a été appelée à ces deux audiences ;
- elle ne conteste pas ne pas avoir conclu comme l'indiquent les consorts [P] et ses dires sont repris dans l'ordonnance de référé ;
- la juridiction a renvoyé l'affaire à l'audience du 11 avril 2022 afin de lui permettre de s'acquitter de sa dette locative puis à cette audience, a refusé un nouveau renvoi mais a autorisé une note en délibéré avant le 9 mai 2022, l'affaire étant mise en délibéré jusqu'au 25 mai, afin de permettre à la société de justifier de ce paiement ;
- la société a adressé le 23 mai 2022 un courriel au service des référés du tribunal judiciaire de Paris afin d'indiquer qu'un virement venait d'être effectué le jour-même sur le compte Carpa de son conseil et de solliciter une réouverture des débats ;
- le paiement est parvenu sur le compte du gestionnaire du bailleur le 25 mai, pour la somme de 1 544,58 euros et le 27 mai, pour une somme de 64 583 euros, les consorts [P] ayant indiqué par courriel du 24 mai 2022 à 21 heures ne pas avoir reçu de paiement.
Ainsi, la société VIAE FRANCE a été à même de présenter son argumentation au cours de deux audiences, ses dires ont été pris en compte et elle a bénéficié d'un renvoi afin de s'acquitter de sa dette puis d'un délai supplémentaire pour ce faire dans le cadre d'une note en délibéré qu'elle a adressée à la juridiction au-delà de la date fixée.
La société VIAE FRANCE soutient ensuite que les conditions du référé n'étaient pas réunies dans la mesure où une contestation sérieuse tenant à la mauvaise foi des bailleurs dans la mise en oeuvre de la clause résolutoire existait.
Aux termes de l'article 834 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable au litige, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend. Il résulte de l'article 835 du même code que le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Par application des dispositions de l'article L. 145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai. Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.
En l'espèce, il ressort des pièces produites aux débats que :
- le bail commercial conclu entre les partie stipule une clause résolutoire prévoyant qu'un mois après un commandement de payer ou après une sommation d'exécuter demeurés infructueux, le bail sera résilié de plein droit conformément aux dispositions de l'article L. 145-41 du code de commerce précité ;
- un commandement de payer a été signifié le 19 novembre 2021 et la juridiction des référés a été saisie par un acte d'huissier du 28 janvier 2022 soit plus d'un mois après le caractère infructueux non contesté de ce commandement ;
- un relevé de compte est joint à ce commandement de payer et ce dernier mentionne le délai d'un mois au terme duquel la résiliation de plein droit produit effet ;
- le bail commercial stipule que la franchise consentie au titre d'une participation de la société aux travaux d'aménagement porte sur les six premiers mois de loyer en principal ce qui exclut les charges locatives ;
- il stipule également que le preneur s'oblige à payer trimestriellement et d'avance le loyer en quatre termes égaux notamment le premier octobre de chaque année.
En outre, la société VIAE FRANCE ne conteste ni la validité du commandement de payer ni le montant de la somme sollicitée. Un moyen sérieux tiré d'une assignation délivrée un mois seulement après que le premier loyer a commencé à courir ne peut pas être retenu alors qu'aux termes du bail, le loyer du mois de décembre 2021 était exigible à compter du premier octobre 2021. Enfin, les échanges de courriels produits par la société sont inopérants pour démontrer que les consorts [P] ont engagé cette procédure afin de libérer les locaux en vue d'une vente.
En dernier lieu, compte tenu de ce qui précède sur le déroulement de la procédure, la société VIAE FRANCE ne peut pas valablement soutenir qu'elle n'a pas pu bénéficier de délais de paiement.
Dès lors, il sera retenu qu'il n'existe pas de moyen sérieux d'annulation ou de réformation de l'ordonnance de référé.
S'agissant des conséquences manifestement excessives que l'exécution de la décision risquerait d'entraîner, la société VIAE FRANCE indique seulement qu'une expulsion aurait pour conséquence d'altérer de manière grave et profonde son organisation sans caractériser précisément au regard de son activité et de son organisation, ces conséquences.
Ces éléments commandent de rejeter la demande d'arrêt de l'exécution provisoire.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
La société VIAE FRANCE, partie perdante, sera tenue aux dépens et condamnée à payer aux consorts [P] la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle sera déboutée de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
Rejetons la demande d'arrêt de l'exécution provisoire de l'ordonnance de référé du 25 mai 2022 du président du tribunal judiciaire de Paris formée par la société VIAE FRANCE,
Condamnons la société VIAE FRANCE à verser à Mesdames [F] et [G] [P] et Messieurs [H], [T] et [M] [P] la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboutons la société VIAE France de sa demande au titre des frais irrépétibles.
Condamnons la société VIAE FRANCE aux dépens.
ORDONNANCE rendue par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
La Greffière, La Présidente
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CAPP/JURITEXT000046991426.xml | AFFAIRE : N RG No RG 20/01344 - No Portalis DBWB-V-B7E-FM5K
Code Aff. : ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Pole social du TJ de SAINT DENIS en date du 06 Février 2020, rg no 19/00730
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANTE :
Madame [X], [F],[W] [Y]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Emilie MAIGNAN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2020/1590 du 18/05/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)
La caisse générale de sécurité sociale de la Réunion
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Isabelle CLOTAGATIDE KARIM de la SCP CANALE-GAUTHIER-ANTELME-BENTOLILA, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 mars 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Nadia HANAFI, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 9 Juin 2022 mise à disposition prorogée au 13 juillet 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 JUILLET 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Par requête adressée le 21 septembre 2018 au tribunal du contentieux de I'incapacité, transféré le 1er janvier 2019 au pôle social du tribunal de grande instance de Saint-Denis, devenu tribunal judiciaire à compter du 1er janvier 2020, Madame [X] [Y] a contesté une décision de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion du 1er août 2018 qui a fixé à 5% le taux d'incapacité permanente résultant d'un accident du travail survenu le 8 juillet 2015.
2. À la demande du tribunal, le Dr. [D] [H] a examiné Madame [X] [Y] et déposé un rapport.
3. Par jugement du 6 février 2020, le tribunal a :
- confirmé la décision de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion du 1er août 2018 qui a fixé à 5% le taux d'incapacité permanente de Madame [X] [Y] résultant de l'accident du travail survenu
le 8 juillet 2015,
- dit n'y avoir lieu à condamnation aux dépens.
4. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 12 août 2020, Madame [X] [Y] a interjeté appel de cette décision.
5. Les parties ont été convoquées par lettre recommandée avec avis de réception du 9 mars 2021 à l'audience du 1er juin 2021.
6. L'affaire a été plaidée à l'audience du 22 mars 2021 et mise en délibéré au 9 juin 2021, prorogé au 27 juin 2021.
7. Madame [X] [Y] déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 28 janvier 2022, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- statuant à nouveau,
- juger que son recours est parfaitement recevable et a été régularisé dans les délais,
- annuler la décision rendue le 1er août 2018 par la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion fixant à 5% le taux d'incapacité permanente résultant de l'accident survenu le 8 juillet 2015,
- fixer à 25% le taux d'incapacité permanente résultant de l'accident de trajet qu'elle a eu à subir le 8 juillet 2015,
- juger en conséquence qu'elle est fondée à solliciter le versement d'une rente viagère versée de manière trimestrielle,
- juger que chaque partie conservera les dépens à sa charge.
8. À l'appui de ses prétentions, Madame [X] [Y] fait en effet valoir :
- que le bureau d'aide juridictionnelle lui a notifié son admission à l'aide juridictionnelle le 18 mai 2020 et qu'elle bénéficiait en outre des dispositions de l'article 2 de l'ordonnance no 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire, de sorte que son appel du 12 août 2020 a été interjeté dans les délais,
- que son état antérieur n'est pour rien dans les symptômes puisqu'elle avait parfaitement récupéré d'une opération d'un neurinome et avait pu reprendre son travail normalement, alors qu'elle a fait l'objet d'un licenciement pour inaptitude suite à son accident du travail.
9. La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 26 janvier 2022, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a confirmé la fixation du taux d'incapacité permanente de Madame [X] [Y] à 5%,
- débouter Madame [X] [Y] de toutes ses demandes, fins et conclusions articulées à son encontre.
10. À l'appui de ses prétentions, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion fait en effet valoir :
- qu'elle renonce au moyen tiré de l'irrecevabilité de l'appel, intervenu dans les délais en tenant compte de la décision d'aide juridictionnelle et de la période protégée intervenue en raison de la crise sanitaire,
- que l'état antérieur de Madame [X] [Y] était connu et a été logiquement pris en considération lors de l'évaluation des séquelles.
11. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées ainsi qu'à la note d'audience figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le taux d'incapacité permanente partielle
12. L'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale dispose en son 1er alinéa que "le taux de l'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité".
13. L'article R. 434-32 précise que la caisse primaire se prononce sur l'existence d'une incapacité permanente au vu de tous les renseignements recueillis et des barèmes indicatifs d'invalidité dont il est tenu compte pour la détermination du taux d'incapacité permanente d'une part en matière d'accidents du travail et d'autre part en matière de maladies professionnelles.
14. L'annexe I de l'article R. 434-32 prescrit que "les éléments dont le médecin doit tenir compte, avant de proposer le taux médical d'incapacité permanente, sont donc :
1o La nature de l'infirmité. Cet élément doit être considéré comme la donnée de base d'où l'on partira, en y apportant les correctifs, en plus ou en moins, résultant des autres éléments. Cette première donnée représente l'atteinte physique ou mentale de la victime, la diminution de validité qui résulte de la perte ou de l'altération des organes ou des fonctions du corps humain. Le présent barème doit servir à cette évaluation.
2o L'état général. Il s'agit là d'une notion classique qui fait entrer en jeu un certain nombre de facteurs permettant d'estimer l'état de santé du sujet. Il appartient au médecin chargé de l'évaluation d'adapter en fonction de l'état général, le taux résultant de la nature de l'infirmité. Dans ce cas, il en exprimera clairement les raisons.
L'estimation de l'état général n'inclut pas les infirmités antérieures - qu'elles résultent d'accident ou de maladie - ; il en sera tenu compte lors de la fixation du taux médical.
3o L'âge. Cet élément, qui souvent peut rejoindre le précédent, doit être pris en considération sans se référer exclusivement à l'indication tirée de l'état civil, mais en fonction de l'âge organique de l'intéressé. Il convient ici de distinguer les conséquences de l'involution physiologique, de celles résultant d'un état pathologique individualisé. Ces dernières conséquences relèvent de l'état antérieur et doivent être estimées dans le cadre de celui-ci.
On peut ainsi être amené à majorer le taux théorique affecté à l'infirmité, en raison des obstacles que les conséquences de l'âge apportent à la réadaptation et au reclassement professionnel.
4o Facultés physiques et mentales. Il devra être tenu compte des possibilités de l'individu et de l'incidence que peuvent avoir sur elles les séquelles constatées. Les chiffres proposés l'étant pour un sujet normal, il y a lieu de majorer le taux moyen du barème, si l'état physique ou mental de l'intéressé paraît devoir être affecté plus fortement par les séquelles que celui d'un individu normal.
5o Aptitudes et qualification professionnelles. La notion de qualification professionnelle se rapporte aux possibilités d'exercice d'une profession déterminée. Quant aux aptitudes, il s'agit là des facultés que peut avoir une victime d'accident du travail ou de maladie professionnelle de se reclasser ou de réapprendre un métier compatible avec son état de santé".
15. L'annexe poursuit :
"3. Infirmités antérieures.
L'estimation médicale de l'incapacité doit faire la part de ce qui revient à l'état antérieur, et de ce qui revient à l'accident. Les séquelles rattachables à ce dernier sont seules en principe indemnisables. Mais il peut se produire des actions réciproques qui doivent faire l'objet d'une estimation particulière.
a. Il peut arriver qu'un état pathologique antérieur absolument muet soit révélé à l'occasion de l'accident de travail ou de la maladie professionnelle mais qu'il ne soit pas aggravé par les séquelles. Il n'y a aucune raison d'en tenir compte dans l'estimation du taux d'incapacité.
b. L'accident ou la maladie professionnelle peut révéler un état pathologique antérieur et l'aggraver. Il convient alors d'indemniser totalement l'aggravation résultant du traumatisme.
c. Un état pathologique antérieur connu avant l'accident se trouve aggravé par celui-ci. Etant donné que cet état était connu, il est possible d'en faire l'estimation. L'aggravation indemnisable résultant de l'accident ou de la maladie professionnelle sera évaluée en fonction des séquelles présentées qui peuvent être beaucoup plus importantes que celles survenant chez un sujet sain. Un équilibre physiologique précaire, compatible avec une activité donnée, peut se trouver détruit par l'accident ou la maladie professionnelle".
16. Enfin, l'annexe précise :
"3.2 RACHIS DORSO-LOMBAIRE.
Si le rachis dorsal est un segment pratiquement rigide et participant peu aux mouvements, la pathologie traumatique du rachis lombaire est fréquente. Aussi, est-il indispensable de tenir compte des données rhumatologiques les plus récentes de la pathologie discale et non discale lombaire.
Pour éviter les interprétations erronées basées sur une fausse conception de l'image radiologique, il faut définir avec soin les données objectives de l'examen clinique et, notamment, différencier les constatations faites selon qu'elles l'ont été au repos ou après un effort.
L'état antérieur (arthroses lombaires ou toute autre anomalie radiologique que l'accident révèle et qui n'ont jamais été traitées antérieurement), ne doit en aucune façon être retenu dans la génèse des troubles découlant de l'accident.
Normalement, la flexion à laquelle participent les vertèbres dorsales et surtout lombaires est d'environ 60o. L'hyperextension est d'environ 30o, et les inclinaisons latérales de 70o. Les rotations atteignent 30o de chaque côté.
C'est l'observation de la flexion qui donne les meilleurs renseignements sur la raideur lombaire. La mesure de la distance doigts-sol ne donne qu'une appréciation relative, les coxo-fémorales intervenant dans les mouvements vers le bas. L'appréciation de la raideur peut se faire par d'autres moyens, le test de Schober-Lasserre peut être utile. Deux points distants de 15 cm (le point inférieur correspondant à l'épineuse de L 5), s'écartent jusqu'à 20 dans la flexion antérieure. Toute réduction de cette différence au-dessous de 5 cm atteste une raideur lombaire réelle.
Persistance de douleurs notamment et gêne fonctionnelle (qu'il y ait ou non séquelles de fracture) :
- Discrètes 5 à 15
- Importantes 15 à 25
- Très importantes séquelles fonctionnelles et anatomiques 25 à 40.
À ces taux s'ajouteront éventuellement les taux estimés pour les séquelles nerveuses coexistantes.
Anomalies congénitales ou acquises : lombosciatiques.
Notamment : hernie discale, spondylolisthésis, etc. opérées ou non. L'I.P.P. sera calculée selon les perturbations fonctionnelles constatées".
17. En l'espèce, les premiers juges ont limité le taux d'incapacité de Madame [X] [Y] à 5% en relevant un état antérieur important.
18. À la demande du tribunal, le Dr. [D] [H] a examiné Madame [X] [Y] à l'audience du 28 novembre 2019 et déposé un rapport aux termes duquel, par suite de contusions lombaires entraînées par l'accident de trajet pour se rendre au travail du 8 juillet 2015, l'intéressée, qui présente une limitation de la mobilité lombaire sur état antérieur (opération d'un neurinome en 2009 entraînant des lombalgies), présente une incapacité permanente partielle inférieure à 5%, majorée entre 15 et 25% sans prise en compte de cet état antérieur.
19. Certes, il ressort d'un compte rendu de consultation du 17 janvier 2013, fait avant l'accident du travail par le Dr. [E] [I] dans le cadre du suivi médical de Madame [X] [Y] depuis "une exérèse complète d'un neurinome de L1 opéré en 2009", que "la patiente se porte bien (et que) son IRM de contrôle du 22 décembre 2012 ne montre pas de récidive", mais ce constat existait encore après l'accident de travail dans un certificat du Dr. [A] [P] du 5 août 2015 mentionnant "des discopathies dégénératives modérées en L1-L2 et L2-L3", ou encore lors d'une IRM pratiquée le 3 novembre 2015 par le Dr. [O] [B].
20. Ce n'est que le 17 août 2016, soit plus d'un an après son accident du travail, que le Dr. [N] [C] indique que "l'état de santé clinique de Madame [X] [Y], âgée de 46 ans, nécessite une rééducation adaptée et spécifique en CRF". Si la salariée a été licenciée pour inaptitude le 6 mars 2017, il ressort d'un certificat médical du Dr. [Z] [G] du 22 juillet 2016 que l'intéressée "n'envisage pas de reprendre (sa profession) chez son ancien employeur du fait de la charge de travail".
21. Le Dr. [S], dans un avis donné le 9 février 2018 en sa qualité de médecin conseil, fait état d' "un état arthrosique débutant muet" antérieur à l'accident du travail qui l'a révélé.
22. L'aggravation de l'état de santé de Madame [X] [Y] par l'accident du travail dont elle a été victime n'étant pas établie, l'expert a, à bon droit, isolé la part revenant exclusivement à cet accident en limitant l'incapacité permanente partielle à 5%.
23. Enfin, Madame [X] [Y] produit 4 attestations sur les difficultés qu'elle rencontre dans sa vie quotidienne, lesquelles sont sans pertinence sur la fixation de son incapacité permanente partielle en rapport avec son accident du travail.
24. Dans ces conditions, il conviendra de confirmer le jugement en toutes ses dispositions.
Sur les dépens
25. Madame [X] [Y], partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne Madame [X] [Y] aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, président de chambre, et par Mme Nadia HANAFI, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière, Le président,
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CAPP/JURITEXT000046991432.xml | AFFAIRE : No RG 20/01835 - No Portalis DBWB-V-B7E-FN5D
Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT PIERRE en date du 16 Septembre 2020, rg no F19/00178
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANTE :
S.A.R.L. BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES CONCEPTION ET REALISATI ON
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Sylvie MOUTOUCOMORAPOULE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [G] [Y] [P]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Bruno RAFFI, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/006870 du 25/11/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)
Clôture : 7 mars 2022
DÉBATS : En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Delphine GRONDIN, greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 5 Juillet 2022 prorogé au 13 juillet 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 JUILLET 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Monsieur [G] [Y] [P] a été embauché par la S.A.R.L. Bureau d'Études Techniques Conception et Réalisation selon contrat de travail à durée indéterminée de chantier du 20 avril 2017 pour un salaire de 1.788,19 € brut et un taux horaire de 35 heures par semaine en qualité de chauffeur poids lourd.
2. Le 15 mai 2019, il a fait l'objet d'un licenciement pour faute grave.
3. Par requête du 17 juillet 2019, Monsieur [G] [Y] [P] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Pierre en contestation de son licenciement.
4. Par jugement du 16 septembre 2020, le conseil a condamné la S.A.R.L. Bureau d'Études Techniques Conception et Réalisation à payer à Monsieur [G] [Y] [P], sous le bénéfice de l'exécution provisoire, la somme de 5.364,75 € à titre d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et la somme de 1.200,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
5. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 16 octobre 2020, la S.A.R.L. Bureau d'Études Techniques Conception et Réalisation a interjeté appel de cette décision.
6. Par ordonnance du 5 octobre 2021, le conseiller de la mise en état a débouté Monsieur [G] [Y] [P] de sa demande de radiation, les causes du jugement ayant été exécutées.
7. Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 7 février 2022, la S.A.R.L. Bureau d'Études Techniques Conception et Réalisation demande à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- statuant à nouveau,
- juger que le licenciement de Monsieur [G] [Y] [P] est justifié au regard de la gravité de la faute commise par le salarié,
- constater que les griefs reprochés à Monsieur [G] [Y] [P] sont constitutifs d'une faute grave,
- juger que les demandes formulées par Monsieur [G] [Y] [P] sont mal fondées,
- rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions formulées par Monsieur [G] [Y] [P],
- condamner Monsieur [G] [Y] [P] à lui payer la somme de 3.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
8. À l'appui de ses prétentions, la S.A.R.L. Bureau d'Études Techniques Conception et Réalisation fait en effet valoir :
- que l'usage abusif de son téléphone professionnel et l'utilisation du camion de la société à des fins personnelles sont des fautes suffisamment graves ayant pu conduire au licenciement de Monsieur [G] [Y] [P], d'autant plus que ce dernier était coutumier de ce dernier fait,
- qu'en revendant de sa propre initiative des déblais à des particuliers à l'insu de la société, il a mis en péril les intérêts de son employeur au regard de la législation applicable aux déchets inertes, de chantier et déblais, qui plus est en sollicitant l'aide d'un engin qui n'était pas homologué pour la circulation sur la route afin de le sortir de son enlisement,
- que Monsieur [G] [Y] [P] produit des attestations de complaisance sans contester celle du chef d'équipe.
9. Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 11 mars 2021, Monsieur [G] [Y] [P] demande à la cour de :
- confirmer purement et simplement le jugement entrepris,
- condamner la S.A.R.L. Bureau d'Études Techniques Conception et Réalisation aux entiers dépens et à lui payer la somme de 2.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
10. À l'appui de ses prétentions, Monsieur [G] [Y] [P] fait en effet valoir :
- qu'il n'a jamais reçu de téléphone professionnel,
- que c'est à la demande de son employeur qu'il s'est débarrassé de remblais qui intéressaient des particuliers,
- que la S.A.R.L. Bureau d'Études Techniques Conception et Réalisation ne produit aucune pièce pertinente alors que la charge de la preuve lui incombe.
11. L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 mars 2022.
12. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le licenciement
13. L'article L. 1232-1 du code du travail prévoit que "tout licenciement pour motif personnel est motivé dans les conditions définies par le présent chapitre.
Il est justifié par une cause réelle et sérieuse".
14. L'article L. 1232-6 dispose que, "lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception.
Cette lettre comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur".
15. La faute grave est caractérisée par des faits imputables personnellement au salarié, qui constituent un non-respect des obligations de son contrat de travail ou des relations au travail et qui est d'une telle importance qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée de son préavis. La charge de la preuve de la faute grave du salarié incombe à l'employeur.
16. En l'espèce, la lettre de licenciement de Monsieur [G] [Y] [P] est ainsi motivée :
"Nous faisons suite à l'entretien préalable du vendredi 10 mai 2019 effectué en présence de votre conseiller.
Vous avez eu une conduite constitutive d'une faute grave suite aux faits suivants :
- Usage abusif du téléphone professionnel
- Utilisation du camion de la société immatriculé EM 376 RM à des fins personnelles pour acheminer à votre initiative des déblais issus de nos chantiers chez un particulier et que ces faits s'avèrent récurrents. De plus, à votre propre initiative vous avez fait déplacer un chauffeur de pelle et son engin en le faisant rouler sur la chaussée aux fins de vous dépanner suite à votre enlisement chez un particulier.
Ces faits représentent un manquement grave de votre part. C'est pourquoi compte tenu de leur gravité et malgré vos explications lors de notre entretien, nous sommes au regret de devoir procéder à votre licenciement pour faute grave".
17. En premier lieu, il sera relevé que la S.A.R.L. Bureau d'Études Techniques Conception et Réalisation ne produit aucune pièce permettant de démontrer un usage abusif de son téléphone professionnel par Monsieur [G] [Y] [P], étant observé que l'employeur n'a pas entendu contester l'assertion de son salarié selon laquelle aucun téléphone à usage professionnel ne lui aurait été remis.
18. En deuxième lieu, concernant l'acheminement de déblais chez des particuliers de sa propre initiative et à des fins personnelles, ce reproche est principalement fondé sur :
- une attestation de Monsieur [C] [S] indiquant avoir entendu une conversation téléphonique entre Monsieur [J] [N] et Monsieur [G] [Y] [P] dans laquelle ce dernier demandait au premier "de se rendre à [Localité 5] pour le décoincer sans en informer le chef de chantier",
- une attestation dudit chef de chantier, Monsieur [I] [L], qui a constaté l'absence sur le chantier tant de Monsieur [G] [Y] [P] que de Monsieur [J] [N] avant de s'entendre dire du premier qu'il était allé déposer des déblais à la demande d'un particulier et confirmer par le second qu'il était parti avec la pelle pour aider Monsieur [G] [Y] [P] à sortir de son enlisement.
19. La matérialité du fait reproché, bien que non datée et fondée sur des attestations non conformes aux dispositions des articles 202 et suivants du code de procédure civile, n'est pas contestée par Monsieur [G] [Y] [P] qui affirme ne pas l'avoir fait de sa propre initiative mais à la demande du client, formée directement auprès de Monsieur [K] [X], gérant de la S.A.R.L. Bureau d'Études Techniques Conception et Réalisation.
20. C'est effectivement ce qui ressort de l'attestation de Monsieur [D] [H], qui précise que la S.A.R.L. Bureau d'Études Techniques Conception et Réalisation "n'a pas reçu de contrepartie d'argent ou autre".
21. Il n'est pas possible, faute de date dans les diverses attestations comme dans la lettre de licenciement, de savoir si le transport fait auprès de Monsieur [D] [H] était celui reproché dans la lettre de licenciement, Monsieur [G] [Y] [P] produisant d'autres attestations, comme celle de Monsieur [I] [R], de Monsieur [A] [M] ou de Monsieur [T] [B] relatant avoir bénéficié de la livraison de déblais de la part du salarié sans contrepartie financière.
22. L'employeur se contente de discréditer des "attestations de complaisance" sans davantage expliciter son propos. Il doit être considéré comme ne rapportant pas la preuve des griefs énoncés dans la lettre de licenciement.
23. Il conviendra donc de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que le licenciement de Monsieur [G] [Y] [P] avait été prononcé sans cause réelle et sérieuse.
Sur l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse
24. L'article L. 1235-3 du code du travail dispose que, "si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge (...) octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre (des) montants minimaux et maximaux", soit entre 3 mois et 3,5 mois de salaire brut pour des salariés comptant deux années d'ancienneté dans les entreprises d'au moins 11 salariés.
25. En l'espèce, le conseil, tenant compte du fait que Monsieur [G] [Y] [P] a subi un préjudice particulier "puisqu'il s'est retrouvé du jour au lendemain sans situation professionnelle, sans salaire", a pu à bon droit arbitrer à 3 mois de salaire brut l'indemnité due au salarié.
Sur le remboursement à Pôle Emploi
26. En application des dispositions des articles L.1235-4 et L.1235-5 du code du travail, il convient d'ordonner d'office le remboursement à Pôle Emploi par la S.A.R.L. Bureau d'Études Techniques Conception et Réalisation des indemnités de chômage versées à Monsieur [G] [Y] [P], dans la limite de six mois.
27. Il conviendra sur ce point d'ajouter au jugement qui ne l'avait pas mentionné.
Sur les dépens
28. La S.A.R.L. Bureau d'Études Techniques Conception et Réalisation, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
29. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la partie condamnée aux dépens prend en charge les frais irrépétibles exposés par la partie adverse dans les proportions que le juge détermine.
30. En l'espèce, il ne sera pas fait application de ces dispositions, Monsieur [G] [Y] [P] étant bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale et la S.A.R.L. Bureau d'Études Techniques Conception et Réalisation étant la partie condamnée aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Ordonne d'office le remboursement à Pôle Emploi par la S.A.R.L. Bureau d'Études Techniques Conception et Réalisation des indemnités de chômage versées à Monsieur [G] [Y] [P], dans la limite de six mois,
Condamne la S.A.R.L. Bureau d'Études Techniques Conception et Réalisation aux dépens d'appel,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, Président de chambre, et par Mme Delphine GRONDIN, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991433.xml | AFFAIRE : N RG No RG 21/00644 - No Portalis DBWB-V-B7F-FREA
Code Aff. : ARRÊT N
ORIGINE :JUGEMENT du Pole social du TJ de SAINT-DENIS en date du 17 Mars 2021, rg no 19/01523
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANTE :
La caisse générale de sécurité sociale de [Localité 7]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Philippe Barre de la selarl Philippe Barre, avocat au barreau de Saint-Denis-de-la-Réunion, avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
Madame [T] [B]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Comparante
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2022 en audience publique, devant Philippe Bricogne, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Delphine Grondin, greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 5 juillet prorogé au 13 juillet 2022;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Philippe Bricogne
Conseiller : Laurent Calbo
Conseiller : Aurélie Police
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 juillet 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Par courrier recommandé avec avis de réception du 3 juillet 2019, Madame [T] [B] a saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Saint-Denis de La Réunion, devenu tribunal judiciaire à compter du 1er janvier 2020, d'une contestation à l'encontre de la décision implicite de rejet de la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8] relative à I'exonération de cotisations sociales prévue à l'article L. 756-2 du code de la sécurité sociale.
2. Par courrier recommandé avec avis de réception du 22 juin 2020, Madame [T] [B] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion d'une contestation à l'encontre d'une mise en demeure du 3 février 2020 délivrée par la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8] pour obtenir le paiement de cotisations sociales au titre du 4ème trimestre 2019.
3. Par jugement du 17 mars 2021, le tribunal a :
- ordonné la jonction des affaires no 19/1523 et no 20/411 au bénéfice du no 19/1523,
- jugé que Madame [T] [B] bénéficie de l'exonération des cotisations sociales visée à l'article L. 756-2 du code de la sécurité sociale du 18 septembre 2018 au 17 septembre 2020,
- annulé la mise en demeure du 3 février 2020 émise par la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8],
- ordonné à la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8] de procéder à la modification des appels de cotisations de Madame [T] [B] émis depuis le 18 septembre 2018,
- condamné la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8] aux entiers dépens,
- condamné la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8] au paiement à Madame [T] [B] de la somme de 500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision.
4. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 14 avril 2021, la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8] a interjeté appel de cette décision.
5. Les parties ont été convoquées par lettre recommandée avec avis de réception du 28 avril 2021 à l'audience du 5 octobre 2021.
6. L'affaire a été plaidée à l'audience du 11 avril 2022 et mise en délibéré au 5 juillet 2022, prorogé au 13 juillet 2022..
7. La caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8] déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 4 octobre 2021, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris,
- valider la décision administrative contestée du 10 janvier 2019 et par voie de conséquence,
- dire que Madame [T] [B] ne peut être considérée en situation de début d'activité par combinaison des dispositions des articles L. 756-2 et R. 133-1 du code de la Sécurité sociale,
- valider la mise en demeure du 3 février 2020,
- condamner Madame [T] [B] aux dépens.
8. À l'appui de ses prétentions, la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8] fait en effet valoir que seul peut avoir droit à l'exonération de 24 mois prévue à l'article L. 756-2 du code de la sécurité sociale, le cotisant qui débute l'exercice d'une activité indépendante, Madame [T] [B] ayant débuté son activité d'avocate à [Localité 10] avant de s'installer à La Réunion où elle n'a fait que transférer son activité qui n'a pas cessé pendant plus d'une année civile.
9. Madame [T] [B] déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 7 décembre 2021, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- confirmer le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire Pôle social le 17 mars 2021 en ce qu'il a :
* dit et jugé qu'elle bénéficie de l'exonération des cotisations sociales visées à l'article L. 756-2 du code de la sécurité sociale du 18 septembre 2018 au 17 septembre 2020,
* annulé la mise en demeure du 3 février 2020 émise par la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8],
* ordonné a la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8] de procéder à la modification des appels de ses cotisations émis depuis le 18 septembre 2018,
* condamné la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8] aux entiers dépens de première instance,
* condamné la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8] à lui payer la somme de 500,00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance,
- en conséquence,
- débouter la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8] à lui payer la somme de 1.500,00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la présente procédure d'appel,
- condamner la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8] aux entiers dépens d'appel.
10. À l'appui de ses prétentions, Madame [T] [B] fait en effet valoir que les dispositions de l'article L. 756-2 du code de la sécurité sociale sont bien applicables à la situation d'une réinstallation d'un cabinet d'avocat à La Réunion, dès lors que c'est le début d'activité dans un département d'outre-mer qui est visé, peu important l'activité antérieure déployée en métropole.
11. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées ainsi qu'à la note d'audience figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'exonération des cotisations sociales
12. L'article L. 756-2 du code de la sécurité sociale dispose que "les cotisations et contributions de sécurité sociale, à l'exception des cotisations prévues à l'article L. 635-1 et des cotisations et contributions recouvrées par les organismes mentionnés aux articles L. 642-1 et L. 652-1, ne sont pas dues pour une période de vingt-quatre mois à compter de la date de création de l'activité lorsque les revenus d'activité rapportés à l'année entière au titre de chacune des années civiles correspondant à cette période sont inférieurs à un seuil fixé à 110 % du montant annuel du plafond mentionné à l'article L. 241-3. Pour des revenus d'activité compris entre 110 % et 150 % du montant annuel du plafond mentionné au même article L. 241-3, le montant de cette exonération est celui applicable pour un revenu égal à 110 % du montant annuel de ce plafond. Au-delà, le montant de cette exonération décroît linéairement à proportion des revenus d'activité et devient nul lorsque ces revenus atteignent 250 % du montant annuel du plafond mentionné audit article L. 241-3".
13. Ce dispositif dérogatoire du droit commun, qui s'insère dans un titre relatif aux "dispositions particulières à la [Localité 5], à la [Localité 6], à la [Localité 9], à [Localité 8], à [Localité 11] et à [Localité 12]", tend à favoriser le développement économique et l'emploi dans le département d'outre-mer concerné, en aidant à la création d'entreprises par l'exonération de certaines cotisations pendant les deux premières années d'activité.
14. Il s'évince de ces dispositions législatives que toute personne débutant une activité est celle qui entreprend une activité nouvelle, non par rapport à elle-même, mais pour le département d'outre-mer, peu important son activité antérieure, identique ou non, en métropole.
15. Le Conseil constitutionnel a d'ailleurs consacré dans sa décision no 2013-301 QPC du 5 avril 2013 que ce dispositif, tel qu'interprété par la Cour de cassation en ce sens, ne méconnaissait pas le principe d'égalité devant la loi et les charges publiques.
16. Il s'ensuit que c'est à bon droit que les premiers juges ont dit et jugé que Madame [T] [B] bénéficiait de l'exonération des cotisations sociales visées à l'article L. 756-2 du code de la sécurité sociale du 18 septembre 2018 au 17 septembre 2020, en raison de l'installation de son cabinet d'avocate à [Localité 8] à compter du 18 septembre 2018, peu important qu'elle fût précédemment avocate à [Localité 10] jusqu'à cette date.
17. C'est également à bon droit que les premiers juges, sanctionnant la méconnaissance par la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8] des dispositions de l'article L. 756-2 du code de la sécurité sociale dans les appels à cotisation et dans l'envoi d'une mise en demeure du 3 février 2020, ont annulé cette mise en demeure et ordonné à la caisse de procéder à la modification des appels de cotisations de Madame [T] [B] émis depuis le 18 septembre 2018.
18. Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.
Sur les dépens
19. La caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8], partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
20. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la partie condamnée aux dépens prend en charge les frais irrépétibles exposés par la partie adverse dans les proportions que le juge détermine.
21. En l'espèce, il convient de faire bénéficier Madame [T] [B] de ces dispositions à hauteur de 1.000,00 €.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8] aux dépens,
Condamne la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 8] à payer à Madame [T] [B] la somme de 1.000,00 € (mille euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, Président de chambre, et par Mme Delphine GRONDIN, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991427.xml | AFFAIRE : No RG 21/00057 - No Portalis DBWB-V-B7F-FPSY
Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Pole social du TJ de SAINT-DENIS en date du 16 Décembre 2020, rg no 19/02148
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANTE :
Etablissement Public CENTRE HOSPITALIER [6] prise en la personne de son représentant légal en exercice
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Eric DUGOUJON de la SELARL DUGOUJON & ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
LA CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA REUNION (CGSSR)
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Isabelle CLOTAGATIDE KARIM de la SCP CANALE-GAUTHIER-ANTELME-BENTOLILA, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Delphine GRONDIN, greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 5 Juillet 2022 prorogé au 13 Juillet 2022;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 JUILLET 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Le 20 juin 2019, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion a notifié au centre hospitalier [6] un indu de 18.501,43 € au titre d'activités de chirurgie sans autorisation.
2. La commission de recours amiable n'ayant pas statué dans les délais, le centre hospitalier [6] a contesté cet indu par requête parvenue au pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Denis le 18 décembre 2019.
3. Par jugement du 16 décembre 2020, le tribunal a :
- validé l'indu notifié par la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion au centre hospitalier [6] d'un montant de 18.501,43 €,
- condamné le centre hospitalier [6] au paiement à la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion de la somme de 18.501,43 €,
- condamné le centre hospitalier [6] aux entiers dépens,
- dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
4. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 14 janvier 2021, le centre hospitalier [6] a interjeté appel de cette décision.
5. Les parties ont été convoquées par lettre recommandée avec avis de réception du 29 mars 2021 à l'audience du 7 septembre 2021.
6. L'affaire a été plaidée à l'audience du 11 avril 2022 et mise en délibéré au 5 juillet 2022 prorogé au 13 juillet 2022.
7. Le centre hospitalier [6] déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 6 septembre 2021, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- déclarer recevable son appel,
- infirmer totalement le jugement entrepris,
- statuant à nouveau,
- juger que la somme de 18.501,43 € mise à sa charge n'est pas due,
- ordonner la décharge de la somme de 18.501,43 €,
- annuler la notification d'indu de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion du 20 juin 2019 pour un montant de 18.501,43 € et la décision de rejet implicite de la commission de recours amiable,
- condamner la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion aux entiers dépens,
- condamner la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion à lui verser la somme de 5.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
8. À l'appui de ses prétentions, le centre hospitalier [6] fait en effet valoir :
- que même un médecin dont l'établissement n'est pas titulaire de l'autorisation a l'obligation de prodiguer à son patient tous les soins exigés en urgence par l'état de ce dernier lorsqu'une opération chirurgicale réalisée en urgence a permis de découvrir une tumeur maligne,
- qu'il est tout à fait possible, pour un établissement non titulaire de l'autorisation, de procéder à une intervention chirurgicale dès lors que cette dernière n'aurait pas pour objectif de soigner la tumeur maligne,
- que, même si l'état carcinologique mammaire est préalablement connu par l'établissement hospitalier non titulaire de l'autorisation, cela ne fait pas obstacle à ce que ce dernier puisse effectuer une autre opération mammaire de la patiente, dès lors que cette opération n'a pas pour but de soigner le caractère cancérologique de la patiente, à défaut d'urgence et en dispensant à la patiente des soins consciencieux,
- qu'en d'autres termes, l'urgence ne constitue pas une condition limitative du champ d'intervention de l'établissement hospitalier non titulaire de l'autorisation,
- que, dans les quatre cas reprochés, il n'a procédé à aucune opération de chirurgie cancérologique mammaire,
- que, dans deux cas, il a seulement effectué un prélèvement de tissus, dans un autre, l'établissement bénéficiaire de l'autorisation n'était pas en mesure de prodiguer les soins exigés pour cette patiente dont l'état de santé nécessitait l'existence d'un service de réanimation au vu de son état de morbidité et, dans le dernier, l'élargissement des berges de la zonectomie de la patiente, déjà existante et non réalisée par lui, ne constituait par un acte chirurgical lié à la chirurgie cancérologique mammaire.
9. La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 3 décembre 2021, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a validé l'indu d'un montant de 18.501,43 € notifié au centre hospitalier [6] et condamné ce dernier à lui rembourser ladite somme de 18.501,43 €,
- débouter le centre hospitalier [6] de toutes ses demandes, fins et conclusions articulées contre elle.
10. À l'appui de ses prétentions, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion fait en effet valoir que tous les dossiers en cause concernent des soins programmés et non une situation d'urgence, soit que le centre hospitalier universitaire [5] disposait d'une autorisation d'intervention pour la chirurgie carcinologique du sein ainsi que d'un service de réanimation, soit qu'au vu de son dossier médical, la patiente aurait dû être prise en charge d'emblée dans un établissement spécialisé détenteur de l'autorisation pour chirurgie carcinologique mammaire, soit encore que la consultation spécialisée carcinologique préopératoire montrait bien une forte présomption à la nature cancéreuse de la lésion, soit enfin que l'opération faisait suite à une réunion multidisciplinaire faite plus de deux mois plus tôt.
11. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées ainsi qu'à la note d'audience figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'indu
12. Aux termes de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, "en cas d'inobservation des règles de tarification, de distribution ou de facturation :
1o Des actes, prestations et produits figurant sur les listes mentionnées aux articles L. 162-1-7, L. 162-17, L. 165-1, L. 162-22-7, L. 162-22-7-3 et L. 162-23-6 ou relevant des dispositions des articles L. 162-16-5-1-1, L. 162-16-5-2, L. 162-17-2-1, L. 162-22-1, L. 162-22-6, L. 162-23-1 et L. 165-1-5,
2o Des frais de transports mentionnés à l'article L. 160-8,
l'organisme de prise en charge recouvre l'indu correspondant auprès du professionnel, du distributeur ou de l'établissement à l'origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l'assuré, à un autre professionnel de santé, à un distributeur ou à un établissement".
13. L'article R. 133-9-1 prévoit en son 2ème alinéa que la notification d'indu "précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées et la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement".
14. L'article R. 6123-91 du code de la santé publique dispose que, "lorsqu'une intervention chirurgicale réalisée en urgence dans un établissement qui n'est pas titulaire de l'autorisation de traitement du cancer a permis de découvrir une tumeur maligne, l'établissement donne au patient tous les soins exigés en urgence par l'état du patient ou par les suites de l'intervention, avant d'assurer son orientation vers un établissement titulaire de cette autorisation".
15. En l'espèce, la notification d'indu adressée le 20 juin 2019 par la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion au centre hospitalier [6] concerne des traitements effectués en 2016 et est fondée sur les dispositions des articles L. 133-4 et R. 133-9-1 du code de la sécurité sociale.
16. Le centre hospitalier [6] fait état, pour expliquer le dépassement des actes autorisés, des obligations déontologiques du praticien exigées par le code de la santé publique :
- à l'article R. 4127-40 : "le médecin doit s'interdire, dans les investigations et interventions qu'il pratique comme dans les thérapeutiques qu'il prescrit, de faire courir au patient un risque injustifié",
- à l'article R. 4127-32 : "dès lors qu'il a accepté de répondre à une demande, le médecin s'engage à assurer personnellement au patient des soins consciencieux, dévoués et fondés sur les données acquises de la science, en faisant appel, s'il y a lieu, à l'aide de tiers compétents".
17. Toutefois, indépendamment des seules obligations déontologiques rappelées ci-dessus, le centre hospitalier [6] doit justifier de la seule considération d'urgence qui lui permettait de facturer les actes incriminés.
18. Or, le centre hospitalier [6] produit trois des quatre compte-rendus opératoires des patientes concernées, à savoir :
- celui du 4 avril 2016 (dossier no 1 de la notification de l'indu) pour l'hospitalisation d'une patiente de 78 ans du 31 mars au 4 avril 2016 pour "une récidive (...) de carcinome mammaire droit 15 ans après un carcinome mammaire droit traité par tumorectomie, curage, chimiothérapie, radiothérapie. La patiente a bénéficié d'une nouvelle cure de chimiothérapie qui n'améliore pas la tumeur. Décision de mastectomie totale de propreté".
- celui du 27 mai 2016 (dossier no 8 de la notification de l'indu) concernant une intervention du 13 mai 2016 pour une reprise de tumorectomie à distance d'une exérèse antérieure non in sano d'un carcinome in situ programmée depuis une réunion multidisciplinaire du 9 mars 2016, après une première zonectomie du 26 février 2016.
- celui du 23 août 2016 (dossier no 3 de la notification de l'indu) pour une hospitalisation du 19 août 2016 chez une "patiente âgée de 61 ans chez qui il avait été découvert sur une mammographie de dépistage un foyer de micro calcification au niveau du quadrant supéro externe du sein gauche. La biopsie retrouve un foyer d'hyperplasie canalaire atypique. Indication de zonectomie après repérage radiologique".
- celui du 2 janvier 2017 (dossier no 2 de la notification de l'indu) pour une intervention du 26 décembre 2016 chez une "patiente de 62 ans opérée récemment d'une néoplasie mammaire T1 Nx-M0 par zonectomie et curage axillaire (avec) proposition de reprise chirugicale avec recoupe supérieure et pamectomie".
19. Il ne ressort aucune considération d'urgence de ces compte-rendus dès lors que les interventions étaient programmées, parfois de longue date.
20. Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.
Sur les dépens
21. Le centre hospitalier [6], partie perdante, sera condamné aux dépens d'appel.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
22. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la partie condamnée aux dépens prend en charge les frais irrépétibles exposés par la partie adverse dans les proportions que le juge détermine.
23. En l'espèce, le centre hospitalier [6], partie condamnée aux dépens, n'est pas éligible à ces dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne le centre hospitalier [6] aux dépens d'appel,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, Président de chambre, et par Mme Delphine GRONDIN, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991440.xml | AFFAIRE : N RG No RG 20/02235 - No Portalis DBWB-V-B7E-FOYE
Code Aff. : ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Pole social du TJ de [Localité 5] en date du 18 Novembre 2020, rg no 19/01955
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANTE :
Madame [J] [R] [W]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
La caisse générale de sécurité sociale de la Réunion
Pôle Expertise Juridique Santé
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Isabelle CLOTAGATIDE KARIM de la SCP CANALE-GAUTHIER-ANTELME-BENTOLILA, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 mars 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Nadia HANAFI, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 9 Juin 2022 mise à disposition prorogée au 13 juillet 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 9 juin 2022 puis prorogé au 13 juillet 2022 ;
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Par requête du 20 novembre 2019, Madame [J] [R] [W], lingère au sein de l'association Levavasseur, a saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Saint Denis de La Réunion, devenu tribunal judiciaire, aux fins de contester la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion portant sur sa demande de prise en charge d'un accident du travail dont elle aurait été victime le 21 juin 2018.
2. Par jugement du 18 novembre 2020, le tribunal a :
- débouté Madame [J] [R] [W] du recours formé à l'encontre de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion du 6 juin 2019,
- rejeté la demande formée par Madame [J] [R] [W] au titre de l'artice 700 du code de procédure civile,
- condamné Madame [J] [R] [W] aux entiers dépens.
3. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 10 décembre 2020, Madame [J] [R] [W] a interjeté appel de cette décision.
4. Les parties ont été convoquées par lettre recommandée avec avis de réception du 11 mars 2021 à l'audience du 1er juin 2021.
5. L'affaire a été plaidée à l'audience du 22 mars 2022 et mise en délibéré au 9 juin 2022, prorogé au 27 juin 2022.
6. Madame [J] [R] [W] déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 3 décembre 2021, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- statuant à nouveau,
- juger non fondée la décision de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion du 6 juin 2019 refusant de reconnaître le caractère professionnel de son sinistre et la décision explicite de rejet de la commission de recours amiable du 28 février 2020,
- en conséquence,
- annuler la décision de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion du 6 juin 2019 refusant de reconnaître le caractère professionnel de son sinistre et la décision explicite de rejet de la commission de recours amiable du 28 février 2020,
- débouter la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion à lui verser la somme de 3.000,00 € au titre de I'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
7. À l'appui de ses prétentions, Madame [J] [R] [W] fait en effet valoir :
- qu'elle fait l'objet d'un harcèlement moral depuis plusieurs années de la part de son directeur de pôle, situation qui l'a conduite à déposer plainte,
- qu'elle a découvert, à travers un compte-rendu de réunion relatant des contre-vérités, qu'elle avait été délibérément évincée d'une réunion de travail pour mieux la dénigrer, ce qui l'aurait psychologiquement anéantie,
- qu'elle n'a à ce jour pas pu reprendre son travail en raison d'un syndrome dépressif,
- que cet événement peut être qualifié d'accident du travail car il ne fait pas suite à une simple tension entre collègues ou à un désaccord avec la hiérarchie, peu important que son arrêt de travail date du lendemain de la découverte du compte-rendu de réunion.
8. La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 29 novembre 2021, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Madame [J] [R] [W] du recours formé à l'encontre de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable,
- statuant à nouveau,
- juger que Madame [J] [R] [W] ne peut bénéficier de la législation relative aux risques professionnels pour l'incident du 20 juin 2018,
- rejeter toute demande de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile articulée à son encontre,
- débouter Madame [J] [R] [W] de toutes ses demandes, fins et conclusions.
9. À l'appui de ses prétentions, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion fait en effet valoir :
- que, pour bénéficier de la présomption d'imputabilité au travail, encore faut-il que la victime puisse établir la réalité d'un fait accidentel survenu au temps et sur le lieu du travail, à l'origine d'une lésion,
- que, si les relations entre Madame [J] [R] [W] et ses collègues semblent tendues, cette situation ne saurait revêtir la qualification d'accident du travail,
- que la lésion psychologique dont souffre Madame [J] [R] [W] résulterait davantage d'une dégradation lente et continue de ses conditions de travail, ce qui ne répond aucunement à la définition légale et jurisprudentielle de l'accident du travail.
10. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées ainsi qu'à la note d'audience figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'accident du travail
11. Aux termes de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, "est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise".
12. Une dépression nerveuse soudaine intervenue après un événement particulier peut être prise en charge au titre de la législation sur les accidents du travail, de même que des troubles psychologiques (stress nécessitant un traitement psychologique) consécutifs à un choc émotionnel, mais, pour que le traumatisme psychologique subi par un salarié puisse être qualifié d'accident du travail, il doit être établi que l'arrêt de travail prescrit a été causé par une brutale altération des facultés mentales, par exemple en relation avec le harcèlement invoqué.
13. En l'espèce, Madame [J] [R] [W], qui estime être victime depuis plusieurs années de faits constitutifs de harcèlement moral de la part du directeur de son pôle, Monsieur [E] [I], soutient que ce dernier l'aurait délibérément mise à l'écart de la réunion de service du 7 juin 2018 en l'obligeant à être de repos ce jour-là et que, le 20 juin 2018, elle aurait pris connaissance du compte rendu de cette réunion ainsi rédigé sur le point 4 relatif à la lingerie :
"[L] est inquiet car les problèmes de panier non montés ou non descendus par [R] n'ont jamais été résolus. Il pense également que la lingère vient trop souvent à la cuisine pour solliciter l'aide de [V] par exemple pour demander à qui appartient tel ou tel vêtement.
[L] pense que le retour d'[R] dans l'établissement après son accident du travail a été précipité, cela met l'équipe en difficulté car il y a beaucoup de tâches qu'elle ne peut (ou veut) plus réaliser seule.
Cela fait une surcharge de travail notamment pour [C] et [Y] qui s'occupent des chambres et qui doivent aller aider leur collègue.
[Y] dit qu'elle va prendre rendez-vous avec [N] [F] [G] car cette situation ne peut plus durer.
L'équipe s'interroge sur le fait qu'il n'y a jamais eu aucun problème lorsque quelqu'un d'autre est en poste sur la lingerie.
[V] dit qu'il y avait trop de drap aujourd'hui. Elle pense qu'il faudrait s'occuper des draps et des serviettes en priorité.
[L] annonce que mercredi, il y avait 10 paniers à la lingerie. [R] n'a pas traité car elle n'a pas eu d'aide. Se pose alors la question de la place du renfort en lingerie. Le renfort est-il là pour faire tout le travail ou juste donner un coup de main ?
[K] rappelle que sur le planning il est noté que le renfort en lingerie est fait pour donner un coup de main aux lingères et non pour faire à leur place.
Monsieur [I] a entendu les sollicitations de l'équipe et demande à chaque agent de signer ce compte-rendu pour pouvoir mettre en place des solutions. Toute l'équipe est d 'accord pour signer.
Il va rencontrer [R] pour lui faire part du ressenti de l'équipe".
14. Madame [J] [R] [W] a été mise en arrêt maladie dès le lendemain pour "syndrome dépressif en rapport avec le travail" et elle a ensuite adressé un courrier le 22 juin 2018 à la direction de son entreprise pour "signalement de propos et d'attitudes de dénigrement de la part de (ses) collègues". Elle a enfin effectué une déclaration de sinistre "accident du travail" le 14 novembre 2018, transmise le lendemain par son employeur à la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion avec des réserves.
15. Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, la seule lecture du compte-rendu de réunion du 7 juin 2018, qui évoque le problème de la lingerie parmi 8 autres points et qui, en cette occasion, relate des difficultés d'organisation au-delà du seul cas de Madame [J] [R] [W] en des termes relativement neutres, ne traduit pas l'existence d'un événement soudain et anormal survenu au temps et au lieu du travail, quand bien même l'intéressée, sans aucun doute fragilisée par ce qu'elle estime être un harcèlement durable, aurait pu en concevoir une amertume telle qu'elle se soit sentie exclue de sa communauté de travail.
16. Le certificat médical initial, daté du lendemain pour "syndrome dépressif en rapport avec le travail" ne caractérise pas davantage l'apparition soudaine d'une lésion au temps et sur le lieu du travail, l'arrêt de travail ne reposant que sur les propres déclarations de la salariée reçues par le praticien.
17. Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.
Sur les dépens
18. Madame [J] [R] [W], partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
19. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la partie condamnée aux dépens prend en charge les frais irrépétibles exposés par la partie adverse dans les proportions que le juge détermine.
20. En l'espèce, Madame [J] [R] [W], partie condamnée aux dépens, n'est pas éligible à ces dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne Madame [J] [R] [W] aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, président de chambre, et par Mme Nadia HANAFI, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991454.xml | No de minute : 163/2022
COUR D'APPEL DE NOUMÉA
Arrêt du 11 juillet 2022
Chambre civile
Numéro R.G. : No RG 19/00312 - No Portalis DBWF-V-B7D-QJT
Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 9 septembre 2019 par le juge de la mise en état du tribunal de première instance de NOUMEA (RG no :18/00387)
Saisine de la cour : 25 septembre 2019
M. [N] [E]
né le [Date naissance 10] 1955 à [Localité 16]
demeurant [Adresse 2]
Représenté par Me Nathalie LEPAPE, avocat au barreau de NOUMEA
Mme [K] [H] veuve [A]
née le [Date naissance 9] 1964 à [Localité 13]
demeurant [Adresse 1]
M. [I] [A]
né le [Date naissance 7] 1989 à [Localité 17]
demeurant [Adresse 4]
M. [Z] [A]
né le [Date naissance 6] 1991 à [Localité 18]
demeurant [Adresse 4]
M. [G] [A]
né le [Date naissance 3] 1992 à [Localité 15]
demeurant [Adresse 5]
M. [U] [A]
né le [Date naissance 11] 2000 à [Localité 15]
demeurant [Adresse 8]
Tous représentés par Me Yann BIGNON, membre de la SARL LEXCAL, avocat au barreau de NOUMEA
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 9 juin 2022, en audience publique, devant la cour composée de :
M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,
M. François BILLON, Conseiller,
Mme Zouaouïa MAGHERBI, Conseiller,
qui en ont délibéré, sur le rapport de M. François BILLON.
Greffier lors des débats : Mme Isabelle VALLEE
Greffier lors de la mise à disposition : M. Petelo GOGO
- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par M. Philippe ALLARD, président, et par M. Petelo GOGO, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.
***************************************
PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE
Le docteur [N] [E], titulaire depuis 1991 d'un contrat pour l'exercice exclusif de la radiologie dans la clinique [14] à [Localité 15], a signé, le 25 décembre 2006, un contrat d'association avec le docteur [T] [A], ce dernier versant à son confrère une indemnité de 34 000 000 F CFP. Le matériel nécessaire à cette activité a été attribué à la SCM [E] constituée le 18 décembre 2006, le docteur [A] en acquérant l'usage pour le prix de 21 360 000 F CFP. A l'issue d'un différend, les deux praticiens ont décidé, en octobre 2010, de cesser leur collaboration mais n'ont pas pu s'entendre sur l'indemnité de rupture du contrat, ni sur la date de départ du docteur [A] de la clinique.
M. [T] [A], par requête déposée le 28 septembre 2012, a fait appeler à comparaître devant le tribunal de première instance de Nouméa, M. [N] [E] aux fins et sous le bénéfice de l'exécution provisoire, de l'entendre condamner au paiement de la somme de 28 587 238 F CFP, au titre du solde d'une indemnité de rupture d'un contrat d'association du 25 décembre 2006, avec intérêts légaux à compter du 26 avril 2011, outre capitalisation des intérêts, sollicitant en outre la somme de 350 000 FCFP au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance du 23 mars 2015, le juge de la mise en état a prononcé la radiation de l'affaire.
Des conclusions aux fins de ré-enrôlement ont été déposées le 7 juillet 2017 sans qu'une suite ne leur soit donnée.
M. [T] [A] est décédé le [Date décès 12] 2017.
Les ayants droit de M. [A], à savoir Mme [K] [H] veuve [A], M. [I] [A], M. [Z] [A], M. [G] [A] et M. [U] [A] ont déposé le 19 janvier 2018 des conclusions d'intervention volontaire.
M. [N] [E], par conclusions déposées le 27 novembre 2018, complétées le 18 mars 2019, a saisi le juge de la mise en état, soulevant la péremption d'instance, eu égard à la date de radiation du 23 mars 2015 et l'irrecevabilité de la demande du fait du non-respect de la clause contractuelle de conciliation, sollicitant en outre la somme de 500 000 F CFP au titre des frais irrépétibles.
Les consorts [A], par leurs dernières conclusions déposées le 13 mai 2019, ont demandé au juge de la mise en état de :
- rejeter tant l'exception de péremption que la fin de non-recevoir tirée de l'absence de conciliation préalable ;
- condamner le docteur [E] à leur payer la somme de 300 000 F CFP en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux dépens de l'incident.
Par ordonnance de la mise en état du 9 septembre 2019, le tribunal de première instance de Nouméa a statué ainsi qu'il suit :
DISONS que l'instance n'est pas périmée ;
REJETTONS la fin de non-recevoir ;
DECLARONS la demande recevable ;
RENVOYONS l'affaire à l'audience de mise en état du JEUDI 31 octobre 2019 à 08 H 00 ;
CONDAMNONS M. [N] [E] à payer aux consorts [A] la somme de 300 000 F CFP sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile de Nouvelle Calédonie ;
CONDAMNONS M. [N] [E] aux dépens exposés à l'occasion de l'incident, avec application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SELARL YANN BIGNON, société d'avocats au barreau de NOUMEA.
PROCÉDURE D'APPEL
M. [E], par requête valant mémoire ampliatif déposée au greffe le 25 septembre 2019, a interjeté appel de la décision.
Dans ses conclusions récapitulatives enregistrées au greffe le 29 septembre 2021, il fait valoir, pour l'essentiel :
- que le courrier dont se prévalent les intimés pour soutenir que la péremption d'instance ne serait pas acquise, concerne une autre procédure et ne saurait donc avoir interrompu la présente procédure ;
- qu'en tout état de cause, le contrat d'association souscrit le 25 décembre 2006 entre le docteur [A] et le docteur [E], prévoyait expressément, en son article 9 relatif à la survenance d'un litige, la saisine préalable du Conseil de l'ordre ce qui n'a pas été fait par le docteur [A] et a eu pour effet de consacrer la fin de non-recevoir sollicitée ; que l'argument opposé consistant à relever un procès-verbal de non conciliation en date de 2010 est inopérant car la demande avait déjà été formulée par le seul docteur [E] et non par le docteur [A] comme le contrat le lui obligeait mais surtout parce que le différend était autre et portait non sur la rupture en elle-même de la convention, le docteur [A] ne l'ayant jamais remise en cause, mais sur les suites de cette rupture ;
- qu'il est établi que le docteur [A] a manifesté sa volonté contentieuse dés le 26 avril 2011, qu'il n'a jamais saisi le conseil de l'Ordre, qu'il a même initié une procédure contentieuse signée le 27 juillet 2012 et signifiée le 12 septembre 2012 au docteur [E] sans avoir préalablement initié de procédure de conciliation et alors même qu'il était parfaitement informé d'une convocation ce qui ajoute à sa faute contractuelle ;
- qu'enfin, les ayants droit n'ont pas acquis la qualité d'associé et n'ont donc pas qualité pour agir en justice.
En conséquence, M. [E] demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :
Vu l'article 776 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie,
Vu les articles 387, 388, 389 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie,
Vu les pièces versées au débat,
lNFlRMER l'ordonnance du juge de la mise en état du 9 septembre 2019 en toutes ses dispositions ;
Et statuant de nouveau :
DEBOUTER les intervenants volontaires de toutes leurs demandes fins et prétentions ;
CONSTATER que, conformément à l'article 388 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie, la péremption de l'instance est opposée par M. [N] [E] avant tout autre moyen et qu'elle est de droit ;
DECLARER en conséquence l'instance éteinte en application de l'article 389 du code de procédure civil ;
Vu les articles 122 et suivants du code de procédure civile,
CONSTATER l'irrecevabilité de la demande ;
DECLARER irrecevable l'intervention volontaire des intervenants volontaires ;
En tout état de cause,
CONDAMNER les intervenants volontaires à verser au Docteur [N] [E], la somme de 400 000 F CFP au titre des frais irrépétibles.
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Les Consorts [A], par conclusions enregistrées au RPVA le 16 juillet 2021, font valoir pour l'essentiel :
- qu'il résulte des dispositions de l'article 386 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie, que l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans ; que l'appelant se prévaut de l'ordonnance du juge de la mise en état en date du 23 mars 2015 ayant prononcé la radiation du rôle général de l'affaire 12/1933 qui prévoyait de "ré-enrôler l'affaire dès réception du rapport d'expertise financière dans une procédure civile parallèle opposant les mêmes parties" ; qu'en effet, en parallèle de la présente procédure initialement enregistrée au greffe sous le numéro 12/1933, existait une seconde procédure aux fins de dissolution de la SCM [E]-[A], initialement enrôlée au greffe sous le numéro 13/179 aujourd'hui devenue, après ré-enrôlement le numéro 18/385 ; que dans le cadre de celle-ci et aux fins d'être en mesure de statuer sur les conséquences de la dissolution et par ordonnance en date du 30 septembre 2013, le même juge de la mise en état a désigné M. [R] [P] en qualité d'administrateur ad'hoc de la SCM [E]-[A] avec notamment pour mission de suivre les procédures judiciaires pendantes intéressant la SCM [E]-[A] l'opposant à M. [A] et à la société d'exploitation de la Clinique [14], d'évaluer l'avantage de l'utilisation exclusive par le Dr [E] du matériel appartenant à la SCM [E]-[A] depuis le 1er mai 2011 et chiffrer la valeur résiduelle de celui-ci et enfin d'indiquer les moyens pour apurer les comptes entre les parties ; que l'interdépendance des procédures est manifeste, dès lors que ces éléments sont impératifs en ce qu'ils constituent la base de l'assiette de calcul de l'indemnité due par le Dr [E] à feu le Dr [A], son ancien confrère, les ayants droit de feu M. [A] ne sauraient ainsi subir l'inertie de l'administrateur de même que celle concertée de la société d'exploitation de la Clinique [14] et de son radiologue, le Dr [E] ; qu'en définitive, le juge de la mise en état a ré-enrôlé en 2018 les deux afffaires qui avaient été radiées en l'absence de diligences de l'administrateur ad'hoc ; que la péremption d'instance ne saurait être acquise, M.[A], puis sa succession, ne s'étant en rien désintéressés de la procédure et ayant bien au contraire fait diligence pour la faire progresser malgré l'interaction des différentes procédures, pour certaines toujours pendantes devant le tribunal de première instance et le tribunal mixte de commerce de Nouméa ;
- que le juge de la mise en état a justement écarté la fin de non-recevoir soulevée au motif qu'il ne pouvait être retenu que le préliminaire de conciliation prévu à l'article 9 du contrat d'association n'avait pas été respecté ; qu'en effet, différentes décisions de l'Ordre versées au débat établissent que cet organe a bien été saisi aux fins de conciliation comme le contrat l'avait prévu ;
- qu'enfin, si l'absence de qualité d'associé des ayants droit de feu M. [T] [A] peut être débattue, il n'en demeure pas moins que leur intérêt patrimonial en cette même qualité justifie leur intérêt à agir pour que soient prononcées, d'une part la dissolution mais surtout la liquidation de la société et sa valorisation ;
En conséquence, les consorts [A] demandent à la cour de statuer ainsi qu'il suit :
Confirmer, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 9 septembre 2019 déférée.
Y ajoutant,
Condamner M. [N] [E] à payer aux consorts [A] une somme de 500 000 F CFP, en cause d'appel et en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie.
Condamner M. [N] [E] aux entiers dépens de première instance et d'appel, et allouer à la Société d'Avocats LEXCAL, sur ses offres de droit, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie.
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L'ordonnance de clôture et de fixation de la date de l'audience a été rendue le 14 mars 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
De la péremption de l'instance
Attendu que pour se prévaloir de la péremption de l'instance, M. [E] rappelle que l'affaire a été radiée par ordonnance du 23 mars 2015, que le délai de péremption était acquis lorsque les concluants sont intervenus ès qualités par dépôt au greffe de conclusions en intervention volontaire, enregistrées le 19 janvier 2018 et accompagnées de l'acte de notoriété de feu leur mari et père, soit plus de deux ans après le délai prévu à l'article 386 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie prévoyant la péremption de l'instance ;
Attendu que les consorts [A] sont cependant fondés à relever :
- qu'ils ont manifesté, par toute voie qui leur était offerte, leur volonté de faire avancer la procédure y compris dans une phase où les diligences leur échappaient du fait de l'inaction de l'administrateur ad'hoc, ainsi qu'auprès du juge de la mise en état qui, par son ordonnance du 23 mars 2015 de radiation avait déjà prévu que "l'affaire serait ré-enrôlée lorsque le rapport d'expertise financière sera déposé dans une procédure parallèle opposant les mêmes parties" ;
- que des diligences accomplies dans le cadre des deux autres procédures civiles et commerciales dépendent du même évènement, soit de l'obtention des éléments de nature à apurer les comptes entre les deux praticiens par l'administrateur, notamment celles devant le tribunal mixte de commerce qui se sont notamment traduites par :
* une ordonnance de fixation en date du 26 août 2015 en vue de l'audience du 7 septembre 2016,
* des conclusions d'intervention volontaire de M. [T] [A] en sa qualité d'associé en date du 2 août 2016 aux termes desquelles il sollicitait un sursis à statuer jusqu'à fourniture par l'administrateur ad'hoc du montant des remboursements versés par les organismes payeurs à la Clinique,
* une ordonnance de fixation et une ordonnance du même jour renvoyant l'examen de la procédure au 30 décembre 2016 pour les conclusions de la société d'exploitation de la Clinique [14] ;
- qu'une ordonnance de fixation est ainsi intervenue le 6 décembre 2017 qui n'a pu aboutir en raison du décès du docteur [A] survenu le [Date décès 12] 2017 et de l'absence de l'administrateur ;
- que ces diligences dans une procédure interdépendante et tout particulièrement l'ordonnance de fixation qui a pour effet de suspendre toute obligation de diligences des parties, caractérisent manifestement une contribution à l'interruption de la péremption, les chiffres attendus de la procédure commerciale étant la clé de l'assiette de fixation de l'indemnité de résiliation sollicitée par le Docteur [A] dans la présente instance ;
Attendu que la jurisprudence a ainsi pu pu rappeler que, quand bien même la radiation remonterait à plus de deux années, "celle-ci n'a pas pour effet que de suspendre l'instance sans priver les parties de la faculté d'accomplir des diligences interruptives de la péremption " (Cass.2ème Civ. 11 juillet 2013, no 12-15994) ;
Attendu en conséquence, sans qu'il soit nécessaire de reprendre l'historique déjà énoncé dans l'ordonnance entreprise que la présente décision s'approprie, qu'il convient de dire que M. [A], puis ses ayants droits, ne se sont jamais désintéressés de la procédure et que leurs diligences ont interrompu la péremption de l'instance et partant l'extinction de celle-ci ; que l'ordonnance entreprise doit être ainsi confirmée ;
De la fin de non-recevoir
Attendu qu'il est établi que le contrat d'association du 25 décembre 2006 souscrit entre les docteurs [A] et [E] prévoyait notamment :
- en son article 3 : "L'association du Docteur [A] avec le Docteur [E] prendra effet au règlement par le Docteur [A] au bénéfice du Docteur [E] d'une demi-annuité d'honoraires calculée sur la moyenne des trois dernières années d'exercice précédant le contrat, augmentée d'une demi-part du matériel acquis par le Docteur [E] depuis son installation pour l'exercice de son art, évaluée contradictoirement par les parties, ou à défaut d'accord, à dire d'experts chaque partie désignant le sien" ;
- et en son article 9 :" En cas de litige ou de difficulté majeure résultant de leur exercice en commun ou de l'exécution du contrat, les parties conviennent de soumettre leur différend à une conciliation ordinale, chaque partie désignant son propre conciliateur.
La conciliation devra intervenir dans les quatre mois suivant la désignation du premier conciliateur.
A défaut de conciliation ou en cas de non respect des décisions émanant de la conciliation ordinale, le Docteur [E] versera au Docteur [A] qui se retirera de l'association, une somme correspondant à une demi-annuité de l'ensemble des honoraires calculée sur la moyenne des trois dernières années précédant la conciliation augmentée d'une demi-part du matériel acquis depuis son entrée dans l'association, évaluée contradictoirement ou à défaut d'accord à dire d'expert, chacune des parties désignant le sien" ;
Attendu que le docteur [E] soutient que le docteur [A] a manifesté sa volonté contentieuse dès le 26 avril 2011, qu'il n'a jamais saisi le conseil de l'ordre, qu'il a même initié une procédure contentieuse signée le 27 juillet 2012 et signifiée le 12 septembre 2012 au docteur [E] sans avoir préalablement initié de procédure de conciliation et alors même qu'il était parfaitement informé d'une convocation ce qui ajoute à sa faute contractuelle ;
Attendu cependant qu'il est produit aux débats :
- le procès-verbal de non-conciliation du 23 novembre 2010 du président de l'ordre des médecins de Nouvelle-Calédonie, saisi le 7 octobre 2010 par le docteur [E] "en application des dispositions de l'article 9 du contrat d'association", qui mentionne : "une divergence des points de vue rendant la conciliation impossible après 1h30 de discussion " ;
- le procès-verbal de médiation "n'excluant pas une solution amiable" du 13 novembre 2012 du président de l'ordre des médecins de Nouvelle-Calédonie, saisi le 18 juin 2012 par le docteur [E], portant "essentiellement sur un problème financier relatif au calcul des indemnités de départ du docteur [A]" ;
- le procès-verbal de non conciliation du 16 mai 2013 du président de l'ordre des médecins de Nouvelle-Calédonie, saisi le 12 décembre 2012 par le docteur [E] qui, suite à la médiation mise en place, souhaitait porter plainte à l'encontre du docteur [A] ;
- la décision de la chambre disciplinaire de première instance de l'organe de l'ordre des médecins de Nouvelle-Calédonie en date du 28 mai 2014, statuant sur la plainte du docteur [E] reprochant au docteur [A] son intention spéculative contraire au devoir de probité, qui reprenait les différentes tentatives infructueuses de conciliation des parties portant sur l'interprétation du contrat dont l‘appréciation "ressortit uniquement aux juridictions de l'ordre judiciaire, à l'exclusion des juridictions disciplinaires ordinales, le désaccord portant sur les conséquences pécuniaires du contrat" ;
- la décision de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins en date du 22 mars 2016 confirmant la décision de première instance et relevant que les modalités de calcul de l'indemnité d'éviction du docteur [A] ne constituaient pas un manquement à la probité ou au devoir de confraternité ;
Attendu qu'il est ainsi manifeste que le préalable de conciliation consacré par le procès-verbal de non conciliation du 23 novembre 2010 du président de l'ordre des médecins de Nouvelle-Calédonie, saisi le 7 octobre 2010 par le docteur [E], portait sur les conditions générales d'exécution de l'article 9 du contrat, ainsi que le docteur [E] l'a expressément formulé dans sa saisine, sans que cette saisine ne soit circonscrite, comme s'en prévaut la partie adverse, à un différend autre que les seules suites de la rupture du contrat d'association ; que le fait que cette demande de conciliation émane du docteur [E] et non du docteur [A] ne saurait au terme du contrat vicier l'effectivité du préalable de conciliation ;
Attendu que c'est en conséquence à juste titre que le premier juge a retenu que le préalable de conciliation prévu contractuellement avait été respecté ; que l'ordonnance doit être ainsi confirmée ;
De la qualité à agir des ayants droit [A]
Attendu que le docteur [E] conteste enfin la qualité à agir des ayants droit de M. [T] [A] en faisant valoir qu'ils n'ont pas la qualité d'associé ;
Attendu que c'est cependant au titre de leur intérêt patrimonial que les ayants droit du docteur [A] sollicitent à l'encontre du docteur [E] le paiement d'un solde d'indemnité dû au titre de la rupture du contrat d'association du 25 décembre 2006 pour un montant de 28 587 238 F CFP ;
Attendu qu'en conséquence, les consorts [A] sont fondés à relever que leur intérêt patrimonial justifie leur intérêt à agir ;
PAR CES MOTIFS
Confirme la décision déférée du 9 septembre 2019 ;
Y ajoutant,
Condamne M. [N] [E] à payer, pour la procédure d'appel, aux consorts [A] la somme de 400 000 F CFP sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile de Nouvelle Calédonie ;
Condamne M. [N] [E] aux dépens d'appel exposés à l'occasion de l'incident, avec application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SELARL YANN BIGNON, société d'avocats au barreau de NOUMEA.
Le greffier, Le président.
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CAPP/JURITEXT000046991468.xml | AFFAIRE : N RG 21/00602 - No Portalis DBWB-V-B7F-FRA4
Code Aff. :
ARRÊT N AL
ORIGINE :JUGEMENT du Pole social du TJ de SAINT DENIS en date du 24 Mars 2021, rg no 20/00667
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 08 JUILLET 2022
APPELANTE :
S.A.R.L. PROMOFLEX
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentant : Me Frédéric Cerveaux, avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
Monsieur [G] [J]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Emilie Maignan, avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2021/2618 du 19/05/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)
La caisse générale de sécurité sociale de [Localité 6]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentant : Me Isabelle Clotagatide Karim de la SCP Canale-Gauthier-Antelme-Bentolila avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Avril 2022 en audience publique, devant Alain Lacour, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Monique Lebrun, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 05 Juillet 2022;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Alain Lacour
Conseiller : Laurent Calbo
Conseiller : Aurélie Police
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 5 Juillet prorogé au 8 Juillet 2022
Greffier lors des débats : Mme Monique Lebrun
Greffier lors du prononcé par mise à disposition : Mme Delphine Grondin
Exposé du litige :
M. [J], salarié de la SARL Promoflex (la société) en qualité de technico-commercial, a été déclaré inapte selon avis 19 novembre 2019, puis licencié pour impossibilité de reclassement ensuite de son inaptitude le 17 décembre 2019. Il a sollicité la reconnaissance du caractère professionnel d'un eczéma de contact sur les mains et les pieds, pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels par la caisse générale de sécurité sociale de [Localité 6] (la caisse).
Saisi par M. [J], qui demandait notamment que fût reconnue la faute inexcusable de l'employeur dans la survenance de sa maladie professionnelle, le tribunal judiciaire de Saint-Denis-de-la-Réunion, par jugement rendu le 24 mars 2021, a notamment dit que la maladie professionnelle de M. [J] est due à une faute inexcusable de la société, ordonné à la caisse de majorer au montant maximum la rente versée en application de l'article L. 452-2 du code de la sécurité sociale et ordonné une expertise médicale avant-dire droit.
Appel de cette décision a été interjeté par la société le 6 avril 2021.
Vu les conclusions notifiées les 6 décembre 2021 et 22 avril 2022 par la société, oralement soutenues à l'audience de plaidoiries ;
Vu les conclusions notifiées par M. [J] les 5 octobre 2021, 8 et 25 avril 2022, oralement soutenues à l'audience de plaidoiries ;
Vu les conclusions de la caisse notifiées le 1er décembre 2021, oralement soutenues à l'audience de plaidoirie ;
Plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées et aux développements infra.
Vu les articles L. 452-1 du code de la sécurité sociale, L. 4121-1 à L. 4121-3 et R. 4121-1 du code du travail ;
Attendu que M. [J] fait grief à la société de ne pas avoir fait établir de documents uniques d'évaluation des risques, les exemplaires désormais produits aux débats à hauteur d'appel par la société étant selon lui des faux, et de ne pas lui avoir fourni d'équipements individuels de protection autres que des gants ;
Attendu, en ce qui concerne ce deuxième grief, que M. [J] reproche à la société de ne lui avoir fourni que des gants, qu'il estime inadaptés, alors qu'il était en contact avec des huiles minérales usagées contenant du nickel et du cobalt, mais pas d'autres équipements (chaussures, masques, vêtements de protection) et de ne pas s'être assurée du contrôle du port et de l'efficacité des équipements de protection individuelle ;
Attendu que la société objecte qu'elle fournissait tous les équipements de protection requis et qu'elle satisfaisait à son obligation de sécurité ;
Attendu que si les attestations de MM. [Y], [R], [Z] et [B] (pièces no 8 à 11 de la société) sont sans emport pour être générales et ne pas concerner M. [J] en particulier, de même que celle de Mme [I] épouse [V] (pièce no 15 de la société), qui se borne à indiquer que M. [J] ne s'est jamais plaint d'eczéma aux mains et qu'« il n'y a eu aucune visibilité tout au long de sa présence dans l'entreprise », il ressort en revanche des attestations de MM. [M] (pièce no 12 de la société), [S] (pièce no 13 de la société) et Dobaria (pièce no 14 de la société) qu'étaient fournis à M. [J] des vêtements de protection (pantalon, veste), un casque antibruit, des gants en nitrile, des bouchons d'oreilles, des lunettes de protection, des masques et des chaussures de sécurité ; que la critique faite par M. [J] aux gants fournis est contredite par la pièce no 3 de la caisse, qui comporte notamment une fiche de données de sécurité concernant l'huile pour circuit hydraulique, sur lesquels intervenait M. [J], qui mentionne que les gants en nitrile sont adaptés pour se prémunir des effets de son contact ;
Attendu qu'il doit donc être retenu que la société a fourni les équipements de protection individuelle nécessaires à M. [J] ;
Attendu en revanche, s'agissant de l'élaboration de document unique d'évaluation des risques, que la société objecte qu'elle en est dotée depuis 2014 et en verse aux débats les exemplaires 2016 à 2020 (pièces no 1 à 4, 29 et 30), que dès l'établissement du document unique de 2014, les risques chimiques ont été identifiés et les mesures de protection mises en place, qu'une erreur de plume a conduit à dater du 6 août 2018 le document unique du 6 août 2019, erreur dont elle indique justifier avec ses pièces no 31 à 33 ; qu'elle conteste qu'il s'agisse de faux ;
Attendu, concernant le document unique d'évaluation des risques créé le 6 août 2018 et mis à jour à cette même date (pièce no 2 de la société) qu'il a été rédigé par la société Ergonomix ;
Or, attendu que M. [J] établit par sa pièce no 42, constituée de la fiche de cette société au répertoire Sirene, que cette entreprise n'est active que depuis le 26 mars 2019 ;
Attendu que ce document mentionne encore, au titre du risque 8, à la rubrique « moyens de prévention et/ou protection à mettre en place » ce qui suit : « Mise à disposition d'un livret d'information de sécurité Covid-19 – Méthode de décontamination des mains, méthode de lavage des masques lavables » ; que M. [J] relève à juste titre que l'épidémie due au virus de la Covid-19 n'a été décelée qu'au début de l'année 2020, en sorte qu'il était impossible qu'un document de 2019 la mentionne ;
Attendu que la même remarque doit être faite s'agissant de la pièce no 1 de la société, présentée par elle comme le document unique d'évaluation des risques de 2019, qui porte la même mention relative à la Covid-19, alors que cette pandémie n'est intervenue qu'en 2020 ;
Attendu, s'agissant toujours de la pièce no 2 de la société, désignée sur son bordereau de pièces communiquées comme son document unique d'évaluation des risques de 2018, que la société expose qu'une erreur de date a été commise et qu'il « s'agit en réalité du document unique de l'année 2019, une erreur de frappe l'ayant datée du 06/08/2018 au lieu du 06/08/2019 », erreur dont elle indique justifier par sa pièce no 33, constituée d'un courriel en date du 26 juillet 2021 de M. [A], qui mentionne ce qui suit : « Suite à une audition au commissariat du [Localité 7] le 23/07/2021 par M. [U] [D] brigadier de police, la date de votre dernier document unique est erronée. Cette erreur est sûrement due à une simple faute de frappe, en effet cette erreur n'est pas voulue et aucunement fait l'objet d'une falsification volontaire.
Notez que cette erreur n'a pas de conséquences sur l'identification des risques inhérents à vos métiers, vous avez toujours eu en votre possession un document unique à jour à la disposition de vos salariés : le premier daté du 03/06/2014 avait été mis a jour lors de la première intervention réalisée dans votre société, puis le second est entré en vigueur 06/08/2019 mis à jour a plusieurs reprises en collaboration avec Mme [V]. Il n'y a jamais eu de discontinuité de document unique depuis la rédaction du premier document unique.
La date indiquée sur le second document unique est le 06/08/2018, merci de corriger cette date au 06/0 8/2019, notre premier contact datant du mois de septembre 2019 » ;
Or, attendu en premier lieu qu'à supposer que l'erreur mentionnée dans ce courriel ait effectivement été commise, il en résulterait que la société produirait aux débats deux documents unique d'évaluation des risques pour l'année 2019, mais aucun pour 2018 ;
Attendu, en second lieu, que ce courriel conduit à une nouvelle incohérence puisque si le premier contact entre la société et la société Ergonomix remonte au mois de septembre 2019, aucun document n'a pu être élaboré par celle-ci en 2018, alors pourtant que la société prétend le contraire ;
Attendu, s'agissant en troisième lieu du document unique d'évaluation des risques de l'année 2016 (pièce no 32 de la société), qui porte la mention « date de la dernière mise à jour : 06/06/2016 », qu'il fait apparaître M. [J] au rang des salariés de la société alors qu'il est constant que celui-ci n'a été recruté, initialement en contrat à durée déterminée, qu'à compter du 14 octobre 2016 ;
Attendu que la société ne s'explique pas sur les multiples incohérences ressortant de l'examen et du rapprochement des pièces qu'elle invoque au soutien de sa position, en sorte qu'il doit être considéré qu'elles sont, en raison de leurs nombreuses contradictions, demeurées inexpliquées, dépourvues de toute force probante ;
Attendu que la société ne fait donc pas la preuve de ce qu'elle a satisfait aux prescriptions impératives de l'article R. 4121-1 susvisé ; que l'employeur, qui aurait dû avoir conscience du danger lié à l'exposition de son salarié à des produits chimiques, et l'a uniquement doté d'équipements de protection individuelle sans évaluer l'ensemble des risques inhérents à cette exposition en l'absence d'établissement du document unique d'évaluation des risques, n'a pas pris des mesures suffisantes permettant de protéger son salarié du danger en sorte que sa faute inexcusable est établie ; que le jugement, qui a conséquemment retenu que la maladie professionnelle de M. [J] résulte de la faute inexcusable de l'employeur, ordonné une expertise et alloué à M. [J] une provision, doit être confirmé ;
PAR CES MOTIFS :
Publiquement, contradictoirement,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 24 mars 2021 par le tribunal judiciaire de Saint-Denis-de-la-Réunion ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SARL Promoflex à payer à M. [J] la somme de 2 500 euros à titre d'indemnité pour frais non répétibles d'instance ;
Condamne la SARL Promoflex aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par M. Lacour, président, et par Mme Grondin, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991483.xml | AFFAIRE : N RG No RG 20/02043 - No Portalis DBWB-V-B7E-FOKB
Code Aff. : ARRÊT N AL
ORIGINE :JUGEMENT du Pole social du TJ de SAINT DENIS en date du 28 Octobre 2020, rg no 19/01468
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 JUILLET 2022
APPELANTE :
Madame [Y] [E]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentant : Me Alexandre ALQUIER de la SELARL ALQUIER & ASSOCIÉS, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
La Caisse générale de sécurité sociale de La Réunion venant aux droits de la Caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants de La Réunion,
Pôle Expertise Juridique Recouvrement [Adresse 5]
[Localité 2]
Représentant : Me Patrice SANDRIN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 946 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 mai 2022 devant la cour composée de :
Président : M. Alain LACOUR
Conseiller : M. Laurent CALBO
Conseiller : Mme Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.
A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 05 juillet 2022.
ARRÊT : mis à disposition des parties le 05 JUILLET 2022
greffier lors des débats : Delphine GRONDIN
greffier du prononcé par mise à disposition au greffe : Nadia HANAFI
Exposé du litige :
La sécurité sociale pour les indépendants, aux droits de laquelle vient la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion (la caisse) a mis Mme [E] en demeure, le 9 janvier 2019, d'avoir à lui payer la somme de 2 805 euros au titre des cotisations retraite de base, allocations familiales, CSG-CRDS, formation professionnelle et maladie du quatrième trimestre de l'année 2018.
Par jugement rendu le 28 octobre 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Denis-de-la-Réunion a notamment débouté Mme [E] de ses demandes, déclaré la mise en demeure valable et régulière, condamné Mme [E] à payer à la caisse la somme de 105 euros au titre des cotisations du quatrième trimestre 2018, outre une amende civile de 500 euros au profit du Trésor public et une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Appel de cette décision a été interjeté par Mme [E] le 19 novembre 2020. L'affaire a été instruite conformément aux dispositions de l'article 446-2 du code de procédure civile.
Vu les conclusions notifiées par Mme [E] le 29 avril 2021, oralement soutenues à l'audience de plaidoiries ;
Vu les conclusions notifiées par la caisse le 25 juin 2021, oralement soutenues à l'audience de plaidoiries ;
Par arrêt rendu avant-dire droit le 22 février 2022, il a été statué comme suit :
- « Invite la Caisse générale de sécurité sociale de la Réunion à s'expliquer sur son affirmation selon laquelle Mme [E] a perçu en France des revenus de 24 833 euros en 2018, et à en justifier ;
- Invite Mme [E] à s'expliquer sur le nombre et la nature des mandats sociaux qu'elle détient en France, ainsi que sur la rémunération qu'elle en retire, ou son absence, et d'en justifier par la production des statuts des sociétés intéressées et des documents comptables faisant apparaître la rémunération de leurs dirigeants ;
- Renvoie la cause et les parties à l'audience qui se tiendra le 10 mai 2022 à 14 h 00 ;
- Réserve tous les chefs de demande ainsi que les dépens ».
Vu les conclusions notifiées par la caisse le 6 mai 2022, oralement soutenues à l'audience de plaidoiries ;
Vu le document notifié par Mme [E], daté du 6 avril 2022, et les pièces annexées ;
Pour plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées ainsi qu'aux développements infra.
Vu les articles L.111-2-2, R 131-1 et R 131-2 du code de la sécurité sociale ;
Attendu que la caisse excipe de ce que Mme [E] est gérante de la société Imeo depuis le 1er juillet 1999, qui exerce une activité de marchand de biens à [Localité 4], de ce qu'elle est résidente fiscale en France bien qu'habitant dans l'île Maurice et de ce que son affiliation volontaire à la Caisse des Français à l'étranger est indifférente ;
Attendu que Mme [E] verse désormais aux débats les comptes annuels pour l'exercice 2018 de la SARL Imeo dont elle était alors la gérante (pièce no 4 de Mme [E]), dont les mentions ne sont pas contestées et desquels il ressort qu'elle n'a perçu aucune rémunération au cours de cet exercice ;
Attendu que la caisse n'invoque aucune autre source de revenus perçus par Mme [E] ;
Attendu en conséquence que Mme [E] n'est redevable d'aucune cotisation, que la mise en demeure doit être annulée et que le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions, la caisse étant déboutée de ses demandes ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement,
Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 28 octobre 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Denis-de-la-Réunion ;
Statuant à nouveau,
Annule la mise en demeure du 9 janvier 2019 ;
Déboute la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion de toutes ses demandes ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion à payer à Mme [E] la somme de 1 500 euros à titre d'indemnité pour frais non répétibles d'instance ;
Condamne la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion aux dépens de première instance et d'appel.
Le présent arrêt a été signé par M. Lacour, président, et par Mme Hanafi, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,
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CAPP/JURITEXT000046991497.xml | AFFAIRE : N RG No RG 21/00550 - No Portalis DBWB-V-B7F-FQZU
Code Aff. :
ARRÊT N AL
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-DENIS DE LA REUNION en date du 26 Février 2021, rg no F19/00134
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 JUILLET 2022
APPELANT :
Monsieur [L] [I]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : M. [R] [X] [M] (Défenseur syndical ouvrier)
S.A.R.L. [G] Représentée par son gérant en exercice.
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Léopoldine Settama de l'AARPI VSH AVOCATS, avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
DÉBATS : En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Avril 2022 en audience publique, devant Alain Lacour, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Monique Lebrun, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 05 Juillet 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Alain Lacour
Conseiller : Laurent Calbo
Conseiller : Aurélie Police
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 05 Juillet 2022
Greffier lors des débats : Mme Monique Lebrun
Greffier lors du prononcé par mise à disposition : Mme Delphine Grondin
Exposé du litige :
M. [I] et la SARL [G] (la société) ont signé un contrat de travail à durée déterminée le 1er février 2018. M. [I] a été convoqué par lettre du 30 octobre 2018 à un entretien préalable à son éventuel licenciement qui a eu lieu le 9 novembre 2018.
Saisi par M. [I], qui demandait la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée, contestait son licenciement et réclamait le paiement d'heures supplémentaires et l'indemnisation des différents chefs de préjudice dont il se plaignait, le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion, par jugement du 26 février 2021, l'a débouté de toutes ses demandes et a débouté la société de sa demande d'indemnité pour frais non répétibles d'instance.
Appel de cette décision a été interjeté par M. [I] le 29 mars 2021. Les conclusions de la société ont été déclarées irrecevables par ordonnance du conseiller de la mise en état du 1er mars 2022.
Vu les conclusions notifiées par M. [I] le 29 mars 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
Vu les articles 472 et 954 du code de procédure civile ;
Attendu que la société, qui n'a pas conclu, est réputée s'approprier les motifs du jugement entrepris ;
Attendu qu'il ne sera fait droit aux demandes de M. [I] que si elles sont recevables, régulières et bien fondées ;
Sur la requalification du contrat de travail :
Vu l'article L. 1245-1 du code du travail ;
Attendu que par contrat en date du 1er février 2018, M. [I] a été embauché par la société, pour une durée déterminée, à compter du 1er février 2018 et jusqu'au 31 janvier 2019, en qualité d'aide cuisinier polyvalent ;
Attendu cependant que M. [I] établit par ses pièces no 1 et 15 (attestations de MM. [Z] et [W]) qu'il a en réalité commencé à travailler pour le compte de la société à compter du mois de novembre 2017, en la même qualité ;
Attendu qu'en l'absence de contrat de travail écrit pour la période antérieure au 1er février 2018, il doit être considéré que M. [I] et la société étaient liés, à compter du 13 novembre 2017, par un contrat de travail à durée indéterminée, sans que la signature le 1er février 2018 d'un contrat à durée déterminée n'ait pu modifier cette situation ; qu'il convient par conséquent de requalifier la relation de travail en contrat à durée indéterminée ;
Sur l'indemnité de requalification :
Vu l'article L. 1245-2 du code du travail ;
Attendu que pour les motifs exposés infra, il doit être retenu que M. [I] effectuait des heures supplémentaires chaque semaine puisqu'il travaillait hebdomadairement 50,50 heures ; que le salaire à prendre en considération doit donc comprendre la rémunération des heures supplémentaires, soit un montant total brut mensuel de 2 408,20 euros ;
Attendu qu'il sera fait une juste réparation du préjudice ainsi subi par M. [I] par la condamnation de la société à lui payer la somme de 2 408,20 euros ;
Sur le licenciement :
Vu l'article L. 1232-1 du code du travail ;
Attendu que la lettre de licenciement, dont M. [I] expose qu'elle ne lui a été remise qu'en cours de procédure devant le conseil de prud'hommes, n'a pas été produite aux débats ; que M. [I] indique que les motifs qu'elle mentionnait portaient sur des absences injustifiées du 5 au 8 octobre 2018, des insultes proférées le 19 octobre 2018 et une menace faite à son employeur ;
Attendu, s'agissant d'un licenciement pour faute grave, qu'il incombe à la société d'en rapporter la preuve, ce qu'elle ne fait pas puisque les pièces qu'elle a remises à la cour sont irrecevables, comme ses conclusions ; que si les premiers juges ont retenu que Mme [G] a déposé plainte pour menaces de mort et ont pris en considération le témoignage de M. [U], ni cette plainte, ni l'attestation de ce dernier ne sont versées aux débats ;
Attendu en conséquence qu'il doit être considéré que le licenciement de M. [I] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Sur l'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse :
Vu l'article L. 1235-3 du code du travail ;
Attendu qu'il sera fait une juste réparation du préjudice ainsi subi par M. [I] par la condamnation de la société à lui payer la somme de 4 816, 40 euros, correspondant à deux mois de salaire brut, à titre indemnitaire ;
Sur l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis :
Vu l'article L. 1234-1 du code du travail ;
Attendu que M. [I] avait un an d'ancienneté lors de son licenciement ; qu'il convient par conséquent de condamner la société à lui payer la somme de 2 408,20 euros, correspondant à un mois de salaire, à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 240,82 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;
Sur les heures supplémentaires :
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;
Attendu que M. [I] verse aux débats (pièce no 13) un tableau qui mentionne, pour chaque jour travaillé, l'heure de sa prise de poste, l'heure de son abandon de poste, le nombre d'heures travaillées, le nombre d'heures supplémentaires effectuées et le salaire qui leur correspond ;
Attendu que ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à la société de les contester en versant aux débats des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par M. [I], ce qu'elle ne fait pas ;
Attendu qu'il sera par conséquent considéré que M. [I] a effectué les heures de travail apparaissant sur le tableau figurant sur sa pièce no 13 ; que la société sera donc condamnée à lui payer la somme de 9 867, 65 euros au titre des heures supplémentaires, outre 986,76 euros au titre des congés payés afférents ;
Sur l'indemnité légale de licenciement :
Vu l'article R. 1234-2 du code du travail ;
Attendu que M. [I] avait un an d'ancienneté lors de son licenciement ; qu'il peut par conséquent prétendre à une indemnité légale de licenciement de 602,05 euros (2 408,20/4) ; que toutefois, M. [I] ayant limité sa demande de ce chef à 551,82 euros, il y sera fait droit dans cette mesure ;
Sur l'indemnité pour travail dissimulé :
Vu l'article L. 8223-1 du code du travail ;
Attendu qu'il incombe à M. [I] d'établir que la société a agi intentionnellement, le fait qu'il n'ait pas été inscrit sur le registre du personnel avant le 1er février 2018, qu'aucun document justifiant l'embauche n'ait été rédigé, et qu'aucun bulletin de salaire ne lui ait été remis, avant cette date, que les heures supplémentaires accomplies n'apparaissent pas sur les fiches de paie qui lui ont été remises ne suffisant pas à caractériser cette intention ;
Attendu que M. [I] invoque sa pièce no 14, constituée d'une attestation de M. [W], qui déclare avoir travaillé pour la société sans contrat de travail ; que cette pièce n'établit pas davantage l'intention de l'employeur pour ne concerner que son rédacteur, et non M. [I] ;
Attendu que M. [I] sera par conséquent débouté de cette demande ;
Sur les documents de fin de contrat :
Attendu qu'il convient d'ordonner à la société de remettre à M. [I] des bulletins de salaire conformes au présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'ordonner une astreinte ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement,
Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 26 février 2021 par le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion ;
Statuant à nouveau,
Dit que le licenciement de M. [I] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Condamne la SARL [G] à payer à M. [I] les sommes suivantes :
- 2 408, 20 euros à titre d'indemnité de requalification ;
- 4 816, 40 euros à titre d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
- 2 408, 20 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
- 240, 82 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;
- 9 867, 65 euros au titre des heures supplémentaires ;
- 986,76 euros au titre des congés payés afférents ;
- 551, 82 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;
Ordonne à la SARL [G] de remettre à M. [I] des bulletins de salaire conformes au présent arrêt ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SARL [G] à payer à M. [I] la somme de 1 000 euros à titre d'indemnité pour frais non répétibles d'instance ;
Rejette le surplus des demandes de M. [I] ;
Condamne la SARL [G] aux dépens de première instance et d'appel.
Le présent arrêt a été signé par M. Lacour, président, et par Mme Grondin, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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Code Aff. :
ARRÊT N LC
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT DENIS (REUNION) en date du 08 Mars 2021, rg no 18/00455
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 JUILLET 2022
APPELANTE :
Madame [O] [I] épouse [K] [X]
[Adresse 4]
[Localité 8]
Représentant : Me Alain Antoine, avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
S.C.P. [G] - [P]
[Adresse 6]
[Localité 7]
Représentant : Me Jean Pierre Gauthier de la SCP Canale-Gauthier-Antelme-Bentolila, avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
Clôture : 7 mars 2022
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 804 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 Mai 2022 devant la cour composée de :
Président : M. Alain Lacour
Conseiller : M. Laurent Calbo
Conseiller : Madame Aurélie Police
Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.
A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 05 Juillet 2022.
ARRÊT : mis à disposition des parties le 05 Juillet 2022
Greffier lors des débats : Mme Delphine Grondin
Exposé du litige :
Mme [O] [I] épouse [K] [X] (la salariée) a été embauchée le 25 septembre 1991 par la SCP [T] [G] - [S] [P] (la société) en qualité de secrétaire selon contrat de travail à durée indéterminée.
Elle a été licenciée le 11 juillet 2018 pour faute grave.
Saisi par Mme [K] [X] qui demandait notamment de dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse, et condamner l'employeur à l'indemniser de ses préjudices et lui payer un rappel de salaire, le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion, par jugement du 8 mars 2021, a notamment :
- dit que le licenciement pour faute grave est fondé ;
- débouté la salariée de l'intégralité de ses demandes ;
- débouté la société de sa demande reconventionnelle ;
- mis les dépens à la charge de la salariée.
Appel de cette décision a été interjeté par Mme [K] [X] par acte du 22 mars 2021.
L'ordonnance de clôture de l'instruction est intervenue le 7 mars 2022.
Vu les dernières conclusions notifiées au greffe de la cour par Mme [K] [X] le 16 novembre 2021 ;
Vu les dernières conclusions notifiées au greffe de la cour par la société le 31 janvier 2022 ;
Pour plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées ainsi qu'aux développements infra.
Sur la recevabilité de la nouvelle demande en nullité du licenciement :
Vu l'article 565 du code de procédure civile ;
Mme [K] [X] forme à titre principal une demande en nullité du licenciement.
La société en soulève l'irrecevabilité, s'agissant d'une demande nouvelle en cause d'appel.
Dans ses dernières écritures soutenues oralement devant les premiers juge, Mme [K] [X] sollicitait de voir juger sans cause réelle et sérieuse son licenciement.
Or, la demande en nullité du licenciement tendant aux mêmes fins que la demande initiale au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, dès lors que ces demandes tendent à obtenir l'indemnisation des conséquences du licenciement que la salariée estime injustifié, elle est recevable en cause d'appel.
Sur la nullité du licenciement :
1o/ comme résultant d'un harcèlement moral :
Vu les articles L.1152-1 et L.1154-1 du code du travail ;
Mme [K] [X] indique que l'atmosphère au sein de l'étude a changé avec l'arrivée de deux nouveaux collaborateurs (Maître [S] [P] et Maître [H] [C]) et que ses conditions de travail se sont dégradées à compter de son retour de congés en février 2018.
Elle dénonce des pressions incessantes, remarques injustifiées sur sa proximité avec les clients, son travail à l'ancienne ou son manque de compétitivité reproché par Maître [G], des dénigrements et commandes de dernière minute au-delà des horaires habituels de travail notamment de Maître [C], les brimades et humiliations étant devenues quotidiennes alors mêmes que de nombreux témoignages louent ses qualités.
Elle estime que ces agissements avaient comme objectif de la pousser à quitter son poste afin d'éviter une rupture conventionnelle coûteuse.
Elle ajoute que la persistance de ces agissements a conduit à la constatation médicale d'une « dépression brutale sur harcèlement au travail et burn out » concernant un fait accidentel du 6 juin 2018, et que compte tenu des agissements de l'employeur ayant porté atteinte à ses droits et à sa dignité, le licenciement est nul puisque les erreurs reprochées par l'employeur, à considérer qu'elles soient fondées, sont la résultante d'un harcèlement moral.
Pris dans leur ensemble, ces éléments laissent supposer l'existence d'un harcèlement.
Il incombe par conséquent à la société de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
La société réfute toute situation de harcèlement et fait observer qu'aucune pièce ne vient accréditer la position de la salariée.
D'une part, il est constaté que Maître [C], principalement visée par la salariée comme à l'origine des agissements harcelants, conteste les faits dont l'accuse Mme [K] [X].
Elle argue au contraire du comportement insolent et blessant à son endroit de la salarié qui l'avait conduite à annoncer à Maître [G] son départ de l'étude et cite notamment les attestations de Mme [A] [OI], Maître [M] [E], M. [JP] [N], M. [Z] [W], Mme [R] [V] et Mme [D] [L] (pièces 38, 39, 47 à 49 / intimée).
Mme [OI] explique que Mme [K] [X] n'a pas supporté de perdre de son influence dans l'étude après l'arrivée de Maîtres [P] et [C]. M. [W] confirme que Mme [K] [X] a rejeté l'arrivée de ces deux huissiers de justice, que la salariée les a défiés et qu'elle a refusé tout dialogue. Dans le même sens, M. [N] indique que Mme [K] [X] ne supportait pas Maître [C].
Maître [E] atteste quant à lui des « dérapages verbaux et manque de respect éhontés » de la salariée à l'endroit de Maître [C].
Par ailleurs, Mmes [V] et [L] rapportent le comportement bienveillant et professionnel de Maître [C] avec les personnels.
Les agissements imputés à Maître [C], non corroborés par la moindre pièce, sont donc efficacement contredits par l'employeur.
D'autre part, Maître [E] conteste les faits allégués par Mme [K] [X] à son endroit (pièce 39 / intimée). Il précise qu'il est difficile de travailler avec cette salariée qui rejetait toute remarque et réagissait très fortement aux reproches bien que justifiés, qu'elle avait la capacité compte tenu de son ancienneté de nuire à l'ambiance générale et qu'elle pensait bénéficier d'une protection inébranlable de la part de Maître [G].
M. [F] [E], M. [U] [J] (pièce 42 / intimée) et Mme [V] attestent en faveur de Maître [E] en sorte que les agissements imputés par la salariée à celui-ci, non corroborés par la moindre pièce, sont efficacement contredits.
Enfin, alors que l'employeur conteste les faits allégués par Mme [K] [X], il est observé que les attestations produites par la salariée n'apportent aucun élément sur les agissements dont elle se plaint. En effet, les témoignages (pièces 11 à 20 / appelante) détaillent uniquement les qualités professionnelles de l'appelante tandis que celui de Mme [DF] (pièce 21 / appelante) se limite à rapporter les faits relatés par la salariée exceptée la crise de larmes qu'elle a elle-même constatée le 6 juin 2018 en suite d'une altercation dont elle n'a toutefois pas été témoin.
Au contraire, les attestations produites par la société (pièces 37, 38, 39, 48 et 50) dépeignent des relations professionnelles compliquées voire tendues avec Mme [K] [X] en raison de son attitude de « chef de clan », de sa mainmise sur les salariés et de son absence de remise en cause. Elles démontrent que la salariée a mal vécu l'arrivée à l'étude de deux nouveaux huissiers de justice.
Ces éléments contredisent les faits présentés par Mme [K] [X] alors qu'aucun élément ne vient étayer les brimades et dénigrements dont elle se dit victime.
Surtout, ces témoignages rapportent de nombreuses erreurs commises quotidiennement par Mme [K] [X] dans les missions qu'elle devait accomplir, en raison d'un manque de rigueur, ce qui contredit son affirmation selon laquelle les plaintes récurrentes sur son travail effectuées par Maîtres [C], [E] et [P] seraient injustifiées.
La société justifie en conséquence que ses agissements ou ceux de ses salariés à l'endroit de Mme [K] [X] sont étrangers à tout harcèlement.
Les faits de harcèlement moral ne sont pas caractérisés.
2o/ comme résultant d'une violation d'un statut protégé :
Vu les articles L.1226-7 du code du travail selon lequel le contrat de travail du salarié victime d'un accident du travail, autre qu'un accident de trajet, ou d'une maladie professionnelle est suspendu pendant la durée de l'arrêt de travail provoqué par l'accident ou la maladie, et L.1226-9 du même code selon lequel au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie.
Mme [K] [X] indique que son licenciement est nul en raison de la suspension de son contrat de travail en suite d'un accident du travail et de l'absence de faute grave lui étant imputable.
Mme [K] [X] justifie du certificat médical initial du 7 juin 2018 mentionnant un accident du travail du 6 juin 2018, que la société reconnaît avoir reçu le 7 juin dans son courrier de contestation du 11 juin 2018 (pièce 25).
Dans l'attente de la décision de la caisse sur le caractère professionnel de l'accident déclaré par la salariée laquelle a été notifiée à l'employeur le 13 août 2018 (pièce 8 / intimée), Mme [K] [X] bénéficiait de la protection attachée à la suspension de son contrat de travail pour un accident du travail.
Or, le licenciement étant intervenu le 11 juillet 2018, il ne peut reposer que sur une faute grave.
Il convient dès lors d'analyser les différents griefs détaillés dans la lettre de licenciement (pièce 3 / intimée) lesquels reposent sur des manquements de Mme [K] [X] dans le traitement de dix dossiers de l'étude dont elle était chargée et dont l'employeur aurait eu connaissance à la suite d'un contrôle en suite de son arrêt de travail (point 1-), et plus généralement sur l'attitude de la salariée (point 2-).
Il appartient à la société de rapporter la preuve d'une violation par Mme [K] [X] d'une obligation découlant du contrat de travail ou d'un manquement à la discipline de l'entreprise, rendant impossible son maintien dans l'entreprise.
1- S'agissant du dossier C035276, la société fait grief à Mme [K] [X] de s'être abstenue de traiter une assignation pour une audience du 13 juin 2018.
Elle produit la première page de l'assignation revêtue de la mention manuscrite « reçu le 13 avril 2018 » et de la signature de la salariée et du courriel du 12 juin de Maître [C] demandant à l'avocat un projet d'acte avec une nouvelle date d'audience (pièces 9 et 10).
Elle rappelle que Mme [K] [X] avait pour mission de réceptionner les actes préparés par les avocats et les décisions de justice à signifier et de préparer les actes en conséquence.
Mme [K] [X] objecte que cette assignation n'a pas été délivrée puisque la défenderesse a comparu volontairement.
L'attestation de Maître [B] (pièce 12 / appelante) précise en effet qu'il n'a subi aucun préjudice dans ce dossier dans la mesure où l'épouse de son client s'est présentée à l'audience du 13 juin 2018, et qu'en tout état de cause, en l'absence de cette partie, le juge aurait renvoyé cette affaire.
Toutefois, ces éléments n'indiquent pas que Mme [K] [X] ait reçu, postérieurement à la réception du projet d'assignation, la consigne de Maître [B] de suspendre la signification de l'acte.
L'appelante ne justifie donc pas des raisons pour lesquelles aucune diligence n'avait été accomplie entre le 13 avril et le 7 juin 2018, date de la suspension de son contrat de travail.
Le grief est caractérisé, peu important l'absence de conséquence dommageable pour l'étude.
S'agissant du dossier C035293, la société fait grief à Mme [K] [X] de s'être abstenue de traiter une assignation à délivrer à Madagascar pour une audience du 22 août 2018 et d'avoir transféré cette tâche à M. [E].
Elle produit le courriel du 20 avril 2018 adressé à Mme [K] [X] par l'avocat et celui de relance du 14 juin 2018 (pièces 11 et 12).
Mme [K] [X] rétorque qu'elle a informé Maître [C] de l'impossibilité de signifier cet acte pour la date prévue en raison d'une période inférieure à six mois.
Il résulte des pièces produites que si l'avocat s'étonne le 14 juin 2018 de l'absence de signification de l'acte « dans les délais », il a saisi l'étude par courriel du 20 avril 2018 en sorte que le délai de six mois impératif ne permettait pas une signification à l'audience du 13 août 2018.
De plus, le courriel étant également adressé sur la boite électronique de la « SCP » sans que l'organisation interne de l'étude ne soit détaillée quant au suivi de cette boite, il ne peut être reproché à Mme [K] [X] seule, l'absence d'alerte adressée à l'avocat sur l'impossibilité de signifier l'assignation dans les délais.
En outre, aucun élément ne vient établir, comme le soutient l'employeur, que Mme [K] [X] se soit déchargée de cette tâche sur M. [E].
En l'absence de manquement établi à l'encontre de l'appelante, le grief n'est pas caractérisé.
S'agissant du dossier C033256, la société fait grief à Mme [K] [X] de s'être abstenue de traiter une assignation à délivrer à Madagascar pour une audience prévue en novembre 2018.
Elle produit le courriel de relance de l'avocat (pièce 13).
Mme [K] [X] estime que la signification de ce genre d'acte ne relève pas de ses fonctions de secrétaire, qu'elle a préparé l'acte mais qu'il n'a pas été signifié par les huissiers dans les délais et que l'avocat évoque un « loupé » de l'étude et non du fait de sa personne.
Contrairement à ce que Mme [K] [X] soutient, son poste de secrétaire incluait la préparation et la rédaction d'actes, ainsi que leur inscription au répertoire (pièce 3 / intimée), sans qu'il y ait lieu de distinguer si la signification de l'acte est à effectuer sur l'île de La Réunion, en métropole ou à l'étranger.
Il résulte du courriel de l'avocat que Mme [K] [X] a entrepris des diligences afin d'obtenir du greffe la fixation de l'affaire à une date d'audience en novembre 2018 permettant le respect du délai impératif de six mois.
Cette seule pièce ne démontre pas que Mme [K] [X] soit à l'origine de l'absence de diligence en suite de l'obtention d'une nouvelle date d'audience laissant un délai suffisant pour la signification à Madagascar.
La salariée soutenant sans être contredite en sorte que cette circonstance sera retenue, qu'une fois la date obtenue, le projet a été soumis aux huissiers de justice chargés de contrôler les actes, aucun manquement ne lui est imputable.
Le grief n'est pas caractérisé.
S'agissant du dossier C034698, la société fait grief à Mme [K] [X] d'avoir omis de retourner dans les délais une assignation aux fins d'expulsion ce qui n'a pas permis son enrôlement, et de signifier l'acte au préfet alors qu'il s'agit d'une condition de recevabilité.
Elle produit le courrier de l'avocat, la copie de l'acte, le courrier de réclamation et les actes ayant dû être réitérés aux frais de l'étude (pièces 14 à 19).
Mme [K] [X] indique que les délais ne pouvaient être respectés en raison de la saisine tardive de l'avocat.
Le courrier du 29 mars 2018 adressé par l'avocat à l'étude a été réceptionné le 3 avril 2018 par Mme [K] [X]. Si la signification est intervenue le 4 avril 2018, il est précisé par l'avocat qu'il n'a pas reçu un retour dans les délais permettant son enrôlement.
Madame [K] [X] ayant réceptionné ce pli et effectué les diligences en vue de la signification de l'acte, il lui appartenait de s'assurer du retour de la signification de l'acte à l'avocat ce dont elle ne justifie pas.
Son manquement est caractérisé à ce titre, peu important l'irrecevabilité alléguée par la salariée en ce que la saisine de l'avocat était trop tardive pour permettre la notification de l'assignation au préfet alors que cette diligence n'était pas mentionnée sur le courrier du 29 mars 2018.
Le grief est établi.
S'agissant du dossier C035282, la société fait grief à Mme [K] [X] de s'être abstenue de traiter une signification d'arrêt.
Elle produit le courrier de l'avocat du 24 janvier 2018 et l'état des actes effectués par l'étude (pièces 20 et 21).
Mme [K] [X] explique que Maître [C] est à l'origine du retard dans ce traitement, qu'il n'y a pas eu de problème de gestion dans ce dossier et que Mme [Y] qui travaillait dans le cabinet de l'avocat, atteste en sa faveur.
Le courrier de l'avocat daté du 24 janvier 2018 indique sa réception par Mme [K] [X] le 23 mars 2018.
Toutefois, il n'est justifié d'aucune diligence entreprise par Mme [K] [X] afin de faire signifier la décision. Si la salariée renvoie la faute sur Maître [C], elle n'explique pas les raisons pour lesquelles la préparation d'une simple signification de décision de justice relevait de la compétence de l'huissier de justice.
Enfin, l'attestation produite (pièce 17 / appelante) n'apporte aucun élément sur le dossier litigieux.
Le manquement étant caractérisé, le grief est établi.
S'agissant du dossier C035045, la société fait grief à Mme [K] [X] de s'être abstenue de traiter la dénonciation d'une assignation.
Elle produit le courriel de l'avocat du 29 mai 2018, le transfert du courriel à Mme [K] [X], le courriel de relance et le courrier de mécontentement de l'avocat (pièces 22 à 24).
Mme [K] [X] fait valoir que le travail a été effectué et avance plusieurs hypothèses pour expliquer l'absence de notification à la partie concernée.
Il est relevé que si la demande reçue par courriel de l'avocat a été adressée le 20 mai 2018 à l'attention de Maître [E], Mme [K] [X] en a été expressément rendue destinataire sans délais par Maître [C], compte tenu des courts délais pour exécuter les diligences requises.
Il revenait à Mme [K] [X] saisie à cette fin de procéder à la préparation de la dénonciation de l'assignation qui relevait de ses attributions et non de celles d'un huissier de justice de l'étude.
Or, la signification n'a été effectuée que le 14 juin 2018 après une relance du 12 juin, soit postérieurement à la suspension du contrat de travail de Mme [K] [X].
Mme [K] [X] rejette la faute sur Maître [C] qui aurait bloqué le parapheur et avance l'impossibilité de notifier au créancier inscrit si l'acte n'a pas été préalablement signifié, autant d'hypothèses objectivées par aucune pièce.
L'absence de justification de démarches entreprises suite à la saisine du 29 mai 2018 ou de suivi du traitement de ce dossier, caractérise le manquement de Mme [K] [X] à ce titre.
Le grief est établi.
S'agissant du dossier C035086, la société fait grief à Mme [K] [X] d'avoir fait signifier avec retard un jugement à la demande d'un avocat de métropole, et surtout d'avoir communiqué une fausse information à l'avocat en confirmant la signification et le retour de l'acte à son cabinet.
Elle produit le courriel de l'avocat du 15 mai 2018, le transfert du courriel à Mme [K] [X], le courriel de relance, l'échange de courriel entre l'avocat et Maître [C] et les procès-verbaux de signification (pièces 25 à 29).
Mme [K] [X] fait valoir qu'elle a édité les deux actes le 24 mai 2018 lesquels ont été remis à l'huissier de justice pour vérification et signification qui sont intervenues postérieurement à son arrêt de travail.
Cependant, dès lors que Mme [K] [X] a préparé les actes de signification, il lui appartenait de s'enquérir de leur régularisation effective.
D'ailleurs, Mme [K] [X] a répondu elle-même au courriel de relance, preuve qu'il lui incombait d'assurer le suivi des diligences et d'en faire retour à l'avocat.
En tout état de cause, Mme [K] [X] a répondu le 5 juin 2018 à l'avocat « Je vous confirme que l'acte a été régularisé et retourné à votre cabinet, le tout conformément à votre demande. » alors que cette régularisation n'interviendra que le 7 juin 2018 pour l'une des parties et le 18 juin 2018 pour l'autre ce qui suscitera l'étonnement de l'avocat.
La salariée a donc manqué à ses obligations en communiquant à l'avocat des éléments erronés sur les diligences entreprises, susceptibles d'avoir de graves conséquences sur la responsabilité de l'auxiliaire de justice qui avait expressément précisé la nécessité de signifier les actes avant le 19 juin 2018 au regard des délais en cours.
Le grief est caractérisé.
S'agissant du dossier C034959, la société fait grief à Mme [K] [X] d'avoir d'une part retourné à un avocat une copie incomplète d'un acte signifié par l'étude, d'autre part répondu aux remarques de l'avocat sans autorisation ce qui a nui à l'image de l'étude, et enfin transmis l'original de l'acte en métropole et avec retard pour une audience se tenant à la Réunion, les explications recueillies sur ce point le 6 juin 2018 étant sans rapport avec les faits.
Elle produit trois échanges de courriels en rapport avec les faits (pièces 30 à 32).
Mme [K] [X] réfute toute responsabilité dans les deux erreurs, une attestation d'un avocat démontrant la régularité de la signification de l'acte (pièce 11).
Il est constaté que Mme [K] [X] a adressé à l'avocat parisien, par courriel du 15 mai 2018, une copie de l'acte régularisé le 11 mai précédent.
L'avocat a aussitôt répondu que la signification était incomplète ce qui a entraîné l'intervention de Maître [C] pour rassurer le client sur la signification régulière de l'acte, la copie ayant été scannée d'un seul côté et non recto-verso suite à une erreur de la secrétaire.
Mme [K] [X] qui ne contredit pas efficacement ces faits, a donc transmis une copie sans en vérifier le contenu ce qui a causé le mécontentement du client à l'égard de l'étude et l'intervention d'un huissier de justice dans le traitement de ce dossier.
Parallèlement, Mme [K] [X] a pris l'initiative de s'adresser au client en utilisant le pronom « nous », ce dont il s'évince que la salariée a répondu au nom de l'étude, en précisant qu'il n'y avait pas à signifier l'acte une seconde fois et qu'aucune faute n'avait été commise. Cette circonstance a provoqué une nouvelle réponse de l'avocat lequel a rappelé les précédentes erreurs et la nécessité de communiquer en interne compte tenu qu'il avait déjà obtenu un retour de l'huissier de justice sur ce problème.
En s'exprimant au nom de l'étude de surcroît pour contester les reproches de l'avocat, sans autorisation de l'employeur, Mme [K] [X] a manqué à ses obligations contractuelles.
Par ailleurs, l'avocat a écrit le 5 juin 2018 à l'étude, concernant le même acte, en se plaignant que les originaux n'aient été expédiés que le 31 mai 2018 alors que la lettre d'accompagnement était datée du 17 mai 2018 et de surcroît en métropole plutôt qu'au cabinet de l'avocat correspondant à la Réunion, comme pour les autres dossiers, puisque l'audience se tenait le 7 juin au tribunal de grande instance de Saint-Denis.
Maître [C] a été contrainte à nouveau d'adresser ses excuses au nom de l'étude et de procéder au placement des originaux auprès du service d'audiencement du tribunal de grande instance en vue de l'audience.
Alors que Mme [K] [X] était en possession le 15 mai 2018 de l'acte régularisé, pour en avoir communiqué une copie incomplète par courriel, elle n'a transmis les originaux que le 31 mai suivant, ce retard lui étant imputable. De plus, en ne vérifiant pas l'opportunité de les renvoyer au client en métropole compte tenu de la date d'audience fixé à bref délai à La réunion, Mme [K] [X] a commis un autre manquement.
Le fait que l'avocat correspondant ait précisé que les faits n'ont pas eu d'incidence sur la régularité de la signification de l'acte, est sans emport sur les manquements de la salariée qui ont nui à l'image de l'étude.
Le grief est caractérisé.
S'agissant du dossier C035332 (numérotation intervenue après la suspension du contrat de travail de Mme [K] [X]), la société fait grief à la salariée d'avoir failli dans la signification d'un jugement malgré plusieurs relances du client.
Mme [K] [X] rétorque qu'il appartient à Maître [G] de vérifier l'état d'avancement des dossiers et de solliciter son personnel lorsqu'il est saisi d'une relance ce qu'il n'a pas fait pendant deux ans.
La cour en déduit que la salariée ne conteste pas les faits figurant dans la lettre de motivation en ce qu'elle a été destinataire de courriers et courriels concernant une même demande de signification de jugement sans qu'elle procède à l'ouverture d'un dossier par ses soins en sa qualité de secrétaire de l'étude.
L'employeur n'a donc pas été en mesure d'exercer son contrôle sur le suivi du dossier.
En l'absence de diligences démontrées par la salariée, son manquement est caractérisé.
Le grief est donc établi.
S'agissant du dossier C034720, la société fait grief à Mme [K] [X] d'avoir adressé un avis de signification à une mauvaise adresse et commis un faux pour dissimuler ses manquements dans les diligences lui incombant.
Elle produit l'avis de signification d'acte adressé en lettre simple à une mauvaise adresse, le procès-verbal du 11 mai 2016 de remise d'un acte à un homonyme, l'avis de signification d'acte communiqué par Mme [K] [X] à la demande de l'employeur (pièces 33 à 35), le procès-verbal de constat d'huissier sur le logiciel de l'étude (pièce 52) et l'attestation de M. [J], témoin de l'explication donnée par la salariée à l'employeur sur ces faits (pièce no36).
Mme [K] [X] objecte que le deuxième courrier a été fabriqué par l'employeur et que le clerc aurait dû laisser un avis de passage dans la boite aux lettres.
La société justifie, après les diligences effectuées par M. [J] au domicile de la personne concernée, de l'envoi de l'avis de signification par lettre simple, cette diligence relevant des attributions habituelles de Mme [K] [X] en sa qualité de secrétaire de l'étude.
Il résulte du procès-verbal d'huissier que ce courrier a été enregistré par le logiciel de l'étude comme ayant été adressé au [Adresse 5] et que toute modification de ce courrier lors de son édition est sans conséquence sur l'adresse initialement renseignée qui reste figée dans l'application.
Il est donc établi que l'avis a été initialement adressé par Mme [K] [X] au [Adresse 5].
Or, il est démontré que cette adresse correspond à un homonyme et non à l'adresse figurant sur l'acte que M. [J] a précédemment signifié au [Adresse 3].
Un premier manquement est donc caractérisé en ce que Mme [K] [X] a adressé l'avis à une mauvaise adresse, le fait que M. [J] ait, comme elle le soutient, manqué à ses obligations en omettant lors de son passage de laisser un avis dans la boite aux lettres de l'intéressé, étant sans emport sur ses propres obligations.
M. [J] atteste, sans que Mme [K] [X] ne contredise efficacement son témoignage direct des faits, que sur demande de l'employeur, elle a produit concernant ce dossier un avis de signification adressé par ses soins par lettre simple à l'adresse [Adresse 3] ».
L'adresse de l'avis produit par Mme [K] [X] pour justifier de ses diligences ne correspondant pas à celui définitivement enregistré par le logiciel, la salariée a produit un faux document à son employeur, l'erreur d'orthographe sur la ville attestant en outre de l'empressement dans lequel ce document a été édité.
Le grief est donc établi, peu important la régularité de l'acte de signification soutenue par la salariée.
2- S'agissant de l'attitude de Mme [K] [X], la société fait grief à la salariée de commettre des erreurs répétées et d'une certaine gravité, notamment dans une courte période précédant la suspension de son contrat de travail.
Elle ajoute qu'elle refuse catégoriquement d'appliquer les règles élémentaires mises en place et qu'elle réfute toujours toute responsabilité dans ses multiples erreurs bien que son attention ait été attirée sur les conséquences dommageables pour l'employeur, ce qui nuit au fonctionnement de l'étude.
A l'appui de ce grief, elle cite les attestations de Maître [C] (pièce 37), Mme [OI] (pièce 38), Maître [E] (pièce 39), M. [E] (pièce 41), M. [J] (pièce 42) et M. [N] (pièce 47).
Mme [K] [X] soutient qu'elle n'a pas été formée aux missions qui lui sont dévolues en sorte que l'employeur ne peut lui reprocher ni la mauvaise maîtrise de ses tâches, ni la mauvaise utilisation des outils de l'étude.
Il s'évince des attestations des salariés que Mme [K] [X] commet régulièrement des erreurs dans le traitement des dossiers qui lui incombe en sa qualité de secrétaire de l'étude ce qui impose à ses collègues et supérieurs hiérarchiques de vérifier ses tâches et corriger les erreurs à leur niveau en l'absence de prise en compte de leurs observations et de tout changement de son comportement.
Il est également établi par ces pièces que Mme [K] [X] n'a pas accepté le lien de subordination qui la liait aux deux nouveaux huissiers de justice Maitres [E] et [C], et qu'elle refusait d'appliquer leurs directives, ce qui avait des répercussions sur le bon fonctionnement de l'étude.
Enfin, il est relayé la posture de victime adoptée par Mme [K] [X], voire les mensonges de cette dernière, dès lors qu'une erreur lui était signalée.
Mme [K] [X] ne produit aucun témoignage de salariés contredisant ces faits.
En outre, si elle se plaint de l'absence de formation, ce que l'employeur contredit efficacement par la production d'une convention de formation professionnelle continue (pièce 45), il est attesté que Mme [K] [X] refusait les formations qui lui étaient proposées (pièces 46, 48, 51). En outre, Mme [K] [X] n'explique pas en quoi les tâches reprochées par l'employeur ne relevaient pas de son poste de secrétaire et des compétences attendues d'une salariée totalisant une ancienneté de 26 ans sur ce poste.
Le grief est donc établi.
En conséquence, la cour constate que les griefs établis par l'employeur (manquements dans le traitement de huit dossiers sur une courte période ayant précédé la suspension du contrat de travail et erreurs habituelles sans remise en cause perturbant le fonctionnement de l'étude), pris dans leur ensemble, caractérisent les graves insuffisances professionnelles de Mme [K] [X] dans le traitement des tâches qui lui incombent.
Par ailleurs, d'une part, les manquements de Mme [K] [X] dans les dossiers C035086 et C034720 relèvent d'une attitude fautive en ce qu'elle a communiqué des éléments mensongers à l'avocat sur l'avancement de son dossier, et dissimulé son erreur auprès de son employeur par un faux établi par ses soins.
D'autre part, l'absence de remise en question par Mme [K] [X] de sa pratique associée à une posture de victime lorsqu'elle est confrontée à ses erreurs, ont altéré l'image de la société par la réitération d'erreurs dans le traitement des dossiers confiés à l'étude. De même, les relations tendues qu'elle entretenait avec deux de ses supérieurs hiérarchiques, huissiers de justice, ont perturbé le fonctionnement de l'étude. Ces deux circonstances constituent une exécution fautive de la relation de travail.
Enfin, la production d'un faux par Mme [K] [X] pour dissimuler une nouvelle erreur, le dernier jour de présence à l'étude avant la suspension de son contrat de travail, caractérise l'impossibilité pour l'employeur de poursuivre la relation de travail et de maintenir Mme [K] [X] dans l'entreprise.
La faute grave étant caractérisée, Mme [K] [X] ne bénéficiait pas de la protection attachée à la suspension de la relation de travail en suite d'un accident du travail.
La nullité du licenciement sera rejetée.
Sur le licenciement sans réelle et sérieuse:
Selon les articles L.1232-1 et L.1232-6 du code du travail, « Tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ».
La cour ayant jugé le licenciement fondé sur une faute grave, Mme [K] [X] sera déboutée de sa demande tendant à voir juger sans cause réelle et sérieuse la rupture de la relation de travail ou encore comme fondée sur une faute simple.
Les demandes indemnitaires subséquentes sont également rejetées, le jugement étant confirmé.
Sur le préjudice distinct :
Vu l'article 9 du code de procédure civile ;
Mme [K] [X] sollicite des dommages et intérêts eu égard aux circonstances vexatoires ayant accompagné le licenciement.
Elle argue d'un licenciement visant à « se débarrasser » d'elle, d'une signification de la convocation et de la lettre de licenciement par une autre étude d'huissier rendant public le licenciement, d'accusations mensongères et de la production frauduleuse d'une lettre d'avertissement prescrite.
D'une part, l'attitude fautive et vexatoire de l'employeur ne saurait résulter des faits à l'origine du licenciement qui ont été reconnus fondés à l'exception de deux griefs concernant des erreurs de traitement de dossier.
D'autre part, les notifications de la convocation à entretien préalable et de lettre de licenciement par acte d'huissier étant légales, Mme [K] [X] n'est pas fondée à se plaindre de cette modalité de signification.
En outre, il n'est pas justifié par la moindre pièce de propos vexatoires publiquement tenus par l'employeur.
Enfin, la lettre d'avertissement invoquée n'étant pas produite au débat et l'employeur n'ayant formulé aucun grief à ce titre, aucun manquement de la société n'est caractérisé à ce titre.
En l'absence de faute caractérisée de la société sur le contexte ayant entouré le licenciement, la demande indemnitaire sera rejetée, le jugement étant confirmé sur ce point.
Sur le non respect de la procédure de licenciement :
Vu les articles L.1232-4 et L.1235-2 du code du travail ;
Mme [K] [X] fait grief à l'employeur d'avoir omis de mentionner l'adresse de la mairie de son lieu de résidence à laquelle elle pouvait consulter la liste des conseillers des salariés, l'employeur n'ayant pas conclu sur ce point.
En l'espèce, le courrier de convocation à un entretien préalable du 22 juin 2018 (pièce 2 / intimée) mentionne : « Conformément aux dispositions de l'article L.1232-4 du code du travail, je vous informe que vous pouvez vous faire assister, soit par une personne appartenant au personnel de l'entreprise, soit par un conseiller choisi sur une liste. Vous pouvez la consulter aux lieux ci-dessous précisés :
- Mairie de [Localité 7] : [Adresse 1] ;
- Inspection du travail : [Adresse 2] ».
En effet, la lettre de convocation ne mentionne pas l'adresse de la mairie de la commune de résidence de Mme [K] [X], soit [Localité 8].
L'irrégularité de la procédure a donc causé un préjudice à la salariée qui sera réparé par l'allocation d'une indemnité de 1 000 euros. Le jugement sera infirmé sur ce point, et confirmé pour le surplus.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort ;
Déclare recevable la demande en nullité du licenciement ;
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a débouté Mme [K] [X] de sa demande indemnitaire fondée sur l'irrégularité de la procédure de licenciement ;
Statuant à nouveau sur le chef de jugement infirmé,
Condamne la SCP [T] [G] - [S] [P] à payer à Mme [K] [X] la somme 1 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice résultant de l'irrégularité de la procédure ;
Y ajoutant,
Déboute Mme [K] [X] de sa demande de nullité du licenciement ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette les demandes formées au titre des frais non répétibles ;
Condamne Mme [K] [X] aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par M. Lacour, président, et par Mme Grondin, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991482.xml | COUR D'APPEL
DE SAINT-DENIS
Chambre sociale
No RG 21/01946 - No Portalis DBWB-V-B7F-FUHG
E.U.R.L. STATION LE BOUVET Représentée par son gérant, Monsieur [H] [I] [T], domicilié au siège social de la société
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Jacques HOARAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
APPELANTEMonsieur [S] [F] [Y]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : M. [K] [R], défenseur syndical
ORDONNANCE SUR INCIDENT No
DU 05 juillet 2022
Nous, Alain LACOUR, conseiller de la mise en état, assisté lors des débats de Monique LEBRUN, greffier, et de Nadia HANAFI, greffier, lors du prononcé par mise à disposition au greffe,
Exposé du litige :
Vu le jugement rendu le 13 octobre 2021 par le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion, en formation de départage ;
L'EURL Station le Bouvet (la société) a interjeté appel de cette décision le 12 novembre 2021.
Les parties ont été invitées par message adressé par le greffe à s'expliquer sur la caducité encourue par l'appel en application des dispositions de l'article 908 du code de procédure civile. L'affaire a été appelée à l'audience du 7 juin 2022. Aucune des parties n'a conclu sur la recevabilité de l'appel.
Vu les articles 642, 908 et 911 du code de procédure civile ;
Attendu que la société a interjeté appel le 12 novembre 2021 ; qu'elle disposait par conséquent d'un délai de trois mois, expirant le 12 février 2022, pour conclure et remettre ses conclusions au greffe ; que toutefois, le 12 février étant un samedi, ce délai a été prolongé jusqu'au lundi 14 février 2022 ;
Or, attendu que la société a notifié ses conclusions au greffe de la cour le 14 février 2022 ; qu'aucune caducité n'est encourue de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
Le conseiller de la mise en état,
Statuant publiquement, contradictoirement,
Dit que l'appel interjeté le 12 novembre 2021 par l'EURL Station le Bouvet n'encourt aucune caducité ;
Laisse les dépens de l'incident à la charge du Trésor public.
La présente ordonnance a été signée par Le conseiller de la mise en état et le greffier.
Le greffier
Nadia HANAFI Le conseiller de la mise en état
Alain LACOUR
Me Jacques HOARAU, vestiaire : 40
M. [R], défenseur syndical
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CAPP/JURITEXT000046991469.xml | REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 12
SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT
ORDONNANCE DU 08 JUILLET 2022
(no 286 , pages)
No du répertoire général : No RG 22/00288 - No Portalis 35L7-V-B7G-CF7EX
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 29 Juin 2022 -Tribunal Judiciaire de Créteil (Juge des Libertés et de la Détention) - RG no 22/02316
L'audience a été prise au siège de la juridiction, en audience publique, le 08 Juillet 2022
Décision réputée contradictoire
COMPOSITION
Madame Anne EVEILLARD, président de chambre à la cour d'appel de Paris, agissant sur délégation du Premier Président de la cour d'appel de Paris,
assistée de Madame Alexandra AUBERT, greffier lors des débats et du prononcé de la décision
Monsieur [L] [D] (Personne faisant l'objet de soins)
né le [Date naissance 2]/1996 à INCONNU
demeurant [Adresse 1]
Actuellement hospitalisé au Centre hospitalier [5]
non comparant et représenté par Me KACI Assia, avocat commis d'office au barreau de Paris,
M. LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER [5]
demeurant [Adresse 3]
non comparant, non représenté
Madame [W] [D]
demeurant [Adresse 4]
non comparante, non représentée
MINISTÈRE PUBLIC
Représenté par Madame Marie-Daphné PERRIN, avocate générale
Vu l'ordonnance du 29 juin 2022 rendue par le juge des libertés et de la détention de Créteil ordonnant la poursuite de la mesure d'hospitalisation complète de M. [L] [D] .
Par déclaration d'appel en date du 29 juin 2022 enregistrée au greffe le même jour, M. [L] [D] a interjeté appel de ladite ordonnance.
Les parties ainsi que le directeur de l'établissement ont été convoqués à l'audience du 7 juillet 2022.
L'audience s'est tenue au siège de la juridiction, en audience publique.
M. [L] [D] n'a pas comparu ayant fait l'objet d'une levée de son hospitalisation.
Au début de l'audience, les parties ont été invitées à se prononcer sur la recevabilité de l'appel dès lors que l'acte d'appel n'est pas motivé.
Son conseil a conclu à l'irrecevabilité de l'appel.
L'avocat général requiert que soit constaté l'irrecevabilité de l'appel comme non motivé et souligne que l'appel est sans objet.
Aux termes de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :
1o Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;
2o Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2o de l'article L. 3211-2-1.
Aux termes de l'article L 3211-12-1 du même code, l'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l'établissement, n'ait statué sur cette mesure avant l'expiration d'un délai de douze jours à compter de la décision par laquelle le directeur de l'établissement a prononcé son admission ou modifié la forme de la prise en charge du patient en procédant à son hospitalisation complète; que cette saisine est accompagnée d'un avis motivé rendu par le psychiatre de l'établissement ;
En cas d'appel, le premier président ou son délégataire statue dans les douze jours de sa saisine.
En l'espèce, il convient de constater que M. [L] [D] indique dans son acte d'appel « je soussigné [D] [L] demande de faire appel de la décision du juge des libertés du 29 juin 2022 ».
En l'absence de tout motif à l'appui de l'appel interjeté et faute de régularisation de l'appel interjeté, l'appel de M. [L] [D] est déclaré irrecevable car non motivé, en application de l'article R3211-19 du code de la santé publique.
Dès lors et sans qu'il soit nécessaire de répondre aux arguments de fond, l'appel interjeté est déclaré irrecevable.
PAR CES MOTIFS
Le délégué du premier président de la cour d'appel, statuant publiquement par mise à disposition au greffe.
Déclarons irrecevable l'appel formé par M. [L] [D].
Laissons les dépens à la charge de l'État.
Ordonnance rendue le 08 JUILLET 2022 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DÉLÉGATAIRE
Une copie certifiée conforme notifiée le 08/07/2022 par mail à :
X patient à l'hôpital
ou/et par LRAR à son domicile
X avocat du patient
X directeur de l'hôpital
X tiers par LS préfet de police
avocat du préfet
tuteur / curateur par LRAR
X Parquet près la cour d'appel de Paris
|
CAPP/JURITEXT000046991455.xml | COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
2ème CHAMBRE CIVILE
ARRET No 449 DU 11 JUILLET 2022
No RG 21/01109
No Portalis DBV7-V-B7F-DL3E
Décision déférée à la cour : Jugement civil du tribunal judiciaire de Basse-Terre, décision attaquée en date du 16 septembre 2021, enregistrée sous le no 20/00306.
APPELANTS :
Monsieur [K] [Y]
[Adresse 8]
[Adresse 7]
[Localité 3]
Représenté par Me Florence Deloumeaux de la Selarl Deloumeaux, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART
Madame [X] [Y]
[Adresse 8]
[Adresse 7]
[Localité 3]
Représenté par Me Florence Deloumeaux de la Selarl Deloumeaux, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART
Monsieur [J] [V]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Non représenté
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 799 alinéa 3 du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état, à la demande des parties, a autorisé les avocats à déposer leur dossier au greffe de la chambre civile jusqu'au 23 mai 2022.
Par avis du 23 mai 2022 le président a informé les parties que l'affaire était mise en délibéré devant la chambre civile de la cour composée de :
Madame Corinne Desjardins, présidente de chambre,
Madame Annabelle Clédat, conseillère,
Madame Christine Defoy, conseillère,
qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées à l'issue des débat de ce que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 11 juillet 2022.
GREFFIER en charge du dépôt des dossiers et lors du prononcé Madame Armélida Rayapin.
Réputé contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
Signé par Mme Corinne Desjardins, Présidente de chambre et par Mme Armélida Rayapin, greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire
FAITS ET PROCEDURE
M. [J] [V] est propriétaire d'un terrain situé au [Adresse 2], cadastré section [Cadastre 5], sur laquelle est édifiée une construction comprenant un hangar.
Le 1er janvier 2006, M. [V] a donné à bail un garage pour stationner un camion et pour confectionner les préparations destinées à la vente ambulante à M. [K] [Y] et Mme [X] [I] épouse [Y] (les époux [Y]) moyennant un loyer mensuel de 1.000 euros et pour une durée de six ans renouvelable par tacite reconduction.
Le 1er juillet 2014, un compromis de vente sous seing privé, sous condition suspensive a été signé par les parties portant sur un lot cadastré [Cadastre 4] d'une contenance de 214 m2, contenant un garage, situé [Adresse 2] sur la commune de [Localité 6] pour un prix de 60.000 euros payable comptant directement au vendeur en espèces, sous la condition suspensive du versement le 20 juillet 2012 de la somme de 60.000 euros correspondant au prix de vente.
Les époux [Y] ayant cessé de payer tout loyer à compter du mois d'avril 2018, M. [V] a saisi le juge des référé du tribunal de grande instance de Basse-Terre par assignation du 12 novembre 2018 aux fins d'obtenir l'expulsion des époux [Y] et leur condamnation à une indemnité provisionnelle au titre des arriérés de loyers.
Par ordonnance du 26 février 2019, le juge des référés a dit n'y avoir lieu à référé après avoir retenu l'existence d'une contestation sérieuse fondée sur l'existence du compromis de vente dont se sont prévalus les époux [Y] et du versement du prix de vente selon reçus en date des 1er juillet 2012 au 4 juillet 2018.
Par acte d'huissier en date du 30 juillet 2020, M. [V] à fait assigner les époux [Y] devant le tribunal judiciaire de Basse-Terre aux fins notamment de voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de bail, de voir constater que le compromis de vente sous condition suspensive est atteint par la prescription quinquennale et subsidiairement de le déclarer nul, d'ordonner l'expulsion des époux [Y] ainsi que leur condamnation à lui payer la somme de 28.000 euros au titre des loyers échus d'avril 2018 à juin 2020, de voir fixer le montant d'indemnité d'occupation à la somme de 1.000 euros .
Par jugement du 16 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Basse-Terre a :
- rejeté l'exception d'incompétence soulevée par les époux [Y],
- rejeté le moyen soulevé sur la nullité de l'assignation par les époux [Y],
- déclaré recevable l'action formée par M. [J] [V] à l'encontre des époux [Y],
- prononcé la résiliation du bail ayant pris effet le 1er janvier 2006 entre les parties,
- ordonné l'expulsion des époux [Y] ainsi que de tous occupants de leur chefs des lieux situés au [Adresse 2],
- condamné les époux [Y] à payer à M. [V] la somme de 28.000 euros au titre des loyers échus et impayés du mois d'avril 2018 au mois de juillet 2020, avec intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2018, date de la délivrance de la sommation de payer,
- fixé l'indemnité d'occupation à la somme de 1.000 euros par mois à compter du prononcé du jugement à intervenir jusqu'à la libération totale des lieux loués,
- prononcé la caducité du compromis de vente en date du 1er juillet 2014,
- débouté les époux [Y] de l'ensemble de leurs demandes,
- condamné les époux [Y] à payer à M. [V] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Les époux [Y] ont interjeté appel de cette décision par déclaration remise au greffe de la cour par voie électronique le 21 octobre 2021, de l'ensemble des dispositions du jugement expressément mentionnées.
Le 8 janvier 2022, les époux [Y] ont fait signifier la déclaration d'appel à M. [V] en réponse à l'avis du 10 décembre 2021 donné par le greffe. Cette signification a été faite à personne.
M. [V] n'a pas constitué avocat.
Par acte du 27 janvier 2022, les appelants ont fait signifier leurs conclusions à l'intimé.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 16 mai 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 23 mai 2022, date à laquelle la décision a été mise en délibéré au 11 juillet 2022.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
1/ M. [K] [Y] et Mme [X] [I] épouse [Y] , appelants :
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 18 janvier 2022 par lesquelles les appelants demandent à la cour de :
- dire les époux [Y] recevables et bien fondés en toutes leurs demandes,
- débouter M. [V] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
- dire et juger nulle et de nul effet l'assignation au fond introductive d'instance,
- dire et juger le contrat de bail nul et de nul effet,
- constater que le loyer versé selon quittance s est déduit du prix de vente et en conséquence rejeter la demande d'expulsion,
- condamner M. [V] au paiement des sommes suivantes:
* 25.654,98 euros au titre de l'indemnité principale d'éviction représentant une année de chiffre d'affaires,
* 15.000 euros au titre des frais de déménagement et réinstallation,
* 53.800 euros en remboursement des sommes versées par les appelants selon quittances versées aux débats ( pièces 2 et 3),
* 33.000 euros au titre de l'acompte versé selon compromis de vente,
* 9.249,11 euros au titre des travaux de remise en état effectués par les appelants,
- donner acte à M.[Y] de son maintien dans les lieux jusqu'au paiement de l'indemnité d'éviction due, outre la somme demandée au titre des frais de déménagement,
- condamner M. [V] au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions pour un exposé détaillé des prétentions et moyens.
MOTIFS DE L'ARRET
A titre liminaire, il convient de rappeler que, conformément aux dispositions de l'article 472 du code de procédure civile, lorsque l'intimé ne se constitue pas, la cour fait droit à la demande de l'appelant que dans la mesure où elle l'estime régulière, recevable et bien fondée.
La cour ajoute que les époux [Y] ne versent au soutien de leur appel que trois pièces selon bordereau de pièces du 18 janvier 2022, une pièce 1 intitulée factures réalisées par M. [Y] contenant 10 factures établies par la société SOPIMAT de divers matériaux en métal établies entre le 19 août 2014 pour les plus anciennes et le 26 juin 2015 pour la plus récente, deux pièces 2 et 3 contenant des quittances de loyer ou d'indemnité d'occupation de 1.000 euros établies au cours des années 2012 à 2018, et une 4ème pièce constituée d'un compromis de vente sous conditions suspensives en date du 1er juillet 2014.
Elle rappelle enfin que les demandes de " constater", " dire et juger", ne constituent pas des prétentions mais un rappel de moyens.
Sur la demande tendant à la nullité de l'assignation
Les époux [Y] reprochent au jugement déféré d'avoir rejeté le moyen de nullité de l'assignation motif pris qu'il leur appartenait de saisir le juge de la mise en état de cette demande qui relève de sa compétence exclusive.
Ils soutiennent devant la cour d'appel que la procédure au fond était pendante devant le juge de la mise en état, lequel n'avait pas à être saisi puisqu'il l'était déjà.
L'article 789 du code de procédure civile dispose que lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est jusqu'à son dessaisissent, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal pour statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l'article 47 et les incidents mettant fin à l'instance.
C'est donc à bon droit que les premiers juges ont rejeté la demande de nullité de l'assignation qui devait être présentée par les époux [Y] devant le juge de la mise en état, et non pas devant le tribunal.
Sur la demande tendant à la nullité du bail
Les époux [Y] reprochent aux premiers juges de ne pas avoir prononcé la nullité du bail liant les parties, alors que ce bail dont la durée est limitée à six années ne remplit pas la condition de durée de neuf année, d'ordre public posée par l'article L 145-4 du code de commerce, d'une part et ne contient pas en annexes un état des risques naturels miniers et technologiques, un diagnostic de performance énergétique ( DPE) , un diagnostic amiante, et une annexe environnementale d'autre part.
Ils affirment que la durée du bail limitée à six années et l'absence des annexes sus mentionnées entraînent la nullité du bail commercial.
Cette seule affirmation, dénuée de fondement juridique, est parfaitement inopérante pour rapporter la preuve de la nullité alléguée.
C'est en conséquence par une juste appréciation de la cause que les premiers juges ont considéré au visa des articles 1719 et 1728 du code civil qu'au regard du bail signé entre les parties, et l'absence de paiements des loyers échus à compter du mois d'avril 2018, du commandement aux fins de payer un arriéré locatif de 7.000 euros en principal délivré le 10 octobre 2018 resté sans effet, qu'en l'absence de paiement des loyers par les locataires depuis le mois d'avril 2018, il convenait de prononcer la résiliation du bail du 1er janvier 2006 conclu entre les parties, ordonner l'expulsion des époux [Y] ainsi que de tous occupants de leur chef et de les condamner à payer à M. [V] la somme de 28.000 euros représentant les loyers échus et impayés du mois d'avril 2018 au mois de juillet 2020 et ont fixé le montant de l'indemnité mensuelle d'occupation à 1.000 euros à compter du jugement jusqu'à la libération totale des lieux loués.
Sur le compromis de vente
Les époux [Y] n'hésitent pas à soutenir en cause d'appel que les sommes de 1.000 euros versées chaque mois, comme en attestent les quittances de loyers avec la mention "location-vente" versées en pièces 2 et 3, doivent être déduites du prix de vente convenu dans le compromis signé par les parties le 1er juillet 2014.
L'article 1102 du code civil dispose que chacun est libre de contracter ou de ne pas contracter , de choisir son cocontractant et de déterminer le contenu et la forme du contrat dans les limites fixées par la loi. La liberté contractuelle ne permet pas de déroger aux règles qui intéressent l'ordre public .
L'article 1134 de ce même code dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour des causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.
En l'espèce, les parties ont signé le 1er juillet 2014 un compromis de vente du bien objet du contrat de bail sous la condition suspensive que le prix fixé à 60.000 euros soit payé le 20 juillet 2012 (2014).
Il est constant que lorsque dans une promesse de vente sous condition, un délai est prévu pour la réalisation de la condition suspensive et qu'à la date prévue pour la réitération par acte authentique, cette condition n'est pas accomplie, la promesse est caduque.
Or les époux [Y] ne justifient pas avoir rempli cette condition suspensive en payant la somme de 60.000 euros le 20 juillet 2012 en réalité 2014.
En outre, les quittances versées aux débats correspondent sans ambiguïté au paiement des loyers fixés à la somme de 1.000 euros dans le contrat de bail qui les lie à M. [V] et non pas comme ils le soutiennent de mauvaise foi au paiement d'acomptes sur le prix.
Ainsi, l'absence du respect des délais prévus contractuellement pour lever la condition suspensive rend le compromis caduc comme l'ont à bon droit rappelé les premiers juges.
En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions y compris celles fondées sur l'article 700 du code de procédure civile, et par suite, les époux [Y] seront déboutés de l'ensemble de leurs demandes de paiements.
Les époux [Y] qui succombent en leur appel seront condamnés aux entiers dépens. Et seront déboutés de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute M. [K] [Y] et Mme [X] [I] épouse [Y] de l'ensemble de leurs demandes de paiement,
Déboute M. [K] [Y] et Mme [X] [I] épouse [Y] de leur demande fondée sur l'article 700 du code e procédure civile,
Condamne M. [K] [Y] et Mme [X] [I] épouse [Y] aux entiers dépens.
Et ont signé,
La greffière La présidente
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CAPP/JURITEXT000046991441.xml | AFFAIRE : No RG 19/03261 - No Portalis DBWB-V-B7D-FJWZ
Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Tribunal de Grande Instance de SAINT-DENIS DE LA REUNION en date du 24 Avril 2019, rg no 18/00583
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANTE :
Association [4]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Thomas HUMBERT de la SELAFA B.R.L. Avocats, avocat au barreau de PARIS et Me REMONGIN avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
LA CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA REUNION
Contentieux Santé
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Isabelle CLOTAGATIDE KARIM de la SCP CANALE-GAUTHIER-ANTELME-BENTOLILA, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Delphine GRONDIN, greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 5 Juillet 2022 prorogé au 13 juillet 2022;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 JUILLET 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Par requête adressée au secrétariat du tribunal des affaires de sécurité sociale de La Réunion le 20 juin 2018, l'association [4] a contesté une décision de la commission de recours amiable de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion relative à l'opposabilité de la prise en charge d'une maladie professionnelle reconnue à l'une de ses salariées, Madame [S] [G].
2. En application de l'article 12 de la loi no 2016-1547 du 18 novembre 2015 et de l'article 16 du décret no 2018-928 du 29 octobre 2018, la procédure a été transférée devant le tribunal de grande instance de Saint-Denis de La Réunion.
3. Par jugement du 24 avril 2019, le tribunal a :
- confirmé la décision de la commission de recours amiable de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion relative à l'opposabilité à l'association [4] de la prise en charge de la maladie professionnelle reconnue à l'une de ses salariées,
- dit que cette prise en charge est opposable à l'association [4],
- dit n'y avoir lieu à condamnation aux dépens.
4. Par déclaration du 16 mai 2019 parvenue au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion le 21 mai 2019, l'association [4] a interjeté appel de cette décision.
5. Les parties ont été convoquées par lettre recommandée avec avis de réception du 17 septembre 2019 à l'audience du 5 novembre 2019.
6. Par ordonnance du 5 novembre 2019, le président de la chambre sociale a constaté la caducité de la déclaration d'appel de l'association [4].
7. Par ordonnance (non datée), le président de la chambre sociale a rapporté l'ordonnance du 5 novembre 219, dit que la déclaration d'appel de l'association [4] n'encourt aucune caducité et ordonné la radiation de l'affaire.
8. L'affaire a été réinscrite au rôle le 31 décembre 2019 à la demande de l'association [4].
9. L'affaire a été plaidée à l'audience du 11 avril 2022 et mise en délibéré au 5 juillet 2022, prorogé au 13 juillet 2022.
10. L'association [4] déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 28 octobre 2021, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
- en conséquence,
- statuant à nouveau,
- à titre principal,
- constater que la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion n'a pas notifié de clôture d'instruction avant de notifier sa décision de prise en charge le 16 février 2018,
- constater que la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion n'a pas respecté les dispositions des articles R. 441-11 et suivants du code de sécurité sociale,
- en conséquence,
- dire et juger que la décision de la caisse de prendre en charge la maladie du 16 février 2018 au titre de la législation professionnelle lui est inopposable,
- à titre subsidiaire,
- constater que l'assurée a déclaré une pathologie non désignée dans le tableau 98,
- constater que la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion ne pouvait prendre en charge la pathologie au titre de la présomption d'imputabilité et devait soumettre préalablement à toute décision le dossier au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles,
- constater que la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion ne démontre pas le respect du délai de prise en charge de 6 mois fixé au tableau 98 des maladies professionnelles,
- en conséquence,
- dire et juger que la prise en charge de la maladie du 16 février 2018 au titre de la présomption d'imputabilité lui est inopposable.
11. À l'appui de ses prétentions, l'association [4] fait en effet valoir :
- que la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion a notifié sa décision de prise en charge sans qu'il y ait eu préalablement de lettre de clôture d'instruction l'informant de sa possibilité de consulter les pièces et de la date de prise de décision, le courrier recommandé ne mentionnant pas le numéro d'accusé de réception, alors que ce dernier n'est pas rattachable de façon certaine au courrier de notification,
- qu'il appartenait à la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion de vérifier, le cas échéant par voie d'IRM, si la pathologie dont souffrait sa salariée était bien une des pathologies prévues au tableau 98 (atteinte radiculaire de topographie concordante), le contraire étant démontré.
12. La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 26 janvier 2022, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
- débouter l'association [4] de toutes ses demandes, fins et conclusions articulées contre elle.
13. À l'appui de ses prétentions, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion fait en effet valoir :
- que l'ensemble de la procédure contradictoire a été respectée,
- que le dossier de la salariée a fait l'objet d'une instruction dans le cadre du tableau no 98 des maladies professionnelles,
- que l'existence de la sciatique par hernie discale L4-L5 a été mise en évidence lors du colloque médico-administratif du 8 février 2018 et dans un certificat médical établi par le Dr. [X], rhumatologue, du 9 octobre 2017,
- que la seule possibilité pour l'employeur de renverser la présomption d'imputabilité est de rapporter la preuve que le travail effectué par la victime est totalement étranger à la survenance de la maladie, ce que n'offre pas l'association [4].
14. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées ainsi qu'à la note d'audience figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le respect de la procédure contradictoire
15. L'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, dispose en son 1er alinéa que "la caisse dispose d'un délai de trente jours à compter de la date à laquelle elle a reçu la déclaration d'accident et le certificat médical initial ou de trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu le dossier complet comprenant la déclaration de la maladie professionnelle intégrant le certificat médical initial et le résultat des examens médicaux complémentaires le cas échéant prescrits par les tableaux de maladies professionnelles pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie".
16. L'article R. 441-11 prévoit que "la victime adresse à la caisse la déclaration de maladie professionnelle. Un double est envoyé par la caisse à l'employeur à qui la décision est susceptible de faire grief par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception. L'employeur peut émettre des réserves motivées. La caisse adresse également un double de cette déclaration au médecin du travail.
(...) En cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés".
17. Aux termes de l'article R. 441-13, "le dossier constitué par la caisse primaire peut, à leur demande, être communiqué à l'assuré, ses ayants droit et à l'employeur, ou à leurs mandataires".
18. Enfin, il ressort de l'article R. 441-14 que, "dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R. 441-11, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13.
La décision motivée de la caisse est notifiée, avec mention des voies et délais de recours par tout moyen permettant de déterminer la date de réception, à la victime ou ses ayants droit, si le caractère professionnel de l'accident, de la maladie professionnelle ou de la rechute n'est pas reconnu, ou à l'employeur dans le cas contraire. Cette décision est également notifiée à la personne à laquelle la décision ne fait pas grief".
19. En l'espèce, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion produit trois lettres adressées à l'association [4] au [Adresse 2] à [Localité 3] :
- l'une du 17 novembre 2017, adressée en recommandée, intitulée "transmission d'une déclaration de maladie professionnelle" et ainsi libellée :
"L'assuré(e) cité(e) en référence a établi une déclaration de maladie professionnelle, dont je vous adresse copie en application de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale.
Cette déclaration m'est parvenue, accompagnée du certificat médical indiquant lombosciatique réfractaire le 6 novembre 2017.
L'instruction de ce dossier est en cours et une décision devrait être prise à cet égard, dans le délai de trois mois à compter de la date mentionnée ci-dessus, en application de l'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale.
Dans l'hypothèse où un délai complémentaire serait nécessaire au traitement de ce dossier, je ne manquerais pas de vous en aviser, en application de l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale.
Je vous saurais gré de bien vouloir transmettre un exemplaire de la déclaration de maladie professionnelle et le courrier joint, au médecin du travail attache à votre établissement".
- l'autre du 31 janvier 2018, adressée en recommandée, intitulée "consultation du dossier avant décision sur maladie professionnelle" et ainsi libellée :
"Je vous informe que l'instruction du dossier est maintenant terminée.
Préalablement à la prise de décision sur le caractère professionnel de la maladie "sciatique par hernie discale" inscrite dans le "TABLEAU No 98 : Affections chroniques du rachis lombaire provoquées par la manutention manuelle de charges lourdes" qui interviendra le 16 février 2018, vous avez la possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier.
À cette date une notification de la décision prise vous sera adressée
Avant de vous déplacer et afin de vous accueillir dans les meilleures conditions, je vous invite à prendre un rendez-vous auprès de nos services".
- la dernière du 16 février 2018, adressée en recommandée, intitulée "notification de prise en charge d'une maladie professionnelle dans le cadre des tableaux" et ainsi libellée :
"Le dossier de votre salarié(e) a été examiné dans le cadre du 2ème alinéa de l'article L.461-1 du code de la sécurité sociale. Il ressort que la maladie sciatique par hernie discale L4-L5 inscrite dans le TABLEAU No 98 : Affections chroniques du rachis lombaire provoquées par la manutention manuelle de charges lourdes est d'origine professionnelle.
Cette maladie est prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels.
Si toutefois, vous estimez devoir contester cette décision, vous devez adresser votre réclamation motivée, accompagnée de ce courrier, de préférence par lettre recommandée avec accusé de réception, à la commission de recours amiable de notre organisme situé :
Secrétariat de la Commission de Recours Amiable de la Caisse d'Assurance Maladie, [Adresse 1], dans les deux mois suivant la réception de cette lettre, en joignant tout élément que vous jugerez utile pour l'examen de votre recours".
20. Il ressort des pièces produites par la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion que l'association [4] a signé l'accusé de réception de chacun de ces courriers permettant de déterminer sa date de réception.
21. Au cas particulier du courrier du 31 janvier 2018 relatif à la consultation du dossier avant décision sur maladie professionnelle, la production par la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion de l'accusé de réception signé par l'association [4] le 5 février 2018 permet de le rattacher à ce courrier dès lors que les deux documents mentionnent une référence commune (618031001WT00001).
22. La décision de prise en charge est intervenue le 16 février 2018, soit au moins dix jours francs après la date de l'accusé de réception, l'association [4] n'ayant pas usé de sa faculté de consultation du dossier.
23. C'est donc à bon droit que les premiers juges ont pu considérer qu'aucune inopposabilité à l'employeur ne peut résulter du non respect des règles relatives à l'instruction du dossier.
Sur l'opposabilité de la prise en charge de la salariée au titre de la maladie professionnelle
24. L'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale prévoit que "les dispositions du présent livre sont applicables aux maladies d'origine professionnelle sous réserve des dispositions du présent titre. En ce qui concerne les maladies professionnelles, est assimilée à la date de l'accident :
1o La date de la première constatation médicale de la maladie ;
2o Lorsqu'elle est postérieure, la date qui précède de deux années la déclaration de maladie professionnelle mentionnée au premier alinéa de l'article L. 461-5 ;
3o Pour l'application des règles de prescription de l'article L. 431-2, la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle.
Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.
Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.
Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.
Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article L. 315-1 (...)".
25. Aux termes de l'article L. 461-2, "des tableaux annexés aux décrets énumèrent les manifestations morbides d'intoxications aiguës ou chroniques présentées par les travailleurs exposés d'une façon habituelle à l'action des agents nocifs mentionnés par lesdits tableaux, qui donnent, à titre indicatif, la liste des principaux travaux comportant la manipulation ou l'emploi de ces agents. Ces manifestations morbides sont présumées d'origine professionnelle.
Des tableaux spéciaux énumèrent les infections microbiennes mentionnées qui sont présumées avoir une origine professionnelle lorsque les victimes ont été occupées d'une façon habituelle aux travaux limitativement énumérés par ces tableaux.
D'autres tableaux peuvent déterminer des affections présumées résulter d'une ambiance ou d'attitudes particulières nécessitées par l'exécution des travaux limitativement énumérés (...)".
26. L'annexe II du livre IV relatif aux "accidents du travail et maladies professionnelles" et intitulée "Tableau no 98 - Affections chroniques du rachis lombaire provoquées par la manutention manuelle de charges lourdes" est ainsi libellée :
Désignation des maladiesDélai de prise en chargeListe limitative des travaux susceptibles de provoquer ces maladies
Sciatique par hernie discale L4-L5 ou L5-S1 avec atteinte radiculaire de topographie concordante.
Radiculalgie crurale par hernie discale L2-L3 ou L3-L4 ou L4-L5, avec atteinte radiculaire de topographie concordante. 6 mois (sous réserve d'une durée d'exposition de 5 ans) Travaux de manutention manuelle habituelle de charges lourdes effectués :
- dans le fret routier, maritime, ferroviaire, aérien ;
- dans le bâtiment, le gros oeuvre, les travaux publics ;
- dans les mines et carrières ;
- dans le ramassage d'ordures ménagères et de déchets industriels ;
- dans le déménagement, les garde-meubles ;
- dans les abattoirs et les entreprises d'équarrissage ;
- dans le chargement et le déchargement en cours de fabrication, dans la livraison, y compris pour le compte d'autrui, le stockage et la répartition des produits industriels et alimentaires, agricoles et forestiers ;
- dans le cadre des soins médicaux et paramédicaux incluant la manutention de personnes ;
- dans le cadre du brancardage et du transport des malades ;
- dans les travaux funéraires.
27. En l'espèce, le certificat médical initial d'accident du travail de Madame [S] [G] du 28 juillet 2017 évoque une "lombosciatique réfractaire". Il ressort de la déclaration de maladie professionnelle du 24 octobre 2017 que cette lombosciatique réfractaire serait apparue dès le 2 mars 2016.
28. Le rapport d'enquête administrative du 18 janvier 2018 indique que, si Madame [S] [G] a débuté sa carrière professionnelle comme secrétaire médicale, elle est devenue par la suite veilleuse de nuit et auxiliaire de puériculture dès le 24 octobre 2002, ce qui l'a conduite à mobiliser le rachis lombaire pour les soins de nursing au lit avec ou sans réfection, quelques transferts lit/fauteuil et/ou lit/douche, et avec des manutentions sans lève-malade, avec l'apparition d'une première pathologie lombaire dès mars 2009.
29. Madame [S] [G] explique avoir été amenée à travailler au moins 4 mois sans aide de son binôme infirmier, d'où une démultiplication des efforts lors des manipulations de résidents et avoir souffert rapidement de fortes douleurs dans le bas du dos avec des irradiations dans la jambe droite jusqu'au pied, accentuées dès janvier 2015.
30. Cela fait donc plus de 5 ans qu'elle est exposée à des travaux de manutention manuelle habituelle de charges lourdes effectués dans le cadre des soins médicaux et paramédicaux incluant la manutention de personnes. La manipulation de résidents adultes a été confirmée par l'association [4] dans sa déclaration d'employeur du 19 décembre 2017.
31. Le Dr. [X], dans un certificat médical du 9 octobre 2017, évoque "une lombalgie chronique avec sciatalgie sur antécédent de hernie discale lombaire opérée en 2014 (devant) être prise en compte dans le cadre d'une maladie professionnelle 98".
32. Enfin, le Dr. [U], dans le cadre du colloque médico-administratif maladie professionnelle du 8 février 2018, confirme la sciatique par hernie discale L4-L5 du tableau 98.
33. Toutefois, si la sciatique par hernie discale L4-L5 est confirmée, notamment à la faveur d'une IRM pratiquée le 26 mai 2016, l'atteinte radiculaire de topographie concordante, constitutive de la maladie professionnelle catégorisée au tableau 98, n'est pas établie.
34. Il conviendra donc d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de déclarer la prise en charge de Madame [S] [G] au titre de la maladie professionnelle inopposable à l'association [4].
Sur les dépens
35. La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion, qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Déclare la prise en charge de Madame [S] [G] au titre de la maladie professionnelle inopposable à l'association [4],
Condamne la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion aux dépens de première instance et d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, Président de chambre, et par Mme Delphine GRONDIN, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991457.xml | No de minute : 164/2022
COUR D'APPEL DE NOUMÉA
Arrêt en omission de statuer
du 11 juillet 2022
Chambre civile
Numéro R.G. : No RG 22/00055 - No Portalis DBWF-V-B7G-S3N
Par requête en omission de statuer du 24 février 2022
d'un arrêt rendu le 31 janvier 2022 (RG no :20/447) par la cour d'appel de Nouméa
faisant suite à une déclaration d'appel du 17 décembre 2020
sur une décision rendue le 6 octobre 2020 par le tribunal de première instance de Nouméa, section détachée de Koné
M. [L] [F]
né le [Date naissance 1] 1983 à [Localité 4]
Représenté par Me Samuel BERNARD membre de la SARL NORD CONSEIL, avocat au barreau de NOUMEA
Société d'assurances AXA
Siège social : Délégation de Nouvelle Calédonie - [Adresse 2]
Représentée par Me Véronique LE THERY membre de la SELARL CABINET D'AFFAIRES CALEDONIEN, avocat au barreau de NOUMEA
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 9 juin 2022, en audience publique, devant la cour composée de :
M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,
M. François BILLON, Conseiller,
Mme Zouaouïa MAGHERBI, Conseiller,
qui en ont délibéré, sur le rapport de M. François BILLON.
Greffier lors des débats : Mme Isabelle VALLEE
Greffier lors de la mise à disposition : M Petelo GOGO
- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par M. Philippe ALLARD, président, et par M Petelo GOGO, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.
***************************************
RAPPEL DE LA PROCEDURE
Par arrêt de cette cour en date du 31 janvier 2022, il a été statué ainsi qu'il suit :
Déclare l'appel recevable ;
Confirme le jugement entrepris à l'exception des indemnisations retenues pour [Y], [A], [U], [C], [H], [V], [G] et [L] [F],
Et statuant à nouveau sur ces seules dispositions,
Condamne [D] [O] et [S] [Z], sous la garantie de la compagnie d'assurances AXA, in solidum à verser, à titre d'indemnisation de leur préjudice d'affection les sommes de :
- 200 000 F CFP à [Y] [F] pour le décès de [J] [E],
- 100 000 F CFP à [A] [F] pour le décès de [J] [E],
- 100 000 F CFP à [G] [F] pour le décès de [J] [E],
- 100 000 F CFP à [G] [F] pour le décès de [P] [F],
- 100 000 F CFP à [U] [F] pour le décès de [J] [E],
- 100 000 F CFP à [C] [F] pour le décès de [J] [E],
- 100 000 F CFP à [H] [F] pour le décès de [J] [E],
- 100 000 F CFP à [V] [F] pour le décès de [J] [E],
- 100 000 F CFP à [L] [F] pour le décès de [J] [E] ;
Dit que la présente décision est opposable à la compagnie d'assurances AXA ;
Dit que chaque partie succombant partiellement, conservera la charge de ses frais irrépétibles d'appel et de ses dépens d'appel.
************************
Par requête en omission de statuer enregistrée au greffe le 24 février 2022, M. [L] [F] fait valoir pour l'essentiel :
- que la cour d'appel de Nouméa, par son arrêt du 31 janvier 2022, a omis de statuer sur l'indemnisation du préjudice d'affection devant lui être alloué pour le préjudice d'affection consécutif au décès de M. [P] [F] ;
- qu'il est donc demandé de statuer sur ce point et d'allouer pour ce décès, la même somme que celle retenue pour le décès de M. [J] [E], ou encore celle accordée à M. [G] [F] pour le décès de M. [P] [F] et de [J] [E], soit la somme de 100 000 F CFP.
En conséquence, M. [L] [F] demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :
Vu l'article 463 du Code de procédure civile dans sa version applicable en Nouvelle-Calédonie,
Vu le jugement du Tribunal de Première Instance de Nouméa, Section détachée de KONE en date du 06 octobre 2020,
Vu l'arrêt de la Cour d'Appel de NOLIMEA en date du 31 janvier 2022,
Statuer sur l'indemnisation du préjudice d'affection dû à M. [L] [F] pour le décès de [P] [F].
******************
La compagnie d'assurances AXA FRANCE IARD, par des conclusions enregistrées au greffe le 23 mai 2022 portant appel incident, réplique pour l'essentiel :
- qu'elle fait valoir qu'elle avait conclu en ses termes en cours de procédure d'appel :
"[L] [F] quant à lui, vit à [Localité 3] où il s'est marié comme I'on peut voir sur la pièce no26 produite par son conseil en première instance. Dès lors, leur indemnisation ne saurait être accueillie tant pour le décès de [P] [F] que pour le décès de [J] [E] puisque qu'ils ne justifient pas d'un lien affectif réel avec les défunts" ;
- qu'elle considère ainsi, à la lecture du dispositif, que M. [L] [F] a été débouté de sa demande de réparation de préjudice moral pour le décès de [P] [F] ;
- que cependant si la Cour devait reconnaître l'omission de statuer l'indemnisation ne saurait être supérieure à 100 000 F CFP, soit la même somme que pour le décès de [J] [E].
En conséquence, la compagnie AXA demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :
DIRE n'y avoir lieu à indemnisation de préjudice moral de M. [L] [F] suite au décès de [P] [F].
STATUER ce que de droit sur les dépens
A titre subsidiaire :
Si par impossible la Cour devait retenir l'existence d'une omission de statuer :
Limiter l'indemnisation du préjudice moral de M. [L] [F] suite au décès de [P] [F] à la somme de 100 000 F CFP.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Attendu que les dispositions de l'article 462 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie prévoient, pour l'essentiel, que :
"Les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande " ;
Attendu qu'il est manifeste que la Cour n'a pas statué sur le préjudice moral susceptible d'être versé à M. [L] [F] pour le décès de M. [P] [F] ;
Attendu qu'il n'est pas contesté que M. [L] [F] vit en métropole, à [Localité 3] où il s'est marié, et qu'il ne peut en conséquence justifier d'une proximité immédiate avec le défunt qui était resté vivre en Nouvelle-Calédonie ; que le jugement entrepris qui lui avait accordé une somme de 200 000 F CFP sera ainsi réformé en limitant la demande formée par M. [L] [F] à la somme de 100 000 F CFP pour le décès de M. [P] [F] ;
PAR CES MOTIFS
Vu l'arrêt de ce siège en date 31 janvier 2022 no20/447,
Vu les dispositions de l'article 462 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
Condamne M. [D] [O] et M. [S] [Z], sous la garantie de la compagnie d'assurances AXA, in solidum à verser, à titre d'indemnisation de son préjudice d'affection la somme de 100 000 F CFP à M. [L] [F] pour le décès de M. [P] [F] ;
Dit que les dépens de la présente procédure seront à la charge du Trésor public.
Le greffier, Le président,
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CAPP/JURITEXT000046991443.xml | AFFAIRE : No RG 19/02048 - No Portalis DBWB-V-B7D-FHIS
Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT PIERRE en date du 26 Juin 2019, rg no 17/00213
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANT :
Monsieur [G] [M] [J]
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentant : Me Emmanuelle BLANC NOEL, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
E.U.R.L. [D] M
[Adresse 2]
[Localité 8]
Représentant : Me Eric HAN KWAN de la SCP MOREAU -NASSAR - HAN-KWAN, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
PARTIES INTERVENANTES :
Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE SAINT DENIS
[Adresse 1]
[Localité 9], représentant : Me Nathalie JAY, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
S.E.L.A.R.L. BACH
[Adresse 4]
[Localité 9]
Non représentée
Société CBF ASSOCIES
[Adresse 5]
[Localité 6]
Non représentée
Clôture : 7 Mars 2022
DÉBATS : En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Delphine GRONDIN, greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022 prorogé au 13 Juillet 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 JUILLET 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Suivant contrat de travail à durée indéterminée du 1er février 2009, Monsieur [G] [M] [J] a été embauché par l'E.U.R.L. [D] M M en qualité d'ouvrier niveau Ill, compagnon professionnel 1er échelon, coefficient 137, avant qu'un nouveau contrat ne soit établi le 1er février 2011.
2. Le 18 octobre 2016, Monsieur [G] [M] [J] a été mis à pied pour des soupçons de vols dans l'entreprise, avant d'être convoqué le 26 octobre 2016 à un entretien préalable à une mesure de licenciement et d'être licencié le 23 novembre 2016 pour faute lourde.
3. Le 5 octobre 2017, Monsieur [G] [M] [J] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Pierre en contestation de son licenciement et paiement de diverses sommes.
4. Par jugement du 26 juin 2019, le conseil a :
- dit et jugé que le licenciement opéré par l'E.U.R.L. [D] M à l'égard de Monsieur [G] [M] [J] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,
- requalifié néanmoins le licenciement pour faute lourde en un licenciement pour faute grave,
- dit et jugé que le salarié ne pourra prétendre à aucune indemnité,
- débouté Monsieur [G] [M] [J] de toutes ses demandes en lien avec la rupture du contrat de travail y compris celle relative à la mise à pied conservatoire,
- condamné l'E.U.R.L. [D] M à payer à Monsieur [G] [M] [J] la somme de 1.721,24 € au titre de rappel de salaires pour les années 2015 et 2016,
- débouté Monsieur [G] [M] [J] du surplus de ses demandes,
- débouté l'E.U.R.L. [D] M de ses demandes reconventionnelles,
- condamné l'E.U.R.L. [D] M aux entiers dépens.
5. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 11 juillet 2019, Monsieur [G] [M] [J] a interjeté appel de cette décision.
6. Par ordonnance du 3 novembre 2020, le conseiller de la mise en état a notamment :
- déclaré irrecevables les conclusions notifiées le 5 septembre 2020 par l'E.U.R.L. [D] M,
- déclaré irrecevables les pièces communiquées par l'E.U.R.L. [D] M,
- condamné l'E.U.R.L. [D] M aux dépens de l'incident.
7. Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 1er octobre 2021, Monsieur [G] [M] [J] demande à la cour de :
- déclarer son appel recevable et bien fondé,
- infirmer le jugement en ce qu'il a dit que le licenciement opéré par l'E.U.R.L. [D] M était fondé sur une cause réelle et sérieuse et l'a requalifié néanmoins en faute grave,
- dire que le licenciement opéré par l'E.U.R.L. [D] M est dépourvu de cause réelle et sérieuse et est abusif,
- fixer au passif de la procédure de redressement judiciaire de l'E.U.R.L. [D] M les sommes ci-après :
* 2.806,62 €, à titre d'indemnité due au titre de la mise à pied conservatoire abusive,
* 262,80 €, à titre d'indemnité de congés payés à valoir sur la période de ladite mise à pied conservatoire abusive,
* 4.150,00 €, à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
* 415,00 €, à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,
* 3.215,00 €, à titre d'indemnité légale de licenciement,
* 25.000,00 €, à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 5.000,00 €, à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice moral, distinct de la rupture abusive du contrat,
* 2.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* les dépens.
- déclarer l'UNEDIC, délégation AGS CGEA de La Réunion, tenue à garantie pour sa créance précitée dans les limites et conditions posées par les articles L. 3253-6 et suivants, L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail,
- fixer également au passif de l'E.U.R.L. [D] M la créance de Pôle Emploi au titre des indemnités de chômage versées depuis son licenciement et jusqu'au jour du prononcé de loarrêt dans la limite de 6 mois d'indemnités,
- statuer ce que de droit sur les dépens.
8. À l'appui de ses prétentions, Monsieur [G] [M] [J] fait en effet valoir :
- qu'il conteste avoir commis le moindre vol, puisqu'il effectuait tous les jours des achats pour l'entreprise auprès des fournisseurs sans pour autant les soustraire,
- qu'outre le gazole pour le camion, il faisait remplir des bidons de gazole
pour la consommation du Bob cat et des bidons d'essence pour les bétonnières, ce qui explique des factures plus élevées qu'un plein habituel,
- que son travail le conduisait à faire de nombreux déplacements dans l'ensemble de l'île, l'E.U.R.L. [D] M ayant produit des listings comportant une imitation de sa signature,
- qu'il payait lui-même ses propres achats, les faits relatifs au gaz et aux cigarettes n'ayant d'ailleurs pas été énoncés dans la lettre de licenciement,
- que les attestations fournies par l'E.U.R.L. [D] M sont soit complaisantes soit sans portée significative,
- que la plainte de l'E.U.R.L. [D] M a été classée sans suite,
- que la preuve de l'intention de nuire n'est pas rapportée,
- que l'employeur a fabriqué une lettre de licenciement non conforme à celle qu'il a envoyée, dans le seul but de s'exonérer de toute responsabilité dans la non-remise de documents sociaux,
- qu'il doit être indemnisé de la période de mise à pied conservatoire,
- qu'âgé de 52 ans, il n'a toujours pas retrouvé d'emploi depuis son licenciement, étant précisé que celui-ci est intervenu antérieurement à l'entrée en vigueur des barèmes Macron,
- qu'il s'est retrouvé en grande difficulté en raison de l'obstruction de son employeur dans la délivrance des documents de rupture, le conseil ayant omis de statuer sur sa demande relative au préjudice distinct.
9. Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 3 septembre 2021, l'AGS, citée par acte d'huissier du 30 avril 2021 en intervention forcée, demande à la cour de :
- in limine litis,
- constatant que l'appelant cite des pièces et arguments de l'employeur à l'appui de ses écrits judiciaires et de ses prétentions, mais n'a pas communiqué à l'intervenant forcé ayant constitué avocat les conclusions et pièces communiquées par l'intimé antérieurement à l'assignation en intervention forcée,
- dire que l'appelant a violé le principe du contradictoire,
- en tirer toutes les conséquences légales et rejeter l'intégralité des demandes formulées par l'appelant,
- au fond,
- confirmer la décision attaquée en toutes ses dispositions,
- statuant à nouveau,
- dire le licenciement fondé sur une faute grave et débouter Monsieur [G]
[M] [J] de l'intégralité de ses demandes,
- subsidiairement,
- constatant que le licenciement prend date le jour de l'envoi de la lettre de licenciement, soit le 16 novembre 2016, et que Monsieur [G] [M] [J] a déjà obtenu le paiement de son salaire d'octobre 2016,
- réduire la demande en paiement du salaire pendant la période de mise à pied conservatoire à la somme de 1.581,41 € brut,
- constatant que le salaire de base est de 2.062,71 € brut,
- réduire la demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis à 4.125,40 € brut,
- constatant que le salaire de base est de 2.062,71 € brut,
- réduire la demande en paiement de l'indemnité légale de licenciement à 3.197,20 € brut,
- constatant que la rémunération brute dont Monsieur [G] [M] [J] bénéficiait pendant les six derniers mois précédant la rupture du contrat de travail (juin à novembre 2016) est égale à 10.994,03 € brut et qu'il ne communique pas d'éléments prouvant une difficulté particulière du fait de la perte d'emploi,
- constatant que les barèmes Macron auxquels Monsieur [G] [M]
[J] échappe pour avoir été licencié deux jours avant leur application fixent une indemnité de 3 à 8 mois, soit 6.188,13 € à 16.501,68 € brut au plus,
- limiter l'indemnité visée par l'article L. 1235-3 du code de travail à 11.000,00 € et rejeter toute demande supérieure,
- en tout état de cause,
- constatant que la demande en paiement de dommages intérêts pour préjudice moral distinct de la rupture est une demande nouvelle qui se trouve irrecevable pour être formulée pour la première fois en cause d'appel, que cette demande a par ailleurs déjà été indemnisée par l'exécution de l'ordonnance de référé du 24 avril 2017 à hauteur de 3.000,00 €,
- rejeter cette demande comme irrecevable, à défaut, comme sans objet, le préjudice ayant déjà été indemnisé,
- sur sa garantie,
- dire que la décision à intervenir ne lui sera opposable que dans les seules limites de sa garantie légale prévue aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail,
- en conséquence, dire que sa garantie est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à l'un des trois plafonds définis à l'article D. 3253 du code du travail,
- exclure de la garantie de l'AGS les créances éventuellement inscrites au titre de l'indemnité pour frais irrépétibles et dépens.
10. À l'appui de ses prétentions, l'AGS fait en effet valoir :
- qu'elle a finalement réussi à se faire remettre les pièces produites par l'employeur,
- que le classement sans suite de la plainte déposée par l'E.U.R.L. [D] M n'enlève rien à la matérialité des faits reprochés à Monsieur [G] [M] [J], établis par de nombreuses attestations, des factures d'achat de carburant ou encore des bons de livraison,
- que Monsieur [G] [M] [J] ne pouvait ignorer le contexte déjà difficile de la situation du bâtiment à La Réunion, ni les difficultés que traversait l'entreprise,
- que Monsieur [G] [M] [J] pourrait avoir falsifié la lettre de licenciement qu'il produit en justice,
- que Monsieur [G] [M] [J] a déjà obtenu en référé le paiement de son salaire d'octobre 2016, les indemnités devant être réduites à de plus justes proportions,
- que la demande de réparation du préjudice moral, nouvelle en cause d'appel, est irrecevable.
- que sa garantie est en toute hypothèse limitée à des plafonds légaux et réglementaires.
11. Ni la S.E.L.A.R.L. Franklin Bach, désignée comme liquidateur de l'E.U.R.L. [D] M suivant jugement du tribunal mixte de commerce de Saint-Pierre du 28 octobre 2021, citée en intervention forcée par acte d'huissier remis à personne morale le 14 février 2022, ni la société CBF Associés, citée en intervention forcée en qualité d'administrateur de l'E.U.R.L. [D] M par acte d'huissier remis à personne morale le 27 mai 2021, n'ont constitué avocat.
12. L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 mars 2022.
13. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le principe du contradictoire
14. L'article 16 du code de procédure civile dispose en son 1er alinéa que "le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction".
15. En l'espèce, Monsieur [G] [M] [J] n'avait pas lui-même à produire les pièces versées aux débats par l'E.U.R.L. [D] M mais déclarées irrecevables en même temps que les conclusions de l'employeur par ordonnance du conseiller de la mise en état du 3 novembre 2020.
16. En toute hypothèse, il ressort des dernières conclusions de l'AGS que celle-ci produit elle-même les pièces de l'E.U.R.L. [D] M, de sorte que les débats peuvent être jugés loyaux.
Sur le licenciement
17. L'article L. 1232-1 du code du travail prévoit que "tout licenciement pour motif personnel est motivé dans les conditions définies par le présent chapitre.
Il est justifié par une cause réelle et sérieuse".
18. L'article L. 1232-6 dispose que, "lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception.
Cette lettre comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur".
19. La faute lourde est caractérisée par l'intention de nuire à l'employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif et ne résulte pas de la seule commission d'un acte préjudiciable à l'entreprise. Elle est d'une telle importance que, comme la faute grave, elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée de son préavis. La charge de la preuve de la faute lourde du salarié incombe à l'employeur.
20. En l'espèce, la lettre de licenciement de Monsieur [G] [M] [J] est ainsi motivée :
"Nous faisons suite à l'entretien préalable qui s'est tenu le 26 octobre 2016 dans notre bureau en présence d'une conseillère départementale.
Les explications que vous nous avez fournies ne nous ont pas convaincus et nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute lourde.
Cette décision est due aux malversations que vous avez effectuées au sein de notre société en détournant pour votre compte du carburant et des marchandises destinés aux chantiers.
Nous vous informons qu'une plainte a été déposée auprès du commissariat de police de [Localité 8].
Vous ne pouvez bénéficier, compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, d'une indemnité de licenciement".
21. Il convient d'observer que la lettre de licenciement versée aux débats par Monsieur [G] [M] [J] est l'exemplaire original signé de la main du gérant de l'E.U.R.L. [D] M, lequel n'a donc pu donner lieu à aucune forme de falsification, ainsi que le laisse accroire l'AGS.
22. Le faux suspecté par l'AGS est donc plutôt imputable à l'E.U.R.L. [D] M qui avait produit une autre version de sa lettre de licenciement, sous forme de photocopie non signée, laquelle comportait deux autres paragraphes ainsi rédigés dans la version versée aux débats par l'AGS (pièce no 7) :
"Votre contrat de travail prend fin dès la première présentation de cette lettre.
Nous tenons à votre disposition les documents administratifs afférents à votre départ".
23. Quoi qu'il en soit, la lettre de licenciement ne contient aucune précision ni sur les dates, ni sur la nature et l'importance des détournements invoqués.
24. À l'appui des griefs invoqués, sont produites 20 factures et 8 bons de commande, mais rien ne permet d'affirmer que ces matériaux auraient été soustraits à l'activité de l'entreprise.
25. Sont également produites trois attestations indiquant pour l'une, avoir vu à plusieurs reprises Monsieur [G] [M] [J] prendre du gasoil dans des bidons, ainsi que du gaz et des cigarettes (Monsieur [Y] [L]), pour l'autre l'avoir vu faire du gasoil le dimanche et le samedi après-midi ou encore acheter des blocs américains à l'entreprise TURPIN le vendredi après-midi (Monsieur [W] [D], frère du gérant de l'E.U.R.L. [D] M) et pour la dernière l'avoir vu à plusieurs reprises à la station du 22ème kilomètre se servir en gasoil et acheter du gaz et des cigarettes sur le compte de l'E.U.R.L. [D] M (Monsieur [U] [Z]).
26. La cour observe le caractère peu circonstancié de ces attestations, que l'employeur aurait pu utilement compléter par la production des factures correspondantes, mais elle pose le principe de l'achat de gasoil dans des bidons, ce que Monsieur [G] [M] [J] reconnaît en disant que ces bidons étaient destinés à l'alimentation du Bob cat et des bétonnières.
27. L'AGS verse également aux débats un tableau en forme de relevé de facturations pour la période du 1er janvier 2015 au 31 juillet 2016 signé par les différents salariés ayant engagé les factures, en ce compris Monsieur [G] [M] [J] qui a la particularité de mentionner son nom en même temps que sa signature, une comparaison d'écritures faite au vu des pièces versées aux débats permettant de confirmer que les signatures portées sont bien le fait de l'appelant.
28. Il en ressort que, pour le seul 1er semestre de l'année 2016, Monsieur [G] [M] [J] a effectué en station service les achats suivants :
- 655,17 € en 9 fois entre le 6 et le 29 janvier 2016
- 604,01 € en 8 fois entre le 3 février et le 29 février 2016
- 454,25 € en 6 fois entre le 3 mars et le 30 mars 2016
- 746,01 € en 11 fois entre le 3 avril et le 30 avril 2016
- 585,15 € en 8 fois entre le 7 mai et le 26 mai 2016
- 802,37 € en 10 fois entre le 2 juin et le 30 juin 2016.
27. Cette consommation exceptionnelle de carburant (3.846,96 € pour un seul semestre) ne peut pas s'expliquer par les seuls déplacements effectués par Monsieur [G] [M] [J] qui avait d'abord la qualité d'ouvrier. Par ailleurs, si le salarié affirme qu'il faisait également remplir des bidons de gasoil pour la consommation du Bob cat et des bidons d'essence pour les bétonnières, l'AGS produit deux attestations de Monsieur [Y] [O] et de Monsieur [V] [T] indiquant que la pelle (le Bob cat) était alimenté en fuel domestique. Le surplus de consommation n'est pas davantage explicable par les seuls besoins des bétonnières.
28. Le relevé de facturation fait apparaître par exemple que Monsieur [G] [M] [J] a acheté du carburant en station, le même dimanche 15 mai 2016, à hauteur de 80,00 € à 8 heures 20 puis à hauteur de 63,02 € à 11 heures 21, ce qui n'est pas rationnellement explicable.
29. La preuve des détournements de carburant étant rapportée, le licenciement doit être considéré comme étant fondé sur une cause réelle et sérieuse, bien que le conseil ait à juste titre écarté la faute lourde pour ne retenir qu'une faute grave en l'absence d'intention de nuire, le salarié ayant profité des largesses octroyées par son employeur et de son laxisme dans le contrôle des dépenses sans nécessairement avoir conscience des difficultés économiques que connaissait l'entreprise.
30. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse tirée de la faute grave, propre à priver Monsieur [G] [M] [J] de toutes les indemnités sollicitées par le salarié, en ce compris celles relatives à la mise à pied et au préavis.
Sur les dépens
31. Monsieur [G] [M] [J], partie perdante, sera condamné aux dépens d'appel.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
32. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la partie condamnée aux dépens prend en charge les frais irrépétibles exposés par la partie adverse dans les proportions que le juge détermine.
33. En l'espèce, l'équité commande de ne pas faire application de ces dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, en matière sociale et en dernier ressort, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne Monsieur [G] [M] [J] aux dépens d'appel,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, Président de chambre, et par Mme Delphine GRONDIN, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991494.xml | AFFAIRE : No RG 20/01919 - No Portalis DBWB-V-B7E-FOCP
Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Saint Pierre en date du 06 Octobre 2020, rg no 19/00237
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 JUILLET 2022
APPELANTE :
Association L'UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA DE [Localité 5], association déclarée, représentée par sa directrice nationale Madame [D] [I],
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentant : Me Nathalie Jay, avocat au barreau de Saint-Pierre de la Réunion
Maître [J] [L] de la SELARL [L] , mandataire judiciaire, es-qualité de liquidateur de SARL PLAFT immatriculée au registre de commerce et des sociétés de SAINT DENIS ( REUNION) sous le numéro B 801 222 068, dont le siège était situé [Adresse 2]
[Adresse 4]
[Localité 5]
Non représenté
Monsieur [T] [S]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentant : M. [N] [M] [E] (Défenseur syndical ouvrier)
Clôture : 6 décembre 2021
DÉBATS : En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Février 2022 en audience publique, devant Philippe Bricogne, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Monique Lebrun, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 5 mai 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Alain Lacour
Conseiller : Philippe Bricogne
Conseiller : Laurent Calbo
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 5 mai 2022 puis prorogé au 5 juillet 2022
Greffier lors des débats : Mme Monique Lebrun
Greffier lors du prononcé par mise à disposition : Mme Delphine Grondin
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Par requête du 26 juillet 2016, Monsieur [T] [S], embauché le 27 juillet 2015 par contrat de travail à durée déterminée d'une durée d'un an en qualité d'ouvrier polyvalent, a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Pierre en résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de son employeur la S.A.R.L. Plaft.
2. Bien que la S.A.R.L. Plaft ait été mise en liquidation judiciaire d'office le 3 août 2016 et que Monsieur [T] [S] n'ait pas appelé à la cause les organes de la procédure collective, le conseil a, par jugement du 7 mars 2017 :
- requalifié le contrat de travail à durée déterminée de Monsieur [T] [S] en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet,
- prononcé la résolution judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur à la date de prononcé du jugement,
- condamné la S.A.R.L. Plaft à payer à Monsieur [T] [S] les sommes suivantes :
* 14.575,50 € au titre des salaires d'octobre 2015 à juillet 2016,
* 1.457,55 € au titre des congés payés afférents aux salaires,
* 1.457,55 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
* 145,75 € au titre des congés payés afférents à l'indemnité compensatrice de préavis,
* 10.200,00 € au titre du rappel des salaires jusqu'au prononcé du jugement,
* 2.000,00 € au titre des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par le licenciement abusif,
* 1.000,00 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné la remise de l'attestation Pôle Emploi conforme, du certificat de travail, de ses bulletins de salaire de septembre 2015 au 7 mars 2017, sous astreinte de 50,00 € par jour de retard passé un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné la S.A.R.L. Plaft aux dépens.
3. Par jugement du 7 mars 2018, le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis a ordonné la clôture de la procédure de liquidation judiciaire de la S.A.R.L. Plaft pour insuffisance d'actif.
4. Par courrier du 31 mai 2018, Monsieur [T] [S] a sollicité le paiement de ses créances auprès de l'ancien liquidateur la S.E.L.A.R.L. [L].
5. Le liquidateur ayant rappelé à Monsieur [T] [S] que le jugement avait été rendu hors la présence des organes de la procédure et qu'il n'était pas opposable à l'AGS, il a, par requête du 4 octobre 2019, saisi une nouvelle fois le conseil de prud'hommes de Saint-Pierre afin qu'il soit ordonné la garantie de l'AGS et le règlement des créances salariales inscrites au jugement.
6. Le greffe a appelé l'AGS à la cause le 4 octobre 2019.
7. Par jugement du 6 octobre 2020, le conseil a :
- dit et jugé que les sommes reconnues par jugement du 7 mars 2017 doivent faire l'objet d'un règlement par le liquidateur judiciaire,
- dit que ces sommes sont opposable à l'AGS,
- condamné Maitre [J] [L], mandataire liquidateur de la S.A.R.L. Plaft, aux entiers dépens.
8. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 28 octobre 2020, l'AGS a interjeté appel de cette décision.
9. Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 25 janvier 2021, l'AGS demande à la cour de :
- in limine litis,
- constatant que la décision attaquée n'a pas répondu aux moyens de l'AGS tant sur l'irrégularité de sa saisine que sur l'absence de pièces communiquées pour prouver les prétentions du demandeur ou encore sur les contestations émises au fond,
- constatant que le tribunal judiciaire a seul compétence pour statuer sur la responsabilité civile professionnelle d'un liquidateur judiciaire, responsabilité non garantie par elle,
- déclarer nul et non avenu le jugement attaqué,
- infirmer la décision en ce qu'elle a consacré une autorité de la chose jugée du jugement du 7 mars 2017 et condamné personnellement le liquidateur au paiement des créances et (ordonné) la garantie de l'AGS,
- constatant qu'un jugement du 7 mars 2018 a prononcé la clôture pour insuffisance d'actif de la S.A.R.L. Plaft qui se trouve dissoute et n'a plus de représentant légal, ce jugement ayant mis fin au mandat de liquidateur de Maître [J] [L],
- déclarer irrégulière l'action dirigée contre une personne morale dépourvue de représentant légal,
- très subsidiairement au fond,
- constatant que ni Maître [J] [L], ni l'AGS n'ont été appelés à la cause lors de la saisine du conseil ayant donné lieu au jugement du 7 mars 2017, alors que l'employeur la S.A.R.L. Plaft se trouvait en liquidation judiciaire, le précédent jugement se trouvant irrégulier,
- constatant que (l'intimé) ne verse aux débats ni contrat de travail, ni bulletin de paie, ni document de rupture, ni lettre de rupture, ni le moindre document pouvant démontrer l'existence du contrat de travail à durée déterminée qu'il invoque, ni le montant de la rémunération qu'il aurait perçu, ni la rupture irrégulière du contrat ou existence d'un préjudice éventuel,
- débouter Monsieur [T] [S] de l'intégralité de ses demandes,
- à titre infiniment subsidiaire,
- constater qu'il résulte de l'aveu de Monsieur [T] [S] que le contrat de travail était à durée déterminée (et qu'il) a pris fin à son terme en juillet 2016 soit avant que le conseil de prud'hommes ne statue sur la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail le 7 mars 2017,
- dire que la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail est devenue sans objet et en débouter le salarié,
- en conséquence,
- débouter Monsieur [T] [S] de sa demande à titre d'indemnité pour rupture abusive du contrat de travail et de toute autre demande liée à une rupture imputable à l'employeur,
- dire n'y avoir lieu à paiement des salaires postérieurs à juillet 2016, terme du contrat de travail et rejeter toute demande éventuelle à ce titre,
- constater que Monsieur [T] [S] ne démontre pas l'existence d'un préjudice lié à la faute invoquée et le débouter de toute demande à titre de dommages et intérêts,
- sur sa garantie,
- constatant que ni Maître [J] [L], ni elle-même n'ont été appelés à la cause lors de la saisine du conseil ayant donné lieu au jugement du 7 mars 2017 alors que l'employeur la S.A.R.L. Plaft se trouvait en liquidation judiciaire, le précédent jugement se trouvant irrégulier,
- constater qu'aucune procédure de redressement ou liquidation judiciaire n'est plus en cours du fait de la clôture pour insuffisance d'actif et dire que la fin de la procédure a mis fin aux règles d'intervention de l'AGS et que sa garantie ne sera pas due,
- subsidiairement,
- dire que la décision à intervenir ne lui sera opposable que dans les seules limites de sa garantie légale prévue aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail et des plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail,
- en conséquence, dire que la garantie de l'AGS est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à l'un des trois plafonds définis à l'article D. 3253 du code du travail.
10. À l'appui de ses prétentions, l'AGS fait en effet valoir :
- que le jugement n'a pas répondu aux moyens soulevés en se contentant de lui déclarer opposable un jugement auquel elle n'est pas partie,
- que le mandataire judiciaire n'a pas été valablement convoqué à la procédure,
- que le conseil a excédé ses pouvoirs en condamnant le liquidateur à titre personnel,
- qu'elle ne garantit pas les dommages et intérêts mis à la charge d'un liquidateur,
- que la clôture des opérations de liquidation pour insuffisance d'actif a anéanti la personnalité morale de la S.A.R.L. Plaft et déchargé le liquidateur, la réouverture des opérations n'ayant pas été demandée devant le tribunal mixte de commerce,
- que Monsieur [T] [S] n'a jamais produit les pièces propres à prouver les droits qu'il revendique,
- que son contrat de travail avait cessé au moment où il a saisi le conseil de prud'hommes, aucune indemnité de rupture n'étant due,
- que sa garantie n'est due que tant que la procédure collective est ouverte, la récupération de sa créance privilégiée n'étant plus possible,
- que Monsieur [T] [S] a réclamé l'inscription de ses créances salariales postérieurement à la clôture des opérations de liquidation.
11. Monsieur [T] [S], bien que représenté, n'a pas conclu.
12. La S.E.L.A.R.L. [L], à qui la déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées respectivement le 30 avril 2021 et le 27 janvier 2021 à personne morale, ne s'est pas fait représenter.
13. La S.A.R.L. Plaft, qui n'est pas partie à la procédure mais à qui la déclaration d'appel a été signifiée le 6 mai 2021 suivant procès-verbal de recherches infructueuses et à qui les conclusions ont été signifiées le 4 février 2021 à personne morale, n'est pas intervenue.
14. L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 décembre 2021.
15. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la nullité du jugement
16. L'article 16 du code de procédure civile dispose en son 1er alinéa que "le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction".
17. En l'espèce, le dossier de première instance révèle que la S.E.L.A.R.L. [L] a bien été convoquée par le greffe à l'audience du 12 novembre 2019 suivant lettre recommandée avec avis de réception du 4 octobre 2019, en dépit d'une formule byzantine du jugement : "il semble avoir également attrait Maître [L] à la cause, malgré la fin de son mandat en raison de la clôture de la procédure collective pour insuffisance d'actif".
18. Cette convocation a eu lieu en qualité de "mandataire liquidateur de la S.A.R.L. Plaft", de sorte que le conseil ne commet aucun abus de pouvoir lorsqu'il "dit et juge que les sommes reconnues par jugement du 7 mars 2017 doivent faire l'objet d'un règlement par le liquidateur judiciaire", aucune condamnation personnelle n'étant prononcée contre la S.E.L.A.R.L. [L].
19. L'AGS ne produit pas ses conclusions de première instance, mais il ressort de la note de l'audience du 2 juin 2020 qu'elle invoquait la nullité du jugement initial, contre lequel elle avait formé tierce-opposition, qu'elle se plaignait de n'avoir reçu aucune pièce et qu'elle ne pouvait plus offrir sa garantie puisque la S.A.R.L. Plaft n'existait plus depuis la clôture des opérations de liquidation.
20. Le jugement entrepris résume la position de l'AGS à ce moyen : "ce jugement est nul et de nul effet pour avoir été rendu de façon non contradictoire en l'absence des organes de la procédure collective", auquel il répond que "le liquidateur Maître [L] aurait dû avoir connaissance des procédures judiciaires en cours, l'employeur a omis volontairement d'avertir le liquidateur d'une procédure prud'homale".
21. En omettant de donner une quelconque suite à l'absence de communication de pièces dont se plaignait l'AGS et en ne répondant pas au moyen tiré de son absence de garantie, les premiers juges ont violé le principe du contradictoire, de sorte que le jugement entrepris sera annulé, l'affaire étant évoquée au fond.
Sur le fond
22. Dès lors que l'appel de l'AGS porte sur les chefs de jugement ayant, d'une part, dit et jugé que les sommes reconnues par jugement du 7 mars 2017 doivent faire l'objet d'un règlement par le liquidateur judiciaire et, d'autre part, dit que ces sommes sont opposable à l'AGS et que l'appelante a fait part d'une tierce opposition audit jugement, laquelle imposera la désignation d'un administrateur ad hoc pour représenter la S.A.R.L. Plaft, une bonne administration de la justice commande d'ordonner qu'il soit sursis à statuer dans l'attente de l'issue de cette procédure.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, en matière sociale et en dernier ressort, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Annule le jugement entrepris,
Sursoit à statuer dans l'attente de l'issue de la tierce opposition formée par l'AGS à l'encontre du jugement du conseil de prud'hommes de Saint-Pierre du 7 mars 2017,
Réserve l'ensemble des demandes.
Le présent arrêt a été signé par M.Lacour, président, et par Mme Grondin, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991480.xml | Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 7
ARRÊT DU 07 JUILLET 2022
(no 22, 17 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 21/14466 - No Portalis 35L7-V-B7F-CEFUM
Décision déférée à la Cour : décision de la Commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers no 11 (procédure no 20-13) du 17 juin 2021, et certains de ses actes préparatoires
REQUÉRANTE :
CANDEL & PARTNERS S.A.S. anciennement dénommée CONSELLIOR
Prise en la personne de son président
Immatriculée au RCS de Paris sous le no 529 263 295
Dont le siège social est au [Adresse 3]
[Localité 4]
Élisant domicile au Cabinet de l'AARPI JEANTET
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Frank MARTIN LAPRADE, de l'AARPI JEANTET, avocat au barreau de PARIS, toque : T04
EN PRÉSENCE DE :
L'AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Mme [C] [L] et M. [K] [D], dûment mandatés
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 09 juin 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
– M. Gildas BARBIER, président de chambre, président,
– Mme Agnès MAITREPIERRE, présidente de chambre,
– Mme Frédérique SCHMIDT, présidente de chambre,
qui en ont délibéré.
GREFFIER, lors des débats : Mme Véronique COUVET
MINISTÈRE PUBLIC : auquel l'affaire a été communiquée et représenté lors des débats par Mme Jocelyne AMOUROUX, avocate générale
– contradictoire
– prononcé par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
– signé par M. Gildas BARBIER, président de chambre, et par Mme Véronique COUVET, greffière à qui la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
Vu la déclaration de recours déposée au greffe le 16 août 2021 par la société Consellior contre la décision no 11 du 17 juin 2021 de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers et certains de ses actes préparatoires, notamment la décision adoptée le 30 juin 2020 par le collège de ladite autorité ;
Vu l'exposé des moyens du demandeur au recours, déposé au greffe le 30 août 2021 ;
Vu les observations écrites déposées au greffe par l'Autorité des marchés financiers le 12 janvier 2022 ;
Vu les dernières écritures du demandeur au recours, déposées au greffe le 16 mars 2022 ;
Vu l'avis du ministère public du 3 juin 2022 communiqué le même jour au demandeur au recours et à l'Autorité des marchés financiers ;
Après avoir entendu en leurs observations, à l'audience publique du 9 juin 2022, le conseil du demandeur au recours, ainsi que le représentant de l'Autorité des marchés financiers, et le ministère public, le demandeur au recours ayant eu la parole en dernier et été en mesure de répliquer.
FAITS ET PROCÉDURE..............................................................................§ 1 à 31
MOTIVATION..............................................................................................§ 32 à 100
I. SUR LA RECEVABILITÉ DES PIÈCES No 3 À 15 PRODUITES PAR LE DEMANDEUR AU RECOURS EN ANNEXE À SON EXPOSÉ DES MOYENS.....................................................................................................§ 32 à 38
II. SUR LA RECEVABILITÉ DU RECOURS EN CE QU'IL PORTE SUR LA DÉCISION DU COLLÈGE DE SAISIR IMMÉDIATEMENT LA COMMISSION DES SANCTIONS DE L'AMF..............................§ 39 à 53
III. SUR LE BIEN-FONDÉ DU RECOURS EN CE QU'IL PORTE SUR LA DÉCISION DE LA COMMISSION DES SANCTIONS...........................§ 54 à 99
IV. SUR L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE ET SUR LES DÉPENS................................................................................................................§ 100
FAITS ET PROCÉDURE
1.La société Baccarat (ci-après « Baccarat ») est spécialisée dans la fabrication et la commercialisation d'articles haut de gamme, notamment en cristal. Cette société de droit français est cotée sur le compartiment C d'Euronext [Localité 4].
2.Par un communiqué de presse du 2 juin 2017, Baccarat a annoncé avoir pris connaissance de la signature d'une promesse unilatérale d'achat entre plusieurs de ses actionnaires et le fonds d'investissement hongkongais Fortune Fountain Capital (ci-après « FCC »), constituant une cession de bloc d'actions, laquelle serait suivie du dépôt d'un projet d'offre publique d'achat (ci-après « OPA ») auprès de l'Autorité des marchés financiers (ci-après « l'AMF »).
3.Le jour même, l'AMF en a informé le marché par une publication marquant le début de la période de pré-offre.
4.Le 20 juin 2018, agissant par l'intermédiaire de sa filiale luxembourgeoise, dénommée Fortune Legend Limited Sarl (ci-après « FLL »), FCC a acquis le bloc d'actions considéré, lequel représente 88,78 % du capital de Baccarat.
5.Entre le 23 octobre et le 19 novembre 2018, la société de droit français Consellior (ci-après « Consellior »), qui détenait déjà 53 500 actions Baccarat, en a acquis 55 de plus, détenant ainsi 6,44 % de son capital.
6.Elle a déclaré à l'AMF avoir « l'intention de poursuivre les achats tant que l'offre ne sera pas déposée et ne reflétera pas la valeur de l'entreprise » (déclaration publiée le 24 octobre 2018).
7.Elle a ensuite confirmé cette intention et précisé que « dans l'attente du visa [de l'AMF] (?) [elle] n'a pas encore pris de décisions sur l'apport de ses titres à l'offre (?) » (déclaration publiée le 21 novembre 2018).
8.Entre temps, le 13 novembre 2018, FFL a déposé auprès de l'AMF un projet d'offre publique simplifiée (ci-après « OPAS ») sur le solde des actions (93 167), représentant 11,22 % du capital de Baccarat. À l'appui de ce projet d'offre, il a déposé un projet de note d'information.
9.Le même jour, Baccarat a déposé un projet de note en réponse, après avoir fait état, par un communiqué de presse, de la décision favorable de son conseil d'administration sur le projet d'offre.
10.Ces deux projets de note ont été diffusés conformément aux articles 231-16 et 231-26 du règlement général de l'AMF (ci-après « RGAMF »).
11.Le 11 décembre 2018, l'AMF a déclaré ce projet d'offre conforme et apposé son visa aux deux projets de note.
12.Par un communiqué du 12 décembre 2018, l'AMF a indiqué que l'offre serait ouverte le 13 décembre suivant, puis clôturée le 4 janvier 2019.
13.Consellior a formé contre la décision de conformité une demande de sursis à exécution, laquelle a été rejetée par une ordonnance du délégué du premier président de la cour d'appel de Paris du 3 janvier 2019, ainsi qu'un recours en annulation, dont elle s'est désisté (CA Paris, 31 janvier 2019, RG no 18/27918).
14.Par un communiqué du 3 janvier 2019, l'AMF a reporté la date de clôture de l'offre au 11 janvier 2019.
15.Par un courriel du 11 janvier 2019, envoyé à 17 h 46 (quelques minutes après la clôture de l'offre), Consellior a transmis à l'AMF :
– d'une part, deux déclarations de cession de titres Baccarat, réalisées respectivement le jour même (portant sur 41 050 actions) et quelques jours auparavant, le 3 janvier 2019 (portant sur 12 005 actions) et ;
– d'autre part, une déclaration d'intention aux termes de laquelle elle « considère devoir apporter ses titres à l'offre pour éviter un risque de liquidité ».
16.De son côté, FLL, qui détenait à la clôture de l'offre 97,10 % du capital des droits de vote de Baccarat, a précisé ne pas avoir l'intention de demander la mise en oeuvre d'un retrait obligatoire et la radiation des actions Baccarat de la cote.
17.Le 19 février 2019, l'AMF a ouvert une enquête sur l'information financière et le marché du titre Baccarat et sur tout instrument financier dont le cours ou la valeur dépend du cours ou de la valeur de ce titre ou dont le cours ou la valeur a un effet sur le cours ou la valeur dudit titre, à compter du 1er juin 2017.
18.Le 16 janvier 2020, la direction des enquêtes et des contrôles de l'AMF a adressé à Consellior une lettre l'informant de manière circonstanciée des faits susceptibles de lui être reprochés au regard des constats des enquêteurs et de la faculté de présenter des observations dans un certain délai. Celle-ci a présenté ses observations en réponse le 3 février 2020.
19.La direction des enquêtes et des contrôles de l'AMF a établi son rapport le 5 mai 2020.
20.Au vu de ce rapport, la commission spécialisée no 1 du Collège de l'AMF a, le 30 juin 2020, décidé de notifier des griefs à l'encontre de la société Consellior, sans lui proposer d'entrée en voie de composition administrative, et de transmettre immédiatement cette notification des griefs à la commission des sanctions de l'AMF (ci-après « la Commission des sanctions »).
21.Aux termes de la notification des griefs, adressée à Consellior le 6 juillet 2020 et transmise le jour même à la Commission des sanctions, il lui a été reproché :
– d'une part, d'avoir déclaré tardivement (retard de cinq jours ouvrés) la cession des titres Baccarat réalisée le 3 janvier 2019, en méconnaissance des dispositions de l'article 231-46 du RGAMF ;
– d'avoir « omis d'informer les services de l'AMF de son changement d'intention, par l'envoi sans délai d'une déclaration aux fins de publication et d'information du marché, en méconnaissance des dispositions de l'article 231-47 du RGAMF ».
22.Le 9 septembre 2020, Consellior a déposé auprès de l'AMF des observations en réponse à la notification des griefs. Le même jour, elle a formé un recours contre la décision de notification des griefs, dont elle s'est désisté un an plus tard, le 9 septembre 2021 (CA Paris, 30 septembre 2021, RG no 20/12660).
23.Le 5 avril 2021, elle a également déposé auprès de l'AMF des observations en réponse au rapport établi, le 19 mars 2021, par le rapporteur désigné par la présidente de la Commission des sanctions.
24.Par une décision no 11 du 17 juin 2021, la Commission des sanctions a retenu que Consellior avait manqué à ses obligations déclaratives, a prononcé à son encontre une sanction pécuniaire de quatre-vingt mille euros, et ordonné la publication de sa décision sans anonymisation sur le site internet de l'AMF, ainsi que son maintien en ligne pendant cinq ans.
25.Le 25 juin 2021, Consellior a absorbé la société Candel & Partners, dont elle a repris la dénomination.
26.Par une déclaration déposée au greffe le 16 août 2021, elle a formé un recours dirigé à la fois contre la décision de la Commission des sanctions du 17 juin 2021 et contre la décision de notification des griefs du Collège du 30 juin 2020, en ce qu'elle a opté pour la saisine immédiate de la Commission des sanctions, au lieu de lui proposer d'entrer en voie de composition administrative.
27.Aux termes de son exposé des moyens, elle demande à la Cour :
À titre principal,
– d'annuler la décision de la Commission des sanctions (du 17 juin 2021) ;
– de réformer la décision du Collège (du 30 juin 2020) ;
– d'ordonner qu'il lui soit proposé d'entrer en voie de composition administrative ;
– d'ordonner que FFL et ses parties liées, en particulier son actionnaire de contrôle (FFC), l'établissement présentateur de l'offre (Société Générale Corporate & Investment Bankin), ainsi que les dirigeants et administrateurs de Baccarat qui ont certifié la sincérité des notes d'information relative à l'offre, soient invitées à conclure un accord transactionnel avec l'AMF, les obligeant notamment à l'indemniser à hauteur d'au moins 3 173 165 euros ;
À titre subsidiaire,
– de réformer la décision de la Commission des sanctions en réduction du montant de la sanction pécuniaire d'au moins 60 000 euros ;
En toutes hypothèses,
– de condamner l'AMF à lui verser la somme de 70 291 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'au règlement des entiers dépens.
28.Aux termes de ses dernières écritures, elle demande à la Cour :
À titre principal,
– d'annuler la décision de la Commission des sanctions du 17 juin 2021 ;
– de réformer la décision du Collège du 30 juin 2020, en ce qu'elle a opté pour la saisine immédiate de la Commission des sanctions ;
À titre subsidiaire,
– de réformer la décision de la Commission des sanctions en réduction du montant de la sanction pécuniaire d'au moins 60 000 euros ;
En toutes hypothèses,
– de condamner l'AMF à lui verser la somme de 70 291 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'au règlement des entiers dépens.
29.Lors de l'audience, le demandeur au recours a précisé avoir renoncé aux deux derniers chefs de demande formés à titre principal dans son exposé des moyens, lesquels ne figurent plus dans ses dernières écritures.
30.L'AMF invite la Cour à :
– écarter des débats plusieurs pièces annexées à l'exposé des moyens (pièces no 3 à 15) ;
– déclarer le recours irrecevable et subsidiairement non fondé en ce qu'il porte sur la décision du Collège ;
– rejeter le recours en ce qu'il porte sur la décision de la Commission des sanctions ;
– écarter la demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
31.Le ministère public invite la Cour à :
– déclarer recevables les pièces no 3 à 15 produites par le demandeur au recours ;
– déclarer recevable mais non fondé le recours contre la décision de notification des griefs ;
– rejeter le recours contre la décision de la Commission des sanctions.
MOTIVATION
I. SUR LA RECEVABILITÉ DES PIÈCES No 3 À 15 PRODUITES PAR LE DEMANDEUR AU RECOURS EN ANNEXE À SON EXPOSÉ DES MOYENS
32.L'AMF fait valoir que les pièces no 3 à 15 produites par le demandeur au recours, en annexe à son exposé des moyens, sont irrecevables, en application de l'article R.621-46 du code monétaire et financier, faute d'avoir été déposées en même temps que sa déclaration de recours.
33.Le demandeur au recours conteste cette analyse en se fondant sur deux arrêts de la Cour ayant, dans d'autres instances, admis la recevabilité de pièces complémentaires, déposées en même temps que l'exposé des moyens (CA Paris, 27 juin 2013, RG no 12/08248, et 12 janvier 2017, RG no 16/17607).
34.Le ministère public se fonde également sur cette jurisprudence pour considérer que ces pièces sont recevables.
Sur ce, la Cour,
35.L'article R.621-46, I, du code monétaire et financier dispose :
« Le recours devant la cour d'appel de Paris est formé par une déclaration écrite déposée en quadruple exemplaire au greffe de la cour d'appel de Paris contre récépissé. À peine d'irrecevabilité prononcée d'office, elle comporte les mentions prescrites par l'article 648 du code de procédure civile. Lorsque le recours ne contient pas l'exposé des moyens invoqués, le demandeur doit, sous la même sanction, déposer cet exposé au greffe dans les 15 jours qui suivent le dépôt de la déclaration. La déclaration de recours mentionne la liste des pièces et documents justificatifs produits. Ces pièces et documents sont remis au greffe de la cour d'appel en même temps que la déclaration. Le demandeur au recours joint à la déclaration une copie de la décision attaquée ».
36.La Cour rappelle que, si aux termes de cet article, les pièces et documents justificatifs mentionnés dans la déclaration de recours doivent être remis au greffe en même temps que celle-ci, aucune disposition ne sanctionne le non-respect de cette exigence par leur irrecevabilité. En outre, la faculté laissée au demandeur au recours de déposer l'exposé de ses moyens dans les quinze jours qui suivent le dépôt de sa déclaration de recours, doit être interprétée comme l'autorisant à déposer ses pièces et documents au plus tard en même temps que l'exposé de ses moyens, le non- respect de ce délai de quinze jours étant quant à lui, sanctionné par l'irrecevabilité de l'exposé des moyens, ainsi que, le cas échéant, des pièces et documents l'accompagnant.
37.En l'espèce, le demandeur au recours a déposé ses pièces no 3 à 15 en même temps que l'exposé de ses moyens, le 30 août 2021, soit dans le délai de quinze jours qui lui était imparti.
38.Ces pièces sont donc recevables.
II. SUR LA RECEVABILITÉ DU RECOURS EN CE QU'IL PORTE SUR LA DÉCISION DU COLLÈGE DE SAISIR IMMÉDIATEMENT LA COMMISSION DES SANCTIONS
39.À l'appui de sa contestation sur la recevabilité du recours en ce qu'il porte sur la décision du Collège, l'AMF rappelle les développements de jurisprudence ayant retenu l'irrecevabilité de recours formés contre un acte de notification des griefs ou des décisions du Collège de notifier des griefs avec ou sans proposition d'entrée en voie de composition administrative (CA Paris, 20 juin 2019, RG no 19/00472, suivi, dans la même affaire, de Com., 16 décembre 2020, pourvoi no 19-21.091 ; CA Paris, 11 décembre 2019, RG no 19/19116, Com. 14 avril 2021, pourvoi no 20-12.599 ; CA Paris, 9 juillet 2020, RG no 19/19067, suivi, dans la même affaire, de Com. 24 novembre 2021, pourvoi no 20-19.729 ; CA Paris, 27 mai 2021, RG no 20/08347). Elle en déduit que la décision du Collège de notifier des griefs, qu'elle soit assortie ou non d'une proposition d'entrée en voie de composition administrative, n'est pas susceptible d'un recours, et que la régularité de la notification des griefs ne peut être contestée que dans le cadre d'un recours fondé sur l'article R.621-46 du code monétaire et financier contre une décision de sanction, mais ne peut, en tant que telle, faire l'objet ni d'un recours sur le fondement de ce texte, concomitamment au recours formé contre une décision de sanction, ni d'un recours autonome sur le fondement de l'article L.621-30 du même code relatif aux recours dirigés contre les décisions individuelles de l'AMF.
40.Au soutien de la recevabilité de son recours, en ce qu'il est dirigé contre la décision du Collège, le demandeur au recours fait valoir que cette décision est attaquée, non pas en ce qu'elle a décidé de notifier des griefs, mais seulement en ce qu'elle a opté pour la saisine immédiate de la Commission des sanctions, au lieu de lui proposer d'entrer en voie de composition administrative. À cet égard, il estime s'être conformé à la jurisprudence selon laquelle la décision de notification des griefs ne peut faire l'objet d'un recours autonome et distinct de celui ouvert, par l'article L.621-30 du code monétaire et financier, contre la décision de la Commission des sanctions. Il cite en ce sens un récent arrêt de la Cour de cassation (Com. 14 avril 2021, précité), dont il déduit la recevabilité du présent recours, en ce qu'il est formé de manière conjointe et concomitante, à la fois contre la décision du Collège et contre la décision de la Commission des sanctions. Il se prévaut également des dispositions de l'article L.621-30 du code monétaire et financier relatives aux recours dirigés contre les décisions individuelles de l'AMF.
41.Le ministère public invite la Cour à déclarer le recours recevable, la remise en cause d'une décision de notification des griefs à l'occasion du recours contre la décision de la Commission des sanctions restant possible selon la jurisprudence précitée. Il estime néanmoins qu'il y a lieu de rejeter le moyen de réformation de la décision de notification des griefs dès lors que le Collège dispose d'un pouvoir souverain d'appréciation s'agissant de la proposition d'entrée en voie de composition administrative.
Sur ce, la Cour,
42.L'article L.621-15, I, alinéa 1 et 2, du code monétaire et financier (dans sa rédaction issue de l'ordonnance no 2019-1067 du 21 octobre 2019), dispose :
« Le collège examine le rapport d'enquête ou de contrôle établi par les services de l'Autorité des marchés financiers.
(?) [S']il décide l'ouverture d'une procédure de sanction, il notifie les griefs aux personnes concernées. Il transmet la notification des griefs à la commission des sanctions, qui désigne un rapporteur parmi ses membres » (soulignement ajouté par la Cour).
43.L'article L.621-14-1 du code monétaire et financier, relatif à la procédure de composition administrative, introduite par la loi no 2010-1249 du 22 octobre 2010 et dont le champ d'application a été étendu par la loi no 2016-1698 du 9 décembre 2016, énonce :
« Lorsque le rapport d'enquête ou de contrôle établi par les services de l'Autorité des marchés financiers fait état de manquements commis par une personne (...), le collège de l'Autorité peut, en même temps qu'il notifie les griefs dans les conditions prévues à la première phrase du deuxième alinéa du I de l'article L.621-15, lui adresser une proposition d'entrée en voie de composition administrative.
Cette proposition suspend le délai fixé au deuxième alinéa du I de l'article L.621-15.
Toute personne à qui il a été proposé d'entrer en voie de composition administrative s'engage, dans le cadre d'un accord arrêté avec le secrétaire général de l'Autorité des marchés financiers, à verser au Trésor public une somme dont le montant maximum est celui de la sanction pécuniaire encourue au titre du III de l'article L.621-15.
L'accord est soumis au collège puis, s'il est validé par celui-ci, à la commission des sanctions, qui peut décider de l'homologuer. L'accord ainsi homologué est rendu public.
En l'absence d'accord homologué ou en cas de non-respect de celui-ci, la notification de griefs est transmise à la commission des sanctions qui fait application de l'article L.621-15.
Les décisions du collège et de la commission des sanctions mentionnées au présent article sont soumises aux voies de recours prévues à l'article L.621-30 (...) » (soulignements ajoutés par la Cour).
44.L'article L.621-30 du même code, dans sa rédaction issue de la loi no 2014-1662 du 30 décembre 2014, auquel renvoie l'article L.621-14-1, précité, en son dernier alinéa, précise :
« L'examen des recours formés contre les décisions individuelles de l'Autorité des marchés financiers autres que celles, y compris les sanctions prononcées à leur encontre, relatives aux personnes et entités mentionnées au II de l'article L.621-9 est de la compétence du juge judiciaire. Ces recours n'ont pas d'effet suspensif sauf si la juridiction en décide autrement. Dans ce cas, la juridiction saisie peut ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de la décision contestée si celle-ci est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives.
Lorsque les recours mentionnés au premier alinéa du présent article visent une décision individuelle de l'Autorité des marchés financiers relative à une offre publique mentionnée aux sections 1 à 3 du chapitre III du titre III du livre IV, la juridiction saisie se prononce dans un délai de cinq mois à compter de la déclaration de recours.
Les décisions prononcées par la commission des sanctions peuvent faire l'objet d'un recours par les personnes sanctionnées et par le président de l'Autorité des marchés financiers, après accord du collège. (...) » (soulignements ajoutés par la Cour).
45.Il résulte de la combinaison de ces textes que, lorsque le Collège décide d'ouvrir une procédure de sanction en adressant une notification des griefs aux personnes concernées, il transmet immédiatement cette notification à la Commission des sanctions. Comme l'a rappelé la jurisprudence citée par l'AMF, la décision de notification des griefs n'est pas susceptible du recours prévu à l'article L.621-30 du code monétaire et financier, dès lors que cette décision, qui constitue un acte préparatoire, ne peut faire l'objet d'un recours autonome de celui ouvert par ce texte contre la décision de sanction prise, le cas échéant, par la Commission des sanctions.
46.Il résulte également de la combinaison de ces textes que, lorsque le Collège décide de faire usage de la faculté, qui lui est ouverte à l'article L.621-14-1, de proposer à la personne destinataire de la notification des griefs d'entrer en voie de composition administrative, il ne transmet pas immédiatement à la Commission des sanctions la notification des griefs, cette dernière ne lui étant transmise, le cas échéant, qu'en l'absence d'accord homologué ou de non-respect de celui-ci.
47.En outre, en visant en son dernier alinéa les « décisions du collège et de la commission des sanctions mentionnées au présent article », ce texte se borne à ouvrir un recours contre les décisions prises pour les besoins de la procédure de composition administrative, telles que celles du Collège, relatives à la validation de l'accord conclu entre la personne poursuivie et le secrétaire général, ou celles de la Commission des sanctions, relatives à l'homologation de cet accord. Ainsi, contrairement à ce qui est soutenu par la demandeur au recours, ce texte ne saurait être interprété comme ouvrant un recours contre la décision du Collège de transmettre immédiatement la notification des griefs à la Commission de sanctions, et partant, de ne pas recourir à une procédure de composition administrative.
48.Il s'ensuit qu'à défaut de dispositions contraires, aucun recours n'est ouvert contre une décision du Collège de saisine immédiate de la Commission des sanctions, prévue en cas de notification des griefs sans proposition d'entrée en voie de composition administrative. Un tel recours est donc irrecevable.
49.En l'espèce, la Cour relève que la décision du Collège du 30 juin 2020 est contestée en ce qu'elle a opté pour la saisine immédiate de la Commission des sanctions en lui transmettant la notification des griefs dès celle-ci adressée à Consellior et, partant, sans lui proposer d'entrer en voie de composition administrative.
50.La Cour relève également que cette décision du Collège est contestée dans le cadre d'un recours mixte, dirigé à la fois contre celle-ci (en vue de sa réformation) et contre la décision de sanction (en vue de son annulation ou réformation), et non dans le cadre d'un moyen de procédure venant au soutien d'un recours formé contre la seule décision de sanction.
51.La Cour relève encore qu'à l'appui de sa contestation, le demandeur au recours invoque l'existence d'une prétendue erreur manifeste d'appréciation de la gravité du manquement faisant l'objet du premier grief (qui aurait été le seul retenu par la Commission des sanctions), ce qui, selon lui, aurait dû conduire le Collège à lui proposer d'entrer en voie de composition administrative, au lieu de saisir immédiatement la Commission des sanctions, et aurait ainsi eu pour effet d'invalider la procédure ultérieurement suivie devant elle. Ce faisant, le demandeur au recours remet en réalité en cause le choix du Collège de ne pas avoir fait usage de la faculté, ouverte à l'article L.621-14-1 précité, de lui adresser une proposition d'entrée en voie de composition administrative, en même temps que la notification des griefs.
52.Or, ainsi qu'il a déjà été indiqué, le choix du Collège de transmettre immédiatement la notification des griefs à la Commission des sanctions sans proposition d'entrée en voie de composition administrative, n'est pas susceptible de recours.
53.Le présent recours est donc irrecevable, mais seulement en ce qu'il vise à réformer la décision du Collège, du 30 juin 2020, de saisir immédiatement la Commission des sanctions.
III. SUR LE BIEN-FONDÉ DU RECOURS EN CE QU'IL PORTE SUR LA DÉCISION DE LA COMMISSION DES SANCTIONS
54.Le demandeur au recours soutient que la décision de la Commission des sanctions encourt l'annulation, ou à défaut la réformation, en raison du caractère disproportionné de la sanction pécuniaire prononcée à son encontre.
55.À l'appui de ce moyen, il avance qu'un seul des deux griefs notifiés a été retenu à son encontre, à savoir la déclaration tardive de la cession réalisée le 3 janvier 2019, portant sur 12 005 titres Baccarat (grief no 1). Il prétend que le grief no 2, tel qu'il lui a été notifié, a été implicitement écarté par la Commission des sanctions, laquelle y aurait substitué un nouveau grief no 3, qui ne pouvait donner lieu à sanction, faute de lui avoir été préalablement notifié. À cet égard, il fait valoir que, par le grief no 2, il lui était reproché d'avoir tardé à déclarer son changement d'intention relatif à l'abandon de sa position acheteuse (précédemment communiquée au marché, le 21 novembre 2018) en faveur d'une position vendeuse, tandis que la Commission des sanctions, quant à elle, a retenu qu'il avait tardé à déclarer sa prise de position par rapport à l'offre ou à apporter un complément d'information sur ce point à la déclaration précitée (grief dit no 3).
56.À titre surabondant, dans ses dernières écritures, il allègue qu'en tout état de cause, dès le départ, l'AMF a commis une erreur dans la qualification juridique de l'opération de cession réalisée le 3 janvier 2019, en l'assimilant à un apport à l'offre. Sur ce point, il explique, d'une part, que les procédures ad hoc prévues dans la note d'information relative à l'OPAS, qui imposaient aux actionnaires de Baccarat l'utilisation d'un modèle fourni par leur intermédiaire financier pour transmettre à celui-ci un ordre d'apport à l'offre, n'ont pas été respectées et, d'autre part, qu'un tiers présent sur le marché, autre que l'initiateur de l'offre (FFL), aurait pu, grâce à un ordre agressif, acquérir les 12 005 titres qu'il avait, quant à lui, mis en vente le 3 janvier 2019, en évinçant ainsi l'intermédiaire centralisateur de l'offre, à savoir la Société Générale, de sorte que son éventuelle intention d'apporter ces titres à l'offre ne saurait être déduite de leur acquisition par FFL.
57.En outre, il soutient que la déclaration d'intention d'apporter ou non à l'offre ? requise par l'article 231-47 du RGAMF ? porte uniquement sur les titres « acquis » pendant la période d'offre ou de pré-offre, et non sur l'intégralité de la participation détenue par un investisseur. Il en tire la conséquence qu'en l'espèce, il ne pouvait être tenu de déclarer son intention par rapport à l'offre qu'en ce qui concerne les 55 actions Baccarat qu'il avait acquises en octobre/novembre 2018 et qui faisaient partie, selon lui, du bloc des 500 actions qu'il n'aurait décidé de conserver - et partant de ne pas apporter à l'offre- que le 11 janvier 2019, soit le jour-même où cette décision aurait été communiquée à l'AMF, de sorte qu'il ne saurait lui être reproché d'avoir tardé à déclarer son intention par rapport à l'offre. Il conteste, en tout état de cause, avoir opéré un quelconque changement d'intention à cet égard, n'ayant jamais officiellement pris position auparavant, par une déclaration préalable auprès de l'AMF, sur la question d'un éventuel apport à l'offre des titres qu'il avait acquis en octobre/novembre 2018. Il prétend n'avoir changé d'intention, par rapport à ce qu'il avait déclaré à l'AMF le 21 novembre 2018, qu'en ce qui concerne la poursuite ou non de ses acquisitions (abandon de sa position acheteuse en faveur d'une position vendeuse).
58.Au surplus, il fait valoir que l'AMF ne lui a demandé aucun complément d'information sur son intention par rapport à l'offre lors de la publication de la déclaration précitée (du 21 novembre 2018), mais seulement le 9 janvier 2019, et que sa démarche déclarative réalisée le 11 janvier (à peine 48 heures plus tard) ne saurait être considérée comme tardive, l'information complémentaire apportée à une déclaration initiale, contrairement à une déclaration de changement d'intention, n'étant soumise à aucun délai particulier par l'article 231-47 du RGAMF.
59.Le demandeur au recours déduit de l'ensemble de ces éléments que la sanction de 80 000 euros prononcée à son encontre est manifestement excessive, au regard, d'une part, des caractéristiques du seul grief qui aurait été valablement retenu contre lui, s'agissant d'un manquement non-intentionnel, purement formel, et pour lequel il n'est pas établi que des investisseurs aient subi un préjudice et, d'autre part, du montant des sanctions prononcées dans d'autres affaires.
60.Il demande en conséquence, à titre principal, l'annulation de la décision de la Commission des sanctions et, à titre subsidiaire, sa réformation en vue d'une réduction du montant de la sanction d'au moins 60 000 euros, afin de le mettre a minima au niveau du montant transactionnel de 20 000 euros qui aurait, selon lui, vraisemblablement été mis à sa charge, s'il avait été orienté par le Collège vers la voie de la composition administrative.
61.En réponse, l'AMF rappelle, s'agissant du grief no 1, qu'ayant dépassé le seuil de 5 %, Consellior était tenue, en application de l'article 231-46 du RGAMF, de déclarer à l'AMF tout achat ou cession de titres Baccarat au plus tard le jour de la négociation suivant l'opération concernée, ce qu'elle n'a pas fait puisqu'elle n'a réalisé sa déclaration que le 11 janvier 2019 alors que l'opération de cessation avait eu lieu dès le 3 janvier. Elle précise que le manquement à cette obligation déclarative est caractérisé sans qu'il soit besoin de déterminer si, dans chaque cas, les faits reprochés ont effectivement porté atteinte à la protection des investisseurs et au bon fonctionnement du marché, ni d'établir l'existence d'une intention ou la réalisation d'un profit, ces derniers éléments pouvant néanmoins être pris en compte, le cas échéant, au stade de la détermination du montant de la sanction pécuniaire, ce qu'a fait la Commission des sanctions en l'espèce (aux paragraphes 56 et 59 de sa décision).
62.S'agissant du grief no 2, l'AMF relève qu'aux termes de la notification des griefs, ce grief portait bien sur l'envoi par Consellior de sa déclaration de changement d'intention quant à l'apport de ses titres à l'offre. Elle indique que la Commission des sanctions ne s'est pas trompée sur l'étendue de sa saisine et qu'elle a bien statué dans le cadre de la notification des griefs.
63.À cet égard, elle précise, s'agissant des titres à prendre en compte, que l'article 231-57 du RGAMF s'applique à toute personne qui « vient à accroître sa participation », quel que soit le montant de cet accroissement, notamment si celle-ci détient plus de 5 % du capital au cours de la période d'offre ou de pré-offre, sans opérer de distinction selon que sa participation a été acquise avant ou après l'ouverture de la période de pré-offre, de sorte que la déclaration d'intention requise vise tous les titres détenus par un investisseur dont la participation est supérieure aux seuils énoncés audit article, quelle que soit leur date d'acquisition. Elle estime que l'interprétation selon laquelle cette obligation déclarative ne serait applicable qu'aux titres acquis en période d'offre ou de pré-offre serait contraire à l'objectif de transparence, de bon fonctionnement du marché et de protection des investisseurs, poursuivi par cet article, dès lors que la mise en oeuvre dudit article doit permettre de connaître le positionnement des principaux actionnaires quant à l'offre d'acquisition de l'ensemble des titres qu'ils détiennent.
64.L'AMF précise également, s'agissant de l'objet de l'obligation déclarative, que l'article 231-57, dernier alinéa, du RGAMF se borne à prévoir la faculté pour l'AMF de demander au déclarant toute précision ou complément qu'elle estime nécessaire, sans ériger la transmission d'un complément d'information en une obligation déclarative autonome.
65.Elle précise encore, s'agissant du moment de réalisation de la déclaration de changement d'intention, que celle-ci doit intervenir « sans délai », c'est-à-dire avant la mise en oeuvre de la décision d'apporter ou de ne pas apporter ses titres à l'offre. À cet égard, elle fait valoir que, si les investisseurs n'étaient tenus de déclarer leur intention ou leur changement d'intention qu'une fois tout aléa supprimé, cette information interviendrait en général peu de temps avant la réalisation effective de leur projet et ne permettrait donc pas d'assurer la visibilité et la transparence recherchées.
66.En l'espèce, l'AMF observe que, dès le 2 juin 2017, soit à la date d'ouverture de la période de pré-offre, Consellior détenait 53 501 actions Baccarat, ce qui représentait 6,44 % du capital de cette société, de sorte qu'elle se trouvait, dès cette date, au-delà du seuil de 5 % prévu à l'article 231-47 du RGAMF et était donc, à ce titre, tenue de déclarer « immédiatement » à l'AMF les objectifs qu'elle avait l'intention de poursuivre au regard de l'offre en cours puis, en cas de changement d'intention, de communiquer « sans délai » à l'AMF une nouvelle déclaration d'intention. Elle relève en outre qu'en cédant des actions Baccarat sur le marché, les 3 et 11 janvier 2019, alors qu'il résultait clairement de la note d'information de FLL du 13 novembre 2018 que toute cession réalisée sur le marché revenait, en application de l'article 233-2 du RGAMF, à une cession réalisée au bénéfice de FLL, en tant qu'initiateur de l'offre, Consellior a, de fait, apporté une partie de ses titres à l'offre, ce qu'elle ne pouvait ignorer. Elle rappelle que la mise en oeuvre de cette décision d'apporter une partie de ses titres à l'offre n'a été précédée d'aucune déclaration de changement d'intention en ce sens, laquelle n'est intervenue qu'après la clôture de l'offre, ce qui était insusceptible de renseigner le marché sur sa position, en tant que principal actionnaire minoritaire de Baccarat. Elle relève qu'à supposer même que Consellior ait exprimé son changement d'intention à l'AMF dès le 9 janvier, cette éventuelle déclaration n'aurait pas été réalisée « sans délai », de sorte que le manquement serait, en tout état de cause, caractérisé.
67.Sur le montant de la sanction pécuniaire prononcée, l'AMF rappelle les différents éléments sur lesquels la Commission des sanctions s'est fondée au regard des critères légaux (article L.621-15, III, du code monétaire et financier) et observe que le demandeur au recours n'apporte aucun justificatif de sa situation financière et patrimoniale.
68.Elle déduit de l'ensemble de ces éléments que la sanction prononcée et justifiée et non disproportionnée.
69.Le ministère public développe un argumentaire comparable.
Sur ce, la Cour,
70.L'article 231-47 du RGAMF, dans sa rédaction en vigueur depuis le 30 juin 2014, applicable à la date des faits et non modifiée à ce jour, énonce :
« Sans préjudice des articles L.233-7 et suivants du code de commerce, toute personne ou entité, à l'exception de l'initiateur de l'offre, qui vient à accroître, seule ou de concert, depuis le début de la période d'offre ou, le cas échéant, de la période de pré-offre, le nombre d'actions qu'elle possède d'au moins 2 % du capital de la société visée, ou qui vient à accroître sa participation si elle détient plus de 5 % du capital ou des droits de vote, est tenue de déclarer immédiatement à l'AMF les objectifs qu'elle a l'intention de poursuivre au regard de l'offre en cours. En cas de changement d'intention, une nouvelle déclaration est établie et communiquée sans délai à l'AMF.
Les dispositions du premier alinéa s'appliquent également aux titres visés par l'offre, autres que des actions.
La déclaration précise :
1. Si la personne ou l'entité qui vient à accroître sa participation agit seule ou de concert ;
2. Les objectifs poursuivis par cette personne ou entité au regard de l'offre, notamment si elle a l'intention de poursuivre ses acquisitions et, si l'offre a été déposée, d'apporter les titres acquis à l'offre.
L'AMF peut demander au déclarant toute précision ou complément qu'elle juge nécessaire » (soulignements ajoutés par la Cour).
71.C'est sur le fondement de ces dispositions qu'il a été reproché à Consellior, au titre du grief no 2, d'avoir omis « d'informer les services de l'AMF de son changement d'intention par l'envoi sans délai d'une déclaration aux fins de publication et d'information du marché ».
72.Par ce grief no 2, il lui a été reproché d'avoir tardé à déclarer son changement d'intention consistant à apporter une partie de ses titres à l'offre, et non, comme cela est prétendu à tort, d'avoir tardé à déclarer son changement d'intention relatif à l'abandon de sa position acheteuse en faveur d'une position vendeuse.
73.En effet, si la notification des griefs rappelle que les cessions des titres Baccarat réalisées par Consellior en janvier 2019 apparaissent en contradiction avec sa dernière déclaration d'intention, publiée le 21 novembre 2018, laquelle mentionnait, notamment, son intention de poursuivre ses achats, il en résulte nullement la formulation d'un grief de déclaration tardive de changement d'intention portant sur la poursuite ou non de ses acquisitions.
74.Plus précisément, aux termes de la notification des griefs, l'objet du grief no 2 ressort clairement du rapprochement entre les éléments suivants :
– tout d'abord, les cessions de janvier 2019 et le choix de la procédure d'apporter à l'offre exprimé par FFL dans sa note d'information du 13 novembre 2018, dont il est déduit que ces cessions « pourraient être qualifiées d'apport à l'offre compte tenu de leur calendrier de réalisation » ;
– ensuite, lesdites cessions, la déclaration d'intention précitée (publiée le 21 novembre 2018), laquelle mentionnait notamment que « dans l'attente du [visa] de l'AMF [sur la conformité de l'offre], Consellior n'a pas encore pris de décisions sur l'apport de ses titres à l'offre et fera connaître sa décision alors », ainsi que « le litige existant et l'opposition à l'offre initialement déclarée de Consellior » (litige opposant celui-ci à l'AMF sur la décision de conformité de l'offre), dont il est déduit un changement d'intention consistant à apporter une partie de ses titres à l'offre, lequel aurait dû être déclaré immédiatement à l'AMF, et non le 11 janvier 2019, une fois l'offre clôturée.
75.Il s'ensuit que, contrairement à ce que prétend le demandeur au recours, le grief no 2 ne concernait ni le premier volet de l'obligation déclarative d'intention, ni le changement d'intention y afférent (poursuite ou non des acquisitions), mais uniquement son second volet (apport ou non des titres à l'offre).
76.En outre, contrairement à ce qui est allégué, la Commission des sanctions n'a pas décidé d'écarter ce grief no 2, pour lui substituer un prétendu autre grief, qui ne lui aurait pas été notifié, de déclaration tardive de sa prise de position par rapport à l'offre ou de fourniture tardive d'un complément d'information sur ce point.
77.En effet, il ressort clairement de la décision de la Commission des sanctions que celle-ci a retenu que Consellior avait tardé à déclarer son changement d'intention par rapport à l'offre, ayant mise en oeuvre sa décision d'apporter une partie de ses titres à l'offre dès le 3 janvier 2019 (date de la première cession), la même décision ayant été réitérée le 11 janvier de la même année (date de la seconde cession), sans faire précéder ces interventions d'une déclaration de changement d'intention par rapport à celle publiée le 21 novembre 2018, alors que cette déclaration aurait dû intervenir « sans délai », et donc avant lesdites interventions. La Commission des sanctions s'est ainsi prononcée sur le grief no 2, tel qu'il avait été notifié à Consellior, et, loin de l'écarter et d'y substituer un quelconque grief non notifié, a estimé que celui-ci était fondé.
78.Il résulte de l'ensemble de ces développements que la thèse du demandeur au recours repose sur un postulat erroné, procédant d'une dénaturation, tant de la notification des griefs que de la décision de la Commission des sanctions.
79.Elle repose, au surplus, sur une mauvaise interprétation des dispositions de l'article 231-47 du RGAMF, précité.
80.En effet, il ressort clairement du libellé de ces dispositions qu'en l'absence d'une quelconque distinction entre les titres acquis en période de pré-offre ou d'offre et les titres acquis antérieurement, tout investisseur qui vient à accroître sa participation (peu important l'ampleur de cet accroissement), s'il détient plus de 5 % du capital ou des droits de vote de la société cible, est tenu de déclarer immédiatement à l'AMF son intention d'apporter ou non ses titres à l'offre, quelle que soit la date d'acquisition des titres ainsi détenus, et, le cas échéant, de déclarer sans délai son changement d'intention à cet égard. Ces obligations déclaratives recouvrent donc tous les titres détenus par un investisseur ayant atteint les seuils susvisés, et non pas uniquement les titres acquis pendant la période d'offre ou de pré-offre, comme le prétend à tort le demandeur au recours. Admettre le contraire reviendrait à priver largement d'effet utile ces obligations déclaratives, eu égard à l'importance de l'objectif de bonne information du marché dans le cadre d'une offre publique, en particulier en ce qui concerne le positionnement des principaux actionnaires de la société cible (intention d'apporter ou non leurs titres à l'offre).
81.En outre, si l'article 231-47 du RGAMF, précité, indique qu' « [e]n cas de changement d'intention, une nouvelle déclaration est établie et communiquée sans délai à l'AMF », il n'en demeure pas moins que l'investisseur ne saurait utilement se prévaloir de l'absence de réalisation de toute déclaration préalable d'intention de sa part auprès de l'AMF, en violation de l'article 231-47 du RGAMF, pour échapper à l'obligation, également requise par ce texte, de déclarer son changement d'intention auprès de ladite autorité.
82.Par ailleurs, il importe de rappeler que, par définition, une intention est une disposition d'esprit par laquelle on envisage délibérément un objectif. Il s'agit d'un simple projet, d'un dessein, dont la conception repose sur l'appréciation d'une certaine situation, laquelle peut être évolutive, ce qui peut justifier l'émission de réserves lors de la déclaration d'intention ou la réalisation d'une nouvelle déclaration en cas de changement d'intention. Ainsi, contrairement à ce que suggère le demandeur au recours, ni la déclaration d'intention, ni la déclaration de changement d'intention, ne sont subordonnées à une prise de décision préalable, effectivement arrêtée par l'investisseur. Admettre le contraire reviendrait à retarder indûment la déclaration d'intention ou de changement d'intention, au plus près de la réalisation effective d'un projet, contrairement à l'objectif poursuivi par l'obligation déclarative, consistant à assurer en temps utile une bonne information du marché et à faciliter en conséquence la prévisibilité de l'issue de l'offre. Il s'ensuit que, comme l'a indiqué à juste titre la Commission des sanctions dans sa décision (paragraphe 31), la déclaration de changement d'intention prévue par l'article 231-47 du RGAMF doit intervenir « sans délai », c'est-à-dire avant même la mise en oeuvre d'une décision d'apporter ou de ne pas apporter les titres concernés à l'offre, en réalisant des opérations sur le marché.
83.Il s'ensuit qu'en l'espèce, ayant atteint, dès le 2 juin 2017 (à la date d'ouverture de la période de pré-offre) un niveau de participation au capital de Baccarat supérieur au seuil de 5 % fixé par l'article 231-27 du RGAMF, Consellior était tenue, en application de ce texte, une fois l'offre déposée, de déclarer immédiatement à l'AMF si elle avait l'intention d'apporter ou non ses titres à l'offre, quelle que soit leur date d'acquisition, puis en cas de changement d'intention, de déclarer ce changement sans délai à l'AMF.
84.Or, il ressort du dossier que Consellior a effectivement changé d'intention par rapport à l'offre.
85.En effet, dans sa déclaration publiée le 21 novembre 2018, une fois l'offre déposée (le 13 novembre de la même année), elle a indiqué à l'AMF que « dans l'attente du [visa] de l'AMF [sur la conformité de l'offre], (?) [elle] n'a pas encore pris de décisions sur l'apport de ses titres à l'offre et fera connaître sa décision alors ».
86.Or, une fois que l'AMF a décidé de déclarer le projet d'offre conforme (le 11 décembre 2018), Consellior a (le 14 décembre 2018) formé, devant la Cour, un recours en annulation contre cette décision ainsi qu'une requête de sursis à exécution de celle-ci. Par là-même, conformément au calendrier qu'elle avait annoncé dans sa déclaration précitée (du 21 novembre 2018), elle a manifesté publiquement son opposition à l'offre, révélant ainsi son intention de n'apporter aucun de ses titres à ladite offre.
87.Puis, une fois sa requête de sursis à exécution rejetée (le 3 janvier 2019), elle a, le jour même, soit pendant la période d'offre (ouverte le 13 décembre 2018 et clôturée le 11 janvier 2019), cédé une partie de ses titres sur le marché.
88.Or, le projet de note d'information de l'initiateur tel que diffusé et visé par l'AMF, précise, en son point 2.5, intitulé « Procédures d'apport à l'offre », que « l'offre sera réalisée par achats sur le marché d'Euronext [Localité 4] conformément à l'article 233-2 du [RGAMF] » (c'est-à-dire conformément aux règles applicables aux OPAS) et que « la Société générale, prestataire de services d'investissement habilité en tant que membre du marché acheteur, se portera acquéreur, pour le compte de l'initiateur, de toutes les actions de la société [Baccarat] qui seront apportées à l'offre » (annexe 1.2 du rapport d'enquête).
89.Dès lors, Consellior ne pouvait ignorer que la cession sur le marché de titres Baccarat, pendant la période d'offre, revenait à se placer dans la perspective d'un apport à l'offre. Ainsi, lorsqu'elle a décidé de céder une partie de ses titres sur le marché (dès le 3 janvier 2019), elle s'est inévitablement placée dans cette perspective. Il s'ensuit qu'elle avait, au préalable, nécessairement changé d'intention par rapport à l'offre, en s'écartant de sa ligne d'opposition initiale.
90.La circonstance que les procédures prévues par la note d'information précitée pour apporter à l'offre n'aient pas été respectées ou que l'acquisition de ses titres aurait pu être emportée par un tiers mieux disant ne sont pas de nature à remettre en cause cette analyse. De telles circonstances, sur la formalisation de l'acte de cession ou l'issue éventuelle de l'opération de cession, sont impropres à anéantir l'existence d'un changement d'intention, laquelle est préalable et suffisamment caractérisée.
91.Consellior aurait donc dû, conformément à l'article 231-47 du RGAMF, en informer sans délai l'AMF, quelle que soit la date d'acquisition de ses titres Baccarat.
92.Or, elle a attendu le vendredi 11 janvier 2019 (à 17 h 46) pour le faire, une fois l'offre clôturée (à 17h30).
93.Pourtant, elle avait été alertée par cette autorité, dès le mercredi 9 janvier, en réponse au projet de communiqué qu'elle lui avait adressé le même jour ? mentionnant son intention « d'apporter ses titres à l'offre pour éviter un risque de liquidité » ? de la nécessité, vu la clôture prochaine de l'offre, de lui transmettre « très rapidement » une déclaration de changement d'intention en ce sens, dont une proposition de formulation lui avait même été adressée, ce qui aurait dû l'inciter à se conformer au plus vite à son obligation déclarative, afin que le marché en soit immédiatement informé.
94.À cet égard, le demandeur au recours ne saurait exciper de ce que l'AMF ne lui avait pas demandé, en application de l'article 231-47 in fine du RGAMF, d'apporter toute précision ou complément éventuellement nécessaire lors de la publication de sa déclaration du 21 novembre 2018, pour se soustraire à son obligation de déclarer sans délai son changement d'intention d'apporter ou non ses titres à l'offre, cette obligation s'imposant à elle, sans être subordonnée à une quelconque démarche de l'AMF.
95.Il résulte de l'ensemble de ces développements que c'est à juste titre que la Commission des sanctions a retenu à l'encontre de Consellior deux manquements à ses obligations déclaratives, à savoir :
– d'une part, un manquement de déclaration tardive de la cession, réalisée le 3 janvier 2019, d'une partie de ses titres, en méconnaissance des dispositions de l'article 231-46 du RGAMF, ce qui n'est pas contesté ;
– d'autre part, un manquement de déclaration tardive de son changement d'intention d'apporter ou non une partie de ses titres à l'offre, en méconnaissance des dispositions de l'article 231-47 du RGAMF, ce qui est vainement contesté.
96.Ces deux manquements étant fondés et justifiant, sur le fondement des articles L.621-14 et L.621-15 du code monétaire et financier, le prononcé d'une sanction pécuniaire, il convient de rejeter le moyen d'annulation de la décision de la Commission des sanctions, pris du caractère disproportionné de ladite sanction.
97.Il convient également de rejeter le moyen de réformation de cette décision, pris, lui aussi, du caractère disproportionné de ladite sanction.
98.En effet, c'est à juste titre que, tenant compte, premièrement, de la gravité respective de chacun des deux manquements qu'elle a exactement appréciée, au regard notamment de la qualité du mis en cause s'agissant de l'actionnaire minoritaire le plus important dès la période de pré-offre et de l'alerte qui lui avait été adressée pour déclarer très rapidement son changement d'intention, deuxièmement, de l'absence de préjudice établi à l'égard des investisseurs et, troisièmement, des capacités financières dont elle disposait le concernant, que la Commission des sanctions a fixé le montant de la sanction pécuniaire à quatre-vingt mille euros.
99.À cet égard, le demandeur au recours ne peut utilement se prévaloir du montant des sanctions prononcées dans le cadre d'autres affaires, en procédant à des comparaisons, pour soutenir que la sanction prononcée à son encontre est disproportionnée, dès lors que le montant des sanctions est défini au cas par cas, selon les circonstances et situations propres à chaque affaire, en suivant la méthode d'individualisation retenue par l'article L.621-15, sous III ter, du code monétaire et financier.
IV. SUR L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE ET SUR LES DÉPENS
100.Le demandeur succombant en son recours, il ne peut prétendre à l'allocation d'une indemnité au titre de ses frais irrépétibles et supportera les dépens de l'instance.
PAR CES MOTIFS
DÉCLARE recevables les pièces no 3 à 15 produites par la société Consellior, devenue la société Candel & Partners, en annexe à l'exposé des moyens du recours qu'elle a formé ;
DÉCLARE en partie irrecevable son recours, en ce qu'il est dirigé contre la décision de la commission spécialisée no 1 du collège de l'Autorité des marchés financiers, du 30 juin 2020, de saisir immédiatement la commission des sanctions de ladite autorité ;
REJETTE son recours en ce qu'il est formé contre la décision no 11 de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers du 17 juin 2021 ;
REJETTE sa demande en paiement au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
LA CONDAMNE aux dépens.
LA GREFFIÈRE,
Véronique COUVETLE PRÉSIDENT,
Gildas BARBIER
|
CAPP/JURITEXT000046991481.xml | Ordonnance n° 37
-------------------------
07 Juillet 2022
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No RG 22/01050 -
No Portalis DBV5-V-B7G-GQ4C
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S.A.R.L. DESCARTES AVOCATS, représentée par Maître [V] [E]
S.A.R.L. FIMJ, prise en la personne de son gérant, Monsieur [C] [T]
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Ordonnance notifiée aux parties le :R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
ORDONNANCE DU PREMIER PRESIDENT
Contestation d'honoraires d'avocat
Rendue le sept juillet deux mille vingt deux
Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le vingt trois juin deux mille vingt deux par Madame Estelle LAFOND, conseillère, agissant sur délégation de la première présidente de la cour d'appel de POITIERS, conformément à son ordonnance en date du 13 décembre 2021, assistée de Madame Inès BELLIN, greffier, lors des débats.
S.A.R.L. DESCARTES AVOCATS, représentée par Maître [V] [E]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Comparant en personne
DEMANDEUR en contestation d'honoraires,
D'UNE PART,
S.A.R.L. FIMJ, prise en la personne de son gérant, Monsieur [C] [T]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Jérôme CREPIN de la SCP CREPIN-FONTAINE, avocat au barreau d'AMIENS
DEFENDEUR en contestation d'honoraires,
D'AUTRE PART,
ORDONNANCE :
- Contradictoire
- Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- Signée par Madame Estelle LAFOND, conseillère agissant sur délégation de la première présidente et par Madame Inès BELLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La SARL Descartes Avocats a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Poitiers d'une demande de taxation d'un honoraire de résultat dû par la SARL FIMJ à hauteur de 221 920,66 euros toutes taxes comprises.
Par décision du 31 mars 2022, Monsieur le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers a débouté la SARL Descartes Avocats de sa demande de taxation.
La décision du bâtonnier a été notifiée à la SARL Descartes Avocats le 11 avril 2022, laquelle a formé un recours entre les mains de la première présidente de la cour d'appel de Poitiers le 22 avril 2022.
L'affaire a été appelée à l'audience du 23 juin 2022.
La SARL Descartes Avocats qui a comparu en la personne de Maître [V] [E], expose avoir été saisie par Monsieur [C] [T] en sa qualité de gérant de la SARL FIMJ dans le cadre d'un litige l'opposant à la société Microsoft Corp.
Elle fait valoir que contrairement à ce qu'a retenu le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers, l'absence de convention d'honoraires n'empêche pas la fixation d'un honoraire complémentaire de résultat dès lors que les honoraires réclamés ont été fixés en accord avec le client.
La SARL Descartes Avocats soutient avoir exposé oralement à Monsieur [C] [T] les conditions financières de son intervention, notamment sur l'existence d'un honoraire de résultat et lui avoir adressé plusieurs conventions d'honoraires. Elle soutient que si la SARL FIMJ n'a pas signé la convention d'honoraires, elle n'a jamais émis le moindre désaccord sur les modalités financières de son intervention, de sorte qu'elle les aurait acceptées. Elle rappelle que la formation d'un contrat ne nécessite pas d'écrit.
La SARL Descartes Avocats rappelle être intervenue dans de multiple dossiers menés par le siège américain de la société Microsoft corp contre la société FIMJ et que cette dernière avait déjà connaissance des conditions financières de son intervention qu'elle avait acceptées.
La SARL Descartes Avocats fait valoir que ses arguments ont permis à la SARL FIMJ de réaliser une économie de 3 082 231,22 euros et que l'honoraire de résultat réclamé est fixé selon les termes de la convention d'honoraires.
Elle indique que la décision rendue par la cour d'appel de Douai est devenue définitive, de sorte que rien ne s'opposerait à la demande de condamnation formulée à l'encontre de la SARL FIMJ.
Elle fait valoir que le dossier dont elle a été saisie comprenait notamment l'analyse de 41 330 pages de pièces de la partie adverse.
La SARL Descartes Avocats sollicite :
- la confirmation de la décision en ce qu'elle a retenu que sa demande n'était pas prescrite ;
- la réformation de la décision entreprise en ce qu'elle l'a déboutée de sa demande de taxation ;
- la condamnation de la SARL FIMJ à lui payer la somme de 221 920,66 euros toutes taxes comprises ;
- le débouté des demandes, fins et prétentions de la SARL FIMJ ;
- la condamnation de la SARL FIMJ à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La SARL FIMJ, représentée à l'audience, fait valoir que la fixation d'un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ou du service rendu ne peut intervenir que par une convention entre l'avocat et son client.
Elle indique ne pas avoir signé la convention d'honoraires qui lui a été présentée, laquelle lui serait inopposable.
La société FIMJ soutient qu'elle n'entendait pas s'engager dans cet honoraire de résultat et fait valoir que le fait qu'elle ait payé l'honoraire de base ne démontre pas qu'elle ait accepté un honoraire complémentaire.
La SARL FIMJ sollicite la confirmation de l'ordonnance du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers du 31 mars 2022 et la condamnation de la SARL Descartes Avocats à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur la recevabilité :
Selon l'article 176 du décret du 27 novembre 1991, la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d'appel qui est saisi par l'avocat ou la partie par lettre recommandée avec accusé de réception. Le délai de recours est d'un mois à compter de la notification de la décision.
En l'espèce, le recours de la SARL Descartes Avocats est recevable et régulier en la forme.
Sur le fond :
Les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires des avocats sont réglées en recourant à la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret no91-1197 du 27 novembre 1991.
Il résulte de l'article 10 de la loi no71-1130 du 31 décembre 1971, modifié par la loi du 10 juillet 1991 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, que sauf en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat conclut par écrit avec son client une convention d'honoraires, qui précise notamment le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.
A défaut de convention, les honoraires sont fixés au regard de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci, conformément au quatrième alinéa de l'article 10 de la loi no71-1130 du 31 décembre 1971.
Toute fixation d'honoraires qui ne le serait qu'en fonction du résultat judiciaire est interdite. Est licite la convention qui, outre la rémunération des prestations effectuées, prévoit la fixation d'un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ou du service rendu.
Il sera rappelé qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge de l'honoraire de se prononcer sur l'éventuelle responsabilité civile de l'avocat à l'égard de son client, liée au manquement à son devoir de conseil et d'information, ou à une exécution défectueuse de sa prestation. De tels griefs relèvent de la responsabilité professionnelle de l'avocat et non de l'évaluation des honoraires et ils ne peuvent pas non plus justifier une réduction de sa rémunération.
Sur la prescription :
Devant le bâtonnier, la SARL FIMJ avait soulevé la prescription de l'action de la SARL Descartes Avocats.
Le bâtonnier a retenu que le point de départ du délai de prescription de cinq ans prévu à l'article 2224 du code civil commençait à courir à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant de former sa demande, soit en matière d'honoraires de résultat, lorsqu'il a été mis fin à l'instance par un acte ou une décision juridictionnelle définitive, de sorte que la prescription n'est pas acquise.
La SARL Descartes Avocats sollicite la confirmation du jugement sur ce point.
Il convient de constater que la SARL FIMJ ne conteste pas la décision du bâtonnier sur la question de la prescription, de sorte que la décision du bâtonnier sera confirmée en ce qu'elle a retenu que la demande de la SARL Descartes Avocats n'était pas prescrite.
Sur l'honoraire de résultat :
En l'espèce, la SARL Descartes Avocats a été saisie par Monsieur [C] [T] en sa qualité de gérant de la SARL FIMJ dans le cadre d'un litige l'opposant à la société Microsoft Corp.
Aucune convention d'honoraires n'a été régularisée par les parties.
La SARL Descartes Avocats a soumis à la signature de la SARL FIMJ une convention d'honoraires, laquelle prévoyait la rémunération de l'avocat selon un honoraire de base et un honoraire complémentaire de résultat. Cette convention n'a jamais été retournée à la SARL Descartes Avocats.
Il est constant que lorsqu'aucune convention d'honoraires a été signée, un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ne peut être réclamé que si les parties se sont entendues sur son principe et sur son montant.
En l'espèce, le fait que la société FIMJ n'ait pas manifesté son désaccord sur les modalités financières de l'intervention de la SARL Descartes Avocats ne permet pas de considérer qu'elle aurait tacitement accepté le principe de l'honoraire de résultat facturé.
L'attestation de Madame [P] [I], assistante de la SARL Descartes Avocats, par laquelle elle indique que Monsieur [C] [T], gérant de la société FIMJ, aurait expressément accepté l'honoraire de résultat lors d'un rendez-vous téléphonique est inopérante et ne saurait être de nature à établir l'existence d'un accord de la société FIMJ sur le versement d'un honoraire de résultat.
Par conséquent, la SARL Descartes Avocats ne démontrant pas que la SARL FIMJ était d'accord pour s'acquitter d'un honoraire de résultat, un tel honoraire ne saurait lui être réclamé.
La décision du bâtonnier sera donc confirmée.
Sur l'article 700 du code de procédure civile :
Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens en tenant compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.
Succombant à la présente instance, la SARL Descartes Avocats sera condamnée à payer à la SARL FIMJ la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur les dépens :
L'article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
Succombant à la présente instance, la SARL Descartes Avocats en supportera les dépens.
PAR CES MOTIFS :
Nous, Estelle LAFOND, conseillère chargée du secrétariat général de la première présidence, statuant par délégation de la première présidente, par mise à disposition au greffe et par ordonnance contradictoire,
Déclarons le recours de la SARL Descartes Avocats recevable et régulier en la forme ;
Confirmons l'ordonnance du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers en date du 31 mars 2022 ;
En conséquence,
Déboutons la SARL Descartes Avocats de sa demande de taxation ;
Condamnons la SARL Descartes Avocats à payer à la SARL FIMJ une indemnité de 1 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamnons la SARL Descartes Avocats aux dépens.
Le greffier, La déléguée de la première présidente,
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CAPP/JURITEXT000046991495.xml | AFFAIRE : N RG No RG 21/00171 - No Portalis DBWB-V-B7F-FP5P
Code Aff. : ARRÊT N AL
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT DENIS en date du 17 Décembre 2020, rg no 18/000363
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 JUILLET 2022
APPELANTE :
S.A.R.L. KRUGELL
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Marie NICOLAS de la SELARL ALQUIER & ASSOCIÉS, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [T] [K] [G]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Mme [S] [B], défenseur syndical
Clôture : 7 mars 2022
DÉBATS : En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 avril 2022 en audience publique, devant Alain LACOUR, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Monique LEBRUN, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 05 JUILLET 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Alain LACOUR
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
Greffier du prononcé par mise à disposition au greffe : Nadia HANAFI
ARRÊT : mis à disposition des parties le 05 JUILLET 2022
Exposé du litige :
M. [G] a été embauché par la SARL Krugell (la société) en qualité de poseur selon contrat à durée indéterminée de chantier en date du 29 août 2011. Ce contrat a été prolongé et est devenu à durée indéterminée. M. [G] a été licencié pour faute grave le 15 janvier 2018.
Saisi par M. [G], qui contestait son licenciement et sollicitait l'indemnisation des différents chefs de préjudice dont il se plaignait, le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion, par jugement rendu le 17 décembre 2020, a notamment dit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, a condamné la société à payer à M. [G] 16 610,44 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, 4 745,84 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 474,58 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, 4076,34 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, 500 euros à titre de dommages-intérêts pour absence d'institution représentative du personnel et 500 euros pour frais de procédure. Le remboursement à Pôle emploi des indemnités de chômage servies à M. [G], dans la limite de six mois, a en outre été ordonné.
Appel de cette décision a été interjeté par la société le 10 février 2021.
Vu les conclusions notifiées par la société le 3 décembre 2021 ;
Vu les conclusions notifiées par M. [G] le 8 septembre 2021 ;
Pour plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées et aux développements infra.
Sur le licenciement :
Vu les articles L. 1232-1 du code du travail, 542, 562 et 901 du code de procédure civile ;
Attendu que l'acte par lequel la société a interjeté appel est rédigé comme suit : « Objet/portée de l'appel : l'appel porte sur les sommes objet de la décision de condamnation à savoir :-16 610. 44 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, - 4745. 84 euros brut à titre d'indemnité de préavis, - 474. 58 euros brut à titre d'indemnité de congés payés sur préavis, - 4076. 34 euros net à titre d'indemnité de licenciement, - 500. 00 euros net à titre de dommages et intérêts absence d'institution représentative du personnel - 500. 00 euros net au titre de l'article 700 du code de procédure civile. - Ordonne à la SARL Krugell en la personne de son représentant légal de rembourser la direction générale de Pôle emploi les indemnités de chômage dans la limite de six mois conformément à l'article L. 1235-4 du code du travail L'appelant estime que le licenciement du salarié était pleinement légitime » ; qu'il en résulte que la société n'a pas interjeté appel du jugement en ce qu'il a « dit que le licenciement pour faute grave intervenu le 15 janvier 2018 est sans cause réelle et sérieuse » ;
Attendu que M. [G] conclut à la confirmation du jugement entrepris ;
Attendu en conséquence que le jugement est définitif en ce qu'il a dit que le licenciement de M. [G] était dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'il n'y a donc pas lieu de statuer de ce chef ;
Sur l'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse :
Vu l'article L. 1235-3 du code du travail ;
Attendu que M. [G] avait six ans et quatre mois d'ancienneté lors de son licenciement et qu'il percevait un salaire brut mensuel de 2 372, 92 euros ;
Attendu qu'il sera fait une juste réparation du préjudice ainsi subi par M. [G] la condamnation de la société à lui payer la somme de 16 610,44 euros ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;
Sur l'indemnité compensatrice de préavis :
Vu les articles L. 1234-1 et R. 1234-2 du code du travail ;
Attendu que M. [G] avait six ans et quatre mois d'ancienneté lors de son licenciement ; qu'il peut par conséquent prétendre à une indemnité compensatrice de préavis correspondant à deux mois de salaire, soit la somme de 4 745,84 euros, outre 474, 58 euros au titre des congés payés afférents ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;
Sur l'indemnité légale de licenciement :
Vu l'article R. 1234-2 du code du travail ;
Attendu que c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont condamné la société à payer à M. [G] la somme de 4 076, 34 euros de ce chef ; que le jugement sera là encore confirmé ;
Sur les dommages-intérêt pour absence d'institution représentative du personnel :
Vu les articles 1142 du code civil et L. 2314-9 du code du travail ;
Attendu que la société justifie par sa pièce no 11, 7 et 9 avoir convoqué les syndicats CFDT, CFE CGC, CFTC, FO et CGTR à négocier un protocole préélectoral concernant l'organisation des élections de délégués du personnel, qu'aucun syndicat n'a répondu à cette invitation en sorte qu'un procès-verbal de carence a été dressé le 15 mars 2016, qui a été notifié à la direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la Réunion par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; que c'est donc à tort que M. [G] soutient que la société n'a jamais organisé d'élection de délégués du personnel ; qu'il sera débouté de sa demande de dommages-intérêts et le jugement infirmé de ce chef ;
Attendu que le jugement n'est pas critiqué pour le surplus de ses dispositions et sera par conséquent confirmé ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement,
Constate que la cour n'est pas saisie du licenciement ;
Constate que le jugement est définitif sur ce point ;
Le confirme pour le surplus de ses dispositions, sauf en ce qu'il a condamné la SARL Krugell à payer à M. [G] la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts pour absence d'institution représentative du personnel ;
Statuant à nouveau de ce chef,
Déboute M. [G] de cette demande ;
Y ajoutant,
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette la demande de la SARL Krugell;
Condamne la SARL Krugell aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par M. Lacour, président, et par Mme Hanafi, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,
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Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Saint Denis en date du 16 Février 2021, rg no F19/00410
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILET 2022
APPELANTE :
Madame [K] [D]
[Adresse 8]
[Localité 2]
Représentant : Me Emilie MAIGNAN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
S.A.R.L. SOPHAR REUNION
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentant : Me Jean Patrice SELLY de la SELARL SELLY-MOLIERE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Clôture : 7 février 2022
DÉBATS : En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Mars 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Nadia HANAFI, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 9 juin 2022, mise à disposition prorogée au 13 juillet 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 juillet 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Madame [K] [D] a été embauchée par la S.A.R.L. Sophar Réunion en contrat à durée déterminée du 15 janvier 2018 au 13 juillet 2018 comme visiteuse médicale au statut cadre.
2. Par avenant du 25 juin 2018, le contrat de travail de Madame [K] [D] a été transformé en contrat à durée indéterminée.
3. Par mail du 2 septembre 2018, Madame [K] [D] s'est plainte auprès de son employeur d'avoir une inégalité de traitement par rapport à certains de ses collègues.
4. N'ayant pas obtenu la régularisation espérée, Madame [K] [D] a démissionné le 6 mars 2019 par lettre remise en main propre contre décharge.
5. Par courrier recommandé du 18 mars 2019, Madame [K] [D] a mis en demeure la S.A.R.L. Sophar Réunion de régulariser les manquements et discriminations dont elle dit avoir fait l'objet.
6. Le 19 mars 2019, la S.A.R.L. Sophar Réunion a informé Madame [K] [D] qu'elle n'entendait pas donner une suite favorable à sa demande de dispense partielle de préavis.
7. Le 17 septembre 2019, Madame [K] [D] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Denis afin de requalifier son contrat à durée déterminée initial en contrat à durée indéterminée, de requalifier sa démission en prise d'acte et de solliciter la condamnation de la S.A.R.L. Sophar Réunion à lui verser diverses sommes.
8. Par jugement du 16 février 2021, le conseil a :
- dit et jugé que le contrat à durée déterminée initial de Madame [K] [D] était justifié par un accroissement d'activité,
- dit et jugé que le contrat à durée déterminée ne doit pas être requalifié en contrat à durée indéterminée,
- dit et jugé que la démission de Madame [K] [D] est explicite et non équivoque,
- "subsidiairement",
- dit et jugé que la Madame [K] [D] n'a pas manqué aux obligations lui incombant,
- débouté Madame [K] [D] de l'intégralité de ses demandes indemnitaires formulées à l'encontre de la S.A.R.L. Sophar Réunion,
- débouté la S.A.R.L. Sophar Réunion de sa demande de 10.000,00 € à titre de dommages et intérêts,
- condamné Madame [K] [D] à verser à la société S.A.R.L. Sophar Réunion la somme de 1.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Madame [K] [D] aux entiers dépens.
9. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 12 mars 2021, Madame [K] [D] a interjeté appel de cette décision.
10. Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 11 juin 2021, Madame [K] [D] demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la S.A.R.L. Sophar Réunion de sa demande tendant à sa condamnation au versement de la somme de 10.000,00 € à titre de dommages et intérêts,
- infirmer le jugement pour le surplus,
- statuant à nouveau,
- la juger recevable et fondée en son action,
- constater que la S.A.R.L. Sophar Réunion a manqué aux obligations lui
incombant,
- juger que sa lettre de démission doit en réalité être requalifiée en prise d'acte de la rupture du contrat de travail,
- juger qu'il y a lieu de requalifier la prise d'acte de sa rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- juger que le contrat de travail à durée déterminée doit être requalifié en contrat à durée indéterminée,
- en conséquence,
- condamner la S.A.R.L. Sophar Réunion à lui les sommes suivantes :
* 8.000,00 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
* 1.800,00 € à titre d'indemnité de licenciement conventionnelle
* 4.000,00 € à titre d'indemnité de préavis
* 400,00 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés
* 8.000,00 € à titre d'indemnité de requalification en CDI d'un CDD
* 4.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale
* 4.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour retard d'affiliation mutuelle et/ou de prévoyance
* 4.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour (délivrance) tardive de la carte professionnelle
* 10.200,00 € au titre des salaires impayés
* 1.020,00 € au titre des congés payés sur salaires
* 1.500,00 € au titre de la prime Q1 2019
* 973,65 € au titre des RTT du 1er janvier au 5 juin 2019
* 1.547,00 € au titre de l'indemnité d'occupation
* 829,43 € au titre des heures de travail réalisées du 21 décembre 2017 au 11 janvier 2018
* 9.496,61 € au titre des heures supplémentaires non rémunérées
* 10.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour discrimination
* 8.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat
* 1.220,85 € au titre des remboursements professionnels (soit 486,50 € des frais de téléphonie et 734,35 € d'abonnement internet ADSL)
* 24.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé
- débouter la S.A.R.L. Sophar Réunion de l'intégralité de ses demandes et prétentions,
- condamner la S.A.R.L. Sophar Réunion à lui verser la somme de 5.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
11. À l'appui de ses prétentions, Madame [K] [D] fait en effet valoir :
- que son employeur n'a prévu une visite médicale d'embauche que plus d'un an après le début de son contrat de travail et après mise en demeure, finalement annulée pour cause de démission, ce qui a entraîné un retard dans le dépistage de l'affection longue durée dont elle souffre (double hernie cervicale),
- qu'elle n'a pas été affiliée à la mutuelle avant le le 22 mai 2018, l'obligeant à faire l'avance de ses frais de santé voire à différer des actes chirugicaux, ni à la prévoyance de l'entreprise avant le 18 septembre 2018,
- que, du fait du retard pris par la S.A.R.L. Sophar Réunion, elle a été contrainte d'exercer son activité durant près de 10 mois sans aucune carte professionnelle de visite médicale attestant de son niveau de connaissances réglementaires et scientifiques,
- que la S.A.R.L. Sophar Réunion n'a pas respecté son obligation d'assurer l'égalité de rémunération entre les salariées, placées dans une situation identique, ni ses engagements en ce sens, malgré ses diplômes et son expérience,
- qu'elle n'a pas perçu la totalité de la prime du cycle Q1 2019 d'un montant de 3.500,00 € brut,
- qu'elle n'a pas bénéficié de ses droits à RTT du 1er janvier au 5 juin 2019 contrairement aux années précédentes,
- que, dans la mesure où un local professionnel n'a pas été mis à sa disposition, elle peut prétendre à une indemnité d'occupation de son domicile à des fins professionnelles, peu important que son contrat de travail ne l'ait pas prévu,
- que le véhicule mis à sa disposition a entraîné une dégradation de son état de santé physique et mentale,
- que les frais engagés pour les besoins de son activité professionnelle doivent lui être remboursés,
- qu'elle démontre l'existence des heures effectuées à la demande de son employeur et sous sa direction avant son entrée en fonction le 15 janvier 2018, lesquelles n'ont pas été rémunérées,
- qu'elle a effectué 159 heures supplémentaires dans le cadre de l'exécution de son CDD du 15 janvier 2018 au 13 juillet 2018 et 112 heures supplémentaires dans le cadre de son CDI du 14 juillet 2018 au 5 juin 2019, la S.A.R.L. Sophar Réunion n'offrant pas une meilleure démonstration que la sienne,
- qu'il s'ensuit qu'elle doit être indemnisée du travail dissimulé pratiqué par l'employeur,
- que le recours à son contrat de travail à durée déterminée initial ne se justifiait pas par l'accroissement de l'activité de la S.A.R.L. Sophar Réunion, indépendamment de la poursuite de la relation contractuelle dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée,
- que l'inégalité de traitement dont elle a été l'objet est suffisamment démontrée, cette discrimination, qui rendait impossible le maintien de la relation de travail, ayant légitimement conduit à la prise d'acte que sous-entendait sa démission, les faits ayant été révélés à l'employeur avant cet événement,
- que la S.A.R.L. Sophar Réunion ne démontre pas en quoi elle aurait manqué à ses obligations de réserve, de discrétion et de loyauté.
12. Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 10 septembre 2021, la S.A.R.L. Sophar Réunion demande à la cour de :
- à titre principal,
- confirmer le jugement en ce qu'il a constaté qu'elle n'a pas manqué aux
obligations lui incombant,
- confirmer le jugement en ce qu'il déboute Madame [K] [D] de sa demande de requalification de son contrat de travail en contrat à durée indéterminée,
- confirmer le jugement en ce qu'il déboute Madame [K] [D] de sa demande de requalification de sa démission en prise d'acte,
- en conséquence,
- débouter Madame [K] [D] de l'ensemble de ses demandes indemnitaires formulées à son encontre,
- à titre reconventionnel,
- infirmer le jugement en ce qu'il la déboute de sa demande de dommages et intérêts pour manquement à ses obligations de loyauté, discrétion et réserve,
- en conséquence,
- condamner Madame [K] [D] à lui verser la somme de 10.000,00 € à titre de dommages et intérêts,
- condamner Madame [K] [D] à lui payer la somme de 5.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
13. À l'appui de ses prétentions, la S.A.R.L. Sophar Réunion fait en effet valoir :
- que le défaut de visite médicale à l'embauche ne lui est pas imputable, Madame [K] [D] étant par ailleurs bien en peine d'établir un quelconque préjudice,
- que Madame [K] [D] était affiliée à la mutuelle AG2R comme l'ensemble des salariés de la société et a été remboursée de manière rétroactive de tous les frais de santé qu'elle avait pu avancer pendant la période d'affiliation à la mutuelle, comme pour toutes les sommes qui lui étaient dues au titre de sa prévoyance, le retard dans la prise en charge ne lui étant pas imputable,
- que la carte professionnelle de la salariée lui a été envoyée à une adresse erronée correspondant à celle indiquée au contrat de travail, aucun préjudice dans l'exercice de son travail n'étant démontré quant à cette carence,
- que les différences de rémunération alléguées sont justifiées par le diplôme, l'expérience ou le secteur géographique,
- que ni le contrat de travail initial, ni son avenant n'évoquent l'octroi d"une quelconque prime,
- que Madame [K] [D], dont le contrat de travail prévoit un travail hebdomadaire de 35 heures, n'était pas éligible aux RTT,
- que la salariée ne fait pas la démonstration selon laquelle elle était tenue de travailler à son domicile, aucune obligation ne lui ayant été imposée à cet égard,
- que Madame [K] [D] n'était pas propriétaire de son véhicule, ce qui ne lui permettait pas de facturer des indemnités kilométriques, de sorte qu'elle n'a pas eu d'autre choix que d'utiliser le véhicule de fonction mis à sa disposition, sa demande de bénéficier d'un véhicule à boîte automatique n'étant pas fondée sur des considérations de santé,
- que la demande de remboursement de frais professionnels est infondée,
- que Madame [K] [D] n'a pas droit à une rémunération au titre de sa participation volontaire avant le début de son contrat de travail,
- qu'elle n'a jamais demandé à sa salariée d'effectuer des heures supplémentaires, Madame [K] [D] ayant usé de la liberté d'organisation que lui procurait son contrat de travail de visiteuse médicale, aucun élément intentionnel ne venant confirmer le travail dissimulé allégué,
- que la salariée a été recrutée dans le cadre d'un accroissement temporaire d'activité (contrat conclu en 2017 pour une année avec un de ses clients),
- que Madame [K] [D] n'a subi aucune discrimination,
- que la démission de la salariée est dépourvue d'équivoque, Madame [K] [D] ayant immédiatement retrouvé du travail,
- qu'elle rapporte la preuve d'agissements déloyaux de sa salariée, entrepris dans le seul but de lui nuire.
14. L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 février 2022.
15. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la requalification du contrat de travail à durée déterminée initial en contrat de travail à durée indéterminée
16. L'article L. 1245-1 du code du travail, en vigueur depuis le 22 décembre 2017, tel que modifié par l'ordonnance no 2017-1718 du 20 décembre 2017, répute "à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des dispositions des articles L. 1242-1 à L. 1242-4, L. 1242-6, L. 1242-7, L. 1242-8-1, L. 1242-12, alinéa premier, L. 1243-11, alinéa premier, L. 1243-13-1, L. 1244-3-1 et L. 1244-4-1, et des stipulations des conventions ou accords de branche conclus en application des articles L. 1242-8, L. 1243-13, L. 1244-3 et L. 1244-4.
La méconnaissance de l'obligation de transmission du contrat de mission au salarié dans le délai fixé par l'article L. 1242-13 ne saurait, à elle seule, entraîner la requalification en contrat à durée indéterminée. Elle ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité, à la charge de l'employeur, qui ne peut être supérieure à un mois de salaire".
17. Aux termes de l'article L. 1242-1, "un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise".
18. La poursuite de la relation contractuelle en contrat de travail à durée indéterminée ne prive pas le salarié du droit de demander la requalification du contrat à durée déterminée initial qu'il estime irrégulier, le passage du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée n'ayant pas pour effet de purger le contrat initial de tout vice.
19. En l'espèce, l'article 1er du contrat de travail à durée déterminée du 15 janvier 2018 mentionne qu' "il est fait recours au contrat de travail à durée déterminée entre le salarié et la société en raison de la nature temporaire de l'accroissement des activités de la société en matière de promotion médicale".
20. La S.A.R.L. Sophar Réunion explique que "ce recrutement en contrat de travail à durée déterminée s'est inscrit dans le cadre d'un contrat conclu en mars 2017 (avec) l'un de ses laboratoires client, le laboratoire Bristol Myers Squibb, pour une durée d'une seule année" et "qu'elle n'avait aucune visibilité quant au renouvellement de ce contrat temporaire (qui) justifiait l'accroissement d'activités".
21. Outre le fait que la S.A.R.L. Sophar Réunion, qui ne produit pas le contrat de mars 2017 dont elle fait état, ne justifie aucunement de l'accroissement exceptionnel de son activité, elle n'a pas démenti Madame [K] [D] lorsque celle-ci évoque le recours à 5 autres contrats de travail à durée déterminée de visiteurs médicaux sur les secteurs de La Réunion et des Antilles durant l'année 2017 et de la transformation de l'un d'eux en contrat de travail à durée indéterminée 5 jours avant la signature de son propre contrat de travail, ce qui signe à la fois une pratique usuelle et le fait que l'employeur était déjà assuré du renouvellement de son contrat avec le laboratoire Bristol Myers Squibb au moment de son embauche.
22. Le recours à un contrat de travail à durée déterminée pour le contrat de travail initial de Madame [K] [D] peut donc être considéré comme abusif, de sorte qu'il sera fait droit à la demande de requalification ainsi qu'à la demande en paiement, mais dans la limite de 3.400,00 € correspondant à un mois de salaire, le jugement étant infirmé de ces chefs.
Sur la rupture du contrat de travail
1 - la demande de requalification de la démission de la salariée en prise
d'acte de rupture aux torts exclusifs de l'employeur
23. L'article L. 1231-1 du code du travail dispose en son 1er alinéa que "le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié, ou d'un commun accord, dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre".
24. La démission, qui doit être librement consentie par le salarié, ne peut que résulter d'une volonté propre et non équivoque de rompre le contrat de travail. Ainsi, si la lettre de démission ne contient aucune réserve et que le salarié ne justifie d'aucun litige antérieur ou contemporain à cette lettre, la démission n'est pas équivoque et ne peut donc pas être remise en cause.
25. En l'espèce, Madame [K] [D] considère que le non-respect des obligations légales de son ancien employeur est constitutif de harcèlement moral et que ces agissements fautifs ont rendu impossible la poursuite du contrat de travail.
26. La salariée a démissionné par un courrier remis en main propre à son supérieur hiérarchique le 6 mars 2019 qui est ainsi rédigé :
"Monsieur,
Je soussignée [K] [D], ai l'honneur de vous présenter ma démission du poste de Visiteur Médical mission BMS, que j'occupe depuis le 15 janvier 2018 au sein de votre société, à compter de la date de ce courrier.
J'ai bien noté que les termes de mon contrat de travail prévoient un préavis d'une durée de 3 mois.
Cependant, et par dérogation, je sollicite une dispense partielle de ce préavis visant à le ramener à une durée de 25 jours. Dans cette hypothèse, mon contrat de travail expirerait ie 31 mars 2019.
À la date de mon départ, je vous demanderai de bien vouloir me transmettre un reçu pour solde de tout compte, un certificat de travail ainsi qu'une attestation Pôle Emploi.
Je vous prie de recevoir, Monsieur, l'expression de mes salutations les plus distinguées".
27. Ce courrier ne comporte aucun grief à l'encontre de son employeur pouvant expliquer son choix. Bien plus, elle y sollicite une réduction de la durée de son préavis à 25 jours au lieu des trois mois prévus par son contrat de travail, ce que la S.A.R.L. Sophar Réunion a refusé par lettre du 19 mars 2019 en lui indiquant que son contrat de travail prendrait fin le 5 juin 2019.
28. Par ailleurs, il ressort du profil Linkedin de Madame [K] [D] qu'elle a débuté son nouvel emploi en juin 2019, soit à l'issue de son préavis, en qualité de déléguée hospitalière, division biosimilaires, chez Fresenius Kabi France, dans la région [Localité 5], [Localité 6] et [Localité 7].
29. Toutefois, le courrier de démission peut être jugé équivoque dès lors que les premiers reproches faits à l'employeur sont concentrés dans un courrier électronique du 2 septembre 2018. Madame [K] [D] y fait part de 18 mécontentements, dont certains sans rapport direct avec le présent litige.
30. S'il est certain que Madame [K] [D] n'a pas supporté les divers dysfonctionnements imputés à son employeur, les manquements valablement reprochés à la S.A.R.L. Sophar Réunion, tels qu'ils seront vus plus bas, n'étaient pas de nature à rendre intolérable le maintien de la relation de travail.
31. La démission peut être la conséquence de désaccords profonds entre l'employeur et le salarié ou l'expression d'une opportunité, pour ce dernier, de rebondir dans une autre entreprise, sans qu'il y ait lieu à requalification en prise d'acte lorsque, comme en l'espèce, aucune faute de l'employeur ne rendait intolérable le maintien de la relation de travail.
2 - l'indemnisation des préjudices subis :
32. Compte tenu de ce qui vient d'être dit, Madame [K] [D] n'a droit à aucune des indemnités revendiquées.
33. Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Madame [K] [D] de ces chefs.
Sur l'absence de visite médicale d'embauche
34. Aux termes de l'article L. 4624-1 du code du travail, "tout travailleur bénéficie, au titre de la surveillance de l'état de santé des travailleurs prévue à l'article L. 4622-2, d'un suivi individuel de son état de santé assuré par le médecin du travail et, sous l'autorité de celui-ci, par le collaborateur médecin mentionné à l'article L. 4623-1, l'interne en médecine du travail et l'infirmier.
Ce suivi comprend une visite d'information et de prévention effectuée après l'embauche par l'un des professionnels de santé mentionnés au premier alinéa du présent article. Cette visite donne lieu à la délivrance d'une attestation".
35. L'employeur n'est donc plus tenu de faire procéder à une visite médicale d'embauche mais à une visite d'information et de prévention, le salarié ne pouvant obtenir des dommages et intérêts qu'à la condition de prouver que le manquement de l'employeur lui a causé un préjudice.
36. La visite individuelle d'information et de prévention doit notamment permettre :
- d'interroger le salarié sur son état de santé
- de l'informer sur les risques éventuels auxquels l'expose son poste de travail
- de le sensibiliser sur les moyens de prévention à mettre en oeuvre
- de l'informer sur les modalités selon lesquelles sera assuré le suivi de son état de santé par le service de santé au travail et sur la possibilité dont il dispose, à tout moment, de bénéficier d'une visite à sa demande avec le médecin du travail.
37. En l'espèce, Madame [K] [D] affirme que ce n'est qu'après avoir mis en demeure la S.A.R.L. Sophar Réunion d'avoir à procéder à une visite médicale par courrier du 18 mars 2019 que l'employeur a contacté Intermétra, et non dès son embauche, intervenue le 15 janvier 2018.
38. Il convient d'observer que cette mise en demeure est postérieure à sa démission du 6 mars 2019. Elle n'y demande donc plus à l'employeur de s'exécuter mais égraine divers reproches, dont l'absence de visite médicale pourtant prévue à l'article 3 alinéa 1er de son contrat de travail initial du 15 janvier 2018, l'aptitude à l'exercice des missions confiées étant libellée sous forme de clause suspensive.
39. Par ailleurs, la S.A.R.L. Sophar Réunion produit l'accusé de réception de la déclaration préalable à l'embauche de Madame [K] [D] reçue par l'Urssaf le 9 janvier 2018, soit six jours avant son embauche, laquelle déclaration a entraîné l'enregistrement de la formalité relative à la médecine du travail. Elle verse également aux débats le formulaire Intermétra représentatif de la liste du personnel déclaré pour 2018 , dans laquelle figure le nom de l'appelante.
40. Interpellée par Madame [K] [D], la responsable administrative et réseau de la S.A.R.L. Sophar Réunion lui a répondu dans un mail du 4 avril 2019 que "l'organisme avait été sollicité depuis la date de (son) embauche, la cotisation (la) concernant avait été réglée et (elle) était bien inscrite sur leur listing en tant que nouvel entrant", même si, "indépendamment de (leur) volonté, (elle) n'a pas été convoquée". En réponse, la salariée a confirmé qu'Intermetra avait bien été sollicitée par la S.A.R.L. Sophar Réunion à son embauche mais que la convocation adressée était restée sans suite, l'employeur indiquant de son côté n'avoir jamais reçu de convocation pour sa salariée.
41. La cour constate que, malgré la démission de Madame [K] [D], la responsable administrative et réseau est intervenue auprès d'Intermetra pour obtenir un rendez-vous le 11 avril 2019.
42. Non seulement la faute de l'employeur n'est pas prouvée dans cet enchaînement de faits puisque, d'une part, la "perte" de la convocation de Madame [K] [D] n'est pas établie et, d'autre part, la S.A.R.L. Sophar Réunion a réagi à la première interpellation, mais encore la salariée ne caractérise pas le préjudice qui en serait résulté pour elle, son contrat de travail ayant été exécuté indépendamment de la condition suspensive évoquée plus haut.
43. Enfin, Madame [K] [D] ne saurait invoquer le dépistage tardif de son affection longue durée en raison des atermoiements de l'employeur tout en considérant que "la dégradation de son état physique et moral est liée aux conditions de travail intolérables et inacceptables subies depuis son embauche". En effet, une visite au moment de l'embauche n'aurait, par hypothèse, pas permis de détecter une affection qui serait censément le fruit d'un processus long lié à l'exercice de son contrat de travail.
44. Si Madame [K] [D] a été reconnue comme souffrant "de douleurs des styloïdes ulnaires" et si, "suite à l'arrêt de l'activité professionnelle les douleurs ont quasiment disparu" aux termes d'un certificat médical du Dr. [R] du 5 août 2019, il n'est pas établi qu'une visite individuelle d'information et de prévention organisée au moment de l'embauche aurait permis d'éviter le développement de la symptomatologie constatée.
45. Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Madame [K] [D] de ce chef.
Sur le retard d'affiliation mutuelle ou prévoyance
46. L'article 10 du contrat de travail prévoit que "le salarié bénéficiera de tous les avantages de retraite, mutuelle et de prévoyance accordés par la société qui (...) sont souscrits auprès des organismes suivants :
- Retraite complémentaire : ARRCO
- Prévoyance : REUNICA
- Mutuelle : AG2R".
47. Madame [K] [D] invoque le fait que l'affiliation à la mutuelle UMS a été effective à compter du 22 mai 2018, soit près de cinq mois après son embauche, l'obligeant à faire l'avance de ses frais de santé, et celle de la prévoyance à compter du 18 septembre 2018, soit près de neuf mois après son embauche.
48. La S.A.R.L. Sophar Réunion produit un mail du 12 mars 2018, soit deux mois après son embauche, adressant à Madame [K] [D] des documents d'affiliation pré-remplis qu'il lui était demandé de compléter. Cette correspondance fait suite à une demande formalisée auprès de la mutuelle par l'employeur le 22 février 2018.
49. Aux termes de ses conclusions, Madame [K] [D] admet n'avoir transmis à la S.A.R.L. Sophar Réunion les documents d'affiliation à la mutuelle et à la prévoyance dûment rectifiés et complétés que par mail et par courrier simple du 20 avril 2018, soit 39 jours après l'envoi des documents pré-remplis.
50. Quoi qu'il en soit, il est justifié par la S.A.R.L. Sophar Réunion d'un appel de cotisations par la mutuelle en juin 2018 et en juin 2019 à partir d'un tableau au sein duquel figure le nom de Madame [K] [D].
51. Outre le fait que le retard pris dans la gestion administrative du dossier d'affiliation de la salariée est largement partagée entre Madame [K] [D], la S.A.R.L. Sophar Réunion et la mutuelle, l'appelante peine à caractériser le préjudice qui en serait résulté puisqu'elle se contente d'affirmer, sans le prouver, qu'elle n'aurait pu bénéficier d'une éventuelle prise en charge d'un arrêt maladie pour ses deux interventions chirurgicales et les 25 séances de radiothérapie et que son chirurgien aurait été contraint de programmer son intervention de manière tardive dans l'attente de son affiliation à la mutuelle, dès lors qu'elle ne pouvait avancer la part complémentaire d'une telle intervention chirurgicale.
52. À cet égard, Madame [K] [D] n'a pas démenti la S.A.R.L. Sophar Réunion lorsqu'elle indique qu'elle a été remboursée, de manière rétroactive, de tous les frais de santé qu'elle avait pu avancer pendant la période d'affiliation à la mutuelle.
53. Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Madame [K] [D] de ce chef.
Sur le retard dans la remise de la carte professionnelle
54. L'article 2 de la charte de d'information par démarchage ou prospection visant à la promotion des médicaments prévoit que "les personnes exerçant une activité d'information par démarchage ou prospection visant à la promotion possèdent une carte professionnelle attribuée par le Leem au travers de l'Association de Gestion de la Visite Médicale. L'attribution de cette carte permet de garantir que le niveau de connaissances réglementaires et scientifiques du salarié répond aux exigences de I'article L. 5122-11 du code de la santé publique et à l'obligation de formation continue".
55. La S.A.R.L. Sophar Réunion explique qu'elle ne permet la délivrance de la carte professionnelle qu'après le suivi de la formation d'intégration sur les sept thèmes réglementaires, dispensée par la société et faisant l'objet d'une évaluation.
56. Elle reconnaît que cette formation a été suivie par Madame [K] [D] le 23 janvier 2018 et indique qu'à l'issue de la formation et de l'évaluation afférente, elle a sollicité auprès du Leem la carte professionnelle de la salariée, laquelle carte aurait été adressée à cette dernière par courrier recommandé avec demande d'avis de réception à deux reprises. Elle produit à cet effet le retour des recommandés, avec la mention d'un avis fait les 8 avril et 20 avril 2019, pour un pli non réclamé à chaque fois.
57. Outre le fait que ces courriers ont été envoyés plus d'un an après la délivrance de l'attestation de formation par la S.A.R.L. Sophar Réunion, il apparaît qu'ils l'ont été au [Adresse 1], qui correspond à la nouvelle adresse de Madame [K] [D] indiquée dans un courrier électronique du 9 janvier 2019. L'intéressée avait toutefois encore changé de domicile puisqu'elle avait notifié à son employeur une nouvelle adresse un mois plus tard qui n'a manifestement pas été prise en compte.
58. Il y a donc eu une faute de la S.A.R.L. Sophar Réunion, qui doit cependant être atténuée par le triple changement d'adresse de Madame [K] [D] en un mois et demi (mails du 21 décembre 2018, du 9 janvier 2019 et du 4 février 2019) et le fait que les envois litigieux ont quand même été faits alors que la salariée était démissionnaire.
59. Madame [K] [D] a certes ainsi été "contrainte d'exercer son activité durant près de 10 mois sans aucune carte professionnelle de visiteur médical attestant son niveau de connaissances réglementaires et scientifiques" mais elle ne justifie pas des inconvénients que cette situation a pu susciter.
60. Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Madame [K] [D] de ce chef.
Sur le rappel de salaires et les congés payés y afférents
61. Aux termes de l'article L. 3221-4 du code du travail, "sont considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse". Toutefois, le principe d'égalité de rémunération ne s'applique que dans la mesure où les salariés sont placés dans une situation identique.
62. En l'espèce, Madame [K] [D] demande le paiement de la somme de 10.200,00 € au titre des salaires impayés correspondant à la différence entre la rémunération qu'elle a perçue et celle qu'elle aurait dû percevoir. Elle s'estime en effet discriminée par rapport à deux autres salariées sans qu'aucun critère objectif ne le justifie.
63. La S.A.R.L. Sophar Réunion reconnaît une différence de rémunération entre Madame [K] [D] (3.400,00 €), Madame [O] [Z] (3.800,00 €) et Madame [E] [B] (4.000,00 €), toutes trois visiteuses médicales.
64. Mais elle justifie la rémunération supérieure de :
- Madame [O] [Z] par une ancienneté supérieure au moment de l'embauche (23 ans et 2 mois contre 19 ans et 7 mois pour Madame [K] [D]), l'intéressée exerçant en outre dans un secteur différent (les Antilles),
- Madame [E] [B] par une formation supérieure (doctorat en pharmacie, master spécialisé de haute école de commerce en management pharmaceutique et des biotechnologie contre une maîtrise de biochimie et un master I en marketing et vente pour Madame [K] [D]).
65. Dans des métiers à forte qualification comme celui de visiteur médical, il n'est pas interdit à l'employeur, pour s'attirer les meilleures compétences, de valoriser les diplômes, sans pour autant que cela dégénère en discrimination salariale. Les critères retenus par la S.A.R.L. Sophar Réunion peuvent être considérés comme objectifs et pertinents.
66. Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Madame [K] [D] de ce chef.
Sur la prime Q1 2019
67. Si le droit du salarié à une prime d'objectifs résulte de son contrat de travail, l'employeur ne peut pas se prévaloir du défaut de détermination des objectifs à réaliser, qui relève exclusivement de son pouvoir de direction, pour échapper au paiement d'un élément de la rémunération convenue.
68. En l'espèce, Madame [K] [D] sollicite le versement de la prime du cycle Q1 2019 d'un montant de 3.500,00 € brut, sur laquelle elle n'aurait reçu que 2.000,00 €, dès lors que les conditions de calcul de la prime objectif au titre de l'exercice QI 2019 auraient été "définies de manière déloyale et opaque".
69. Or, si la lecture de son bulletin de salaire de juin 2018 fait état du versement d'une prime de 2.000,00 € au titre de la "prime BMS Q1 2018", ni le contrat de travail initial de Madame [K] [D] (article 6 relatif à la rémunération), ni son avenant n'évoquent l'octroi d'une quelconque prime et encore moins son montant.
70. Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Madame [K] [D] de ce chef.
Sur les RTT
71. À défaut de disposition du contrat de travail ou d'accord collectif prévoyant une indemnisation, l'absence de prise des jours de repos au titre de la réduction du temps de travail n'ouvre droit à une indemnité que si cette situation est imputable à l'employeur.
72. En l'espèce, Madame [K] [D] s'estime fondée à recevoir la somme de 973,65 € au titre des RTT du 1er janvier au 5 juin 2019, se fondant sur le Guide du collaborateur rédigé par l'employeur lui-même au bénéfice de ses salariés qui prévoit, en son point 3 (page 27) que :
"Pour une présence dans l'entreprise du 1er juin au 31 mai, vous bénéficiez de 5 semaines de congés payés, soit 25 jours ouvrés (du lundi au vendredi inclus) et de 12 jours « équivalents RTT » pour une présence dans l'entreprise de janvier à décembre (salarié à temps plein)".
73. Son contrat de travail prévoit en son article 7 que "le salarié sera réputé avoir accompli 151,67 heures par mois et devra réaliser le nombre de visites aux professionnels de santé nécessaires pour l'accomplissement de sa mission".
74. L'article 12 précise en son 3ème alinéa qu' "en cas d'embauche du salarié par la société sous contrat à durée indéterminée à l'issue du présent contrat à durée déterminée, les jours de congés payés acquis pendant la durée du présent contrat seront reportés et pris au cours du contrat à durée indéterminée en conformité avec les dispositions du code du travail. Dans ce cas, l'indemnité compensatrice de congés payés indiquée au paragraphe précédent ne sera pas versée au salarié à la fin du contrat à durée déterminée".
75. La S.A.R.L. Sophar Réunion ne s'explique pas sur l'opposabilité du Guide du collaborateur qu'elle a elle-même rédigé et remis à Madame [K] [D], lequel, ajouté au contrat de travail, accrédite le droit de la salariée à récupération des journées de RTT non prises.
76. Ce chef du jugement sera donc infirmé et il sera fait droit à sa demande de paiement de la somme de 973,65 € au titre des journées de RTT non prises du 1er janvier au 5 juin 2019.
Sur l'indemnité d'occupation
77. Une indemnité d'occupation est due lorsque le salarié, qui ne dispose pas d'un local professionnel pour exécuter ses tâches administratives qui lui incombent et qui justifie de la nécessité de les effectuer à domicile, est soumis à une véritable sujétion à son domicile personnel, peu important que le contrat de travail de l'intéressé ne la prévoie pas.
78. En l'espèce, Madame [K] [D], estimant avoir démontré qu'aucun local n'était mis à sa disposition par son employeur et qu'elle était contrainte, du fait de la nature de ses fonctions, d'exécuter un certain nombre de tâches administratives à son domicile relatives à ses missions de visiteur médical, sollicite le versement d'une indemnité d'occupation de 91,00 € par jour sur la période du 15 janvier 2018 au 5 juin 2019.
79. Toutefois, Madame [K] [D] ne donne aucun élément sur la partie de sa résidence qu'elle consacrait à son travail ni sur les modalités de cacul de l'indemnité d'occupation revendiquée.
80. Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Madame [K] [D] de ce chef.
Sur le manquement à l'obligation de sécurité de résultat de l'employeur
81. Madame [K] [D] se fonde sur le décret no 2001-1016 du 5 novembre 2001 portant création d'un document relatif à l'évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs pour solliciter des dommages et intérêts en faisant valoir que son employeur a injustement refusé de l'indemniser à partir de l'utilisation de son véhicule de location, muni d'une boîte de vitesses automatique, en la dotant d'un véhicule à boîte mécanique de plus de deux ans qui aurait entraîné "une dégradation de son état de santé physique et mentale" en raison d'une utilisation intensive (2000 km par mois en moyenne).
82. Elle verse aux débats le procès-verbal de livraison de son premier véhicule daté du 15 janvier 2018, soit le jour de la signature de son contrat de travail. Si le kilométrage indiqué est de 77135, rien ne permet de confirmer que ce véhicule aurait eu plus de deux ans.
83. Si Madame [K] [D] ne justifie pas d'un refus opposé par la S.A.R.L. Sophar Réunion sur le principe d'une indemnisation à partir de l'utilisation d'un véhicule de location au motif qu'elle n'en serait pas propriétaire, l'intimée n'a pas contesté cette assertion.
84. La S.A.R.L. Sophar Réunion fonctionnant en leasing pour son parc automobile, Madame [K] [D] a été dotée d'un véhicule neuf dès le 1er octobre 2018.
85. Madame [K] [D] ne justifie pas avoir accompagné ses demandes de véhicule muni d'une boîte automatique d'une restriction à la conduite, d'un certificat médical ou d'un arrêt de travail ayant pour motif des maux de dos ou encore une dégradation de son état de santé physique et mentale.
86. Enfin, par hypothèse, le métier de visiteur médical impose d'importants trajets en voiture, de sorte que la cour ne peut pas mettre en relation le certificat médical du Dr. [R] uniquement avec l'utilisation d'un véhicule à boîte manuelle.
87. Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Madame [K] [D] de ce chef.
Sur le remboursement des frais professionnels
88. Madame [K] [D] indique avoir dû utiliser son téléphone personnel durant les 11 premiers mois de son contrat de travail et ainsi que sa ligne ADSL pendant toute la durée de ce contrat.
89. Il résulte de l'article 1.4 du Guide collaborateur que la S.A.R.L. Sophar Réunion "fournit un smartphone Androïd à chaque collaborateur, ainsi qu'une carte SIM pro. Si le collaborateur souhaite conserver son téléphone, il informera Sophar qu'il n'en a pas besoin".
90. Ce guide prévoit également la prise en charge du forfait téléphonique et du forfait internet à hauteur de 50% pour chacun d'eux dans la limite de 50,00 € par mois.
91. Dès lors que Madame [K] [D] a préféré utiliser son iPhone personnel, qui n'était par hypothèse pas exclusivement consacré à son activité professionnelle, de sorte qu'elle a droit à la prise en charge de la moitié de son forfait. Il en est de même pour l'abonnement internet.
92. La salariée produit ses quittances de loyer de janvier à décembre 2018, desquelles il ressort qu'elle a réglé, au titre des charges, un forfait ADSL de 52,61 € par mois. La S.A.R.L. Sophar Réunion lui est donc redevable sur cette période de la somme de 315,66 €.
93. Pour le surplus, Madame [K] [D] ne produit qu'une facture de téléphonie de février 2018 distinguant un abonnement sur sa SIM professionnelle pour un montant de 19,99 € et une facture internet de février 2019 pour un montant de 48,06 €.
94. Il s'ensuit que le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté Madame [K] [D] de ce chef et, statuant à nouveau, la cour fera droit à sa demande dans la limite de 315,66 + 19,99 + 24,03 = 359,68 €.
Sur l'absence de déclaration d'emploi et le non-paiement des heures supplémentaires
1 - l'absence de déclaration d'emploi :
95. Aux termes de l'article L. 3121-1 du code du travail, "la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles".
96. En l'espèce, Madame [K] [D] estime avoir effectué 37 heures de travail, du 21 décembre 2017 au 11 janvier 2018, sur les directives de la S.A.R.L. Sophar Réunion avant l'exécution de son contrat de travail à durée déterminée qui débutait officiellement le 15 janvier 2018 et réclame à ce titre la somme de 829,43 €.
97. Elle affirme avoir ainsi été mobilisée :
- le 21 décembre 2017 au siège parisien de la S.A.R.L. Sophar Réunion afin d'y récupérer son ordinateur portable,
- le 5 janvier 2018 afin d'assister à une réunion de 9 h à 16 h,
- le 10 janvier 2018 pour une réunion de 9 h à 12 h, ainsi qu'une visite d'un garde-meubles de 12 h à 13 h,
- pour faire une analyse pour le 10 janvier 2018,
- pour revoir les logiciels administratifs aux fins d'être opérationnelle au 15 janvier 2018,
- pour préparer le module 1 de la formation du produit Orencia du 11 janvier 2018,
- pour assister le 12 janvier 2018 à la formation administrative.
98. La S.A.R.L. Sophar Réunion réplique que ces temps de présence n'étaient pas des sujétions imposées et qu'ils ont en toute hypothèse été récupérés en début de contrat de travail.
99. Sur les différents courriers électroniques adressés à la salariée, seuls ceux du 21 décembre 2017 et du 3 janvier 2018 (pour la réunion du 5 janvier 2018, soit avant le début du contrat de travail) peuvent être considérés comme contraignants. Or, le courrier électronique du 5 janvier 2018 précise que "cette demi-journée sera récupérée sur votre début de collaboration", ce qui est avéré à l'examen du logiciel Appogee renseigné par la salariée elle-même (récupération faite le 1er février 2018).
100. Par ailleurs, Madame [K] [D] n'était pas obligée de se rendre au siège parisien de la S.A.R.L. Sophar Réunion pour y récupérer son ordinateur portable. Les parties n'ont vu qu'avantage commun à ce retrait physique avant le départ de la salariée pour La Réunion.
2 - les heures supplémentaires :
101. L'article L. 3121-28 du code du travail dispose que "toute heure accomplie au delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent".
102. Aux termes de l' article L. 3171-4, "en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles".
103. Il résulte de ces dispositions qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
104. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
105. Seules doivent donner lieu à rémunération les heures supplémentaires accomplies à la demande ou pour le compte de l'employeur ou, à tout le moins, avec son accord implicite, lequel est constitué lorsque le supérieur hiérarchique a connaissance de la situation.
106. En l'espèce, Madame [K] [D] estime avoir effectué 159 heures supplémentaires dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail à durée déterminée du 15 janvier 2018 au 13 juillet 2018 et 112 heures supplémentaires dans le cadre de son contrat de travail à durée indéterminée du 14 juillet 2018 au 5 juin 2019, demande à ce titre paiement de la somme de 9.496,61 € et produit à cette fin un tableau détaillant les heures supplémentaires, mois par mois.
107. Toutefois, en sa qualité de visiteuse médicale, Madame [K] [D] pouvait gérer librement son temps de travail, dont il convient de rappeler qu'il était de 35 heures par semaine.
108. Madame [K] [D] donne quelques exemples d'heures supplémentaires exigées par son employeur :
- conférences téléphoniques du 15 au 26 janvier 2018 au-delà de la durée légale de 35 heures,
- conférence téléphonique "formation PV BMS" du 31 janvier 2018 de 17 h à 17 h 30.
- conférence téléphonique "point FOT Question ABA" du 7 février 2018 de 17 h à 19 h,
- réunion du 23 avril 2018 de 17 h à 19 h suivie d'un cocktail dînatoire,
- conférences téléphoniques du 4 au 15 juin 2018 de 15 h 30 à 17 h,
- réunion du 26 juin 2018 de 17 h à 19 h suivie d'un dîner,
- conférence téléphonique "présentation Marketing DH SOPHAR Réunion" fixée le 18 juin 2018 de 16 h 30 à 18 h,
- conférence téléphonique "PV BMS" du 17 août 2018 de 16 h 30 à 17 h,
- conférence téléphonique "conf call équipe BMS" du 5 novembre 2018 de 17 h à 18 h,
- réunion du 13 décembre 2018 de 17 h à 19 h,
- conférence téléphonique "MAJ Campagne Eliquis Janvier + Actus" du 15 février 2019 de 17 h à 18 h 30,
- conférence téléphonique "FOT Marketing fonctionnement et ambitions 2019" fixée le 18 février 2019 de 17 h à 18 h,
- conférence téléphonique "FOT Marketing" du 25 février 2019 de 17 h à 18 h,
- conférence téléphonique "présentation du système de primes 2019" du 25 février 2019 de 18 h à 19 h,
- conférence téléphonique "campagne marketing Orencia 2019" du 27 février 2019 de 18 h à
- conférence téléphonique "ateliers Orencia" du 26 mars 2019 de 17 h à 18 h 30,
- conférence téléphonique "formation PV BMS" du 27 mars 2019 de 16 h 30 à 17 h.
109. Or, la salariée était, à chaque fois, avertie suffisamment tôt à l'avance de façon à lui permettre d'adapter son temps de travail en conséquence. Qui plus est, elle devait renseigner son compte Appogee sur ses heures de travail et il n'en ressort pas qu'elle ait effectué des heures supplémentaires qui n'aient donné lieu à récupération.
3 - le travail dissimulé :
110. Aux termes de l'article L. 8221-5 du code du travail, "est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur (...) de mentionner sur le bulletin de paie (...) un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli".
111. L'article L. 8223-1 prévoit qu' "en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire".
112. En l'espèce, il s'évince de ce qui précède que les heures de travail indiquées sur les bulletins de salaire de Madame [K] [D] correspondent à la réalité du travail fourni.
113. Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Madame [K] [D] de ces chefs.
Sur l'inégalité de traitement
114. Aux termes de l'article 23 de la déclaration universelle des droits de l'homme de 1948, "toute personne a droit au travail, au libre choix de son travail, à des conditions équitables et satisfaisantes et à la protection contre le chômage. Tous ont droit, sans aucune discrimination, à un salaire égal pour un travail égal".
115. Il s'en évince que l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés de l'un ou l'autre sexe, pour autant que les salariés en cause sont placés dans une situation identique.
116. Ce principe englobe l'ensemble des droits individuels et collectifs, qu'ils soient financiers ou non, accordés aux salariés en raison de leur appartenance à l'entreprise.
117. En l'espèce, Madame [K] [D] voit dans les événements suivants la marque d'une inégalité de traitement confinant à la discrimination :
- le refus de remboursement par l'employeur du forfait ADSL alors que d'autres collègues ont bénéficié de ce remboursement,
- son salaire est inférieur à celui de Madame [E] [B], alors qu'elle est placée dans une situation identique,
- aucune augmentation de salaire au 1er janvier 2019 ne lui a été accordée alors qu'au 1er avril 2019, l'ensemble des salariés des sociétés de La Réunion et des Antilles, recrutés pour présenter les produits du laboratoire Bristol Myers Squibb, ont bénéficié d'une augmentation de salaire,
- le véhicule de fonction mis à sa disposition ne répond pas aux normes du document unique évaluant les risques professionnels et il lui a été refusé d'utiliser son véhicule personnel dans le cadre de son activité pour pallier la non-conformité de son véhicule professionnel, alors que son collègue Monsieur [F] [H] aurait été autorisé par l'employeur à utiliser son véhicule personnel comme véhicule de fonction avec remboursement des indemnités kilométriques,
- elle a été écartée de plusieurs candidatures, notamment sur le poste de directeur régional, celui de délégué manager, mais également celui de délégué hospitalier oncologie sur la base de motifs fallacieux au profit d'autres candidats moins qualifiés pour les postes convoités.
118. La S.A.R.L. Sophar Réunion indique que les frais ADSL n'ont pas été remboursés à Madame [K] [D] faute de production de factures. Il a été partiellement fait droit à sa demande, la cour ayant considéré que la production de quittances distinguant les charges au titre de l'abonnement internet était suffisante. L'application rigide de son Guide collaborateur par la S.A.R.L. Sophar Réunion ne signe pas pour autant une pratique discriminatoire, les autres salariés étant remboursés sur la base d'une production de factures à leur nom.
119. La rémunération différente pratiquée entre Madame [K] [D] et sa collègue Madame [E] [B] se justifie par une formation supérieure.
120. La démission de Madame [K] [D] le 6 mars 2019 n'a pas permis à la S.A.R.L. Sophar Réunion d'envisager l'augmentation de sa rémunération à compter du 1er avril 2019.
121. La mise à disposition d'un véhicule de service conformément au Guide collaborateur ne peut pas être jugée inégalitaire, même si le refus de l'employeur d'indemniser des frais kilométriques à partir d'un véhicule dont le salarié est propriétaire et pas seulement d'un véhicule personnel de location peut être jugé excessif.
122. Enfin, Madame [K] [D] n'établit pas avoir été écartée des trois candidatures dont elle fait état uniquement à raison de sa personne, la S.A.R.L. Sophar Réunion précisant en outre, sans être démentie, qu'il n'a été donné aucune suite au poste de directeur régional et que la salariée a finalement refusé le poste de délégué hospitalier oncologie motif pris d'une discrimination salariale.
123. Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Madame [K] [D] de ce chef.
Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts
124. Aux termes de l'article L. 1222-1 du code du travail, "le contrat de travail est exécuté de bonne foi".
125. Il s'en évince que le salarié doit s'abstenir de nuire, mais aussi d'accomplir tout acte contraire à l'intérêt de l'entreprise, cette obligation de loyauté s'appliquant également lorsqu'il a quitté l'entreprise.
126. En l'espèce, la S.A.R.L. Sophar Réunion reproche à Madame [K] [D] des agissements :
- à l'extérieur, pour avoir adressé un courrier électronique au laboratoire Bristol Myers Squibb le 28 mai 2019, alors qu'elle était toujours en poste, afin de lui transmettre la lettre de mise en demeure destinée au gérant de la S.A.R.L. Sophar Réunion,
- en interne, pour avoir pris contact en décembre 2019 avec des salariés de la société Sophar à La Réunion et aux Antilles pour qu'ils réalisent des attestations contre l'employeur, avec une volonté manifeste de nuire.
127. Le premier reproche est avéré et reconnu par Madame [K] [D] qui indique l'avoir fait sur les conseils du laboratoire qui aurait été soucieux de ses conditions de travail, ce qu'atteste une ancienne salariée de la S.A.R.L. Sophar Réunion Madame [X] [G]. S'il est constitutif d'un acte de dénigrement, l'employeur, qui a adressé le 5 juin 2019 à sa salariée une mise en demeure de cesser ses agissements, ne caractérise pas le préjudice qui en serait résulté pour l'entreprise.
128. Le second reproche n'est en revanche pas établi, la S.A.R.L. Sophar Réunion se contentant de produire une nouvelle mise en demeure du 16 décembre 2019 de cesser ses agissements nuisibles en contactant d'autres anciens salariés de l'employeur à La Réunion et aux Antilles. Il ne peut pas être reproché à Madame [K] [D] d'avoir tenté d'étayer son dossier, par exemple en sollicitant des attestations, comme celle de Madame [X] [G].
129. Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la S.A.R.L. Sophar Réunion de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts.
Sur les dépens
130. La S.A.R.L. Sophar Réunion, partie perdante, même très partiellement, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
131. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la partie condamnée aux dépens prend en charge les frais irrépétibles exposés par la partie adverse dans les proportions que le juge détermine.
132. En l'espèce, il convient de faire bénéficier Madame [K] [D] de ces dispositions à hauteur de 2.000,00 € pour ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a :
- débouté Madame [K] [D] de ses demandes relatives à la requalification de son contrat de travail à durée déterminée initial, à l'indemnisation de ses journées de RTT non prises du 1er janvier au 5 juin 2019 et au remboursement des frais professionnels,
- condamné Madame [K] [D] à payer à la S.A.R.L. Sophar Réunion la somme de 1.000,00 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,
Statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant,
Requalifie le contrat de travail à durée déterminée initial de Madame [K] [D] en contrat de travail à durée indéterminée,
En conséquence, condamne la S.A.R.L. Sophar Réunion à lui payer la somme de 3.400,00 € (trois mille quatre cents euros) à titre de dommages et intérêts,
Condamne la S.A.R.L. Sophar Réunion à payer à Madame [K] [D] la somme de 973,65 € (neuf cent soixante treize euros et soixante cinq centimes) au titre des journées de RTT non prises du 1er janvier au 5 juin 2019,
Condamne la S.A.R.L. Sophar Réunion à payer à Madame [K] [D] la somme de 359,68 € (trois cent cinquante neuf euros et soixante huit centimes) au titre du remboursement de ses frais professionnels,
Condamne la S.A.R.L. Sophar Réunion aux dépens de première instance et d'appel,
Condamne la S.A.R.L. Sophar Réunion à payer à Madame [K] [D] la somme de 2.000,00 € (deux mille euros) au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, président de chambre, et par Mme Nadia HANAFI, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991456.xml | COUR D'APPEL
BASSE - TERRE
No RG 22/711
No Portalis DVB7-V-B7G-DOZT
ORDONNANCE DU 11 JUILLET 2022
Dans l'affaire entre d'une part :
Monsieur le Préfet de [Localité 5] et [Localité 6],
non comparant et non représenté,
Appelant le 10 juillet 2022 à 12h15 d'une ordonnance rendue le 9 juillet 2022 à 12h20 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre ;
et d'autre part,
Monsieur [L] [E] [O] [J]
né le [Date naissance 1] 1994 à [Localité 7] (Cuba)
de nationalité cubaine (numéro de passeport L824567)
sans adresse sur le territoire national
non comparant, représenté par Maître Laurent HATCHI, avocat au Barreau de la Guadeloupe,
Le ministère Public
Représenté par Monsieur Eric RAVENET, substitut général,
comparant,
*************
Nous, Emmanuel PLANQUE, conseiller à la Cour d'appel de Basse-Terre, délégué par ordonnance de Monsieur le premier président pour statuer en matière de rétention administrative, assistée de Monsieur Armélida RAYAPIN, greffier,
Vu le procès-verbal d'interpellation de Monsieur [O] [J] [L] [E] le 4 juillet 2022 à 21h30 ;
Vu le procès-verbal de notification du placement en mesure de retenue de l'intéressée le 4 juillet 2022 à 23h00 ;
Vu l'arrêté du préfet de [Localité 5] et [Localité 6] no97822140SM du 5 juillet 2022 prononçant l'obligation de quitter sans délai le territoire français de Monsieur [O] [J] [L] [E], avec interdiction de retour pendant une durée d'un an ;
Vu la décision du préfet de [Localité 5] et [Localité 6] no97822140SM de placement au centre de rétention administrative de l'intéressé en date du 5 juillet 2022 ;
Vu le procès-verbal de notification de ses droits en rétention en date du 5 juillet 2022 à 17h30 ;
Vu l'ordonnance du 9 juillet 2022 rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre déclarant la procédure diligentée à l'encontre de Monsieur [L] [E] irrégulière, disant n'y avoir lieu en conséquence à statuer sur la demande de prolongation de la rétention administrative de l'intéressé et ordonnant sa remise en liberté ;
Vu l'appel interjeté à l'encontre de cette ordonnance suivant requête du 10 juillet 2022 à 12 heures 15 par Monsieur le préfet de [Localité 5] et [Localité 6] ;
A l'audience qui s'est tenue en audience publique au palais de justice de BASSE-TERRE le lundi 11 juillet 2022 à 14 heures 30, ont été entendus Monsieur l'avocat général et Maître Laurent HATCHI, représentant Monsieur [L] [E].
Suivant requête valant déclaration d'appel, Monsieur le préfet de [Localité 5] et [Localité 6] soutient avoir effectivement pris en compte la demande d'asile de Monsieur [L] [E], laquelle n'est toutefois intervenue que le 8 juillet 2022, soit après son placement en rétention administrative.
Il en déduit que la procédure administrative est parfaitement régulière et sollicite la prolongation de la rétention administrative de l'intéressé, au regard de la décision de rejet de sa demande d'asile qui est intervenue le 8 juillet 2022.
Monsieur l'avocat général a requis la confirmation de la décision querellée.
Monsieur [L] [E], représenté par son conseil, a rappelé que sa demande d'asile a été effectuée le 7 juillet 2022 à 19h01, qu'elle est dès lors antérieure à l'audience du juge des libertés et de la détention et que le préfet de [Localité 5] et [Localité 6] aurait dû en informer celui-ci dès lors qu'elle a nécessairement une incidence sur la procédure de rétention administrative.
1/ Sur la recevabilité de l'appel,
Conformément aux dispositions de l'article R743-10 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui statue sur une demande relative à la rétention d'un étranger est susceptible d'appel dans les 24 heures de son prononcé par déclaration motivée.
Le délai prévu est calculé et prorogé conformément aux articles 640 et 642 du Code de procédure civile.
L'appel de Monsieur le préfet de la Guadeloupe à l'encontre de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de POINTE-À-PITRE rendue le 9 juillet 2022 à 12h20 ayant été formé le lendemain à 12h15 est donc recevable.
2/ Sur la mesure de rétention administrative,
Aux termes du premier alinéa de l'article L612-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), « L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. »
L'article L612-2 du même Code dispose que « par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire (notamment s'il) existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ».
L'article L612-3 précise que :
« Le risque mentionné au 3o de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :
1o L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
2o L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
3o L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;
4o L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;
5o L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;
6o L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;
7o L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ;
8o L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3o de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5. »
L'article L731-1 dispose quant à lui que :
« L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants :
1o L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins d'un an auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ;
2o L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction de retour sur le territoire français prise en application des articles L. 612-6, L. 612-7 et L. 612-8 ;
3o L'étranger doit être éloigné pour la mise en oeuvre d'une décision prise par un autre État, en application de l'article L. 615-1 ;
4o L'étranger doit être remis aux autorités d'un autre Etat en application de l'article L. 621-1 ;
5o L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction de circulation sur le territoire français prise en application de l'article L. 622-1 ;
6o L'étranger fait l'objet d'une décision d'expulsion ;
7o L'étranger doit être éloigné en exécution d'une peine d'interdiction judiciaire du territoire prononcée en application du deuxième alinéa de l'article 131-30 du code pénal ;
8o L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction administrative du territoire français.
L'étranger qui, ayant été assigné à résidence en application du présent article, ou placé en rétention administrative en application des articles L. 741-1 ou L. 741-2, n'a pas déféré à la décision dont il fait l'objet ou, y ayant déféré, est revenu en France alors que cette décision est toujours exécutoire, peut être assigné à résidence sur le fondement du présent article. »
L'article L740-1 explique que « l'autorité administrative peut, dans les conditions prévues au présent titre, placer en rétention un étranger pour l'exécution de la décision d'éloignement dont il fait l'objet. »
L'article L741-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que :
« L'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.
Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3. »
L'article L741-3 du même Code précise que « un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet. »
Aux termes de l'article L521-1 du CESEDA, « tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente qui enregistre sa demande et procède, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, à la détermination de l'Etat responsable en application du règlement (UE) no 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ou en application d'engagements identiques à ceux prévus par le même règlement. »
L'article L521-7 prévoit quant à lui que « lorsque l'enregistrement de sa demande d'asile a été effectué, l'étranger se voit remettre une attestation de demande d'asile dont les conditions de délivrance et de renouvellement sont fixées par décret en Conseil d'Etat. La durée de validité de l'attestation est fixée par arrêté du ministre chargé de l'asile.
La délivrance de cette attestation ne peut être refusée au motif que l'étranger est démuni des documents et visas mentionnés à l'article L. 311-1. Elle ne peut être refusée que dans les cas prévus aux c ou d du 2o de l'article L. 542-2.
Cette attestation n'est pas délivrée à l'étranger qui demande l'asile à la frontière ou en rétention. »
Il ressort de la procédure que Monsieur [O] [J] [L] [E] est de nationalité cubaine et, selon ses déclarations, avait pour projet de se rendre à [Localité 4] ou une des îles vierges américaines, via l'île de [Localité 6] où il a été interpellé le 4 juillet 2022 alors qu'il s'apprêtait à quitter ce territoire par la mer.
Il admet qu'il ne bénéficie d'aucun document l'autorisant à séjourner sur le territoire guadeloupéen et qu'il n'a pas de famille en Guadeloupe ou sur l'île de [Localité 6], ayant expliqué qu'il a quitté Cuba par crainte pour sa vie afin de se rendre in fine aux États-Unis.
Lors de la notification de ses droits au moment de son placement en rétention administrative à [Localité 6], Monsieur [O] [J] [L] [E] a indiqué expressément que « il ne désirait pas déposer de demande d'asile ».
L'autorité administrative n'ayant pas pu organiser le retour de l'intéressé à [Localité 3] (Cuba) avant le 12 juillet 2022, par transport aérien, celui-ci a été transféré le 6 juillet 2022 au Centre de rétention administrative de la Guadeloupe où ses droits en rétention lui ont à nouveau été notifiés.
Le 7 juillet 2022 à 16h35, Monsieur [O] [J] [L] [E] déposait une requête en contestation de son placement en rétention administrative, principalement sur le fondement des articles L521-1 et suivants du CESEDA.
Il y expose en effet avoir déposé une demande d'asile le 7 juillet 2022 au Centre de rétention administrative des [Localité 2], laquelle toutefois ne figure pas au dossier initial.
Suivant mémoire en date du 10 juillet 2022, Monsieur le préfet de [Localité 5] et [Localité 6] confirme que l'intéressé a effectivement formé cette demande d'asile qui a été enregistrée le 8 juillet 2022 et que celle-ci a bien été prise en considération, qu'elle a conduit à un examen attentif de sa situation qui a amené l'autorité administrative à considérer cette demande comme dilatoire, n'ayant été formée que dans le but de faire échec à la mesure d'éloignement dont il faisait appel, suivant arrêté noDR/ETR/RF/97822140SM en date du 8 juillet 2022.
Il apparaît que Monsieur [O] [J] [L] [E] est arrivé sur le territoire de [Localité 6] le 30 juin 2022 dans l'attente d'émigrer vers [Localité 4] ou une île britannique et qu'il n'a formulé sa demande d'asile que près de huit jours plus tard, alors qu'il faisait déjà l'objet d'une mesure portant obligation de quitter le territoire français et d'un arrêté de rétention administrative.
La procédure initiale de rétention administrative est donc parfaitement régulière.
En revanche, la décision portant refus d'admission au séjour au titre de l'asile datée du 8 juillet 2022 aurait dû être portée à la connaissance du juge des libertés et de la détention, ce d'autant qu'il n'apparaît pas à la lecture de la copie versée aux débats de cette décision qu'elle a été notifiée à l'intéressé.
En l'état du dossier, la demande d'asile de Monsieur [L] [E] devait être prise en considération par le premier juge, comme constituant une obstacle à la mesure d'éloignement précitée et corrélativement, à son placement en rétention administrative.
Il y a lieu dès lors de confirmer la décision querellée, uniquement en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de prolongation de la rétention administrative.
PAR CES MOTIFS,
Nous, Emmanuel PLANQUE, conseiller, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président, assistée de Armélida RAYAPIN, greffier,
Statuant publiquement, par décision réputée contradictoire et rendue en dernier ressort, après débats en audience publique,
Déclarons recevable l'appel de Monsieur le préfet de la Guadeloupe formé à l'encontre de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Pointe-à-Pitre en date du 9 juillet 2022 ;
Infirmons l'ordonnance déférée du juge des libertés et de la détention de Pointe-à-Pitre en date du 9 juillet 2022 en ce qu'elle a déclaré la procédure irrégulière ;
Confirmons l'ordonnance déférée du juge des libertés et de la détention de Pointe-à-Pitre en date du 9 juillet 2022 en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de prolongation de la rétention administrative de Monsieur [L] [E] [O] [J] et ordonné sa remise en liberté ;
Disons que la présente ordonnance sera notifiée aux parties intéressées par tout moyen par le greffe de la cour d'appel et sera transmise à Monsieur le procureur général ;
Fait à BASSE-TERRE le 11 juillet 2022 à 15 heures 50
La greffière Le magistrat délégué
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CAPP/JURITEXT000046991452.xml | COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
2ème CHAMBRE CIVILE
ARRÊT AUX FINS DE RECTIFICATION D'ERREUR MATERIELLE
No 450 DU 11 JUILLET 2022
No RG 22/00616
No Portalis DBV7-V-B7G-DOQH
Décision déférée à la cour : Arrêt rendu par deuxième chambre civile de la cour d'appel de Basse-Terre, décision attaquée en date du 16 mai 2022, enregistrée sous le no 21/01251.
APPELANTE :
S.C.I. Iguana
[Adresse 4],
[Localité 3]
Représentée par Me Corinne Dupont, avocat au barreau de Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélémy.
S.A.R.L. Bio [Localité 2]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Béatrice Fusenig de la Selarl Derussy-Fusenig-Mollet, avocat au barreau de Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélémy.
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue sans audience publique, en vertu de l'article 462 du code de procedure civile devant la cour composée de :
Mme Corinne Desjardins, Présidente de chambre
Mme Annabelle Cledat, conseillère,
Mme Christine Defoy, conseillère.
qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées que l'arrêt serait rendue par sa mise à disposition au greffe de la cour le 11 juillet 2022.
GREFFIER : Lors du prononcé Madame Armélida Rayapin.
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
Signé par Mme Corinne Desjardins, Présidente de chambre et par Mme Armélida Rayapin, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
Par requête en rectification d'erreur matérielle déposée au greffe le 14 juin 2022, la SCI Iguana demande à la cour de corriger l'erreur matérielle constatée dans l'arrêt no 307 du 16 mai 2022 rendu par la deuxième chambre et enregistré sous le numéro de RG 21/01251 en ce que la société Bio [Localité 2] est dénommée de façon erronée société Bio Basse dans le dispositif dudit arrêt.
En application des dispositions de l'article 462 du code de procédure civile, le greffe a invité les parties à formuler d'éventuelles observations avant le 1er juillet 2022.
Aucune observation n'a été formulée par les parties.
L'affaire a été mise en délibéré au 11 juillet 2022.
MOTIFS DE L'ARRET
Aux termes de l'article 462 du code de procédure civile, les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu.
En l'espèce il est constant que l'arrêt no 307 rendu le 16 mai 2022 sous le numéro de RG 21/01251 contient dans son dispositif une erreur relative à la dénomination de la société Bio [Localité 2].
Il convient en conséquence de rectifier comme suit le dispositif:
- Accorde à la SARL Bio-[Localité 2] des délais de paiements pour la durée de 24 mois aux fins de régler sa dette fixée à la somme de 30.380 euros suivant décompte arrêté au mois de février 2022 ( mois de février 2022 inclus)
Au lieu de :
Accorde à la SARL Bio-Basse des délais de paiements pour la durée de 24 mois aux fins de régler sa dette fixée à la somme de 30.380 euros suivant décompte arrêté au mois de février 2022 ( mois de février 2022 inclus)
Les dépens seront laissés à la charge de l'Etat.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement, par arrêt rendu par mise à disposition au greffe,
Rectifie le dispositif de l'arrêt no 307 rendu le 16 mai 2022 par la deuxième chambre civile de la cour d'appel de Basse-terre enregistré sous le numéro de RG 21/01251 comme suit :
Accorde à la SARL Bio-[Localité 2] des délais de paiements pour la durée de 24 mois aux fins de régler sa dette fixée à la somme de 30.380 euros suivant décompte arrêté au mois de février 2022 ( mois de février 2022 inclus)
Au lieu de :
Accorde à la SARL Bio-Basse des délais de paiements pour la durée de 24 mois aux fins de régler sa dette fixée à la somme de 30.380 euros suivant décompte arrêté au mois de février 2022 ( mois de février 2022 inclus)
Dit que le présent arrêt sera mentionné sur la minute et sur les expéditions de l'arrêt no 307 rendu le 16 mai 2022 par la deuxième chambre civile de la cour d'appel de Basse-Terre,
Dit que les dépens seront mis à la charge de l'Etat.
Et ont signé,
La greffière La présidente
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CAPP/JURITEXT000046991446.xml | AFFAIRE : No RG 21/00120 - No Portalis DBWB-V-B7F-FPYJ
Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Saint-Denis en date du 07 Janvier 2021, rg no F 19/00413
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 JUILLET 2022
APPELANT :
Monsieur [R], [M], [D] [O]
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentant : Me Stéphanie IÈVE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/007129 du 19/10/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)
S.A.S. SOCIÉTÉ GÉNÉRALE CONSTRUCTION TRAVAUX PUBLICS OCEAN INDIEN (S.G.C.T.P O.I)
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentant : Me Jean pierre GRONDIN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
PARTIES INTERVENANTES :
S.E.L.A.R.L. BACH FRANKLIN
[Adresse 3]
[Localité 5]
Non représentée
Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA
[Adresse 1]
[Localité 8], représentant : Me Nathalie JAY, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
Clôture : 7 mars 2022
DÉBATS : En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Delphine GRONDIN, greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022 prorogé au 13 juillet 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 JUILLET 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Monsieur [R] [O] aurait été engagé sous contrat à durée indéterminée en qualité de chef d'équipe polyvalent coefficient 137 à compter du 15 février 2019 au sein de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien, moyennant une rémunération mensuelle de 1.967,00 € pour 35 heures de travail hebdomadaire.
2. Suite à un différend, I'employeur aurait indiqué à Monsieur [R] [O] de ne pas revenir travailler et qu'il était licencié, allant jusqu'à lui demander de laisser les clés sur les roues du camion qu'il venait d'emmener au contrôle technique.
3. Aucun licenciement formel n'ayant existé, Monsieur [R] [O] a, par requête du 23 septembre 2019, saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Denis en contestation de son licenciement et paiement de diverses indemnités.
4. Par jugement du 7 janvier 2021, le conseil a :
- rejeté l'exception de sursis à statuer pour l'intégralité du litige,
- débouté Monsieur [R] [O] de l'ensemble de ses demandes,
- condamné Monsieur [R] [O] à verser à la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien les sommes de :
* 1.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* 1.000,00 € au titre de l'article 581 du code de procédure civile,
- prononcé le retrait de I'aide juridictionnelle accordé à Monsieur [R] [O] au regard du caractère abusif,
- condamné Monsieur [R] [O] aux entiers dépens,
- débouté la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien du surplus de ses demandes.
5. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 28 janvier 2021, Monsieur [R] [O] a interjeté appel de cette décision.
6. Par ordonnance du 5 octobre 2021, le conseiller de la mise en état a :
- débouté la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien de ses demandes notamment tendant à la radiation de l'affaire,
- condamné la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien à payer à Monsieur [R] [O] la somme de 2.500,00 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien aux dépens de l'instance sur incident,
- renvoyé l'affaire pour clôture.
7. Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 1er février 2022, Monsieur [R] [O] demande à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il :
* l'a débouté de l'ensemble de ses demandes,
* l'a condamné à verser à la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien les sommes de :
1.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
1.000,00 € au titre de l'article 581 du code de procédure civile,
* a prononcé le retrait de son aide juridictionnelle au regard du caractère abusif,
* l'a condamné aux entiers dépens,
- en conséquence et statuant à nouveau,
- le recevoir en son appel et l'y dire fondé,
- le déclarer recevable et fondé en son assignation en intervention forcée,
- juger que l'Unedic Délégation AGS de La Réunion sera tenue d'intervenir dans l'instance actuellement pendante devant la chambre sociale de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion,
- juger que la S.E.L.A.R.L. Franklin Bach sera tenue d'intervenir dans l'instance actuellement pendante devant la chambre sociale de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion,
- juger qu'il n'y avait pas lieu à "réclamation" préalable au regard des textes applicables,
- en conséquence,
- juger qu'un contrat de travail à durée indéterminée le liait à son employeur, la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien,
- juger que son licenciement intervenu le 3 mai 2019 doit s'analyser en
un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- en conséquence,
- fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien aux sommes suivantes :
* indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 4.780,64 € nets,
* indemnité pour procédure inexistante : 2.390,32 € nets,
* indemnité compensatrice de préavis : 239,00 € nets,
* indemnité de congés payés : 853,70 € bruts,
* indemnité de travail dissimulé : 14.341,92 € nets,
* rappel de salaire : 6.333,80 € bruts,
* dommages et intérêts du fait de la privation de ses allocations chômage : 4.780,64 € nets,
* indemnité pour préjudice distinct : 4.780,64 € nets,
* indemnité pour licenciement vexatoire : 2.000,00 € nets,
- juger l'AGS tenue en garantie et lui déclarer opposable le présent arrêt,
- juger que, dans l'hypothèse où l'AGS invoquerait l'application d'un plafond légal, elle devra en justifier,
- juger que la S.E.L.A.R.L. Franklin Bach ès-qualité de mandataire liquidateur de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien devra régler ses créances excédant le plafond de garantie qui seraient jugées justifiées par l'arrêt sur les fonds disponibles selon l'ordre de priorité prévu par l'article L. 621-32 du code du commerce,
- juger que la S.E.L.A.R.L. Franklin Bach ès-qualité de mandataire liquidateur de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien devra régulariser sa situation auprès de tous les organismes compétents et concernés,
- juger que la S.E.L.A.R.L. Franklin Bach ès-qualité de mandataire liquidateur de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien devra lui remettre, sous astreinte de 250,00 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir :
* bulletin de paie rectifié de février 2019,
* bulletins de paie conformes des mois de mars 2019, avril 2019, mai 2019,
* attestation Pôle Emploi conforme à la présente procédure,
* certificat de travail conforme à la présente procédure,
* solde de tout compte conforme à la présente procédure,
- condamner la S.E.L.A.R.L. Franklin Bach ès-qualité de mandataire liquidateur de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien à lui payer la somme de 2.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,
- débouter les intimés et intervenants forcés de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contraires.
8. À l'appui de ses prétentions, Monsieur [R] [O] fait en effet valoir :
- qu'une tentative préalable de conciliation est imposée dans la procédure prud'homale, le conseil ayant qui plus est fait rétroagir le décret no 2019-1333 du 11 décembre 2019 en accueillant à tort l'exception de procédure soulevée par la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien,
- qu'il n'est pas responsable des fautes présentes dans son contrat de travail, rédigé par le gérant de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien qui n'avait pas encore embauché son comptable et dont la plainte pour faux est restée lettre morte, le doute devant lui profiter,
- qu'il a été vu sur plusieurs chantiers de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien en qualité de salarié de cette dernière,
- que l'amende civile juridiquement mal fondée ne pouvait pas être prononcée à l'occasion de la seule défense de ses droits,
- qu'il a été licencié sans aucune procédure,
- que son licenciement, qui ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse, sera sanctionné par l'octroi de deux mois de salaire,
- qu'il a été victime d'un véritable travail dissimulé, n'étant jamais payé et ne recevant qu'un bulletin de paie en février 2019,
- qu'il a été privé de ses allocations chômage, a été en difficulté pour payer son loyer et a été licencié dans des circonstances particulièrement vexatoires.
9. Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 15 juillet 2021, la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien demande à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
- "statuant à nouveau",
- condamner Monsieur [R] [O] à lui payer la somme de 3.500,00 € au titre de préjudice moral en vertu de l'article 1240 du code civil,
- condamner Monsieur [R] [O] à lui payer la somme de 3.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance,
- condamner Monsieur [R] [O] à lui payer la somme de 3.500,00 € au titre de l'article 581 du code de procédure civile.
10. À l'appui de ses prétentions, la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien fait en effet valoir :
- que Monsieur [R] [O] ne démontre pas en appel avoir entrepris de quelconques tentatives amiables,
- que Monsieur [R] [O] s'est procuré des modèles de contrats et les cachets de l'entreprise avec l'aide d'un complice, alors qu'aucun contrat de travail n'a été signé entre les parties, celui produit étant un faux doté d'une imitation de la signature de son gérant et parsemé d'anomalies,
- que la fonction de chef d'équipe polyvalent n'existe pas dans la convention collective applicable,
- que le seul bulletin de salaire produit contient de multiples incohérences,
- que Monsieur [R] [O] verse aux débats une attestation discréditée par une autre.
11. Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 27 janvier 2022, l'AGS, assignée en intervention forcée, demande à la cour de :
- confirmer la décision attaquée en toutes ses dispositions,
- débouter Monsieur [R] [O] de l'intégralité de ses demandes,
- très subsidiairement,
- constatant que le salaire contractuel est fixé par contrat à 1.967,00 € brut, limiter les créances à :
* 491,75 € représentant 0,25 mois de salaire, subsidiairement à 1.967,00 € s'agissant des dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 1.967,00 € pour irrégularité formelle du licenciement,
* 196,70 € brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
* 11.802,00 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé,
* 5.901,00 € à titre de rappel de salaire.
- sur sa garantie,
- dire que la décision à intervenir ne lui sera opposable que dans les seules limites de sa garantie légale prévue aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail,
- en conséquence, dire que sa garantie est plafonnée, toutes créances
avancées pour le compte du salarié, à l'un des trois plafonds définis à l'article D. 3253 du code du travail,
- exclure de sa garantie les créances éventuellement inscrites au titre de
des frais irrépétibles et des dépens.
12. À l'appui de ses prétentions, l'AGS fait en effet valoir :
- que le gérant de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien a toujours contesté avoir passé un quelconque contrat de travail avec Monsieur [R] [O], qu'il avait hébergé et qui l'a abusé,
- que l'appelant devra produire d'autres éléments que ceux dont l'authenticité est contestée,
- que Monsieur [R] [O] ne produit aux débats aucun élément permettant de retenir l'existence d'un acte unilatéral de l'employeur prenant la décision de rompre le contrat, ni de dater la rupture.
13. La S.E.L.A.R.L. Franklin Bach, mise en cause par acte d'huissier remis à personne morale le 21 octobre 2021 en sa qualité de mandataire liquidateur de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien par jugement du tribunal mixte de commerce de Saint-Denis du 7 juillet 2021, n'a pas constitué avocat.
14. L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 mars 2022.
15. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
16. À titre liminaire, si le jugement entrepris fait reproche à Monsieur [R] [O] de n'avoir entrepris aucune tentative amiable de résolution de son différend sur le fondement de dispositions inapplicables au moment de la requête du 23 septembre 2019 et alors que la procédure prud'homale intègre nécessairement une phase de conciliation, force est de constater qu'il n'en tire aucune conséquence juridique, ni dans ses motifs, ni dans son dispositif.
Sur l'authenticité du contrat de travail
17. L'article 287 du code de procédure civile dispose en son 1er alinéa que, "si l'une des parties dénie l'écriture qui lui est attribuée ou déclare ne pas reconnaître celle qui est attribuée à son auteur, le juge vérifie l'écrit contesté à moins qu'il ne puisse statuer sans en tenir compte".
18. Aux termes de l'article 288, "il appartient au juge de procéder à la vérification d'écriture au vu des éléments dont il dispose après avoir, s'il y a lieu, enjoint aux parties de produire tous documents à lui comparer et fait composer, sous sa dictée, des échantillons d'écriture.
Dans la détermination des pièces de comparaison, le juge peut retenir tous documents utiles provenant de l'une des parties, qu'ils aient été émis ou non à l'occasion de l'acte litigieux".
19. En l'espèce, Monsieur [R] [O] produit l'original d'un contrat de travail censément signé le 15 février 2019 par Monsieur [Z] [T], gérant de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien, sous une mention manuscrite "bon pour accord, lu et approuvé".
20. Il ressort clairement de la comparaison de cette mention manuscrite avec celle présente dans un acte d'engagement de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien du 13 mars 2019 qu'il s'agit du même auteur. Les signatures entre ces deux documents sont également particulièrement proches.
21. Pour rendre crédible le contrat de travail versé aux débats, Monsieur [R] [O] produit également une attestation de Monsieur [J] [X] qui relate un épisode au cours duquel l'appelant l'aurait appelé le 2 mai 2019 pour préparer le contrôle technique d'un camion. L'attestant y indique avoir vu en cette occasion arriver Monsieur [G] [F] "avec son associé" qui peut être identifié comme étant Monsieur [Z] [T], lequel ne s'est pas étonné de la présence de Monsieur [R] [O].
22. Monsieur [R] [O] produit également une attestation de Monsieur [V] [Y] qui l'a vu se présenter comme "chef d'équipe" de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien afin d'être autorisé à monter un échafaudage, ainsi qu'un échange de SMS intervenu courant mai 2019 accréditant la relation de travail.
23. Le contrat de travail du 15 février 2019 est donc le fait de Monsieur [Z] [T], gérant de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien, et la relation de travail avec Monsieur [R] [O] est établie, nonobstant les fautes et/ou incohérences par ailleurs stigmatisées par l'employeur.
24. De ce qui précède, il conviendra d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions dès lors qu'il a débouté Monsieur [R] [O] de ses demandes au seul motif que la relation de travail n'était pas prouvée.
Sur le licenciement
25. L'article L. 1231-1 du code du travail dispose en son 1er alinéa que "le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié, ou d'un commun accord, dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre".
26. L'article L. 1235-1 prévoit qu' "en cas de litige, (...) à défaut d'accord, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Il justifie dans le jugement qu'il prononce le montant des indemnités qu'il octroie.
Si un doute subsiste, il profite au salarié".
27. Aux termes de l'article L. 1235-2, "les motifs énoncés dans la lettre de licenciement prévue aux articles L. 1232-6, L. 1233-16 et L. 1233-42 peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés par l'employeur, soit à son initiative soit à la demande du salarié, dans des délais et conditions fixés par décret en Conseil d'Etat.
La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l'employeur, fixe les limites du litige en ce qui concerne les motifs de licenciement".
28. En l'espèce, par hypothèse, le licenciement de Monsieur [R] [O] a été effectué sans motif réel et sérieux puisque la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien a nié la relation de travail et, partant, rompu cette relation sans motif ni procédure.
Sur les indemnités
1 - l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
29. Monsieur [R] [O] a été embauché entre le 15 février 2019 (date de son contrat de travail) et le 9 mai 2019 (date de son congédiement par SMS), soit pendant moins d'un an, de sorte qu'il n'a droit à aucune indemnité de licenciement en application des dispositions de l'article L. 1235-3 du contrat de travail.
30. Il sera donc débouté de ce chef de demande.
2 - l'indemnité pour procédure inexistante :
31. L'article L. 1232-2 du code du travail prévoit que "l'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable".
32. L'article L. 1232-6 dispose que, "lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception.
Cette lettre comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur.
Elle ne peut être expédiée moins de deux jours ouvrables après la date prévue de l'entretien préalable au licenciement auquel le salarié a été convoqué".
33. Aux termes du 5ème alinéa de l'article L. 1235-2, dans sa version applicable au litige pour avoir été modifié par l'ordonnance no 2017-1718 du 20 décembre 2017, "lorsqu'une irrégularité a été commise au cours de la procédure, notamment si le licenciement d'un salarié intervient sans que la procédure requise aux articles L. 1232-2, L. 1232-3, L. 1232-4, L. 1233-11, L. 1233-12 et L. 1233-13 ait été observée (...), mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge accorde au salarié, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire".
34. Selon le 5ème alinéa de l'article L. 1235-3, l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse "est cumulable, le cas échéant, avec les indemnités prévues aux articles L. 1235-12 (non-respect par l'employeur des procédures de consultation des représentants du personnel ou d'information de l'autorité administrative), L. 1235-13 (non-respect de la priorité de réembauche) et L. 1235-15 (procédure de licenciement pour motif économique)".
35. En l'espèce, la procédure de licenciement n'a pas été respectée par la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien puisqu'elle n'a ni convoqué Monsieur [R] [O] à un entretien préalable à une mesure de licenciement ni adressé une lettre de licenciement à son salarié.
36. Monsieur [R] [O] n'ayant pas droit à une indemnité de licenciement pour absence de cause réelle et sérieuse il a droit à une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement.
37. Il lui sera donc alloué la somme de 1.967,00 €, soit un mois de salaire, à ce titre.
3 - l'indemnité de préavis :
38. L'article L. 1234-1 du contrat de travail dispose que, "lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit, s'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus inférieure à six mois, à un préavis dont la durée est déterminée par la loi, la convention ou l'accord collectif de travail ou, à défaut, par les usages pratiqués dans la localité et la profession ".
39. Aux termes de l'article L. 1234-5, "lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit, sauf s'il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice".
40. L'article 10.1 de la convention collective du bâtiment et travaux publics ouvriers La Réunion, intitulé "Préavis", le salarié a droit, "en cas de licenciement autre que le licenciement économique, jusqu'à 6 mois d'ancienneté, (à) 1 jour par mois entier de présence continue".
41. En l'espèce, la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien n'a pas respecté le délai de préavis de 2 jours auquel avait droit Monsieur [R] [O] puisqu'il comptait un peu moins de 3 mois de travail effectif dans l'entreprise.
42. Il sera donc fait droit à cette demande dans la limite de 131,13 € en application du salaire contractuel.
4 - l'indemnité de congés payés :
43. Le salarié qui travaille à temps plein ou à temps partiel acquiert 2,5 jours ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur.
44. En l'espèce, Monsieur [R] [O] a droit à 5 jours de congés payés pour avoir travaillé deux mois pleins, soit 327,83 €.
5 - l'indemnité de travail dissimulé :
45. Aux termes de l'article L. 8221-5 du code du travail, "est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur (...) de mentionner sur le bulletin de paie (...) un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli".
46. L'article L. 8223-1 prévoit qu' "en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire".
47. En l'espèce, les conditions de l'embauche et du licenciement de Monsieur [R] [O], qui n'a jamais été payé d'aucun salaire, permettent de considérer que la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien a procédé sciemment à du travail dissimulé.
48. Il sera donc alloué à Monsieur [R] [O] la somme de 11.802,00 €.
Sur le rappel de salaire
49. La S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien ne justifie pas avoir payé un quelconque salaire entre le 15 février 2019 et le 9 mai 2019.
50. Il lui sera donc alloué de ce chef la somme de 5.475,60 €.
Sur les autres préjudices
51. Parmi les divers préjudices allégués, Monsieur [R] [O] ne justifie que du caractère vexatoire de son licenciement auquel il a été procédé par simple SMS.
52. Dans ces conditions, il lui sera alloué la somme de 2.000,00 € à titre de dommages et intérêts.
Sur la remise des documents
53. Il conviendra de condamner la S.E.L.A.R.L. Franklin Bach ès qualités de mandataire liquidateur de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien à remettre à Monsieur [R] [O] les documents demandés dans le mois suivant la signification du présent arrêt et, au-delà, sous astreinte de 20,00 € par document et par jour de retard pendant six mois, après quoi il sera de nouveau statué.
Sur la garantie de l'AGS
54. Le présent arrêt ne sera opposable à l'AGS que dans les seules limites de sa garantie légale prévue aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail.
Sur les dépens
55. La S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien, partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
56. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la partie condamnée aux dépens prend en charge les frais irrépétibles exposés par la partie adverse dans les proportions que le juge détermine.
57. En l'espèce, il convient de donner acte à Maître IEVE, avocat de Monsieur [R] [O], bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, de ce qu'elle s'engage à renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle dans les conditions prévues à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991, modifié
par la loi du 18 décembre 1998, si, dans le délai de douze mois à compter de la délivrance de l'attestation de fin de mission, elle parvient à récupérer auprès de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien la somme allouée au titre des textes précités.
58. Dès lors, il y aura lieu de condamner la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien à payer à Monsieur [R] [O] la somme de 2.500,00 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Dit que le contrat de travail du 15 février 2019 dont se prévaut Monsieur [R] [O] est le fait de Monsieur [Z] [T], gérant de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien,
Déclare établie la relation de travail entre Monsieur [R] [O] et la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien,
Infirme le jugement en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Dit que Monsieur [R] [O] a fait l'objet d'un licenciement abusif,
En conséquence,
Fixe la créance de Monsieur [R] [O] au passif de la liquidation judiciaire de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien aux sommes suivantes :
- indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement : 1.967,00 € (mille neuf cent soixante sept euros),
- indemnité compensatrice de préavis : 131,13 € (cent trente et un euros et treize centimes),
- indemnité de congés payés : 327,83 € (trois cent vingt sept euros et quatre vingt trois centimes),
- indemnité de travail dissimulé : 11.802,00 € (onze mille huit cent deux euros),
- rappel de salaire : 5.475,60 € (cinq mille quatre cent soixante quinze euros et soixante centimes),
- dommages et intérêts pour licenciement vexatoire : 2.000,00 € (deux mille euros),
Condamne la S.E.L.A.R.L. Franklin Bach ès qualités de mandataire liquidateur de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien à remettre à Monsieur [R] [O] les documents suivants :
- bulletin de paie rectifié de février 2019,
- bulletins de paie conformes des mois de mars 2019, avril 2019, mai 2019,
- attestation Pôle Emploi conforme à la présente procédure,
- certificat de travail conforme à la présente procédure,
- solde de tout compte conforme à la présente procédure,
dans le mois suivant la signification du présent arrêt et, au-delà, sous astreinte de 20,00 € par document et par jour de retard pendant six mois, après quoi il sera de nouveau statué,
Dit que la S.E.L.A.R.L. Franklin Bach ès-qualité de mandataire liquidateur de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien devra régler les créances de Monsieur [R] [O] excédant le plafond de garantie qui seraient jugées justifiées par l'arrêt sur les fonds disponibles selon l'ordre de priorité prévu par l'article L. 621-32 du code du commerce,
Dit que la S.E.L.A.R.L. Franklin Bach ès-qualité de mandataire liquidateur de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien devra régulariser la situation de Monsieur [R] [O] auprès de tous les organismes compétents et concernés,
Dit que le présent arrêt ne sera opposable à l'AGS que dans les seules limites de sa garantie légale prévue aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail,
Déboute Monsieur [R] [O] du surplus de ses demandes,
Condamne la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien aux dépens de première instance et d'appel,
Donne acte à Maître IEVE, avocat de Monsieur [R] [O], bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, de ce qu'elle s'engage à renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle dans les conditions prévues à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991, modifié par la loi du 18 décembre 1998, si, dans le délai de douze mois à compter de la délivrance de l'attestation de fin de mission, elle parvient à récupérer auprès de la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien la somme allouée au titre des textes précités,
En conséquence, condamne la S.A.S. Société Générale Construction Travaux Publics Océan Indien à payer à Monsieur [R] [O] la somme de 2.500,00 € (deux mille cinq cents euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, Président de chambre, et par Mme Delphine GRONDIN, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
|
CAPP/JURITEXT000046991491.xml | AFFAIRE : N RG No RG 22/00112 - No Portalis DBWB-V-B7G-FU6J
Code Aff. : ARRÊT N AL
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Saint-Denis en date du 13 Décembre 2021, rg no 21/00334
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 JUILLET 2022
APPELANTE :
Etablissement Public CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE [5] représenté par son directeur général Monsieur [P] [O]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentant : Me Flora PARAVEMAN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [X] [E] [N] ÉPOUSE [C]
[Adresse 1],
[Localité 3]
Non représentée
Clôture : 25 avril 2022
DÉBATS : En application des dispositions des articles 786 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 avril 2022 en audience publique, devant Alain LACOUR, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Monique LEBRUN, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 05 JUILLET 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Alain LACOUR
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
Greffier du prononcé par mise à disposition au greffe : Nadia HANAFI
ARRÊT : mis à disposition des parties le 05 JUILLET 2022
Exposé du litige :
Mme [N] épouse [C] a été embauchée par le centre hospitalier universitaire [5] (l'hôpital) dans le cadre d'un contrat de travail de droit public à durée déterminée du 22 avril au 31 juillet 2021, en qualité d'infirmière. Au terme de ce contrat, l'hôpital a remis à Mme [N] épouse [C] une attestation destinée à Pôle emploi indiquant que la rupture anticipée du contrat de travail résultait de l'initiative de la salariée.
Saisi par Mme [N] épouse [C], qui contestait cette mention et sollicitait indemnisation des différents préjudices dont elle se plaignait, le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion, par jugement rendu le 13 décembre 2021, a condamné l'hôpital au paiement de « 20 euros par jour, dans un délai de 10 jours au prononcé de la décision pour une astreinte globale aux fins de remettre l'attestation Unedic » et a rejeté le surplus des demandes.
Appel de cette décision a été interjeté par l'hôpital le 28 janvier 2022. L'affaire a été fixée à bref délai par ordonnance du 10 février 2022 et la clôture ordonnée le 25 avril 2022, l'affaire étant fixée pour être plaidée le 26 avril 2022. Lors de cette audience, seul l'hôpital a comparu. L'affaire a ensuite été mise en délibéré.
Pendant le cours du délibéré, Mme [N] épouse [C] a présenté des conclusions tendant à la révocation de l'ordonnance de clôture et à la réouverture des débats.
Vu les articles 803, 905-1, 905-2, 907, 910-1 du code de procédure civile ;
Attendu qu'avis a été donné par le greffe à l'hôpital de ce que l'affaire était fixée à bref délai le 10 février 2022 ; que l'hôpital a fait signifier sa déclaration d'appel par acte extrajudiciaire le 18 février 2022 ; qu'il a remis ses conclusions au greffe de la cour le 10 mars 2022 et qu'il les a fait signifier à Mme [N] épouse [C] par acte extrajudiciaire du 8 avril 2022 ; qu'en l'absence de constitution de l'intimée, la clôture a été ordonnée le 25 avril 2022 pour l'affaire être plaidée le 26 avril 2022 ;
Attendu que Mme [N] épouse [C] disposait d'un délai d'un mois, expirant le 8 mai 2022, prolongé au lendemain, le 8 mai étant un dimanche et un jour férié, pour conclure et remettre ses conclusions au greffe, ce qu'elle a fait le 6 mai 2022 ;
Attendu que la circonstance que Mme [N] épouse [C] n'ait pas pu conclure avant la clôture constitue la cause grave qui commande qu'elle soit révoquée et que l'affaire soit renvoyée devant le conseiller de la mise en état, les débats étant rouverts ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement,
Révoque la clôture ;
Ordonne la réouverture des débats et renvoie l'affaire devant le conseiller de la mise en état ;
Réserve tous les chefs de demande ainsi que les dépens.
Le présent arrêt a été signé par M. Lacour, président, et par Mme Hanafi, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,
|
CAPP/JURITEXT000046991485.xml | AFFAIRE : N RG No RG 21/01634 - No Portalis DBWB-V-B7F-FTUF
Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-DENIS en date du 19 Août 2021, rg no 20/00094
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 JUILLET 2022
APPELANT :
Monsieur [H] [C] [O]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentant : Me Marius Henri Rakotonirina, avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2021/006874 du 15/04/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)
S.A.R.L. METALDER
Prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentant : Me Lynda Lee Mow Sim-Wu Tao Shee, avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
S.E.L.A.R.L. [W] [X] es qualité de « Administrateur judiciaire » de la « SARL METALDER » prise en la personne de Madame [W] [X]
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentant : Me Lynda Lee Mow Sim-Wu Tao Shee, avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
S.E.L.A.S. EGIDE es qualités de « mandataire judiciaire » de la « SARL METALDER »
[Adresse 4]
[Localité 5]
Non représentée
Clôture : 16 février 2022
DÉBATS : En application des dispositions des articles 786 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 février 2022 en audience publique, devant Alain Lacour, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Monique Lebrun, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 05 mai 2022, mise à disposition prorogée au 5 juillet 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Alain Lacour
Conseiller : Philippe Bricogne
Conseiller : Laurent Calbo
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 05 Juillet 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Monsieur [H] [O] a été embauché le 28 mai 2007 par la S.A.R.L. Metalder suivant contrat à durée indéterminée en qualité d'ouvrier professionnel au coefficient 102 moyennant un salaire brut mensuel de 1.451,71 €.
2. Par lettre datée du 23 janvier 2020, Monsieur [H] [O] a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur.
3. Par jugement du tribunal mixte de commerce de Saint-Denis du 5 février 2020, la S.A.R.L. Metalder a été placée en redressement judiciaire.
4. Par requête du 14 mai 2020, Monsieur [H] [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Denis en requalification de la rupture de son contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement de diverses indemnités.
5. Par jugement du 19 août 2021, le conseil a :
- dit que la prise d'acte de Monsieur [H] [O] s'analyse en une démission,
- débouté Monsieur [H] [O] de toutes ses demandes,
- condamné Monsieur [H] [O] à payer à la S.A.R.L. Metalder les sommes de :
* 4.756,00 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
* 1.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- débouté la S.A.R.L. Metalder du surplus de ses demandes,
- ordonné l'exécution provisoire suivant l'article R. 1454-14 du code du travail,
- condamné Monsieur [H] [O] aux dépens.
6. Par déclaration parvenue au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion le 20 septembre 2021, Monsieur [H] [O] a interjeté appel de cette décision.
7. Par ordonnance du 4 octobre 2021, le président de la chambre civile a fixé l'affaire à bref délai.
8. Monsieur [H] [O] ayant entre-temps régularisé un deuxième appel, les instances no 21/1700 et 21/1634 ont été jointes sous ce dernier numéro par ordonnance du président de la chambre du 11 octobre 2021.
9. Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 4 novembre 2021, Monsieur [H] [O] demande à la cour de :
- déclarer recevable et bien fondé son appel,
- infirmer le jugement entrepris,
- statuant à nouveau,
- requalifier la prise d'acte de son contrat de travail en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamner la S.A.R.L. Metalder au paiement des sommes suivantes :
? 8.061,73 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,
? 228,80 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés,
? 4.756,00 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
? 25.000.00 € au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamner la S.A.R.L. Metalder au paiement de la somme de 3.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, dont distraction au profit de Maître Marius RAKOTONIRINA.
10. À l'appui de ses prétentions, Monsieur [H] [O] fait en effet valoir :
- que sa prise d'acte est fondée sur une absence de paiement des cotisations au service de la médecine du travail, une absence de visite de reprise à la suite d'un arrêt de travail et un refus d'aménager son poste malgré les préconisations de la médecine du travail, tous faits avérés,
- que les manquements de la S.A.R.L. Metalder à ses obligations sont réels et sérieux.
11. Dans leurs dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 9 février 2022, la S.A.R.L. Metalder et son administrateur judiciaire la S.E.L.A.R.L. [W] [X] demandent à la cour de :
- prononcer la mise hors de cause de la SELARL [W] [X], sa mission d'administrateur judiciaire de la S.A.R.L. Metalder ayant pris fin le 3 novembre 2021, suite à la désignation de la S.E.L.A.S. Egide en qualité de commissaire à l'exécution du plan,
- dire et juger Monsieur [H] [O] mal fondé en son appel du jugement entrepris,
- en conséquence,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- débouter Monsieur [H] [O] de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples et contraires,
- condamner Monsieur [H] [O] au paiement de la somme de 3.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens tant de première instance que d'appel, dont distraction au profit de Maître Lynda LEE MOW SIM, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
12. À l'appui de leurs prétentions, la S.A.R.L. Metalder et la S.E.L.A.R.L. [W] [X] font en effet valoir :
- que les allégations portées contre la S.A.R.L. Metalder sont fausses, bien que des difficultés économiques aient contraint l'employeur à solliciter l'ouverture d'un redressement judiciaire,
- qu'il appartient à Monsieur [H] [O] de rapporter la preuve des faits allégués, ce qu'il ne fait pas, et de caractériser leur gravité, rendant impossible la poursuite du contrat de travail,
- que l'employeur n'a pas besoin de démontrer un préjudice pour obtenir l'indemnité de préavis qui lui est due.
13. L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 16 février 2022.
14. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'irrecevabilité des conclusions des intimées
15. L'article 905-2 du code de procédure civile dispose en son 2ème alinéa que "l'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office par ordonnance du président de la chambre saisie ou du magistrat désigné par le premier président, d'un délai d'un mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué".
16. En l'espèce, autorisées à produire une note en délibéré sur la recevabilité de leurs conclusions, les intimées ont estimé qu'aucune considération d'urgence ne commandait le choix de l'orientation du dossier à bref délai, en témoignent les conclusions de Monsieur [H] [O] tendant au rabat de l'ordonnance de clôture pour conclure à nouveau et, subsidiairement, elles sollicitent qu'il soit fait application du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile.
17. Monsieur [H] [O] a déposé ses conclusions au greffe via RPVA le 4 novembre 2021.
18. La S.A.R.L. Metalder et la S.E.L.A.R.L. [W] [X] n'ont répliqué que par conclusions déposées au greffe via RPVA le 9 février 2022, alors qu'elles disposaient d'un délai expirant le 4 décembre 2021 pour le faire.
19. Les considérations des intimées sont inopérantes, même s'il pourra être fait application des dispositions de l'article 954 alinéa 6 du code de procédure civile aux desquelles "la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs".
20. Les conclusions de la S.A.R.L. Metalder et de la S.E.L.A.R.L. [W] [X] seront donc déclarées irrecevables.
Sur la demande de révocation de l'ordonnance de clôture
21. L'article 803 du code de procédure civile dispose en son 1er alinéa que "l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue".
22. En l'espèce, dans des conclusions du 21 février 2022, Monsieur [H] [O] plaide qu'il "n'a pas été en mesure de faire valoir ses moyens en défense à l'encontre des écritures de la partie adverse alors que les conséquences peuvent être importantes pour lui".
23. Outre le fait que, ce faisant, Monsieur [H] [O] ne caractérise pas la cause grave susceptible de conduire la cour à faire droit à sa demande de révocation de l'ordonnance de clôture, l'irrecevabilité prononcée à l'encontre des conclusions des intimées la rend sans objet.
Sur la rupture du contrat de travail
24. L'article L. 1231-1 du code du travail dispose en son 1er alinéa que "le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié, ou d'un commun accord, dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre".
25. Aux termes de l'article L. 1237-2, "la rupture d'un contrat de travail à durée indéterminée à l'initiative du salarié ouvre droit, si elle est abusive, à des dommages et intérêts pour l'employeur.
En cas de litige, le juge se prononce conformément aux dispositions de l'article L. 1235-1".
26. L'article L. 1235-1 prévoit que le juge "forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles (...). Si un doute subsiste, il profite au salarié".
27. Il en résulte que le salarié peut prendre acte de la rupture de son contrat de travail lorsqu'il reproche à son employeur des manquements à ses obligations essentielles, d'une gravité telle que, pour lui, les relations contractuelles ne peuvent plus se poursuivre. À défaut, la prise d'acte est imputable au salarié et produit les effets d'une démission. La prise d'acte entraîne la cessation immédiate du contrat de travail. Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de son employeur.
28. En l'espèce, Monsieur [H] [O] a, par lettre recommandée avec avis de réception du 23 janvier 2020, notifié à son employeur une prise d'acte de la rupture de son contrat de travail en reprochant à la S.A.R.L. Metalder les faits suivants : absence de paiement des cotisations au service de la médecine du travail, absence de visite de reprise à la suite d'un arrêt de travail et refus d'aménager son poste malgré les préconisations de la médecine du travail.
29. Monsieur [H] [O] produit à cet égard deux courriers du contrôleur du travail :
- l'un du 31 octobre 2019 dans lequel il lui est confirmé qu'à la suite d'un contrôle de la S.A.R.L. Metalder, cette dernière a reçu des "observations" qui ont conduit le contrôleur à faire un signalement au procureur de la République aux fins d'ouverture d'une procédure collective de l'entreprise compte tenu des "problèmes récurrents que les salariés constatent depuis plusieurs mois (retards de paiement des salaires, défaut de cotisation à la caisse de congés payés du bâtiment, etc)".
- l'autre du 6 janvier 2020 dans lequel le salarié est informé de ce que la S.A.R.L. Metalder "ne paie plus ses cotisations au service de médecine du travail depuis près d'un an. Dans ces conditions, les examens médicaux ne peuvent plus être réalisés par ce service et notamment votre visite d'aptitude qui est un préalable à toute reprise de votre travail dans l'établissement".
30. Les premiers juges ont toutefois pu relever l'existence d'attestations de suivi du médecin du travail concernant des visites médicales datant du 18 février 2019, du 11 mars 2019 et du 28 juin 2019, ainsi que des avis de virement par l'employeur en faveur de la médecine du travail le 22 février 2019 et le 27 janvier 2020 et des fiches d'intervention établissant qu'il a bien tenu compte des préconisations du médecin du travail, à savoir "aménagement de poste, pas de port de charge de plus de 10 kg, tâches à activité physique modérée", à la suite de son accident du travail du 7 février 2019.
31. Une visite médicale était programmée pour Monsieur [H] [O] le 4 février 2020, soit dans le délai de huit jours prévu à l'article R. 4624-31 du code du travail suivant la fin de son arrêt de travail prévue le 1er février 2020.
32. Si la S.A.R.L. Metalder a connu des difficultés financières l'ayant conduite à un redressement judiciaire et pouvant expliquer le retard pris dans le paiement des cotisations au service de la médecine du travail, sa situation était régularisée au moment de la prise d'acte de Monsieur [H] [O] qui a toujours pu bénéficier des services de la médecine du travail, notamment après son accident du travail.
33. Le choix de Monsieur [H] [O] a procédé d'une intention délibérée qui n'est pas imputable à l'employeur.
34. Il conviendra, dans ces conditions, de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que la prise d'acte de Monsieur [H] [O] s'analyse en une démission et l'a débouté de toutes ses demandes.
Sur l'indemnité forfaitaire de préavis
35. Si, lorsque le salarié démissionnaire n'exécute pas ou n'exécute que partiellement le préavis, l'employeur est en droit de lui réclamer une indemnité compensatrice sans avoir à faire la preuve d'un préjudice particulier, ce n'est qu'à la condition que ce préavis soit prévu par le contrat de travail, un accord collectif ou les usages de la profession.
36. En l'espèce, tel n'est pas le cas du contrat de travail de Monsieur [H] [O], de sorte que le conseil ne pouvait pas, sur le seul fondement des dispositions de l'article L. 1234-1 du code du travail, condamner le salarié à payer une indemnité de préavis à la S.A.R.L. Metalder qui ne produit par ailleurs aucun accord collectif, ni ne fait état d'aucun usage professionnel, ni ne caractérise aucun préjudice particulier à cet égard.
37. Ce chef du jugement sera donc infirmé.
Sur les dépens
38. Chacune des parties conservera la charge des dépens d'appel qu'elle aura personnellement exposés.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
39. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la partie condamnée aux dépens prend en charge les frais irrépétibles exposés par la partie adverse dans les proportions que le juge détermine.
40. En l'espèce, l'équité commande de ne pas faire application de ces dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par arrêt mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du Code de procédure civile,
Déclare irrecevables les conclusions déposées au greffe via RPVA le 9 février 2022 par la S.A.R.L. Metalder et la S.E.L.A.R.L. [W] [X],
Dit n'y avoir lieu à révocation de l'ordonnance de clôture,
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a condamné Monsieur [H] [O] à payer à la S.A.R.L. Metalder la somme de 4.756,00 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
Statuant à nouveau de ce chef,
Déboute la S.A.R.L. Metalder de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis,
Dit que chacune des parties conservera la charge des dépens d'appel qu'elle aura personnellement exposés,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par M. Lacour président, et par Mme Grondin, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991484.xml | AFFAIRE : No RG 21/00653 - No Portalis DBWB-V-B7F-FREW
Code Aff. :
ARRÊT N AP
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT DENIS en date du 08 Mars 2021, rg no F19/00406
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 JUILLET 2022
APPELANTE :
Madame [T] [R] [G] épouse [F]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Emilie Maignan, avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
Association CLUB ANIMATION PREVENTION
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Laura-eva Lomari, avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
Clôture : 7 mars 2022
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 804 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 Mai 2022 devant la cour composée de :
Président : M. Alain Lacour
Conseiller : M. Laurent Calbo
Conseiller : Madame Aurélie Police
Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.
A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 05 Juillet 2022.
ARRÊT : mis à disposition des parties le 05 Juillet 2022
Greffier lors des débats : Mme Delphine Grondin
Exposé du litige :
Mme [G] épouse [F] a été embauchée par l'association Club Animation Prévention en qualité d'accompagnatrice scolaire, selon contrat à durée indéterminée intermittent du 12 septembre 2003, modifié par avenants du 4 novembre 2003 et du 13 novembre 2007.
Selon contrat à durée indéterminée intermittent du 1er octobre 2008, Mme [G] épouse [F] a été embauchée au poste d'animateur de prévention sur le collège [4]. Par avenant du 17 août 2016, les parties ont convenu que le contrat serait conclu pour une durée indéterminée à temps partiel et que la salariée exercerait la fonction de conseillère d'insertion professionnelle.
Mme [G] épouse [F] a été licenciée pour inaptitude.
Sollicitant l'indemnisation de son préjudice suite à des faits de harcèlement moral commis par son employeur et un rappel de salaires, Mme [G] épouse [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Denis de la Réunion qui a, par jugement du 8 mars 2021 :
- dit que Mme [G] épouse [F] a connu des évolutions de carrière, voire des promotions tout au long de sa carrière professionnelle,
- dit que les faits de harcèlement ne sont nullement démontrés,
- dit que ses salaires sont conformes à ses contrats de travail,
- débouté Mme [G] épouse [F] de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
- débouté Mme [G] épouse [F] de sa demande de rappel de salaires,
- débouté Mme [G] épouse [F] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté l'association Club Animation Prévention de sa demande reconventionnelle,
- mis les dépens à la charge de Mme [G] épouse [F].
Appel de cette décision a été interjeté par Mme [G] épouse [F] le 16 avril 2021 ;
Vu les dernières conclusions notifiées par Mme [G] épouse [F] le 30 juillet 2021 ;
Vu les conclusions notifiées par l'association Club Animation Prévention le 18 octobre 2021 ;
Pour plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées ainsi qu'aux développements infra.
A titre liminaire, il convient de constater que le licenciement pour inaptitude, dont la date n'est pas précisée, n'est pas contesté.
Sur la demande de dommages et intérêts du fait du harcèlement moral
Vu les articles L.1152-1 à L.1152-3 et L.1154-1 du code du travail ;
Aux termes de l'article L. 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Mme [G] épouse [F] sollicite l'indemnisation du préjudice dont elle prétend avoir été victime, reprochant à son employeur de l'avoir humiliée en réunion devant le reste du personnel, en lui faisant des reproches et critiques injustifiées, de l'avoir menacé de perdre son emploi, de ne pas lui avoir accordé le poste promis, l'ayant attribué à une autre salariée qui disposait d'une ancienneté moindre, mais augmentant néanmoins sa charge de travail. Elle reproche enfin à son employeur de ne pas avoir modifié la mention quant à son poste sur ses bulletins de salaire suite à la signature de l'avenant de 2016 et ne pas l'avoir rémunérée conformément aux termes de son contrat. Elle considère que ces agissements ont eu pour effet de dégrader son état de santé.
Pris dans leur ensemble, ces éléments de fait laissent supposer l'existence d'un harcèlement. Il incombe par conséquent à la société de prouver que ces agissements n'étaient pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
S'agissant des reproches et critiques qui auraient été formulés à l'encontre de la salariée, notamment quant à des objectifs qui n'auraient pas été atteints, l'association relève qu'aucune date ou propos précis ne sont allégués et conteste avoir agi de la sorte à son égard.
Par courrier du 24 novembre 2014, Mme [G] épouse [F] écrivait : « Suite à notre entretien du 9 septembre 2014, et en tant qu'employée, je vous fais part à nouveau de mon ressenti et mes interrogations face à l'attitude de certains responsables à mon égard.
Vous ayant déjà évoqué mon ressenti et les difficultés qui en découlent de cette communication (dont les collègues ont pu témoigné) utilisée dans l'entreprise qui peut mener à la longue à des problèmes bien plus graves.
Je crois avoir droit, en tant qu'employée du CAP depuis sept. 2003 avoir droit à tout le respect que je mérite. Comptant sur votre soutien pour que cela cesse, je vous prie de croire, Monsieur, à mes sincères salutations. »
Ce seul courrier ne permet en effet pas d'établir que des propos désobligeants auraient été tenus à l'encontre de la salariée, faisant seulement état d'un ressenti et faisant surtout référence au poste qu'elle sollicitait dans son second courrier du même jour.
De surcroît, contrairement à ce que Mme [G] épouse [F] soutient, l'association a donné suite à ce courrier en date de 4 février 2015, lui proposant de la recevoir en entretien.
De même, la menace qui aurait été proférée quant à une éventuelle suppression de poste en raison d'un rendement moindre, contestée par l'employeur, n'est corroborée par aucun élément. L'attestation de Mme [Y] est sans intérêt pour la résolution du présent litige, celle-ci se contentant d'indiquer avoir été interrogée par un supérieur, durant un arrêt maladie de Mme [G], quant à savoir si elle s'en sortait sans la présence de celle-ci. Si Mme [Y] dit s'être sentie mal : « comme des personnes qui ont dû casser du sucre sur le dos de leur cheffe. », cela ne ressort pas des propos tels que rapportés.
Les griefs allégués au titre d'humiliations et menaces ne sont dès lors pas caractérisés.
S'agissant du refus injustifié de l'employeur d'accorder à la salariée un poste à temps plein, il ressort en effet du second courrier du 24 novembre 2014 que Mme [G] épouse [F] sollicite une réponse claire quant à une demande de poste formulée en avril et rappelle au soutien son ancienneté, ses formations et son sérieux dans les tâches qui lui incombent. Dans ses conclusions, elle indique que Mme [D] a obtenu un poste à temps plein au sein de la structure au mois d'août 2014 alors que cette dernière disposait d'une ancienneté et d'une formation moindres.
L'association réfute là-encore ce grief, faisant remarquer que la salariée a régulièrement progressé au sein de la structure malgré de nombreux arrêts-maladie mais qu'une embauche à temps plein n'a pas été possible faute de budget suffisant.
Il ressort en effet des différents contrats et avenants que Mme [G] épouse [F] a obtenu des postes lui octroyant davantage de responsabilités et qu'elle a obtenu la promotion sollicitée en août 2016, étant nommée conseillère d'insertion professionnelle. S'il est exact que son contrat est demeuré à temps partiel, alors que Mme [D] a été promue sur un poste à temps plein, il apparaît toutefois qu'aucune précision n'est apportée quant au poste occupé par cette dernière préalablement à sa promotion. Les griefs ne sont dès lors pas constitutifs d'un harcèlement.
Enfin, s'agissant de l'absence de prise en compte de sa promotion sur ses bulletins de salaire, l'association fait valoir que ceux-ci sont conformes au contrat.
L'association soutient avoir pris en compte le coefficient convenu contractuellement afin d'établir les bulletins de paie de la salariée. Mme [G] épouse [F] communique uniquement ses bulletins du mois de décembre 2017, décembre 2018 et de l'année 2019, jusqu'au mois d'octobre. Si le coefficient n'est pas précisé sur les bulletins de paie, il apparaît en revanche que la mention relative au poste de conseillère d'insertion professionnelle est valablement indiquée. Ainsi, Mme [G] épouse [F] ne démontre pas avoir assumé de nouvelles responsabilités sans bénéficier des avantages financiers correspondants, comme il ser vu infra. Ce grief n'apparaît pas davantage caractérisé.
En conséquence, les faits de harcèlement moral ne sont pas caractérisés et Mme [G] épouse [F] sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre. Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur la demande de rappel de salaires
Mme [G] épouse [F] soutient n'avoir pas été rémunérée selon le bon coefficient à compter du mois d'août 2016, et sollicite la somme de 45 696,57 euros à titre de rappel de salaires.
Aux termes de l'avenant du 17 août 2016, il est indiqué que Mme [F] percevra un salaire mensuel brut de 1 363,51 euros correspondant à 104 heures de travail mensuel et au groupe de classification niveau C, coefficient 280. Au vu de la pièce no10, Mme [G] épouse [F] considère relever du groupe D, coefficient 300.
Dans cette même pièce, incompréhensible quant aux modalités de calcul retenues, Mme [G] épouse [F] n'expose pas quelles étaient ses fonctions exactes au sein de l'association et le motif pour lequel elle devrait être classée dans la catégorie supérieure.
Il ressort du contrat de travail que Mme [F] était, en sa qualité de conseillère d'insertion professionnelle, chargée de « conseiller et de proposer des actions d'accompagnement professionnel afin de favoriser l'emploi et l'insertion professionnel du public IEJ et ou autres dispositifs du CAP ». Dans l'annexe I relative aux classifications et salaires de la convention collective nationale des métiers de l'éducation, de la culture, des loisirs et de l'animation agissant pour l'utilité sociale et environnementale, au service des territoires (ÉCLAT) du 28 juin 1988, étendue par arrêté du 10 janvier 1989, il est indiqué que les salariés relevant du groupe D, coefficient 300, participent à l'élaboration des procédures de l'équipe ou du service et ont des fonctions de coordination et de contrôle d'autres salariés, ce qui n'est pas démontré en l'espèce.
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [G] épouse [F] de sa demande à ce titre.
Sur la demande reconventionnelle au titre des dommages et intérêts
L'association considère l'appel abusif et sollicite l'octroi de dommages et intérêts, sur le fondement de l'article 559 du code de procédure civile.
Toutefois, le droit d'exercer une action en justice ou une voie de recours ne dégénère en abus que s'il révèle de la part de son auteur une intention maligne, une erreur grossière ou une légèreté blâmable dans l'appréciation de ses droits. En l'espèce, la preuve de cet abus n'est pas rapportée de sorte que la demande de dommages et intérêts doit être rejetée.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement,
Confirme le jugement rendu le 8 mars 2021 par le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Déboute l'association Club Animation Prévention de sa demande à titre de dommages et intérêts pour appel abusif ;
Condamne Mme [G] épouse [F] à payer à l'association Club Animation Prévention la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute Mme [G] épouse [F] du surplus de ses demandes ;
Condamne Mme [G] épouse [F] aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par M. Lacour, président, et par Mme Grondin, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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DE SAINT-DENIS
Chambre civile TGI
No RG 21/01518 - No Portalis DBWB-V-B7F-FTMI
Madame [B] [C] épouse [W]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentant : Me Aurélien ROCHAMBEAU de l'AARPI ROBERT & ROCHAMBEAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2021/006130 du 28/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)
APPELANTMonsieur [V] [I]
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentant : Me Alain ANTOINE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Organisme CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA REUNION
[Adresse 2]
[Localité 4]
PARTIE(S) INTERVENANTE(S) :
Société LA MEDICAL INSURANCE COMPANY DESIGNATED ACTIVITY COMPANY (MIC DAC), prise en la personne de son représentant légal en France, la SAS Branchet, représentant : Me Alain ANTOINE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
ORDONNANCE SUR INCIDENT No22/218
DU 05 JUILLET 2022
Nous, Patrick CHEVRIER, conseiller de la mise en état ;
Assisté de Alexandra BOCQUILLON, FF,
FAITS ET PROCÉDURE
Vu la déclaration d'appel déposée le 19 août 2021, à l'encontre du jugement prononcé par le tribunal judiciaire de Saint-Pierre le 23 février 2021 par Madame [C] [B], épouse [W], dans un litige l'opposant à Monsieur [I] [V] et la Caisse générale de sécurité sociale de la Réunion (CGSSR) ;
Vu l'ordonnance en date du 24 août 2021 renvoyant l'affaire à la mise en état ;
Vu les premières conclusions d'appelante déposées par RPVA le 5 octobre 2021 ;
Vu la signification de la déclaration d'appel et des conclusions de l'appelante à la CGSSR par acte d'huissier délivré le 26 octobre 2021 ;
Vu les conclusions d'intimé de Monsieur [V] [I], déposées au greffe de la cour le 6 janvier 2021 par le RPVA ;
Vu l'avis préalable adressé aux parties par RPVA le 22 mars 2022, puis l'avis du 12 avril 2022, tendant à recueillir leurs observations sur l'éventuelle irrecevabilité des conclusions de l'intimé avant le 15 mai 2022, afin de statuer hors audience à la mise en état du 23 juin pour rendre la décision le 5 juillet 2022 ;
Vu le message de l'avocat de l'intimé en date du 16 juin 2022 ;
Sur l'irrecevabilité des conclusions des intimés :
Aux termes de l'article 909 du code de procédure civile, l'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant prévues à l'article 908 pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué.
En l'espèce, Monsieur [I] a constitué avocat le 8 septembre 2021, soit avant le dépôt des conclusions de l'appelante par RPVA au greffe de la cour d'appel.
Demeurant sur le ressort de la cour d'appel de céans, l'intimé disposait donc d'un délai de trois mois, expirant le 5 janvier 2022 pour adresser ses conclusions par RPVA au greffe de la cour et aux parties constituées, notamment l'appelant.
Les conclusions de l'intimé, adressées le 6 janvier 2022, ont donc été transmises au-delà du délai susvisé, le 5 janvier n'étant ni un jour férié ni un jour de fin de semaine.
En conséquence, les conclusions d'intimés doivent être déclarées irrecevables comme tardives.
PAR CES MOTIFS
Nous Patrick CHEVRIER, président de chambre chargé de la mise en état, statuant publiquement, par décision réputée-contradictoire
DECLARONS IRRECEVABLES les conclusions d'intimée et les pièces y annexées ;
LAISSONS les dépens de l'incident à la charge des parties qui les ont exposés ;
CLOTURONS l'affaire le 05 juillet 2022
FIXONS l'affaire à l'audience collégiale du 10 février 2023 à 8 heures 30.
La présente ordonnance a été signée par Le conseiller de la mise en état et le greffier.
Le greffier
Alexandra BOCQUILLON signé Le conseiller de la mise en état
Patrick CHEVRIER
EXPÉDITION délivrée le 05 Juillet 2022 à :
Me Aurélien ROCHAMBEAU de l'AARPI ROBERT & ROCHAMBEAU, vestiaire : 199
Me Alain ANTOINE, vestiaire : 38
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BASSE - TERRE
No RG 22/715
No Portalis DVB7-V-B7G-DOZX
ORDONNANCE DU 12 JUILLET 2022
Dans l'affaire entre d'une part :
Monsieur [H] [E] [S]
né le [Date naissance 1] 1983 à [Localité 3] (Vénézuela)
de nationalité Vénézuélienne (numéro de passeport 114547862)
se déclarant hébergé chez Monsieur [U] [V] [F] [B], sis « [Adresse 4]
assisté de Madame [A] [Z], interprète en langue espagnole
comparant, assisté de Maître Laurent HATCHI, avocat au Barreau de la Guadeloupe,
Appelant le 11 juillet 2022 à 11h33 d'une ordonnance rendue le 9 juillet 2022 à 12h32 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre ;
et d'autre part,
Monsieur le Préfet de Saint-Barthélémy et Saint-Martin,
non comparant et non représenté,
Le ministère Public
Représenté par Monsieur Eric RAVENET, substitut général,
*************
Nous, Emmanuel PLANQUE, conseiller à la Cour d'appel de Basse-Terre, délégué par ordonnance de Monsieur le premier président pour statuer en matière de rétention administrative, assistée de Monsieur Armélida RAYAPIN, greffier,
Vu le procès-verbal d'interpellation de Monsieur [S] [H] [E] le 4 juillet 2022 à 21h30 ;
Vu le procès-verbal de notification du placement en mesure de retenue de l'intéressé le 4 juillet 2022 à 22h20 ;
Vu l'arrêté du préfet de Saint-Barthélémy et Saint-Martin no97821250SM du 21 septembre 2021 prononçant l'obligation de quitter sans délai le territoire français de Monsieur [S] [H] [E], avec interdiction de retour pendant une durée de deux ans ;
Vu la décision du préfet de Saint-Barthélémy et Saint-Martin no97822144SM de placement au centre de rétention administrative de l'intéressé en date du 5 juillet 2022 ;
Vu le procès-verbal de notification de ses droits en rétention en date du 5 juillet 2022 à 17h30 ;
Vu l'ordonnance du 9 juillet 2022 rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre ordonnant la prolongation de la rétention administrative de l'intéressé pour une durée maximale de vingt-huit jours ;
Vu l'appel interjeté à l'encontre de cette ordonnance suivant courriel du 11 juillet 2022 à 11 heures 33 par Monsieur [S] [H] [E] ;
A l'audience qui s'est tenue publiquement au palais de justice de BASSE-TERRE le mardi 12 juillet 2022 à 11 heures 00, ont été entendus Monsieur l'avocat général et Monsieur [H] [E], assisté de son conseil ;
Suivant la déclaration d'appel précitée, Monsieur [H] [E] demande sa remise en liberté et, à défaut, son placement sous le régime de l'assignation à résidence puisqu'il est détenteur d'un passeport et justifie d'un hébergement à Saint-Martin.
Il explique qu'il a souhaité faire une demande d'asile dès son interpellation par les services de la Police aux frontières alors qu'il s'apprêtait à quitter le territoire de l'île de Saint-Martin, qu'il l'a formalisée le 11 juillet 2022 auprès du greffe du Centre de rétention administrative et soutient que la procédure l'ayant placé en rétention administrative est dès lors irrégulière.
Son conseil a par ailleurs fait valoir qu'une précédente demande d'asile formulée en novembre 2021 serait toujours en cours d'examen, de sorte qu'il ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire national, a fortiori d'une procédure de rétention administrative.
Monsieur l'avocat général a demandé la confirmation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ordonnant la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [H] [E].
1/ Sur la recevabilité de l'appel,
Conformément aux dispositions de l'article R743-10 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui statue sur une demande relative à la rétention d'un étranger est susceptible d'appel dans les 24 heures de son prononcé par déclaration motivée.
Le délai prévu est calculé et prorogé conformément aux articles 640 et 642 du Code de procédure civile.
L'ordonnance du juge des libertés et de la détention de POINTE-À-PITRE querellée a été rendue le samedi 9 juillet 2022 à 12h32, de sorte que le délai d'appel expirant en principe le dimanche 10 juillet 2022 à 12h32 a été prorogé de vingt-quatre heures.
L'appel de Monsieur [H] [E] ayant été formé le 11 juillet 2022 à 11h33 est donc recevable.
2/ Sur la mesure de rétention administrative,
Aux termes du premier alinéa de l'article L612-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), « L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. »
L'article L612-2 du même Code dispose que « par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire (notamment s'il) existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ».
L'article L612-3 précise que :
« Le risque mentionné au 3o de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :
1o L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
2o L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
3o L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;
4o L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;
5o L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;
6o L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;
7o L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ;
8o L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3o de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5. »
L'article L731-1 dispose quant à lui que :
« L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants :
1o L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins d'un an auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ;
2o L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction de retour sur le territoire français prise en application des articles L. 612-6, L. 612-7 et L. 612-8 ;
3o L'étranger doit être éloigné pour la mise en oeuvre d'une décision prise par un autre État, en application de l'article L. 615-1 ;
4o L'étranger doit être remis aux autorités d'un autre Etat en application de l'article L. 621-1 ;
5o L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction de circulation sur le territoire français prise en application de l'article L. 622-1 ;
6o L'étranger fait l'objet d'une décision d'expulsion ;
7o L'étranger doit être éloigné en exécution d'une peine d'interdiction judiciaire du territoire prononcée en application du deuxième alinéa de l'article 131-30 du code pénal ;
8o L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction administrative du territoire français.
L'étranger qui, ayant été assigné à résidence en application du présent article, ou placé en rétention administrative en application des articles L. 741-1 ou L. 741-2, n'a pas déféré à la décision dont il fait l'objet ou, y ayant déféré, est revenu en France alors que cette décision est toujours exécutoire, peut être assigné à résidence sur le fondement du présent article. »
L'article L740-1 explique que « l'autorité administrative peut, dans les conditions prévues au présent titre, placer en rétention un étranger pour l'exécution de la décision d'éloignement dont il fait l'objet. »
L'article L741-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que :
« L'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.
Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3. »
L'article L741-3 du même Code précise que « un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet. »
Aux termes de l'article L521-1 du CESEDA, « tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente qui enregistre sa demande et procède, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, à la détermination de l'Etat responsable en application du règlement (UE) no 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ou en application d'engagements identiques à ceux prévus par le même règlement. »
L'article L521-7 prévoit quant à lui que « lorsque l'enregistrement de sa demande d'asile a été effectué, l'étranger se voit remettre une attestation de demande d'asile dont les conditions de délivrance et de renouvellement sont fixées par décret en Conseil d'Etat. La durée de validité de l'attestation est fixée par arrêté du ministre chargé de l'asile.
La délivrance de cette attestation ne peut être refusée au motif que l'étranger est démuni des documents et visas mentionnés à l'article L. 311-1. Elle ne peut être refusée que dans les cas prévus aux c ou d du 2o de l'article L. 542-2.
Cette attestation n'est pas délivrée à l'étranger qui demande l'asile à la frontière ou en rétention. »
L'article L541-2 précise en effet que « l'attestation délivrée en application de l'article L. 521-7, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la Cour nationale du droit d'asile statuent. »
Il ressort de la procédure que Monsieur [S] [H] [E] est de nationalité vénézuélienne et, selon ses déclarations, vit sur l'île de Saint-Martin depuis décembre 2018, où il travaille, en partie hollandaise comme en partie française.
Il a déclaré avoir déposé en 2018, puis en novembre 2020, des demandes d'asiles qui ont été rejetées, le dernier refus en date du 18 juin 2021 lui ayant été notifié en juillet 2021.
Il a expliqué qu'il avait à nouveau formé une demande d'asile le 5 novembre 2021 et qu'il n'avait pas connaissance de ses suites.
Il ne fournit toutefois aucun commencement de preuve à cet égard, étant rappelé en outre que lors de la notification de ses droits au moment de son placement en rétention administrative à Saint-Martin, Monsieur [H] [E] a indiqué expressément que « il ne désirait pas déposer de demande d'asile ».
Ainsi, il n'apporte en réalité aucun élément de nature à établir qu'il avait l'autorisation de séjourner sur le territoire guadeloupéen, ce d'autant qu'il a fait l'objet le 21 septembre 2021 d'un arrêté du préfet de Saint-Barthélémy et Saint-Martin prononçant à son endroit l'obligation de quitter sans délai le territoire français et lui faisant interdiction de retour pendant une durée de deux ans, qu'il semble toutefois ne pas avoir reçu.
En tout état de cause, il a admis avoir aucune attache familiale ou personnelle à Saint-Martin.
En effet, bien qu'il expose dans son mémoire être hébergé chez Monsieur [U] [V] [F] [B], sis « Résidence [Adresse 4] », [Adresse 5], il avait déclaré initialement résider en colocation côté hollandais près d'une usine d'électricité à [Localité 2].
Il a par ailleurs expliqué qu'il avait le projet de se rendre à Saint John's, île vierge des États-Unis, lorsqu'il s'est fait interpeller le 4 juillet 2022 alors qu'il s'apprêtait à quitter ce territoire par la mer.
Ce n'est donc qu'à la suite de la décision querellée du juge des libertés et de la détention en date du 9 juillet 2022 qu'il a pris la décision de demander l'asile le surlendemain, tout en faisant appel de cette décision sur le fondement des articles L521-1 et L541-2 du CESEDA.
Cette demande apparaît dès lors dilatoire, et semble n'avoir été formée que dans le but de faire échec ou de retarder la mesure d'éloignement dont il faisait l'objet.
Il y a lieu dès lors de confirmer la décision querellée en ce qu'elle a déclaré la procédure de placement en rétention régulière.
3/ Sur la prolongation de la mesure de rétention administrative,
L'article L742-1 du CESEDA dispose que :
« Le maintien en rétention au-delà de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, dans les conditions prévues au présent titre, par le juge des libertés et de la détention saisie à cette fin par l'autorité administrative. »
Compte-tenu de ce qui précède, il est établi qu'il existe pour Monsieur [H] [E] des perspectives raisonnables d'éloignement vers son pays d'origine et que cette reconduite peut s'exécuter à bref délai, précisément le 28 juillet 2022 ainsi que l'autorité administrative en justifie.
Par ailleurs, comme précisé supra, l'hébergement allégué par l'intéressé apparaît être de circonstance et son passeport bien que valide n'est actuellement ni en sa possession, ni en possession des services de la Police aux frontières, puisque détenu par une amie selon ses propres déclarations.
Ainsi, Monsieur [H] [E] ne justifie pas de conditions de nature à permettre une assignation à résidence qui garantirait efficacement l'exécution effective de l'obligation de quitter le territoire français qui lui a été notifiée.
Il convient en conséquence de faire droit à la requête de Monsieur le préfet tendant à voir prolonger la mesure de rétention administrative dans les conditions prévues à l'article L742-3 du CESEDA, soit pour une période de vingt-huit jours à compter de l'expiration du délai initial de quarante-huit heures.
PAR CES MOTIFS,
Nous, Emmanuel PLANQUE, conseiller, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président, assistée de Armélida RAYAPIN, greffier,
Statuant publiquement, par décision réputée contradictoire et rendue en dernier ressort, après débats en audience publique,
Déclarons recevable l'appel de Monsieur [H] [E] [S] formé à l'encontre de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Pointe-à-Pitre en date du 9 juillet 2022 ;
Confirmons l'ordonnance déférée du juge des libertés et de la détention de Pointe-à-Pitre en date du 9 juillet 2022 en ce qu'elle a déclaré la procédure régulière et a ordonné la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [H] [E] [S], pour une durée maximale de vingt-huit jours ;
Disons que la présente ordonnance sera notifiée aux parties intéressées par tout moyen par le greffe de la cour d'appel et sera transmise à Monsieur le procureur général ;
Fait à BASSE-TERRE le 12 juillet 2022 à 14 heures 00
La greffière Le magistrat délégué
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CAPP/JURITEXT000046991453.xml | COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
2ème CHAMBRE CIVILE
ARRET No 440 DU 11 JUILLET 2022
No RG 21/00119
No Portalis DBV7-V-B7F-DI6O
Décision déférée à la cour : Jugement du tribunal mixte de commerce de Basse-terre, décision attaquée en date du 30 octobre 2020, enregistrée sous le no RG No202J00006.
APPELANT :
Monsieur [I] [F]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représenté par Me Loïse Guillaume-Matime, avocat au barreau de Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélémy.
La S.A.S. Banema France
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représentée par Me Harry Durimel de la Selarl Durimel & Bangou, avocat au barreau de Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélémy.
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 799 alinéa 3 du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état, à la demande des parties, a autorisé les avocats à déposer leur dossier au greffe de la chambre civile jusqu'au 23 mai 2022.
Par avis du 23 mai 2022 le président a informé les parties que l'affaire était mise en délibéré devant la chambre civile de la cour composée de :
Madame Corinne Desjardins, présidente de chambre,
Madame Annabelle Clédat, conseillère,
Madame Christine Defoy, conseillère,
qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 11 juillet 2022.
Lors des débats et lors du prononcé Mme Armélida Rayapin, greffière.
ARRET : Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
Signé par Mme Corinne Desjardins, Présidente de chambre et par Mme Armélida Rayapin, greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
Par acte sous seing privé du 04 avril 2019, M. [I] [F] a conclu avec la Sas Banema France un contrat pour le transport d'ouvriers sur des chantiers.
Par courrier daté du 16 mai 2019, la société Banema France a informé M. [F] qu'elle entendait résilier ce contrat à effet du 31 mai.
Par courrier du 12 juillet 2019, M. [F] a mis en demeure la société Banema France de lui régler ses factures impayées. La société Banema France s'est opposée à cette demande en indiquant que les factures correspondaient au double du prix prévu par le contrat. Le 11 octobre 2019, elle a finalement procédé au règlement de la moitié des sommes réclamées au titre des factures 101-1 à 101-8 et 102-1 à 102-7.
Le 27 janvier 2020, M. [F] a assigné la société Banema France devant le tribunal mixte de commerce de Basse-Terre afin de la voir condamner à lui payer :
- 27.560 euros au titre du solde impayé des factures 101-1 à 101-8 et 102-1 à 102-7, outre intérêts au taux légal,
- 143,24 euros au titre de l'intérêt légal pour la période du 28 mai au 11 octobre 2019 sur les factures 101-1 à 101-8,
- 32.04 euros au titre de l'intérêt légal du 13 juin au 11 octobre 2019 pour les factures 102-1 à 102-7,
- 4.000 euros au titre de l'indemnité contractuelle forfaitaire de retard pour les factures 101-1 à 101-8 et 1.112,80 euros pour les factures 102-1 à 102-7,
- 90.726 euros à titre d'indemnisation du délai de préavis,
- 83.600 dollars US à titre de dommages-intérêts pour l'achat de deux bus non amortis,
- 20.000 euros en réparation de son préjudice moral,
- 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
A titre reconventionnel, la société Banema France a demandé au tribunal, après avoir débouté M. [F] de ses demandes :
- de le condamner sous astreinte à lui délivrer des factures rectificatives,
- de le condamner à lui payer 20.000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice moral et 10.000 euros pour procédure abusive.
Par jugement du 30 octobre 2020, exécutoire par provision, le tribunal a :
- rejeté les demandes de M. [F],
- condamné M. [F] à rectifier les factures no101-1 à 101-8 et 102-1 à 102-7 afin que le nombre de trajets facturé corresponde à un trajet aller/retour et non à un trajet aller simple,
- dit qu'en cas d'inexécution de cette rectification dans le délai de deux mois à compter de la signification du jugement il serait redevable d'une astreinte de 50 euros par jour de retard pendant 90 jours,
- dit qu'à défaut d'exécution de cette rectification dans le délai imparti, la société Banema France pourrait saisir le juge de l'exécution aux fins de liquidation de l'astreinte provisoire et de prononcé d'une astreinte définitive,
- rejeté les autres demandes reconventionnelles de la société Banema France,
- condamné M. [F] à payer à la société Banema France la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
M. [F] a interjeté appel de cette décision par déclaration remise au greffe de la cour par voie électronique le 28 janvier 2021, en indiquant expressément que son appel portait sur chacun des chefs de jugement, à l'exception du rejet des autres demandes reconventionnelles de la société Banema France.
En réponse à l'avis du 04 mai 2021 donné par le greffe, M. [F], qui est domicilié à [Localité 7], a fait signifier à l'intimée le 11 juin 2021 la déclaration d'appel et ses conclusions remises au greffe le 24 mai 2021.
La société Banema, dont le siège social est également situé à [Localité 7], a remis au greffe sa constitution d'intimée par voie électronique le 25 juin 2021 et conclu le 11 octobre 2021.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 07 mars 2022 et les parties ont été autorisées à déposer leurs dossiers au greffe jusqu'au 23 mai 2022, date à laquelle la décision a été mise en délibéré au 11 juillet 2022.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
1/ M. [I] [F], appelant :
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 29 décembre 2021 par lesquelles l'appelant demande à la cour :
- de déclarer irrecevables les demandes reconventionnelles de la Sas Banema France,
- d'infirmer les dispositions attaquées du jugement en cause,
- statuant à nouveau :
- de condamner la Sas Banema France à lui payer les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation :
- 27.560 euros au titre du solde impayé des factures 101-1 à 101-8 et 102-1 à 102-7,
- 143,24 euros au titre de l'intérêt légal pour la période du 28 mai au 11 octobre 2019 sur les factures 101-1 à 101-8,
- 32.04 euros au titre de l'intérêt légal du 13 juin au 11 octobre 2019 pour les factures 102-1 à 102-7,
- 4.000 euros au titre de l'indemnité contractuelle forfaitaire de retard pour les factures 101-1 à 101-8 et 1.112,80 pour les factures102-1 à 102-7,
- 1.112,80 euros au titre de l'indemnité contractuelle forfaitaire de retard de règlement des factures 102-1 à 102-7,
- 90.726 euros à titre d'indemnisation du délai de préavis,
- 83.600 dollars US à titre de dommages-intérêts pour l'achat de deux bus non amortis,
- 20.000 euros en réparation de son préjudice moral,
- de condamner la Sas Banema France à lui payer les intérêts au taux légal à compter du 12 octobre 2019 jusqu'au règlement pour les sommes restant dues au titre des factures impayées,
- de condamner la Sas Banema France à lui payer la somme de 6.000 euros au titre de ses frais irrépétibles en première instance et en appel, ainsi qu'aux entiers dépens.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions pour un exposé détaillé des prétentions et moyens.
2/ La Sas Banema France, intimée :
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 06 janvier 2022 par lesquelles l'intimée demande à la cour :
- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré, sauf en ce qu'il a rejeté ses autres demandes reconventionnelles,
- de l'infirmer de ce chef,
- de condamner M. [F] à lui payer les sommes suivantes :
- 20.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi,
- 10.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- de rejeter toutes les demandes, fins et conclusions de M. [F],
- de condamner M. [F] à lui payer la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de la Selarl Durimel & Bangou, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions pour un exposé détaillé des prétentions et moyens.
MOTIFS DE L'ARRET
Sur la recevabilité de l'appel incident :
Conformément aux dispositions de l'article 909 du code de procédure civile, l'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant prévues à l'article 908 pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué.
Ce délai est prolongé d'un mois en vertu de l'article 911-2 pour les parties qui résident à [Localité 7].
L'article 562 rappelle que l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.
Par ailleurs, il est désormais constant qu'en vertu des articles 542 et 954 du code de procédure civile, lorsque l'appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions ni l'infirmation ni l'annulation du jugement, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement, cette disposition étant applicable pour les appels interjetés postérieurement au 17 septembre 2020.
En l'espèce, après avoir reçu notification le 11 juin 2021 des conclusions de l'appelant, la Sas Banema France a régulièrement remis au greffe ses conclusions "responsives no1" le 11 octobre 2021.
Elle a libellé le dispositif de ses écritures dans les termes suivants : "confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal mixte de commerce le 30 octobre 2020, sauf en ce qu'il a rejeté les autres demandes reconventionnelles de la Sas Banema France".
Contrairement à ce que soutient M. [F], il ressort sans ambiguïté de ces termes que la Sas Banema France a formé appel incident à l'encontre du chef de jugement rejetant ses autres demandes reconventionnelles. Elle avait d'ailleurs reproché à ce titre au tribunal mixte de commerce, en page 17 de ses premières conclusions, d'avoir rejeté ses demandes au motif qu'aucun élément ne permettait d'établir le préjudice et le quantifier.
Par ailleurs, une demande expresse tendant à voir infirmer ce chef de jugement figure dans le dispositif de ses dernières conclusions.
En conséquence, son appel incident sera déclaré recevable, tout comme les demandes qu'elle forme à ce titre.
Sur la demande en paiement du solde des factures :
Conformément aux dispositions de l'article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux lui les ont faits.
En l'espèce, le contrat de transport conclu le 4 avril 2019 entre la société Banema France et M. [F] prévoyait dans son article 1 relatif à l'objet du contrat :
"Le contrat de transport concerne le transport de personnes de [Localité 4] et de [Localité 3], ou de tout autre lieu se trouvant sur le même itinéraire, à leur lieu de travail aller/retour du lundi au samedi pour un départ de 6 heures du matin et un retour à 18 heures ou à 21 heures".
S'agissant du prix du transport, l'article 4 disposait :
"Le prestataire établit les factures le 25 du mois en fonction du nombre de personnes transportées. Les factures qui ne sont pas contestées dans les 8 jours suivant réception de la facture seront considérées comme définitives et inviolables. [...]
Le prix est fixé à 8 euros par personne".
Il ressort de la combinaison de ces deux articles que les parties se sont accordées sur le fait que l'objet du contrat était un transport aller/retour et qu'il devait être facturé 8 euros par personne.
Les termes de ce contrat, qui ne nécessitent aucune interprétation dès lors qu'ils sont parfaitement clairs, correspondent en tout point aux négociations pré-contractuelles des parties telles qu'elles ressortent des échanges de courriels entre la société Banema et M. [F] des 29 et 31 mars 2019, produits en pièces 1 et 2 de l'intimée.
En effet, la société Banema avait consulté M. [F] en lui demandant ses tarifs pour le transport d'une trentaine de personnes par jour de [Localité 5] à [Localité 6] et vingt-sept personnes de [Localité 3] à [Localité 6] "aller/retour", ce terme étant expressément indiqué dans le courrier, ce à quoi M. [F] avait répondu que ses "tarifs pour le transport" étaient de "8€/personne".
Dans ces conditions, M. [F] ne pouvait en aucun cas facturer comme il l'a fait à la société Banema France la somme de 8 euros par personne et par trajet, doublant ainsi le montant de la prestation contractuellement prévue.
Il n'y a pas lieu dès lors de suivre M. [F] dans sa démonstration inopérante tendant à prouver qu'il serait fondé à percevoir 8 euros par trajet au motif qu'il aurait lui-même versé 5 euros par personne et par trajet à ses sous-traitants, ceci d'autant qu'aucun contrat de sous-traitance mentionnant ces conditions financières n'est versé aux débats et que les prétendues "factures" adressées par M. [F] à ses sous-traitants sont des pièces établies unilatéralement par l'appelant, qui sont d'autant plus dépourvues de tout caractère probant que M. [F] n'aurait pas dû émettre de factures à l'égard de ses sous-traitants mais au contraire recevoir les leurs ou à tout le moins produire en complément les relevés de prestations établis par leurs soins.
Il est également indifférent que la société Banema ait réglé sans difficulté les premières factures émises le 26 avril 2019, ce règlement, même effectué à tort, ne permettant en aucun cas de considérer que la société aurait accepté de régler le double du montant prévu au contrat.
Enfin, M. [F] ayant fait preuve de mauvaise foi dans l'exécution du contrat, puisqu'il a doublé le montant de ses prestations sans l'accord de son cocontractant, il ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 4 du contrat qui dispose que "les factures qui ne sont pas contestées dans les 8 jours suivant réception de la facture seront considérées comme définitives et inviolables" afin de revendiquer le paiement intégral de ses factures adressées à la société Banema le 28 mai 2019 et le 13 juin 2019, au seul motif que cette dernière aurait attendu le 13 juillet 2019 pour les contester.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a considéré qu'en réglant la moitié des factures 101-1 à 101-8 et 102-1 à 102-7 qui lui avaient été adressées par M. [F] sur la base de 8 euros par personne et par trajet, la société Banema s'est acquittée de ses obligations et en ce qu'il a débouté M. [F] de ses demandes au titre du solde de ces factures et des intérêts de retard.
Sur l'indemnité contractuelle forfaitaire de retard :
L'article 4 du contrat de transport disposait que : "Si [dans] les 15 jours suivant la mise en demeure par lettre recommandée par la poste, le débiteur reste défaillant, la somme de la créance sera ipso jure augmentée de 10% avec un minimum de 125 € et un maximum de 4.000 € en tant qu'indemnité forfaitaire pour les frais administratifs supplémentaires, le suivi du dossier des débiteurs".
Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, il ressort de cette stipulation contractuelle que l'indemnité forfaitaire n'est due que si le créancier adresse à son débiteur une mise en demeure par lettre recommandée par la poste.
Or, en l'espèce, la mise en demeure adressée par l'avocat de M. [F] à la société Banema a été envoyée le 12 juillet 2019 à 19h04 par courrier électronique, ainsi que le démontre la pièce no8a qu'il verse aux débats.
En conséquence, quand bien même la société Banema n'a réglé les sommes qu'elle devait que le 11 octobre 2019, M. [F] n'est pas fondé à obtenir le versement d'une indemnité forfaitaire à ce titre.
Le jugement déféré sera donc confirmé de ce chef.
Sur la rupture abusive du contrat :
L'article 2 du contrat de transport était rédigé dans les termes suivants :
" Le client s'engage à donner au prestataire les missions relatives au transport du 06 avril 2019 au 31 août 2019.
Il est convenu entre les parties, pour plus de flexibilité et compte tenu de l'incertitude de la durée du chantier pour lequel la société intervient actuellement sur l'île de [Localité 7] et l'avancement des travaux, qu'elles pourront, l'une comme l'autre, donner congé à l'autre partie, avant l'arrivée du terme, sous réserve d'un préavis de 15 jours, adressé par courrier recommandé et notification par e-mail".
Par courrier daté du 16 mai 2019, adressé à M. [F] le 18 mai 2019 par e-mail et le 20 mai par courrier recommandé présenté le 28 mai 2019, qui n'a pas été réclamé (pièces 7 et 7 bis de l'intimée et 5 a de l'appelant), la société Banema l'a informé qu'elle souhaitait résilier le contrat. Elle a fondé sa résiliation sur les dispositions de l'article 2 du contrat et a précisé que le délai de préavis de 15 jours débutait à la date du courrier, soit le 16 mai, le contrat devant dès lors prendre fin le 31 mai inclus.
En réalité, le contrat s'est poursuivi jusqu'au 02 juin inclus.
Alors que les premiers juges ont estimé que le contrat prévoyait une faculté de résiliation sous réserve d'un préavis de 15 jours et du respect de certaines formalités, M. [F] soutient que tel n'était le cas que dans l'hypothèse où le chantier arriverait à son terme avant le 31 août 2019.
Cependant, contrairement à son analyse, l'article 2 précité ne subordonne l'exercice de cette faculté de rétractation à aucun motif particulier. L'interruption du chantier ne pouvait en tout état de cause pas constituer la seule cause de révocation anticipée dès lors que cette faculté était ouverte aux deux parties, et pas seulement à la société Banema. En réalité, la référence aux incertitudes concernant la durée du chantier n'est mentionnée dans le contrat que pour expliquer la raison pour lesquelles les parties ont prévu cette faculté de rétractation anticipée, sans la limiter à une quelconque hypothèse.
Dès lors, la société Banema pouvait valablement résilier le contrat de transport de manière anticipée sous réserve de respecter un délai de préavis de quinze jours et des formalités.
Ces formalités ont été respectées le 18 mai 2019 et le 20 mai 2019.
Le délai a également été respecté puisque le contrat s'est poursuivi jusqu'au 02 juin 2019, soit jusqu'au quinzième jour suivant la réception de la notification par voie électronique adressée à M. [F], nonobstant le fait que le courrier recommandé a été présenté plus tardivement et qu'en tout état de cause n'a pas été réclamé.
En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a retenu que la rupture n'était ni abusive, ni brutale.
Il sera également confirmé en ce qu'il a débouté M. [F] de toutes ses demandes de dommages-intérêts, les demandes indemnitaires n'étant présentées, aux termes de ses conclusions, que comme les conséquences de la rupture brutale du contrat de transport.
Sur la rectification des factures :
Alors même qu'il sollicite l'infirmation de tous les chefs de jugement contestés, y compris donc celui par lequel il a été condamné sous astreinte à produire des factures rectifiées, M. [F] ne développe aucun moyen d'infirmation à ce titre et justifie s'être acquitté de cette obligation.
Ce chef de jugement sera donc confirmé.
Sur la demande formée à titre reconventionnel par la société Banema au titre du préjudice moral:
La société Banema fonde sa demande de dommages-intérêts sur les dispositions des articles 1231-1 et 1217 du code civil relatifs à la responsabilité contractuelle, mais également sur celles de l'article L.442-1 du code de commerce qui dispose :
"Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, dans le cadre de la négociation commerciale, de la conclusion ou de l'exécution d'un contrat, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services :
1o D'obtenir ou de tenter d'obtenir de l'autre partie un avantage ne correspondant à aucune contrepartie ou manifestement disproportionné au regard de la valeur de la contrepartie consentie".
Elle indique qu'elle a subi un préjudice moral car elle a été contrainte en toute hâte de rompre le contrat la liant à M. [F] et de rechercher un nouveau transporteur en raison de la faute commise par M.[F] dans l'exécution de ses obligations contractuelles, puisqu'il a produit de fausses factures afin de s'enrichir à son détriment.
Cependant, si M. [F] a effectivement émis des factures contenant des mentions erronées, la société Banema n'a pas fondé la résiliation du contrat sur ce motif mais sur la simple faculté de résiliation anticipée prévue par l'article 2 de ce contrat.
A aucun moment, jusqu'au 13 juillet 2019, elle n'a évoqué l'erreur de facturation qu'elle qualifie désormais de faux et de d'escroquerie.
Dans ces conditions, elle ne peut valablement se prévaloir d'un préjudice lié à la nécessité de rechercher un urgence un nouveau prestataire alors qu'elle a décidé seule de résilier le contrat.
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre d'un préjudice moral.
Sur la demande reconventionnelle de dommages-intérêts pour procédure abusive :
Il est constant, en vertu de l'article 1240 du code civil et de l'article 32-1 du code de procédure civile, que le droit d'agir en justice ne dégénère en abus qu'en cas de mauvaise foi, de légèreté blâmable ou d'erreur grossière équipollente au dol.
En l'espèce, la société Banema soutient que M. [F] a agi de mauvaise foi en l'assignant pour obtenir le paiement de fausses factures et celui de deux bus qu'il a acquis après la résiliation du contrat.
Cependant, si M. [F] a pu faire preuve de mauvaise foi dans l'exécution du contrat en appliquant un tarif différent de celui prévu contractuellement, son action judiciaire n'était pas limitée au paiement du solde de ses factures. Il a en effet développé au titre de la rupture abusive du contrat de transport des moyens sérieux, quand bien même ils n'ont pas été retenus.
En conséquence, la mauvaise foi dans le cadre de l'action en justice n'étant pas suffisamment établie, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté la société Banema France de sa demande de dommages-intérêts.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :
M. [F], qui succombe en cause d'appel, sera condamné aux entiers dépens qui seront recouvrés par la Selarl Durimel & Bangou conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Il sera également condamné à payer à la Sas Banema France la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et débouté de sa propre demande à ce titre.
Enfin, les dispositions du jugement contesté seront confirmées de ce chef.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement, par arrêt rendu par mise à disposition au greffe,
Déclare recevable l'appel incident formé par la Sas Banema France et les demandes formées à ce titre,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne M. [I] [F] à payer à la Sas Banema France la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute M. [I] [F] de sa propre demande à ce titre,
Condamne M. [I] [F] aux entiers dépens de l'instance d'appel,
Dit que les dépens seront recouvrés par la Selarl Durimel & Bangou conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Et ont signé,
La greffière La présidente
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CAPP/JURITEXT000046991479.xml | RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 12
SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT
ORDONNANCE DU 07 JUILLET 2022
(no 284 , pages)
No du répertoire général : No RG 22/00286 - No Portalis 35L7-V-B7G-CF64F
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 22 Juin 2022 -Tribunal judiciaire d'Evry (Juge des Libertés et de la Détention) - RG no 22/01052
L'audience a été prise au siège de la juridiction, en audience publique, le 04 Juillet 2022
Décision réputée contradictoire
COMPOSITION
Madame Anne EVEILLARD, conseillère à la cour d'appel de Paris, agissant sur délégation du Premier Président de la cour d'appel de Paris,
assistée de Madame Alexandra AUBERT, greffier lors des débats et du prononcé de la décision
Monsieur [N] [X] (Personne faisant l'objet des soins)
né le [Date naissance 1]1987 à [Localité 7]
demeurant [Adresse 2]
Actuellement hospitalisé au Centre hospitalier [5].
comparant en personne assisté par Me Malik AIT ALI avocat commis d'office au barreau de Paris
M. LE PREFET DE L'ESSONNE
demeurant [Adresse 3]
non comparant, non représenté
LIEU D'HOSPITALISATION
CENTRE HOSPITALIER [5]
demeurant [Adresse 4]
non comparant, non représenté
MINISTÈRE PUBLIC
Représenté par Mme Anne BOUCHET, avocate générale
Vu l'ordonnance du 22 juin 2022 rendue par le juge des libertés et de la détention d'Evry ordonnant la poursuite de la mesure d'hospitalisation complète de M. [N] [X].
Par déclaration d'appel transmise le 27juin 2022 enregistrée au greffe le 28 juin 2022, M. [N] [X] a interjeté appel de ladite ordonnance.
Les parties ainsi que le directeur de l'établissement ont été convoqués à l'audience du 04 juillet 2022.
L'audience s'est tenue au siège de la juridiction, en audience publique.
Le conseil de M. [N] [X] a sollicité l'infirmation de l'ordonnance critiquée.
Le ministère public a requis la confirmation de l'ordonnance déférée.
M. [N] [X] a eu la parole en dernier. Il a indiqué que les menaces de mort qui lui sont reprochées ne sont pas établies par la vidéo surveillance de l'établissement bancaire et fait état de son inquiétude pour sa chienne. Il conteste la nécessité des soins qui lui sont prodigués affirmant qu'il est seulement sédaté.
Aux termes de l'article L3213-1, le représentant de l'Etat dans le département prononce par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié ne pouvant émaner d'un psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil, l'admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public. Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l'admission en soins nécessaire. Ils désignent l'établissement mentionné à l'article L.3222-1 qui assure la prise en charge de la personne malade.
Le directeur de l'établissement d'accueil transmet sans délai au représentant de l'Etat dans le département et à la commission départementale des soins psychiatriques mentionnée à l'article L.3222-5:
1o Le certificat médical mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 3211-2-2 ;
2o Le certificat médical et, le cas échéant, la proposition mentionnée aux deux derniers alinéas du même article L. 3211-2-2.
II. Dans un délai de trois jours francs suivant la réception du certificat médical mentionné à l'avant dernier alinéa de l'article L. 3211-2-2, le représentant de l'Etat dans le département décide de la forme de prise en charge prévue à l'article L.3211-2-1, en tenant compte de la proposition établie, le cas échéant, par le psychiatre en application du dernier alinéa de l'article L. 3211-2-2 et des exigences liées à la sûreté des personnes et à l'ordre public. Il joint à sa décision, le cas échéant, le programme de soins établi par le psychiatre.
Dans l'attente de la décision du représentant de l'Etat, la personne malade est prise en charge sous la forme d'une hospitalisation complète.
III. Lorsque la proposition établie par le psychiatre en application de l'article L. 3211-2-2 recommande une prise en charge sous une autre forme que l'hospitalisation complète, le représentant de l'Etat ne peut modifier la forme de prise en charge des personnes mentionnées au II de l'article L. 3211-12 qu'après avoir recueilli l'avis du collège mentionné à l'article L. 3211-9.
Aux termes de l'article L 3211-12-1 du même code, en sa rédaction applicable en l'espèce l'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l'établissement, n'ait statué sur cette mesure avant l'expiration d'un délai de douze jours à compter de la décision par laquelle le directeur de l'établissement a prononcé son admission ou modifié la forme de la prise en charge du patient en procédant à son hospitalisation complète; que cette saisine est accompagnée d'un avis motivé rendu par le psychiatre de l'établissement ;
En cas d'appel, le premier président ou son délégataire statue dans les douze jours de sa saisine.
M. [N] [X] a été interpellé et hospitalisé à la suite d'une agression sur un employé de banque et a fait l'objet d'un arrêté du maire de [Localité 6] le 11 juin 2022, portant admission provisoire en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète.
Il a été constaté médicalement qu'il présentait des troubles du comportement avec agitation, menaces de mort réitérées, et qu'il présente un délire de persécution et un délire interprétatif.
S'il s'est montré calme et accessible à la discussion , aux termes du certificat médical du 12 juin 2022, son discours reposait sur un postulat délirant interprétatif de persécution et il banalisait son comportement violent.
Il résulte du certificat médical de situation établi le 30 juin 2022 que son état ne s'est pas amélioré, qu'il est dans le déni de ses troubles, sort de sa chambre, donne des coups de poing dans le mur à plusieurs reprises, présente un comportement impulsif, imprévisible , se montre dans la toute puissance, exprime des idées délirantes de persécution.
Il ne reconnaît pas avoir besoin des soins prodigués alors qu'il relate un parcours personnel difficile marqué par la violence agie et subie.
Au regard de ces éléments, il apparaît que les soins sans consentement en hospitalisation complète restent en l'état nécessaires compte tenu de la persistance de troubles mentaux compromettant la sûreté des personnes ou portant atteinte de façon grave à l'ordre public.
PAR CES MOTIFS
Le délégué du premier président de la cour d'appel, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe,
Confirmons l'ordonnance querellée.
Ordonnons la poursuite de la mesure d' hospitalisation complète de M. [N] [X],
Laissons les dépens à la charge de l'État.
Ordonnance rendue le 07 JUILLET 2022 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DÉLÉGATAIRE
Une copie certifiée conforme notifiée le 07/07/2022 par mail à :
X patient à l'hôpital
ou/et par LRAR à son domicile
X avocat du patient
X directeur de l'hôpital
tiers par LSX préfet de police
avocat du préfet
tuteur / curateur par LRAR
X Parquet près la cour d'appel de Paris
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CAPP/JURITEXT000046991445.xml | COUR D'APPEL DE Saint-Denis
Chambre des Libertés Individuelles
Soins Psychiatriques sous contrainte
ORDONNANCE DU 13/07/2022
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République Française
Au nom du Peuple Français
No RG : No RG 22/00965 - No Portalis DBWB-V-B7G-FWSI
No MINUTE : 22/25
Appel de l'ordonnance rendue le 01 juillet 2022 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de SAINT-DENIS DE LA REUNION
APPELANT :
Monsieur [Y] [T] [X]
né le [Date naissance 1] 1991 à [Localité 3]
Actuellement hospitalisé à l'EPSMR de [Localité 2]
assisté de Me Laurine VILLEZ, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Ont été avisés de la présente audience
MINISTÈRE PUBLIC
Madame la procureure générale
non comparante (avis écrit)
MONSIEUR LE PREFET DE LA REUNION
Agence de santé de l'Océant Indien (ARS)
non comparant
Le directeur de l'établissement de santé mentale de la Réunion
non comparant
Monsieur [E] [J]
gestionnaire de la curatelle renforcée
CONSEILLERE DÉLÉGUÉE : Virginie BELLOUARD-ZAND, déléguée par ordonnance du premier président
GREFFIERE : Nathalie BEBEAU
DÉBATS à l'audience publique du 13 juillet 2022, les parties comparantes ayant été avisées à l'issue des débats que l'ordonnance sera prononcée le jour même le 13/07/2022 et leur sera immédiatement notifiée ;
ORDONNANCE prononcée par mise à disposition au greffe le 13/07/2022 et signée par Virginie BELLOUARD-ZAND, Conseillère déléguée par le premier président, et Nathalie BEBEAU, Greffière ;
Initialement hospitalisé sous contrainte le 24 mai 2022, sur décision du représentant de l'Etat, puis par ordonnance en date 3 juin 2022 du juge des libertés et de la détention, [Y] [X] a par requête en date du 22 juin 2022 sollicité la mainlevée de la mesure d'hospitalisation sous contrainte et une mesure d'expertise, toutes deux rejetées par Ordonnance du juge des libertés et de la détention en date du 1er juillet 2022.
Cette ordonnance a été notifiée le même jour à [Y] [X].
Il a interjeté appel de l'Ordonnance par lettre simple en date du 4 juillet 2022, parvenue au greffe de la cour le 6 juillet 2022.
Aux termes de cet acte d'appel, il indique ne pas accepter la décision des juges.
L'EPSMR, régulièrement convoqué, n'a pas comparu, ni fait connaître ses observations.
Le 30 juin 2022, il a transmis un avis motivé d'actualisation rendu par le médecin psychiatre concluant à la nécessité d'une poursuite de soins sous contrainte, en constatant notamment la recrudescence des comportements d'agressivité, une tension interne majeure ayant justifié de nouveau la mise en chambre sécurisée d'isolement.
Le parquet général dans son avis en date du 7 juillet 2022 a soulevé une fin de non recevoir tenant à l'absence de motivation de l'appel.
A l'audience, [Y] [X] n'a pas fait d'observation sur le défaut de motivation, indiquant que son état de santé ne justifiait pas la mesure d'hospitalisation sous contrainte.
Son conseil a regretté l'abence d'actualisation sur l'état de santé d'[Y] [X], a demandé que l'appel soit déclaré recevable et s'en est rapporté sur la demande de main-levée.
- Sur la recevabilité de l'appel
Il ressort des dispositions des articles R3211-18 et R3211-19 du code de la santé publique que l'ordonnance du juge de la liberté et de la détention est susceptible de recours devant le premier président de la cour ou son délégué dans un délai de dix jours à compter de sa notification, par une déclaration d'appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel.
Le non-respect des modalités de recours prévues par la loi constitue une fin de non-recevoir d'ordre public, qui en l'espèce a été soulevée par le ministère public et débattue contradictoirement par les parties.
L'accusé de réception de la notification de l'ordonnance, signé par le patient porte mention que la décision et les modalités de recours ont bien été portées à sa connaissance le 1er juillet 2022.
Si l'appel est intervenu dans les délais, l'acte d'appel ne comporte aucun élément permettant d'identifier un commencement de critique de la décision rendue.
En effet, le refus d'acceptation de la décision du juge, le sentiment d'injustice qu'il évoque, et sa demande d'être assisté par un infirmier de son choix, qu'il mentionne dans l'acte d'appel ne vaut pas motivation .
Cette obligation de motivation est la contrepartie des dispositions prévoyant l'assistance obligatoire du patient par un avocat, cette obligation de motivation n'ayant par ailleurs pas été régularisée durant le délai d'appel.
En conséquence, sans qu'il y ait lieu d'examiner le fond de la procédure, il convient de déclarer l'appel d' [Y] [X] irrecevable.
PAR CES MOTIFS
Nous, Virginie BELLOUARD-ZAND, Conseillère déléguée par ordonnance de monsieur le Premier Président assistée de Nathalie BEBEAU, Greffière, statuant publiquement par ordonnance réputée contradictoire,
Déclarons irrecevable l'appel interjeté à l'encontre de l'ordonnance en date du 1er juillet 2022 ;
Disons que les frais et les dépens seront mis à la charge du Trésor Public.
La greffière,
Nathalie BEBEAU SIGNEE
La conseillère déléguée,
Virginie BELLOUARD-ZAND
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CAPP/JURITEXT000046991451.xml | COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
2ème CHAMBRE CIVILE
ARRET No445 DU 11 JUILLET 2022
No RG 21/00786
No Portalis DBV7-V-B7F-DK6O
Décision déférée à la cour : Jugement du juge de contentieux locatif du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre, décision attaquée en date du 23 avril 2021, enregistrée sous le no 11-20-002119.
APPELANTE :
S.A. HLM de la Guadeloupe exerçant sous l'enseigne Sikoa
[Adresse 5]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Annick Richard, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART
Madame [K] [H]
Rés. [J] [C]
[Adresse 4]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Non représentée
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 799 alinéa 3 du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état, à la demande des parties, a autorisé les avocats à déposer leur dossier au greffe de la chambre civile jusqu'au 23 mai 2022.
Par avis du 23 mai 2022 le président a informé les parties que l'affaire était mise en délibéré devant la chambre civile de la cour composée de :
Madame Corinne Desjardins, présidente de chambre,
Madame Annabelle Clédat, conseillère,
Madame Christine Defoy, conseillère,
qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 11 juillet 2022.
GREFFIER en charge du dépôt des dossiers et lors du prononcé Madame Armélida Rayapin.
Par défaut, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
Signé par Mme Corinne Desjardins, Présidente de chambre et par Mme Armélida Rayapin, greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire
FAITS ET PROCEDURE
Suivant bail verbal non daté, la SA d'HLM Sikoa de la Guadeloupe, ayant pour nom commercial, Sikoa, a donné à bail à Mme [K] [H] un logement lui appartenant, sis [Adresse 1].
Le 10 août 2020, le bailleur a fait délivrer à sa locataire un commandement de payer, la mettant en demeure de lui régler la somme de 6 550, 84 euros en principal au titre des loyers échus et impayés au 1er juillet 2020.
Le 9 décembre 2020, la SA Sikoa d'HLM de la Guadeloupe a assigné Mme [H] devant le juge des contentieux de la protection de Pointe- à-Pitre aux fins de voir prononcer la résiliation du bail, l'expulsion de sa locataire, la condamnation de cette dernière à lui payer la somme de 4 616, 69 euros, au titre des loyers et charges impayés, sous réserve d'actualisation à l'audience, une indemnité mensuelle d'occupation jusqu'à son départ effectif des lieux, la somme de 2000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.
Par jugement du 23 avril 2021, le juge des contentieux et de la protection de Pointe-à-Pitre a :
-déclaré recevable la demande en résiliation de bail formée par la société Sikoa à Mme [K] [H],
-débouté la Sikoa de sa demande en résiliation de bail,
-condamné Mme [K] [H] à payer à la Sikoa la somme de 6 258, 50 euros au titre des loyers échus et impayés au 22 février 2021, avec les intérêts au taux légal à compter de la signification du présent jugement,
-accordé à Mme [K] [H] un délai de paiement de 36 mois pour se libérer de la dette, en sus du loyer courant, de 35 fois 181 euros, la 36ème mensualité devant solder la dette en principal, intérêts et frais, payables le 10 de chaque mois à compter de la signification de la présente décision,
-rappelé que pendant le cours du délai accordé, les majorations d'intérêts ou les pénalités encourues, à raison du retard, cessent d'être dues,
-condamné Mme [K] [H] à payer à la Sikoa une somme de 300 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamné Mme [K] [H] aux entiers dépens, en ce compris le coût de l'assignation et du commandement de payer en date du 4 février 2020 ;
-rappelé que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire.
Le 16 juillet 2021, la SA d'HLM Sikoa a interjeté appel du jugement précité en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en résiliation de bail, en ce qu'il a accordé à Mme [H] un délai de 36 mois pour se libérer de sa dette, en réglant en sus du loyer courant, la somme de 35 fois 181 euros, la 36ème mensualité devant solder la dette en principal, intérêts et frais, payables le 10 de chaque mois à compter de la signification de la présente décision.
Suite à l'avis du greffe en date du 7 septembre 2021, la SA d'HLM Sikoa a fait signifier la déclaration d'appel à Mme [K] [H] le 9 septembre suivant.
L'intimée n'ayant pas constitué avocat, l'appelant lui a fait signifier ses conclusions à étude le 12 octobre 2021.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 7 février 2022.
L'affaire a été appelée à l'audience du 23 mai 2022 et mise en délibéré au 11 juillet 2022.
PRETENITONS ET MOYENS DES PARTIES
1/ La SA d'HLM Sikoa de la Guadeloupe, appelante :
Vu les conclusions signifiées le 12 octobre 2021 par lesquelles la SA Sikoa d'HLM de la Guadeloupe demande à la cour de :
--infirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en résiliation de bail formée à l'encontre de Mme [K] [H] et en ce qu'il a accordé à cette dernière des délais de paiement de 36 mois, à charge pour elle de régler en plus du loyer courant, la somme de 181 euros, la 36ème mensualité devant régler le solde restant dû, ces mensualités étant payables le 10 de chaque mois à compter de la signification de la présente décision,
-statuant à nouveau,
-prononcer la résiliation du bail consenti à Mme [H],
-ordonner l'expulsion de Mme [K] [H] et de tout occupant de son chef, avec au besoin l'assistance de la force publique et d'un serrurier, qui pourra intervenir à défaut de départ volontaire, dans un délai de deux mois à compter du commandement d'avoir à quitter les lieux imparti par l'article L412-1 du code des procédures civiles d'exécution et conformément aux articles L433-1 et suivant de cette même loi, s'agissant de leurs biens, suivant les formes prescrites par les articles R411 et suivants quant aux personnes et R433-1 et suivants quant aux biens,
-dire qu'il sera également fait application des dispositions règlementaires R153-1 quant à la force publique,
-condamner Mme [K] [H] à lui payer la somme de 8 575, 55euros représentant les loyers échus impayés, selon le relevé de compte en date du 16 juillet 2021,
-condamner Mme [K] [H] à lui payer une indemnité d'occupation mensuelle jusqu'à la libération effective des lieux, qui sera égale au dernier loyer majoré des charges et du surloyer,
-condamner Mme [K] [H] à lui payer la somme de 5000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamner celle-ci aux dépens, qui comprendront ceux de première instance dont le coût du commandement de payer, avec distraction au profit de l'avocat soussigné en application de l'article 699 du code de procédure civile.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens.
2/ Mme [K] [H], intimée :
L'intimée à laquelle ont été signifiées à étude la déclaration d'appel, ainsi que les conclusions et pièces, n'a pas constitué avocat.
En application de l'article 473 du code de procédure civile, le présent arrêt sera donc rendu par défaut.
Sur la résiliation du bail et l'expulsion de l'intimée,
En application de l'article 1728 du code civil, le preneur est tenu à deux obligations principales : celle d'user de la chose louée raisonnablement et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail ou suivant celle présumée par les circonstances, à défaut de convention et celle de payer le prix du bail aux termes convenus.
En cas d'inexécution de l'une ou l'autre de ces obligations, le bailleur peut solliciter la résiliation du contrat de bail.
En l'espèce, le 10 août 2020, la SA d'HLM Sikoa a fait délivrer à Mme [K] [H] un commandement de payer les loyers pour la somme en principal de 6 550, 84 euros, précisant qu'à défaut de paiement dans un délai de deux mois à compter de cette date, la convention d'occupation sera résiliée.
Or, force est de constater qu'à l'échéance du délai de deux mois visé dans le commandement de payer précité, la dette locative de Mme [K] [H] n'a pas été apurée, puisqu'elle restait devoir à l'échéance du 1er novembre 2020 la somme de 8298, 99 euros.
Pour autant, dans le cadre de la décision critiquée, le juge des contentieux de la protection de Pointe-à-Pitre a rejeté la demande en résiliation de bail, au motif que Mme [K] [H] avait récemment effectué des versements conséquents pour réduire le montant de sa dette.
S'il est effectivement exact que l'intimée a effectué des versements de 2000 euros, 4000 euros et 2000 euros, respectivement en avril, mai et juin 2020, puis deux nouveaux versements de 1000 euros et de 2000 euros en février 2021, il y a lieu de constater que depuis aucun paiement n'est intervenu et que la dette locative de Mme [H] s'est accrue.
Dans ce contexte, nonobstant les paiements susvisés, il y a lieu de prononcer la résiliation du bail, ainsi que l'expulsion de Mme [H], dépourvue de droit et de titre sur le logement loué, outre celle de tout occupant de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique, laquelle pourra intervenir, à défaut de départ volontaire, dans un délai de deux mois à compter du commandement d'avoir à quitter les lieux imparti par l'article L412-1 du code des procédures civiles d'exécution, conformément aux articles L433-1 et suivant de cette même loi, s'agissant de leurs biens, et suivant les formes prescrites par les articles R411 et suivants quant aux personnes et R433-1 et suivants quant aux biens,
Il sera également fait application des dispositions règlementaires R153-1 quant à la force publique.
Sur la créance locative, les délais de paiement et la fixation d'une indemnité d'occupation,
Au vu de la pièce no4 produite par la société appelante, consistant en un décompte arrêté au 16 juillet 2021, il y a lieu de condamner Mme [K] [H] à payer à la SA d'HLM de la Guadeloupe Sikoa la somme de 8 575, 55 euros au titre de sa dette locative.
Toutefois, dans le cadre du jugement déféré Mme [H] s'est vue accorder, en application de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989, des délais de paiement sur une durée de 36 mois par dérogation aux dispositions de l'article 1244-1, devenu 1343-5, le premier juge ayant considéré que la locataire était en mesure de régler sa dette locative.
Néanmoins, s'agissant d'un bail verbal, c'est l'article 1343-5 du code civil qui a vocation à s'appliquer, lequel dispose que le juge peut, compte-tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.
La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.
Toute stipulation contraire est réputée non écrite. Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d'aliment.
En l'espèce, force est de constater que la situation matérielle de la débitrice, qui n'a pas constitué avocat, n'est pas connue de la cour. En outre, celle-ci n'a cessé au cours du temps de laisser s'accroître sa dette locative. Nonobstant quelques versements significatifs entre les mois d'avril 2021 et février 2021, elle n'a plus depuis effectué aucun versement pour tenter d'apurer sa dette.
Dans ce contexte, le jugement querellé qui a accordé à Mme [K] [H] des délais de paiement ne pourra qu'être infirmé et l'intimée déboutée de sa demande formée à ce titre.
Enfin, le jugement critiqué sera encore infirmé en ce qu'il a débouté la SA d'HLM de la Guadeloupe Sikoa de sa demande en fixation d'une indemnité d'occupation. Statuant à nouveau, la cour fixera ladite indemnité au montant du dernier loyer majoré des charges et du surloyer, et ce jusqu'à la libération effective des lieux.
Sur les autres demandes,
Il ne paraît pas inéquitable de condamner Mme [K] [H], qui succombe en ses prétentions, à payer à la SA d'HLM de la Guadeloupe Sikoa la somme de 4000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens, qui comprendront ceux de première instance dont le coût du commandement de payer, avec distraction au profit de Maître Annick Ricard, avocate,en application de l'article 699 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par décision rendue par défaut et mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions contestées,
Statuant à nouveau,
Prononce la résiliation du bail consenti à Mme [K] [H] par la SA d'HLM de la Guadeloupe Sikoa, pour le logement sis [Adresse 1],
Ordonne l'expulsion de Mme [K] [H] et de tout occupant de son chef, avec au besoin l'assistance de la force publique et d'un serrurier, qui pourra intervenir à défaut de départ volontaire dans un délai de deux mois à compter du commandement d'avoir à quitter les lieux imparti par l'article L412-1 du code des procédures civiles d'exécution et conformément aux articles L433-1 et suivant de cette même loi s'agissant de leurs biens, suivant les formes prescrites par les articles R411 et suivants quant aux personnes et R433-1 et suivants quant aux biens,
Dit qu'il sera également fait application des dispositions règlementaires R153-1 quant à la force publique,
Condamne Mme [K] [H] à payer à la SA d'HLM de la Guadeloupe Sikoa la somme de 8 575, 55 euros, représentant les loyers échus impayés arrêtés au 16 juillet 2021,
Condamne Mme [K] [H] à payer à la SA d'HLM de la Guadeloupe Sikoa une indemnité d'occupation mensuelle jusqu'à la libération effective des lieux, qui sera égale au montant du dernier loyer majoré des charges et du surloyer,
Y ajoutant,
Condamne Mme [K] [H] à payer la somme de 4000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [K] [H] aux dépens, qui comprendront ceux de première instance, dont le coût du commandement de payer, avec distraction au profit de Maître Annick Richard, avocate en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Et ont signé,
La greffière, La présidente
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CAPP/JURITEXT000046991486.xml | COUR D'APPEL
DE SAINT-DENIS
Chambre civile TGI
No RG 22/00806 - No Portalis DBWB-V-B7G-FWE5
Affaire : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de saint denis, décision attaquée en date du 22 Février 2022, enregistrée sous le no 21/02005
Syndic. de copro. VENT BLEU
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Nicole COHEN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION - Représentant : Pers. morale CABINET PERSONNE (cabinet personne)
APPELANTAssociation LA CROIX MARINE
[Adresse 1]
[Localité 4]
ORDONNANCE DE DÉSISTEMENT No22/222
Nous, Patrick CHEVRIER, Président de chambre, chargé de la mise en état
Assisté de Alexandra BOCQUILLON, ff,
Vu l'appel interjeté par Syndic. de copro. VENT BLEU, selon déclaration enregistrée le 30 Mai 2022 au greffe de la cour, du jugement rendu le 22 FEVRIER 2022 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT DENIS.
Vu les conclusions de désistement déposées par RPVA le 09 juin 2022.
Vu les articles 400 à 405 et 769 du Code de Procédure Civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION:
Il convient de donner acte à Syndic. de copro. VENT BLEU de son désistement d'appel lequel sera déclaré parfait.
Dès lors, ce désistement emporte acquiescement au jugement dont appel.
Il convient de constater l'extinction de l'instance et le dessaisissement de la cour.
En vertu de l'article 399 du code procédure civile, l'appelant supportera les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS:
- DONNONS acte à Syndic. de copro. VENT BLEU de son désistement d'appel.
- DISONS qu'il emporte acquiescement au jugement dont appel, qu'il entraîne l'extinction de l'instance et le dessaisissement de la cour.
- DISONS que l'appelant supportera les frais de la procédure d'appel.
La présente ordonnance a été signée par le conseiller de la mise en état et le greffier.
Fait à Saint-Denis, le 05 Juillet 2022
Le Greffier,
Alexandra BOCQUILLON signé
Le conseiller de la mise en état,
Patrick CHEVRIER
Le 05 Juillet 2022
Expédition délivrée à :
Me Nicole COHEN, vestiaire : 131
|
CAPP/JURITEXT000046991492.xml | AFFAIRE : No RG 19/01626 - No Portalis DBWB-V-B7D-FGIS
Code Aff. :
ARRÊT N AL
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT DENIS en date du 04 Avril 2019, rg no F 16/00557
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 JUILLET 2022
APPELANTES :
S.A.S ALL SECURITY ASSISTANCE (ASA)
[Adresse 2]
[Localité 7]
Me [X] [L] de la SELARL [X], es qualités de mandataire liquidateur de la S.A.S. ALL SECURITY ASSISTANCE (ASA)
[Adresse 5]
[Localité 7]
Représentées par Me Ludovic PAIRAUD de la SELARL PAIRAUD AVOCAT, avocat au barreau de DEUX-SEVRES et Me Jason BENIZRI, avocat au barreau de Paris
Monsieur [Z] [N]
[Adresse 3]
[Localité 8]
Représentant : Me Guillaume jean hyppo DE GERY, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
PARTIES INTERVENANTES :
S.E.L.A.R.L. MONTRAVERS YANG-TING es qualités de liquidateur de SAS ALL SECURITY ASSISTANCE (ASA)
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentant : Me Ludovic PAIRAUD de la SELARL PAIRAUD AVOCAT, avocat au barreau de DEUX-SEVRES et Me Me Jason BENIZRI, avocat au barreau de PARIS
Association L'AGS
[Adresse 1]
[Localité 7],
Représentant : Me Nathalie JAY, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
Clôture : 4 octobre 2021
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 804 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 Mai 2022 devant la cour composée de :
Président : M. Alain Lacour
Conseiller : M. Laurent Calbo
Conseiller : Madame Aurélie Police
Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.
A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 05 Juillet 2022.
ARRÊT : mis à disposition des parties le 05 Juillet 2022
Greffier lors des débats : Mme Delphine Grondin
Exposé du litige :
M. [N] a été embauché en qualité de « responsable exécution marchés sécurité » selon contrat à durée indéterminée du 1er février 2014 par la société All Security Assistance (la société).
Saisi par M. [N], qui réclamait l'annulation d'une sanction disciplinaire, la cessation d'un harcèlement moral et indemnisation des divers chefs de préjudice dont il se plaignait, le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion, par jugement rendu le 4 décembre 2017, a notamment dit que le harcèlement moral de l'employeur à l'encontre de M. [N] était démontré et constitué, prononcé la résiliation du contrat de travail de M. [N] aux torts exclusifs de la société, condamné celle-ci à payer à M. [N] 31 902,90 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en réparation du préjudice subi et né du harcèlement, 5 124,70 euros à titre d'indemnité de préavis, 512,47 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis et 250 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. M. [N] a été débouté du surplus de ses demandes.
Appel de cette décision a été interjeté par la société le 18 décembre 2017.
La société a fait l'objet d'une liquidation judiciaire par jugement du tribunal mixe de commerce rendu le 24 janvier 2018. La Selarl [X] et la Selarl Montravers Yang-Ting ont été désignées en qualité de liquidateurs.
Saisi par M. [N] d'une procédure distincte, tendant au paiement d'heures supplémentaires, d'une indemnité compensatrice de congés payés, d'une indemnité de repos compensateur et d'une indemnité pour travail dissimulé, le même conseil de prud'hommes, par jugement rendu en formation de départage le 29 août 2018, a fixé à la somme de 20 340,83 euros le montant des heures supplémentaires, de laquelle sera déduite la somme de 5 000 euros déjà accordée, à 2 034,08 euros l'indemnité compensatrice de congés payés, à 2 703 l'indemnité au titre du repos compensateur et à 1 716,80 euros l'indemnité de congés payés non incluse dans le solde de tout compte.
Appel de cette décision a été interjeté par la Selarl [X], ès qualités de liquidateur de la société, le 11 octobre 2018.
Les deux procédures ont été jointes. Le CGE AGS (l'AGS) et la Selarl Montravers Yang Ting sont intervenues à l'instance.
Vu les conclusions notifiées par la société, la Selarl [X] et la Selarl Montravers Yang Ting le 24 mars 2021 ;
Vu les conclusions notifiées par M. [N] le 30 juin 2021 ;
Vu les conclusions notifiées le 4 juin 2021 par l'AGS ;
Par arrêt rendu le 24 mars 2022, il a été statué comme suit :
- « Déclare recevables les demandes de M. [N] ;
- Infirme le jugement rendu le 4 décembre 2017 par le conseil de prud'hommes de Saint-Denis, sauf en ce qu'il a dit que le harcèlement moral de l'employeur à l'encontre de M. [N] était démonté et constitué et condamné la société All Security Assistance à payer à M. [N] la somme de 250 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Statuant à nouveau des chefs infirmés,
- Dit que la prise d'acte par M. [N] de la rupture de son contrat de travail produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
- Fixe aux montants suivants les créances de M. [N] au passif de la société All Security Assistance :
- 5 124,70 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
- 512,47 euros à titre de congés payés sur préavis ;
- 1 730,53 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;
- 20 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
- Déboute M. [N] de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire ;
- Avant dire droit,
- Invite et, en tant que de besoin, ordonne aux Selarl [X] et Montravers Yang-Ting ès qualités de remettre la cour l'intégralité des pièces qu'elles mentionnent sur leur bordereau de pièces communiquées ;
- Renvoie la cause et les parties à l'audience qui se tiendra le 10 mai 2022 à 14 heures
- Réserve le surplus des demandes ainsi que les dépens ».
Les Selarl [X] et Montravers Yang-Ting ès qualités ont produit les pièces réclamées.
Pour plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées ainsi qu'aux développements infra.
Sur la pièce no 16 de l'AGS :
Attendu que M. [N] demande à la cour de dire que la pièce no 16 de l'AGS doit lui être déclarée inopposable en ce qu'elle porte sur une décision qu'il n'est pas en mesure de contester alors qu'elle rapporte des propos « non contrôlés, non contrôlables et non contestables » par lui, violant ainsi l'obligation de bonne foi dans l'administration de la preuve et la loyauté des débats ;
Mais attendu, en premier lieu, que cette pièce, dont il n'est pas soutenu qu'elle aurait été obtenue par fraude, a été régulièrement communiquée aux débats, en sorte qu'aucun manquement à leur loyauté n'est établi par M. [N] ;
Et attendu, en second lieu, qu'il appartient M. [N], s'il l'estime utile, d'exercer les voies de droit à lui ouvertes à l'encontre de la décision de la commission locale d'agrément et de contrôle de l'océan Indien qui constitue la pièce no 16 de l'AGS ; qu'il ne justifie pas, ni n'allègue, l'avoir fait ; qu'il sera par conséquent débouté de cette demande ;
Sur le paiement des heures supplémentaires :
Vu l'article L.3171-4 du code du travail ;
Attendu que M. [N] soutient qu'il a effectué de nombreuses heures supplémentaires et sollicite la confirmation du jugement, qui a fixé sa créance de ce chef à la somme de 20 340,83 euros ; qu'il verse aux débats, notamment, ses plannings de travail du mois d'octobre 2014 au mois d'avril 2017, ses bulletins de salaires pour la même période, des tableaux faisant le décompte des sommes qu'il réclame et une attestation de Mme [H], technicienne de paye ;
Attendu que ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l'employeur et, partant aux Selarl [X] et Montravers Yang-Ting ès qualités, de répondre et de fournir les éléments contredisant ceux avancés par M. [N] ;
Attendu qu'à cet effet, elles invoquent leurs pièces :
- no 2, constituée d'un billet d'avion ;
- no 15, constituée d'un échange de courriels entre M. [V] et MM. [N] et [U], relatifs à un voyage touristique à l'île Maurice, Hong Kong et Bangkok ;
- no 17, constituée d'un procès-verbal de constat rédigé par Me [W], huissier de justice, duquel il ressort que M. [A] a pu se connecter au logiciel Comete et modifier les horaires de travail qui y sont enregistrés pour chaque salarié ;
- no 3, constituée d'un courriel adressé par « [Courriel 9] » à M. [N] avec deux photos de T-shirts ;
- no 4, constituée d'une photo d'une partie d'un mémoire technique ;
- no 5, constituée de la fiche de la société Cap sentinelles issue du site societe.com ;
- no 6, constituée des procès-verbaux établis par la police par lesquels M. [O] a déposé plainte contre M. [V] ;
- no 16, constituée d'un jugement du tribunal de grande instance de Nanterre rendu entre la société et la société All Security Assistance aviation ;
- no 7, constituée d'un courriel adressé par M. [N] à M. [J] ;
- no 8, constituée de copies d'écran démontrant que M. [N] s'est connecté au logiciel Comete les 20, 21, 24 août, 1er, 2, 4 et 8 septembre 2017 ;
Attendu que ces pièces ne permettent pas de déterminer les horaires effectifs de travail de M. [N] ;
Attendu en conséquence qu'il sera retenu que M. [N] a effectué les heures supplémentaires qu'il indique avoir accomplies ; que le jugement rendu le 29 août 2018 sera confirmé en ce qu'il a fixé sa créance de ce chef à la somme de 20 340,83 euros, outre 2 034,08 euros au titre des congés payés afférents ;
Sur l'indemnité compensatrice de repos compensateur :
Vu les articles L. 3121-38 et D. 3121-24, ensemble la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité ;
Attendu qu'en 2015, M. [N] a effectué 483 heures supplémentaires alors que le plafond annuel conventionnel est de 329 heures ; qu'il a par conséquent excédé celui-ci 254 heures ; qu'il est dès lors bien fondé à réclamer le paiement de la somme de 2 703 euros sur la base d'une rémunération horaire de 17,554 euros ; que le jugement rendu le 29 août 2018 sera par conséquent confirmé ;
Sur l'indemnité de congés payés :
Attendu que M. [N] réclame la somme de 1 716,80 euros à titre « d'indemnité de congés payés non compris dans le solde de tout compte », sans autrement s'en expliquer qu'en concluant à la confirmation du jugement entrepris, dont il est réputé s'approprier les motifs par application de l'article 954 du code de procédure civile ;
Or, attendu que les premiers juges ont retenu, pour faire droit à cette demande, les motifs suivants : « Il sera fait droit aux demandes comme suit :
- l'indemnité de congés payés non incluse sur le solde de tout compte sera fixée à la somme de 1 716,80 euros » ;
Attendu que ces motifs ne sont pas de nature à caractériser le bien-fondé de cette demande, dont M. [N] sera par conséquent débouté ; que le jugement rendu le 29 août 2018 sera infirmé de ce chef ;
Sur l'indemnité pour travail dissimulé :
Vu l'article 954 du code de procédure civile ;
Attendu que s'affranchissant de l'obligation, pesant sur lui, de fonder en droit sa demande, M. [N] n'invoque aucun fondement juridique à l'appui de cette prétention ;
Vu les articles 12 du code de procédure civile et L. 8223-1 du code du travail ;
Attendu que M. [N] n'établit pas, ni même n'allègue, que la société se serait intentionnellement soustraite aux obligations pesant sur elle, notamment en ne lui payant pas les heures supplémentaires qu'il a effectuées ; qu'il ne peut dès lors qu'être débouté de cette demande et le jugement confirmé de ce chef ;
Sur la mesure d'instruction :
Attendu que M. [N] demande à la cour d'ordonner une mesure d'instruction consistant à consulter le fichier Ficoba ;
Mais attendu que cette mesure d'instruction n'est ni nécessaire, ni utile à la solution du litige ; qu'elle ne sera pas ordonnée ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement,
Confirme le jugement rendu le 29 août 2018 par le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion sauf en ce qu'il a fixé à 1 716,80 euros l'indemnité de congés payés non incluse dans le solde de tout compte ;
Statuant à nouveau de ce chef,
Déboute M. [N] de cette demande ;
Rappelle que l'AGS doit sa garantie dans les plafonds légaux et réglementaires ;
Y ajoutant,
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société All Security Assistance à payer à M. [N] la somme de 3 000 euros à titre d'indemnité pour frais non répétibles d'instance ;
Rejette le surplus des demandes ;
Condamne la société All Security Assistance aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par M. Lacour, président, et par Mme Grondin, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991493.xml | AFFAIRE : N RG No RG 19/02423 - No Portalis DBWB-V-B7D-FICI
Code Aff. : ARRÊT N AP
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de Saint-Denis en date du 10 Juillet 2019, rg no F 18/00120
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 JUILLET 2022
APPELANT :
Monsieur [V] [G]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Magali MICHEL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
et Me Gilles DEVERS, avocat au barreau de LYON
SA CAISSE D'EPARGNE CEPAC société anonyme à directoire, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié audit siège en cette qualité
[Adresse 5]
[Adresse 2]
Représentant : Me Guillaume DE GERY de la SELARL GERY-SCHAEPMAN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Clôture : 5 octobre 2020
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 804 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 mai 2022 devant la cour composée de :
Président : M. Alain LACOUR
Conseiller : M. Laurent CALBO
Conseiller : Mme Aurélie POLICE,
Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.
A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 05 juillet 2022.
ARRÊT : mis à disposition des parties le 05 JUILLET 2022
greffier lors des débats : Mme Delphine GRONDIN
greffier du prononcé par mise à disposition au greffe : Mme Nadia HANAFI
Exposé du litige :
M. [G] a été engagé par la Banque de [Localité 4], à compter du 1er janvier 1986, selon contrats à durée déterminée, puis à compter du 1er janvier 1988 selon contrat à durée indéterminée.
Le 4 juillet 2014, M. [G] a été licencié, mais l'autorisation de licenciement accordée par l'inspecteur du travail ayant été annulée par décision du ministre du travail du 30 mars 2015, le salarié a été réintégré dans les effectifs de la société en date du 16 mai 2015.
Le 25 janvier 2016, M. [G] a de nouveau été licencié avant d'être réintégré en date du 28 août 2016, suite à l'annulation de l'autorisation de licenciement par décision du ministre du travail du 7 juillet 2016.
Invoquant des faits de harcèlement moral et de discrimination, M. [G] a saisi, par requête du 1er octobre 2007, le conseil de prud'hommes de Saint-Denis de la Réunion qui a, par jugement du 8 octobre 2014, déclaré l'action de M. [G] recevable, l'a débouté de toutes ses demandes, l'a condamné au paiement de la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens et a rejeté la demande de la Banque de [Localité 4] relative à l'abus de droit.
Par arrêt du 30 avril 2018, la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion a confirmé le jugement et a condamné M. [G] à payer à la Caisse d'Épargne, venant aux droits de la Banque de [Localité 4], la somme de 111,17 euros en remboursement des indemnités de licenciement et la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens d'appel.
Sollicitant le paiement de rappels de salaires, indemnité de congés payés et primes durant les périodes comprises entre les licenciements et les réintégrations, M. [G], qui demandait également l'indemnisation d'un préjudice moral et la remise des bulletins de paie afférents à ces périodes, a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Denis de la Réunion par requête du 27 mars 2018.
Par jugement rendu en formation de départage en date du 10 juillet 2019, le conseil de prud'hommes de Saint-Denis de la Réunion a rejeté la demande de réouverture des débats présentée par M. [G], déclaré l'intégralité des demandes de M. [G] irrecevables, débouté la Caisse d'Épargne (CEPAC) de ses demandes au titre d'une amende civile ou de dommages et intérêts pour procédure abusive, condamné M. [G] au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens et rejeté les autres demandes.
Appel de cette décision a été interjeté par M. [G] le 30 août 2019 ;
Vu les dernières conclusions notifiées par M. [G] le 16 décembre 2019 ;
Vu les dernières conclusions notifiées par la Caisse d'Épargne CEPAC le 13 mars 2020 ;
La clôture a été prononcée par ordonnance du 5 octobre 2020 et l'affaire a été renvoyée à l'audience du 8 juin 2021 pour l'arrêt être rendu le 28 septembre 2021 ;
Par seconde ordonnance du 5 octobre 2020, la jonction des procédures noRG 19/02424 et noRG 19/2423 a été ordonnée pour être poursuivies sous le noRG 19/2423.
Par arrêt rendu après prorogations le 3 février 2022, la réouverture des débats a été ordonnée pour que la cause soit de nouveau entendue par la cour autrement composée. L'affaire a été plaidée le 10 mai 2022.
A titre liminaire, il y a lieu de rappeler que la jonction des procédures noRG 19/02424 et noRG 19/2423 a déjà été ordonnée, par décision du 5 octobre 2020. Il n'y a pas lieu de statuer de nouveau à ce titre.
Aux termes de l'article R. 1452-6 du code du travail, dans sa version applicable préalablement à l'entrée en vigueur du décret no2016-660 du 20 mai 2016, toutes les demandes liées au contrat de travail entre les mêmes parties font, qu'elles émanent du demandeur ou du défendeur, l'objet d'une seule instance. Cette règle n'est pas applicable lorsque le fondement des prétentions est né ou révélé postérieurement à la saisine du conseil de prud'hommes.
L'article R. 1452-7 du même code, dans cette même version, dispose également que les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables même en appel. L'absence de tentative de conciliation ne peut être opposée. Même si elles sont formées en cause d'appel, les juridictions statuant en matière prud'homale connaissent les demandes reconventionnelles ou en compensation qui entrent dans leur compétence.
L'article 8 du décret no2016-660 du 20 mai 2016 relatif à la justice prud'homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail a implicitement abrogé l'article R. 1452-6 cité ci-dessus qui édictait la règle d'unicité des demandes.
L'article 45 du même décret prévoit cependant que : « les articles 8, 12 et 23 sont applicables aux instances introduites devant les conseils de prud'hommes à compter du 1er août 2016. ».
En l'espèce, la première instance a été introduite par requête du 1er octobre 2007 devant le conseil de prud'hommes et s'est poursuivie jusqu'à l'arrêt du 30 avril 2018.
Cette instance, introduite avant l'entrée en vigueur du décret du 20 mai 2016, reste donc soumise aux dispositions anciennes dont les termes ont été rappelés ci-dessus.
La CEPAC considère que M. [G] ne pouvait dès lors saisir à nouveau, en date du 27 mars 2018, le conseil de prud'hommes, dès lors que la première instance opposant les mêmes parties relativement au même contrat, était toujours en cours et que des demandes nouvelles, qui étaient précédemment connues, auraient pu être formées dans le cours de la première instance.
M. [G] fait quant à lui valoir que le principe de l'unicité de l'instance ne peut lui être opposé dès lors que le fondement de ses prétentions est né ou a été révélé postérieurement à la clôture des débats de l'instance antérieure, au motif que deux jugements ont été rendus par le tribunal administratif en date du 14 décembre 2017.
L'introduction d'une nouvelle instance n'est en effet possible qu'à la condition que les causes du deuxième litige ne soient nées ou n'aient été connues qu'après l'extinction de la première.
Il résulte de l'arrêt du 30 avril 2018 que l'audience de plaidoiries s'est tenue le 11 décembre 2017 alors que le tribunal administratif de la Réunion s'est prononcé sur les recours formés à l'encontre des décisions du ministre du travail annulant les autorisations de licenciement par jugements du 14 décembre 2017.
Pour autant, il se déduit des demandes formées par M. [G], relatives notamment à des rappels de salaires et primes pour les périodes comprises du 5 septembre 2014 au 15 mai 2015 et du 27 mars au 28 août 2016, soit durant les deux périodes comprises entre les licenciements et les réintégrations, que le fondement de celles-ci était nécessairement connu et né bien avant l'extinction de la première instance.
A ce propos, il convient de relever que les prétentions de M. [G] sont fondées sur les décisions de réintégration de l'employeur et l'engagement de ce dernier, dans un courrier du 15 mai 2015, de payer les éléments de salaire. A plusieurs reprises, par courriers de 2015 et 2016, M. [G] a en outre expressément sollicité de la part de la CEPAC le paiement des éléments de salaire qu'il considère lui être dus. L'annulation de la décision du ministre du travail du 30 mars 2015 qui avait elle-même annulé l'autorisation de licenciement, prononcée par jugement du tribunal administratif du 14 décembre 2017, est par ailleurs sans effet sur les prétentions formulées par M. [G], qui sont donc nées bien avant l'extinction de la première instance.
De surcroît, il y a lieu de relever qu'à la date du 27 mars 2018, date de la seconde saisine du conseil de prud'hommes, la première instance n'était pas éteinte dès lors que la décision de la cour d'appel n'a été rendue qu'en date du 30 avril 2018.
A hauteur d'appel, il n'est en outre pas contesté que les demandes successives concernent le même contrat de travail et les mêmes parties. Il est en effet établi que la CEPAC vient aux droits de la Banque de [Localité 4], suite à une fusion absorption ayant entraîné une transmission universelle du patrimoine.
Dès lors, les demandes formées par M. [G] dans le cadre de cette seconde instance sont irrecevables, pour s'opposer au principe de l'unicité de l'instance. Le jugement sera confirmé.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement,
Confirme le jugement rendu le 10 juillet 2019 par le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion en toutes ses dispositions ;
Rejette les demandes plus amples ou contradictoires ;
Condamne M. [G] aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par M. Lacour, président, et Mme Hanafi, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,
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CAPP/JURITEXT000046991487.xml | AFFAIRE : N RG No RG 20/00192 - No Portalis DBWB-V-B7E-FKGS
Code Aff. : AL ARRÊT N
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Saint-Denis en date du 16 Décembre 2019, rg no 19/00060
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 JUILLET 2022
APPELANTE :
Madame [Z] [I] épouse [U]
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentant : Me Olivier CHOPIN de la SELARL CODET-CHOPIN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Association AAPEJ ayant siège publique [Adresse 1]
[Adresse 2]
les [Localité 15]
[Localité 15]
Représentant : Me Caroline CHANE MENG HIME de la SELARL AVOCATS ET CONSEILS REUNION, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Clôture : 1er .02.2021
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 804 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 mai 2022 devant la cour composée de :
Président : M. Alain LACOUR,
Conseiller : M. Laurent CALBO,
Conseiller : Madame Aurélie POLICE,
Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.
A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 05 juillet 2022.
ARRÊT : mis à disposition des parties le 05 JUILLET 2022
greffier lors des débats : Delphine GRONDIN
greffier du prononcé par mise à disposition au greffe : Nadia HANAFI
Exposé du litige :
Mme [I] épouse [U] a été embauchée selon contrat de travail à durée indéterminée du 10 juillet 2000 en qualité d'éducatrice spécialisée par l'Association réunionnaise d'entraide aux libertés. Son contrat de travail a été transféré à l'Association d'aide et de protection de l'enfance et de la jeunesse (l'association) ensuite d'une fusion intervenue le 30 septembre 2015. Mme [I] épouse [U] a été licenciée pour inaptitude avec impossibilité de reclassement le 21 janvier 2017.
Saisi par Mme [I] épouse [U] qui demandait à titre principal que son licenciement fût jugé nul et, subsidiairement, dépourvu de cause réelle et sérieuse et qui réclamait diverses indemnités, le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion, par jugement rendu le 16 décembre 2019, a dit que le licenciement pour inaptitude de Mme [I] épouse [U] reposait sur une cause réelle et sérieuse, a débouté Mme [I] épouse [U] de l'intégralité de ses demandes et l'association des siennes.
Appel de cette décision a été interjeté par Mme [I] épouse [U] le 24 janvier 2020.
Vu les conclusions notifiées par Mme [I] épouse [U] le 23 avril 2020
Vu les conclusions notifiées par l'association le 6 mai 2020 ;
L'affaire a été plaidée à l'audience du 14 septembre 2021 et mise en délibéré au 19 novembre 2021. Par arrêt rendu avant-dire droit le 3 février 2022, la réouverture des débats a été ordonnée pour que l'affaire soit de nouveau plaidée, devant la cour autrement composée.
L'affaire a été plaidée à l'audience tenue le 10 mai 2022.
Pour plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées et aux développements infra.
Sur le harcèlement moral :
Vu les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Attendu qu'à l'appui de sa demande tendant à voir juger que son licenciement pour inaptitude est nul, Mme [I] épouse [U] soutient qu'il est la conséquence du harcèlement moral dont elle indique avoir été victime, résultant de ce que l'association lui a fait le reproche d'avoir pris des congés qui avaient pourtant été validés, lui a infligé une double discrimination à l'embauche, a supprimé la prime d'encadrement des stagiaires qu'elle percevait, lui a refusé des congés trimestriels, l'a mise à l'écart des astreintes et lui a infligé deux avertissements injustifiés ;
Attendu que, pris dans leur ensemble, ces éléments de fait laissent supposer l'existence d'un harcèlement ;
Attendu qu'il incombe par conséquent à l'association de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision était justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;
Attendu, s'agissant de l'avertissement du 17 mars 2016, en premier lieu, que Mme [I] épouse [U] avait présenté, le 7 décembre 2015, une demande de congé visant deux périodes : du 11 au 21 janvier 2016, d'une part, et le 28 janvier 2016, d'autre part ; que la première lui a été accordée mais pas la seconde, l'association faisant valoir qu'elle devait déménager dans de nouveaux locaux ce même 28 janvier 2016, ce qui nécessitait la présence de tous les salariés ; que néanmoins, Mme [I] épouse [U] n'est pas venue travailler le 28 janvier 2016, en expliquant qu'elle avait pris l'engagement de dispenser un cours ce jour-là au profit de l'Institut régional de travail social de la Réunion ;
Attendu que si Mme [I] épouse [U] prétend avoir été dans un premier temps autorisée verbalement à s'absenter le 28 janvier 2016, avant qu'un refus ne lui soit ensuite opposé, elle n'en justifie aucunement, alors que l'association conteste avoir jamais donné cette autorisation ;
Attendu qu'il doit par conséquent être retenu que Mme [I] épouse [U] s'est absentée le 28 janvier 2016, alors qu'elle n'y avait pas été autorisée ;
Attendu, en revanche, en second lieu, que le deuxième grief fait par l'association pour justifier l'avertissement dont s'agit, qui porte sur le fait que Mme [I] épouse [U] aurait installé un « usager » dans un appartement insalubre, n'apparaît pas fondé puisque l'attestation invoquée au soutien par l'association (pièce no 27 de l'intimée) ne mentionne pas l'identité de son rédacteur et n'est pas accompagnée d'une copie d'une pièce justifiant celle-ci ; qu'à défaut pour l'association d'établir ce grief, seule l'absence de Mme [I] épouse [U] le 28 janvier 2016 pouvait fonder l'avertissement qui lui a été infligé le 17 mars 2016 ;
Attendu, en ce qui concerne le second avertissement, en date du 3 août 2016, que l'association soutient que Mme [I] épouse [U] n'a pas présenté de requête aux fins de placement d'un résident vulnérable sous régime de protection, qu'elle lui a ouvert un compte bancaire et a entrepris des transactions financières, sans en avertir la direction de l'association ; que toutefois, celle-ci ne justifie aucunement du bien-fondé de cette sanction disciplinaire pour n'invoquer que la pièce no 28 de Mme [I] épouse [U], constituée de la lettre en date du 3 août 2016, portant notification de l'avertissement litigieux, et qui ne fait par conséquent pas la preuve des manquements allégués, alors que Mme [I] épouse [U] les conteste ;
Attendu, s'agissant des astreintes, que l'association objecte à raison que ni le contrat de travail ayant lié les parties, ni son avenant ne prévoyaient que Mme [I] épouse [U] dût être d'astreinte ; que les astreintes sont en principe accomplies par les chefs de service et directeurs de l'association, ce qui est confirmé par la pièce no 18 de Mme [I] épouse [U], qui fait apparaître que l'essentiel des astreintes (neuf sur 16) ont été assurées par Mme [M], directrice de pôle, même si d'autres salariés en ont ponctuellement effectuées ;
Attendu, en ce qui concerne les congés trimestriels, que l'association objecte que Mme [I] épouse [U] n'a pas demandé à bénéficier de ses congés trimestriels au cours des trois premiers mois de l'année 2016, en sorte que les jours acquis au cours de cette période ont été perdus ;
Attendu que cette règle est conforme à l'article 09.05.01 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951, applicable en l'espèce ;
Attendu que Mme [I] épouse [U] a demandé le 8 avril 2016 un congé trimestriel du 18 au 23 avril 2016, qui lui a été accordé, et qu'ayant ainsi épuisé son droit à congés acquis au cours du deuxième trimestre, la nouvelle demande de congés trimestriels qu'elle a présentée le 28 avril 2016 pour la période du 23 au 28 mai 2016 lui a été légitimement refusée ;
Attendu, s'agissant de la suppression de la prime d'encadrement des stagiaires qui était servie à Mme [I] épouse [U], que l'association ne s'en explique pas ;
Attendu, sur la double discrimination à l'embauche, que l'association excipe de ce que Mme [I] épouse [U], qui avait postulé une première fois en 2015 aux fonctions de chef de service, a été reçue en entretien comme les autres candidats et que Mme [L], autre postulante, a été recrutée en raison de sa qualification (diplôme bac+5 : master en sciences humaines, brevet de technicien agricole option production et brevet de technicien supérieur agricole option analyse et conduite des systèmes d'exploitation), qui correspondait au projet de chantier agricole qu'avait l'association dans le sud du département ; que l'association justifie également de ce que Mme [L] a été recrutée en contrat à durée déterminée, alors que le contrat de travail de Mme [I] épouse [U] était à durée indéterminée ;
Attendu que Mme [I] épouse [U] a postulé une deuxième fois à la même fonction en 2016 ; que l'association explique qu'elle a été reçue par la directrice générale et la directrice du pôle social mais que n'étant pas la meilleure candidate, le poste a été attribué à Mme [T], qui était, comme Mme [I] épouse [U], titulaire du diplôme d'éducatrice spécialisée et du certificat d'aptitude aux fonctions d'encadrement et de responsable d'unité d'intervention sociale (Caferuis) et qui avait, à la différence de celle-ci, une expérience de trois ans en qualité de chef de service et avait suivi des formations en matière d'urgence et crise en institution et en méthodologie managériale ;
Attendu que l'association en justifie par ses pièces no 38 et 39 (curriculum vitae et lettre de motivation de Mme [T]) ; qu'il apparaît ainsi que le recrutement de Mme [L] puis celui de Mme [T] se sont opérés sur des bases objectives, étrangères à toute discrimination ;
Attendu, en ce qui concerne le reproche fait à Mme [I] épouse [U] d'avoir pris ses congés en 2015, alors qu'ils avaient été validés, que si l'association objecte que les demandes de congés présentées au cours de l'année 2015 par Mme [I] épouse [U] ont toutes été acceptées, elle ne s'explique pas sur les reproches invoqués par l'appelante alors qu'elle ne les conteste pas ;
Attendu qu'il résulte de ce qui précède que l'association ne démontre pas que Mme [I] épouse [U] ait installé un « usager » dans un logement insalubre, ni que l'avertissement du 3 août 2016 était fondé, ni que la suppression de la prime d'encadrement des stagiaires était justifiée, ni enfin que les reproches concernant les congés annuels pris en 2015 l'étaient davantage ;
Attendu que Mme [I] épouse [U] justifie de l'altération de son état de santé par sa pièce no 46, constituée d'avis d'arrêts de travail pour maladie ;
Attendu que pris dans leur ensemble, les faits ci-dessus constituent un harcèlement moral ; qu'il sera fait une juste réparation du préjudice subi de ce chef par Mme [I] épouse [U] par la condamnation de l'association à lui payer la somme de 4 000 euros à titre de dommages intérêts ;
Sur le licenciement :
Sur sa nullité :
Attendu que Mme [I] épouse [U] soutient à titre principal que son licenciement est nul, son inaptitude résultant selon elle du harcèlement moral dont elle a été victime ;
Attendu que l'association s'y oppose en sollicitant la confirmation du jugement, qui a retenu que le licenciement pour inaptitude était régulier et reposait sur une cause réelle et sérieuse ;
Attendu qu'il incombe à Mme [I] épouse [U] d'établir que l'inaptitude ayant conduit à son licenciement est la conséquence du harcèlement moral dont elle a été victime, ce qu'elle ne fait pas ; qu'en effet, les avis d'arrêts de travail qu'elle invoque (pièce no 47) ne mentionnent pas les raisons médicales ayant conduit à leur délivrance, cependant que le certificat du docteur [N], psychiatre, invoqué par Mme [I] épouse [U] comme constituant sa pièce no 57, n'apparaît pas sur son bordereau de pièces communiquées, qui ne mentionne que 56 pièces, ni ne figure dans le dossier remis à la cour, qui ne comprend que les 56 pièces mentionnées sur le bordereau de pièces communiquées ;
Attendu en conséquence que Mme [I] épouse [U] sera déboutée de sa demande tendant à voir déclarer nul son licenciement pour inaptitude ;
Sur la cause réelle et sérieuse :
Vu l'article L. 1226-2 du code du travail ;
Attendu qu'à titre subsidiaire, Mme [I] épouse [U] demande à la cour de juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en faisant valoir que l'association a manqué à son obligation de reclassement ;
Attendu que l'association réplique qu'elle a proposé à Mme [I] épouse [U] l'ensemble des postes disponibles qui étaient à la fois en adéquation avec les souhaits de la salariée et les préconisations du docteur [Y], médecin du travail ;
Attendu que ce dernier a déclaré Mme [I] épouse [U] inapte le 15 septembre 2016 en concluant comme suit : « Inapte en 1 seul examen suite à la visite de reprise
Pas de reclassement à prévoir compte tenu de son état de santé » ; qu'interrogé par l'association, le docteur [Y] a précisé ce qui suit : « Le périmètre de mon inaptitude s'étend à toute la filiale réunionnaise. Libre à vous de lui proposer un reclassement hors département selon ses compétences. Et libre à elle de l'accepter ou pas » ;
Attendu s'agissant des souhaits exprimés par Mme [I] épouse [U] que par lettre du 17 novembre 2016 (pièce no 36 de l'appelante), elle informait l'association de ce qu'elle était « ouverte à toute proposition de poste à temps plein et, a minima, dans les mêmes conditions salariales qu'actuellement, correspondant à [ses] compétences techniques et qualification, sans limitation de zone géographique. De plus, titulaire du Caferuis [elle était] également disponible pour un poste de chef de service socio-éducatif » ;
Or, attendu que l'association a proposé à Mme [I] épouse [U] les postes suivants : éducatrice spécialisée en Seine-Saint-Denis, éducatrice spécialisée en Guyane, éducateur spécialisé à [Localité 9], éducateur spécialisé à [Localité 14] et éducateur spécialisé ou assistante de service social ou conseiller en économie sociale et familiale à [Localité 6] ;
Et attendu que Mme [I] épouse [U] établit par sa pièce no 44 qu'aux mois de juillet à septembre 2016, c'est-à-dire à une époque contemporaine de l'avis d'inaptitude émis par la médecine du travail, 20 postes étaient vacants au sein du Groupe SOS, dont fait partie l'association, dont par exemple un poste de chef de service action éducative en milieu ouvert à [Localité 8], deux postes de chef de service à [Localité 13], un poste d'éducateur spécialisé à [Localité 12], un poste de chef de service éducatif à [Localité 11], un poste d'éducateur spécialisé à [Localité 5], trois postes d'éducateur spécialisé à [Localité 10], deux postes d'éducateur spécialisé à [Localité 7] ;
Attendu que ces postes n'ont pas été proposés à Mme [I] épouse [U] alors qu'ils correspondaient à ses qualifications et expérience et satisfaisaient aux préconisations du médecin du travail ; qu'il doit par conséquent être considéré que l'association a manqué à son obligation de recherche loyale de reclassement, en sorte que le licenciement de Mme [I] épouse [U] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Sur l'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse :
Vu l'article L. 1235-3, dans sa rédaction applicable, du code du travail ;
Attendu que Mme [I] épouse [U] avait 16 ans et sept mois d'ancienneté lors de son licenciement et qu'elle percevait un salaire brut mensuel de 3 530,05 euros ; qu'il sera fait une juste réparation du préjudice ainsi subi par elle par la condamnation de l'association à lui payer la somme de 53 000 euros ;
Sur l'indemnité compensatrice de préavis :
Vu l'article L. 1234-1 du code du travail ;
Attendu que Mme [I] épouse [U] avait une ancienneté de 16 ans et sept mois lors de son licenciement ; qu'elle peut par conséquent prétendre à une indemnité correspondant à deux mois de préavis, soit la somme de 7 060 euros, outre 706 euros au titre des congés payés afférents ;
Sur la prime d'encadrement des stagiaires :
Attendu que Mme [I] épouse [U] réclame la somme de 1 260 euros de ce chef, en exposant qu'elle bénéficiait d'une prime d'encadrement de stagiaires d'un montant mensuel de 105 euros depuis le mois de janvier 2010, et ce, qu'elle accompagnât ou non des stagiaires, et que cette prime a cessé de lui être servie à compter du mois de février 2016 ;
Attendu que l'association n'a pas conclu sur ce point ; que sollicitant la confirmation du jugement entrepris, elle est réputée s'en approprier les motifs ; que les premiers juges ont retenu, pour débouter Mme [I] épouse [U] de cette demande, que : « Il résulte des pièces et explications versées au dossier que d'une part contrat de travail de Mme [Z] [I] épouse [U] ne prévoit pas de prime d'encadrement et d'autre part Mme [Z] [I] épouse [U] ne justifie ni qu'elle ait encadré des stagiaires et ni que cette prime était un usage dans l'association AAPEJ. Qu'en conséquence la demande de Mme [I] épouse [U] à titre de prime d'encadrement des stagiaires est infondée » ;
Or, attendu que Mme [I] épouse [U] justifie par ses pièces no 51 et 52, constituées de bulletins de salaire, avoir perçu cette prime chaque mois, qu'elle ait alors encadré des stagiaires ou non, et que celle-ci lui a été supprimée à compter du mois de février 2016 (pièce no 53 de Mme [I] épouse [U]) ; que l'association n'avance aucune raison à cette suppression de ce qui s'analyse en un complément de rémunération, dont Mme [I] épouse [U] a été privée sans justification ; qu'il sera par conséquent fait droit à cette demande ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement,
Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 16 décembre 2019 par le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion ;
Statuant à nouveau,
Déboute Mme [I] épouse [U] de sa demande tendant à voir juger nul son licenciement ;
Dit que le licenciement de Mme [I] épouse [U] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Condamne l'Association d'aide et de protection de l'enfance et de la jeunesse à payer à Mme [I] épouse [U] les sommes de :
- 4 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice distinct ;
- 53 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
- 7 060 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
- 706 euros à titre d'indemnité de congés payés sur préavis ;
- 1 260 euros à titre de prime d'encadrement des stagiaires ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne l'Association d'aide et de protection de l'enfance et de la jeunesse à payer à Mme [I] épouse [U] la somme de 3 000 euros à titre d'indemnité pour frais non répétibles d'instance ;
Condamne l'Association d'aide et de protection de l'enfance et de la jeunesse aux dépens de première instance et d'appel.
Le présent arrêt a été signé par M. Lacour, président, et par Mme Hanafi, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,
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CAPP/JURITEXT000046991450.xml | COUR D'APPEL
BASSE - TERRE
No RG 22/714
No Portalis DVB7-V-B7G-DOZX
ORDONNANCE DU 12 JUILLET 2022
Dans l'affaire entre d'une part :
Monsieur [Y] [E] [C]
né le [Date naissance 2] 1967 à [Localité 3] (Vénézuela)
de nationalité Vénézuélienne (numéro de passeport 145085197)
se déclarant hébergé chez Madame [V] [S] [N], sis [Adresse 1]
assisté de Madame [L] [P], interprète en langue espagnole
comparant, assisté de Maître Laurent HATCHI, avocat au Barreau de la Guadeloupe,
Appelant le 11 juillet 2022 à 11h31 d'une ordonnance rendue le 9 juillet 2022 à 13h20 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre ;
et d'autre part,
Monsieur le Préfet de Saint-Barthélémy et Saint-Martin,
non comparant et non représenté,
Le ministère Public,
Représenté par Monsieur Eric RAVENET, substitut général,
*************
Nous, Emmanuel PLANQUE, conseiller à la Cour d'appel de Basse-Terre, délégué par ordonnance de Monsieur le premier président pour statuer en matière de rétention administrative, assistée de Monsieur Armélida RAYAPIN, greffier,
Vu le procès-verbal d'interpellation de Monsieur [E] [C] [Y] le 4 juillet 2022 à 21h30 ;
Vu le procès-verbal de notification du placement en mesure de retenue de l'intéressé le 4 juillet 2022 à 22h15 ;
Vu l'arrêté du préfet de Saint-Barthélémy et Saint-Martin no97822143SM du 5 juillet 2022 prononçant l'obligation de quitter sans délai le territoire français de Monsieur [E] [C] [Y], avec interdiction de retour pendant une durée d'un an ;
Vu la décision du préfet de Saint-Barthélémy et Saint-Martin no 97822143SM de placement au centre de rétention administrative de l'intéressé en date du 5 juillet 2022 ;
Vu le procès-verbal de notification de ses droits en rétention en date du 5 juillet 2022 à 16h45 ;
Vu l'ordonnance du 9 juillet 2022 rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre ordonnant la prolongation de la rétention administrative de l'intéressé pour une durée maximale de vingt-huit jours ;
Vu l'appel interjeté à l'encontre de cette ordonnance suivant courriel du 11 juillet 2022 à 11 heures 31 par Monsieur [E] [C] [Y] ;
A l'audience qui s'est tenue publiquement au palais de justice de BASSE-TERRE le mardi 12 juillet 2022 à 10 heures 30, ont été entendus Monsieur l'avocat général et Monsieur [Y], assisté de son conseil ;
Suivant la déclaration d'appel précitée, Monsieur [Y] demande sa remise en liberté et, à défaut, son placement sous le régime de l'assignation à résidence puisqu'il est détenteur d'un passeport et justifie d'un hébergement à [Localité 5].
Il explique qu'il a souhaité faire une demande d'asile dès son interpellation par les services de la Police aux frontières alors qu'il s'apprêtait à quitter le territoire de l'île de [Localité 5], qu'il l'a formalisée le 11 juillet 2022 auprès du greffe du Centre de rétention administrative et soutient que la procédure l'ayant placé en rétention administrative est dès lors irrégulière.
Son conseil a par ailleurs fait valoir que son placement en rétention administrative était en tout état de cause inutile dans la mesure où il vivait habituellement à Sint Maarten et qu'il n'avait aucune intention de résider sur le territoire national français.
Monsieur l'avocat général a demandé la confirmation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ordonnant la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [Y], en l'absence de garantie de représentation suffisante le temps nécessaire pour organiser sa reconduite.
1/ Sur la recevabilité de l'appel,
Conformément aux dispositions de l'article R743-10 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui statue sur une demande relative à la rétention d'un étranger est susceptible d'appel dans les 24 heures de son prononcé par déclaration motivée.
Le délai prévu est calculé et prorogé conformément aux articles 640 et 642 du Code de procédure civile.
L'ordonnance du juge des libertés et de la détention de [Localité 4] querellée a été rendue le samedi 9 juillet 2022 à 13h20, de sorte que le délai d'appel expirant en principe le dimanche 10 juillet 2022 à 13h20 a été prorogé de vingt-quatre heures.
L'appel de Monsieur [Y] ayant été formé le 11 juillet 2022 à 11h31 est donc recevable.
2/ Sur la mesure de rétention administrative,
Aux termes du premier alinéa de l'article L612-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), « L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. »
L'article L612-2 du même Code dispose que « par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire (notamment s'il) existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ».
L'article L612-3 précise que :
« Le risque mentionné au 3o de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :
1o L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
2o L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
3o L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;
4o L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;
5o L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;
6o L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;
7o L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ;
8o L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3o de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5. »
L'article L731-1 dispose quant à lui que :
« L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants :
1o L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins d'un an auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ;
2o L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction de retour sur le territoire français prise en application des articles L. 612-6, L. 612-7 et L. 612-8 ;
3o L'étranger doit être éloigné pour la mise en oeuvre d'une décision prise par un autre État, en application de l'article L. 615-1 ;
4o L'étranger doit être remis aux autorités d'un autre Etat en application de l'article L. 621-1 ;
5o L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction de circulation sur le territoire français prise en application de l'article L. 622-1 ;
6o L'étranger fait l'objet d'une décision d'expulsion ;
7o L'étranger doit être éloigné en exécution d'une peine d'interdiction judiciaire du territoire prononcée en application du deuxième alinéa de l'article 131-30 du code pénal ;
8o L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction administrative du territoire français.
L'étranger qui, ayant été assigné à résidence en application du présent article, ou placé en rétention administrative en application des articles L. 741-1 ou L. 741-2, n'a pas déféré à la décision dont il fait l'objet ou, y ayant déféré, est revenu en France alors que cette décision est toujours exécutoire, peut être assigné à résidence sur le fondement du présent article. »
L'article L740-1 explique que « l'autorité administrative peut, dans les conditions prévues au présent titre, placer en rétention un étranger pour l'exécution de la décision d'éloignement dont il fait l'objet. »
L'article L741-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que :
« L'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.
Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3. »
L'article L741-3 du même Code précise que « un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet. »
Aux termes de l'article L521-1 du CESEDA, « tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente qui enregistre sa demande et procède, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, à la détermination de l'Etat responsable en application du règlement (UE) no 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ou en application d'engagements identiques à ceux prévus par le même règlement. »
L'article L521-7 prévoit quant à lui que « lorsque l'enregistrement de sa demande d'asile a été effectué, l'étranger se voit remettre une attestation de demande d'asile dont les conditions de délivrance et de renouvellement sont fixées par décret en Conseil d'Etat. La durée de validité de l'attestation est fixée par arrêté du ministre chargé de l'asile.
La délivrance de cette attestation ne peut être refusée au motif que l'étranger est démuni des documents et visas mentionnés à l'article L. 311-1. Elle ne peut être refusée que dans les cas prévus aux c ou d du 2o de l'article L. 542-2.
Cette attestation n'est pas délivrée à l'étranger qui demande l'asile à la frontière ou en rétention. »
L'article L541-2 précise en effet que « l'attestation délivrée en application de l'article L. 521-7, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la Cour nationale du droit d'asile statuent. »
Il ressort de la procédure que Monsieur [E] [C] [Y] est de nationalité vénézuélienne, a déclaré y avoir une épouse et des enfants tout en résidant depuis plusieurs années sur la partie hollandaise de l'île de [Localité 5].
Il a expliqué qu'il avait le projet de se rendre à Saint John's, île vierge des Etats-Unis, afin d'y trouver du travail en tant qu'électricien, via l'île de [Localité 5] où il a été interpellé le 4 juillet 2022 alors qu'il s'apprêtait à quitter ce territoire par la mer, ainsi qu'il l'explique lui-même dans son acte d'appel.
Il admet qu'il ne bénéficie d'aucun document l'autorisant à séjourner sur le territoire guadeloupéen et s'il expose dans son mémoire qu'il est hébergé chez Madame [V] [S] sur l'île de [Localité 5], il convient de relever qu'il avait déclaré initialement être hébergé chez une certaine « [O] » sur le territoire de Sint Maarten, ce qu'il a d'ailleurs admis à l'audience.
Il doit être également noté que lors de la notification de ses droits au moment de son placement en rétention administrative à [Localité 5], Monsieur [E] [C] [Y] a indiqué expressément que « il ne désirait pas déposer de demande d'asile ».
Ainsi, ce n'est qu'après la décision querellée du juge des libertés et de la détention du 9 juillet 2022 qu'il a pris la décision de demander l'asile tout en faisant appel de cette ordonnance le surlendemain sur le fondement des articles L521-1 et L541-2 du CESEDA.
Cette demande apparaît dès lors dilatoire, et semble n'avoir été formée que dans le but de faire échec ou de retarder la mesure d'éloignement dont il faisait l'objet.
Enfin, la mesure de rétention administrative dont il fait l'objet ne peut être considérée comme inutile du seul fait qu'il avait le projet de quitter l'île de [Localité 5], dès lors qu'il envisageait d'utiliser des moyens illégaux pour se faire.
Il y a lieu dès lors de confirmer la décision querellée en ce qu'elle a déclaré la procédure de placement en rétention régulière.
3/ Sur la prolongation de la mesure de rétention administrative,
L'article L742-1 du CESEDA dispose que :
« Le maintien en rétention au-delà de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, dans les conditions prévues au présent titre, par le juge des libertés et de la détention saisie à cette fin par l'autorité administrative. »
Compte-tenu de ce qui précède, il est établi qu'il existe pour Monsieur [Y] des perspectives raisonnables d'éloignement vers son pays d'origine et que cette reconduite peut s'exécuter à bref délai, précisément le 29 juillet 2022 ainsi que l'autorité administrative en justifie.
Par ailleurs, comme précisé supra, l'hébergement allégué par l'intéressé apparaît être de circonstance et il a été relevé que son passeport n'est aujourd'hui plus valide, par suite de sa péremption le 9 juillet dernier.
Ainsi, Monsieur [Y] ne justifie pas de conditions de nature à permettre une assignation à résidence qui garantirait efficacement l'exécution effective de l'obligation de quitter le territoire français qui lui a été notifiée.
Aussi, il convient de faire droit à la requête de Monsieur le préfet tendant à voir prolonger la mesure de rétention administrative dans les conditions prévues à l'article L742-3 du CESEDA, soit pour une période de vingt-huit jours à compter de l'expiration du délai initial de quarante-huit heures.
PAR CES MOTIFS,
Nous, Emmanuel PLANQUE, conseiller, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président, assistée de Armélida RAYAPIN, greffier,
Statuant publiquement, par décision réputée contradictoire et rendue en dernier ressort, après débats en audience publique,
Déclarons recevable l'appel de Monsieur [Y] [E] [C] formé à l'encontre de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de [Localité 4] en date du 9 juillet 2022 ;
Confirmons l'ordonnance déférée du juge des libertés et de la détention de Pointe-à-Pitre en date du 9 juillet 2022 en ce qu'elle a déclaré la procédure régulière et a ordonné la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [Y] [E] [C], pour une durée maximale de vingt-huit jours ;
Disons que la présente ordonnance sera notifiée aux parties intéressées par tout moyen par le greffe de la cour d'appel et sera transmise à Monsieur le procureur général ;
Fait à BASSE-TERRE le 12 juillet 2022 à 14 heures 00
La greffière Le magistrat délégué
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CAPP/JURITEXT000046991444.xml | AFFAIRE : No RG 21/01998 - No Portalis DBWB-V-B7F-FUKF
Code Aff. :
ARRÊT N PB
ORIGINE :JUGEMENT du Cour d'Appel de SAINT-DENIS DE LA REUNION en date du 15 Novembre 2021, rg no 20/01675 ARRET DU 15 Novembre 2021
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT EN RECTIFICATION D'ERREUR MATERIELLE
DU 13 JUILLET 2022
REQUERANT :
LA CAISSE AUTONOME DE RETRAITE DES MÉDECINS DE FRANCE - CARMF
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentant : Me Patrice SANDRIN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [T] [U] [F]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Non comparant
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Delphine GRONDIN, greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022 prorogé au 13 juillet 2022;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Philippe BRICOGNE
Conseiller : Laurent CALBO
Conseiller : Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 JUILLET 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Par requête déposée le 19 avril 2019, Monsieur [T] [U] [F] a saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Saint-Denis aux fins de contester le rejet implicite de la commission de recours amiable et solliciter sur le fondement de l'article 106 du traité de l'Union européenne, de la directive no 2005/29 CE du 11 mai 2005, des dispositions du code de la mutualité et du code de la sécurité sociale, de voir :
- dire et juger que l'affiliation automatique est en contradiction avec le traité et directive européenne et relèvent de la directive 2005/29 CE du 11 mai 2005,
- en conséquence, annuler la mise en demeure querellée,
- en tout état de cause, condamner la caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF) au paiement d'une somme de 1.500,00 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
2. Par jugement du 26 août 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Denis a:
- rejeté la demande de transmission d'une question préjudicielle,
- validé la mise en demeure du 10 décembre 2018 émise à l'encontre de Monsieur [T] [U] [F] pour la somme de 24.502,14 €,
- condamné Monsieur [T] [U] [F] à payer à la CARMF la somme de 24.502,14 €,
- ordonné l'exécution provisoire de cette décision,
- rejeté la demande de dommages et intérêts présentée par Monsieur [T] [U] [F],
- condamné Monsieur [T] [U] [F] à payer à la CARMF la somme de 500,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Monsieur [T] [U] [F] aux dépens.
3. Par arrêt du 15 novembre 2021, la cour a :
- constaté que Monsieur [T] [U] [F] ne soutient pas son appel et que la cour d'appel n'est saisie d'aucun moyen,
- dit que le jugement du "conseil de prud'hommes" de Saint-Denis du "26 août 2021" sortira son plein et entier effet,
- débouté la "CARMIF" de sa demande au titre de l'amende civile,
- débouté la "CARMIF" de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Monsieur [T] [U] [F] aux dépens.
4. Par requête du 25 novembre 2021, la CARMF a saisi la cour d'une rectification d'erreurs matérielles affectant l'arrêt tant la désignation de la juridiction que dans la désignation d'une des parties.
5. Les parties ont été convoquées par lettre recommandée avec avis de réception du 14 janvier 2022 à l'audience du 22 février 2022.
6. Monsieur [T] [U] [F] n'ayant pas retiré le recommandé portant convocation, il a été cité par acte du 4 mars 2022 suivant remise en étude d'huissier.
7. L'affaire a été plaidée à l'audience du 11 avril 2022 et mise en délibéré au 5 juillet 2022 prorogé au 13 juillet 2022.
8. La CARMF maintient les termes de sa requête.
9. Monsieur [T] [U] [F] n'a pas comparu et ne s'est pas fait représenter.
MOTIFS DE LA DÉCISION
10. L'article 462 du code de procédure civile dispose en son 1er alinéa que "les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande".
11. En l'espèce, la CARMF demande la correction de l'arrêt en ce qu'il la mentionne sous le nom de "CARMIF" et évoque une décision du "conseil de prud'hommes" de Saint-Denis au lieu du pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Denis.
12. Il conviendra de procéder à la rectification de ces simples erreurs matérielles en y ajoutant la mention du jugement qui est du 26 août 2020 et non du "26 août 2021" comme indiqué au dispositif.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, en matière sociale et en dernier ressort, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Ordonne la rectification de l'arrêt du 15 novembre 2021 en ce qu'il mentionne la "CARMIF" au lieu de la CARMF,
Ordonne la rectification du dispositif en ce qu'il "dit que le jugement du "conseil de prud'hommes" de Saint-Denis du 26 août 2021 sortira son plein et entier effet" et dit qu'il convient de lire : "dit que le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Denis du 26 août 2020 sortira son plein et entier effet",
Ordonne qu'il soit fait mention des présentes rectifications en marge de la minute de l'arrêt du 15 novembre 2021,
Dit que les frais et dépens de l'instance en rectification seront à la charge du trésor public.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, Président de chambre, et par Mme Delphine GRONDIN, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046991478.xml | République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 1
ARRÊT DU 07/07/2022
No de MINUTE : 22/
No RG 20/02049 - No Portalis DBVT-V-B7E-TAVT
Jugement (No19/04096) rendu le 12 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Boulogne sur Mer
Ordonnance d'incident (No 21/252) rendu le 07 octobre 2021 rendu par le conseiller de la mise en état
Madame [E] [Z] veuve [B]
née le [Date naissance 4] 1960 à [Localité 7], de nationalité française
demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Anne Painset Beauvillain, avocat au barreau de Boulogne-sur-Mer
Monsieur [S] [K]
né le [Date naissance 5] 1969 à [Localité 6], de nationalité française
demeurant[Adresse 3]
représenté par Me Alex Dewattine, avocat au barreau de Boulogne-sur-Mer
DÉBATS à l'audience publique du 23 mars 2022 tenue par Véronique Renard magistrat chargé d'instruire le dossier qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Valérie Roelofs
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Véronique Renard, présidente de chambre
Dominique Gilles, président
Pauline Mimiague, conseiller
ARRÊT AVANT DIRE DROIT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 07 juillet 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Véronique renard, président et Valérie roelofs, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 16 mars 2022
Vu le jugement contradictoire rendu le 12 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Boulogne sur Mer qui a :
- dit n'y avoir lieu à homologation de l'accord transactionnel signé le 2 Juillet 2019 entre Mme [E] [Z] [B] et M. [S] [K],
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
- condamné Mme [E] [Z] [B] aux entiers dépens,
Vu l'appel interjeté le 12 juin 2020 par Mme [E] [Z],
Vu l'ordonnance rendue le 7 octobre 2021 par le conseiller de la mise en état qui a ordonné le renvoi de l'affaire devant la cour pour qu'il soit statué à la fois sur la question de fond et sur la fin de non-recevoir soulevée par M. [K],
Vu les dernières conclusions no 3 remises au greffe et notifiées par voie électronique le 8 mars 2022 par Mme [Z], qui demande à la cour de :
- la déclarer recevable et bien fondée en son appel interjeté le 12 juin 2020,
- la recevoir en ses demandes,
Y faisant droit,
- infirmer la décision du 12 mai 2020 rendue par le tribunal judiciaire de Boulogne-sur- Mer,
En conséquence,
Statuant à nouveau,
- débouter Monsieur [S] [K] de l'ensemble de ses demandes,
- homologuer le protocole d'accord transactionnel en date du 02 juillet 2019 établi entre
Mme [E] [Z] veuve [B] et Monsieur [S] [K],
- condamner M. [S] [K] à payer à Madame [E] [Z] veuve [B] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
- condamner Monsieur [S] [K] aux entiers dépens, y compris les dépens de
première instance,
Vu les dernières conclusions no3 remises au greffe et notifiées par voie électronique le 15 mars 2022 par M. [K], qui demande à la cour de :
In limine litis (sic), déclarer irrecevable l'action intentée par Madame [E] [B],
Par voie de conséquence (sic) :
- rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions présentées par Madame [E] [B],
En tout état de cause :
- condamner Mme [E] [B] à payer à M. [S] [K] une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner Madame [E] [B] aux entiers frais et dépens de l'appel,
Vu l'ordonnance de clôture du 16 mars 2022 ;
Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.
Il sera simplement rappelé que selon requête du 13 novembre 2019, Mme [Z] [B] a sollicité auprès du tribunal de grande instance (devenu le tribunal judiciaire) de Boulogne-sur-Mer l'homologation d'un protocole transactionnel signé le 2 juillet 2019 avec M. [K] portant sur les conditions de réfection de la toiture terrasse de l'immeuble situé [Adresse 2] à [Localité 7], propriété des époux [B] dont le local du rez de chaussée a été donné à bail le 26 octobre 2006 à M. [K].
Les parties ont été convoquées devant le tribunal au visa de l'article 2066 du code civil relative à la convention de procédure participative à l'audience du 7 janvier 2020 au cours de laquelle M. [K] s'est opposé à toute homologation faisant valoir que Mme [Z] [B] n'a pas tenu ses engagements pris le 2 juillet 2019 de faire réaliser les travaux nécessaires avant le 1er janvier 2020.
C'est dans ces circonstances que le tribunal, statuant à juge unique, a dit n'y avoir lieu à homologation de l'accord transactionnel signé le 2 juillet 2019 entre Mme [Z] [B] et M. [K].
Selon l'article 1567 du code de procédure civile les dispositions des articles 1565 et 1566 sont applicables à la transaction conclue sans qu'il ait été recouru à une médiation, une conciliation ou une procédure participative. Le juge est alors saisi par la partie la plus diligente ou l'ensemble des parties à la transaction.
Aux termes du 1er alinéa de l'article 1565 du même code, l'accord auquel sont parvenues les parties à une médiation, une conciliation ou une procédure participative peut être soumis, aux fins de le rendre exécutoire, à l'homologation du juge compétent pour connaître du contentieux dans la matière considérée.
L'article 1566 ajoute que le juge statue sur la requête qui lui est présentée sans débat, à moins qu'il n'estime nécessaire d'entendre les parties.S'il est fait droit à la requête, tout intéressé peut en référer au juge qui a rendu la décision. La décision qui refuse d'homologuer l'accord peut faire l'objet d'un appel. Cet appel est formé par déclaration au greffe de la cour d'appel. Il est jugé selon la procédure gracieuse.
Enfin l'article 809 du code de procédure civile impose la communication au ministère public des affaires gracieuses.
En l'espèce, Mme [Z], qui conclut à l'infirmation du jugement, sollicite l'homologation d'un accord transactionnel signé le 2 juillet 2019 entre elle et M. [K].
Il est constant que cet accord peut être soumis, aux fins de le rendre exécutoire, à l'homologation du juge compétent et que le jugement qui a refusé cette homologation peut faire l'objet d'un appel par déclaration au greffe de la cour . Pour autant, jugé selon la procédure gracieuse, il doit être communiqué au ministère public.
PAR CES MOTIFS
Révoque l'ordonnance de clôture ;
Ordonne la communication au ministère public de la présente affaire gracieuse ;
Réserve toutes demandes.
Le greffier La présidente
Valérie Roelofs Véronique Renard
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CAPP/JURITEXT000018105115.xml | AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLEGIALE
R.G : 06 / 00991
SA ANAVEO VENANT AUX DROITS DE C.S.T FRANCE
APPEL D'UNE DECISION DU :
Conseil de Prud'hommes de LYON
du 19 Janvier 2006
RG : 04 / 00125
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 20 NOVEMBRE 2007
APPELANTE :
Madame Paola Y... EPOUSE X...
69130 ECULLY
représentée par Me Pierre MASANOVIC, avocat au barreau de LYON
SA ANAVEO VENANT AUX DROITS DE C.S.T FRANCE
10 rue des Rosieristes
69410 CHAMPAGNE AU MONT D OR
représentée par Me Bruno ALART, avocat au barreau de LYON
PARTIES CONVOQUEES LE : 12 Juin 2006
DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 16 Octobre 2007
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Didier JOLY, Président
Madame Marie-Pierre GUIGUE, Conseiller
Madame Danièle COLLIN-JELENSPERGER, Conseiller
Assistés pendant les débats de Monsieur Julien MIGNOT, Greffier.
ARRET : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 20 Novembre 2007, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Signé par Monsieur Didier JOLY, Président, et par Mademoiselle Eléonore BRUEL, Adjoint administratif assermenté faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*************
Madame X... a été engagée par la société C.S.T France en qualité de directrice administrative et financière du groupe de sociétés, suivant contrat à durée indéterminée du 13 janvier 2003, soumis aux dispositions de la convention collective nationale des entreprises de la prévention et de la sécurité, moyennant une rémunération mensuelle brute de 5 850 euros, outre une prime annuelle sur objectifs de l'ordre de 3 000 à 5 000 euros.
Le contrat précise que « ce recrutement s'inscrit dans le cadre du développement du groupe avec pour objectif la promotion de Madame X... au poste de directeur général d'ici la fin de l'année 2003 en fonction de sa bonne intégration au sein de la structure ». Une période d'essai de trois mois était contractuellement prévue, renouvelable pour une durée équivalente après accord écrit des parties.
Madame X... a été placée en arrêt-maladie du 30 octobre 2003 au 4 novembre 2003.Par lettre recommandée avec avis de réception datée du 21 novembre 2003, la société C.S.T France a convoqué Madame X... à un entretien préalable à un éventuel licenciement, entretien prévu le 5 décembre 2003.
Par lettre recommandée avec avis de réception datée du 17 décembre 2003, la société C.S.T France a notifié à Madame X... son licenciement dans les termes suivants : « Lorsque vous avez intégré l'entreprise en qualité de directeur administratif et financier notre projet clairement défini était de vous positionner au terme d'une période de 6 à 12 mois sur un mandat de directeur général. Certes votre attitude m'a-t-elle alors pour le mois surpris lorsque vous avez opposé un refus catégorique dans les premiers jours de votre engagement de vous inscrire dans les travaux de clôture de bilan considérant que l'exercice de clôture 2002 ne vous concernait en rien. Sans remettre en cause vos compétences professionnelles, je regrette de devoir vous confirmer avoir observé de votre part une application particulière à déléguer plutôt qu'à vous investir et dans le même temps une regrettable obstination à nier le rôle de chacun des partenaires tant internes qu'extérieurs à l'entreprise, opposant à leur prise de position une attitude d'une rigidité pour le moins négative et paralysante provoquant pour la grande majorité d'entre eux une sourde hostilité à votre encontre. Les effets n'ont pas manqué de s'en faire ressentir ainsi pour exemple :
Sur le plan strictement professionnel
-alors que j'espérais disposer des budgets courant février 2003, vous ne me les avez finalement présentés que le 27 mai 2003,
-il ne vous a pas été possible de présenter la situation définitive au 30 juin 2003 pour fin juillet 2003 et j'ai dû attendre la fin septembre 2003 pour en connaître la teneur,
-de la même façon, les résultats au 30 septembre 2003 n'ont été portés à ma connaissance qu'à la fin du mois de novembre 2003,
-il vous aura fallu deux mois pour organiser la recherche de candidats pour le poste d'assistante administrative dont je vous avais demandé de vous occuper dès la fin du mois de juin 2003. Les premières candidates n'ont été reçues que le 9 octobre,
-quant aux projets de mise en place d'un nouveau système informatique, vous avez refusé de vous y inscrire en prétextant une réorganisation de structure devait lui précéder, niant une fois de plus l'urgence de vous y impliquer,
Sur le plan relationnel
-compte tenu de l'objectif poursuivi, il me semblait fondamental de démontrer vos capacités à fédérer autour de vous votre équipe de collaborateurs et d'emporter l'adhésion du comité de direction. Si l'on juge le total défaut de communication et le climat relationnel pesant qui en découle avec l'ensemble de vos interlocuteurs, je crains de devoir en conclure que le but est loin d'avoir été atteint,
-de même, nos conseils extérieurs se sont-ils plaint des multiples difficultés rencontrées de votre fait pour mener à bien votre mission. »
Par lettre recommandée avec avis de réception datée du 24 décembre 2003, Madame X... a contesté la lettre de licenciement.
Le 13 janvier 2004, Madame X... a saisi le Conseil de prud'hommes de Lyon.
Par jugement du 19 janvier 2006, le Conseil de prud'hommes de Lyon (section encadrement) a :
-dit que le licenciement de Madame X... repose sur une cause réelle et sérieuse,
-débouté Madame X... de l'intégralité de ses demandes,
-débouté la société C.S.T France de sa demande au titre des frais irrépétibles,
-condamné Madame X... aux dépens.
Madame X... a interjeté appel du jugement.
Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales à l'audience par Madame X... qui demande à la cour de :
-dire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,
-condamné la société ANAVEO venant aux droits de la société C.S.T France à lui payer les sommes de :
Ø 35 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Ø 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,
Ø 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'exécution de bonne foi du contrat de travail résultant de la non-fixation de la prime d'objectifs,
Ø 4 000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance ;
Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales à l'audience par la société ANAVEO qui demande à la cour de confirmer le jugement entrepris et de condamner Madame X... au paiement de la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;
DISCUSSION
Sur le licenciement
Attendu qu'il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les termes du litige et de former sa conviction au vu des éléments fournis par les parties conformément aux dispositions de l'article L. 122-14-3 du Code du travail ; que le licenciement pour une cause inhérente à la personne du salarié doit être fondé sur des éléments objectifs ;
Que selon l'article 4 de son contrat de travail, Madame X... était tenue en sa qualité de directeur administratif et financier, disposant d'une petite équipe de trois personnes, de réaliser notamment la supervision de la comptabilité avec préparation du bilan et des liasses fiscales, le contrôle de gestion et la gestion de trésorerie et avait la responsabilité de la gestion du personnel et des moyens informatiques ;
Qu'il résulte des courriels produits au débat et des témoignages précis et concordants de Monsieur E..., commissaire aux comptes de la société, de Monsieur A..., expert-comptable et des deux salariés occupant les postes de comptable et aide-comptable placés sous les ordres de la directrice que Madame X..., embauchée le 13 janvier 2003, a instauré une méthode de travail pour l'établissement du bilan clos au 31 décembre 2002 laissant Monsieur B..., jeune comptable de 23 ans ayant deux ans d'ancienneté dans l'entreprise, effectuer l'essentiel des démarches sur les comptes et répondre aux questions des intervenants extérieurs ; que contrairement à ce que soutient la salariée, la plupart des courriels envoyés à cette période par l'expert-comptable sont adressés à Monsieur B...seul et jamais à Madame X... alors que dans le même temps, la directrice transmet au comptable ses instructions en vue de les diriger vers les intervenants extérieurs, le commissaire aux comptes écrivant le 25 février 2003 qu'il n'avait pas eu le plaisir de rencontrer la nouvelle directrice ; que les courriels du printemps 2003 établissent que le commissaire aux comptes demandait au comptable de transmettre les éléments sans s'adresser au directeur administratif et financier alors que dans le même temps Madame X... demandait à son subordonné des copies des pièces et envois mail pour classement dans ses dossiers personnels ;
Que les courriels adressés à Monsieur B...pour l'établissement du budget 2003 confirment cette difficulté résultant du fait que Madame X... laissait au comptable des responsabilités déléguées ne correspondant pas à sa mission et à la répartition des tâches au sein d'un service composé de trois personnes, une directrice, un comptable et une aide-comptable ; que la cour retient notamment à titre d'exemple les difficultés survenues à l'occasion de l'établissement de la situation au 30 juin 2003 tardivement établie fin septembre 2003, les courriels d'août 2003 établissant que la directrice partant en congés demandait au comptable de réaliser le travail d'analyse et d'explication des écarts de bilan constatés relevant du travail auquel elle était tenue au titre du contrôle de gestion ; que le commissaire aux comptes témoigne ainsi : « dans le courant de l'année 2003, j'ai eu peu de contact avec Madame X... dans la mesure où à chaque sollicitation, elle ne jouait pas son rôle de directeur administratif et financier, à savoir de centralisation et de discussion mais elle nous renvoyait soit vers Monsieur B...soit vers Madame C...» ; que Monsieur A..., expert-comptable, témoigne dans le même sens en se plaignant de la faible implication de Madame X... pour répondre à leurs questions ; que Monsieur B...atteste qu'il se sentait dépassé par l'ampleur des tâches et précise qu'il se sentait harcelé ; que Madame D..., aide-comptable, atteste : « j'ai constaté que Madame X... harcelait David B...en lui demandant de tout faire à sa place. Ceci a poussé David à bout et quand il est parti en congés en juin 2003, il m'a dit : « je me fous de tout, je pars en congés ou je démissionne » ; que ces témoignages ne peuvent être écartés du seul fait qu'ils émanent de salariés dès lors qu'ils sont corroborés par les intervenants extérieurs et par la définition des méthodes de travail résultant des courriels produits par Madame X... elle-même ;
que contrairement à ce que soutient la salariée, ce management témoignant d'un manque d'implication de la directrice au détriment de ses subordonnés doit également être constaté concernant des tâches relevant de sa fonction administrative déléguées à Madame C..., assistante en ressources humaines, chargée par Madame X... de rédiger un nouveau règlement intérieur, gérer le plan de formation, renégocier les contrats de prévoyance et rédiger le document unique de sécurité ; que la teneur des courriels échangés dans le service et les documents de répartition des tâches au sein de la direction administrative et financière rédigés par Madame X... établissent l'inadaptation de cette organisation à la structure du service à la différence des compétences hiérarchisées existant dans une plus grande entreprise ; que ce management a pu conduire à l'insatisfaction de l'équipe et permet à l'employeur de mentionner dans la lettre de licenciement que Madame X... n'avait pas su fédérer ses équipes ;
que le retard dans la réalisation des suivis budgétaires du bilan 2003 et la présentation à la direction des situations trimestrielles est également établi au débat ; que le récapitulatif des tâches remis à Monsieur B..., pièce 30, mentionnant les dates des multiples diligences mises à sa charge permet de vérifier les très nombreux reports et le fait que des situations trimestrielles devaient être réalisées et n'ont pas été remises à temps à la direction ; que les comptes rendus des comités de direction des 27 octobre et 24 novembre 2003 mentionnent au titre des observations de Madame X... : « la clôture au 30 septembre est en cours » puis « les situations au 30 septembre 2003 seront disponibles en fin de semaine » sans autre commentaire de la directrice administrative et financière ; que Madame X... n'explique pas dans le débat judiciaire la raison de ces difficultés ; que Madame X... se contente d'indiquer que la situation au 30 juin 2003 a été remise à la direction le 2 août 2003 ; que si un document informatique a été établi comportant cette date, la salariée n'en prouve pas l'envoi à la direction malgré son habitude de communiquer par courriels avec le président-directeur-général de la société ; que surtout, les diligences demandées à Monsieur B...après cette date concernant les écarts établissent que la situation intermédiaire formalisée le 2 août n'était pas exploitable par la direction ; qu'une explication peut être trouvée dans la charge de travail déléguée à ses subordonnés et dans certaines instructions de Madame X... aux différents services réclamant une correction répétée et pointilleuse de certaines opérations de nature à induire des retards ;
qu'enfin, les difficultés relationnelles et le manque de communication déjà décrits par les éléments qui précèdent sont corroborés par les témoignages précis et circonstanciés de deux membres du comité de direction et de la secrétaire du comité de direction attestant de la rigidité des positions exprimées par Madame X... parfois jusqu'à la virulence à l'égard du président-directeur-général ; que la concordance avec les témoignages des salariés sous ses ordres décrivant tous un comportement peu compréhensif et excessivement autoritaire de Madame X... et celui d'un salarié du service technique précisant « qu'elle ne leur faisait pas confiance et se comportait comme s'ils ne pensaient qu'à voler la société. Je pense qu'il faut savoir donner afin de recevoir » conduit à considérer que Madame X... n'a pas fait l'objet d'une cabale orchestrée par la direction ;
que Madame X... prétend avoir été mise à l'écart à compter de sa demande auprès du président-directeur général en septembre 2003 de réalisation du projet de nomination en qualité de directeur général ; que les courriels échangés entre les parties à compter de cette date ne témoignent pas d'une mise à l'écart ou d'un comportement agressif du président-directeur-général ; que Madame X... soutient avoir été écartée des comités de direction alors que sa présence figure dans les comptes rendus produits au débat jusqu'à fin décembre 2003 ; que Madame X... n'établit pas d'éléments objectifs relatifs à une attitude fautive de l'employeur dans le dernier trimestre d'exécution du contrat de travail ;
qu'il résulte de ces éléments que Madame X... ne s'est pas adaptée aux responsabilités techniques et relationnelles de directeur administratif et financier qui lui avaient été confiées ne permettant pas l'évolution à un poste de directeur général ; que le licenciement de Madame X... est fondé sur une cause réelle et sérieuse ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté Madame X... de sa demande d'indemnisation de ce chef ;
Sur la demande de dommage-intérêts pour licenciement vexatoire
Attendu que Madame X... ne rapporte pas la preuve de circonstances vexatoires entourant le licenciement du seul fait de l'interruption du préavis ; qu'en effet, cette décision a été prise par l'employeur le jour où a été constaté l'effacement par Madame X... des courriels professionnels contenus dans son ordinateur professionnel, fait non contesté par la salariée ; que Madame X... sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral ; que le jugement entrepris sera confirmé sur ce point ;
Sur la demande au titre de la prime d'objectif
Attendu que l'article 1134 du Code civil dispose que « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi » ; que le principe d'exécution de bonne foi des conventions a été précisé pour le contrat de travail à l'article L. 120-4 du Code du travail introduit par la loi no2002-73 du 17 janvier 2002, applicable en l'espèce ;
qu'il est établi au débat que la société ANAVEO n'a jamais fixé l'objectif conditionnant l'effectivité de la prime annuelle brute de 3 000 à 5 000 euros stipulée au contrat de travail ; que l'employeur ne peut excuser a posteriori ce manquement contractuel par l'insuffisance professionnelle établie à l'encontre de la salariée ; que dès lors qu'une prime d'objectif était contractuellement prévue, la société ANAVEO avait l'obligation de déterminer cet objectif en concertation avec Madame X... pour l'année 2003 ; que sa carence fautive a privé la salariée d'une chance de réaliser l'objectif et d'améliorer ainsi sa rémunération et a ainsi causé à Madame X... un préjudice certain qui sera réparé par l'allocation d'une somme de 3 000 euros ; que le jugement entrepris sera infirmé sur ce point ;
Sur les frais irrépétibles
Attendu qu'il est équitable de laisser chacune des parties supporter les frais qu'elle a exposés, tant en première instance que devant la cour, et qui ne sont pas compris dans les dépens ;
PAR CES MOTIFS,
Reçoit l'appel régulier en la forme ;
Infirme le jugement entrepris en ses dispositions relatives à l'indemnisation au titre de la prime d'objectif ;
Statuant à nouveau :
Condamne la société ANAVEO à payer à Madame X... la somme de 3 000 euros (TROIS MILLE EUROS) à titre de dommages et intérêts pour non-fixation de la clause d'objectif ;
Confirme le jugement dans ses autres dispositions ;
Déboute les parties de leurs demandes en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;
Condamne Madame X... aux dépens d'appel.
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CAPP/JURITEXT000046226718.xml | COUR d'APPEL
BASSE-TERRE
ORDONNANCE
DU 1er août 2022
RG : 22/00834
Par devant Nous, BUSEINE Gaëlle, conseillère, agissant sur délégation du Premier président de la cour d'appel de Basse-Terre, assistée de Mme LARGITTE Christiane, greffière,
Vu la procédure concernant :
M. [Y] [U]
né le [Date naissance 1] 1977 à [Localité 3] (Jamaïque)
de nationalité jamaïcaine
Actuellement retenu au centre de rétention des [Localité 2]
Appelant de l'ordonnance rendue le 30 juillet 2022 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre.
Ayant pour avocat Maître HECKMANN Lise-Marie, avocate au barreau de la Guadeloupe, présente,
Assisté de Madame [K] [X], Interprète en langue anglaise,
D'autre part,
L'Autorité administrative (M. Le Représentant des collectivités de [Localité 5] et [Localité 4]), ni présente, ni représentée, qui a fait parvenir ses observations écrites le 1er août 2022.
Le Ministère Public, représenté par M. RAVENET Eric, Substitut Général près la Cour d'Appel de Basse-Terre, présent.
Les débats ont eu lieu en audience publique au Palais de justice de Basse-Terre, le lundi 1er août 2022 à 16h00.
Vu la décision du 27 juillet 2022 du préfet de la région Guadeloupe portant obligation pour M. [Y] [U] de quitter le territoire français, sans délai de départ, assortie d'une interdiction de retour d'une durée d'un an et la décision du même jour portant placement en centre de rétention administrative,
Vu l'ordonnance rendue le 30 juillet 2022 à 16h00 par laquelle le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre a ordonné la prolongation du maintien de M. [Y] [U] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée de vingt huit jours.
Vu l'appel formé le 31 juillet 2022 par M. [Y] [U] à 13H41, portant sur la décision précitée,
Vu les convocations adressées le 1er août 2022 à M. [Y] [U], à Monsieur le M. Le Représentant des collectivités de [Localité 5] et [Localité 4], au Procureur Général, à l'interprète et à l'avocate, en vue de l'audience du lundi 1er août 2022 à 16h00,
Me [H] [W] demande de juger que l'administration préfectorale n'a pas effectué les diligences nécessaires afin de préparer le départ de M. [Y] [U], de constater que M. [Y] [U] remplit les conditions nécessaires à une assignation à résidence sur le fondement de l'article 741-13 du CESEDA et d'ordonner son assignation à résidence.
Dans ses écritures, M. Le Représentant des collectivités de [Localité 5] et [Localité 4] sollicite le rejet de la requête de M. [Y] [U].
Dans ses réquisitions présentées oralement, le Ministère Public sollicite le rejet de la demande de M. [Y] [U], compte tenu de l'absence de remise du passeport par l'intéressé préalablement à l'audience du juge des libertés et de la détention et de l'absence de garanties sufffisantes de représentation.
M. [Y] [U] a eu la parole en dernier et a notamment exprimé son souhait ne de pas vouloir retourner en Jamaïque.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la recevabilité de l'appel :
L'appel a été formé par une déclaration motivée, dans le délai de 24 heures de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention.
L'appel sera donc déclaré recevable.
Sur la nécessité du placement en rétention administrative :
L'article L.741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose qu'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ et que l'administration doit exercer toute diligence à cet effet.
Il résulte de cette disposition que la rétention administrative a pour objet de permettre l'exécution d'office de la mesure d'éloignement et qu'en conséquence l'étranger ne peut être maintenu en rétention que dans le cas où cette mesure est strictement nécessaire à son départ et en vue d'accomplir les diligences visant à permettre l'exécution d'office de l'éloignement.
Il appartient au juge des libertés et de la détention de s'assurer que l'administration s'acquitte de l'obligation de diligence mise à sa charge par l'article L. 741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Il convient en outre de rappeler que la rétention, outre la mise à exécution de la mesure d'éloignement elle-même, doit d'abord permettre de déterminer la nationalité de l'intéressé lorsque celle-ci est inconnue ou fausse, et l'obtention des documents de voyages afférent à l'éloignement envisagé.
En l'espèce, et contrairement à ce que soutient M. [Y] [U], il appert que l'administration préfectorale justifie avoir accompli les diligences précitées, dès lors qu'une réservation pour un vol en date du 20 août 2022, au nom de l'intéressé, ainsi qu'une demande de laisser-passer consulaire ont été réalisées.
Dans ces conditions, c'est à juste titre que le juge des libertés et de la détention a rejeté ce moyen.
Sur la demande d'assignation à résidence :
Selon l'article L. 743-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le juge des libertés et de la détention peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.
L'assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution.
M. [Y] [U] a déclaré être arrivé le 4 août 2014, sur l'île de [Localité 5], en partie hollandaise. Il a également déclaré avoir vécu en partie française de cette île de 2008 à 2012, puis être retourné en partie hollandaise.
Il a précisé être séparé de son épouse de nationalité hollandaise, vivre seul à Sint- Marteen et avoir un enfant dont il n'a pas la charge, avec une ressortissante jamaïcaine, le reste de sa famille étant en Jamaïque.
Il a également déclaré vivre de travaux dans le secteur de la démolition, sans être titulaire d'un contrat de travail et ne pas avoir entamé de démarches en vue de régulariser sa situation en partie française de l'île de [Localité 5].
S'il a communiqué une attestation d'hébergement, celle-ci est insuffisante pour justifier de garanties de représentation, dès lors que l'intéressé a déclaré lors de son audition du 28 juillet 2022, puis lors de l'audience du 1er août 2022 qu'il ne souhaitait pas retourner dans son pays d'origine.
Dans ces conditions, et nonobstant la production de son passeport à l'issue de l'audience du juge des libertés et de la détention, il ne peut, au regard des dispositions de l'article L. 743-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile faire l'objet d'une assignation à résidence.
Il résulte de l'ensemble des éléments analysés ci-dessus que l'ordonnance déférée devra être confirmée.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement et en dernier ressort,
Déclarons l'appel recevable.
Confirmons l'ordonnance rendue le 30 juillet 2022 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre.
Disons que la présente ordonnance sera notifiée aux parties intéressées par tout moyen par le greffe de la Cour d'Appel.
Fait à Basse-Terre le 1er août 2022,
La GreffièreLe Magistrat délégué
LARGITTE ChristianeBUSEINE Gaëlle
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CAPP/JURITEXT000046226719.xml | AFFAIRE : No RG 21/00717 - No Portalis DBWB-V-B7F-FRJW
Code Aff. :
ARRÊT N AL
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Saint-Denis en date du 26 Mars 2021, rg no 19/00332 COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 JUILLET 2022
APPELANT :
Monsieur [T] [F] [E] [R]
CCAS de [Localité 3],
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Me Florent MALET, avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/003602 du 13/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)
S.A.R.L. SRS JP
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentant : Me Jean claude christia SAINTE-CLAIRE, avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
Clôture : 7 mars 2022
DÉBATS : En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Avril 2022 en audience publique, devant Alain Lacour, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Monique Lebrun, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 05 Juillet 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président :Alain Lacour
Conseiller:Laurent Calbo
Conseiller :Aurélie Police
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 05 Juillet 2022
Greffier lors des débats : Mme Monique Lebrun
Greffier lors du prononcé par mise à disposition : Mme Delphine Grondin
Exposé du litige :
Soutenant avoir bénéficié d'un contrat de travail avec la SARL SRS JP (la société), M. [R] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion afin d'en obtenir la résiliation judiciaire aux torts exclusifs de l'employeur, un rappel de salaire et l'indemnisation des différents chefs de préjudice dont il se plaignait. Par jugement rendu le 26 mars 2021, le conseil de prud'hommes a débouté M. [R] de l'ensemble de ses demandes et a débouté la société de celle qu'elle formait sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Appel de cette décision a été interjeté par M. [R] le 24 avril 2021.
Vu les conclusions notifiées par M. [R] le 21 juillet 2021 ;
Vu les conclusions notifiées par la société le 20 octobre 2021
Pour plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées ainsi qu'aux développements infra.
Sur l'existence d'un contrat de travail :
Vu les articles 9 et 954 du code de procédure civile ;
Attendu que M. [R] soutient qu'il était lié par un contrat de travail à la société, ce que celle-ci conteste ; qu'il incombe par conséquent à M. [R] d'établir qu'il a fourni une prestation de travail au profit de la société, en contrepartie d'une rémunération, dans une relation de subordination à l'égard de la société ; qu'à cet effet, il invoque ses pièces :
- no 2, constituée de l'attestation de Mme [Y], qui déclare : « J'ai pu constaté que pendant plusieurs mois que M. [R] [T] travaillais dans le pressing de l'Hermitage » ;
- no 3, constituée de l'attestation de Mme [A], qui déclare : « Être une cliente du pressing de l'Hermitage avoir vue plusieurs fois M. [R] dans le pressing exerçant son travail ; au cour du mois de janvier j'ai vu M. [R] marchant avec deux béquilles suite à une entorse de la cheville gauche » ;
- no 4, constituée de l'attestation de Mme [G], qui déclare : « j'ai constatée plusieur mois que [T] travaillais au pressing situé au mail Rodrigue » ;
- no 5, constituée de photographies ;
Attendu que ces pièces ne font ni la preuve de ce que M. [R] aurait fourni une prestation de travail en contrepartie d'une rémunération, fût-elle en nature, ni de l'existence d'un lien de subordination entre lui et la société ; qu'elles sont en outre contredites par les nombreuses attestations versées aux débats par la société, desquelles il ressort que M. [O], gérant du pressing exploité par la société, y a toujours travaillé seul et que M. [R] n'y a quant à lui jamais travaillé (pièce no 1 à 26 de la société) ; que M. [R] sera par conséquent débouté de toutes ses demandes et le jugement confirmé intégralement ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 26 mars 2021 par le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion ;
Y ajoutant,
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [R] à payer à la société la somme de 1500 euros à titre d'indemnité pour frais non répétibles d'instance ;
Condamner M. [R] aux dépens d'appel et dit qu'ils seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.
Le présent arrêt a été signé par M. Lacour, président, et par Mme Grondin, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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CAPP/JURITEXT000046226722.xml | AFFAIRE : N RG No RG 20/01718 - No Portalis DBWB-V-B7E-FNWH
Code Aff. : PB ARRÊT N
ORIGINE :JUGEMENT du Pole social du TJ de SAINT DENIS en date du 16 Septembre 2020, rg no 19/02153
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 JUILLET 2022
APPELANTE :
LA CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA REUNION
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Isabelle CLOTAGATIDE KARIM de la SCP CANALE-GAUTHIER-ANTELME-BENTOLILA, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
La S.A.S. CLINIQUE DURIEUX en son représentant légal
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Anne-Sophie MOULIN, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Mathilde MOULIN avocat au barreau de PARIS
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 février 2022 en audience publique, devant Alain LACOUR, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Monique LEBRUN, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 05 mai 2022, mise à disposition prorogée au 5 juillet 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président :Alain LACOUR
Conseiller:Philippe BRICOGNE
Conseiller :Laurent CALBO
Qui en ont délibéré
greffier du prononcé par mise à disposition au greffe : Nadia HANAFI
ARRÊT : mis à disposition des parties le 05 JUILLET 2022
EXPOSÉ DU LITIGE
1. Par requête adressée le 19 décembre 2019 au secrétariat du pôle social du tribunal de grande instance de Saint-Denis de La Réunion, devenu tribunal judiciaire à compter du 1er janvier 2020, la S.A.S. Clinique Durieux a contesté une décision implicite de la commission de recours amiable de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion en annulation d'une notification d'indu du 20 juin 2019 portant sur une somme de 22.330,60 € et sollicité la condamnation de l'organisme social au paiement d'une somme de 3.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
2. Par jugement du 16 septembre 2020, le tribunal a :
- annulé la notification d'indu du 20 juin 2019 portant sur une somme de
22.330,60 €,
- rejeté la demande présentée par la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion tendant à la condamnation de la S.A.S. Clinique Durieux au paiement de cette somme,
- condamné la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion à payer à la S.A.S. Clinique Durieux la somme de 1.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion aux dépens.
3. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 5 octobre 2020, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion a interjeté appel de cette décision.
4. Les parties ont été convoquées par lettre recommandée avec avis de réception du 10 mars 2021 à l'audience du 1er juin 2021.
5. L'affaire a été plaidée à l'audience du 22 février 2022 et mise en délibéré au 5 mai 2022, prorogé au 5 juillet 2022.
7. La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 17 février 2022, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- infirmer le jugement litigieux en ce qu'il a annulé la notification d'indu en date du 20 juin 2019 portant sur une somme de 22.330,60 €, a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la S.A.S. Clinique Durieux au paiement de cette somme, l'a condamnée à payer à la S.A.S. Clinique Durieux la somme de 1.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamnée aux dépens,
- statuant à nouveau,
- constater qu'elle a respecté l'ensemble des obligations que la procédure met à sa charge,
- constater que la S.A.S. Clinique Durieux ne disposait pas, lors de la réalisation des actes chirurgicaux litigieux, de l'autorisation spécifique délivrée par l'agence régionale de santé pour le traitement du cancer,
- constater que les interventions ont été réalisées dans le cadre de soins non urgents,
- constater que la clinique n'apporte aucun élément de preuve de nature à remettre en cause le bien-fondé de l'indu,
- confirmer la décision de notification d'indu prise par la S.A.S. Clinique Durieux en date du 20 juin 2019,
- confirmer la décision implicite de rejet rendue par la commission de recours amiable,
- condamner la S.A.S. Clinique Durieux au paiement de la somme de 22.330,60 €,
- condamner la S.A.S. Clinique Durieux au paiement de la somme de 1.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter la S.A.S. Clinique Durieux de toute demande visant sa condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter la S.A.S. Clinique Durieux de toutes ses autres demandes, fins et conclusions articulées contre elle.
8. À l'appui de ses prétentions, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion fait en effet valoir :
- que la procédure de recouvrement de l'indu a été régulièrement suivie,
- qu'un acte médical effectué sans autorisation des autorités de santé ne saurait être rémunéré,
- que les organismes d'assurance maladie sont fondés à agir lorsqu'ils estiment qu'il est nécessaire de préserver la sécurité des patients en leur garantissant une qualité de soins minimum, notamment par le biais d'une analyse d'activité,
- que la S.A.S. Clinique Durieux n'était pas titulaire d'une autorisation de prise en charge des personnes atteintes de cancer lors de la réalisation des actes litigieux, ni s'être trouvée dans la situation de la découverte d'une tumeur maligne à l'occasion d'un acte chirurgical urgent.
9. La S.A.S. Clinique Durieux déclare s'en remettre à ses écritures déposées au greffe le 1er février 2022, dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- y ajoutant,
- juger, à titre principal, qu'à la date du fait générateur, la caisse ne pouvait se fonder sur l'absence d'autorisation de chirurgie carcinologique pour refuser le paiement des interventions litigieuses,
- juger, à titre subsidiaire, que l'action en répétition de l'indu formée par la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion n'est pas fondée au regard des dispositions du code de la santé publique qui autorisent les chirurgiens à traiter les cancers en cas de découverte fortuite de la tumeur à l'occasion de la prise en charge d'un patient,
- débouter la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion de l'ensemble de ses demandes,
- condamner la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion à lui verser la somme de 3.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
10. À l'appui de ses prétentions, la S.A.S. Clinique Durieux fait en effet valoir :
- que l'article R. 162-33-3-1 du code de la sécurité sociale met en place une procédure très rigoureuse pour la récupération des sommes facturées pour des actes non autorisés au sein de l'établissement, laquelle procédure n'existait pas avant 2020, la sanction n'étant que la suspension ou le retrait des autorisations, à l'initiative du seul directeur de l'ARS,
- qu'aucune règle de tarification ou de facturation ne prévoyait, avant la promulgation de la loi du 22 décembre 2018 et la publication du décret du 8 juillet 2019, l'interdiction aux établissements de facturer des actes pour lesquels ils ne détiennent pas une autorisation, l'action en répétition des sommes versées aux établissements et aux professionnels de santé obéissant aux seules disposition de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale,
- que les sommes versées constituent la contrepartie des hospitalisations complètes et des opérations chirurgicales qui ont été réalisées au sein de l'établissement, prestations nécessaires et justifiées, de sorte qu'elles ne sont pas indues au regard du mécanisme prévu à l'article 1302 du code civil, d'autant moins qu'elles n'ont causé aucun préjudice à la sécurité sociale,
- que, sur les vingt six séjours analysés, la caisse ne justifie pas en quoi quinze dossiers sont considérés comme conformes alors même qu'ils sont identiques aux dossiers retenus comme anormaux,
- que les traitements des cancers litigieux ont été pratiqués conformément aux conditions de l'article R. 6123-91 du code de la santé publique,
- que le défaut de communication des résultats du contrôle médical réalisé les 30 et 31 août 2019 méconnaît le principe de la procédure contradictoire prévue à l'article R. 315-1 du code de la sécurité sociale et entraîne la nullité de la procédure suivie puisque ce manquement ne lui a pas permis de préparer utilement sa défense,
- que la notification d'indu no 1904635337-15 du 20 juin 2019 est entachée d'un défaut de motivation.
11. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées ainsi qu'à la note d'audience figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la forme
12. Aux termes de l'article L. 315-1 du code de la sécurité sociale, "la procédure d'analyse de l'activité se déroule dans le respect des droits de la défense selon des conditions définies par décret".
13. L'article R. 315-1 dispose en son 1er alinéa que, "lorsque le service du contrôle médical procède à l'analyse de l'activité d'un établissement de santé en application du III de l'article L. 315-1, les résultats de cette analyse sont communiqués au directeur de l'établissement concerné ainsi qu'au directeur général de l'agence régionale de santé".
14. L'article R. 133-9-1 prévoit en son 2ème alinéa que la notification d'indu "précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées et la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement".
15. En l'espèce, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion produit le courrier d'information de la mise en oeuvre du contrôle (daté du 25 juillet 2018), le courrier mentionnant les résultats du contrôle (daté du 15 février 2019) et le courrier notifiant le montant de l'indu allégué (daté du 20 juin 2019).
16. Les "résultats de l'analyse" sont donc censés avoir été repris dans le courrier du 15 février 2019. Or, ainsi que le soulignent les premiers juges, ce courrier mentionne uniquement que "les résultats sont les suivants : sur 26 séjours de chirurgie, 14 concernent des chirurgies effectuées hors autorisation. Au total 54% des séjours contrôlés sont donc en relation avec des pratiques non autorisées".
17. Outre le fait que ce courrier n'indique pas la nature des pratiques non autorisées, il a été suivi de la notification d'un indu à hauteur de 22.330,60 €, fondé cette fois sur 11 dossiers, sans davantage d'explication sur la qualification des actes en cause et alors que cet indu ne peut pas être mis en cohérence avec le courrier du 15 février 2019.
18. La S.A.S. Clinique Durieux n'ayant pas eu une pleine connaissance de l'étendue et de la cause des versements dont le remboursement lui était réclamé, c'est à bon droit que les premiers juges ont pu annuler la notification d'indu du 20 juin 2019.
Sur les dépens
19. La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
20. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la partie condamnée aux dépens prend en charge les frais irrépétibles exposés par la partie adverse dans les proportions que le juge détermine.
21. En l'espèce, il convient de faire bénéficier la S.A.S. Clinique Durieux de ces dispositions à hauteur de 2.000,00 €.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
Confirme le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Condamne la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion aux dépens d'appel,
Condamne la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion à payer à la S.A.S. Clinique Durieux la somme de 2.000,00 € (deux mille euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par M. Lacour, président, et par Mme Hanafi, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,
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CAPP/JURITEXT000046226723.xml | AFFAIRE : N RG No RG 21/01208 - No Portalis DBWB-V-B7F-FSS7
Code Aff. : ARRÊT N AL
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT DENIS en date du 18 Juin 2021, rg no F 20/00174
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 JUILLET 2022
APPELANTE :
S.A.R.L. MAJIK GLACES
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Rohan RAJABALY, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [K] [L] [I] [M]
[Adresse 2]. F - Résidence les
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentant : Me Jean-Claude ABDOULOUSSEN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2021/006038 du 16/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)
Clôture : 5 mars 2022
DÉBATS : En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 avril 2022 en audience publique, devant Alain LACOUR, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Monique LEBRUN, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 05 JUILLET 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président :Alain LACOUR
Conseiller:Laurent CALBO
Conseiller :Aurélie POLICE
Qui en ont délibéré
Greffier du prononcé par mise à disposition au greffe : Nadia HANAFI
ARRÊT : mis à disposition des parties le 05 JUILLET 2022
Exposé du litige :
M. [M] a été embauché par la SARL Magik glaces (la société) le 1er juin 2018 en qualité d'employé polyvalent, selon contrat à durée indéterminée à temps partiel, transformé en contrat à temps plein par avenant du 19 octobre 2018. Il a été licencié pour faute grave, après mise à pied conservatoire, le 25 novembre 2019.
Saisi par M. [M], qui contestait son licenciement et sollicitait un rappel de salaire et diverses indemnités, le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion, par jugement rendu le 18 juin 2021, a notamment requalifié le motif du licenciement en licenciement pour cause réelle et sérieuse et condamné la société à payer à M. [M] 1 550 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, 775 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, 1 550 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 155 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, 878 euros à titre de salaire pendant la période de mise à pied, 87,80 euros à titre de congés payés sur salaire pendant la mise à pied, outre 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Une astreinte de 50 euros par jour de retard a en outre été ordonnée pour la remise des « documents sociaux ».
Appel de cette décision a été interjeté par la société le 6 juillet 2021.
Vu les conclusions notifiées par la société le 18 janvier 2022 ;
Vu les conclusions notifiées par M. [M] le 25 octobre 2021 ;
Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées et aux développements infra.
Sur le licenciement :
Vu les articles L. 1232-1 du code du travail, 9 et 954 du code de procédure civile ;
Attendu que la lettre de licenciement, qui fixe les termes du litige, est ainsi rédigée : « [?] nous vous informons de notre décision de vous licencier pour les motifs suivants :
- les propos dénigrants que vous avez employé à notre encontre à plusieurs reprises le 5, 6 et 19 novembre 10 ans que nous vous avions "arnaqué", "caché des choses", "mené en bateau " ;
- la remise en cause de notre moralité : l'argument réitéré le 5 et 6 novembre sur un ton agressif pour preuve de notre malhonnêteté de nous avoir fait remplir votre fiche de congés avec une date de retour au 15 septembre 2019 au lieu du 17 septembre (alors que cela était à votre avantage) ;
- l'insubordination : le ton et la gestuelle agressive usités envers nous le 5 et le 6 novembre ; la remise en cause de certaines tâches et de leur ordonnancement : le 2 octobre pour mixer et remettre en boîte la pâte à puffle, le 6 novembre pour refuser désormais de travailler à l'adresse de [Localité 6] alors que c'est chose que vous avez faite depuis le début de votre contrat et qu'elle a toujours eu votre préférence ;
- abus de la liberté d'expression : la remise en cause répétée de notre organisation comme le fait que nous travaillions en heures décalés et le week-end "déjà que nous ne voyons pas nos familles" le 5 novembre alors que nos contraintes horaires sont le point mis en avant à chaque entretien d'embauche et testés pendant la période d'essai, la demande réitérée du remplacement des personnes ayant quitté l'entreprise alors que l'activité ne justifie pas et que vous n'effectuez pas d'heures supplémentaires pour pallier ces départs volontaires, le reproche que nous ouvrions le glacier le lundi de Pentecôte, la remise en cause le 23 octobre de notre exécution des tâches à votre place afin d'économiser votre énergie ;
- le non-respect du lien de subordination qui existe entre vous et nous par le ton agressif et énervé que vous avez employé envers nous le 5 et le 6 novembre ;
- la négligence lorsque le 13 octobre vous vous trompez dans une commande à servir alors que la consigne vous a été dite 3 fois et votre réponse lorsqu'on vous en a fait la remarque "les erreurs ça arrive à tout le monde", les bavardages incessants avec vos coéquipiers alors que diverses tâchent vous attendent comme la rédaction de procédures liées aux objectifs fixés le 28 mars 2019 ou encore suite à la réunion de travail du 28 avril 2019.
Cette conduite met en cause la bonne marche du service. [?]
En conséquence, nous avons décidé de vous licencier pour faute grave [?] » ;
Attendu, s'agissant d'un licenciement pour faute grave, qu'il incombe à la société de rapporter la preuve des faits qu'elle impute à faute à M. [M] ;
Or, attendu qu'à cet effet, elle n'invoque aucune offre de preuve au soutien ; que les seules pièces qu'elle produit sont constituées d'une photographie de mauvaise qualité et d'un document portant les mentions suivantes : « convention collective nationale de la restauration rapide (restauration livrée) » et « convention collective nationale des détaillants, détaillants-fabricants et artisans de la confiserie, chocolaterie, biscuiterie » ;
Attendu que ces pièces ne font pas la preuve des griefs articulés par la société à l'encontre de M. [M] ; que le licenciement de celui-ci est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que le jugement sera infirmé de ce chef ;
Sur l'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse :
Vu l'article L. 1235-3 du code du travail ;
Attendu que M. [M] avait un an et six mois d'ancienneté lors de son licenciement et qu'il percevait un salaire brut mensuel de 1 550 euros ; qu'il sera fait une juste réparation du préjudice ainsi subi par lui par la condamnation de la société à lui payer la somme de 3 100 euros à titre d'indemnité ;
Sur l'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement :
Attendu que M. [M], qui a été indemnisé du préjudice résultant de ce que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ne peut qu'être débouté de sa demande au titre d'une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, ces deux indemnités ne se cumulant pas ; que le jugement sera infirmé de ce chef ;
Sur l'indemnité légale de licenciement :
Vu l'article 954 du code de procédure civile ;
Attendu que s'affranchissant de l'obligation pesant sur lui en vertu de ce texte, M. [M] n'invoque aucun fondement juridique à sa demande ;
Vu les articles 12 du code de procédure civile, L. 1234-9 et R. 1234-2 du code du travail ;
Attendu que M. [M] avait une ancienneté d'un an et six mois lors de son licenciement et qu'il percevait un salaire brut mensuel de 1 550 euros ; qu'il peut par conséquent prétendre à une indemnité légale de licenciement de 581,25 euros [(1 550/4) + (1 550/4 x 6/12)] ; que le jugement sera infirmé de ce chef ;
Sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents :
Vu l'article 954 du code de procédure civile ;
Attendu que s'affranchissant de l'obligation pesant sur lui en vertu de ce texte, M. [M] n'invoque aucun fondement juridique à sa demande ;
Vu les articles 12 du code de procédure civile et L. 1234-1 du code du travail ;
Attendu que M. [M], qui avait un an et six mois d'ancienneté lors de son licenciement, peut prétendre à une indemnité compensatrice de préavis de 1 550 euros, correspondant à un mois de salaire, outre 155 euros au titre des congés payés afférents ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;
Sur le rappel de salaire :
Attendu que M. [M] est bien fondé à réclamer paiement du salaire qui ne lui a pas été versé pendant la mise à pied conservatoire dont il a fait l'objet, du 21 novembre au 7 décembre 2019, soit la somme de 878 euros, outre 87,80 euros au titre des congés payés afférents ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;
Sur l'indemnité de déplacement et de transport :
Attendu que M. [M] réclame la somme de 532 euros de ce chef, sans autrement s'en expliquer, alors qu'il a été débouté de cette demande par le jugement ; que celui-ci sera par conséquent confirmé et M. [M] débouté de cette prétention ;
Sur la remise de documents de fin de contrat :
Attendu que M. [M] demande qu'il soit ordonné à la société, sous astreinte, de lui remettre « les bulletins de paye dûment complétés des heures majorées au-delà de 22 heures et des heures travaillées les dimanches et jours fériés travaillés » ;
Attendu que la société s'oppose à cette demande ;
Attendu que M. [M], qui ne s'explique aucunement sur le fondement de cette demande, qui est contestée, ne pourra qu'en être débouté ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement,
Confirme le jugement en ce qu'il a condamné la SARL Magik glaces à payer à M. [M] 1 550 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 155 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, 878 euros à titre de rappel de salaire, 87,80 euros à titre de congés payés sur rappel de salaire, 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il l'a condamnée aux dépens de première instance ;
L'infirme pour le surplus de ses dispositions ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Dit que le licenciement de M. [M] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Condamne la SARL Magik glaces à payer à M. [M] :
- 3 100 euros à titre d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
- 581,25 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;
Déboute M. [M] de sa demande au titre de l'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement ;
Y ajoutant,
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SARL Magik glaces à payer à M. la somme de 2 000 euros à titre d'indemnité pour frais non répétibles instance ;
Condamne la SARL Magik glaces aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par M. Alain LACOUR, président, et par Mme Nadia HANAFI, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE,LE PRÉSIDENT,
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CAPP/JURITEXT000046226721.xml | AFFAIRE : N RG No RG 19/02272 - No Portalis DBWB-V-B7D-FHX4
Code Aff. : ARRÊT N AL
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-DENIS en date du 26 Juillet 2019, rg no F 16/00470
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 JUILLET 2022
APPELANTE :
S.A. AIR AUSTRAL
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentant : Me Michel LAGOURGUE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [S] [D]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Me Anissa SETTAMA de l'AARPI VSH AVOCATS, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Clôture : 1er.02.2021
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 804 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 mai 2022 devant la cour composée de :
Président :M. Alain LACOUR
Conseiller :M. Laurent CALBO
Conseiller :Mme Aurélie POLICE,
Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.
A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 05 juillet 2022.
ARRÊT : mis à disposition des parties le 05 JUILLET 2022
greffier lors des débats : Mme Delphine GRONDIN
greffier du prononcé par mise à disposition au greffe : Mme Nadia HANAFI
Exposé du litige :
M. [D] a été embauché par la société Air austral (la société) en qualité de personnel navigant commercial selon contrat de travail à durée indéterminée du 5 mai 2003. Il a été promu à la fonction de chef de cabine le 30 janvier 2008, puis licencié pour insuffisance professionnelle le 21 avril 2016.
Saisi par M. [D], qui soutenait avoir subi des agissements de harcèlement moral, demandait que la nullité de son licenciement fût prononcée ou, subsidiairement, qu'il fût jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse et qui réclamait la condamnation de la société à lui payer diverses indemnités, le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion, par jugement rendu le 26 juillet 2019, a notamment « dit que le licenciement intervenu dans un contexte de harcèlement moral n'est pas recevable », dit qu'il est dépourvu de cause réelle et sérieuse, a condamné la société à payer à M. [D] 40 352,80 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Le remboursement à Pôle emploi par la société des indemnités de chômage servies à M. [D] a en outre été ordonné, ainsi que l'exécution provisoire du jugement. Le surplus des demandes a été rejeté.
Appel de cette décision a été interjeté par la société le 7 août 2019.
Vu les conclusions notifiées par la société le 29 septembre 2020 ;
Vu les conclusions notifiées par M. [D] le 25 février 2020 ;
L'affaire a été plaidée à l'audience du 14 septembre 2021 pour l'arrêt être rendu le 19 novembre 2021. Par arrêt rendu après prorogations le 3 février 2022, la réouverture des débats a été ordonnée pour que la cause soit de nouveau entendue par la cour autrement composée. L'affaire a été plaidée le 10 mai 2022.
Pour plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées et aux développements infra.
Sur le harcèlement moral :
Vu les articles 562 et 909 du code de procédure civile ;
Attendu que M. [D] a été débouté de sa demande formée au titre d'un harcèlement moral par le jugement entrepris, dont il n'a pas interjeté appel incident faute par lui d'en demander, dans le dispositif de ses conclusions, l'infirmation ;
Attendu, surabondamment, que M. [D] n'invoque aucun fait autre que son licenciement pour soutenir qu'il a été victime d'un harcèlement moral, alors qu'il sera vu infra que le licenciement était justifié par une cause réelle et sérieuse ;
Attendu en conséquence que le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que M. [D] n'avait pas subi de harcèlement moral ;
Et attendu, par voie de conséquence, que M. [D] sera débouté de sa demande tendant à voir prononcer la nullité de son licenciement ;
Sur la cause du licenciement :
Vu l'article L. 1232-1 du code du travail ;
Attendu que la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est ainsi rédigée : « Lors de vos contrôles écrits de connaissances sécurité-sauvetage du 09 mars 2016, vous avez obtenu les notes de :
- 60 % à votre premier test
- 60 % à votre second test
Notes inférieures au minimum requis de 75%.
Vous avez été reprogrammé en stage les 22 et 23 mars 2016, à l'issue duquel vous avez subi un dernier test et avez obtenu la note de 73, 33 %, inférieur au minimum requis de 75 %.
Nous avons donc, de ce fait, été dans l'obligation réglementaire de procéder à la suspension de votre activité en vol conformément aux dispositions réglementaires prévues dans notre manuel formation OM D UU422-0 Page 8-5.2 "traitement de l'échec".
Ces derniers contrôles en vol ont mis en évidence une insuffisance notable dans les connaissances en sécurité, sûreté et secourisme, éléments essentiels des compétences standards exigées d'un personnel navigant commercial et les explications recueillies auprès de vous, au cours de notre entretien préalable du 14 avril dernier, n'ont pas permis de modifier notre appréciation initiale.
Dans ce contexte nous vous notifions par la présente votre licenciement pour insuffisance professionnelle [?] » ;
Attendu que la société verse aux débats :
- le premier test passé par M. [D] le 9 mars 2016, auquel il a obtenu 60 % de bonnes réponses, alors que le minimum requis est de 75 % :
- le deuxième test passé le même jour, auquel il a obtenu le même taux de bonnes réponses ;
- le troisième test passé après un stage le 23 mars 2016, auquel il a obtenu 73, 33 % de bonnes réponses ;
Attendu que M. [D] objecte que ces tests sont réalisés par les instructeurs de la société, que les questions posées n'ont aucun sens et changent selon les instructeurs rédacteurs, que la société ne fait pas la preuve de ce que les questions posées étaient préalablement validées par la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) et que le rapport de celle-ci produit par la société aux débats est postérieur de deux ans aux tests litigieux ;
Mais attendu que les tests passés par M. [D] produits aux débats mentionnent les questions posées et les réponses données ; que leur examen démontre que, contrairement aux affirmations de M. [D], les questions alors posées sont sensées et portent toutes sur les procédures ou consignes applicables au transport aérien de personnes ;
Attendu que la société verse aux débats le compte rendu de contrôle que lui a adressé la DGAC le 26 juin 2018, qui relève que : « Les contrôles individuels, sous forme de QCM, sont réalisés sur l'ordinateur avec l'aide du manuel sécurité et sauvetage (MSS) en version papier ou électronique. Les questions sont puisées dans une base de données. Chaque test est différent pour chaque stagiaire » et conclut comme suit : « Ce contrôle n'a fait l'objet d'aucune non-conformité et d'aucune remarque » ; qu'il est indifférent que ce compte rendu soit postérieur de deux années aux tests litigieux dès lors qu'il n'est pas prétendu que la société aurait modifié sa procédure de contrôle des connaissances, ni que les tests passés par M. [D] eussent été différents de ceux objet du contrôle opéré par la DGAC ;
Attendu, encore, qu'il doit être relevé que si M. [D] avait lors de son licenciement une ancienneté de presque 13 ans au sein de la société, dont huit en qualité de chef de cabine, il a fait l'objet d'un avertissement le 18 juin 2015 (pièce no 2 de la société) pour n'avoir pas « effectué correctement votre check-list prévol de la porte 25, conformément à l'OM B777 » et pour ne pas s'être aperçu que le toboggan était inversé ;
Attendu que lors de son entretien annuel d'évaluation du 9 février 2016, l'objectif intitulé « avoir une meilleure connaissance des procédures de sécurité et des plans d'armements » a été qualifié de « non atteint », de même que ceux intitulés « vérifier la bonne exécution du travail demandé au PNC » et « connaissance de l'entreprise », ce qui a amené le responsable de M. [D] à faire le commentaire suivant : « Les objectifs n'ont pas été atteints comme convenu en 2014 » ; qu'à la rubrique « connaissances théoriques », il a été indiqué que « les connaissances en SS [i. e. Sécurité-sauvetage] doivent être impérativement acquises » ; que M. [D] était convenu de ses insuffisances puisqu'il indiquait alors : « je m'engage à atteindre ces objectifs » ; que les trois échecs aux tests de contrôle des connaissances démontrent que tel n'a pas été le cas ;
Attendu, dans ces conditions, que la société rapporte la preuve de l'insuffisance professionnelle de M. [D], qui faisait obstacle à son maintien dans l'entreprise et justifiait son licenciement ;
Attendu que le jugement sera par conséquent infirmé en ce qu'il a dit le licenciement de M. [D] dépourvu de cause réelle et sérieuse, en ce qu'il a condamné la société à payer à M. [D] une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité pour frais non répétibles d'instance et ordonné le remboursement à Pôle emploi des indemnités de chômage servies à M. [D] ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement,
Confirme le jugement rendu le 26 juillet 2019 par le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion en ce qu'il a dit que M. [D] n'avait pas été victime de harcèlement moral ;
L'infirme pour le surplus de ses dispositions ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Dit que le licenciement de M. [D] était justifié par une cause réelle et sérieuse ;
Déboute M. [D] de toutes ses demandes ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [D] à payer à la société Air austral la somme de 1 500 euros à titre d'indemnité pour frais non répétibles d'instance ;
Condamne M. [D] aux dépens de première instance et d'appel.
Le présent arrêt a été signé par M. Lacour, président, et par Mme Hanafi, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,
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CAPP/JURITEXT000046226720.xml | AFFAIRE : No RG 21/01207 - No Portalis DBWB-V-B7F-FSS5
Code Aff. :
ARRÊT N AL
ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT DENIS en date du 18 Juin 2021, rg no F 20/00136 COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 JUILLET 2022
APPELANTE :
S.A.R.L. MAJIK GLACES
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Me Rohan RAJABALY, avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
Monsieur [Y] [K] [B]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentant : Me Jean claude ABDOULOUSSEN, avocat au barreau de Saint Denis de la Réunion
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/5561 du 04/08/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Saint-Denis)
Clôture : 7 mars 2022
DÉBATS : En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Avril 2022 en audience publique, devant Alain Lacour, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Monique Lebrun, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 05 Juillet 2022 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président :Alain Lacour
Conseiller:Laurent Calbo
Conseiller :Aurélie Police
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 05 juillet 2022
Greffier lors des débats : Mme Monique Lebrun
Greffier lors du prononcé par mise à disposition : Mme Delphine Grondin
Exposé du litige :
M. [B] a été embauché par la SARL Majik glaces (la société) le 11 août 2017 dans le cadre d'un contrat de professionnalisation d'une durée de deux ans, à l'issue duquel un contrat à durée indéterminée a été signé par les parties le 1er juin 2019. M. [B] a été licencié pour faute grave le 7 décembre 2019.
Saisi par M. [B], qui contestait son licenciement et sollicitait un rappel de salaire et l'indemnisation des différents chefs de préjudice dont il se plaignait, le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion, par jugement rendu le 18 juin 2021, a notamment requalifié « le motif du licenciement pour faute grave de M. [Y] [K] [B] en un licenciement pour cause réelle et sérieuse », condamné la société à payer à M. [B] 1 550 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, 775 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, 1 550 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 155 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, 878 euros à titre de salaire pendant la mise à pied, 87, 80 euros à titre de congés payés sur le salaire correspondant à la période de mise à pied, « 50 euros d'astreinte pour remise de chacun des documents sociaux à partir du 10e jour après réception de la présente décision » et 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Les parties ont été déboutées du surplus de leurs demandes.
Appel de cette décision a été interjeté par la société le 6 juillet 2021.
Vu les conclusions notifiées par la société le 13 janvier 2022 ;
Vu les conclusions notifiées par M. [B] le 25 octobre 2021 ;
Pour plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées et aux développements infra.
Sur le licenciement :
Vu les articles L. 1232-1 du code du travail et 954 du code de procédure civile ;
Attendu que la lettre de licenciement est ainsi rédigée : « [?] nous vous informons de notre décision de vous licencier pour les motifs suivants :
- rupture de confiance : le 5 novembre 2019, lorsque nous constatons votre parfaite maîtrise du contenu de vos réclamations alors que 2h auparavant vous disiez ne pas connaître le sujet (à savoir les majorations pour les soirs, dimanches et jours fériés) ;
- insubordination : l'exigence, l'insistance et le ton employé le 5 et le 6 novembre pour nous pousser à organiser une réunion formelle afin de vous permettre de nous exposer vos réclamations alors même que nous vous avions dit qu'une transmission de documents ne nécessitait pas une réunion et qu'elle serait organisée à posteriori dans le but de vous apporter les réponses à vos questions ;
- l'exercice abusif de votre liberté d'expression : en dénigrant le 5 et le 6 novembre le bien-fondé des réunions de travail et d'information que nous avions précédemment organisées "pour des sujets bien moins importants que la réunion que nous demandons maintenant"; les propos diffamatoires tenus à notre égard le 5 et 6 novembre sur le fait que nous minimisons votre demande, que votre rémunération n'est pas importante pour nous, que votre problème n'est pas important pour nous, de nous accuser de vous avoir traité de voleur le 6 novembre, et de vous avoir accusé de ne jamais avoir passé l'aspirateur ; la mise en cause de notre moralité en nous accusant de vous faire du chantage lorsque vous nous faites part de votre souhait de quitter l'entreprise d'obtenir des arriérés de majorations et de vouloir aussi une rupture conventionnelle et que nous vous expliquons ne pas avoir, les propos malveillants envers notre société "ce n'est pas mon problème si la boîte elle coule";
- les négligences opérées : le 6 novembre après notre réunion où il a fallu plusieurs fois vous demander de vous remettre au travail car vous ne vouliez pas mettre fin à notre discussion, pour la remise en cause des consignes de nettoyage parce que vous n'étiez pas payé correctement, pour le laisser-aller concernant le nettoyage et la gestion des périssables ;
- la violation des règles d'hygiène et de sécurité : pour la durée excessivement longue pour l'installation de la vitrine pour cause de bavardages incessants congélateur ouvert, bacs à la main.
Cette conduite met en cause la bonne marche du service [?]
En conséquence, nous avons décidé de vous licencier pour faute grave.
Compte tenu de la gravité de celle-ci et de ses conséquences, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible [?] » ;
Attendu, s'agissant d'un licenciement pour faute grave, qu'il incombe à la société de rapporter la preuve des faits qu'elle impute à faute à M. [B] ;
Or, attendu que si la société reprend dans ses conclusions les reproches formulés dans la lettre de licenciement, force est néanmoins de constater qu'elle ne caractérise aucune faute de M. [B], pour n'invoquer aucune pièce à l'appui de ses allégations, méconnaissant ainsi les dispositions de l'alinéa premier de l'article 954 susvisé ;
Attendu en conséquence qu'il sera retenu que le licenciement de M. [B] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Sur l'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse :
Vu l'article L. 1235-3 du code du travail ;
Attendu que M. [B] avait deux ans et quatre mois d'ancienneté lors de son licenciement et qu'il percevait un salaire brut mensuel de 1 550 euros ; qu'il sera fait une juste réparation du préjudice ainsi subi par lui par la condamnation de la société à lui payer la somme de 5 425 euros, correspondant à 3,5 mois de salaire ;
Sur l'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement :
Attendu que M. [B], qui a été indemnisé pour son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, ne peut qu'être débouté de ce chef de demande ;
Sur l'indemnité légale de licenciement :
Vu l'article R. 1234-2 du code du travail ;
Attendu que M. [B] peut prétendre à une indemnité légale de licenciement de 775 euros (1 550/4 x 2) ; qu'il sera fait droit à cette demande ;
Sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents :
Vu l'article L. 1234-1 du code du travail ;
Attendu que M. [B] avait deux ans et quatre mois d'ancienneté lors de son licenciement ; qu'il peut par conséquent prétendre à une indemnité compensatrice de préavis correspondant à deux mois de salaire, soit la somme de 3 100 euros ; qu'ayant limité sa demande à 1 550 euros, il y sera fait droit dans cette mesure ; que la société sera en outre condamnée à lui payer 155 euros au titre des congés payés afférents ;
Sur le rappel de salaire pendant la période de mise à pied :
Attendu que la mise à pied conservatoire ayant précédé le licenciement pour faute grave de M. [B] est injustifiée puisque, ainsi qu'il a été vu précédemment, ce licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que M. [B] réclame donc légitimement les salaires dont il a été privé pendant cette période, soit la somme de 878 euros, outre 87 euros au titre des congés payés afférents ;
Sur les documents de fin de contrat :
Attendu qu'il convient d'ordonner à la société de remettre à M. [B] des bulletins de salaire rectifiés, mentionnant les heures supplémentaires réalisées ; qu'il n'y a pas lieu d'ordonner une astreinte ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement,
Confirme le jugement rendu le 18 juin 2021 par le conseil de prud'hommes de Saint-Denis-de-la-Réunion sauf en ce qu'il dit que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse, condamné la SARL Majik glaces à payer à M. [B] 1 550 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, et ordonné une astreinte ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Dit que le licenciement de M. [B] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Déboute M. [B] de sa demande d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement ;
Y ajoutant,
Condamne la SARL Majik glaces à payer à M. [B] la somme de 5 425 euros à titre d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Ordonne à la SARL Majik glaces de remettre à M. [B] des bulletins de salaire rectifiés, faisant apparaître les heures supplémentaires qu'il a effectuées ;
Vu les articles 37 et 75 de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991,
Condamne la SARL Majik glaces à payer à Me Abdouloussen, conseil de M. [B], la somme de 2 000 euros à titre de frais de procédure ;
Dit que le paiement de cette somme emporte renonciation par cet auxiliaire de justice à l'indemnité versée en application des dispositions sur l'aide juridictionnelle ;
Rejette le surplus des demandes ;
Condamne la SARL Majik glaces aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par M. Lacour, président, et par Mme Grondin, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président Exposé du litige :
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CAPP/JURITEXT000046226717.xml | COUR D'APPEL
VERSAILLES
Code nac : 58Z
3e chambre
CONTRADICTOIRE
DU 06 Mai 2021
No RG 20/05165
- No Portalis DBV3-V-B7E-UDVJ
Association CONSOMMATION, LOGEMENT ET CADRE DE VIE (CLCV)
S.A. AXA FRANCE VIE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Juillet 2020 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
No chambre : 6
No RG : 14/12664
Expéditions exécutoires
Expéditions
délivrées le :
Me Hélène FERON-POLONI
Me Richard GHUELDRE de l'AARPI GIDE LOYRETTE
Me Christophe DEBRAY, avocat au barreau de VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SIX MAI DEUX MILLE VINGT ET UN,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
L'Association CLCV - Consommation, Logement et Cadre de Vie Association agrée par arrêté de renouvellement du 01 Juin 2010,
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentant : Me Hélène FERON-POLONI de la SCP LECOQ VALLON & FERON-POLONI, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire: L0187 - No du dossier 19270
****************
1/ S.A. AXA FRANCE VIE
RCS 310. 499. 959
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentant : Me Harold HERMAN, Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : T03
Représentant : Me Richard GHUELDRE de l'AARPI GIDE LOYRETTE NOUEL AARPI, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : T03 Représentant : Me Sophie CREUSVAUX, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
2/ L'Association Générale Interprofessionnelle de Prévoyance et D'investissement - AGIPI
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Christophe DEBRAY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 - No du dossier 20475
Représentant : Me Christophe BOURDEL de la SCP Société d'Avocats, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0014
****************
L'affaire a été mise en délibéré au 08 avril, délibéré prorogé au 06 mai 2021
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 Février 2021, Madame Marie José BOU, président ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Marie-José BOU, Président,
Madame Françoise BAZET, Conseiller,
Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT
Par acte du 28 octobre 2014, l'association consommation, logement et cadre de vie, ci-après l'association CLCV, a assigné devant le tribunal de grande instance de Nanterre la société Axa France vie et 1'association générale interprofessionnelle de prévoyance et d'investissements, ci-après l'AGIPI, sur le fondement des articles L. 423-1 du code de la consommation et 1134 du code civil, afin d'obtenir leur condamnation à réparer les préjudices individuels subis par un groupe constitué de plusieurs adhérents et bénéficiaires du contrat collectif d'assurance sur la vie à adhésion non obligatoire dénommé "contrat compte libre d'épargne et de retraite" (CLER).
Par ordonnance du 8 janvier 2016, le juge de la mise en état a rejeté l'exception de nullité de l'assignation soulevée par les défenderesses ainsi que les demandes d'exclusion du périmètre de l'action de certaines catégories de bénéficiaires et de limitation de l'action formées par l'AGlPI.
Cette ordonnance a été confirmée par arrêt du 3 novembre 2016 de la cour d'appel de Versailles. Le pourvoi formé contre cette décision a été rejeté par arrêt de la Cour de cassation du 27 juin 2018.
Par jugement du 17 juillet 2020, le tribunal a :
- déclaré irrecevable l'action de groupe engagée par l'association CLCV à l'encontre de la société Axa France vie et de l'AGIPI,
- rejeté la demande de mise hors de cause de l'AGIPI,
- rejeté les demandes en paiement de dommages et intérêts ainsi que les demandes de publicité formées en défense,
- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire,
- condamné l'association CLCV à payer à la société Axa France vie une indemnité de procédure de 20 000 euros et à l'AGIPI, une indemnité de procédure de 10 000 euros,
- condamné l'association CLCV aux dépens, dont distraction,
- rejeté toute demande plus ample ou contraire.
Suivant déclaration du 23 octobre 2020, l'association CLCV a interjeté appel du jugement en ce qu'il a déclaré irrecevable son action, rejeté ses demandes et l'a condamnée aux dépens ainsi qu'à des indemnités de procédure.
L'association CLCV prie la cour, par dernières écritures notifiées le 4 février 2021 et au visa des articles L. 423-1 et suivants du code de la consommation tels qu'applicables, de l'article 1134 du code civil et des articles L. 111-1 et L. 211-1 du code de la consommation, de :
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions défavorables à l'association CLCV,
sur les appels incidents formés par l'association AGIPI et la société Axa France vie :
- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de mise hors de cause de l'AGIPI et rejeté toutes autres demandes formées par les sociétés intimées et appelantes incidentes contre la CLCV tant dans leur principe que leur quantum,
statuant à nouveau :
- juger l'action de l'association CLCV recevable et bien-fondée, et la juger non prescrite,
- rejeter toutes demandes qui seront formées par la société Axa France vie et l'association AGIPI,
- condamner in solidum la société Axa France vie et l'association AGIPI à garantir le taux minimum de rendement net de 4,50% l'an sur l'ensemble des adhésions au contrat CLER souscrites antérieurement au 1er juin 1995 et pour les versements effectués avant le 1er juin 1995 ainsi que sur l'ensemble des versements réguliers programmés et mis en place avant le 1er juin 1995,
- condamner in solidum la société Axa France vie et l'association AGIPI à créditer du différentiel de rendement les adhésions qui n'auraient pas bénéficié du taux minimum garanti
de rendement net de 4,50% l'an jusqu'au prononcé de la décision à intervenir,
- condamner in solidum la société Axa France vie et l'association AGIPI à payer aux bénéficiaires des adhésions arrivées à terme du vivant de l'assuré le manque à gagner calculé sur la base du taux minimum garanti de rendement net de 4,50% l'an dont l'adhésion n'a pas été créditée avant son terme,
- condamner in solidum la société Axa France vie et l'association AGIPI à payer aux bénéficiaires des adhésions qui ont pris fin par le décès de l'assuré le manque à gagner calculé sur la base du taux minimum garanti de rendement net de 4,50% l'an dont l'adhésion n'a pas été créditée avant le décès,
- ordonner toute mesure d'information de la décision à intervenir à destination des personnes susceptibles d'appartenir au groupe de consommateurs ainsi défini, notamment par la publication, de manière très apparente, réitérée au moins tous les quinze jours et sur une période d'au moins six mois, de la décision à intervenir, dans les quotidiens Le Parisien, Le Figaro, Le Monde, le magazine Le Particulier, un affichage très apparent sur la page d'accueil du site internet de la société Axa France vie et de l'AGIPI (axa.fr et agipi.com) ainsi que par des messages radiophoniques et télévisuels dont le paiement sera à la charge des intimées conformément à l'article L. 423-4 du code de la consommation, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la signification de la décision,
- fixer à six mois à compter de l'achèvement des mesures de publicité ordonnées le délai dont disposent les consommateurs pour adhérer au groupe afin d'obtenir la réparation de leur préjudice dans les conditions vues ci-dessus,
- préciser que les modalités d'adhésion au groupe se feront par l'envoi d'un courrier recommandé avec accusé de réception adressé par les adhérents à l'association AGIPI dont le siège social est situé [Adresse 1], à défaut à la société Axa France vie dont le siège social est situé [Adresse 2], avec envoi concomitant de la copie de ce courrier à l'association CLCV située [Adresse 3],
- fixer à un délai maximal d'un mois à compter de la réception de la lettre recommandée avec accusé de réception que l'adhérent aura adressée à l'association AGIPI pour que cette dernière, ainsi que la société Axa France vie, rétablissent le taux minimum garanti net de 4,50% l'an, créditent les adhésions des rémunérations qui leur sont dues et règlent aux bénéficiaires des adhésions qui ont pris fin les capitaux supplémentaires qui leur sont dus à ce titre,
- condamner in solidum la société Axa France vie et l'association AGIPI au paiement d'une somme de 230 000 euros au profit de l'association CLCV au titre des frais non compris dans les dépens et de l'article 700 du code de procédure civile dont une somme de 200 000 euros sera réglée dès le prononcé de la condamnation à titre de provision en application des dispositions de l'article L. 423-8 du code de la consommation,
- les condamner in solidum aux entiers dépens, dont distraction.
Par dernières conclusions notifiées le 29 janvier 2021, la société Axa France vie demande à la cour, au visa des articles 56, 122 et suivants, 752 du code de procédure civile, de la loi no2014-344 du 17 mars 2014, des articles L. 423-1, L. 423-3, R. 423-3 du code de la consommation en vigueur à la date de l'assignation (devenus les articles L. 623-1, L. 623-4, L. 623-5, L. 623-6, R. 623-6, R. 623-9 et R. 623-3 à la suite de l'ordonnance no2016-301 du 14 mars 2016, du décret no2014-1081 du 24 septembre 2014, de la circulaire NOR : JUSC1421594C du 26 septembre 2014, de la décision no2014-690 DC du 13 mars 2014, des articles L. 114-1, L. 140-4 (aujourd'hui L. 141-4), A. 132-1, A. 132-1-1, A. 132-2, A. 132-3 du code des assurances, de la directive 92/96/CE du 10 novembre 1992, des arrêtés du 19 mars 1993, du 28 mars 1995 et du 2 janvier 1998 et des articles 5, 1134, 1315, 1351, 2224 du code civil en vigueur à la date de l'assignation, de :
1) à titre principal, sur les fins de non-recevoir,
1.1 sur la confirmation du jugement ayant retenu une fin de non-recevoir quant au champ d'application de l'action de groupe
- confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que le manquement du professionnel à ses obligations légales ou contractuelles allégué par CLCV au soutien de son action de groupe n'a pas été commis à "l'occasion de la vente de biens ou de la fourniture de services", le contrat CLER ne pouvant être qualifié de "fourniture de services" au sens de l'ancien article L. 423-1 du code de la consommation ;
- en conséquence, confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que l'action de CLCV est irrecevable pour défaut de respect de l'ancien article L. 423-1 du code de la consommation ;
1.2 sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d'exposé exprès de cas individuels représentatifs au soutien de l'action
- juger que l'assignation n'expose pas les cas individuels représentatifs au soutien de l'action ;
- en conséquence, juger que l'action de CLCV est irrecevable pour défaut manifeste de présentation des cas individuels ;
1.3 sur la fin de non-recevoir tenant au non-respect des dispositions impératives du code de la consommation quant aux spécificités de l'action de groupe
- juger que l'action de CLCV n'est pas une action en responsabilité susceptible de relever du champ de l'action de groupe créée par la loi no2014-344 du 17 mars 2014 ;
- juger que les consommateurs ne sont pas placés dans une situation identique ou similaire ;
- en conséquence, juger que l'action de CLCV est irrecevable pour défaut de respect des dispositions impératives du code de la consommation ;
1.4 sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription
- juger que l'action de CLCV à l'encontre d'Axa est prescrite ;
2) à titre subsidiaire,
- juger que la modification contractuelle du taux de rémunération du contrat CLER est régulière ;
- juger que cette modification a été valablement rendue opposable aux adhérents au contrat ;
- subsidiairement, juger qu'aucune obligation d'information relative à la modification du contrat n'incombait à Axa ;
- en conséquence, débouter CLCV de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
3) à titre très subsidiaire,
- restreindre le périmètre de l'action de groupe aux adhésions postérieures au 1er mai 1990 et aux seuls adhérents justifiant avoir reçu les conditions générales du contrat CLER issues de la version de juin 1989 produite par CLCV ;
- exclure tous les bénéficiaires de contrats CLER du périmètre de l'action de groupe ;
plus subsidiairement,
- restreindre le périmètre de l'action de groupe aux adhésions postérieures au 1er mai 1990 et aux seuls adhérents justifiant avoir reçu les conditions générales du contrat CLER issues des versions de décembre 1987, juin 1989, mars 1991 et février 1993 uniquement ;
- exclure tous les bénéficiaires de contrats CLER du périmètre de l'action de groupe ;
4) à titre infiniment subsidiaire,
- juger que CLCV ne rapporte pas la preuve du préjudice qu'auraient subi les consommateurs
appartenant au groupe ;
- en conséquence, débouter CLCV de sa demande d'indemnisation du préjudice des consommateurs membres du groupe ;
plus subsidiairement,
- juger que l'indemnisation des membres du groupe effectivement représentés doit être limitée à la perte de chance de souscrire un contrat d'assurance-vie présentant un taux viager de 4,5% l'an ;
5) en tout état de cause,
- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes en paiement de dommages et intérêts ainsi que les demandes de publicité et, statuant à nouveau, :
- recevoir Axa en sa demande reconventionnelle et la dire bien fondée ;
- en conséquence, condamner CLCV à verser à Axa la somme de 1 euro symbolique, en réparation de son préjudice ;
- ordonner la publication sur la page d'accueil du site internet de CLCV des dispositifs du jugement entrepris et de l'arrêt à intervenir favorables à Axa pendant une durée de six mois, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la signification de la décision à intervenir ;
- condamner CLCV à supprimer toutes les pages de son site internet relatives à l'action de groupe engagée par elle à l'encontre d'Axa et de l'AGIPI, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la signification de la décision à intervenir ;
- condamner CLCV à assurer, à ses frais, la publication des dispositifs du jugement entrepris et de l'arrêt à intervenir favorables à Axa dans trois journaux nationaux dans un délai de quinze jours à compter de la signification de la décision sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
- condamner CLCV à envoyer un courrier à chacun des adhérents au contrat CLER ayant renseigné le formulaire de contact les invitant à se manifester auprès d'elle dans le cadre de l'action de groupe, de façon à les informer de la décision intervenue reconnaissant le préjudice d'Axa, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la signification de la décision à intervenir favorable à Axa ;
- infirmer le jugement en ce qu'il a limité à 20 000 euros la somme que CLCV est condamnée à verser à Axa au titre de l'article 700 du code de procédure civile et, statuant à nouveau, condamner CLCV au paiement d'une somme de 100 000 euros à verser à Axa en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance ;
- condamner CLCV, au titre de la procédure d'appel, au paiement d'une somme de 100 000 euros à verser à Axa au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- confirmer le jugement condamnant CLCV aux entiers dépens de première instance, dont distraction conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;
- condamner CLCV aux entiers dépens d'appel, dont distraction conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions notifiées le 20 janvier 2021, l'AGIPI demande à la cour, au visa des anciens articles L. 423-1 et suivants et R. 423-1 et suivants du code de la consommation, des articles 5, 1351 et 2224 anciens du code civil, de l'ancien article L. 140-4 et de l'article L. 141-4 ainsi que des articles A. 132-1 et suivants du code des assurances, de :
I - à titre principal, sur l'infirmation du jugement en ce qu'il a rejeté la demande de mise hors de cause de l'AGIPI
- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de mise hors de cause de l'AGIPI, et statuant à nouveau :
- prononcer la mise hors de cause de l'AGIPI ;
II- à titre subsidiaire, sur les fins de non-recevoir
- confirmer le jugement en ce qu'il a jugé irrecevable l'action de groupe initiée par CLCV pour défaut de respect des dispositions de l'ancien article L. 423-1 du code de la consommation, et juger que l'action de CLCV est irrecevable pour défaut d'application des dispositions du code de la consommation au contrat d'assurance de groupe ;
- juger que l'action de CLCV est irrecevable pour défaut de représentativité des cas individuels visés par CLCV dans son assignation, ou au motif que les consommateurs ne sont pas placés "dans une situation similaire ou identique" ou prescrite ou encore car elle n'est pas une action en responsabilité au sens de la loi no2014-344 du 17 mars 2014 ;
III - à titre subsidiaire, sur le mal fondé de l'action de CLCV
- débouter CLCV de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
VI - à titre encore plus subsidiaire, sur la demande de limitation de l'action engagée par CLCV
- exclure du périmètre de l'action les bénéficiaires des contrats CLER arrivés à terme du vivant de l'assuré et les bénéficiaires des contrats CLER ayant pris fin à la suite du décès de l'assuré;
- limiter l'action de groupe aux seules adhésions au contrat CLER conclues entre 1985 et janvier 1994 pour lesquelles les adhérents pourront démontrer qu'ils ont reçu la version des conditions générales de 1989 référencée Z 70323 à l'exclusion des adhérents ayant reçu des certificats d'adhésion V3 ;
- limiter l'indemnisation des consommateurs effectivement représentés à la perte de chance de souscrire un contrat présentant un taux viager de 4,5% l'an ;
V - en tout état de cause
- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formulée par l'AGIPI au titre de la réparation de son préjudice d'image, et statuant à nouveau, :
- condamner CLCV au paiement d'un euro symbolique à titre de dommages et intérêts ainsi qu'à :
? ordonner la suppression de toutes les pages internet de son site officiel concernant l'action de groupe engagée à l'encontre de l'AGIPI et d'Axa France vie ;
? ordonner la publication sur son site internet officiel pendant une durée de trois mois d'un bandeau ainsi rédigé :
"Publication judiciaire à la demande de l'AGIPI :
Par arrêt du [jj/mm/aaaa] la cour d'appel de Versailles a débouté l'association de consommateurs CLCV de l'action de groupe engagée le 28 octobre 2014 et de ses prétentions dirigées à l'encontre de l'AGIPI et de la société Axa France vie au titre du contrat CLER. La cour a condamné l'association CLCV au paiement de la somme d'un euro de dommages et intérêts symbolique en réparation du préjudice d'image que lui a causé la publicité illégale effectuée par l'association de consommateurs CLCV.
La cour d'appel de Versailles a également condamné l'association de consommateurs CLCV à supprimer toutes les pages de son site internet faisant référence à l'action de groupe qu'elle a engagée à l'encontre de l'AGIPI".
? ordonner l'envoi d'un courriel à l'ensemble des adhérents du contrat CLER qui se sont manifestés auprès de CLCV par l'intermédiaire de son site internet ainsi rédigé :
"Madame, Monsieur,
Par arrêt en date du [jj/mm/aaaa] la cour d'appel de Versailles a débouté l'association de consommateurs CLCV de l'action de groupe introduite à l'encontre de l'AGIPI et de la société AXA France vie visant les contrats CLER.
Par l'intermédiaire de notre site internet, vous avez manifesté votre volonté d'appartenir au groupe de consommateurs qui était potentiellement concerné par cette action.
Par la présente, nous vous informons que nous ne pouvons donner aucune suite judiciaire à votre demande dans le cadre de cette action, notre association ayant été déboutée de ses demandes." ;
- assortir cette condamnation d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard qui prendra effet un mois après la signification à partie du présent arrêt ;
- juger qu'aucune mesure de publicité de l'arrêt ne pourra intervenir avant l'expiration du délai de pourvoi en cassation ou que la Cour de cassation n'ait statué dans l'hypothèse d'un pourvoi;
- débouter CLCV de l'ensemble de ses demandes ;
- condamner CLCV au paiement de la somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du code
de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 février 2021.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande de mise hors de cause de l'AGIPI
Pour rejeter cette demande, le tribunal a énoncé que l'action, en ce qu'elle tendait à mettre en cause la responsabilité des défenderesses au motif que chacune d'entre elles aurait manqué à ses propres obligations, pouvait être dirigée tant contre l'assureur que contre le souscripteur et qu'il lui appartenait d'apprécier le bien fondé des griefs présentés.
Au soutien de sa demande de mise hors de cause, l'AGIPI soutient d'abord que l'action de groupe est nécessairement dirigée contre un professionnel au sens de l'article liminaire du code de la consommation alors qu'en sa qualité d'association souscriptrice du contrat collectif, elle ne peut être considérée comme tel. Elle fait valoir ensuite que l'action de groupe tend à obtenir le paiement de la prestation d'assurance qui n'est pas une obligation du souscripteur du contrat collectif si bien que sa mise en cause est superfétatoire.
L'association CLCV réplique que l'AGIPI est mandatée par la société Axa France vie et se comporte tel l'assureur. Elle conteste que l'AGIPI n'exerce aucune activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, arguant notamment qu'elle met en avant son activité commerciale sur son site internet. Elle soutient que les pièces versées aux débats établissent le rôle exact de l'AGIPI qui est celui d'un assureur.
L'association CLCV a agi contre l'AGIPI à titre principal, lui reproche un manquement à sa propre obligation d'information et forme des demandes à son égard, notamment de condamnation, in solidum avec la société Axa France vie, à garantir un taux minimum de rendement net de 4,50% et à payer un manque à gagner calculé sur la base de ce taux. Il s'ensuit que l'AGIPI est à l'évidence concernée par le litige engagé par l'association CLCV.
La circonstance que l'action soit éventuellement dirigée contre une personne n'ayant pas la qualité à défendre, motifs pris que l'AGIPI ne serait pas un professionnel et ne devrait pas la prestation d'assurance en tant que souscriptrice du contrat collectif, ou qu'elle soit non fondée à l'égard de l'AGIPI, qui ne serait pas tenue à une obligation de paiement, n'est pas de nature à justifier sa mise hors de cause pure et simple mais constitue l'invocation de moyens de défense. Ceux-ci doivent être examinés comme tels et nécessitent que l'AGIPI ne soit pas d'emblée mise hors de cause.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
Sur la fin de non-recevoir fondée sur le champ d'application matériel de l'action de groupe
Le tribunal a, au visa de l'article L. 423-l du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi no20l4-344 du 17 mars 2014 applicable à la date d'introduction de l'instance, retenu qu'il appartenait au demandeur invoquant l'existence d'une fourniture de services d'en rapporter la preuve.
Il a énoncé que le contrat de fourniture de services est celui qui permet de réaliser une prestation de services et qu'il comprend comme obligation essentielle une obligation de faire, le débiteur de cette obligation s'engageant à titre principal à effectuer une activité déterminée créatrice d'utilité économique.
Il a rappelé que le contrat CLER est un contrat d'assurance de groupe sur la vie à adhésion facultative, permettant aux adhérents de placer leur épargne sur un fonds en euros ou d'opter pour des supports en unité de compte, en procédant à des versements libres ou réguliers.
Il a estimé qu'en dépit de son utilisation à des fins d'épargne, l'assurance-vie est une variété d'assurances de personne, et non un instrument financier au sens du code monétaire et financier, et qu'il s'agit d'un contrat de couverture de risque lié à la durée de vie de l'assuré, la désignation du bénéficiaire étant une stipulation pour autrui et le contrat comportant un aléa au sens du code des assurances. Il a relevé qu'en échange du paiement de primes ou de cotisations, l'assureur s'engage à verser une certaine somme à 1'assuré ou au bénéficiaire désigné par celui-ci.
Il en a déduit que l'ob1igation essentielle de l'assureur consiste à verser une somme d'argent en cas de survenance du risque couvert et que comportant essentiellement une obligation de payer, et non de faire, l'assurance-vie ne constitue pas un contrat de fourniture de service de sorte qu'elle ne peut constituer le support d'une action de groupe.
L'association CLCV reproche au tribunal d'avoir adopté une conception restrictive de la notion de fournitures de services.
Elle fait valoir que la jurisprudence relative à l'action de groupe en matière de baux d'habitation va à l'encontre de l'esprit de la loi Hamon de mars 2014. Elle avance que c'est pour contrer cette jurisprudence que la loi no2018-1021 du 23 novembre 2018 a d'ailleurs complété l'article L. 623-1 du code de la consommation en prévoyant que l'action de groupe s'applique aussi dans le cadre de la location d'un bien immobilier. Elle argue également de l'origine européenne de l'action de groupe et de la notion de "vente de biens ou de fourniture de services", le contrat de service recouvrant dans cette conception toute activité rémunérée ne consistant pas à transférer la propriété. Elle invoque enfin que l'assurance vie est avant tout un produit d'épargne et que le contrat CLER met à la charge de l'assureur non seulement l'obligation d'ouvrir un compte d'épargne à versements libres au nom de chacun des adhérents mais aussi celle de gérer en faisant fructifier les sommes versées, caractérisant une obligation de faire et la fourniture d'un service financier.
Elle estime ainsi qu'il s'agit d'une prestation de services, entrant dans le champ d'application de l'action de groupe.
La société Axa France vie conclut au contraire à la confirmation du jugement.
Elle affirme que l'action de groupe a une origine française si bien que la notion de "fourniture de services"doit être interprétée au regard du droit français, dans lequel l'archétype du contrat de fourniture de services est celui d'entreprise dont la prestation caractéristique consiste en une obligation de faire. Elle soutient que cette interprétation ne saurait être écartée au regard de certains travaux parlementaires et que l'ajout en 2018 par le législateur de la location d'un bien immobilier parmi les cas d'ouverture de l'action de groupe conforte cette analyse. Elle prétend que le placement par l'assureur des sommes versées par l'adhérent pour les faire fructifier vise à satisfaire à son obligation essentielle consistant à verser le capital ou la rente définis lors de la survenance du risque et objecte que la jurisprudence de la Cour de cassation s'oppose à la qualification des contrats d'assurance vie comme le contrat CLER en contrats d'épargne.
L'AGIPI conclut aussi à la confirmation du jugement dont elle fait siens les motifs.
Elle développe pour l'essentiel des moyens similaires à la société Axa France vie. Elle soutient notamment que l'interprétation extensive de l'association CLCV tend à vider de son sens l'ancien article L. 423-1 du code de la consommation visant à circonscrire le champ d'application de l'action de groupe aux principaux contrats conclus par les consommateurs. Elle ajoute que le contrat CLER n'est pas régi par les dispositions du code de la consommation, ce qui rend aussi irrecevable l'action de groupe.
L'article L. 423-1, devenu L. 623-1, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (dite loi [Localité 7]), dispose qu'une association de défense des consommateurs représentative au niveau national et agréée en application de l'article L. 41l-1 (devenu L. 811-1) peut agir devant une juridiction civile afin d'obtenir la réparation des préjudices individuels subis par des consommateurs placés dans une situation similaire ou identique et ayant pour cause commune un manquement d'un ou des mêmes professionnels à leurs obligations légales ou contractuelles :
1 o A l'occasion de la vente de biens ou de la fourniture de services ;
2 o Ou lorsque ces préjudices résultent de pratiques anticoncurrentielles au sens du titre II du livre IV du code de commerce ou des articles 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.
Au cas d'espèce, l'association CLCV soutient que le contrat CLER relève d'une fourniture de services.
En droit français, le contrat de service renvoie au contrat de louage et d'industrie tel que régi par les articles 1779 et suivants du code civil et à la notion de contrat d'entreprise. La définition retenue par le tribunal selon laquelle le contrat de fourniture de services est celui qui permet de réaliser une prestation de services et comprend comme obligation essentielle une obligation de faire, le débiteur de cette obligation s'engageant à titre principal à effectuer une activité déterminée créatrice d'utilité économique, ne peut dès lors qu'être approuvée au regard du droit national.
S'il n'est pas contestable qu'en droit européen, la notion de contrat de service est plus vaste, cette conception s'explique par la volonté de donner un effet maximal à la libre circulation des services au sein de l'Union européenne, objectif non recherché par le législateur national. En toute hypothèse, la législation française sur l'action de groupe ne trouve pas son origine dans le droit européen, contrairement à ce que soutient l'appelante, si bien qu'elle doit être appréciée au regard du droit national et non à la lumière de textes européens.
S'il est vrai par ailleurs que lors des débats parlementaires, le ministre délégué a affirmé qu' "aucun secteur d'activité n'est exclu du champ d'application du dispositif d'action de groupe", force est de constater que la formule retenue par le législateur en 2014 ne reprend pas cette expression et ne vise pas tous les contrats mais limite l'action de groupe, la cantonnant à la vente de biens et à la fourniture de services.
L'association CLCV soutient cependant que l'intention du législateur se déduirait de son intervention en 2018, par la loi [Localité 7], qui viendrait confirmer le champ d'application large de l'action de groupe et que la modification de l'article L. 423-1 devenu L. 623-1 du code de la consommation résultant de cette loi serait de nature interprétative.
L'article 138 de la loi [Localité 7] a complété cet article comme suit :
une association de défense des consommateurs représentative au niveau national et agréée en application de l'article L. 41l-1 (devenu L. 811-1) peut agir devant une juridiction civile afin d'obtenir la réparation des préjudices individuels subis par des consommateurs placés dans une situation similaire ou identique et ayant pour cause commune un manquement d'un ou des mêmes professionnels à leurs obligations légales, relevant ou non du présent code, ou contractuelles :
1 o A l'occasion de la vente de biens ou de la fourniture de services ainsi que dans le cadre de la location d'un bien immobilier ;
2 o Ou lorsque ces préjudices résultent de pratiques anticoncurrentielles au sens du titre II du livre IV du code de commerce ou des articles 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.
Or, cette loi n'indique pas qu'elle est interprétative de la loi du 17 mars 2014 ayant institué l'action de groupe et l'alinéa selon lequel l'article 138 est interprétatif de ladite loi a d'ailleurs été supprimé dans la rédaction finalement retenue. En outre, il résulte de la formulation de l'article 138 précité que ce texte n'a nullement précisé les termes de la loi initiale mais a procédé à un ajout. Il s'en déduit que la modification de l'article L. 423-1 devenu L. 623-1 du code de la consommation n'est pas interprétative. Or, cet ajout de la location immobilière, en plus de la vente et de la fourniture de services, corrobore que cette dernière doit s'entendre stricto sensu.
Le tribunal a exactement rappelé l'objet du contrat CLER et la définition du contrat d'assurance de groupe au sens du code des assurances.
C'est aussi par de justes motifs expressément approuvés par la cour que le tribunal a retenu que même si elle est utilisée en tant que produit d'épargne, l'assurance vie est une variété d'assurances, non un instrument financier, et qu'il s'agit d'un contrat de couverture d'un risque de décès ou de survie de l'assuré. Cette analyse est conforme au principe résultant d'arrêts de la chambre mixte de la Cour de cassation du 23 novembre 2004 en application duquel les contrats du même type que le contrat CLER ne sauraient être qualifiés en contrats d'épargne mais constituent bien des contrats d'assurance sur la vie, s'agissant de contrats d'assurance dont les effets dépendent de la durée de la vie humaine et qui comportent un aléa.
Et comme l'a encore à raison énoncé le tribunal, l'obligation essentielle de l'assureur consiste à verser une somme d'argent en cas de risque de survenance du risque couvert, soit à l'assuré, soit au bénéficiaire, ce qui ne constitue pas une obligation de faire. En effet, il ne s'agit pas de l'exécution d'une prestation matérielle ou intellectuelle de telle sorte que l'existence d'une fourniture de service n'est pas caractérisée.
La circonstance que l'assureur ouvre un compte d'épargne au nom de chaque adhérent et accomplisse une gestion financière est sans incidence au regard de la qualification du contrat qui est fondée sur l'obligation principale du débiteur.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action engagée par l'association CLCV dès lors que le contrat litigieux ne rentre pas dans le champ d'application de l'action de groupe, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres fins de non-recevoir soulevées par les intimées.
Sur les demandes reconventionnelles
Le tribunal a rejeté les demandes de dommages et intérêts et de mesures de publicité de la société Axa France vie et de l'AGIPI, faute de préjudice avéré.
La société Axa France vie reproche à l'association CLCV une communication prématurée sur son action, lancée avant même son assignation, et dénuée d'objectivité. Elle soutient qu'il s'agit d'un manquement aux dispositions du code de la consommation et d'une faute au sens de l'ancien article 1382 du code civil. Elle se prévaut d'un sondage confirmant l'impact négatif d'une action de groupe sur l'image du professionnel visé auprès des consommateurs.
L'AGIPI soutient qu'en violation des dispositions du code de la consommation prévoyant la mise en oeuvre de mesures de publicité une fois que la décision sur la responsabilité n'est plus susceptible de recours ordinaire, ni de pourvoi en cassation, l'association CLCV a publié un communiqué de presse se plaignant de mauvaises pratiques, avant même son assignation. Elle affirme le caractère préjudiciable de tels agissements sur son image.
L'association CLCV rétorque que le législateur n'a jamais interdit d'informer le public de l'existence d'une action de groupe engagée contre un professionnel et ses fondements. Elle fait valoir que les intimées ne démontrent pas en quoi les propos dénoncés auraient dégénéré en abus. Elle ajoute que l'existence d'un préjudice commercial n'est pas démontrée, que le sondage cité est orienté et que les mesures sollicitées sont disproportionnées, voire illégales.
Il appartient à celui qui se plaint d'une faute délictuelle de rapporter la preuve du préjudice dont il se plaint en lien de causalité avec cette faute.
Au cas présent, alors que le tribunal a rejeté les demandes de la société Axa France vie et de l'AGIPI au motif qu'elles ne justifiaient pas du tort que leur aurait causé la publicité donnée par l'association CLCV à son action de groupe, l'AGIPI n'invoque en appel aucun élément pour caractériser son préjudice d'image, se bornant à l'affirmer. Quant à la société Axa France vie, elle se prévaut seulement d'une étude réalisée par l'IFOP non pas sur l'impact de la publicité litigieuse à son égard mais sur l'effet que serait susceptible de provoquer chez les sondés le fait qu'une entreprise, en général, soit visée par une action de groupe. Une telle pièce n'est pas probante du préjudice allégué.
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de réparation formées par la société Axa France vie et l'AGIPI, qu'elles consistent en des dommages et intérêts ou en des mesures de publicité.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
L'association CLCV, qui succombe en son recours, sera condamnée aux dépens d'appel, déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile et condamnée à payer à chacune des intimées la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, le jugement étant confirmé sur les dépens et frais irrépétibles de première instance.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Ajoutant :
Condamne l'association CLCV à payer à la société Axa France vie et à l'AGIPI, chacune, la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;
Rejette toute autre demande ;
Condamne l'association CLCV aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile par l'avocat en ayant fait la demande.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-José BOU, Président et par Madame Claudine AUBERT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier,Le Président,
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CAPP/JURITEXT000020071679.xml | 24 / 10 / 2008
No RG : 07 / 05016
Décision déférée du 26 Septembre 2007- Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de TOULOUSE (20600801)
Norbert SAINT RAMON
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA HAUTE GARONNE
SOCIETE APSIDE
INFIRMATION
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4ème Chambre Section 2- Chambre sociale
ARRÊT DU VINGT QUATRE OCTOBRE DEUX MILLE HUIT
APPELANT (S)
Monsieur X...
31270 CUGNAUX
représenté par Mme BULGARELLI, (FNATH) en vertu d'un pouvoir
INTIME (S)
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA HAUTE GARONNE
Service juridique
3 boulevard Léopold Escande
31093 TOULOUSE CEDEX 9
représentée par Mme AUDARD, en vertu d'un pouvoir
SOCIETE APSIDE
58 avenue du Général Leclerc
92514 BOULOGNE
représentée par Me Xavier LOUBEYRES, avocat au barreau de PARIS substitué par Me P. SAINT GENIEST, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945. 1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Septembre 2008, en audience publique, devant C. CHASSAGNE, conseiller, chargé d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
P. de CHARETTE, président
C. PESSO, conseiller
C. CHASSAGNE, conseiller
Greffier, lors des débats : D. FOLTYN-NIDECKER
- CONTRADICTOIRE
-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile
-signé par P. de CHARETTE, président, et par D. FOLTYN-NIDECKER, greffier de chambre.
FAITS ET PROCEDURE
Embauchée depuis le 1er septembre 1999 en qualité d'analyste programmeur par la société APSIDE (prestations informatiques), ...X... établissait le 12 décembre 2005 une déclaration de maladie professionnelle au titre du tableau 57 C (tendinite bilatérale).
La CPAM de la Haute-Garonne ayant refusé de prendre en charge cette pathologie au titre de la législation professionnelle au motif que le poste tenu ne l'exposait pas au risque prévu au dit tableau, ... X... saisissait la commission de recours amiable qui confirmait la décision de la caisse.
Par jugement en date du 26 septembre 2007, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Garonne la déboutait de son recours.
Par lettre recommandée expédiée le 10 octobre 2007, ... X... interjetait appel de cette décision.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
... X... demande à la cour, à titre principal, de constater qu'elle remplit les conditions prévues par le tableau 57 des maladies professionnelles et la renvoyer devant l'organisme compétent pour la liquidation de ses droits, ou à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale pour rechercher si les travaux accomplis par elle entrent dans le cadre de ce tableau.
Elle indique que le caractère habituel du risque n'implique pas nécessairement sa permanence mais au moins sa répétition avec une fréquence et une durée suffisante et soutient que sa pathologie est liée à l'utilisation de la souris et du clavier de l'ordinateur sur lequel elle travaille au moins 80 % de son temps.
La société APSIDE soulève in limine litis l'irrecevabilité de l'appel comme tardif et sur le fond conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de ... X... à lui payer 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle rappelle que la demande d'expertise ne peut suppléer la carence d'une partie.
Elle constate qu'après son licenciement ... X... a repris un poste similaire dans une société plus importante et affirme que le travail sur ordinateur d'un analyste programmeur ne génère aucun mouvement de nature à provoquer une inflammation de la gaine du tendon du poignet.
la CPAM de la Haute-Garonne conclut également à la confirmation du jugement.
Elle indique qu'... X... ne rapporte pas la preuve de son exposition habituelle au risque prévu par le tableau 57 C et que la condition de délai de prise en charge (en l'espèce sept jours à compter de la cessation de l'exposition) n'est pas remplie.
Attendu que Mademoiselle X... a interjeté appel du jugement rendu le 26 septembre 2007 par lettre recommandée expédiée le 10 octobre 2007, reçue par la cour le 11 octobre ; que cet appel interjeté dans les formes et délai légaux est par conséquent recevable ;
Attendu qu'en application de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale, est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau ; que si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime ;
Qu'en l'espèce, il est constant qu'... X... souffre d'une tendinite aux avants bras droit et gauche, maladie désignée dans le tableau 57 C des maladies professionnelles comme susceptible d'être provoquée par des travaux comportant de façon habituelle, soit des mouvements répétés ou prolongés du poignet ou de préhension de la main, soit un appui carpien, soit une pression prolongée ou répétée sur le talon de la main ; que le délai de prise en charge de cette maladie est de 7 jours à compter de la fin de l'exposition ;
Attendu qu'... X... travaille depuis 1999 en qualité d'analyste programmeur pour la société APSIDE qui la délègue dans des sociétés clientes pour effectuer les prestations informatiques ;
Que les dernières missions qui lui ont été confiées avant la déclaration de maladie professionnelle faite le 12 novembre 2005 étaient pour le client IBM du 6 janvier 2005 au 30 septembre 2005, puis pour le client ATR à compter du 2 novembre 2005 chez lequel elle travaillait encore le jour de la déclaration ;
Que toutes les parties s'accordent pour reconnaître que le travail sur ordinateur et en particulier l'utilisation du clavier et de la souris correspond aux gestes décrits au tableau 57 C comme susceptibles de provoquer une tendinite des avants bras, mais la CPAM de la Haute-Garonne et la société ABSIDE prétendent qu'... X... ne pratiquait pas ces gestes de façon habituelle puisque son activité comprend deux aspects, la saisie de données, d'une part, mais également, d'autre part, un travail d'analyse par le dialogue, la réflexion, des réunions ou la lecture de dossiers ne nécessitant pas l'utilisation du clavier et de la souris ;
Que non seulement ... X... conteste le fait que le travail d'analyse exclut l'utilisation de l'ordinateur mais surtout elle produit de nombreuses attestations de collègues de travail qui confirment que 75 % au moins de son temps de travail nécessite l'utilisation du clavier et la souris et non 50 % comme indiqué par l'employeur ;
Qu'en tout état de cause, le caractère habituel ne signifie pas de façon constante ou linéaire comme l'a retenu à tort le premier juge, de telle sorte qu'il est indifférent de savoir avec précision quel pourcentage du temps de travail journalier de la salariée était réservé au maniement du clavier et de la souris alors qu'il est établi que c'est tous les jours et plusieurs heures par jour qu'... X... était soumise aux gestes en question, ce qui caractérise bien leur caractère habituel ;
Qu'en outre, elle a été exposée au risque jusqu'au jour de la déclaration de maladie professionnelle contrairement à ce que soutiennent les intimées ;
Attendu par ailleurs que les avis du médecin traitant de l'intéressée, du médecin du travail (dont la société APSIDE a refusé de suivre la préconisation d'aménagement du poste d'... X... (cf décision de la DDTE en date du 9 juin 2006), du spécialiste des maladies professionnelles de l'hôpital Purpan et du rhumatologue sont unanimes pour dire que la pathologie de l'appelante est en relation directe avec son activité professionnelle ;
Que contrairement à ce que prétend l'employeur, cette tendinite ne peut avoir de relation avec les cours du soir qu'... X... suit au CNAM dont Mr F...et Mlle G... attestent que ce sont des cours magistraux sans utilisation d'ordinateur, ni à une pathologie antérieure puisque la fiche médicale produite par la salariée confirme que les différents examens cliniques radios et IRM ont éliminé une cause osseuse articulaire ou tendineuse pour expliquer les symptômes ;
Attendu qu'au vu de ces considérations, il y a lieu d'accueillir le recours formé par ... X... et de réformer la décision de la commission de recours amiable ayant refusé la prise en charge de sa maladie au titre de la législation professionnelle ;
Attendu que la présente décision est opposable à la société ABSIDE qui doit être déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles ;
PAR CES MOTIFS
En la forme,
Déclare l'appel formé par ... X... recevable.
Infirme le jugement rendu le 26 septembre 2007 par le Tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute Garonne,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Accueille le recours formé par ... X... contre la décision de la commission de recours amiable de la CPAM de la Haute-Garonne en date du 8 juin 2006.
Dit et juge que l'affection dont souffre ... X... (tendinite aux avants bras) est d'origine professionnelle.
Déclare le présent arrêt opposable à la société APSIDE.
Déboute la société APSIDE de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par M. P. de CHARETTE, président et par Mme D. FOLTYN-NIDECKER, greffier.
Le greffierLe président
Dominique FOLTYN-NIDECKERPatrice de CHARETTE
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CAPP/JURITEXT000046013800.xml | Ordonnance n° 29
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23 Juin 2022
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No RG 21/02288 -
No Portalis DBV5-V-B7F-GKTW
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Ordonnance notifiée aux parties le :R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
ORDONNANCE DE LA PREMIÈRE PRÉSIDENTE
Contestation d'honoraires d'avocat
Rendue le vingt trois juin deux mille vingt deux
Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le dix neuf mai deux mille vingt deux par Madame Gwenola JOLY-COZ, première présidente de la cour d'appel de POITIERS, assistée de Madame Inès BELLIN, greffier, lors des débats.
Madame [L] [Z]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
comparante en personne
DEMANDEUR en contestation d'honoraires,
D'UNE PART,
Maître Stéphanie GUEDO
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Emmanuelle BERNARD de la SCP ADEN AVOCATS ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de POITIERS
DEFENDEUR en contestation d'honoraires,
D'AUTRE PART,
ORDONNANCE :
- Contradictoire
- Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- Signée par Madame Gwenola JOLY-COZ, première présidente et par Madame Inès BELLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Par lettre enregistrée le 25 mars 2021, Maître [N] [J] a saisi Monsieur le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de La Roche-sur-Yon d'une demande de taxation de ses honoraires dus par Madame [L] [Z] à hauteur de 1 092 euros toutes taxes comprises.
Par décision prononcée le 1er juillet 2021, le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de La Roche-sur-Yon a taxé les honoraires dus à Maître [N] [J] à la somme de 1 092 euros toutes taxes comprises.
La décision du bâtonnier a été notifiée à Madame [L] [Z] le 5 juillet 2021.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 juillet 2021, Madame [L] [Z] a formé un recours devant la première présidente de la cour d'appel de Poitiers.
L'affaire a été appelée à l'audience du 19 mai 2022 où Madame [L] [Z] a comparu en personne devant la première présidente.
Madame [L] [Z] déclare avoir confié la défense de ses intérêts à Maître [N] [J] dans le cadre d'une procédure de divorce par consentement mutuel.
Elle conteste devoir la somme de 1 092 euros à Maître [N] [J].
Elle fait valoir qu'elle devait bénéficier de l'aide juridictionnelle totale, mais qu'en raison du manque de diligence de son avocate la décision d'aide juridictionnelle serait devenue caduque.
Elle soutient que Maître [N] [J] ne l'aurait jamais informée du risque de caducité de la décision d'aide juridictionnelle.
Madame [L] [Z] a entrepris de faire une nouvelle demande d'aide juridictionnelle et soutient avoir envoyé l'ensemble des pièces justificatives à son avocate par voie postale, conformément à sa demande. Le dossier d'aide juridictionnelle n'a jamais été déposé et Maître [N] [J] lui adressait alors une facture de 1 092 euros toutes taxes comprise qu'elle refusait de payer.
Madame [L] [Z] a dessaisi son avocate le 27 janvier 2021.
Elle expose n'avoir signé aucune convention avec Maître [N] [J] et n'avoir jamais été informée du montant des honoraires de son avocate. Elle soutient que la somme réclamée est au-dessus de ses moyens et considère que ses intérêts ont été négligés par son avocate lui reprochant son manque de diligence ou son inaction dans le dossier.
Madame [L] [Z] déclare avoir adressé deux courriels à Maître [N] [J], afin de solutionner amiablement ce litige, qui seraient restés sans réponse. Elle propose à l'audience de régler la somme de 600 euros toutes taxes comprises pour les cinq heures de travail effectuées par Maître [N] [J].
Maître [N] [J], représentée par Maître Emmanuelle Bernard, déclare que Madame [L] [Z] a reçu notification de la décision du bureau d'aide juridictionnelle avec la précision que la procédure devait être introduite dans le délai d'un an, à défaut de quoi la décision d'aide juridictionnelle serait caduque. Elle fait valoir qu'aucune convention d'honoraires n'a pu être signée compte-tenu de son intervention au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle déclare n'avoir perçu aucun honoraire pour les diligences accomplies qu'elle décrit. Un projet de convention de divorce a été proposé aux parties le 1er octobre 2018. L'impossibilité de parvenir à régulariser la convention de divorce ne lui est pas imputable et a tenu au temps pris par Madame [L] [Z] pour faire retour aux mels, aux difficultés des conseils pour obtenir des informations, aux désaccords entre les parties sur un certain nombre de points justifiant la rédaction d'une requête en divorce, à la saisine tardive par les parties d'un notaire, à l'éloignement géographique de Madame [L] [Z] qui avait déménagé à [Localité 3] et à l'absence de son mari parti à l'étranger.
Concernant le dépôt de la nouvelle demande d'aide juridictionnelle, Maître [N] [J] soutient que Madame [L] [Z] ne lui aurait jamais remis les pièces justificatives rendant impossible le dépôt du dossier, précisant que sa cliente n'était, en tout état de cause, plus admissible à l'aide juridictionnelle totale.
Maître [N] [J] fait valoir avoir limité le montant de ses honoraires en facturant seulement cinq heures de travail.
Elle soutient que le montant sollicité au titre de ses honoraires est parfaitement justifié au regard des diligences accomplies et sollicite la fixation de ses honoraires dus par Madame [L] [Z] à la somme de 1 092 euros toutes taxes comprises et la condamnation de cette dernière à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur la recevabilité :
Selon l'article 176 du décret du 27 novembre 1991, la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d'appel qui est saisi par l'avocat ou la partie par lettre recommandée avec accusé de réception. Le délai de recours est d'un mois à compter de la notification de la décision.
En l'espèce, le recours de Madame [L] [Z] est recevable et régulier en la forme.
Sur le fond :
Sur la convention d'honoraires :
Les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires des avocats sont réglées en recourant à la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret no91-1197 du 27 novembre 1991.
Il résulte de l'article 10 de la loi no71-1130 du 31 décembre 1971, modifié par la loi du 10 juillet 1991 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, que sauf en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat conclut par écrit avec son client une convention d'honoraires, qui précise notamment le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.
A défaut de convention, les honoraires sont fixés au regard de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci, conformément au quatrième alinéa de l'article 10 de la loi no71-1130 du 31 décembre 1971.
En l'espèce, aucune convention d'honoraires n'a été signée entre les parties.
Sur la responsabilité de l'avocat :
Il sera rappelé qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge de l'honoraire de se prononcer sur l'éventuelle responsabilité civile de l'avocat à l'égard de son client, liée au manquement à son devoir de conseil et d'information, ou à une exécution défectueuse de sa prestation. De tels griefs relèvent de la responsabilité professionnelle de l'avocat et non de l'évaluation des honoraires.
Sur les diligences accomplies :
En l'espèce, Maître [N] [J] a été désignée le 21 mai 2018 pour assister Madame [L] [Z] dans le cadre de sa procédure de divorce par consentement mutuel.
Il ressort des éléments du dossier que les diligences accomplies par Maître [N] [J] ont consistés en :
-plusieurs rendez-vous téléphoniques,
-des échanges de mels avec la cliente,
-des échanges de mels avec le conseil de la partie adverse aux fins d'établissement d'une convention de divorce,
-la vérification du projet de convention de divorce rédigé par le conseil de la partie adverse, lequel a été soumis aux parties le 1er octobre 2018,
-le suivi de la procédure.
Il apparaît, au regard des éléments versés aux débats, que Maître [N] [J] justifie avoir assisté Madame [L] [Z] tout le long de la procédure jusqu'à son dessaisissement par sa cliente.
Cette décision unilatérale ne peut faire obstacle à la rémunération de l'avocat pour les diligences qu'il a réalisées à la demande ou avec l'accord de son client.
Les honoraires totaux sollicités, d'un montant de 1 092 € toutes taxes comprises, correspondant à une facturation de cinq heures de travail à raison de 180 euros toutes taxes comprises, sont justifiés au regard de la longueur de la procédure et des diligences accomplies et tiennent compte de la situation de fortune de la cliente.
Par conséquent, la décision du bâtonnier sera confirmée.
Sur l'article 700 du code de procédure civile :
Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens en tenant compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.
En l'espèce, il n'y aura pas lieu à condamnation de Madame [L] [Z] au paiement d'une somme au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Sur les dépens :
L'article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
Succombant à la présente instance, Madame [L] [Z] en supportera les dépens.
PAR CES MOTIFS :
Nous, Gwenola Joly-Coz, première présidente, statuant publiquement et par décision contradictoire,
Déclarons le recours de Madame [L] [Z] recevable et régulier en la forme ;
Confirmons l'ordonnance du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de La Roche-sur-Yon en date du 1er juillet 2021 ;
En conséquence,
Enjoignons à Madame [L] [Z] de régler à Maître Stéphanie Guedo la somme de 1 092 euros toutes taxes comprises ;
Disons n'y avoir lieu à paiement au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamnons Madame [L] [Z] aux dépens.
La greffière,La première présidente,
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CAPP/JURITEXT000046013801.xml | AFFAIRE : No RG 20/02167 - No Portalis DBWB-V-B7E-FORZ
Code Aff. :
ARRÊT N CF
ORIGINE :JUGEMENT du Pole social du TJ de SAINT DENIS en date du 05 Novembre 2020, rg no 19/02057
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 31 MAI 2022
APPELANT :
Monsieur [B] [M]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Me Alexandre Alquier de la Selarl Alquier & associés, avocat au barreau de Saint-Denis-de-la-Réunion
La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion venant aux droits de la Caisse de sécurité sociale des travailleurs indépendants
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentant : Me Patrice Sandrin, avocat au barreau de Saint-Denis-de-la-Réunion
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2022 en audience publique, devant Christian Fabre, conseiller chargé d'instruire l'affaire, assisté de Delphine Grondin, greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 31 mai 2022;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président :Alain Lacour
Conseiller:Laurent Calbo
Conseiller :Christian Fabre
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mis à disposition des parties le 31 mai 2022
Exposé du litige :
Monsieur [B] [M] a interjeté appel dans le délai légal d'un jugement rendu le 05 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion, pôle social, dans une affaire l'opposant à la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Réunion (CGSSR).
Monsieur [M] a saisi le tribunal de grande instance de Saint-Denis de la Réunion, devenu tribunal judiciaire, en contestation d'une décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de la "Caisse RSI REUNION", désignant son adversaire étant la "Caisse de sécurité sociale des indépendants de la Réunion", afférente à une mise en demeure en date du 19 juin 2019 portant sur la somme de 36.483 euros. Le jugement déféré a notamment validé la mise en demeure et a condamné Monsieur [M] au paiement des sommes de 1.882 euros pour les cotisations, de 1.000 euros à titre d'amende civile et de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les conclusions notifiées le 28 février 2022 par Monsieur [M], les seules oralement soutenues à l'audience.
Vu les conclusions récapitulatives notifiées le 02 mars 2022 par la CGSSR oralement soutenues à l'audience.
Pour plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées ainsi qu'aux développements à suivre.
La recevabilité de l'appel n'est pas contestée, étant précisé que celle-ci résulte du montant visé par la mise en demeure.
Sur la saisine préjudicielle de la Cour de justice de l'Union européenne :
Selon l'article 267 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, le juge national saisi, s'il estime qu'une décision sur l'interprétation d'un traité ou des actes pris par les institutions de l'Union est nécessaire pour rendre son jugement, peut demander à la Cour de statuer sur cette question. Si le renvoi préjudiciel devant la CJUE est obligatoire lorsque la question est soulevée devant une juridiction dont la décision n'est pas susceptible d'un recours juridictionnel en droit interne, tel n'est pas le cas en l'espèce, le présent arrêt étant susceptible de pourvoi.
En outre, il sera relevé, d'une part, que selon l'article 2, d) de la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) no 2006/2004 du Parlement et du Conseil, on entend, aux fins de la directive, par « pratiques commerciales des entreprises vis-à-vis des consommateurs », « toute action, omission, conduite démarche ou communication commerciale, y compris la publicité et le marketing, de la part d'un professionnel, en relation avec la promotion, la vente ou la fourniture d'un produit aux consommateurs » ; d'autre part, que le recouvrement selon les règles d'ordre public du code de la sécurité sociale des cotisations et contributions dues par une personne assujettie à titre obligatoire à un régime de sécurité sociale ne revêt pas le caractère d'une pratique commerciale au sens des dispositions sus-rappelées et n'entre pas, dès lors dans le champ d'application de la directive.
En conséquence la demande sera rejetée et le jugement confirmé de ce chef.
Sur la demande de sursis à statuer :
Monsieur [M] demande qu'il soit sursis à statuer en l'attente de la décision à venir de la Commission européenne suite à une plainte pour abus de position dominante (pièce no 25) de l'association CSAPR et de Messieurs [F] et [L] dont il n'est pas justifié du dépôt. Cette plainte concerne feu le RSI et la CGSSR, régime social des indépendants, sur la base d'un postulat, par définition non démontré, d'une identité de nature entre les deux, étant précisé que la mise en demeure a été émise la Sécurité sociale pour les indépendants. Pour le reste, la cour adopte les motifs pertinents du jugement qui reprennent la démonstration de ce que les régimes obligatoires de sécurité sociale ne sont pas des entreprises au sens de la directive 2005/29/CE du 11 mai 2015.
La demande de sursis à statuer est en conséquence rejetée.
Sur la radiation du cotisant :
Monsieur [M] ne conteste pas avoir été radié le 27 juillet 2020 en qualité de travailleur indépendant avec une date d'effet au 31 décembre 2013 en raison de son affiliation à la Mutualité sociale agricole. Il n'en tire aucune conséquence juridique alors que ses contestations sont devenues sans objet suite à l'annulation par la CGSSR des sommes visées par la mise en demeure.
Le jugement est infirmé pour avoir validé la mise en demeure, condamné Monsieur [M] au paiement des sommes de 1.882 euros et 1.000 euros et la mise en demeure est annulée.
Sur les demandes de dommages-intérêts et l'amende civile :
Monsieur [M] soutient que la CGSSR est fautive, sans toutefois le démontrer. La demande est en conséquence rejetée.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Monsieur [M] a maintenu ses contestations et omis de faire état de sa radiation poursuivant de ce chef un litige devenu sans objet. Le jugement est alors confirmé sur les frais et dépens justement arbitrés. Ce même motif impose que les dépens d'appel soient à la charge de Monsieur [M], étant précisé que sa demande au titre des frais irrépétibles est irrecevable comme formulée à l'encontre du RSI qui n'a pas été appelé à la cause.
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement, contradictoirement,
Confirme le jugement sur le rejet de la question préjudicielle, du sursis à statuer, les frais et dépens
Infirme le jugement pour le reste,
Annule la mise en demeure,
Rejette les autres demandes,
Condamne Monsieur [B] [M] aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par M. Lacour, président, et par Mme Grondin, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière Le président
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R.G : No RG 21/03167 - No Portalis DBVH-V-B7F-IE5F
POLE SOCIAL DU TJ D'[Localité 4]
24 juin 2021
MAISON DEPARTEMENTALE DES PERSONNES HANDICAPEES
CAF AVIGNON VAUCLUSE
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 21 JUIN 2022
APPELANTE :
Madame [S] [X]
601, le Mistral
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Hafsa TARRIFOU, avocat au barreau d'AVIGNON
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/011021 du 08/12/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de [Localité 7])
INTIMÉES :
MAISON DEPARTEMENTALE DES PERSONNES HANDICAPEES
[Adresse 1]
[Adresse 5]
[Localité 4]
non comparante, non représentée
CAF AVIGNON VAUCLUSE
[Adresse 3]
[Localité 4]
non comparante, non représentée
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 945-1 du code de Procédure Civile, sans opposition des parties.
Elle en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
à l'audience publique du 05 Avril 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 14 Juin 2022 et prorogé ce jour ;
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 21 Juin 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :
Par décision du 19 février 2019, la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de Vaucluse a rejeté la demande d'allocation aux adultes handicapés déposée par Mme [S] [X] au motif que son taux d'incapacité est inférieur à 50%.
Mme [S] [X] a saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Marseille, suivant requête reçue le 23 avril 2019 en contestation de cette décision.
Suivant ordonnance du 13 mai 2019, le président du pôle social du tribunal de grande instance de Marseille, contentieux de la protection sociale, a déclaré cette juridiction territorialement incompétente, au profit du pôle social du tribunal de grande instance d'Avignon, contentieux de la protection sociale au motif que la requérante résidait dans le département de Vaucluse.
Suivant jugement du 24 juin 2021, le tribunal de grande instance d'Avignon, contentieux de la protection sociale, a :
-reçu le recours de Mme [S] [X],
- dit que le taux d'incapacité est inférieur à 50%,
- dit que Mme [S] [X] ne remplit pas les conditions d'attribution de l'allocation aux adultes handicapés et du complément de ressources,
- confirmé la décision du 13 mai 2019 prise par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées,
- dit que les frais résultant de la consultation confiée au docteur [M] seront pris en charge par la caisse nationale de l'assurance maladie,
- condamné Mme [S] [X] aux dépens de l'instance.
Suivant courrier envoyé le 24 juillet 2021, Mme [S] [X] a régulièrement interjeté appel de cette décision.
L'affaire a été appelée à l'audience du 04 janvier 2022 puis reportée à celle du 05 avril 2022 à laquelle elle a été retenue.
Suivant conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l'audience, Mme [S] [X] demande à la cour de :
- réformer le jugement rendu par le tribunal de grande instance d'Avignon, contentieux de la protection sociale, le 24 juin 2021,
- constater qu'elle remplit les conditions d'attribution de l'a1location aux adultes handicapés et du complément de ressources,
- infirmer la décision du 13 mai 2015 (sic) de la commission des droits et l'autonomie des personnes handicapées,
- lui accorder le bénéfice de l'allocation aux adultes handicapés à compter du dépôt de sa demande, soit le 5 juillet 2018,
- statuer ce que de droit quant aux dépens.
Elle fait valoir, au visa des articles L 821-2 et D 821-1 du code de la sécurité sociale, que le docteur [M] confirme qu'elle souffre d'une pathologie du membre inférieur droit et des deux épaules, que le médecin lui a conseillé de déposer un nouveau dossier compte tenu de l'aggravation de sa maladie, qu'elle remplit dès lors toutes 1es conditions pour bénéficier de l'allocation sollicitée, qu'elle justifie pâtir de problèmes de santé particulièrement importants et handicapants, que les nombreux certificats médicaux et notamment celui du docteur [U], justifient que son état de santé entraîne des douleurs sévères du genou droit qui l'empêchent de travailler et de rester debout au travail. Elle ajoute qu'elle n'a pas de qualification ni de formation spécifique et est employée en qualité d'agent de service, et que ses problèmes de santé sont incompatibles avec son activité professionnelle laquelle est très physique.
La [Adresse 6] ne comparaît pas ni est représentée à l'audience du 04 janvier 2022 bien que régulièrement convoquée conformément à l'article 937 du code de procédure civile, l'accusé de réception correspondant à la lettre de convocation supportant un tampon humide avec la mention "courrier arrivé le 25 NOV 2021 MDPH.84" ; la [Adresse 6] ne comparaît pas ni est représentée à l'audience du 05 avril 2022 bien qu'avisée du renvoi de l'affaire à cette audience.
La Caisse d'allocations familiales de Vaucluse ne comparaît pas ni est représentée à l'audience du 04 janvier 2022 bien que régulièrement convoquée conformément à l'article 937 du code de procédure civile, l'accusé de réception correspondant à la lettre de convocation supportant un tampon humide avec la mention "CAF de Vaucluse 25 NOV 2021 COURRIER" ; la Caisse d'allocations familiales ne comparaît pas ni est représentée à l'audience du 05 avril 2022 bien qu'avisée du renvoi de l'affaire à cette audience.
Selon l'article L114 du code de l'action sociale et des familles, constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant.
Selon l'article L821-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable, issu de la loi No2016-1917 du 29 décembre 2016, toute personne résidant sur le territoire métropolitain (...) ayant dépassé l'âge d'ouverture du droit à l'allocation prévue à l'article L. 541-1 et dont l'incapacité permanente est au moins égale à un pourcentage fixé par décret perçoit, dans les conditions prévues au présent titre, une allocation aux adultes handicapés. (...)
Le droit à l'allocation aux adultes handicapés est ouvert lorsque la personne ne peut prétendre, au titre d'un régime de sécurité sociale, d'un régime de pension de retraite ou d'une législation particulière, à un avantage de vieillesse, à l'exclusion de l'allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l'article L. 815-1, ou d'invalidité, à l'exclusion de la prestation complémentaire pour recours à constante d'une tierce personne visée à l'article L. 355-1, ou à une rente d'accident du travail, à l'exclusion de la prestation complémentaire pour recours à tierce personne mentionnée à l'article L. 434-2, d'un montant au moins égal à cette allocation.
Lorsque cet avantage ou le montant mensuel perçu au titre de l'allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l'article L. 815-1 est d'un montant inférieur à celui de l'allocation aux adultes handicapés, celle-ci s'ajoute à la prestation sans que le total des deux avantages puisse excéder le montant de l'allocation aux adultes handicapés.(...)
Lorsque l'allocation aux adultes handicapés est versée en complément de la rémunération garantie visée à l'article L. 243-4 du code de l'action sociale et des familles, le cumul de cet avantage avec la rémunération garantie mentionnée ci-dessus est limité à des montants fixés par décret qui varient notamment selon que le bénéficiaire est marié ou vit maritalement ou est lié par un pacte civil de solidarité et a une ou plusieurs personnes à charge. Ces montants varient en fonction du salaire minimum de croissance prévu à l'article L. 141-4 du code du travail.
Selon l'article D821-1 le taux d'incapacité permamente partielle exigé pour l'attribution de l'allocation aux adultes handicapés est d'au moins 80%.
L'article L821-2 du même code poursuite: l'allocation aux adultes handicapés est également versée à toute personne qui remplit l'ensemble des conditions suivantes :
1o Son incapacité permanente, sans atteindre le pourcentage fixé par le décret prévu au premier alinéa de l'article L. 821-1, est supérieure ou égale à un pourcentage fixé par décret ;
2o La commission mentionnée à l'article L. 146-9 du code de l'action sociale et des familles lui reconnaît, compte tenu de son handicap, une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi, précisée par décret.
Le versement de l'allocation aux adultes handicapés au titre du présent article prend fin à l'âge auquel le bénéficiaire est réputé inapte au travail dans les conditions prévues au cinquième alinéa de l'article L. 821-1.
Le taux visé au 1o ci-dessus est fixé à 50% par l'article D821-1.
L'article D821-1-2 du même code, dans sa rédaction applicable à la date de la demande, précise les critères d'appréciation de la restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi : pour l'application des dispositions du 2o de l'article L821-2, la restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi subie par une personne handicapée qui demande à bénéficier de l'allocation aux adultes handicapés est appréciée ainsi qu'il suit :
1o La restriction est substantielle lorsque le demandeur rencontre, du fait de son handicap même, des difficultés importantes d'accès à l'emploi. A cet effet, sont à prendre en considération:
a) Les déficiences à l'origine du handicap ;
b)Les limitations d'activités résultant directement de ces mêmes déficiences ;
c) Les contraintes liées aux traitements et prises en charge thérapeutiques induits par le handicap ;
d) Les troubles qui peuvent aggraver ces déficiences et ces limitations d'activités.
Pour apprécier si les difficultés importantes d'accès à l'emploi sont liées au handicap, elles sont comparées à la situation d'une personne sans handicap qui présente par ailleurs les mêmes caractéristiques en matière d'accès à l'emploi.
2o La restriction pour l'accès à l'emploi est dépourvue d'un caractère substantiel lorsqu'elle peut être surmontée par le demandeur au regard :
a) Soit des réponses apportées aux besoins de compensation mentionnés à l'article L.114-1-1 du code de l'action sociale et des familles qui permettent de faciliter l'accès à l'emploi sans constituer des charges disproportionnées pour la personne handicapée ;
b) Soit des réponses susceptibles d'être apportées aux besoins d'aménagement du poste de travail de la personne handicapée par tout employeur au titre des obligations d'emploi des handicapés sans constituer pour lui des charges disproportionnées ;
c) Soit des potentialités d'adaptation dans le cadre d'une situation de travail.
3o La restriction est durable dès lors qu'elle est d'une durée prévisible d'au moins un an à compter du dépôt de la demande d'allocation aux adultes handicapés, même si la situation médicale du demandeur n'est pas stabilisée. La restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi est reconnue pour une durée de un à cinq ans.
4o Pour l'application du présent article, l'emploi auquel la personne handicapée pourrait accéder s'entend d'une activité professionnelle lui conférant les avantages reconnus aux travailleurs par la législation du travail et de la sécurité sociale.
5o Sont compatibles avec la reconnaissance d'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi :
a) L'activité à caractère professionnel exercée en milieu protégé par un demandeur admis au bénéfice de la rémunération garantie mentionnée à l'article L243-4 du code de l'action sociale et des familles ;
b) L'activité professionnelle en milieu ordinaire de travail pour une durée de travail inférieure à un mi-temps, dès lors que cette limitation du temps de travail résulte exclusivement des effets du handicap du demandeur ;
c) Le suivi d'une formation professionnelle spécifique ou de droit commun, y compris rémunérée, résultant ou non d'une décision d'orientation prise par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées mentionnée à l'article L. 241-5 du code de l'action sociale et des familles.
Il ressort du guide barème qu'un taux de 50% correspond à des troubles importants entraînant une gêne notable dans la vie sociale de la personne. L'entrave peut, soit être concrètement repérée dans la vie de la personne, soit compensée afin que cette vie sociale soit préservée, mais au prix d'efforts importants ou de la mobilisation d'une compensation spécifique. Toutefois, l'autonomie est conservée pour les actes élémentaires de la vie quotidienne.
Un taux d'au moins 80 % correspond à des troubles graves entraînant une entrave majeure dans la vie quotidienne de la personne avec une atteinte de son autonomie individuelle. Cette autonomie individuelle est définie comme l'ensemble des actions que doit mettre en oeuvre une personne, vis-à-vis d'elle-même, dans la vie quotidienne. Dès lors qu'elle doit être aidée totalement ou partiellement, ou surveillée dans leur accomplissement, ou ne les assure qu'avec les plus grandes difficultés, le taux de 80 % est atteint. C'est également le cas lorsqu'il y a déficience sévère avec abolition d'une fonction.
Pour l'appréciation du caractère substantiel de la restriction de l'accès à l'emploi, doivent être prises en compte les déficiences à l'origine du handicap, les limitations d'activités en résultant directement, les contraintes liées au traitement et les troubles qui peuvent aggraver ces déficiences et ces limitations, le tout par comparaison à la situation d'une personne sans handicap qui présente, par ailleurs, les mêmes caractéristiques quant à l'accès à l'emploi; la restriction est dépourvue de caractère substantiel, lorsqu'elle peut être surmontée par le demandeur au regard de divers dispositifs d'accès à l'emploi, d'aménagement de poste.
L'emploi auquel peut prétendre le demandeur doit, pour l'application de ses dispositions, s'entendre d'une activité professionnelle qui lui confére les avantages reconnus aux travailleurs par la législation du travail et de la sécurité sociale ; la reconnaissance d'une restriction est compatible avec une activité professionnelle en milieu protégé, avec une activité professionnelle en milieu ordinaire pour une durée inférieure à un mi temps, ou avec une formation professionnelle.
En l'espèce, le médecin expert désigné par les premiers juges, le docteur [M], qui a procédé à la consultation médicale de Mme [S] [X] conclut dans son rapport à un taux d'incapacité inférieur à 50% , indique qu'à l'époque de la demande, Mme [S] [X] travaillait en contrat à durée indéterminée à temps plein, et retient une aggravation de sa pathologie, lui conseillant de déposer une nouvelle demande d'allocation, après avoir relevé des douleurs aux deux épaules, une boiterie avec port d'une canne à droite, une douleur au genou suite à une intervention du ligament croisé antérieur, un périmètre de marche de 300 mètres, une pathologie du membre inférieur droite, une atteinte des deux épaules , tout en précisant qu'à l'époque de la demande, la pathologie était moins invalidante.
A l'appui de ses prétentions, Mme [S] [X] produit aux débats :
- un certificat médical du docteur [C] [U] du 05 avril 2019 qui atteste que son état de santé "entraîne des douleurs sévères du genou droit qui l'empêchent de travailler et de rester debout au travail. Elle n'a pas de qualification et ne peut qu'exercer un travail physique, ce qui est incompatible avec son état de santé",
- un courrier du même médecin du 06 novembre 2020 dans lequel il indique que Mme [S] [X] a été reconnue travailleur handicapé, qu'elle souffre d'un diabète gestationnel, de périarthrite de l'épaule droite, d'une fissure anale, qu'elle a subi une plastie du LCA et une méniscectomie en 2016 et des stripping de varices, qu'elle se plaint depuis des années de l'épaule droite et du genou droit, qu'elle est volontaire pour travailler et qu'il faut l'aider à faire une formation adaptée à son handicap, qu'elle est plus à l'aise dans un travail debout, si il est fractionné,
- une attestation établie par le docteur [W], médecin du travail, qui liste les pathologies dont souffre Mme [S] [X] et qui indique que "cet état impacte sa capacité à assurer les diverses tâches de son poste de travail, l'aptitude sera à revoir à court terme. Pas de reclassement possible du fait de la structure de l'entreprise. Le niveau de formation fera obstacle à une reconversion professionnelle",
- des bulletins de salaire de mai à septembre 2021 qui établissent que Mme [S] [X] travaille comme agent de propreté,
- une attestation de paiement de la Caisse d'allocations familiales et sa déclaration de revenus 2021.
Les pièces que Mme [S] [X] produit aux débats confirment qu'elle souffre de nombreuses pathologies qui ont été prises en compte par le médecin consultant, et qui sont à l'origine d'une gêne notable dans la vie courante, mais celles-ci ne constituent pas, pour autant, des troubles graves qui ont pour conséquence une entrave majeure dans sa vie quotidienne une abolition d'une fonction, Mme [B] [L] ayant conservé son autonomie et ne justifiant pas, par ailleurs, être aidée totalement ou partiellement pour la réalisation de certains actes de la vie quotidienne.
Par ailleurs, il n'est pas sérieusement contesté que Mme [S] [X] travaillait au moment de sa demande d'allocation dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée, et il ressort des éléments qu'elle a communiqués, qu'en 2021, elle poursuivait son activité professionnelle, de sorte qu'elle ne justifie pas d'une restriction substantielle et durable à l'accès à l'emploi.
Les éléments que Mme [S] [X] a produits aux débats ne permettent donc pas de remettre en cause sérieusement les conclusions du docteur [M].
Il s'en déduit que Mme [S] [X] ne rapporte pas la preuve que son taux d'incapacité est supérieur à 50% et qu'elle connaît une restriction substantielle et durable à l'emploi, de sorte qu'elle ne remplit pas les conditions pour bénéficier de l'allocation aux adultes handicapés.
En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, en matière de sécurité sociale et en dernier ressort;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal de grande instance d'Avignon, contentieux de la protection sociale, le 24 juin 2021,
Déboute Mme [S] [X] de l'intégralité de ses prétentions,
Condamne Mme [S] [X] aux dépens de la procédure d'appel.
Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame OLLMANN, Greffière.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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CAPP/JURITEXT000046013793.xml | COUR D'APPEL d'AIX-EN-PROVENCE
[Adresse 3]
[Localité 2]
No RG 22/07257 - No Portalis DBVB-V-B7G-BJNT6
Chambre 1-9
Ordonnance no 2022/M141
S.C.I. MAGUI
Représentant : Me Michael ZERBIB de la SELARL CABINET MICHAEL ZERBIB & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE
Organisme SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE L'IMMEUBLE [Adresse 1]
ORDONNANCE D'IRRECEVABILITÉ DE L'APPEL
Nous, Evelyne THOMASSIN, Présidente, assistée de Nicolas FAVARD, greffier,
Vu la demande de timbre effectuée par le greffe le 20 Mai 2022
Vu le défaut de paiement la contribution prévue par l'article 1635 bis P du code général des impôts ;
Vu les articles 963 et 964 du code de procédure civile ;
Attendu qu'il convient en application des articles sus-visés de déclarer irrecevable l'appel interjeté le 18 Mai 2022 par S.C.I. MAGUI.
PAR CES MOTIFS
PRONONÇONS l'irrecevabilité de l'appel interjeté le 18 Mai 2022 par S.C.I. MAGUI contre la décision rendue le 28 Avril 2022 par Juge de l'exécution de MARSEILLE.
Fait à Aix-en-Provence, le 23 Juin 2022
LE GREFFIERLA PRÉSIDENTE
Copie adressée aux avocats ce jour par courriel
|
CAPP/JURITEXT000046013787.xml | Copies exécutoires délivrées aux parties le :
Copies certifiées conformes délivrées aux parties le :
République française
Au nom du Peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 9 - B
ARRET DU 23 Juin 2022
(no 117 , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S No RG 20/00156 - No Portalis 35L7-V-B7E-CB36B
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Mars 2020 par le tribunal judiciaire de PARIS RG no 11-19-007749
Monsieur [W] [P] (débiteur)
[Adresse 4]
[Localité 15]
non comparant
ENGIE CHEZ INTRUM JUSTITIA (511965027)
POLE SURENDETTEMENT
[Adresse 18]
[Localité 14]
non comparante
CRCAM DE PARIS ET D'ILE DE FRANCE (65034731750)
[Adresse 9]
[Adresse 19]
[Localité 15]
non comparante
BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ( 42503015509002)
Chez NEUILLY CONTENTIEUX
[Adresse 6]
[Localité 16]
non comparante
RIVP DIVISION SUD DE LA GERANCE (Trop perçu)
[Adresse 5]
[Localité 15]
non comparante
BNP PARIBAS CHEZ EFFICO SORECO (01168912/00889|N000599242)
Service Surendettement
[Adresse 7]
[Localité 12]
non comparante
SIP PARIS 3E et 4E (IR16-17)
[Adresse 3]
[Localité 15]
non comparante
SFR MOBILE CHEZ EOS CONTENTIA (8039140577)
[Adresse 1]
[Adresse 21]
[Localité 13]
non comparante
[Adresse 8]
[Localité 10]
non comparante
ESPACIL HABITAT (00000168291)
[Adresse 2]
[Adresse 20]
[Localité 11]
non comparante
DRFIP IDF ET PARIS (1714684315-FACT 6484785)
VILLE DEPARTEMENT
[Adresse 17]
[Localité 15]
non comparante
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Mai 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laurence ARBELLOT conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Christophe BACONNIER, président
Mme Laurence ARBELLOT, conseillère
Mme Fabienne TROUILLER, conseillère
Greffière : Mme Alexandra AUBERT, lors des débats
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Christophe BACONNIER, président et par Mme Alexandra AUBERT, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [W] [P] a saisi la commission de surendettement des particuliers de Paris qui a, le 10 janvier 2019, déclaré sa demande recevable.
Par une décision notifiée le 10 mai 2019, la commission a imposé une mesure de rééchelonnement du paiement des dettes pendant 53 mois au taux maximum de 0,86% sur la base d'une mensualité de remboursement de 346,29 euros.
M. [P] a contesté cette décision le 27 mai 2019 en considérant que les mesures étaient trop lourdes au regard de dettes familiales et personnelles.
Par jugement réputé contradictoire en date du 9 mars 2020, le tribunal judiciaire de Paris a déclaré recevable en son recours et l'a rejeté. Il a rappelé que M. [P] devra s'acquitter de ses dettes selon les modalités prévues par la commission.
La juridiction a principalement retenu que les ressources de M. [P] s'élevaient à 1 609 euros par mois et ses charges à 1 248,50 euros et que la situation de M. [P] avait été exactement évaluée.
Cette décision a été notifiée le 11 mars 2020 à M. [P].
Par déclaration adressée le 10 avril 2020 au greffe de la cour d'appel de Paris, M. [P] a interjeté appel du jugement en faisant valoir qu'il n'avait que 600 euros par mois pour vivre après déduction de ses charges et que sa situation financière s'était dégradée avec une enfant à charge.
Les parties ont été convoquées à l'audience du 17 mai 2022.
M. [P] a été régulièrement convoqué par courrier recommandé dont il a bien accusé réception. Il n'a ni comparu ni ne s'est fait représenter à l'audience, ni n'a fait connaître de motif à son absence.
Par courrier reçu au greffe le 24 mars 2022, la Direction régionale des finances publiques d'Île-de-France de Paris, s'excuse de ne pouvoir être présente et indique être créancière à hauteur de 299,06 euros.
Aucun créancier n'a comparu.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il convient d'indiquer à titre liminaire que l'appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile. La procédure applicable devant la cour d'appel est donc la procédure orale de droit commun dans laquelle la prise en considération des écrits d'une partie par la cour est subordonnée à l'indication orale à l'audience par cette partie ou son représentant qu'elle se réfère à ses écritures. Dès lors, la cour ne peut prendre en compte les demandes ou observations présentées par écrit par les parties non comparantes.
En l'espèce, bien que régulièrement convoqué à l'audience du 17 mai 2022, M. [P] n'a ni comparu ni ne s'est fait représenter et n'a invoqué aucun motif légitime pour justifier sa non-comparution. Du fait de celle-ci, la cour n'est saisie d'aucun moyen à l'appui de l'appel formé.
Le jugement dont appel conserve donc toute son efficacité.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt par défaut et en dernier ressort,
Constate que M. [W] [P] ne soutient pas son appel et que la cour n'est saisie d'aucune prétention,
Laisse les éventuels dépens à la charge de l'appelant,
Dit que le présent arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement et aux parties par lettre recommandée avec avis de réception.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT
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CAPP/JURITEXT000046013786.xml | COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
[Adresse 2]
[Localité 1]
Chambre 1-9
No RG 21/14652 - No Portalis DBVB-V-B7F-BIHQ7
Ordonnance no 2022/M137
M. [Z] [L]
Représentant : Me Patrick DEUDON de la SELARL PATRICK DEUDON AVOCAT, avocat au barreau de NICE
AppelantMme [G] [D] veuve [O],
Représentant : Me Bertrand DUHAMEL de la SCP DUHAMEL ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
ORDONNANCE DE DÉSISTEMENT
Nous, Evelyne THOMASSIN, Présidente, assistée de Nicolas FAVARD, greffier,
Vu les articles 384, 400 et suivants et 787 du code de procédure civile,
Vu le désistement d'appel de M. [Z] [L], appelant contre M. [G] [D] veuve [O], intimée
Attendu que le désistement est fait sans réserve ;
Attendu que l'intimée à l'égard duquel le désistement est fait a déclaré l'accepter ;
PAR CES MOTIFS
Constatons l'extinction de l'instance No RG 21/14652 - No Portalis DBVB-V-B7F-BIHQ7 et le dessaisissement de la cour.
Disons que chacune des parties conservera à sa charge les frais et dépens par elle engagés.
Fait à Aix-en-Provence, le 23 juin 2022
Le greffier,La Présidente,
copie délivrée ce jour aux avocats des parties
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CAPP/JURITEXT000046013792.xml | COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
[Adresse 2]
[Localité 1]
Chambre 1-9
No RG 22/04148 - No Portalis DBVB-V-B7G-BJCXN
Ordonnance no 2022/M138
Organisme CAISSE NATIONALE DE L'ASSURANCE MALADIE (CNAM)
Représentant : Me Karine TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
AppelanteDr [Y] [D]
Représentant : Me Philippe DUTERTRE de la SCP SCP D'AVOCATS BERLINER-DUTERTRE-LACROUTS, avocat au barreau de NICE
ORDONNANCE DE DÉSISTEMENT
Nous, Evelyne THOMASSIN, Présidente, assistée de Nicolas FAVARD, greffier,
Vu les articles 384, 400 et suivants et 787 du code de procédure civile,
Vu le désistement d'appel de la CAISSE NATIONALE DE L'ASSURANCE MALADIE (CNAM), appelante contre le Docteur [Y] [D], intimé
Attendu que le désistement est fait sans réserve ;
Attendu que l'intimé à l'égard duquel le désistement est fait a déclaré l'accepter ;
PAR CES MOTIFS
Constatons l'extinction de l'instance No RG 22/04148 - No Portalis DBVB-V-B7G-BJCXN et le dessaisissement de la cour.
Disons que chacune des parties conservera à sa charge les frais et dépens par elle engagés
Fait à Aix-en-Provence, le 23 juin 2022
Le greffier,La Présidente,
copie délivrée ce jour aux avocats des parties
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CAPP/JURITEXT000046013779.xml | COUR D'APPEL DE LYON
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE DU 20 Juin 2022
statuant en matière de soins psychiatriques
No RG 22/04433 - No Portalis DBVX-V-B7G-OLV2
Appel contre une décision rendue le 02 juin 2022 par le juge des libertés et de la détention de Lyon.
APPELANTE :
Mme [R] [C]
née le [Date naissance 1] 1984 à [Localité 5]
de nationalité française
actuellement hospitalisée au centre hospitalier de [6]
comparante, assistée de Maître Brice DANDOIS, avocat au barreau de Lyon, commis d'office
M. LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER [6]
[Adresse 2]
69008 [Localité 4]
non comparant, régulièrement convoqué, non représenté
Le dossier a été préalablement communiqué au Ministère Public qui a fait valoir ses observations écrites.
Nous, Stéphanie ROBIN, conseiller à la cour d'appel de Lyon, désignée par ordonnance de monsieur le premier président de la cour d'appel de Lyon du 15 décembre 2021 pour statuer à l'occasion des procédures ouvertes en application des articles L.3211-12 et suivants du code de la santé publique, statuant contradictoirement et en dernier ressort,
Assistée de Manon CHINCHOLE, greffier, pendant les débats tenus en audience publique,
Ordonnance prononcée le 20 juin 2022 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signée par Stéphanie ROBIN, conseiller, et par Manon CHINCHOLE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
**********************
Par décision du 25 mai 2022, le directeur de l'hôpital [6] a prononcé la transformation, d'une mesure de soins à la demande d'un tiers, sous forme de programme de soins, en hospitalisation complète conformément aux articles L 3211-11-1, L3212-1 et suivants du code de la santé publique, de :
Mme [C] [R], née le [Date naissance 3] 1984 à [Localité 4].
Par requête en date du 30 mai 2022, le directeur du centre hospitalier a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon, afin qu'il soit statué sur la poursuite de l'hospitalisation complète au-delà de 12 jours.
Par ordonnance rendue le 2 juin 2022, le juge des libertés et de la détention a autorisé le maintien en hospitalisation complète de Mme [C], sans son consentement, pour lui prodiguer des soins psychiatriques au-delà d'une durée de 12 jours.
Par courrier reçu au greffe de la cour d'appel le 15 juin 2022, Mme [C] a relevé appel de cette décision, en faisant valoir qu'elle avait toujours été suivie en consultation au CMP depuis un an, qu'elle était à l'initiative de l'hospitalisation pour reprendre son traitement, mais qu' elle souhaitait être en hospitalisation libre. Elle a évoqué également des impératifs personnels, tels que les rencontres avec son fils, et un déménagement.
La procureure générale a conclu à l'irrecevabilité de l'appel, celui-ci étant trop tardif.
Elle précise que la date du document scanné n'est pas lisible en l'état et que la demande a été transmise postérieurement au délai d'appel.
L'affaire a été évoquée lors de l'audience du 20 juin 2022.
À cette audience, Mme [C] a comparu en personne, assistée de son avocat.
Il lui a été donné connaissance à l'audience du certificat de situation établi par le docteur [L] le 17 juin 2022 et des conclusions de la procureure générale, son avocat ayant eu communication des documents préalablement.
Elle indique spontanément que l'appel a été formé le 10 juin et que son courrier est bien daté. Elle ajoute qu'un arrêt du traitement avait été convenu d'un commun accord avec son médecin, mais qu'elle ne s'est pas sentie bien ensuite. Elle ne se considère pas confuse et souhaite poursuivre des soins mais dans un cadre libre. Elle sollicite la main levée de la mesure d'hospitalisation sous la forme d'une hospitalisation complète.
Maître Dandois, conseil de Mme [C] a été entendu en ses explications. Il ne relève pas de difficultés procédurales. Il ajoute que la date de l'appel est en réalité lisible sur le document, soit le 10 juin 2022, de sorte que l'appel est recevable. Il sollicite la main levée de la mesure actuelle, aux motifs que le certificat médical de réintégration est peu détaillé et que Mme [C] adhère aux soins.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité de l'appel
En application de l'article R 3211-18 du code de la santé publique, l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention est susceptible d'appel dans un délai de dix jours à compter de la notification.
En l'espèce, il n'est pas contesté que l'ordonnance a été notifiée à Mme [C] le 2 juin 2022. En outre, le courrier d'appel de Mme [C] mentionne expressément la date du 10 juin 2022. En effet, même si le document scanné ne permettait pas de prime abord de voir cette date, elle est bien présente. En outre, l'enveloppe du courrier d'appel sollicitée avant l'audience, nous a été transmise en cours de délibéré et cette pièce a été communiquée à l'ensemble des parties. Il apparaît que le courrier d'appel a été envoyé le 10 juin 2022 et donc dans les délais légaux.
Compte tenu de ces éléments, il convient de déclarer l'appel de Mme [C] recevable.
Sur la demande de main-levée de la mesure de soins psychiatriques
Il appartient au juge judiciaire, selon les dispositions de l'article L 3211-3 du code de la santé publique, de s'assurer que les restrictions à l'exercice des libertés individuelles du patient sont adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en oeuvre du traitement requis.
Mme [C], suivie dans le cadre d'un programme de soins à [U], a sollicité son hospitalisation, compte tenu de la dégradation de son état. Le certificat médical du Docteur [U] en date du 25 mai, mentionne effectivement que son état clinique nécessite une réintégration à temps complet, ce qui est suffisant, le suivi antérieur de la patiente étant régulier et son état s'étant manifestement détérioré. Il est ensuite observé dans le certificat médical du 30 mai, un débordement psychique, avec une labilité thymique et une anxiété manifeste au premier plan. Mme [C] avait en outre arrêté son traitement. Le médecin note qu'une période d'hospitalisation complète s'impose, pour réintroduire son traitement nécessaire, et qu'elle a interrompu.
En outre, les certificats mensuels antérieurs mettaient en évidence un risque de stress lié à son déménagement. Elle se montrait néanmoins régulière dans le cadre des entretiens.
Le certificat médical avant l'audience de ce jour, du docteur [L], daté du 17 juin 2022 évoque une patiente réhospitalisée pour recrudescence anxieuse, dans un contexte de rupture de soins. Il est relaté une désorganisation psychique, avec la présence d'éléments psychotiques. Des antécédents similaires sont observés et une rationalisation des troubles, ainsi qu'une ambivalence à l'hospitalisation, la patiente n'étant pas en état de consentir aux soins. L'hospitalisation sous contrainte sous la forme d'une hospitalisation complète est décrite comme nécessaire, pour réintroduire le traitement médicamenteux sous surveillance rapprochée.
De plus, si Mme [C] invoque à l'audience un arrêt de son traitement en concertation avec les médecins, cela ne correspond aucunement aux éléments de la procédure, et elle a manifestement mal interprété les propos tenus par les professionnels. Les différents certificats, y compris le plus récent, notent encore une ambivalence aux soins et une surveillance rapprochée toujours nécessaire, justifiant le maintien d'une hospitalisation complète.
La demande de main levée est en conséquence à ce jour prématurée.
Il résulte de ces différentes considérations que le maintien de Mme [C] dans le dispositif d'hospitalisation psychiatrique sans consentement, sous la forme d'une hospitalisation complète, est justifié, cette mesure s'avérant en outre proportionnée à son état mental au sens de l'article L 3211-3 du code de la santé publique.
Il convient en conséquence de confirmer la décision du juge des libertés et de la détention.
PAR CES MOTIFS
Déclarons l'appel recevable ;
Confirmons l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;
Laissons les dépens d'appel à la charge du Trésor Public.
Le greffier, Le conseiller délégué,
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CAPP/JURITEXT000046013784.xml |
R.G : No RG 19/04572 - No Portalis DBVH-V-B7D-HSIY
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'AVIGNON
08 juillet 2019
RG:16/00230
CPAM DE VAUCLUSE
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 21 JUIN 2022
APPELANT :
Monsieur [J] [D]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par Me Laure MATTLER, avocat au barreau de NIMES
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/10751 du 20/11/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)
CPAM DE VAUCLUSE
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par M. [K] en vertu d'un pouvoir général
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 945-1 du code de Procédure Civile, sans opposition des parties.
Elle en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
à l'audience publique du 12 Avril 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 21 Juin 2022
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 21 Juin 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 11 décembre 2015, le directeur de la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse a notifié à M. [J] [D] une pénalité financière de 3.031 euros suite à un indu de prestations financières d'une valeur de 22.769,02 euros résultant du versement d'indemnités journalières depuis le 3 janvier 2011.
M. [J] [D] a saisi, par requête du 11 février 2016, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Vaucluse d'un recours contre cette décision, recours enregistré sous le RG 21600230.
Par jugement du 25 janvier 2018, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Vaucluse a sursis à statuer sur ce recours " dans l'attente de la décision de la Commission de Recours Amiable de la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse à intervenir, ainsi que de l'étude des autres recours de M. [J] [D]".
Le 28 septembre 2017, la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse a mis M. [J] [D] en demeure de lui régler la somme de 22.769,02 euros correspondant à un trop-perçu d'indemnités journalières pour la période du 2 janvier 2011 au 10 janvier 2013. Le 3 octobre 2017, elle l'a mis en demeure de lui régler la somme de 3.031 euros de pénalité financière.
M. [J] [D] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Vaucluse d'un recours contre ces mises en demeure, ce recours a été enregistré sous le RG 21701359.
Dans sa séance du 28 juin 2018, la Commission de Recours Amiable de la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse, saisie par M. [J] [D], a maintenu le montant du trop-perçu d'indemnités journalières de 22.769,02 euros pour la période du 2 janvier 2011 au 10 janvier 2013.
M. [J] [D] a contesté cette décision en saisissant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Vaucluse, recours enregistré sous le RG 21801215.
Par jugement du 8 juillet 2019, le tribunal de grande instance d'Avignon, Contentieux de la protection sociale, a:
- ordonné la jonction des recours 16/00230, 17/01359 et 18/01215,
- débouté M. [J] [D] de l'intégralité de ses demandes,
- validé la décision de la Commission de Recours Amiable de la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse en date du 28 juin 2018 maintenant la dette de 22.769,02 euros, les mises en demeure en date du 3 octobre 2017 et 28 septembre 2017 et la décision du directeur de la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse en date du 11 décembre 2015,
- condamné M. [J] [D] au paiement des entiers dépens de l'instance.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée le 29 novembre 2019, M. [J] [D] a régulièrement interjeté appel de cette décision qui lui a été signifiée le 5 novembre 2019. Enregistrée sous le numéro RG 19/4572, l'examen de cette affaire a été appelé à l'audience du 14 décembre 2021 et renvoyé à la demande des parties à celle du 12 avril 2022. A cette date l'affaire a été mise en délibéré et les parties ont été autorisées à produire une note en délibéré.
Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, et de sa note en délibéré reçue au greffe de la chambre sociale le 17 mai 2022, M. [J] [D] demande à la cour de:
- rejeter toutes demandes, fins ou conclusions contraires,
- accueillir son appel, le déclarer recevable et bien-fondé,
- au principal constater la prescription de l'action en recouvrement d'indu d'indemnités journalières et de la pénalité allégués par la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse,
- en conséquence, infirmer le jugement rendu le 8 juillet 2019 par le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Avignon ( sic ), annuler la décision de la Commission de Recours Amiable de la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse du 28 juin 2018, les mises en demeure de la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse des 28 septembre 2017 et 3 octobre 2017, et la décision du directeur de la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse en date du 11 décembre 2015,
- subsidiairement, l'action de la caisse étant mal fondée, infirmer le jugement rendu le 8 juillet 2019 par le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Avignon, annuler la décision de la Commission de Recours Amiable de la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse du 28 juin 2018, les mises en demeure de la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse des 28 septembre 2017 et 3 octobre 2017, et la décision du directeur de la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse en date du 11 décembre 2015,
- condamner la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Au soutien de ses demandes, M. [J] [D] soulève in limine litis la prescription de l'action de la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse, faisant observer que celle-ci ne justifie pas du paiement des indemnités journalières afférentes à une période qui se serait achevée le 10 janvier 2013. Il observe que la mise en demeure datée du 28 septembre 2017 est intervenue largement au-delà du délai de prescription de deux années, et conteste l'existence d'une fraude qui permettrait l'application du délai de prescription quinquennal.
Concernant le recouvrement de la pénalité financière qui aurait été notifiée par courrier du 11 décembre 2015 , M. [J] [D] considère au visa de l'article L 114-17 du code de la sécurité sociale que l'action en recouvrement se prescrivant par deux ans, celle-ci est également prescrite.
M. [J] [D] soutient qu'il n'a reçu que la mise en demeure du 28 septembre 2017 et demande à la cour de vérifier qu'elle répond aux exigences de forme de l'article R 133-9-1 du code de la sécurité sociale.
Enfin, il considère que la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse ne démontre pas la réalité du trop-perçu dont elle se prévaut et reproche aux premiers juges d'avoir statué sans respecter le principe du contradictoire, simplement en confirmant les actes de la Caisse Primaire d'assurance maladie et en ne vérifiant pas la réalité du caractère contradictoire des affirmations de l'organisme social.
Il considère par ailleurs que le défaut de motivation de la décision des premiers juges qui n'ont fait que sanctionner son absence aux débats, ne permet pas de connaître le fondement de leur décision, ce qui est contraire au principe du droit au procès équitable reconnu par la cour européenne des droits de l'Homme. Il explique son absence par le fait qu'il était en droit de ne pas faire le choix d'une représentation par avocat et qu'il n'a pas pu être présent lors de l'audience en raison "d'un incident de dernière minute".
Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, et de sa note en délibéré reçue au greffe de la chambre sociale le 12 mai 20222, la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse demande à la cour de :
A titre principal,
- constater que les demandes formulées par M. [J] [D] sont nouvelles,
- déclarer les prétentions de M. [J] [D] irrecevables,
A titre subsidiaire,
- rejeter l'ensemble des demandes formulées par M. [J] [D],
- condamner M. [J] [D] à lui payer l'indu de 22.769,02 euros,
- condamner M. [J] [D] à lui payer une pénalité financière de 3.031,00 euros,
- condamner M. [J] [D] à lui payer la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
En tout état de cause,
- confirmer le jugement rendu le 8 juillet 2019 par le tribunal de grande instance d'Avignon - Pôle social,
- condamner M. [J] [D] aux entiers dépens.
Au soutien de ses demandes, la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse, au visa des articles 561, 562 et 564 du code de procédure civile, considère que M. [J] [D] ne s'étant pas présenté devant les premiers juges et n'ayant présenté aucun moyen au soutien de son recours, ainsi que mentionné dans la décision déférée, les demandes qu'il présente devant la cour sont de fait nouvelles et donc irrecevables.
A titre subsidiaire, sur le fond, elle rappelle que ses investigations ont permis de démontrer que M. [J] [D] avait produit au soutien de sa demande d'indemnités journalières de faux justificatifs de travail, et que dans le cadre de cette fraude avérée l'action en recouvrement de l'indu se prescrit par 5 ans.
Au visa des articles L 162-1-14 et suivants, R 147-6 et suivants du code de la sécurité sociale dans leur version applicable au litige, la Caisse Primaire d'assurance maladie considère que la mise en oeuvre de la procédure de pénalités financières est fondée eu égard à l'ensemble des manquements révélés par ses investigations.
Enfin, elle considère que la mise en demeure répond aux exigences de l'article R 133-9-1 du code de la sécurité sociale et n'est entachée d'aucune nullité.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.
* sur la recevabilité des demandes présentées par M. [J] [D]
Par application des dispositions des articles 561 à 566 du code de procédure civile, les prétentions nouvelles devant la cour d'appel sont à examiner au regard de la demande qui a été formée en première instance et sur laquelle le premier juge a statué.
L'article 564 du code de procédure civile prohibe en principe les demandes nouvelles en cause d'appel, il est néanmoins admis certaines exceptions à cette règle, notamment lorsque, selon les termes de l'article 565 du même code, les demandes présentées pour la première fois en appel "tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent."
Les exceptions au principe de l'irrecevabilité des demandes nouvelles en appel doivent être interprétées restrictivement dès lors qu'elles portent atteinte au principe du double degré de juridiction.
Par "fin" d'une demande ou d'une prétention au sens de l'article 565 précité, il faut entendre le but poursuivi ou le résultat recherché par l'auteur de cette demande ou de cette prétention. Ce but ou ce résultat diffère de l'objet de la demande avec lequel il est cependant en étroite relation. Alors, en effet que l'objet est constitué par la prétention elle-même, la notion de fin de la demande introduit un élément supplémentaire qui permet, précisément, d'assurer la réalisation de cette fin. Dans ces conditions, une prétention tend aux mêmes fins qu'une prétention précédente lorsqu'elle est assortie d'une allégation qui, bien que différente de celle dont était assortie la première, doit cependant permettre la reconnaissance de cette prétention, sans en déformer la nature.
La cour d'appel est tenue d'examiner au regard de chacune des exceptions prévues aux textes susvisés si la demande est nouvelle. Il résulte de l'article 566 du code de procédure civile que les parties ne peuvent soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions, sauf à ce que celles-ci soient l'accessoire, la conséquence ou le complément de celles soumises au premier juge.
En l'espèce, les trois recours qui ont été joints par la décision querellée ont tous le même objet, soit la contestation par M. [J] [D] de la réclamation par la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse d'un trop-perçu de 22.769,02 euros et d'une pénalité financière subséquente de 3.031 euros.
Cette contestation constitue la prétention de M. [J] [D], soit en l'espèce la contestation de l'indu et de la pénalité financière
Par son absence devant les premiers juges, ceux-ci ont justement considéré qu'aucun moyen n'était présenté au soutien du recours, c'est-à-dire au soutien des prétentions de M. [J] [D].
En cause d'appel, M. [J] [D] peut présenter, dans les limites précédemment rappelées, des moyens nouveaux au soutien de ses prétentions, ce qui est le cas en l'espèce, les moyens présentés sont nouveaux, mais tendent à la même fin que le recours initial, soit la suppression de l'indu et de la pénalité financière.
Par conséquent, les demandes présentées par M. [J] [D] sont recevables.
* sur la violation du principe du contradictoire par les premiers juges
La procédure devant les juridictions sociales étant orales, les parties peuvent faire connaître leurs arguments jusqu'aux débats lors de l'audience de fond.
Le fait que M. [J] [D] ne se soit pas présenté lors de cette audience et n'ait pas sollicité de dispense de comparution, ni de report de l'audience comme il avait pu le faire précédemment, ne signifie pas pour autant que la juridiction ne pouvait pas statuer au fond, en se référant aux éléments qui lui étaient régulièrement soumis par la seule partie présente, soit la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse.
La seule restriction visée par l'article 16 du code de procédure civile concerne les moyens de droit que le juge relèverait d'office sans les soumettre aux parties, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
Dès lors aucune violation du principe du contradictoire n'est démontrée.
* sur la prescription de l'action en recouvrement
Au terme de l'article L 332-1 du code de la sécurité sociale, l'action de l'assuré ( et des ayants droit mentionnés à l'article L. 161-14-1 dans la version applicable de cet article jusqu'au 31 décembre 2015 )pour le paiement des prestations de l'assurance maladie se prescrit par deux ans, à compter du premier jour du trimestre suivant celui auquel se rapportent lesdites prestations ; pour le paiement des prestations de l'assurance maternité, elle se prescrit par deux ans à partir de la date de la première constatation médicale de la grossesse.
L'action des ayants droit de l'assuré pour le paiement du capital prévu à l'article L. 361-1 se prescrit par deux ans à partir du jour du décès.
Cette prescription est également applicable, à compter du paiement des prestations entre les mains du bénéficiaire, à l'action intentée par un organisme payeur en recouvrement des prestations indûment payées, sauf en cas de fraude ou fausse déclaration.
En cas de fraude ou de fausse déclaration, il convient en conséquence d'appliquer la prescription de droit commun, soit la prescription quinquennale.
En l'espèce, la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse fonde sa demande au titre du trop-perçu d'indemnités journalières sur un rapport d'investigation établi par son service "Maîtrise du risque" qui conclut à l'existence d'une fraude de la part de M. [J] [D] au soutien de ses demandes de paiement d'indemnités journalières, lequel aurait déclaré une activité fictive auprès des employeurs "Cannes Contentieux" et "Nice Armatures" dans la mesure où, notamment, ces sociétés ont cessé toute activité depuis plusieurs années, aucun versement de salaire n'apparaît sur les relevés bancaires qui ont pu être consultés par l'agent assermenté, et le relevé de carrière de M. [J] [D] ne mentionne pas d'activité postérieurement à 2007 pour 2.675 euros et 2010 pour 110 euros, en intérim dans les deux cas.
Contrairement à ce que soutient M. [J] [D], l'absence de dépôt de plainte pénale ne fait pas disparaître le caractère frauduleux établi par ce rapport, rédigé par un agent assermenté de l'organisme social, lequel fait foi jusqu'à preuve du contraire.
Au surplus, M. [J] [D] ne produit aucun élément pour démontrer que ce rapport contiendrait des éléments erronés, se contentant d'affirmer que la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse ne démontre pas qu'il aurait eu connaissance du caractère frauduleux des documents produits, sans pour autant rapporter la preuve par exemple du paiement des salaires correspondants.
En conséquence, l'action en recouvrement du trop-perçu d'indemnités journalières doit être soumis à la prescription de droit commun.
Le point de départ du délai de prescription est le premier jour du trimestre suivant celui auquel se rapportent lesdites prestations. Les indemnités journalières visées par l'indu ont été versées à compter du 3 janvier 2011, le délai de prescription a donc débuté, pour la première indemnité journalière versée, le 1er avril 2011 et est arrivé à échéance le 1er avril 2016, sauf acte interruptif de prescription.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 30 septembre 2015, la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse a notifié à M. [J] [D] l'indu de 22.769,02 euros. Le courrier a été retourné avec la mention " pli avisé non réclamé". Dès lors que la demande de paiement a été régulièrement adressée au débiteur, même si celui-ci n'a pas retiré le courrier, elle vient interrompre la prescription, et un nouveau délai de 5 ans a alors débuté.
La mise en demeure adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 28 septembre 2017 et dont l'accusé réception porte une signature est également interruptive de prescription et a déclenché à compter de son envoi un nouveau délai de 5 ans.
Si M. [J] [D] soutient dans ses écritures qu'il n'a pas été destinataire de cette mise en demeure, force est de constater que d'une part il l'a contestée devant la Commission de Recours Amiable de la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse qui a rendu sa décision le 28 juin 2018 et d'autre part devant le tribunal des affaires de sécurité sociale qu'il a saisi par requête en date du 28 novembre 2017.
Par ailleurs, M. [J] [D] considère que la Caisse Primaire d'assurance maladie doit démontrer qu'elle s'est conformée, s'agissant de la régularité de la mise en demeure, aux dispositions de l'article R 133-9-1 du code de la sécurité sociale mais ne dit pas en quoi consisteraient les manquements de l'organisme social. Dès lors, en l'absence d'argument au soutien de cette contestation, M. [J] [D] sera débouté de sa demande.
Ainsi, contrairement à ce que soutient M. [J] [D], l'action en recouvrement de la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse n'est entachée d'aucune prescription et d'aucune irrégularité.
Concernant l'action en recouvrement de la pénalité financière, celle-ci se prescrit, conformément aux dispositions de l'article L 144-7 du code de la sécurité sociale par deux ans à compter de la date d'envoi de la notification de la pénalité par le directeur de l'organisme concerné.
Si dans ses écritures M. [J] [D] soutient qu'il semblerait qu'une pénalité financière lui aurait été appliquée par courrier du 11 décembre 2015, force est de constater qu'il a effectivement reçu le courrier concerné puisque non seulement l'accusé réception de notification de la décision porte une signature en date du 22 décembre 2015, mais aussi que sa saisine du tribunal des affaires de sécurité sociale de Vaucluse le 11 février 2016 est fondée sur la contestation de cette notification.
La mise en demeure en date du 3 octobre 2017, notifiée par lettre recommandée avec avis de réception dont l'accusé réception porte une signature en date du 11 octobre 2017, est intervenue avant l'échéance du délai de prescription de deux ans ayant débuté avec la notification de la pénalité financière, et l'action en recouvrement est en conséquence entachée d'aucune prescription.
* sur le fond
L'article R 313-3 du même code précise que :
1o Pour avoir droit aux indemnités journalières de l'assurance maladie pendant les six premiers mois d'interruption de travail, aux allocations journalières de maternité et aux indemnités journalières de l'assurance maternité, l'assuré social doit justifier aux dates de référence prévues aux 2o et 3o de l'article R. 313-1 :
a) Soit que le montant des cotisations dues au titre des assurances maladie, maternité, invalidité et décès assises sur les rémunérations qu'il a perçues pendant les six mois civils précédents est au moins égale au montant des mêmes cotisations dues pour un salaire égal à 1 015 fois la valeur du salaire minimum de croissance au premier jour de la période de référence ;
b) Soit avoir effectué au moins 150 heures de travail salarié ou assimilé au cours des trois mois civils ou des quatre-vingt-dix jours précédents.
L'assuré doit en outre justifier de dix mois d'immatriculation à la date présumée de l'accouchement pour bénéficier des indemnités journalières de l'assurance maternité.
2o Lorsque l'arrêt de travail se prolonge sans interruption au-delà du sixième mois, l'assuré social, pour avoir droit aux indemnités journalières après le sixième mois d'incapacité de travail, doit avoir été immatriculé depuis douze mois au moins à la date de référence prévue au 2o de l'article R. 313-1. Il doit justifier en outre :
a) Soit que le montant des cotisations dues au titre des assurances maladie, maternité, invalidité et décès assises sur les rémunérations qu'il a perçues pendant les douze mois civils précédant l'interruption de travail est au moins égal au montant des mêmes cotisations dues pour un salaire égal à 2 030 fois la valeur du salaire minimum de croissance au 1er janvier qui précède immédiatement le début de cette période ;
b) Soit qu'il a effectué au moins 600 heures de travail salarié ou assimilé au cours des douze mois civils ou des 365 jours précédant l'interruption de travail.
En l'espèce, l'indu d'indemnités journalières visés par la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse concerne des prestations servies à compter du 3 janvier 2011.
Aux éléments précis et circonstanciés recueillis par l'agent assermenté de la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse pour établir l'indu de prestations en espèce mis en recouvrement à l'encontre de M. [J] [D], tels que rappelés précédemment, l'appelant n'oppose aucun fait précis et ne produit que des bulletins de salaire pour la période du 1er juin 1995 au 2 février 1996, en qualité de juriste d'entreprise, soit pour une période antérieure de plusieurs années à celle prise en compte pour le calcul des droits à indemnités journalières.
Dès lors, la décision des premiers juges qui a confirmé le montant du trop-perçu d'indemnités journalières pour la période du 3 janvier 2011 au 10 janvier 2013 sera confirmée.
S'agissant de la pénalité, M. [J] [D] considère que la Caisse Primaire d'assurance maladie doit démontrer qu'elle s'est conformée aux dispositions de l'article L114-17-1 du code de la sécurité sociale mais ne dit pas en quoi consisterait les manquements de l'organisme social. Dès lors, en l'absence d'argument au soutien de cette contestation, la pénalité sera confirmée et la décision des premiers juges ayant statué en ce sens confirmée également.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, en matière de sécurité sociale, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
Dit que les demandes présentées par M. [J] [D] sont recevables,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 8 juillet 2019 par le tribunal de grande instance d'Avignon, Contentieux de la protection sociale,
Condamne M. [J] [D] à verser à la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse la somme de 800 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Condamne M. [J] [D] aux dépens de la procédure d'appel.
Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame OLLMANN, Greffière.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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[Adresse 2]
[Localité 1]
No RG 22/05983 - No Portalis DBVB-V-B7G-BJI7F
Chambre 1-9
Ordonnance no 2022/M139
M. [Z] [S]
Représentant : Me Sandrine VENZONI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
M. [R] [E]
S.A. CEPAC
ORDONNANCE D'IRRECEVABILITÉ DE L'APPEL
Nous, Evelyne THOMASSIN, Présidente, assistée de Nicolas FAVARD, greffier,
Vu les demandes de timbre effectuées par le greffe le 27 Avril 2022 et le 3 Juin 2022,
Vu le défaut de paiement la contribution prévue par l'article 1635 bis P du code général des impôts ;
Vu les articles 963 et 964 du code de procédure civile ;
Attendu qu'il convient en application des articles sus-visés de déclarer irrecevable l'appel interjeté le 23 Avril 2022 par M. [Z] [S],
PAR CES MOTIFS
PRONONÇONS l'irrecevabilité de l'appel interjeté le 23 Avril 2022 par M. [Z] [S], contre la décision rendue le 15 Mars 2022 par Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE.
Fait à Aix-en-Provence, le 23 Juin 2022
LE GREFFIERLA PRÉSIDENTE
Copie adressée aux avocats ce jour par courriel
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CAPP/JURITEXT000046013791.xml | COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
[Adresse 2]
[Localité 1]
Chambre 1-9
No RG 21/15175 - No Portalis DBVB-V-B7F-BIJQG
Ordonnance no 2022/M136
M. [H] [W]
Représentant : Me Jean christophe STRATIGEAS de la SELARL CADJI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
AppelantMme Françoise FOLACCI
Représentant : Me Stéphanie LEANDRI-CAMPANA, avocat au barreau de MARSEILLE
ORDONNANCE DE DÉSISTEMENT
Nous, Evelyne THOMASSIN, Présidente, assistée de Nicolas FAVARD, greffier,
Vu les articles 384, 400 et suivants et 787 du code de procédure civile,
Vu le désistement d'appel de M. [H] [W], appelant contre Mme [E] [J], intimée
Attendu que le désistement est fait sans réserve ;
Attendu que l'intimée à l'égard duquel le désistement est fait a déclaré l'accepter ;
PAR CES MOTIFS
Constatons l'extinction de l'instance No RG 21/15175 - No Portalis DBVB-V-B7F-BIJQG et le dessaisissement de la cour.
Disons que chacune des parties conservera à sa charge les frais et dépens par elle engagés
Fait à Aix-en-Provence, le 23 juin 2022
Le greffier,La Présidente,
copie délivrée ce jour aux avocats des parties
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CAPP/JURITEXT000046013785.xml | COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
2ème CHAMBRE CIVILE
ARRET No 394 DU 20 JUIN 2022
No RG 21/00700
No Portalis DBV7-V-B7F-DKUM
Décision déférée à la cour : Jugement du Juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre, décision attaquée en date du 07 Juin 2021, enregistrée sous le no 21/00334.
APPELANT :
Monsieur [E], [B] [O]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté par Me Jacques Witvoet de la SCP Morton & Associés, avocat au barreau de Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélémy.
Madame [Y] [O] épouse [X]
[Adresse 4]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Youri Cohen, avocat au barreau de Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélémy.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 799 alinéa 3 du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état, a autorisé les avocats à déposer leur dossier au greffe de la chambre civile jusqu'au 25 avril 2022.
Par avis du 25 avril 2022 le président a informé les parties que l'affaire était mise en délibéré devant la chambre civile de la cour composé de :
Mme Corinne Desjardins, Présidente de chambre,
Mme Annabelle Clédat, conseillère,
Mme Christine Defoy, conseillère,
qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisés à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 20 juin 2022.
GREFFIER en charge du dossier après dépôts et lors du délibéré : Mme Armélida Rayapin
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été prélablement avisés conformément à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
Signé par Mme Corinne Desjardins, Présidente de chambre et par Mme Armélida Rayapin, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
Par arrêt en date du 12 novembre 2019, la cour d'appel de Basse-Terre a :
-condamné Mme [Y] [O] à procéder à la démolition du cabanon empêchant l'accès au chemin figurant sur la parcelle indivise cadastrée AE [Cadastre 2], lieudit [Adresse 4] [Localité 3], débouchant sur la voie publique dans un délai de trois mois à compter de la signification de l'arrêt,
-dit que passé ce délai, Mme [Y] [O] sera condamnée à y procéder sous astreinte de 50 euros par jour de retard pendant une durée de deux mois au terme de laquelle il sera à nouveau statué.
L'arrêt a été signifié à Mme [Y] [O] le 10 décembre 2019.
Suivant exploit d'huissier en date du 11 mars 2021, M. [E] [O] a fait assigner Mme [Y], [Z] [O], épouse [X] devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre aux fins de :
-liquider à 3000 euros le montant de l'astreinte provisoire prononcée par la cour d'appel de Basse-Terre par arrêt du 12 novembre 2019 régulièrement signifié le 10 décembre 2019,
-condamner Mme [Y] [O], épouse [X] au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l'astreinte provisoire,
-assortir d'une astreinte de 100 euros par jour de retard l'obligation faite à Mme [Y] [O], épouse [X], par arrêt de la cour d'appel de Basse-Terre du 12 novembre 2019, d'avoir à procéder à la démolition du cabanon empêchant l'accès au chemin figurant sur la parcelle indivise cadastrée AE no[Cadastre 2], lieudit [Adresse 4] [Localité 3] débouchant sur la voie publique avec le concours de la force publique,
-condamner Mme [Y] [O], épouse [X] à lui payer la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.
Suivant jugement du 7 juin 2021, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre a :
-liquidé l'astreinte assortissant l'obligation mise à la charge de Mme [Y] [O] par l'arrêt de la cour d'appel de Basse-Terre du 12 novembre 2019 à la somme de 3000 euros pour la période ayant couru du 11 au 12 mars 2020, puis du 24 juin au 22 août 2020,
-condamné par suite Mme [Y] [O] épouse [X] à payer à M. [E] [O] la somme de 3000 euros au titre de l'astreinte liquidée,
-débouté M. [E] [O] de ses demandes d'astreinte définitive et d'autorisation de la démolition du cabanon à ses frais avancés avec le concours de la force publique,
-débouté pour le surplus des demandes,
-mis les dépens à la charge de Mme [Y] [O], épouse [X],
-condamné Mme [Y] [O], épouse [X], à payer à M. [E] [O] la somme de 800 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 25 juin 2021, M. [E] [O] a interjeté appel de la décision précitée en ce qu'elle l'a débouté de ses demandes d'astreinte définitive et de sa demande d'être autorisé à procéder à la démolition du cabanon à ses frais avancés avec le concours de la force publique et en ce qu'elle l'a débouté du surplus de ses demandes. La procédure a été enregistrée sous le numéro 21/00700.
Faisant suite à l'avis du greffe en date du 8 septembre 2021, M. [E] [O] a fait signifier le 13 septembre 2021 sa déclaration d'appel à l'intimée non constituée, en application des articles 905 et suivants du code de procédure civile, la procédure ayant fait l'objet d'une orientation à bref délai.
Le 16 septembre 2021, Mme [Y] [O], épouse [X], a régularisé sa constitution d'intimée par la voie électronique.
Par ailleurs, le 25 juin 2021, Mme [Y] [O], épouse [X], a interjeté appel du même jugement en ce qu'il a liquidé l'astreinte assortissant l'obligation mise à la charge de Mme [Y] [O] par l'arrêt de la cour d'appel de Basse-Terre du 12 novembre 2019 à la somme de 3000 euros pour la période allant du 11 au 12 mars 2020, puis du 24 juin au 22 août 2020, en ce qu'il l'a condamnée à payer à M. [E] [O] la somme de 3000 euros au titre de l'astreinte liquidée, en ce qu'il a mis les dépens à sa charge et l'a condamnée à payer la somme de 800 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile. Cette procédure a été enregistrée sous le numéro 21/00703.
Faisant suite à l'avis du greffe en date du 8 septembre 2021, Mme [Y] [O], épouse [X], a fait signifier le 15 septembre 2021 sa déclaration d'appel à l'intimé non constitué, en application des articles 905 et suivants du code de procédure civile, la procédure ayant fait l'objet d'une orientation à bref délai.
Les parties ayant conclu, les deux procédures ont été fixées à l'audience de dépôt du 25 avril 2022 où elles ont été mises en délibéré au 20 juin 2022.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Dans la procédure no21/00700,
1/ M. [E] [O], appelant :
Vu les conclusions notifiées le 20 avril 2022 par lesquelles M. [E] [O] demande à la cour de :
-infirmer le jugement rendu le 7 juin 2021 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre en ce qu'il l'a débouté de sa demande d'astreinte définitive, et en ce qu'il l'a débouté du surplus de ses demandes,
-statuant à nouveau, assortir d'une astreinte définitive de 1000 euros par jour de retard l'obligation faite à Mme [Y] [O], épouse [X] par arrêt de la cour d'appel de Basse-Terre du 12 novembre 2019, d'avoir à procéder à la démolition du cabanon empêchant l'accès au chemin figurant sur la parcelle indivise cadastrée AE no[Cadastre 2], lieudit [Adresse 4] [Localité 3] débouchant sur la voie publique, dans un délai de trois mois à compter de l'arrêt,
-condamner Mme [Y] [O], épouse [X], à lui payer la somme de 5000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens.
2/ Mme [Y] [O], épouse [X], intimée :
Vu les conclusions notifiées par Mme [Y] [O], épouse [X], le 22 avril 2022, par lesquelles celle-ci demande à la cour de :
-dire et juger que son comportement doit conduire à supprimer ou diminuer l'astreinte telle que liquidée par le premier juge,
-dire et juger que M. [E] [O] qui refuse de participer aux opérations de compte liquidation partage de la parcelle familiale indivise, seule façon d'obtenir une servitude conventionnelle définitive pour l'accès à sa parcelle, souffre de sa propre turpitude,
-infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a liquidé l'astreinte à la somme de 3000 euros,
-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [O] de sa demande d'astreinte définitive d'un montant de 1000 euros par jour,
-statuant à nouveau,
-dire et juger n'y avoir lieu à astreinte au vu de son comportement dans la mesure où elle a tout fait pour parvenir à un règlement définitif du problème et à la sortie de l'indivision, ce qui aurait pour conséquence un rétablissement de l'accès au chemin pour M. [E] [O] qui se verrait attribuer une servitude conventionnelle dans l'acte de partage,
-confirmer le jugement entrepris pour le surplus,
-condamner M. [E] [O] à lui payer la somme de 4882, 50 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens.
Dans la procédure no21/00703,
1/ Mme [Y] [O], épouse [X], appelante :
Vu les conclusions notifiées le 22 avril 2022 par lesquelles Mme [Y] [O], épouse [X], demande à la cour de :
-dire et juger que son comportement doit conduire à supprimer ou diminuer l'astreinte telle que liquidée par le premier juge,
-dire et juger que M. [E] [O] qui refuse de participer aux opérations de compte liquidation partage de la parcelle familiale indivise, seule façon d'obtenir une servitude conventionnelle définitive pour l'accès à sa parcelle souffre de sa propre turpitude,
-infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a liquidé l'astreinte à la somme de 3000 euros,
-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [O] de sa demande d'astreinte définitive d'un montant de 1000 euros par jour,
-statuant à nouveau,
-dire et juger n'y avoir lieu à astreinte au vu de son comportement dans la mesure où elle a tout fait pour parvenir à un règlement définitif du problème et à la sortie de l'indivision, ce qui aurait pour conséquence un rétablissement de l'accès au chemin pour M. [E] [O] qui se verrait attribuer une servitude conventionnelle dans l'acte de partage,
-confirmer le jugement entrepris pour le surplus,
-condamner M. [E] [O] à lui payer la somme de 4882, 50 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens.
2/ M. [E] [O], intimé :
Vu les conclusions notifiées le 20 avril 2022 par lesquelles M. [E] [O] demande à la cour de :
-infirmer le jugement rendu le 7 juin 2021 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Pointe à Pitre en ce qu'il l'a débouté de sa demande d'astreinte définitive, et en ce qu'il l'a débouté du surplus de ses demandes,
-statuant à nouveau, assortir d'une astreinte définitive de 1000 euros par jour de retard l'obligation faite à Mme [Y] [O], épouse [X], par arrêt de la cour d'appel de Basse-Terre du 12 novembre 2019, d'avoir à procéder à la démolition du cabanon empêchant l'accès au chemin figurant sur la parcelle indivise cadastrée AE no[Cadastre 2], lieudit [Adresse 4] [Localité 3] débouchant sur la voie publique dans un délai de trois mois à compter de l'arrêt,
-condamner Mme [Y] [O], épouse [X] à lui payer la somme de 5000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens.
Sur la jonction des procédures,
L'article 367 du code de procédure civile dispose que le juge peut, à la demande des parties ou d'office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il est d'une bonne administration de la justice de les faire instruire et juger ensemble.
En l'espèce, les deux appels interjetés le 25 juin 2021 à l'encontre de la décision rendue par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Pointe- à-Pitre le 7 juin 2021 ont le même objet et concernent les mêmes parties.
Dès lors, il est d'une bonne administration de la justice de les faire juger ensemble et à cette fin d'ordonner la jonction de la procédure no21/00703 sous le numéro 21/00700.
Sur la liquidation de l'astreinte provisoire,
L'article L131-2 du code des procédures civiles d'exécution dispose que l'astreinte est indépendante des dommages et intérêts. L'astreinte est provisoire ou définitive. Elle est considérée comme provisoire à moins que le juge n'ait précisé son caractère définitif.
Une astreinte définitive ne peut être ordonnée qu'après le prononcé d'une astreinte provisoire et pour une durée que le juge détermine. Si l'une de ces conditions n'a pas été respectée, l'astreinte est liquidée comme une astreinte provisoire.
L'article L131-4 du même code indique que le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et aux difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter. Le taux de l'astreinte définitive ne peut jamais être modifié lors de sa liquidation.
L'astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient en tout ou partie d'une cause étrangère.
En l'espèce, il est acquis que suivant arrêt de la cour d'appel de Basse-Terre en date du 12 novembre 2019, régulièrement signifié à Mme [Y] [O], épouse [X], le 10 décembre suivant, celle-ci a été condamnée à procéder à la démolition du cabanon empêchant l'accès au chemin figurant sur la parcelle cadastrée AE no[Cadastre 2] lieudit [Adresse 4] [Localité 3] débouchant sur la voie publique dans un délai de trois mois à compter de la signification de l'arrêt et a dit que passé ce délai, Mme [Y] [O] sera condamnée à y procéder sous astreinte pendant une durée de deux mois au terme de laquelle il sera à nouveau statué.
Dans le cadre de son appel, Mme [Y] [O], épouse [X], sollicite l'infirmation du jugement déféré qui l'a condamné à payer à M. [E] [O] la somme de 3000 euros au titre de l'astreinte liquidée. Elle demande de voir supprimer voire minorer le montant de ladite astreinte au regard de son comportement, indiquant avoir fait tout son possible pour parvenir à un partage des biens indivis en litige et donc permettre à son adversaire de disposer d'une servitude conventionnelle de passage, alors que M. [E] [O] s'est opposé au règlement de la succession.
Elle considère donc que M. [E] [O] ne peut se prévaloir de sa propre turpitude pour obtenir la liquidation de l'astreinte et que son attitude a constitué une cause étrangère qui l'a empêchée d'exécuter son obligation consistant à permettre l'obtention par M. [E] [O] d'une servitude conventionnelle de passage.
Toutefois, le moyen ainsi invoqué par Mme [Y] [O] [X] est parfaitement inopérant, dès lors qu'il ressort du procès-verbal de constat établi par Maître Erard Eustache, huissier de justice, le 28 septembre 2021, que le cabanon construit par l'appelante sur la parcelle AE no[Cadastre 2] au Nord de la maison de M. [E] [O] est toujours existant et persiste à empêcher l'accès à un chemin débouchant sur la voie publique.
Il en résulte que Mme [Y] [O], épouse [X] n'a nullement exécuté l'obligation mise à sa charge en vertu de l'arrêt de la cour d'appel de Basse-Terre du 12 novembre 2019, consistant à procéder à la démolition du cabanon empêchant l'accès au chemin figurant sur la parcelle cadastrée AE no[Cadastre 2] lieudit [Adresse 4] [Localité 3] débouchant sur la voie publique dans un délai de trois mois à compter de la signification de l'arrêt.
Le fait que celle-ci ait tout mis en oeuvre pour sortir de l'indivision et procéder au partage de la parcelle indivise ne saurait la dédouaner de son obligation consistant à démolir purement et simplement le cabanon litigieux. De plus, le comportement de M. [E] [O] dans la liquidation de ces biens indivis est parfaitement étranger à l'obligation mise à sa charge et ne saurait constituer une cause étrangère de nature à l'exonérer du paiement de l'astreinte.
Dans ces conditions, la cour ne pourra que confirmer le jugement déféré qui a liquidé l'astreinte litigieuse pour la période ayant couru du 11 au 12 mars 2020, puis du 24 juin au 22 août 2020 à la somme de 3000 euros et qui a condamné Mme [Y] [O], épouse [X], à payer ladite somme à M. [E] [O].
Sur la fixation d'une astreinte définitive,
Tout d'abord, M. [E] [O] entend préciser dans le cadre de ses dernières conclusions qu'il souhaite limiter son appel incident à sa demande de fixation d'astreinte définitive. Par conséquent, les dispositions du jugement déféré ayant débouté M. [E] [O] du surplus de ses demandes et dont il a interjeté appel dans le cadre de sa déclaration d'appel le 25 juin 2021, seront confirmées.
Sur le fond, il est constant que nonobstant la fixation et la liquidation de l'astreinte provisoire susvisée, Mme [Y] [O] n'a toujours pas exécuté l'obligation de démolition du cabanon lui incombant au titre de l'arrêt de la cour d'appel de Basse-Terre du 12 novembre 2019, qui lui a été régulièrement signifié le 10 décembre 2019.
Dans ces conditions, le prononcé d'une astreinte définitive s'avère un moyen pertinent pour contraindre Mme [Y] [O], épouse [X] à exécuter ses obligations.
Par conséquent le jugement entrepris qui a débouté M. [E] [O] de cette demande sera infirmé.
La cour, statuant à nouveau assortira d'une astreinte définitive de 500 euros par jour de retard, l'obligation faite à Mme [Y] [O], épouse [X], de procéder à la démolition du cabanon empêchant l'accès au chemin figurant sur la parcelle indivise cadastrée AE no[Cadastre 2], lieudit [Adresse 4] [Localité 3] débouchant sur la voie publique, conformément à l'arrêt de la cour d'appel de Basse-Terre du 12 novembre 2019, et ce, pendant un délai de trois mois à compter de l'expiration d'un délai d'un mois suivant la signification du présent arrêt.
Sur les autres demandes,
Les dispositions du jugement déféré concernant l'article 700 du code de procédure civile et les dépens seront également confirmées.
Il ne parait pas inéquitable enfin de condamner Mme [Y] [O], épouse [X], à payer à M. [E] [O] la somme de 4000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de l'instance. Elle sera pour sa part déboutée de sa demande formée à ce titre.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire, mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
Ordonne la jonction de la procédure no21/00703 avec la procédure no21/00700 sous le numéro 21/00703,
Dans les limites de l'appel,
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté M. [E] [O] de sa demande en fixation d'une astreinte définitive,
Statuant à nouveau de ce chef,
Dit qu'il y a lieu d'assortir d'une astreinte définitive de 500 euros par jour de retard, l'obligation faite à Mme [Y] [O], épouse [X] de procéder à la démolition du cabanon empêchant l'accès au chemin figurant sur la parcelle indivise cadastrée AE no[Cadastre 2], lieudit [Adresse 4] [Localité 3] débouchant sur la voie publique, conformément à l'arrêt de la cour d'appel de Basse-Terre du 12 novembre 2019, et ce, pendant un délai de trois mois à compter de l'expiration du délai d'un mois suivant la signification du présent arrêt,
Y ajoutant,
Condamne Mme [Y] [O], épouse [X], à payer à M. [E] [O] la somme de 4000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute Mme [Y] [O], épouse [X], de sa demande formée à ce titre,
Condamne Mme [Y] [O], épouse [X], aux entiers dépens de la procédure.
Et ont signé,
La Greffière La Présidente
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CAPP/JURITEXT000046013781.xml |
R.G : No RG 20/00671 - No Portalis DBVH-V-B7E-HVAV
POLE SOCIAL DU TJ DE NIMES
22 janvier 2020
RG:17/00458
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCES MALADIE DU GARD
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 21 JUIN 2022
APPELANTE :
Madame [T] [R]
[Adresse 6]
[Localité 4]
représentée par Me Anne-sophie CHAGNAUD, avocat au barreau de NIMES
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCES MALADIE DU GARD
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par M. [B] en vertu d'un pouvoir général
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 945-1 du code de Procédure Civile, sans opposition des parties.
Elle en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
à l'audience publique du 05 Avril 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 14 Juin 2022 et prorogé ce jour ;
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 21 Juin 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :
Le 02 septembre 2016, Mme [T] [R] a souscrit une déclaration de maladie professionnelle sur la base d'un certificat médical initial établi le 30 août 2016 par le Docteur [H] qui mentionnait une "dissection sous clavière gauche et thrombose axe huméro-radial et cubital responsable d'une ischémie du MSG".
Le 19 janvier 2017, la caisse primaire d'assurance maladie du Gard a rejeté la prise en charge de l'affection déclarée au titre de la législation sur les risques professionnels au motif que les conditions médicales réglementaires du tableau 69C ne sont pas remplies.
Le 22 février 2017, Mme [T] [R] a saisi la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie du Gard d'un recours contre cette décision laquelle l'a rejeté par une décision du 20 avril 2017.
Par courrier recommandé du 06 juin 2017, Mme [T] [R] a saisi le tribunal de grande instance de Nîmes, contentieux de la protection sociale d'un recours contre cette décision, lequel, suivant jugement du 22 janvier 2020, a :
- confirmé la décision de la commission de recours amiable en date du 20 avril 2017,
- débouté Mme [T] [R] de l'ensemble de ses demandes,
- condamné Mme [T] [R] aux dépens.
Suivant déclaration envoyée par voie électronique le 20 février 2021, Mme [T] [R] a régulièrement interjeté appel de cette décision.
L'affaire a été appelée à l'audience du 05 avril 2022 à laquelle elle a été retenue.
Suivant conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l'audience, Mme [T] [R] demande à la cour de :
- réformer la décision rendue par le tribunal de grande instance de Nîmes, contentieux de la protection sociale le 22 janvier 2020 en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes,
A titre principal,
- annuler la décision de la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie du Gard du 20 avril 2017 qui a refusé de reconnaître le caractère professionnel de la maladie qu'elle a souscrite le 27 septembre 2016,
- rejeter toutes prétentions contraires comme injustes et mal fondées,
- reconnaître le caractère professionnel de la maladie qu'elle a souscrite le 27 septembre 2016 avec toutes les conséquences de droit qui y sont attachées,
A titre subsidiaire,
- ordonner la saisine du comité de reconnaissance des maladies professionnelles pour avis,
A titre infiniment subsidiaire,
- désigner un expert médical aux fins de déterminer si la maladie qu'elle a souscrite est en lien avec son activité professionnelle,
En toute hypothèse,
- condamner la caisse primaire d'assurance maladie du Gard à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle fait valoir qu'elle a été amenée à porter en sa qualité de manutentionnaire des bobines de fils de fibre de verre très lourdes, que ces gestes répétés sont à l'origine d'une atteinte physique grave et d'un handicap au niveau du bras gauche qu'elle ne peut plus utiliser en raison d'une artère bouchée et qu'elle a dû subir quatre opérations chirurgicales.
Au visa de l'article L461-1 du code de la sécurité sociale, elle soutient que l'affection qu'elle a déclarée doit bénéficier de la présomption d'origine professionnelle, précisant qu'il y a bien une atteinte vasculaire cubito palmaire de la main gauche entraînant des manifestations ischémiques.
Subsidiairement, elle estime être fondée à solliciter la désignation d'un comité de reconnaissance des maladies professionnelles pour déterminer si sa maladie est en lien avec son activité professionnelle, et à titre très subsidiaire, elle sollicite une expertise médicale judiciaire.
Suivant conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l'audience, la caisse primaire d'assurance maladie du Gard demande à la cour de :
- confirmer purement et simplement le jugement rendu le 22 janvier 2020 par le tribunal judiciaire,
- rejeter les demandes de Mme [T] [R],
Si par extraordinaire la cour estimait que l'affection présentée par Mme [T] [R] relevait du tableau no69C, renvoyer l'assurée devant elle pour reprise de l'instruction de son dossier,
Si par extraordinaire la cour diligentait une expertise judiciaire, la mission de l'expert serait de déterminer si l'affection de Mme [T] [R] correspond à celle désignée dans le tableau no69 C des maladie professionnelles.
Elle fait valoir au visa de l'article L461-1 du code de la sécurité sociale que le médecin conseil a considéré que Mme [T] [R] présente une dissection sous clavière gauche mais ne présente pas de phénomène de Raynaud de sorte qu'elle ne remplit pas les conditions médicales du tableau 69C des maladies professionnelles et qu'il ne lui appartient pas de porter un quelconque jugement sur cet avis.
Elle ajoute que seule la condition médicale n'étant pas remplie et le dossier de Mme [T] [R] ayant été instruit sur la base du tableau 69C , la désignation d'un comité de reconnaissance des maladies professionnelles n'est pas fondée, tout comme la désignation d'un expert médical dans la mesure où le litige ne porte pas sur le lien entre la pathologie dont souffre Mme [T] [R] et son activité professionnelle mais sur la désignation de la maladie.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens de parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.
Selon l'article L461-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable issu de la loi no215-994 du 17 août 2015, les dispositions du présent livre sont applicables aux maladies d'origine professionnelle sous réserve des dispositions du présent titre.
En ce qui concerne les maladies professionnelles, la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle est assimilée à la date de l'accident.
Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.
Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.
Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.
Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article L. 315-1.
Les pathologies psychiques peuvent être reconnues comme maladies d'origine professionnelle, dans les conditions prévues aux quatrième et avant-dernier alinéas du présent article. Les modalités spécifiques de traitement de ces dossiers sont fixées par voie réglementaire.
La reconnaissance des maladies professionnelles repose ainsi sur des tableaux de maladies professionnelles annexés au livre IV du code de la sécurité sociale. Chaque tableau précise la nature des travaux susceptibles de provoquer la ou les maladies et énumère les affections provoquées. Ces tableaux instituent une présomption d'imputabilité entre la maladie qu'ils décrivent et les travaux qu'ils mentionnent. Les affections ainsi listées sont présumées d'origine professionnelle lorsqu'il est établi que le salarié qui en est atteint a été exposé, de façon habituelle, au cours de son activité professionnelle, à l'action d'agents nocifs.
Fixés par décret et annexés au code de la sécurité sociale, les tableaux des maladies professionnelles ont un caractère réglementaire. Leur application est d'ordre public.
Lorsque la demande de la victime réunit les trois conditions, affection désignée dans le tableau, délai dans lequel la maladie doit être constatée après la cessation de l'exposition du salarié au risque identifié pour être pris en charge et travaux susceptibles de provoquer la maladie, la maladie est présumée d'origine professionnelle, sans que la victime ait à prouver le lien de causalité entre son affection et son travail.
La maladie telle qu'elle est désignée dans les tableaux de maladies professionnelles est celle définie par les éléments de description et les critères d'appréciation fixés par chacun des tableaux.
S'il n'y a pas lieu à procéder à une analyse littérale du certificat médical initial, par contre, la maladie déclarée doit correspondre précisément à celle décrite au tableau, avec tous ses éléments constitutifs et doit être constatée conformément aux éléments de diagnostic éventuellement prévus, et la charge de la preuve de la réunion des conditions exigées par l'article L. 461-1 susvisé, pèse sur l'organisme social, lorsque ce dernier a décidé d'une prise en charge contestée par l'employeur.
Il entre dans les compétences du médecin conseil de la caisse, en application de l'article L.315-1 du code de la sécurité sociale, de vérifier si la pathologie mentionnée au certificat médical initial correspond à une maladie mentionnée dans un tableau de maladies professionnelles.
Le tableau no69C du tableau des maladies professionnelles relatif aux affections provoquées par les vibrations et chocs transmis par certaines machines-outils, outils et objets et par les chocs itératifs du talon de la main sur des éléments fixes :
- désigne au paragraphe C la maladie suivante : atteinte vasculaire cubito-palmaire en règle unilatérale (syndrome du marteau hypothénar) entraînant un phénomène de Raynaud ou des manifestations ischémiques des doigts confirmée par l'artériographie objectivant un anévrisme ou une thrombose de l'artère cubitale ou de l'arcade palmaire superficielle,
- fixe un délai de prise en charge de 1 an sous réserve d'une durée d'exposition de 5 ans,
- liste les travaux à l'origine de cette maladie : travaux exposant habituellement à l'utilisation du talon de la main en percussion directe itérative sur un plan fixe ou aux chocs transmis à l'éminence hypothénar par un outil percuté ou percutant.
Mme [T] [R] a déclaré le 27 janvier 2016 une affection pour une "dissection sous clavière gauche et thrombose de l'huméro-radial et cubital responsable d'une ischémie" ; le certificat médical initial mentionne une "dissection sous clavière gauche et thrombose axe huméro-radial et cubital responsable d'une ischémie du MSG".
Le médecin conseil de la caisse primaire d'assurance maladie du Gard a considèré dans son colloque médico-administratif le 19 décembre 2016 que les conditions médicales réglementaires du tableau 69C n'étaient pas remplies en raison de l'absence du "phénomène de Raynaud. Dissection sous clavière gauche".
Cependant, la maladie désignée au tableau 69C prévoit soit l'apparition d'un phénomène de Raynaud, soit une manifestation ischémique des doigts confirmée par artériographie objectivant un anévrisme ou une thrombose de l'artère cubitale ou de l'arcade palmaire superficielle.
A l'appui de ses prétentions, Mme [T] [R] produit notamment :
- un compte rendu d'une artériographie de la crosse de l'aorte du 30 mai 2016 qui conclut de la façon suivante "thrombose du stend de la sous-clavière gauche. Réopacification de la sous clavière gauche par une collatéralité provenant des vaisseaux droits et des cervicales ascendantes. Thrombose de l'artère humérale droite et au niveau de l'avant bras, persistent une cubitale et une inter osseuse",
- un compte rendu opératoire du 25 mars 2016 concernant une "thrombectomie huméro axillaire gauche et une dilatation stenting sous clavière gauche par abord huméral gauche."
Les éléments ainsi apportés par l'appelante mettent en évidence une thrombose de la sous-clavière gauche qui est différente de l'artère cubitale, cependant, ces même pièces médicales font également état de la persistance d'une "cubitale".
Enfin, si Mme [T] [R] n'établit pas être atteinte du syndrome de Raynaud, par contre, le certificat médical initial mentionne une ischémie.
La cour n'étant pas en mesure de statuer sur ce litige d'ordre médical, il convient de faire droit à la demande de Mme [T] [R] et d'ordonner une mesure d'expertise médicale.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière de sécurité sociale et en dernier ressort;
Avant dire droit,
Ordonne une expertise médicale sur pièces du dossier médical de Mme [T] [R],
Commet pour y procéder le Docteur [L] [N], [Adresse 7] ( Tél : [XXXXXXXX01] - Port. : [XXXXXXXX02] Mèl : [Courriel 8]) avec pour mission de :
- se faire communiquer l'entier dossier médical de Mme [T] [R] en possession du service médical de la caisse primaire d'assurance maladie du Gard,
- dire si l'affection que Mme [T] [R] a déclarée le 27 janvier 2016 correspond à la maladie désignée dans le tableau 69C des maladies professionnelles,
- fournir les seuls éléments médicaux de nature à apporter une réponse à la question posée.
Rappelle que la caisse primaire d'assurance maladie du Gard doit communiquer à l'expert désigné le dossier de Mme [T] [R] détenu par son service médical, sauf au juge à tirer toutes conséquences de droit de son abstention ou refus,
Ordonne la consignation par la Caisse primaire d'assurance maladie du Gard auprès du régisseur de la cour dans les deux mois de la notification du présent arrêt de la somme de 600 euros à valoir sur la rémunération del'expert par chèque libellé à "l'ordre du régisseur d'avances et de recttes de la cour d'appel de Nimes",
Dit que l'expert déposera son rapport au greffe de la cour d'appel dans les quatre mois de sa saisine et au plus tard le 30 octobre 2022 et en transmettra copie à chacune des parties,
Désigne M [I] [X] président, ou un délégataire, pour suivre les opérations d'expertise,
Renvoie la cause et les parties à l'audience du 22 novembre 2022 à 14 heures,
Dit que la notification du présent arrêt vaudra convocation à l'audience,
Sursoit à statuer sur les dépens.
Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame OLLMANN, Greffière.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
|
CAPP/JURITEXT000046013795.xml | COUR D'APPEL d'AIX-EN-PROVENCE
[Adresse 2]
[Localité 1]
No RG 22/07105 - No Portalis DBVB-V-B7G-BJNED
Chambre 1-9
Ordonnance no 2022/M140
M. [H] [Z]
Représentant : Me Wilfried BIGENWALD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Mme [P] [Y]
Représentant : Me Wilfried BIGENWALD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
M. [D] [T]
Mme [F] [T]
ORDONNANCE D'IRRECEVABILITÉ DE L'APPEL
Nous, Evelyne THOMASSIN, Présidente, assistée de Nicolas FAVARD, greffier,
Vu la demande de timbre effectuée par le greffe le 19 Mai 2022
Vu le défaut de paiement la contribution prévue par l'article 1635 bis P du code général des impôts ;
Vu les articles 963 et 964 du code de procédure civile ;
Attendu qu'il convient en application des articles sus-visés de déclarer irrecevable l'appel interjeté le 16 Mai 2022 par [H] [Z] et Mme [P] [Y].
PAR CES MOTIFS
PRONONÇONS l'irrecevabilité de l'appel interjeté le 16 Mai 2022 par [H] [Z] et Mme [P] [Y] contre la décision rendue le 28 Avril 2022 par Juge de l'exécution d'AIX-EN-PROVENCE.
Fait à Aix-en-Provence, le 23 Juin 2022
LE GREFFIERLA PRÉSIDENTE
Copie adressée aux avocats ce jour par courriel
|
CAPP/JURITEXT000046013794.xml | Copies exécutoires délivrées aux parties le :
Copies certifiées conformes délivrées aux parties le :
République française
Au nom du Peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 9 - B
ARRET DU 23 Juin 2022
(no 118 , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S No RG 20/00157 - No Portalis 35L7-V-B7E-CB364
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Février 2020 par le Tribunal de proximité de PALAISEAU RG no 11-19-000596
Monsieur [D] [P] (débiteur)
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
comparant en personne
HOIST FINANCE SAS (1615022-2667467 ; 1615022-2667221)
[Localité 1]
non comparante
SIP [Localité 6] (IR15 et 16)
[Adresse 4]
[Adresse 4]
non comparante
CA CONSUMER FINANCE ANAP (81054479942)
AGENCE 923 Banque de France
[Adresse 3]
[Adresse 3]
non comparante
Département juridique affaires pénales
[Adresse 2]
[Adresse 2]
non comparante
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Mai 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laurence ARBELLOT conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Christophe BACONNIER, président
Mme Laurence ARBELLOT, conseillère
Mme Fabienne TROUILLER, conseillère
Greffière : Mme Alexandra AUBERT, lors des débats
- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Christophe BACONNIER, président et par Mme Alexandra AUBERT, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [D] [P] a saisi la commission de surendettement des particuliers de [Localité 8] qui a, le 12 mars 2019, déclaré sa demande recevable.
Par une décision notifiée 19 août 2019, la commission a imposé le rééchelonnement du paiement des créances sur une durée de 34 mois, au taux de 0,86%, avec une mensualité de remboursement maximal de 789 euros.
Le 13 septembre 2019, M. [P] a contesté cette décision en faisant état de sa situation familiale et de prêts contractés auprès de particuliers qu'il rembourse. Il affirme qu'il perçoit moins que ce que la commission a retenu et que la dette réclamée par la société Hoist Finance n'est pas justifiée.
Par jugement réputé contradictoire du 26 février 2020, le tribunal de proximité de Palaiseau a:
- déclaré recevable le recours,
- arrêté les mesures propres à traiter la situation de surendettement de M. [P] selon les modalités suivantes: les dettes sont rééchelonnées sur une durée de 71 mois, le taux d'intérêt des prêts est ramené à zéro et les dettes reportées ou rééchelonnées ne produiront pas d'intérêt,
- écarté de la procédure les créances déclarées par la société Hoist Finance et dit qu'elles ne pourront faire l'objet d'aucune mesure d'exécution pendant la durée du plan,
- rappelé que la créance de la RATP est exclue du champ de la procédure.
La juridiction a retenu des ressources de 1 825 euros par mois et des charges fixées à 1 584 euros par mois avec une capacité réelle de remboursement de M. [P] de 241 euros mensuels. Elle a rappelé que la créance de la RTP était exclue du champ de procédure car constitutive d'une dette pénale et a écarté la créance de la société Hoist Finance comme étant non justifiée.
Cette décision a été notifiée à M. [P] suivant courrier adressé le 28 février 2020.
Par déclaration adressée le 18 mars 2020 au greffe de la cour d'appel de Paris, M. [P] a interjeté appel du jugement en faisant valoir que certaines dettes qu'il a contractées n'ont pas été prises en compte et fait état d'une situation financière difficile.
Les parties ont été convoquées à l'audience du 17 mai 2022.
M. [P] comparaît en personne.
Il prend acte de ce que les créances des sociétés Hoist finance et Ratp ont été écartées. Il explique avoir un peu respecté le plan au début en versant 3 ou 4 fois les 241 euros mensuels mais qu'il n'a pas continué. Il produit son bulletin de salaire d'avril 2022 indiquant qu'il perçoit 1 441 euros nets par mois et qu'il a une saisie sur son salaire d'environ 366 euros par mois correspondant à des avis à tiers détenteur pour le paiement de ses créances fiscales.
Il explique être marié depuis 2019, que sa femme vient d'arriver en France mais qu'elle ne travaille pas et qu'ils attentent un enfant. Il indique ne pas percevoir d'aide au logement et aider sa famille au Sri Lanka, son père étant décédé. Il explique qu'il ne peut payer et ne peut rien proposer sauf à voir ses dettes effacées.
Par courriers reçus au greffe le 7 juillet 2020 et le 10 mars 2022, la Direction générale des finances publiques de Créteil, fait savoir que l'intéressé a manqué à ses obligations en ne respectant pas le plan approuvé par le tribunal dans son jugement du 26 février 2020 et être créancière à hauteur de 2 262,66 euros.
Aucun créancier n'a comparu.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il convient d'indiquer à titre liminaire que l'appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile. La procédure applicable devant la cour d'appel est donc la procédure orale de droit commun dans laquelle la prise en considération des écrits d'une partie par la cour est subordonnée à l'indication orale à l'audience par cette partie ou son représentant qu'elle se réfère à ses écritures. Dès lors, la cour ne peut prendre en compte les demandes ou observations présentées par écrit par les parties non comparantes.
Sur la recevabilité du recours
En l'absence de tout élément de nature à contredire le jugement sur ce point, la décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a déclaré recevable le recours.
La bonne foi de M. [P] n'est pas contestée et n'est pas susceptible d'être remise en cause au vu des éléments dont la cour dispose. Il n'y a donc pas lieu de statuer spécialement sur ce point.
Sur les mesures
Aux termes de l'article L.733-1 du code de la consommation, en l'absence de mission de conciliation ou en cas d'échec de celle-ci, la commission peut, à la demande du débiteur et après avoir mis les parties en mesure de fournir leurs observations, imposer tout ou partie des mesures suivantes :
1o Rééchelonner le paiement des dettes de toute nature, y compris, le cas échéant, en différant le paiement d'une partie d'entre elles, sans que le délai de report ou de rééchelonnement puisse excéder sept ans ou la moitié de la durée de remboursement restant à courir des emprunts en cours ; en cas de déchéance du terme, le délai de report ou de rééchelonnement peut atteindre la moitié de la durée qui restait à courir avant la déchéance ;
2o Imputer les paiements, d'abord sur le capital ;
3o Prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées ou rééchelonnées porteront intérêt à un taux réduit qui peut être inférieur au taux de l'intérêt légal sur décision spéciale et motivée et si la situation du débiteur l'exige. Quelle que soit la durée du plan de redressement, le taux ne peut être supérieur au taux légal;
4o Suspendre l'exigibilité des créances autres qu'alimentaires pour une durée qui ne peut excéder deux ans. Sauf décision contraire de la commission, la suspension de la créance entraîne la suspension du paiement des intérêts dus à ce titre. Durant cette période, seules les sommes dues au titre du capital peuvent être productives d'intérêts dont le taux n'excède pas le taux de l'intérêt légal.
L'article L.733-3 du même code énonce que la durée totale des mesures mentionnées à l'article L. 733-1 ne peut excéder sept années.
Aux termes de l'article R. 731-1 du code de la consommation : « Pour l'application des dispositions des articles L. 732-1, L. 733-1 et L. 733-4, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l'apurement de ses dettes est calculée, dans les conditions prévues aux articles L. 731-1, L.731-2 et L. 731-3, par référence au barème prévu à l'article R. 3252-2 du code du travail. Toutefois, cette somme ne peut excéder la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l'intéressé et le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2o de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles applicable au foyer du débiteur ».
L'article R. 731-2 précise : « La part de ressources réservée par priorité au débiteur est déterminée au regard de l'ensemble des dépenses courantes du ménage, qui intègre les dépenses mentionnées à l'article L. 731-2 ».
Enfin selon l'article R.731-3 : « Le montant des dépenses courantes du ménage est apprécié par la commission, soit pour leur montant réel sur la base des éléments déclarés par le débiteur, soit en fonction du barème fixé par son règlement intérieur et prenant en compte la composition de la famille. Le règlement intérieur précise à quelles conditions et selon quelles modalités les dépenses sont prises en compte pour leur montant réel ou selon le barème. Lorsque la commission prend en compte des dépenses courantes du ménage pour leur montant réel, elle peut demander au débiteur d'en fournir des justificatifs. Si le débiteur ne les fournit pas, les dépenses concernées sont appréciées selon le barème susvisé ».
En l'espèce, il ressort du dossier que le passif non contesté retenu par la commission et le tribunal s'élève à la somme de 16 953,41 euros et que les mesures de rééchelonnement arrêtées par le tribunal sur une durée de 71 mois sans intérêt avec des mensualités maximales de 241 euros permettent un règlement intégral des deux créances (SIP Créteil et CA Consumer finance) à l'issue du plan.
Le tribunal a constaté que les ressources de M. [P] étaient de 1 825 euros par mois et les charges ont été évaluées à 1 584 euros par mois.
M. [P] justifie d'une baisse de ses ressources puisqu'il ne perçoit plus que 1 441 euros par mois de salaire (bulletin de salaire d'avril 2022) sans aide au logement et indique sans le justifier, être marié et bientôt père d'un enfant.
Concernant sa part de ressources nécessaires aux dépenses courantes, aucun élément ne permet de contredire l'évaluation du montant des charges retenue par le premier juge à hauteur de 1 584 euros mensuels, étant précisé que ce montant est amené à augmenter en raison de l'arrivée prochaine d'un enfant.
Il résulte de ce qui précède que M. [P] justifie d'une diminution de ses ressources qui ne lui permet pas de faire face à ses charges et alors qu'il reconnaît avoir été dans l'impossibilité de respecter les mesures imposées par la décision querellée. M. [P] ne dispose d'aucune capacité de remboursement et d'aucun actif susceptible de désintéresser ses créanciers, étant remarqué qu'il fait l'objet par ailleurs de trois avis à tiers détenteur émanant des SIP de [Localité 7], [Localité 6] et de [Localité 9].
Il convient en conséquence d'infirmer la décision dont appel et de renvoyer le dossier à la commission de surendettement des particuliers de [Localité 8] pour prise en compte de la nouvelle situation professionnelle et familiale de M. [P].
Chaque partie supportera ses éventuels dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par arrêt par réputé contradictoire et en dernier ressort rendu par mise à disposition au greffe :
Infirme le jugement en toutes ses dispositions,
Renvoie l'examen du dossier à la Commission de surendettement des particuliers de Paris,
Laisse à la charge de chaque partie les éventuels dépens d'appel exposés par elle,
Dit que l'arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement et aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT
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CAPP/JURITEXT000046013780.xml |
R.G : No RG 19/04337 - No Portalis DBVH-V-B7D-HRTA
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MENDE
15 octobre 2019
RG:18/00014
CAISSE COMMUNE DE LA SECURITE SOCIALE DE LA LOZERE BRANCHE ASSURANCE MALADIE
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 21 JUIN 2022
APPELANT :
Monsieur [A] [W]
Le Village
[Localité 2]
représenté par Me Laurence AGUILAR, avocat au barreau de NIMES
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019010738 du 04/12/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)
CAISSE COMMUNE DE LA SECURITE SOCIALE DE LA LOZERE BRANCHE ASSURANCE MALADIE
[Adresse 4]
[Localité 1]
représentée par M. [H] en vertu d'un pouvoir général
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 945-1 du code de Procédure Civile, sans opposition des parties.
Elle en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
à l'audience publique du 05 Avril 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 14 Juin 2022 et prorogé ce jour ;
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 21 Juin 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :
M. [A] [W] qui a occupé le poste d'ouvrier d'exécution au sein de la société de plomberie-chaufferie Testud depuis le 06 septembre 2010, s'est trouvé en arrêts de travail à compter du 21 juillet 2016 pour des douleurs lombaires.
Après l'avis défavorable du médecin conseil consigné le 24 mars 2017, la caisse commune de sécurité sociale de la Lozère lui a notifié sa décision de cesser le versement des indemnités journalières à compter du 09 mai 2017.
M. [A] [W] contestant cette décision a sollicité une expertise médicale sur le fondement de l'article L141-14 du code de la sécurité sociale à laquelle il a été fait droit par la caisse, confiée au Docteur [X] [F] lequel a répondu positivement à la question qui lui était posée "dire si l'état de santé de M. [A] [W] lui permettait d'exercer une activité professionnelle quelconque à la date du 09 mai 2017".
Contestant les conclusions expertales que la caisse commune de sécurité sociale de la Lozère lui a notifiées, M. [A] [W] a saisi la commission de recours amiable de la caisse d'un recours contre cette décision laquelle a rejeté sa contestation par décision du 23 octobre 2017.
M. [A] [W] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Mende d'un recours contre cette décision.
Suivant jugement du 15 octobre 2019, le tribunal de grande instance de Mende, contentieux de la protection sociale, désormais compétent pour statuer sur ce litige, a :
- déclaré recevable mais mal fondé le recours de M. [A] [W],
- débouté M. [A] [W] de ses demandes,
- confirmé la décision de la commission de recours amiable du 23 octobre 2017 ayant refusé le versement des indemnités journalières à M. [A] [W] à compter du 09 mai 2017,
- condamné M. [A] [W] aux dépens.
Suivant déclaration envoyée par voie électronique le 14 novembre 2019, M. [A] [W] a régulièrement interjeté appel de cette décision.
L'affaire a été fixée à l'audience du 14 décembre 2021 puis renvoyée à celle du 05 avril 2022 à laquelle elle a été retenue.
Suivant conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l'audience, M. [A] [W] demande à la cour de :
- infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a :
- déclaré recevable mais mal fondé son recours,
- l'a débouté de ses demandes,
- a confirmé la décision de la commission de recours amiable du 23 octobre 2017 ayant refusé à son profit le versement des indemnités journalières à compter du 9 mai 2017,
- l'a condamné aux dépens qui seront recouvrés selon les formes de l'aide juridictionnelle,
Statuant à nouveau,
A titre principal,
- constater que son état de santé ne lui permettait pas de reprendre une activité à la date du 9 mai 2017,
- dire et juger que la caisse commune de la sécurité sociale de Mende lui versera les indemnités journalières dues pour la période allant du 9 mai 2017, date à laquelle elles ont cessé d'être versées à tort, jusqu'à la date de son licenciement pour inaptitude, soit, jusqu'au 16 juin 2017,
A titre subsidiaire,
- ordonner une nouvelle expertise médicale,
- désigner tel expert médical avec pour mission de déterminer si à la date du 9 mai 2017, il était apte à reprendre une activité salariée,
En tout état de cause,
- constater qu'il est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale selon décision du BAJ no 2019/010738 du 4 décembre 2019,
- laisser les dépens à la charge du Trésor.
Il fait valoir que s'il est constant que des conclusions d'expertise s'imposent aux parties lorsqu'elles sont claires, précises et dénuées de contradiction, force est de constater que la conclusion du médecin expert est en totale contradiction avec les éléments retenus dans sa discussion, qu'à la date du 13 juin 2017, date de l'expertise, il portait un corset rigide qui était prévu pour 6 mois initialement et qu'il a dû le porter durant une année, jusqu'à ce qu'il intègre le programme de rééducation au Chu de [Localité 3], que dans ces conditions, il était toujours sous la contrainte de ce corset, ce qui ne lui permettait pas d'exercer une quelconque activité salariée. Il indique bénéficier d'une carte priorité depuis le 21 mars 2017 et qu'il a été reconnu travailleur handicapé et jugé inapte à son poste de travail le 10 mai 2017.
Il dit produire des documents qui établissent qu'il a subi une intervention chirurgicale invasive à l'origine de douleurs et d'une gêne fonctionnelle importante qui ont nécessité une période de rééducation et qui expliquent son incapacité de travailler de nouveau.
Il considère qu'aucun élément du dossier médical ne permet d'abonder dans le sens des conclusions d'expertise du Docteur [F].
Suivant conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l'audience, la caisse commune de sécurité sociale de la Lozère demande à la cour de :
A titre principal,
- constater que la péremption de l'instance est acquise,
A titre subsidiaire,
- refuser la mise en oeuvre de toute expertise médicale,
- constater l'absence de tout élément remettant en cause le jugement du tribunal de grande instance de Mende du 15 octobre 2019,
- confirmer en son intégralité le jugement du tribunal de grande instance de Mende, contentieux de la protection sociale, du 15 octobre 2019,
En tout état de cause,
- débouter M. [A] [W] de l'ensemble de ses prétentions.
Elle soulève en premier lieu la péremption d'instance au visa de l'article 386 du code de procédure civile, au motif que M. [A] [W] n'a accompli aucun acte de procédure entre l'acte d'appel et la transmission tardive de ses conclusions le 09 décembre 2021.
A titre subsidiaire, au visa des articles L141-1 et suivants et R141-1 et suivants du code de la sécurité sociale et de la jurisprudence y afférente, elle soutient que les conclusions de l'expert qu'elle avait désigné sont claires, précises et dénuées de contradiction, que contrairement à ce que soutient M. [A] [W], le rapport de M. [F] ne contient pas de contradiction, que l'expert a pris en compte l'ensemble des éléments que l'assuré avait produits tout d'ailleurs comme les premiers juges, qu'il présente ce jour les mêmes documents que ceux versés en première instance lesquels sont sans rapport avec la constatation de son état de santé et n'ont pas pour objet de se prononcer sur l'exercice d'une activité professionnelle.
Enfin, elle indique qu'il n'est pas sérieusement contesté que M. [A] [W] a exercé une activité de disc jokey en 2016 alors qu'il se trouvait en arrêt maladie.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens de parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.
Sur la demande formée par la caisse au titre de la péremption d'instance :
Il résulte des dispositions du décret no2018- 928 du 29 octobre 2018 ayant abrogé l'article R. 142-22 du Code de la sécurité sociale, que l'article 386 du code de procédure civile est applicable en matière de sécurité sociale tant aux instances d'appel initiées à partir du 1er janvier 2019 qu'à celles en cours à cette date.
En l'espèce, la caisse commune de sécurité sociale de la Lozère soutient que la présente instance est périmée en application de l'article 386 du Code de procédure civile au motif que M. [A] [W] n'a réalisé aucune diligence pendant plus de deux ans depuis l'acte d'appel.
En l'espèce, il résulte des pièces de la procédure que :
- M. [A] [W] a interjeté appel par déclaration envoyée par voie électronique le 14 novembre 2019,
- par courrier du 29 octobre 2019, le Président de la chambre sociale a accordé au conseil de l'appelant, Maître Laurence Aguilar, un délai de quatre mois au maximum à compter de la déclaration d'appel pour conclure, soit jusqu'au 28 février 2020,
- le conseil de M. [A] [W] a adressé ses conclusions par courrier reçu par RPVA le 12 mars 2020.
Force est de constater qu'un délai inférieur à deux ans s'est écoulé entre la date impartie à l'appelant pour conclure et la date de dépôt de ses conclusions, 12 mars 2020, de sorte que la présente instance n'est pas périmée.
Il convient, en conséquence, de rejeter l'exception soulevée par la caisse commune de sécurité sociale de la Lozère.
Sur le fond :
Selon l'article L321-1 5o du code de la sécurité sociale dans sa version applicable, des indemnités journalières sont octroyées à l'assuré qui se trouve dans l'incapacité physique constatée par le médecin traitant, selon les règles définies par l'article L162-4-1, de continuer ou de reprendre le travail.
Selon l'article L323-3 du même code dans sa version applicable issu du décret no1985-1353 du 17 décembre 1985, en cas de reprise du travail, l'indemnité journalière peut être maintenue en tout ou en partie pendant une durée fixée par la caisse, mais ne pouvant excéder une durée déterminée:
1o) soit si la reprise du travail et si le travail effectué sont reconnus comme étant de nature à favoriser l'amélioration de l'état de santé de l'assuré ;
2o) soit si l'assuré doit faire l'objet d'une rééducation ou d'une réadaptation professionnelle pour recouvrer un emploi compatible avec son état de santé.
Sauf cas exceptionnel que la caisse appréciera, le montant de l'indemnité maintenu ne peut porter le gain total de l'assuré à un chiffre excédant le salaire normal des travailleurs de la même catégorie professionnelle.
L'article R323-3 du même code dispose, dans sa version applicable issu du décret 2001-532 du 20 juin 2001, que le silence gardé pendant plus de six mois sur la demande de maintien de l'indemnité journalière prévue au 2o de l'article L. 323-3 vaut décision de rejet. La durée maximale, prévue au premier alinéa de l'article L. 323-3, durant laquelle, en cas de reprise du travail, l'indemnité journalière peut être maintenue par la caisse ne peut excéder d'un an le délai de trois ans prévu à l'article R. 323-1.
L'incapacité de travail ouvrant droit au bénéfice des prestations en espèces de l'assurance maladie s'entend de l'incapacité totale de se livrer à une activité professionnelle quelconque.
Ainsi, l'allocation des indemnités journalières est subordonnée à la seule constatation de l'incapacité physique de l'assuré de reprendre le travail, qu'il soit ou non guéri de son affection, et que cette incapacité s'analyse non pas dans l'inaptitude de l'assuré à remplir son ancien emploi, mais dans celle d'exercer une activité salariée quelconque.
En l'espèce, il résulte des pièces produites aux débats que M. [A] [W] a été en arrêt de travail à compter du 21 juillet 2016 jusqu'au 09 mai 2017 de façon ininterrompue pour une lombalgie sciatalgie gauche et que la caisse commune de sécurité sociale de la Lozère lui a notifié une cessation du versement des indemnités journalières à compter de cette dernière date au motif que le médecin conseil a estimé que son arrêt de travail n'est plus médicament justifié.
Le rapport d'expertise du Docteur [X] [F] qui a été désigné par la caisse pour réaliser une expertise technique repose sur la discussion suivante : "l'anamnèse, l'examen clinique et les documents médicaux permettent de retenir que M. [A] [W] né en 1993 a été victime le 21/07/2016 d'un accident de travail qui a entraîné : une lombalgie au niveau de L4-L5, que le 13/12/2016, le docteur [G], neurochirurgien à [Localité 5] a noté "M. [A] [W] présente des lombalgies disco-géniques en cours de bilan. Il nécessite une kinésithérapie pour une durée d'au moins trois mois en cas d'échec. Un geste chirurgical sera envisagé". Compte tenu des constatations cliniques faites ce jour, qui ne montrent aucun élément d'évolutivité, l'état de santé de M. [A] [W] lui permettait d'exercer une activité professionnelle quelconque à la date du 09/05/2017".
A l'appui de ses prétentions, M. [A] [W] produit aux débats :
- une ordonnance du Professeur [K] prescrivant une angio TDM abdominal,
- une photocopie de la carte priorité pour personne handicapée valable du 01 décembre 2016 au 30 novembre 2021,
- une proposition de fixation de son taux d'incapacité inférieur à 50%, la reconnaissance du statut de travailleur handicapé pour la période comprise entre le 1er décembre 2016 et le 30 novembre 2021 et un accord pour une orientation vers le marché du travail ordinaire pour la même période,
- une fiche d'aptitude établie par le CMIST Alès Lozère qui conclut au 10 mai 2017 "inapte au poste de plombier actuellement occupé après étude de poste, des conditions de travail et entretien avec l'employeur le 21 novembre 2016. Inaptitude dans une seule visite avec la mention que "l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi dans l'entreprise. A revoir",
- un courrier du Docteur [L] [M] du 11 septembre 2017 qui indique notamment que M. [A] [W] a été victime d'un accident de travail en juillet 2016, que "les neurochirugiens de [Localité 5] lui avait proposé une prise en charge par corset pendant 6 mois qui a diminué la symptomatologie sans la faire disparaître totalement avec une récidive des douleurs à l'ablation du corset, ainsi qu'une prise en charge au centre de rééducation qui n'a pas pu être réalisée pour des problèmes financiers par le patient et si inefficacité de tous ces traitements, pose d'une prothèse discale ; sur le plan clinique, M. [A] [W] présente des lombalgies basses discrètement majorées à la palpation ; la prise en charge proposée sur [Localité 5] semble tout à fait logique chez ce patient jeune, il est donc à l'étape de rééducation",
- un compte rendu d'hospitalisation de rééducation neuro-orthopédique du 13 juin 2018,
- un compte rendu Irm rachis lombaire du 13 juillet 2018,
- un courrier du Docteur [S] au Docteur [Z] du 21 août 2018,
- un compte rendu de scanner lombaire du 08 octobre 2018,
- un courrier du Docteur [E] adressé au Docteur [Z] du 11 octobre 2018,
- un certificat médical établi le 10 avril 2019 par le docteur [P],
- un courrier d'hospitalisation de rééducation neuro-orthopédique du 25 avril 2019,
- des avis d'arrêt de travail du 21 mai 2018 et de prolongation.
Le courrier du Docteur [L] [M] conforte le fait qu'en septembre 2017 M. [A] [W] poursuivait sa rééducation qui a dû débuter six mois après l'accident du travail, soit en mars 2017 après une période correspondant au port d'un corset, la fiche d'inaptitude établie le 10 mai 2017 se rapporte à l'emploi que M. [A] [W] remplissait jusqu'à l'accident du travail au sein de l'entreprise Testud et non pas son inaptitude à toute activité professionnelle quelle qu'elle soit, la reconnaissance de son statut de travailleur handicapé n'est pas incompatible avec la poursuite d'une activité professionnelle, les autres pièces médicales produites sont postérieures à la date du 09 mai 2017 et n'apportent aucun élément utile sur la capacité ou non de l'assuré à exercer un travail à cette date.
Le Docteur [F] mentionne dans son rapport que M. [A] [W] est porteur d'un corset rigide qui mobilise le tronc avec difficultés et que l'assuré paraît en souffrir, et a relevé, cependant, l'absence de signe de Lasègue, la présence et la symétrie des réflexes rotuliens et achiléens, la conservation de la motricité et de la sensibilité à tous les modes, une trophicité musculaire normale et la possibilité pour l'assuré de se hisser sur la pointe des pieds et de maintenir la station debout sur les talons.
S'il n'est pas contesté que lors de la consultation d'expertise médicale M. [A] [W] était porteur d'un corset, les pièces médicales produites par les parties ne semblent pourtant pas justifier le maintien du corset après mars 2017 ; pour établir le contraire, M. [A] [W] fait référence à une ordonnance établie par le Docteur [T] [O] non datée qui a prescrit un angio TDM abdominal qui correspond en fait à un scanner du thorax et non pas au port d'un corset.
Par ailleurs, la caisse commune de sécurité sociale de la Lozère produit aux débats des photocopies de captures d'écran de plusieurs pages du compte Facebook de M. [A] [W] qui établissent que l'assuré a travaillé en juin 2017 comme disc jokey, l'une de ces pages mentionnant notamment : "allez se soir je vous attends tous au Khéops à partir de minuit", ce que l'appelant ne conteste pas sérieusement, alors que les doléances faites auprès du médecin expert peu de temps auparavant laissaient à penser que les douleurs ressenties notamment sur la partie basse du rachis étaient incomptabibles avec l'exercice de toute activité professionnelle.
Au vu de l'ensemble de ces considérations, c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu qu'aucun élément ne permet de remettre en cause l'avis de l'expert médical qui est clair, précis et dénué de toute ambiguïté et de faire droit à la demande d'expertise médicale judiciaire.
Il convient dès lors de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière de sécurité sociale et en dernier ressort;
Dit que la présente instance n'est pas périmée,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Mende, contentieux de la protection sociale, le 15 octobre 2019,
Déboute M. [A] [W] de l'intégralité de ses prétentions,
Condamne M. [A] [W] aux dépens de la procédure d'appel.
Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame OLLMANN, Greffière.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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CAPP/JURITEXT000046013796.xml |
No RG 19/02659 - No Portalis DBVH-V-B7D-HNBX
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'ORANGE
07 mars 2019
RG :18/00030
Etablissement Public UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA DE TOULOUSE
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 21 JUIN 2022
APPELANT :
Monsieur [T] [C]
né le [Date naissance 2] 1975 à [Localité 8]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représenté par Me Anne-france BREUILLOT de la SELARL BREUILLOT & AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CARPENTRAS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/004788 du 19/06/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)
Maître [I] [B]
[Adresse 7]
[Localité 4]
Représenté par Me Guilhem NOGAREDE de la SELARL GN AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA DE TOULOUSE
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Lisa MEFFRE de la SELARL SELARLU MG, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CARPENTRAS
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 05 Avril 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
à l'audience publique du 19 Avril 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 21 Juin 2022
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 21 Juin 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :
M. [T] [C] a été engagé par la Sarl Philine suivant contrat saisonnier:
- du 15 mai 2014 au 30 septembre 2014 en qualité de cuisinier, moyennant un salaire mensuel de 1 445,40 euros pour 35 heures hebdomadaires,
- du 1er mai 2015 au 20 septembre 2015 en contrat saisonnier de 39 heures, en qualité de chef de cuisine, moyennant un salaire de 2 157,40 euros.
Le 15 avril 2015, la Sarl Philine est placée en redressement par décision du tribunal de commerce d'Avignon lequel fixait la date de cessation des paiements au 09 avril 2015.
Le 16 décembre 2015, par décision du tribunal de commerce d'Avignon il était mis fin à la période d'observation et la procédure était convertie en liquidation.
Le 1er novembre 2015, M. [T] [C] sollicitait le paiement de son salaire de septembre 2015 et la remise des documents de fin de contrat.
Le 13 février 2018, M. [T] [C] s'estimant lésé de ses droits a saisi le conseil de prud'hommes d'Avignon aux fins d'obtenir le paiement de diverses sommes indemnitaires.
Suivant jugement du 07 mars 2019, le conseil de prud'hommes d'Orange a :
- dit M. [T] [C] partiellement fondé en ses réclamations,
- fixé la créance de M. [T] [C] sur la liquidation judiciaire de la Sarl Philine aux sommes suivantes :
- 2 483,52 euros au titre de rappel de salaires,
- ordonné la remise du reçu pour solde de tout compte et le certificat de travail,
- dit que la condamnation portera intérêts au taux légal à compter du 15 février 2018,
- débouté M. [T] [C] du surplus de ses demandes,
- déclaré le jugement opposable au CGEA AGS Toulouse dans les limites définies aux articles L3253-6 et L3253-8 du code du travail et des plafonds applicables prévus aux articles L3253-17 et D3253-5 du même code,
- dit que le CGEA AGS devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L3253-6 et L3253-8 du code du travail dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L3253-19, L3253-20, L3253-21 et L3253-15 du code du travail,
- rappelé que le jugement bénéficie de l'exécution provisoire de droit dans les limites définies aux articles R1454-28 code du travail et l'article 515-1 du code de procédure civile,
- débouté la Selarl BRMJ venant aux droits de Maître [B] de sa demande reconventionnelle,
- ordonné l'exécution provisoire,
- dit que les dépens seront à la charge de la procédure collective.
Suivant déclaration envoyée par voie électronique le 02 juillet 2019, M. [T] [C] a régulièrement interjeté appel de cette décision, l'accusé de réception de la lettre de notification du jugement portant la mention "destinataire inconnu à l'adresse".
Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 05 avril 2022 et a fixé l'affaire à l'audience du 19 avril 2022 à laquelle elle a été retenue
Dans le dernier état de ses écritures, M. [T] [C] conclut l'infirmation partielle du jugement entrepris et demande à la cour de :
- voir dire et juger qu'il a travaillé au sein de la Sarl Philine pour les périodes des 20 avril au 2 novembre 2014 inclus et du 22 avril au 20 septembre 2015 inclus,
- voir fixer à la liquidation judiciaire de la Sarl Philine les sommes qui lui sont dues au titre de ses contrats de travail de la manière suivante :
- 2 438,52 euros brut à titre de rappel de salaire (heures de base, avantage en nature et indemnité compensatrice de congés payés en fin de contrat) pour le mois de septembre 2015 conformément au bulletin de salaire établi en son temps par la société Philine,
- 12 612,22 euros à titre de rappel de salaires pour la période du 20 avril au 2 novembre 2014,
- 1 261,22 euros au titre des congés payés correspondants,
- 17 023,24 euros à titre de rappel de salaires pour la période du 22 avril au 20 septembre 2015,
- 1 702,32 euros au titre des congés payés correspondants,
- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la durée maximale des journées de travail au cours de la saison 2015,
- 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'organisation des visites médicales d'embauche,
- remise de bulletins de salaires rectifiés, de certificats de travail et d'attestations Pôle Emploi conformes pour les saisons 2014 et 2015 (période d'emploi et salaires réellement dus) sous astreinte de 100 euros par jour de retard à expiration d'un délai de 15 jours après la notification de la décision à intervenir,
- intérêts au taux légal à compter de la saisine,
- condamner Maître [B] es qualité à payer à la Selarl Breuillot et Avocat la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,
- dire et juger que le présent arrêt sera opposable au CGEA AGS de Toulouse,
- condamner Maître [B] es qualité aux entiers dépens.
Il fait valoir que :
- bien que son contrat de travail mentionne une période de travail du 15 mai 2014 au 30 septembre 2014, il a en réalité travaillé au sein de la société Philine du 15 avril au 02 novembre 2014, qu'en l'absence de tout système d'enregistrement des heures de travail par la société il tenait le compte de ses horaires de travail ce qu'atteste un ancien salarié, que la société Philine n'a procédé au paiement que de 151,67 heures mensuelles alors qu'il était en droit de réclamer celle de 12 612,22 euros,
- il avait réclamé son solde de tout compte et le paiement de son salaire du mois de septembre 2015 à 1 776,37 euros net, soit 2 438.52 euros brut, que la société Philine n'avait pas contesté être redevable de cette somme,
- tout comme la saison 2014, il a travaillé sur une période plus importante que celle mentionnée sur son contrat de travail, alors que le contrat mentionne la période du 1er mai au 20 septembre 2015 ; qu'il a tenu un décompte détaillé de ses horaires de travail et qu'il en ressort qu'il effectuait des journées de travail très importantes, sans aucune interruption, de 8 heures du matin à minuit, que la société Philine ne l'a payé qu'à hauteur de 169 heures mensuelles ;
- le conseil des prud'hommes a renversé la charge de la preuve telle qu'elle résulte de l'article L3174-4 alinéas 1 et 2 du code du travail, que le fait d'avoir, à partir d'un décompte figurant sur des calendriers, agendas, feuilles diverses, récapitulé le montant des sommes qui lui étaient dues sur des tableaux Excel ne sauraient en aucun cas permettre au juge de considérer que ses demandes ne sont pas étayées, que s'agissant des prétendues « incohérences » entre la mention de ses horaires quotidiens sur son calendrier et le décompte récapitulatif établi pour la saison 2014, il s'agit simplement du décalage de la mention du mois dans la première colonne qui est sans aucune conséquence sur l'exactitude du décompte, que la société se contente de reprendre, semaine par semaine, ses horaires de travail,
- il ressort des pièces versées aux débats que ses journées de travail ont systématiquement excédé 11 heures au cours de la saison 2015, que ses semaines de travail dépassaient systématiquement la durée maximale absolue, que ce soit au titre de la saison 2014 ou de la saison 2015, qu'une telle durée de travail est source de préjudice puisqu'il ne bénéficiait pas d'un temps de repos suffisant que sa santé ne pouvait que s'en trouver atteinte,
- il travaillait pour des périodes supérieures à 45 jours et aurait dû bénéficier de visites médicales, que cela n'a jamais été le cas, qu'il s'agit donc d'un manquement supplémentaire de la société Philine à son obligation de sécurité de résultat, que compte tenu de ses conséquences possibles sur son état de santé, un tel manquement doit nécessairement être sanctionné.
Dans le dernier état de ses conclusions, la Selarl BRMJ dont il est n'est pas contesté qu'elle vient aux droits de Maître [I] [B], mandataire judiciaire, conclut à la confirmation partielle du jugement entrepris et demande à la cour de :
- réformer partiellement le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Orange du 07 mars 2019 en ce qu'il a :
- fixé au passif de la liquidation la créance de M. [T] [C] pour le mois de septembre 2015 salaire (heures de base, avantages en nature et indemnité compensatrice de congés payés en fin de contrat) à hauteur de 2 438,52 euros,
- dit que les dépens seront à la charge de la procédure collective,
- confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Orange du 07 mars 2019 pour le surplus,
Statuant à nouveau,
A titre principal,
- déclarer irrecevables les demandes de M. [T] [C] à l'encontre de Maître [I] [B], personne physique,
- débouter M. [T] [C] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,
- condamner M. [T] [C] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
À titre subsidiaire,
- ramener à de plus justes proportions les sommes fixées au passif de la société liquidée,
? pour la saison 2014 :
* 12 612,22 euros à titre de rappel de salaires et 1 261,22 euros au titre des congés payés y afférents pour la période erronée du 20 avril au 02 novembre 2014,
? pour la saison 2015 :
* 17 023,24 euros à titre de rappel de salaires et 1 702,32 euros au titre des congés payés y afférents pour la période du 22 avril au 20 septembre 2015,
* 2 438,52 euros bruts à titre de rappel de salaire pour le mois de septembre 2015,
* 5 000 euros de dommages-intérêts pour non-respect de la durée maximale quotidienne de travail pour la saison 2015,
? 1 000 euros de dommages-intérêts pour non-respect de l'organisation des visites médicales d'embauche.
Elle fait valoir que :
- que contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, peu importait que le mandataire ne justifie pas du paiement du salaire du mois de septembre 2015, qu'ils n'ont pas tenu compte du contexte particulier de la liquidation, qu'ils ont fait abstraction du fait que le mandataire liquidateur était le garant de l'ensemble des créanciers et que sa bonne foi était toujours présumée, qu'il ne faisait que respecter son rôle qui consistait à vérifier les créances admissibles, que dès lors, la réformation de ce chef de jugement s'impose,
- elle sollicite la confirmation des autres chefs de jugement en ce qu'il a débouté M. [T] [C] de ses demandes de rappel de salaires de base pour les périodes du 20 avril au 15 mai 2014 et du 1er octobre au 2 novembre 2014, puis du 22 avril au 30 avril 2015, que ses contrats de travail stipulent qu'il a travaillé du 15 mai au 30 septembre 2014 et du 1er mai 2015 au 20 septembre 2015 et que M. [C] ne justifie pas l'existence de relations de travail en dehors de ces périodes,
- elle sollicite la confirmation de la décision en ce qu'elle a débouté M. [T] [C] de ses demandes relatives à ses prétendues heures supplémentaires, que les éléments versés aux débats par le salarié, à savoir les prétendues copies de son agenda et des tableaux récapitulatifs de ses demandes de rappel de salaires se contredisent à tel point que sa demande n'était pas crédible,
- elle sollicite également la confirmation de la décision rendue par le conseil de prud'hommes en ce qu'elle a débouté M. [T] [C] de ses demandes indemnitaires pour de prétendus manquements de l'employeur, ne justifiant d'aucun préjudice,
- dans son courrier de novembre 2015, M. [T] [C] prétend qu'il n'aurait pas reçu le paiement de son salaire du mois de septembre 2015, que cette créance ne peut être démontrée par le seul courrier du 02 décembre 2015 de son employeur lui demandant de venir récupérer son solde de tout compte, qu'il ne justifie d'aucune prestation de travail et comme l'ont parfaitement relevé les conseillers prud'homaux, les relevés d'heures produits par le salarié à l'appui de ses demandes ne sont pas probants, que le solde de tout compte est un reçu établi par l'employeur dans lequel il fait l'inventaire des sommes qu'il a versées au salarié à l'occasion de la rupture du contrat et non une reconnaissance de dette ; enfin, dans son quantum également, la demande est incohérente, puisqu'il réclame 2 438,52 euros bruts, au titre du salaire de base, de l'avantage en nature et de l'indemnité compensatrice de congés payés en se fondant sur ses bulletins de salaire de mai à août 2015, que dans son quantum, la créance invoquée pour le salaire du mois de septembre 2015 ne saurait excéder 2 000,82 euros bruts, congés payés inclus,
- s'agissant des autres demandes, elles sont également infondées,
- M. [T] [C] ne justifie d'aucun préjudice résultant de l'absence de visites médicales.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens de parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.
Sur les demandes de rappel de salaire pour la période du 20 avril au 2 novembre 2014, congés payés correspondants et du 22 avril au 20 septembre 2015 et congés payés correspondants :
L'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait, dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs.
Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements et l'intégration dans un service organisé ; ainsi constitue un indice du lien de subordination lorsque les conditions de travail sont unilatéralement déterminées par le cocontractant.
C'est à la personne qui entend se prévaloir de l'existence d'un contrat de travail, d'en apporter la preuve.
En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées au dispositions légales et réglementaires ; après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celui-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures effectuées, l'employeur doit être en mesure de fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisées par le salarié dans la limite de la prescription quiquennale.
Le juge ne peut pour rejeter la demande se fonder exclusivement sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié et il doit examiner les preuve que l'employeur est tenu de lui fournir.
Sur la période du 20 avril au 02 novembre 2014 :
M. [T] [C] soutient d'une part, qu'il avait une relation de travail avec la société Philine dès le 20 avril 2014 tandis que le contrat de travail saisonnier a pris effet le 15 mai 2014 et que son terme était fixé au 30 septembre 2014, d'autre part, qu'il a effectué des heures supplémentaires sur la totalité de la période d'exécution du contrat de travail.
A l'appui de ses prétentions, M. [T] [C] produit aux débats :
- des photocopies d'un calendrier 2014 qu'il a lui-même renseigné pour les mois d'avril à novembre, sur lesquelles sont mentionnés les heures de début et de fin des périodes de travail pour chaque jour en distinguant les matinées et les soirées, et en indiquant les jours de repos,
- une attestation établie par M. [P] [G] qui se présente comme responsable de salle établie le 08 janvier 2016, et selon laquelle M. [T] [C] en qualité de chef de cuisine était présent de 8h à 15h et "ce chaque jour", qu'il reprenait "de 18h à minuit sans jamais tenir cas d'éventuelles contrainte horaires", que souvent il n'hésitait pas à rester pendant "la dite coupure", il a pu observer à plusieurs reprises sa conscience professionnelle et son ardeur au travail,
- un tableau récapitulatif des heures travaillées pour la saison 2014,
- un tableau établi par le salarié relatif aux "heures travaillées pour la saison 2014 au sein de la Sarl Philine" de mai à octobre 2014.
Les éléments produits par M. [T] [C] sont manifestement insuffisants pour établir la réalité d'une prestation de service et un lien de subordination avec la société Philine et caractériser l'existence d'une relation de travail en dehors des périodes prévues au contrat, l'attestation de M. [G] étant peu précise et non circonstanciée et les phococopies du calendrier 2014 que le salarié a renseigné n'étant corroborées par aucun autre élément, alors qu'il ressort de la lecture d'un courrier que le salarié a adressé au mandataire judiciaire le 1er novembre 2015, que cette difficulté financière n'avait pas été évoquée.
Il y a lieu dès lors de débouter M. [T] [C] de sa demande sur ce point.
S'agissant des heures supplémentaires, contrairement à ce que soutient M. [T] [C], les documents qu'il a produits sont insuffisamment précis pour déterminer le nombre d'heures réalisées durant l'exécution du contrat de travail, compte tenu des différences significatives du nombre d'heures travaillées mentionnées sur le calendrier et sur le tableau récapitulatif de la "saison 2014"; à titre d'exemple, pour le mois de mai, il existe une différence de près 30 heures travaillées, pour le mois de juin 32 heures, pour le mois de juillet près de 26 heures, 34 heures pour août et 14 heures pour le mois de septembre.
Il s'agit manifestement d'écarts horaires considérables qui rendent peu fiables les éléments ainsi apportés par le salarié et pour lesquels le salarié n'apporte pas d'explication convaincante.
C'est donc à bon droit que les premiers juges ont relevé l'imprécision, le manque de détail des horaires effectués et des pauses.
Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé sur ce point.
Sur la période du 22 avril au 20 septembre 2015 :
A l'appui de ses prétentions, M. [T] [C] produit aux débats :
- une photocopie d'un calendrier 2015 qu'il a renseigné de façon manuscrite sur lequel sont mentionnés le nom du restaurant l' "Avenir", les jours de repos et l'amplitude de travail pour chaque jour,
- un tableau récapitulatif du nombre d'heures travaillées par semaine pour la saison 2015,
- un tableau des heures travaillées mensuellement pour la saison 2015, de mai à septembre.
En premier lieu, il y a lieu de constater que M. [T] [C] n'apporte aucun élément de nature à démontrer la réalité d'une relation de travail avec la Sarl Philine en dehors de la période visée dans le contrat de travail saisonnier 2015.
Par ailleurs, s'agissant des heures supplémentaires, force est de constater, tout comme pour la saison 2014, que les différents documents produits par M. [T] [C] mettent en évidence des écarts importants du nombre d'heures travaillées pour cette période : 120 heures en mai, 8 heures en juin, 35 heures en juillet, 72 heures en août et 18 heures en septembre.
Il s'en déduit que ces documents sont insuffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre utilement.
En outre, comme le relèvent les premiers juges, M. [T] [C] produit des "copies identiques reproduites de son agenda...une écriture identique avec la même encre" laissant à penser que ces documents ont été établis pour les besoins de la cause.
C'est donc bon droit que le conseil de prud'hommes a débouté M. [T] [C] de ce chef de demande et le jugement entrepris sera en conséquence confirmé sur ce point.
Sur la demande de rappel de salaire - heure de base, avantage en nature et indemnité compensatrice de congés payés en fin de contrat - pour septembre 2015 :
Par courrier du 21 novembre 2015 adressé à la Sarl Philine, M. [T] [C] sollicitait le paiement du salaire de septembre 2015 soit la somme de 1 776,37 euros et le solde de tous comptes rappelant que le contrat de travail s'était terminé le 20 septembre.
La Selarl BRMJ ne rapporte pas la preuve que la somme de 2438,52 euros bruts mentionnée sur le bulletin de paiement de septembre 2015 qui inclut au salaire de base l'indemnité compensatrice de congés payés, les avantages nourriture et des heures supplémentaires, a été effectivement réglée, de sorte que c'est à bon droit que les premiers juges ont fait droit à la demande en paiement de M. [T] [C] de ce chef.
Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.
Sur la demande relative au non-respect de la durée maximale journalière de travail :
Pour les motifs exposés précédemment, il apparaît que M. [T] [C] n'apporte pas d'éléments suffisamment précis de nature à établir le nombre d'heures travaillées effectives pendant l'exécution de ses deux contrats de travail saisonnier, et qu'il n'est donc pas établi que l'employeur n'a pas respecté la durée maximale journalière de travail.
Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.
Sur la demande de dommages et intérêts résultant de l'absence de visite médicale :
En l'espèce, force est de constater que quand bien même la Selarl BRMJ ne conteste pas sérieusement l'absence de visite médicale pendant l'exécution des deux contrats de travail, M. [T] [C] ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un préjudice, évoquant seulement "des conséquences possibles sur" son état de santé, le conseil de prud'hommes rappelant par ailleurs que "ni ses fonctions, ni son âge et pas plus une fragilité propre ne permettent à eux seuls d'établir un tel préjudice".
Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce chef de demande.
Au vu de l'ensemble de ces considérations, il convient de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière prud'homale et en dernier ressort ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Orange du 07 mars 2019,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article au titre de l'article 700 du code de procédure civile du en cause d'appel,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Déclare le présent arrêt opposable au CGEA AGS de Toulouse,
Condamne M. [T] [C] aux dépens de la procédure d'appel.
Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame OLLMANN, Greffière.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
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CAPP/JURITEXT000046013782.xml |
R.G : No RG 21/02540 - No Portalis DBVH-V-B7F-IDGP
POLE SOCIAL DU TJ DE NIMES
12 mai 2021
RG:20/00522
MAISON DEPARTEMENTALE DE PERSONNES HANDICAPEES
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 21 JUIN 2022
APPELANT :
Monsieur [X] [U]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représenté par Me Wafae EZZAITAB, avocat au barreau de NIMES
MAISON DEPARTEMENTALE DE PERSONNES HANDICAPEES
[Adresse 1]
[Adresse 1]
non comparante, non représentée
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 945-1 du code de Procédure Civile, sans opposition des parties.
Elle en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
à l'audience publique du 05 Avril 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 14 Juin 2022 et prorogé ce jour ;
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 21 Juin 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :
M. [X] [U] a déposé auprès de la Maison départementale des personnes handicapées du [Localité 3] une demande d'allocation aux adultes handicapés et de complément de ressources réceptionnée le 13 septembre 2019.
Le 12 novembre 2019, la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées du [Localité 3] a décidé d'attribuer à M. [X] [U] l'allocation aux adultes handicapés pour la période du 1er octobre 2019 au 30 septembre 2022, de lui accorder la reconnaissance de travailleur handicapé, et de lui refuser l'attribution du complément de ressources au motif que son taux d'incapacité permanente partielle est inférieur à 80%.
M. [X] [U] a formé un recours administratif préalable obligatoire à l'encontre de cette décision auprès de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées qui a décidé le 11 mars 2020 de maintenir sa décision initiale.
M. [X] [U] a formé un recours contre cette décision devant le tribunal de grande instance de Nîmes, contentieux de la protection sociale, lequel, suivant jugement du 12 mai 2021 a :
- reçu le recours de M. [X] [U],
- l'a déclaré non fondé,
- confirmé la décision entreprise rendue le 10 mars 2020,
- constaté que M. [X] [U] ne remplit pas les conditions médicales lui permettant la fixation d'un taux d'incapacité de 80%,
- rejeté la demande d'attribution du complément de ressources,
- mis les dépens à la charge de la Maison départementale des personnes handicapées du [Localité 3].
Suivant courrier réceptionné le 28 juin 2021, M. [X] [U] a régulièrement interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 04 juin 2021.
L'affaire a été appellée à l'audience du 04 janvier 2022 puis renvoyée à celle du 05 avril 2022 à laquelle elle a été retenue.
Suivant conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l'audience, M. [X] [U] demande à la cour de :
- déclarer son appel formé à l'encontre du jugement du 12 mai 2021 recevable en la forme et justifié au fond,
- annuler la décision du 11 mars 2020 qui lui a refusé l'octroi de ressources complémentaires en raison de l'attribution d'un taux d'incapacité permanente partielle inférieur à 80%,
A titre principal,
- lui reconnaître un taux égal ou supérieur à 80%,
- lui accorder l'attribution de l'allocation aux adultes handicapés,
A titre subsidiaire, en cas de taux inférieur à 80%,
- lui octroyer l'allocation aux adultes handicapés en raison de restrictions importantes substantielles d'accès à l'emploi,
- condamner la partie adverse à la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.
Il fait valoir, au visa des articles D821-1-2 du code de la sécurité sociale, de l'article L821-2 du code de l'action sociale et des familles et du guide barème figurant à l'annexe 2-4 du code de l'action sociale et des familles, qu'au regard des certificats médicaux qui lui ont été transmis et de l'avis de l'expert, il justifie de l'existence de restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi.
La Maison départementale des personnes handicapées du [Localité 3] ne comparaît pas ni est représentée à l'audience du 05 avril 2022 bien que régulièrement convoquée conformément à l'article 937 du code de procédure civile, l'accusé de réception correspondant à la lettre de convocation supporte un tampon humide avec la mention "courrier arrivé le 6 JAN 2022 MDPH30".
Selon l'article L114 du code de l'action sociale et des familles, constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant.
Selon l'article L821-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable, issu de la loi No2016-1917 du 29 décembre 2016, toute personne résidant sur le territoire métropolitain (...) ayant dépassé l'âge d'ouverture du droit à l'allocation prévue à l'article L. 541-1 et dont l'incapacité permanente est au moins égale à un pourcentage fixé par décret perçoit, dans les conditions prévues au présent titre, une allocation aux adultes handicapés. (...)
Le droit à l'allocation aux adultes handicapés est ouvert lorsque la personne ne peut prétendre, au titre d'un régime de sécurité sociale, d'un régime de pension de retraite ou d'une législation particulière, à un avantage de vieillesse, à l'exclusion de l'allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l'article L. 815-1, ou d'invalidité, à l'exclusion de la prestation complémentaire pour recours à constante d'une tierce personne visée à l'article L. 355-1, ou à une rente d'accident du travail, à l'exclusion de la prestation complémentaire pour recours à tierce personne mentionnée à l'article L. 434-2, d'un montant au moins égal à cette allocation.
Lorsque cet avantage ou le montant mensuel perçu au titre de l'allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l'article L. 815-1 est d'un montant inférieur à celui de l'allocation aux adultes handicapés, celle-ci s'ajoute à la prestation sans que le total des deux avantages puisse excéder le montant de l'allocation aux adultes handicapés.(...)
Lorsque l'allocation aux adultes handicapés est versée en complément de la rémunération garantie visée à l'article L. 243-4 du code de l'action sociale et des familles, le cumul de cet avantage avec la rémunération garantie mentionnée ci-dessus est limité à des montants fixés par décret qui varient notamment selon que le bénéficiaire est marié ou vit maritalement ou est lié par un pacte civil de solidarité et a une ou plusieurs personnes à charge. Ces montants varient en fonction du salaire minimum de croissance prévu à l'article L. 141-4 du code du travail.
Selon l'article D821-1 le taux d'incapacité permamente partielle exigé pour l'attribution de l'allocation aux adultes handicapés est d'au moins 80%.
L'article L821-2 du même code poursuite: l'allocation aux adultes handicapés est également versée à toute personne qui remplit l'ensemble des conditions suivantes :
1o Son incapacité permanente, sans atteindre le pourcentage fixé par le décret prévu au premier alinéa de l'article L. 821-1, est supérieure ou égale à un pourcentage fixé par décret ;
2o La commission mentionnée à l'article L. 146-9 du code de l'action sociale et des familles lui reconnaît, compte tenu de son handicap, une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi, précisée par décret.
Le versement de l'allocation aux adultes handicapés au titre du présent article prend fin à l'âge auquel le bénéficiaire est réputé inapte au travail dans les conditions prévues au cinquième alinéa de l'article L. 821-1.
Le taux visé au 1o ci-dessus est fixé à 50% par l'article D821-1.
L'article D821-1-2 du même code, dans sa rédaction applicable à la date de la demande, précise les critères d'appréciation de la restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi : pour l'application des dispositions du 2o de l'article L821-2, la restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi subie par une personne handicapée qui demande à bénéficier de l'allocation aux adultes handicapés est appréciée ainsi qu'il suit :
1o La restriction est substantielle lorsque le demandeur rencontre, du fait de son handicap même, des difficultés importantes d'accès à l'emploi. A cet effet, sont à prendre en considération:
a) Les déficiences à l'origine du handicap ;
b) Les limitations d'activités résultant directement de ces mêmes déficiences ;
c) Les contraintes liées aux traitements et prises en charge thérapeutiques induits par le handicap ;
d) Les troubles qui peuvent aggraver ces déficiences et ces limitations d'activités.
Pour apprécier si les difficultés importantes d'accès à l'emploi sont liées au handicap, elles sont comparées à la situation d'une personne sans handicap qui présente par ailleurs les mêmes caractéristiques en matière d'accès à l'emploi.
2o La restriction pour l'accès à l'emploi est dépourvue d'un caractère substantiel lorsqu'elle peut être surmontée par le demandeur au regard :
a) Soit des réponses apportées aux besoins de compensation mentionnés à l'article L.114-1-1 du code de l'action sociale et des familles qui permettent de faciliter l'accès à l'emploi sans constituer des charges disproportionnées pour la personne handicapée ;
b) Soit des réponses susceptibles d'être apportées aux besoins d'aménagement du poste de travail de la personne handicapée par tout employeur au titre des obligations d'emploi des handicapés sans constituer pour lui des charges disproportionnées ;
c) Soit des potentialités d'adaptation dans le cadre d'une situation de travail.
3o La restriction est durable dès lors qu'elle est d'une durée prévisible d'au moins un an à compter du dépôt de la demande d'allocation aux adultes handicapés, même si la situation médicale du demandeur n'est pas stabilisée. La restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi est reconnue pour une durée de un à cinq ans.
4o Pour l'application du présent article, l'emploi auquel la personne handicapée pourrait accéder s'entend d'une activité professionnelle lui conférant les avantages reconnus aux travailleurs par la législation du travail et de la sécurité sociale.
5o Sont compatibles avec la reconnaissance d'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi :
a) L'activité à caractère professionnel exercée en milieu protégé par un demandeur admis au bénéfice de la rémunération garantie mentionnée à l'article L243-4 du code de l'action sociale et des familles ;
b) L'activité professionnelle en milieu ordinaire de travail pour une durée de travail inférieure à un mi-temps, dès lors que cette limitation du temps de travail résulte exclusivement des effets du handicap du demandeur ;
c) Le suivi d'une formation professionnelle spécifique ou de droit commun, y compris rémunérée, résultant ou non d'une décision d'orientation prise par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées mentionnée à l'article L. 241-5 du code de l'action sociale et des familles.
Il ressort du guide barème qu'un taux de 50% correspond à des troubles importants entraînant une gêne notable dans la vie sociale de la personne. L'entrave peut, soit être concrètement repérée dans la vie de la personne, soit compensée afin que cette vie sociale soit préservée, mais au prix d'efforts importants ou de la mobilisation d'une compensation spécifique. Toutefois, l'autonomie est conservée pour les actes élémentaires de la vie quotidienne.
Pour l'appréciation du caractère substantiel de la restriction de l'accès à l'emploi, doivent être prises en compte les déficiences à l'origine du handicap, les limitations d'activités en résultant directement, les contraintes liées au traitement et les troubles qui peuvent aggraver ces déficiences et ces limitations, le tout par comparaison à la situation d'une personne sans handicap qui présente, par ailleurs, les mêmes caractéristiques quant à l'accès à l'emploi; la restriction est dépourvue de caractère substantiel, lorsqu'elle peut être surmontée par le demandeur au regard de divers dispositifs d'accès à l'emploi, d'aménagement de poste.
L'emploi auquel peut prétendre le demandeur doit, pour l'application de ses dispositions, s'entendre d'une activité professionnelle qui lui confére les avantages reconnus aux travailleurs par la législation du travail et de la sécurité sociale ; la reconnaissance d'une restriction est compatible avec une activité professionnelle en milieu protégé, avec une activité professionnelle en milieu ordinaire pour une durée inférieure à un mi temps, ou avec une formation professionnelle.
En l'espèce, le Docteur [R] [M] conclut dans son rapport de consultation médicale de M. [X] [U] réalisé le 17 mars 2021, que le taux d'incapacité permanente partielle dont est atteint M. [X] [U] est inférieur à 80%, après avoir relevé ses doléances : accident de travail du 11 décembre 2018 à l'origine d'une plaie à la main gauche (section totale du fléchisseur superficiel et profond suturé, neurolyse des branches collatérales, pédicule collatéral cubital de l'auriculaire), et après avoir constaté : une cicatrice d'intervention de la main gauche, une opposition pouce/doigts possible, une flexion limitée du 5ème doit, un examen du rachis cervical impossible à réaliser en raison d'une contracture de vigilance, une distance doigts/sol de 25 cms, une rotation possible et pas de Lasègue.
A l'appui de ses prétentions, M. [X] [U] produit aux débats :
- un avis d'arrêt de travail initial du 11 décembre 2018 pour un accident de travail à l'origine d'une plaie à la main gauche, et un avis de prolongation du 09 mars 2019,
- un courrier de la Mutualité sociale agricole demandant à M. [X] [U] de produire des documents administratifs,
- un certificat médical du Docteur [L] [K] qui mentionne un compte rendu opératoire pour une intervention du 11 décembre 2018 se rapportant à une plaie importante de la main gauche : section totale du fléchisseur superficiel et profond, neurolyse des branches collatérales ; un certificat médical du même jour prescrivant 30 séances de rééducation, et le port d'une attelle statique,
- un courrier du Docteur [J] [W] qui indique que M. [X] [U] a été pris en charge pour la réalisation d'une arthrodèse inter phalangienne proximale du 5ème rayon de la main droite et qu'une neurolyse du nerf interdigital du 4ème rayon a été effectuée, que l'ensemble de ces lésions fait suite à une plaie de la main survenue en décembre 2018, qu'il présente des séquelles qui rendent impossibles toute activité professionnelle dans le secteur où il exerçait précédemment, qu'il présente des douleurs résiduelles ainsi qu'une raideur et une perte de mobilité,
- une Irm du rachis cervical du 16 novembre 2021 qui conclut à des discopathies C5/C6 et C6/C7 avec débords,
- un courrier du Docteur [J] [W] du 06 octobre 2021 selon lequel M. [X] [U] est "content du résultat au niveau de l'arthrodèse ...il présente toujours des douleurs de zone gâchette...est suivi pour des discopathies cervicales sans signe de gravité", et certifie que son état de santé ne permet pas d'envisager d'évolution chirurgicale,
- un courrier du professeur [A] rattaché au centre d'étude et du traitement de la douleur du 18 février 2022,
- une attestation de M. [I] [N] masseur kinésithérapeute relative à la mise en oeuvre d'une rééducation.
Les seules pièces contemporaines de la demande de M. [X] [U] auprès de la Maison départementale des personnes handicapées du [Localité 3] confortent la réalité d'un accident de travail survenu en décembre 2018, des arrêts de travail consécutifs à cet accident à l'origine d'une plaie importante à la main gauche pour laquelle une opération chirurgicale a été réalisée avec succès mais dont les douleurs sont toujours persistantes, et l'existence de discopathies, mais ne sont pas de nature à remettre sérieusement en cause les conclusions et les constatations médicales faites par le Docteur [M].
Si les séquelles, les limitations de mouvement de la main gauche et la persistance de douleurs constituent des troubles importants qui entraînent une gêne notable dans la vie sociale de M. [X] [U], cependant il apparaît manifeste que ce dernier a conservé une autonomie pour les actes élémentaires de la vie quotidienne.
Force est de constater que M. [X] [U] ne rapporte donc pas la preuve qu'il serait atteint d'un taux d'incapacité permanente partielle supérieur à 80%.
Par ailleurs, si les éléments produits par M. [X] [U] établissent qu'il ne peut plus exercer son ancienne activité professionnelle, ouvrier agricole, ils ne font pas cependant obstacle à ce qu'il puisse exercer une activité professionnelle dans un autre secteur économique, à défaut de justifier d'autres limitations d'activités que celles se rapportant à l'utilisation de sa main gauche, et bien qu'il soit gaucher.
Il s'en déduit que M. [X] [U] ne remplit pas les conditions pour bénéficier de l'allocation aux adultes handicapés et du complément de ressources.
Le jugement entrepris sera donc confirmé en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, en matière de sécurité sociale et en dernier ressort;
Confirme le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Nîmes, contentieux de la protection sociale, le 12 mai 2021,
Déboute M. [X] [U] de l'intégralité de ses prétentions,
Condamne M. [X] [U] aux dépens de la procédure d'appel.
Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame OLLMANN, Greffière.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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CAPP/JURITEXT000046013783.xml | COUR D'APPEL DE LYON
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE DU 20 Juin 2022
statuant en matière de soins psychiatriques
No RG 22/04456 - No Portalis DBVX-V-B7G-OLXW
Appel contre une décision rendue le 09 juin 2022 par le Juge des libertés et de la détention de Lyon.
APPELANTE :
Mme [Z] [G]
née le [Date naissance 2] 1968
de nationalité française
actuellement hospitalisée au centre hospitalier de [4]
comparante, assistée de Maître Brice DANDOIS, avocat au barreau de Lyon, commis d'office
M. LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER [4]
[Adresse 1]
[Localité 3]
non comparant, régulièrement convoqué, non représenté
Madame [M] [G], soeur et tiers demandeur à la mesure d'hospitalisation sous contrainte de [Z] [G], régulièrement avisée, n'est pas comparante et n'est pas représentée.
Le dossier a été préalablement communiqué au ministère public qui a fait valoir ses observations écrites.
Nous, Stéphanie ROBIN, conseiller à la cour d'appel de Lyon, désignée par ordonnance de monsieur le premier président de la cour d'appel de Lyon du 15 décembre 2021 pour statuer à l'occasion des procédures ouvertes en application des articles L.3211-12 et suivants du code de la santé publique, statuant contradictoirement et en dernier ressort,
Assistée de Manon CHINCHOLE, greffier, pendant les débats tenus en audience publique,
Ordonnance prononcée le 20 juin 2022 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signée par Stéphanie ROBIN, conseiller, et par Manon CHINCHOLE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
**********************
Par décision du 29 mai 2022, le directeur du centre hospitalier Le Vinatier a prononcé l'admission en soins psychiatriques sans consentement, sur la base d'un certificat médical constatant un péril imminent, conformément aux articles L 3211-2-2, L3212-1 et L 3212-3 et suivants du code de la santé publique, de : Mme [G] [Z], née le [Date naissance 2] 1968.
Par ordonnance du 31 mai 2022, elle a été admise en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète, à l'hôpital [4], par transfert du centre hospitalier le Vinatier.
Par décision du 1er juin 2022, le directeur du centre hospitalier [4] a prolongé la mesure de soins sous la forme d'une hospitalisation complète, pour une durée d'un mois et a fixé les modalités de prise en charge de Mme [G].
Par requête en date du 3 juin 2022, le directeur du centre hospitalier a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon, afin qu'il soit statué sur la poursuite de l'hospitalisation complète au-delà de 12 jours.
Par ordonnance rendue le 9 juin 2022, le juge des libertés et de la détention a autorisé le maintien en hospitalisation complète de Mme [G], sans son consentement, pour lui prodiguer des soins psychiatriques au-delà d'une durée de 12 jours.
Par courrier reçu au greffe de la cour d'appel le 16 juin 2022, Mme [G] a relevé appel de cette décision, en faisant valoir qu'elle contestait et ne comprenait pas cette mesure, faite à l'initiative de ses deux soeurs.
La procureure générale a conclu à la confirmation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention et au maintien de la mesure d'hospitalisation sous contrainte.
L'affaire a été évoquée lors de l'audience du 20 juin 2022.
À cette audience Mme [G] a comparu en personne, assistée de son avocat.
Il lui a été donné connaissance à l'audience du certificat de situation établi par le Dr [N] le 17 juin 2022 et des conclusions de la procureure générale, son avocat ayant eu transmission de ces différents documents préalablement.
Mme [G] fait état d'événements douloureux de son parcours de vie et indique qu'elle ne comprend pas l'attitude de sa soeur, la rendant responsable de son hospitalisation, alors que cette dernière ne s'est jamais réellement préoccupée de sa situation.
Elle réitère sa demande de main levée de la mesure d'hospitalisation. Elle confirme le harcèlement dont elle est victime de la part de ses voisins et reconnaît qu'elle s'alimente davantage à l'hôpital, mais vit mal d'être confrontée aux difficultés et pathologies des autres patients.
Maître Dandois, avocat de Mme [G], a été entendu en ses explications.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de l'appel
L'appel formé par Mme [G], parvenu au greffe de la cour dans les délais légaux, est recevable.
Sur la demande de main-levée de la mesure de soins psychiatriques
Il appartient au juge judiciaire, selon les dispositions de l'article L 3211-3 du code de la santé publique, de s'assurer que les restrictions à l'exercice des libertés individuelles du patient sont adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en oeuvre du traitement requis.
En l'espèce, Mme [G] a été admise en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète, dans le cadre d'une décompensation psychotique avec des propos délirants à thématique mystique. Il est fait état d'une agressivité de cette dernière, envers le voisinage, de propos autour de la sorcellerie et d'une anorexie depuis quelques semaines. A l'arrivée des pompiers, elle a refusé d'ouvrir la porte, tenant par la fenêtre des propos incohérents et au moment de l'intervention de la police, sollicitée pour pouvoir entrer au domicile, elle s'est montrée agressive, mordant un ambulancier.
Il est observé lors de son entrée à l'hôpital une instabilité psychomotrice, une tension interne importante et des propos délirants de persécution, avec hallucinations auditives (Elle explique ainsi que la police a mis des caméras, pour surveiller ce qui se passe chez elle, et elle entend la police la nuit, ce qui l'empêche de dormir). Elle a en outre évoqué cesser de s'alimenter pour ne pas manger d'aliments "ensorcelés". Elle est présentée dans le déni de ses troubles, ce qui rend impossible son consentement.
Le certificat médical des 24 heures, établi par le docteur [C], relève que Mme [G] présente un syndrome délirant, de mécanisme hallucinatoire, centré sur le voisinage. Elle est instable sur le plan psychomoteur et une hétéroagressivité est présente. Elle est dans le refus des soins.
Le certificat médical des 72 heures du docteur [B] du 1er juin 2022 mentionne une adhésion totale au discours délirant, avec un tableau psychotique, se compliquant depuis plusieurs semaines. Le déni des troubles est massif. Elle ne conçoit pas la nécessité de soins et ses capacités de jugement sont altérées.
La nécessité de la mesure est réitérée.
Le certificat médical avant l'audience devant le juge des libertés et de la détention confirme le délire de persécution, indiquant que "ses voisins voulaient la pousser au suicide, mais qu'ils n'y sont malheureusement pas arrivés". Elle est très amaigrie, mais mange de nouveau, depuis son arrivée à l'hôpital.
La mesure de soins contraints, sous la forme d'une hospitalisation complète, est décrite comme indispensable.
Le certificat de situation du docteur [N] du 17 juin 2022, réitère les difficultés croissantes de Mme [G] depuis 2013 et une accentuation ces dernières semaines, dans un contexte de persécution du voisinage, de refus d'alimentation pour ne pas s'empoisonner, ce qui a été à l'origine de lourdes conséquences sur son état physique.
Si Mme [G] commence à parler de son parcours et accepte un accompagnement social, elle manifeste toujours une opposition à la mesure de soins contraints, ce qui laisse craindre une rupture thérapeutique, qui ferait encourir un risque vital à la patiente.
Il est ainsi préconisé la poursuite de la mesure d'hospitalisation sous contrainte.
Il ressort de ces éléments que Mme [G] présente une souffrance psychique importante, son état s'étant dégradé ces dernières semaines. Les propos délirants et de persécution l'ont conduite à ne plus s'alimenter, de sorte qu'un risque pour elle-même est prégnant. Elle se montre encore dans une forte ambivalence à l'égard des soins, ne comprenant pas le motif de son hospitalisation. Ainsi, le risque d'arrêt des soins, dans un autre contexte que celui de l'hospitalisation complète, n'est pas hypothétique.
A ce jour, La fragilité de l'adhésion aux soins, les troubles et risques pour la santé même de Mme [G] et la nécessité de soins rendent encore indispensable la mesure actuelle.
Il résulte de ces différentes considérations que le maintien de Mme [G] dans le dispositif d'hospitalisation psychiatrique sans consentement, sous la forme d'une hospitalisation complète, est justifié, cette mesure s'avérant en outre proportionnée à son état mental au sens de l'article L 3211-3 du code de la santé publique.
Il convient en conséquence de confirmer la décision du juge des libertés et de la détention.
PAR CES MOTIFS
Déclarons l'appel recevable,
Confirmons l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions,
Laissons les dépens d'appel à la charge du Trésor Public.
Le greffier, Le conseiller délégué,
|
CAPP/JURITEXT000046013797.xml | Copies exécutoires délivrées aux parties le :
Copies certifiées conformes délivrées aux parties le :
République française
Au nom du Peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 9 - B
ARRET DU 23 Juin 2022
(no 116 , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S No RG 19/00361 - No Portalis 35L7-V-B7D-CBC46
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Août 2019 par le tribunal judiciaire de Paris RG no 11-18-214988
EPIC [Localité 12] HABITAT - OPH
[Adresse 2]
[Localité 5]
représentée par Me Sébastien MENDES GIL de la SELARL CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de [Localité 12], toque : P0173
Madame [J] [I] (débitrice)
[Adresse 11]
[Adresse 9]
[Localité 6]
comparante en personne, assistée de Me Nathalie ALLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0271
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro du 23/02/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
CAF DE [Localité 12] (7781008 INN; 778 1008 D15)
[Adresse 1]
[Localité 7]
non comparante
DIRECT ENERGIE (0103626828)
POLE SOLIDARITE
TSA 21 636
[Localité 8]
non comparante
ENGIE CHEZ INTRUM JUSTITIA (8079014170)
POLE SURENDETTEMENT
[Adresse 10]
[Localité 4]
non comparante
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Mai 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laurence ARBELLOT conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Christophe BACONNIER, président
Mme Laurence ARBELLOT, conseillère
Mme Fabienne TROUILLER, conseillère
Greffière : Mme Alexandra AUBERT, lors des débats
- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Christophe BACONNIER, président et par Mme Alexandra AUBERT, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Mme [J] [I] a saisi la commission de surendettement des particuliers de Paris qui a, le 14 juin 2018, déclaré sa demande recevable.
Le 20 août 2018, la commission a préconisé une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire au bénéfice de Mme [I].
Cette recommandation a été notifiée le 23 août 2018 à la société [Localité 12] Habitat OPH, qui l'a contestée le 7 septembre 2018 en invoquant la mauvaise foi de la débitrice qui n'aurait effectué aucun versement au titre de loyer depuis le mois de novembre 2017 et qui hébergerait sa fille rémunérée à hauteur de 1 500 euros par mois.
Par jugement réputé contradictoire du 26 août 2019, le tribunal d'instance de Paris a :
- déclaré recevable le recours de la société [Localité 12] Habitat OPH,
- constaté que les conditions de recevabilité de la demande étaient réunies au regard de la bonne foi ainsi que de l'impossibilité à faire face à l'ensemble de ses dettes exigibles ou à échoir,
- constaté le caractère irrémédiablement compromis de la situation de Mme [I], ainsi que l'absence d'actif,
- prononcé le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire au bénéfice de l'intéressé,
- rejeté en conséquence le recours formé par la société [Localité 12] Habitat OPH.
La juridiction a estimé que les ressources de Mme [I] s'élevaient à la somme de 1 170 euros par mois, ses charges à la somme de 1 321 euros et qu'elle ne disposait d'aucune une capacité de remboursement, ni d'aucun patrimoine permettant de désintéresser les créanciers. Le tribunal a considéré que sa bonne foi n'était pas remise en cause.
Le jugement a été notifié à la société [Localité 12] Habitat OPH le 28 août 2019.
Par déclaration adressée le 9 septembre 2019 au greffe de la cour d'appel Paris, la société [Localité 12] Habitat OPH a interjeté appel du jugement.
Les parties ont été convoquées à l'audience du 17 mai 2022.
Le conseil de [Localité 12] Habitat OPH aux termes d'écritures visées par le greffier et soutenues oralement sollicite d'être déclaré recevable et bien fondé en ses demandes, de voir infirmer le jugement et statuant à nouveau, de dire et juger que Mme [I] doit être déchue du bénéfice de la procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire en raison de l'absence de bonne foi.
A titre subsidiaire, il sollicite de voir réexaminer la situation de l'intéressée et d'ordonner le renvoi vers une procédure ordinaire.
Il sollicite une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre la prise en charge des dépens par l'intimée.
[Localité 12] Habitat OPH fait remarquer que l'endettement n'a fait que s'aggraver, que Mme [I] n'a pris aucune mesure permettant de limiter cette aggravation puisqu'elle n'a plus réglé les loyers dus à son bailleur depuis le mois de novembre 2017 et que la dette locative relative à son ancien logement a augmenté pour atteindre 14 943,71 euros au mois d'octobre 2020. Il ajoute qu'une nouvelle dette locative est apparue au titre du nouveau logement occupé au [Adresse 9] à hauteur de 2 279,04 euros au 14 décembre 2021. Il indique que Mme [I] est en situation d'impayés de manière récurrente depuis de nombreuses années et en dépit des mécanismes mis en oeuvre pour l'aider (FSL notamment) et qu'il s'agit du quatrième dossier de surendettement depuis 2012.
Il doute de sa bonne foi faisant observer qu'elle a été relogée dans un T3 au loyer de 382 euros en ne précisant pas si elle vivait avec sa fille alors qu'elle devrait s'orienter vers un logement de type T1 ou T2 mieux adapté à sa situation. Il estime que c'est de manière infondée que le tribunal a jugé qu'elle ne disposait pas de capacité de remboursement.
Le conseil de Mme [I] aux termes d'écritures visées par le greffier et développées à l'audience sollicite de la cour de s'assurer de la recevabilité de l'appel de [Localité 12] Habitat, de débouter l'appelante de ses demandes et de confirmer le jugement querellé. Il sollicite que soit constaté la bonne foi de Mme [I], de voir déclaré sa demande de surendettement recevable et de dire et juger sa situation irrémédiablement compromise avec le prononcé d'une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.
Il fait valoir que la dette vis à vis d'EDF est en voie de règlement. Il précise que Mme [I] est âgée de 51 ans, sans activité depuis 2016 sauf un emploi précaire en 2020 et qu'elle ne dispose d'aucune perspective de reclassement. Il ajoute qu'elle a été relogée dans 41 mètres carrés et qu'elle n'héberge pas sa fille de sorte qu'il ne faut pas prendre en compte la somme de 400 euros versée par sa fille comme l'a fait le premier juge. Il ajoute que les ressources de l'intéressée ont diminué, qu'il y a une différence de loyer de 100 euros et que les factures d'énergie sont élevées car le logement est mal isolé.
Les autres créanciers n'ont pas comparu.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il convient d'indiquer à titre liminaire que l'appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile. La procédure applicable devant la cour d'appel est donc la procédure orale de droit commun dans laquelle la prise en considération des écrits d'une partie par la cour est subordonnée à l'indication orale à l'audience par cette partie ou son représentant qu'elle se réfère à ses écritures. Dès lors, la cour ne peut prendre en compte les demandes ou observations présentées par écrit par les parties non comparantes.
Sur la recevabilité de l'appel
En application des articles R.713-7 du code de la consommation et 932 du code de procédure civile, l'appel est formé par une déclaration que la partie ou tout mandataire adresse par pli recommandé au greffe de la cour dans les quinze jours de la notification du jugement. La date de notification est celle de la signature de l'avis de réception. La notification mentionne les voies et délais de recours.
En l'espèce, il résulte du dossier que le courrier de notification du jugement a été réceptionné par [Localité 12] Habitat OPH le 28 août 2019 et que ce dernier a formé appel par déclaration adressée à la cour d'appel de [Localité 12] par pli recommandé du 9 septembre 2019.
Il en résulte que l'appel a bien été formé en les formes requises et dans le délai de quinze jours fixé par les textes susvisés de sorte qu'il doit être déclaré recevable.
Sur la recevabilité du recours
En l'absence de tout élément de nature à contredire le jugement sur ce point, la décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a déclaré recevable le recours.
Sur le moyen tiré de la mauvaise foi
Il résulte de l'article L.711-1 du code de la consommation que la recevabilité de la demande de traitement de la situation de surendettement est subordonnée à la bonne foi du débiteur, conçue comme une absence de mauvaise foi. Il convient de rappeler que la bonne foi est présumée et qu'il appartient au créancier d'apporter la preuve de la mauvaise foi du débiteur. La simple imprudence ou imprévoyance n'est pas constitutive de mauvaise foi. De même, la négligence du débiteur ne suffit pas à caractériser la mauvaise foi en l'absence de conscience de créer ou d'aggraver l'endettement en fraude des droits des créanciers. Les faits constitutifs de mauvaise foi doivent de surcroît être en rapport direct avec la situation de surendettement.
Le débiteur doit donc être de bonne foi pendant la phase d'endettement mais aussi au moment où il saisit la commission de surendettement, ce qui implique sa sincérité, et tout au long du déroulement de la procédure.
En application de l'article L.761-1 du code de la consommation, la mauvaise foi procédurale est également sanctionnée en ce qu'est déchue du bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement toute personne :
1o ayant sciemment fait de fausses déclarations ou remis des documents inexacts,
2o ayant détourné ou dissimulé, ou tenté de détourner ou de dissimuler, tout ou partie de ses biens,
3o ayant, sans l'accord de ses créanciers, de la commission ou du juge, aggravé son endettement en souscrivant de nouveaux emprunts ou ayant procédé à des actes de disposition de son patrimoine pendant le déroulement de la procédure de traitement de la situation de surendettement ou de rétablissement personnel, ou pendant l'exécution du plan ou des mesures de traitement.
En l'espèce, le premier juge a constaté que l'endettement de Mme [I] était constitué d'une dette locative fixée à hauteur de 3 296,18 euros au moment de la recevabilité du dossier puis à 8 766,08 euros, d'une créance auprès de Direct Energie à hauteur de 1 788,18 euros, d'une créance auprès d'Engie à hauteur de 5 euros, et d'une créance auprès de la Caisse d'allocations familiales pour 575,36 euros soit une somme totale de 11 134,62 euros.
Il a également constaté que Mme [I] reconnaissait ne plus avoir honoré ses loyers depuis le mois de novembre 2017 ayant formé à l'époque une demande de relogement pour un appartement plus petit n'ayant pas encore abouti.
[Localité 12] Habitat OPH justifie que la dette locative pour le logement du [Adresse 3] s'élève à la somme de 14 943,71 euros au selon relevé au 14 décembre 2021 incluant le loyer du mois d'octobre 2020 date de sortie du logement. Ce relevé atteste que la locataire a effectué des versements très sporadiques, aggravant sa dette locative depuis le moment du dépôt de son dossier de surendettement le 7 mai 2018.
[Localité 12] Habitat OPH justifie également que Mme [I] qui a été relogée au [Adresse 9] dans un appartement plus petit, n'honore que très irrégulièrement son loyer fixé à 364,63 euros sous déduction de l'aide au logement soit un reliquat mensuel à payer de 126,99 euros comprenant les charges, de sorte que la dette locative s'élève à la somme de 2 279,04 euros loyer de novembre 2021 inclus. Le fait que Mme [I] fasse état d'une mauvaise isolation du logement occupé et justifie avoir formé une nouvelle demande de relogement est inopérant alors que [Localité 12] Habitat OPH démontre avoir fait constater la conformité du logement aux normes au regard du détalonnage des portes et de la propreté des bouches de ventilation.
Mme [I] justifie percevoir une somme mensuelle comprise entre 473 et 524 euros au titre de l'ASS et 260,32 euros d'aide au logement versée directement au bailleur (attestation pôle emploi du 15 mars 2022 et du 6 avril 2022, avis d'impôt sur le revenu 2021, attestation de paiement CAF du 6 avril 2022) soit une somme ne dépassant pas 784 euros par mois. Il n'est pas démontré qu'elle vive avec sa fille ni que cette dernière lui verse une quelconque contribution aux charges de sorte qu'il n'y a pas lieu à retenir la somme de 400 euros mensuelle comme l'a fait le premier juge.
Le montant des charges fixé à 1 321 euros par mois par le premier juge n'est pas contesté au vu des pièces justificatives communiquées par Mme [I].
Au vu de ces éléments, Mme [I] ne dispose donc d'aucune capacité de remboursement ni d'aucun patrimoine susceptible de désintéresser ses créanciers et démontre faire face à de réelles difficultés financières depuis 2016, date de son licenciement, l'empêchant d'honorer sa dette locative sans que sa bonne foi ne soit remise en cause par les éléments produits aux débats.
L'ensemble de ces éléments ne permet pas dire que le comportement de Mme [I] serait à l'origine de l'aggravation de son endettement et de caractériser sa mauvaise foi de sorte que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a déclaré l'intéressée recevable au bénéfice de la procédure de surendettement.
Sur le bien-fondé de la procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire
En vertu des dispositions de l'article L.724-1 du code de la consommation, le débiteur qui se trouve dans une situation irrémédiablement compromise, caractérisée par l'impossibilité manifeste de mettre en oeuvre les mesures de traitement prévues par les articles L.732-1, L.733-1, L.733-7 et L.733-8 du même code, est éligible à la procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire s'il est constaté qu'il ne possède que des biens meublants nécessaires à la vie courante et des biens non professionnels indispensables à l'exercice de son activité professionnelle ou que l'actif est constitué de biens dépourvus de valeur marchande ou dont les frais de vente seraient manifestement disproportionnés au regard de leur valeur vénale.
Mme [I] ne communique aux débats aucun élément actualisé sur sa situation au regard de l'emploi et au regard de son état de santé alors qu'elle soutient être dans l'impossibilité de travailler. Elle ne démontre pas non plus effectuer des démarches en vue de retrouver un emploi ou de suivre une formation alors qu'elle est âgée de 56 ans.
Il s'en suit qu'il n'est pas démontré en quoi la situation de Mme [I] serait irrémédiablement compromise.
Il convient donc d'infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire et de renvoyer le dossier à la commission de surendettement des particuliers de Paris afin de prendre en compte la situation de Mme [I].
L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, en dernier ressort, par arrêt réputé contradictoire et par mise à disposition au greffe,
Déclare l'appel recevable,
Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a déclaré recevable le recours de [Localité 12] Habitat OPH et déclaré Mme [J] [I] recevable au bénéfice de la procédure de surendettement,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire e
Renvoie le dossier à la commission de surendettement des particuliers de Paris,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que chaque partie supportera les éventuels dépens d'appel qu'elle a exposés,
Dit que l'arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement et aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT
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CAPP/JURITEXT000046013799.xml | MINUTE No 22/564
NOTIFICATION :
Copie aux parties
Clause exécutoire aux :
- parties non représentées
Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB
ARRET DU 23 Juin 2022
Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB No RG 20/03063 -
No DBVW-V-B7E-HNJH
Décision déférée à la Cour : 14 Octobre 2020 par le Tribunal Judiciaire de STRASBOURG
APPELANTE :
S.A.S. SUP INTERIM 68,
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Michaël RUIMY, avocat au barreau de LYON, substitué par Me PUTANIER, avocat au barreau de LYON
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU HAUT-RHIN
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Comparante en la personne de Mme [Z] [L], munie d'un pouvoir
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Mars 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme ARNOUX, Conseiller, chargée d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre
Mme ARNOUX, Conseiller
Mme HERY, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre
- signé par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre, et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
M. [T] [F], né le [Date naissance 1] 1967, salarié de la SAS Sup Interim, a été victime d'un accident de travail le 22 avril 2017. Son état de santé a été déclaré consolidé le 31 janvier 2018 et son taux d'incapacité permanente partielle (IPP) a été fixé à 15% à compter du 1er février 2018.
Suite à la notification de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Haut-Rhin en date du 14 mars 2018, la société Sup Interim a contesté le taux devant le tribunal du contentieux de l'incapacité (TCI) de Strasbourg.
Le tribunal judiciaire de Strasbourg, remplaçant le TCI, a ordonné une consultation médicale par le Professeur [V], lequel a rendu son rapport daté du 6 mai 2020 et a conclu qu'un taux d'IPP de 15% était justifié.
Suivant jugement en date du 14 octobre 2020, le tribunal judiciaire de Strasbourg a :
- débouté la SAS Sup Interim de toutes ses demandes,
- déclaré opposable à la SAS Sup Interim la décision de la CPAM du Haut-Rhin du 14 mars 2018 fixant le taux d'incapacité permanente à 15% à compter du 1er février 2018,
- condamné la SAS Sup Interim à payer à la CPAM du Haut-Rhin la somme de 100 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté toute demande plus ample ou contraire,
- condamné la SAS Sup Interim aux dépens.
La SAS Sup Interim a interjeté appel du jugement le 21 octobre 2020.
L'affaire a été fixée à l'audience du 17 mars 2022.
La SAS Sup Interim 68 reprend oralement ses conclusions visées le 22 mars 2021 aux termes desquelles elle demande à la cour d'infirmer le jugement du 14 octobre 2020 et :
- à titre principal de ramener le taux médical attribué à M. [F] dans les rapports CPAM/Employeur à 5%,
- à titre subsidiaire de constater qu'il existe une difficulté d'ordre médical, de désigner un expert qui devra se prononcer sur les séquelles faisant suite à l'accident du travail du 22 avril 2017 et le taux attribué à M. [F] et de juger que les frais de la consultation médicale seront entièrement mis à la charge de la CPAM.
La caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin reprend oralement ses conclusions visées le 25 juin 2021 aux termes desquelles elle demande de confirmer le jugement en date du 14 octobre 2020 et de rejeter l'ensemble des demandes de la partie adverse.
Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux dernières conclusions précédemment visées en application de l'article 455 du code de procédure civile.
Interjeté dans les forme et délai légaux, l'appel est recevable.
Aux termes de l'article L434-2, alinéa premier, du code de la sécurité sociale, le taux de l'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité.
L'article R434-31 du même code dispose en son dernier alinéa que le médecin conseil exprime dans un rapport son avis, au vu de ses constatations et de l'ensemble des éléments d'appréciation figurant au dossier.
Il est constant que le taux d'incapacité s'apprécie au regard des séquelles imputables à l'accident du travail constatées à la date de la consolidation.
Il appartient au médecin chargé de l'évaluation d'adapter en fonction de l'état général, le taux résultant de la nature de l'infirmité. L'estimation médicale de l'incapacité doit faire la part de ce qui revient à l'état antérieur, et de ce qui revient à l'accident, les séquelles rattachables à ce dernier étant seules en principe indemnisables.
En l'espèce, le médecin conseil a fixé le taux d'IPP à 15% en retenant les séquelles suivantes consécutives à l'accident : « Limitation des mouvements de l'articulation, raideur lombaire réelle au Schober Lasserre, réduction de différence au-dessous de 5cm. Persistance de douleurs et de gêne fonctionnelle à 6 mois de l'intervention chirurgicale ».
Il résulte du rapport de consultation médicale en date du 6 mai 2020 fait sur pièces par le Professeur E. [V] que « l'accident du travail du 22 avril 2017 consiste en une chute alors que la victime descendait du camion, ce dernier a glissé sur une marche et est tombé au sol. Il a présenté dans les suites un lumbago.
Il a été mis en évidence une hernie discale L5-S1 gauche, qui a bénéficié dans un premier temps d'un traitement médical puis d'un geste chirurgical.
Lorsque le patient est vu en date du 29/01/2018 par le Praticien Conseil, il est fait état de douleurs au niveau de la jambe droite, irradiant à partir du bassin dans toute la jambe droite jusqu'au niveau du genou. L'intensité semble importante aux dires du patient.
Le patient présente des difficultés à mettre ses chaussures, à mettre son pantalon, à enfiler ses chaussettes.
Il existe une limitation des amplitudes articulaires avec un Lasègue à 60o à droite, une absence de Babinski. Les réflexes ostéo-tendineux rotuliens sont faibles à droite et également le réflexe ostéo-tendineux achilléen.
Il n'y pas de trouble urinaire. L'indice de Schober est à 10+3.
Au regard de ces éléments, en rapport avec le barème, il me semble que le taux d'incapacité de 15% est justifié.
Il existe en effet des limitations des mouvements du rachis, une raideur lombaire réelle au test de Schober, un signe de Lasègue avec une différence de 5cm au Schober.
Il existe également des douleurs gênantes et un retentissement sur les gestes de la vie quotidienne ».
Au soutien de son appel, la société Sup Interim se réfère aux observations de son médecin conseil le docteur [N] [B] en date du 15 juin 2020, celui-ci renvoyant à son avis du 2 mars 2020 proposant de retenir un taux d'IPP de 5% justifié par « des séquelles légères d'une intervention pour hernie discale latéralisée à gauche sur état antérieur connu et symptomatique ».
Elle fait en effet valoir que le 15 juin 2020, le docteur [N] [B] a présenté les observations suivantes suite au rapport du Professeur [V] :
« Le Dr [V] ne tient pas compte de l'état antérieur non traumatique. Le médecin conseil note en effet que le salarié avait déjà mal au dos avant l'accident et que l'intervention du 19 juin 2017 (avec hospitalisation de 8 jours, bien supérieure à celle nécessité par le traitement d'une simple hernie discale) a comporté un recalibrage lombaire, traitement chirurgical du canal lombaire étroit.
Le médecin conseil avait noté un Lasègue neurologique à 60o à droite [?] Le rapport du médecin conseil évoque par ailleurs un Schobert à +3cm qui devient à +5 cm dans la conclusion du Dr [V]. [?]
L'AT du 22 avril 2017 a été responsable d'un « lumbago » puis « une hernie discale L5-S1 » latéralisée à gauche a été objectivée le 11 mai 2017. Le dossier ne comporte pas de notification d'imputabilité à l'accident de cette nouvelle lésion, dont les séquelles ne devraient donc pas être prises en compte pour l'évaluation du taux.
En tout état de cause, cette hernie était latéralisée à gauche, alors que les signes séquellaires retenus par le médecin conseil et le Dr [V] sont latéralisés à droite, ce qui est incohérent, et non expliqué par le Dr [V], qui ne motive donc pas son avis.
Rappelons qu'un canal lombaire étroit entraîne des douleurs neurologiques mal systématisées ».
Comme l'ont dit les premiers juges, l'avis du médecin consultant est clair, précis et circonstancié ; il est en outre en concordance avec les conclusions du service médical de la caisse quant aux séquelles imputables à l'accident et se réfère au barème indicatif d'invalidité pour proposer de fixer, comme le médecin conseil, à 15% le taux d'IPP.
Etant observé que l'accident du travail est à l'origine des « lombalgies » dans la suite desquelles la hernie discale a été révélée et M. [F] opéré, que même si l'assuré avait déjà mal au dos auparavant c'est l'accident du 22 avril 2017 qui a entraîné une « raideur lombaire réelle au Schober Lasserre » -médecin conseil et médecin consultant s'accordant sur une « réduction de différence au-dessous de 5cm » (attestant d'une raideur lombaire réelle cf III Rachis cervical §3.2 du barème), que la hernie discale a été reconnue imputable à l'accident du travail, il y a lieu, au vu des éléments médicaux produits, d'approuver les premiers juges qui ont fixé à 15% le taux d'IPP de M. [T] [F], ce qui commande la confirmation du jugement et le rejet de la demande présentée à titre subsidiaire par la société Sup Interim, la cour disposant de tous les éléments pour statuer.
Succombant dans le cadre de la présente procédure, la SAS Sup Interim sera condamnée aux dépens d'appel.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné la SAS Sup Interim aux dépens de première instance et au versement à la CPAM du Haut-Rhin d'une somme de 100€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la Loi,
DÉCLARE l'appel interjeté recevable ;
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
y ajoutant
REJETTE la demande d'expertise sollicitée à titre subsidiaire par la SAS Sup Interim ;
CONDAMNE la SAS Sup Interim aux dépens de la procédure d'appel.
Le Greffier,Le Président,
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CAPP/JURITEXT000046013798.xml | Copies exécutoires délivrées aux parties le :
Copies certifiées conformes délivrées aux parties le :
République française
Au nom du Peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 9 - B
ARRET DU 23 Juin 2022
(no 119 , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S No RG 20/00165 - No Portalis 35L7-V-B7E-CB5LE
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Juin 2020 par le tribunal judiciaire de BOBIGNY RG no 11-18-002840
Monsieur [J] [B] (débiteur)
[Adresse 6]
[Adresse 1]
[Localité 5]
représenté par Me Amele FAOUSSI, avocat au barreau de PARIS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/020499 du 04/09/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
Madame [L] [W] [N] (sociétés BESKOPE TAILOR et RETOUCHE MODE)
[Adresse 3]
[Localité 4]
comparante en personne
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Mai 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laurence ARBELLOT conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Christophe BACONNIER, président
Mme Laurence ARBELLOT, conseillère
Mme Fabienne TROUILLER, conseillère
Greffière : Mme Alexandra AUBERT, lors des débats
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Christophe BACONNIER, président et par Mme Alexandra AUBERT, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [J] [B] a saisi la commission de surendettement des particuliers de Seine-Saint-Denis le 7 mars 2017.
Statuant sur un recours formé contre la décision de recevabilité de la commission de surendettement, le juge du tribunal d'instance de Bobigny a, par jugement du 22 juin 2018, déclaré M. [B] recevable en sa demande de traitement de sa situation de surendettement.
Le 5 novembre 2018, la commission a préconisé une mesure de suspension de l'exigibilité des créances pendant 24 mois sous réserve de vente du bien immobilier appartenant au requérant.
Le 4 décembre 2018, M. [B] a contesté cette mesure au motif que la vente de son bien immobilier qui constitue sa résidence familiale principale, mettrait sa famille dans une situation délicate en ce que ses revenus ne lui permettraient pas de régler un loyer.
Par jugement contradictoire du 3 juin 2020, le tribunal judiciaire de Bobigny a prononcé la suspension de l'exigibilité des créances de M. [B] pendant une durée de 12 mois et a subordonné la mesure à la mise en vente de son appartement situé [Adresse 2].
Cette décision a été notifiée le 19 juin 2020 à M. [B].
Par déclaration remise par RPVA le 24 juin 2020, M. [B] a interjeté appel du jugement.
Les parties ont été convoquées à l'audience du 17 mai 2022.
Aux termes d'écritures visées par le greffier et développées oralement, le conseil de M. [B] sollicite de voir infirmer partiellement le jugement et de la confirmer pour le surplus, de voir autoriser M. [B] à conserver son bien immobilier et de dire que son passif sera apuré par échéance mensuelles dans la limite du délai légal et de voir fixer les mesures recommandées. Il sollicite le débouté de la demande formée par Mme [N] au titre des frais et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le conseil de M. [B] soutient que son appel est recevable au regard du délai de recours et fait observer qu'une demande d'aide juridictionnelle a été déposée le 25 juin 2020 soit dans le délai de recours et que la décision d'octroi de l'aide juridictionnelle est datée du 4 septembre 2020.
Il précise que son endettement est constitué d'une dette de loyer commercial vis à vis de Mme [N] fixée à 16 648,13 euros outre intérêts au taux légal et la somme de 6 765,68 euros soit 23 413,81 euros.
Il fait valoir que le bien immobilier appartient également à son épouse et qu'il s'agit d'un bien commun de sorte que le premier juge ne pouvait ordonner une vente de ce bien. Il conteste la valeur du bien d'un montant de 89 000 euros retenue par le premier juge. Il indique être bénéficiaire des minimas sociaux.
Mme [N], présente en personne, unique créancière de M. [B], n'a pas d'observation à formuler concernant la recevabilité de l'appel. Elle fait remarquer qu'aucun élément ne permet de dire que le bien immobilier serait commun, qu'il n'est justifié d'aucune démarche en vue de vendre ce bien et qu'elle souhaite pouvoir être payée. Elle sollicite confirmation de la décision querellée et la condamnation de M. [B] à lui verser la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile correspondant aux frais de recommandés exposés par elle.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il convient d'indiquer à titre liminaire que l'appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile. La procédure applicable devant la cour d'appel est donc la procédure orale de droit commun dans laquelle la prise en considération des écrits d'une partie par la cour est subordonnée à l'indication orale à l'audience par cette partie ou son représentant qu'elle se réfère à ses écritures. Dès lors, la cour ne peut prendre en compte les demandes ou observations présentées par écrit par les parties non comparantes.
Sur la recevabilité de l'appel
En application des articles R.713-7 du code de la consommation et 932 du code de procédure civile, l'appel est formé par une déclaration que la partie ou tout mandataire adresse par pli recommandé au greffe de la cour dans les quinze jours de la notification du jugement. La date de notification est celle de la signature de l'avis de réception. La notification mentionne les voies et délais de recours.
En l'espèce, il résulte du dossier que le courrier de notification du jugement a été réceptionné par M. [B] le 19 juin 2020 et que ce dernier a formé appel par le biais de son avocat par déclaration remise le 24 juin 2020.
Il en résulte que l'appel a bien été formé dans le délai de quinze jours fixé par les textes susvisés de sorte qu'il doit être déclaré recevable.
Sur la recevabilité au regard de la procédure de surendettement
La recevabilité du recours n'est pas contestée de sorte qu'il n'y pas lieu de statuer spécifiquement sur ce point.
La bonne foi de M. [B] n'est pas contestée et n'est pas susceptible d'être remise cause au vu des éléments dont la cour dispose. Il n'y a donc pas lieu de statuer spécialement sur ce point.
Sur les mesures
Aux termes de l'article L.733-1 du code de la consommation, la commission de surendettement, en cas d'échec de la conciliation, et après avoir mis les parties en mesure de fournir leurs observations, imposer un rééchelonnement du paiement des dettes du débiteur concerné.
Selon l'article L.733-3 du même code, la durée des mesures n'excède pas sept années sauf lorsque les mesures concernent le remboursement de prêts contractés pour l'achat d'un bien immobilier constituant la résidence principale du débiteur dont elles permettent d'éviter la cession ou lorsqu'elles permettent au débiteur de rembourser la totalité de ses dettes tout en évitant la cession du bien immobilier constituant sa résidence principale.
Aux termes de l'article R. 731-1 du code de la consommation : « Pour l'application des dispositions des articles L. 732-1, L. 733-1 et L. 733-4, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l'apurement de ses dettes est calculée, dans les conditions prévues aux articles L. 731-1, L.731-2 et L. 731-3, par référence au barème prévu à l'article R. 3252-2 du code du travail. Toutefois, cette somme ne peut excéder la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l'intéressé et le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2o de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles applicable au foyer du débiteur ».
L'article R. 731-2 précise : « La part de ressources réservée par priorité au débiteur est déterminée au regard de l'ensemble des dépenses courantes du ménage, qui intègre les dépenses mentionnées à l'article L. 731-2 ».
Enfin selon l'article R.731-3 : « Le montant des dépenses courantes du ménage est apprécié par la commission, soit pour leur montant réel sur la base des éléments déclarés par le débiteur, soit en fonction du barème fixé par son règlement intérieur et prenant en compte la composition de la famille. Le règlement intérieur précise à quelles conditions et selon quelles modalités les dépenses sont prises en compte pour leur montant réel ou selon le barème. Lorsque la commission prend en compte des dépenses courantes du ménage pour leur montant réel, elle peut demander au débiteur d'en fournir des justificatifs. Si le débiteur ne les fournit pas, les dépenses concernées sont appréciées selon le barème susvisé ».
Le premier juge a confirmé les mesures imposées par la commission de surendettement consistant en une suspension de l'exigibilité des créances sur 24 mois sous réserve de la vente du bien immobilier propriété de M. [B] évalué à 89 000 euros, constatant que cette cession permettra à l'intéressé de désintéresser son unique créancier et d'envisager le relogement de sa famille.
Si M. [B] soutient que le bien dépend de la communauté constituée avec son épouse, il ne communique aux débats que la première page d'un acte de cession daté du 20 octobre 1989 mentionnant uniquement en qualité d'acquéreur M. [B] [J]. Cet élément est insuffisant à établir que M. [B] ne serait pas l'unique propriétaire du bien constituant par ailleurs sa résidence principale.
S'il conteste l'évaluation retenue tant par la commission que par le premier juge, il ne fournit aucun élément contraire alors que cette évaluation résultait des éléments qu'il avait lui-même fournis le 2 mars 2017 au moment du dépôt de son dossier de surendettement.
M. [B] ne démontre par ailleurs pas avoir effectué une quelconque démarche depuis le jugement rendu le 3 juin 2020 pour procéder à la vente de ce bien immobilier, alors que la décision était exécutoire à titre provisoire nonobstant appel.
Il ne démontre enfin pas comment il entend honorer sa dette alors qu'il justifie percevoir le revenu de solidarité active et une pension de retraite complémentaire soit environ 500 euros par mois et qu'il ne dispose donc d'aucune capacité de remboursement.
Il en résulte qu'il convient donc de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, la vente du bien immobilier permettant d'apurer la dette et de permettre un relogement de la famille de M. [B].
Chaque partie supportera ses éventuels dépens d'appel.
L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort rendu par mise à disposition au greffe :
Déclare l'appel recevable,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Laisse à la charge de chaque partie les éventuels dépens d'appel exposés par elle,
Dit que l'arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement et aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT
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CAPP/JURITEXT000046013777.xml | No de minute : 70
COUR D'APPEL DE NOUMÉA
arrêt du 5 août 2021
chambre sociale
Numéro R.G. : No RG 19/00114 - No Portalis DBWF-V-B7D-QNB
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 22 octobre 2019 par le tribunal du travail de Nouméa (RG no :18/197)
Saisine de la cour : 12 novembre 2019
SARL XUAN NHI PHO ARCADE représentée par son gérant Monsieur [P] [U] domicilié en cette qualité au dit siège,
Siège : [Adresse 1]
Représentée par son gérant qui a conclu sans être représenté par un avocat
Mme [H] [R]
née le [Date naissance 2] 1971 à [Localité 3],
demeurant [Adresse 4]
Représentée par Me Valérie ROBERTSON, avocat au barreau de NOUMEA
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 15 juillet 2021, en audience publique, devant la cour composée de :
Monsieur Philippe DORCET, Président de chambre, président,
M. Charles TELLIER, Conseiller,
Mme Nathalie BRUN, Conseiller,
qui en ont délibéré, sur le rapport de M. Charles TELLIER.
Greffier lors des débats : M. Petelo GOGO
Greffier lors de la mise à disposition : M. Petelo GOGO
- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par Monsieur Philippe DORCET, président, et par M. Petelo GOGO, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.
***************************************
PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE
Mme [R] a été embauchée à temps partiel par contrat à durée déterminée du 18 novembre 2011 par la SARL XUAN NHI en qualité de plongeuse. Elle a été embauchée en CDI à compter du 21 novembre 2012, à mi-temps. Un nouveau CDI a été conclu le 16 juin 2014 pour une durée de travail hebdomadaire de 30 heures, puis à temps plein à compter du 1er janvier 2015.
Mme [R] a été convoquée le 9 octobre 2017 à un entretien préalable à licenciement économique qui s'est tenu le 17 octobre 2017. Elle a été licenciée selon courrier du 25 octobre 2017 au motif que son poste de plongeuse était supprimé à la suite d'une baisse du chiffre d'affaires de la société.
Mme [R] a saisi le tribunal du travail par requête du 12 juillet 2018 afin de contester ce licenciement.
Par jugement du 22 octobre 2019, le tribunal du travail de Nouméa a constaté que la moyenne des salaires de Mme [R] était de 199.532 FCFP, a dit que son licenciement notifié le 25 octobre 2017 était dépourvu de cause réelle et sérieuse, a condamné la SARL XUAN NHI à 1.200.000 FCFP à titre de dommages et intérêts et a fixé à 4 les unités de valeur de Me [V] intervenant au titre de l'aide judiciaire.
PROCÉDURE D'APPEL
Par requête déposée le 12 novembre 2019, la SARL XUAN NHI a fait appel du jugement du 22 octobre 2019.
Dans ses dernières écritures, à savoir des conclusions récapitulatives déposées le 22 juin 2020, la SARL XUAN NHI demande à la cour de réformer le jugement en ce qu'il a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamné la SARL XUAN NHI à 1.200.000 FCFP à titre de dommages et intérêts. Statuant à nouveau, elle demande à la cour de dire que le licenciement économique était fondé, que l'ordre des licenciements a été respecté, que les exigences de l'article Lp. 122-20 du code du travail ont été respectées et de condamner Mme [R] à 250.000 FCFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières écritures, à savoir des conclusions déposées le 6 avril 2020, Mme [R] demande à la cour de confirmer le jugement déféré et de fixer les unités de valeur dues à son conseil.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Attendu que les premiers juges ont estimé que l'employeur n'avait pas assez justifié des motifs économiques ayant entraîné le licenciement ; que, pourtant, au-delà de la seule baisse significative du chiffre d'affaires d'un trimestre à l'autre, à des niveaux qui restent comparables aux années précédentes, l'activité étant visiblement sujette à des fluctuations saisonnières entre juillet et septembre, la cour ne peut que constater, à la lecture des bilans, que la société était en difficulté économique certaine, accumulant les pertes à hauteur de 4.565.700 FCFP en 2017 et de 4.154.207 FCFP en 2016 ; que les pertes sont moins élevées en 2018, avec 462.613 FCFP, situation expliquée par une baisse des charges d'exploitation de près de 9 millions FCFP dont 3 millions FCFP au titre des salaires, démontrant bien que la baisse de la masse salariale a permis une amélioration de la situation financière ; que l'année 2019 est par ailleurs comparable à 2018 ; que la cour constate donc que la situation financière de l'employeur était très fragile, justifiant le recours au licenciement économique ; que le jugement déféré sera donc infirmé ;
Attendu, concernant l'ordre de licenciement, que l'obligation de reclassement s'analyse en fonction de la taille de l'entreprise ; qu'en application de l'article 92 de l'accord interprofessionnel territorial, cet ordre tient compte de l'aptitude professionnelle en premier lieu, puis de l'ancienneté et de la situation personnelle du salarié ; qu'en l'espèce, il apparaît que la société en cause est une petite structure comportant 4 salariés ; que le choix pour l'employeur de se séparer d'un agent dont il pourra plus facilement assurer lui-même le remplacement, pour la plonge et le ménage, ne présentant pas de spécificité particulière, est une justification suffisante dans une entreprise aussi petite en proie à des difficultés financières démontrées ; que ce moyen ne pourra donc prospérer ; que le licenciement était donc régulier ;
Attendu que le licenciement de Mme [R] était donc justifié et régulier ; que l'intimée sera déboutée de toutes ses demandes ; qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ; que Mme [R] sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel ;
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement déféré ;
Déboute Mme [R] de l'ensemble de ses demandes ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [R] aux dépens de première instance et d'appel ;
Fixe à 3 les unités de valeur dues à Me [L] [V].
Le greffier,Le président.
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CAPP/JURITEXT000046013788.xml | Copies exécutoires délivrées aux parties le :
Copies certifiées conformes délivrées aux parties le :
République française
Au nom du Peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 9 - B
ARRET DU 23 Juin 2022
(no 119 , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S No RG 20/00165 - No Portalis 35L7-V-B7E-CB5LE
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Juin 2020 par le tribunal judiciaire de BOBIGNY RG no 11-18-002840
Monsieur [R] [E] (débiteur)
[Adresse 5]
[Adresse 1]
[Localité 4]
représenté par Me Amele FAOUSSI, avocat au barreau de PARIS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/020499 du 04/09/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
Madame [C] [V] [K] (sociétés BESKOPE TAILOR et RETOUCHE MODE)
[Adresse 2]
[Localité 3]
comparante en personne
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Mai 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laurence ARBELLOT conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Christophe BACONNIER, président
Mme Laurence ARBELLOT, conseillère
Mme Fabienne TROUILLER, conseillère
Greffière : Mme Alexandra AUBERT, lors des débats
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Christophe BACONNIER, président et par Mme Alexandra AUBERT, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [R] [E] a saisi la commission de surendettement des particuliers de Seine-Saint-Denis le 7 mars 2017.
Statuant sur un recours formé contre la décision de recevabilité de la commission de surendettement, le juge du tribunal d'instance de Bobigny a, par jugement du 22 juin 2018, déclaré M. [E] recevable en sa demande de traitement de sa situation de surendettement.
Le 5 novembre 2018, la commission a préconisé une mesure de suspension de l'exigibilité des créances pendant 24 mois sous réserve de vente du bien immobilier appartenant au requérant.
Le 4 décembre 2018, M. [E] a contesté cette mesure au motif que la vente de son bien immobilier qui constitue sa résidence familiale principale, mettrait sa famille dans une situation délicate en ce que ses revenus ne lui permettraient pas de régler un loyer.
Par jugement contradictoire du 3 juin 2020, le tribunal judiciaire de Bobigny a prononcé la suspension de l'exigibilité des créances de M. [E] pendant une durée de 12 mois et a subordonné la mesure à la mise en vente de son appartement situé [Adresse 1].
Cette décision a été notifiée le 19 juin 2020 à M. [E].
Par déclaration remise par RPVA le 24 juin 2020, M. [E] a interjeté appel du jugement.
Les parties ont été convoquées à l'audience du 17 mai 2022.
Aux termes d'écritures visées par le greffier et développées oralement, le conseil de M. [E] sollicite de voir infirmer partiellement le jugement et de la confirmer pour le surplus, de voir autoriser M. [E] à conserver son bien immobilier et de dire que son passif sera apuré par échéance mensuelles dans la limite du délai légal et de voir fixer les mesures recommandées. Il sollicite le débouté de la demande formée par Mme [K] au titre des frais et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le conseil de M. [E] soutient que son appel est recevable au regard du délai de recours et fait observer qu'une demande d'aide juridictionnelle a été déposée le 25 juin 2020 soit dans le délai de recours et que la décision d'octroi de l'aide juridictionnelle est datée du 4 septembre 2020.
Il précise que son endettement est constitué d'une dette de loyer commercial vis à vis de Mme [K] fixée à 16 648,13 euros outre intérêts au taux légal et la somme de 6 765,68 euros soit 23 413,81 euros.
Il fait valoir que le bien immobilier appartient également à son épouse et qu'il s'agit d'un bien commun de sorte que le premier juge ne pouvait ordonner une vente de ce bien. Il conteste la valeur du bien d'un montant de 89 000 euros retenue par le premier juge. Il indique être bénéficiaire des minimas sociaux.
Mme [K], présente en personne, unique créancière de M. [E], n'a pas d'observation à formuler concernant la recevabilité de l'appel. Elle fait remarquer qu'aucun élément ne permet de dire que le bien immobilier serait commun, qu'il n'est justifié d'aucune démarche en vue de vendre ce bien et qu'elle souhaite pouvoir être payée. Elle sollicite confirmation de la décision querellée et la condamnation de M. [E] à lui verser la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile correspondant aux frais de recommandés exposés par elle.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il convient d'indiquer à titre liminaire que l'appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile. La procédure applicable devant la cour d'appel est donc la procédure orale de droit commun dans laquelle la prise en considération des écrits d'une partie par la cour est subordonnée à l'indication orale à l'audience par cette partie ou son représentant qu'elle se réfère à ses écritures. Dès lors, la cour ne peut prendre en compte les demandes ou observations présentées par écrit par les parties non comparantes.
Sur la recevabilité de l'appel
En application des articles R.713-7 du code de la consommation et 932 du code de procédure civile, l'appel est formé par une déclaration que la partie ou tout mandataire adresse par pli recommandé au greffe de la cour dans les quinze jours de la notification du jugement. La date de notification est celle de la signature de l'avis de réception. La notification mentionne les voies et délais de recours.
En l'espèce, il résulte du dossier que le courrier de notification du jugement a été réceptionné par M. [E] le 19 juin 2020 et que ce dernier a formé appel par le biais de son avocat par déclaration remise le 24 juin 2020.
Il en résulte que l'appel a bien été formé dans le délai de quinze jours fixé par les textes susvisés de sorte qu'il doit être déclaré recevable.
Sur la recevabilité au regard de la procédure de surendettement
La recevabilité du recours n'est pas contestée de sorte qu'il n'y pas lieu de statuer spécifiquement sur ce point.
La bonne foi de M. [E] n'est pas contestée et n'est pas susceptible d'être remise cause au vu des éléments dont la cour dispose. Il n'y a donc pas lieu de statuer spécialement sur ce point.
Sur les mesures
Aux termes de l'article L.733-1 du code de la consommation, la commission de surendettement, en cas d'échec de la conciliation, et après avoir mis les parties en mesure de fournir leurs observations, imposer un rééchelonnement du paiement des dettes du débiteur concerné.
Selon l'article L.733-3 du même code, la durée des mesures n'excède pas sept années sauf lorsque les mesures concernent le remboursement de prêts contractés pour l'achat d'un bien immobilier constituant la résidence principale du débiteur dont elles permettent d'éviter la cession ou lorsqu'elles permettent au débiteur de rembourser la totalité de ses dettes tout en évitant la cession du bien immobilier constituant sa résidence principale.
Aux termes de l'article R. 731-1 du code de la consommation : « Pour l'application des dispositions des articles L. 732-1, L. 733-1 et L. 733-4, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l'apurement de ses dettes est calculée, dans les conditions prévues aux articles L. 731-1, L.731-2 et L. 731-3, par référence au barème prévu à l'article R. 3252-2 du code du travail. Toutefois, cette somme ne peut excéder la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l'intéressé et le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2o de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles applicable au foyer du débiteur ».
L'article R. 731-2 précise : « La part de ressources réservée par priorité au débiteur est déterminée au regard de l'ensemble des dépenses courantes du ménage, qui intègre les dépenses mentionnées à l'article L. 731-2 ».
Enfin selon l'article R.731-3 : « Le montant des dépenses courantes du ménage est apprécié par la commission, soit pour leur montant réel sur la base des éléments déclarés par le débiteur, soit en fonction du barème fixé par son règlement intérieur et prenant en compte la composition de la famille. Le règlement intérieur précise à quelles conditions et selon quelles modalités les dépenses sont prises en compte pour leur montant réel ou selon le barème. Lorsque la commission prend en compte des dépenses courantes du ménage pour leur montant réel, elle peut demander au débiteur d'en fournir des justificatifs. Si le débiteur ne les fournit pas, les dépenses concernées sont appréciées selon le barème susvisé ».
Le premier juge a confirmé les mesures imposées par la commission de surendettement consistant en une suspension de l'exigibilité des créances sur 24 mois sous réserve de la vente du bien immobilier propriété de M. [E] évalué à 89 000 euros, constatant que cette cession permettra à l'intéressé de désintéresser son unique créancier et d'envisager le relogement de sa famille.
Si M. [E] soutient que le bien dépend de la communauté constituée avec son épouse, il ne communique aux débats que la première page d'un acte de cession daté du 20 octobre 1989 mentionnant uniquement en qualité d'acquéreur M. [E] [R]. Cet élément est insuffisant à établir que M. [E] ne serait pas l'unique propriétaire du bien constituant par ailleurs sa résidence principale.
S'il conteste l'évaluation retenue tant par la commission que par le premier juge, il ne fournit aucun élément contraire alors que cette évaluation résultait des éléments qu'il avait lui-même fournis le 2 mars 2017 au moment du dépôt de son dossier de surendettement.
M. [E] ne démontre par ailleurs pas avoir effectué une quelconque démarche depuis le jugement rendu le 3 juin 2020 pour procéder à la vente de ce bien immobilier, alors que la décision était exécutoire à titre provisoire nonobstant appel.
Il ne démontre enfin pas comment il entend honorer sa dette alors qu'il justifie percevoir le revenu de solidarité active et une pension de retraite complémentaire soit environ 500 euros par mois et qu'il ne dispose donc d'aucune capacité de remboursement.
Il en résulte qu'il convient donc de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, la vente du bien immobilier permettant d'apurer la dette et de permettre un relogement de la famille de M. [E].
Chaque partie supportera ses éventuels dépens d'appel.
L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort rendu par mise à disposition au greffe :
Déclare l'appel recevable,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Laisse à la charge de chaque partie les éventuels dépens d'appel exposés par elle,
Dit que l'arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement et aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT
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CAPP/JURITEXT000046013789.xml | Copies exécutoires délivrées aux parties le :
Copies certifiées conformes délivrées aux parties le :
République française
Au nom du Peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 9 - B
ARRET DU 23 Juin 2022
(no 121 , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S No RG 20/00168 - No Portalis 35L7-V-B7E-CB5XQ
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Mai 2020 par le tribunal judiciaire de SENS RG no 11-19-000012
Monsieur [W] [Z] [N] [D] (débiteur)
[Adresse 1]
[Localité 6]
non comparant
THELEM ASSURANCES (2018NAT0011511 ; T11718215)
Comptabilité Clients
[Adresse 8]
[Localité 2]
non comparante
TRESORERIE MIGENNES (produits locaux)
[Adresse 4]
[Localité 5]
non comparante
CAISSE D EPARGNE BOURGOGNE FRANCHE COMTE (04884331532)
Service Surendettement
[Adresse 7]
[Localité 3]
non comparante
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Mai 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laurence ARBELLOT conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Christophe BACONNIER, président
Mme Laurence ARBELLOT, conseillère
Mme Fabienne TROUILLER, conseillère
Greffière : Mme Alexandra AUBERT, lors des débats
- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Christophe BACONNIER, président et par Mme Alexandra AUBERT, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [W] [D] a saisi la commission de surendettement des particuliers de l'Yonne qui a, le 31 octobre 2018, déclaré sa demande recevable.
Par une décision notifiée le 21 décembre 2018, la commission a imposé une suspension de l'exigibilité des créances pour une durée de 24 mois au taux de 0% afin de permettre à M. [D] de retrouver un emploi.
M. [D] a contesté cette décision le 10 décembre 2018.
Par jugement réputé contradictoire du 15 mai 2020, le tribunal judiciaire du Sens a déclaré irrecevable le recours et ordonné le renvoi du dossier à la commission de surendettement de l'Yonne.
La juridiction a relevé que M. [D] n'avait pas comparu à l'audience pour soutenir son recours.
Cette décision a été notifiée à M. [D] le 25 mai 2020.
Par déclaration adressée le 28 mai 2020 au greffe de la cour d'appel de Paris, M. [D] a interjeté appel du jugement en faisant valoir qu'il ne pouvait pas payer la somme demandée et qu'il avait à charge un enfant en bas âge. Il proposait de payer 10 euros par mois.
Les parties ont été convoquées à l'audience du 17 mai 2022.
M. [D] a été régulièrement convoqué par courrier recommandé dont il a bien accusé réception. Il n'a ni comparu ni ne s'est fait représenter à l'audience, ni n'a fait connaître de motif à son absence.
Par courrier reçu au greffe de la cour d'appel le 5 avril 2022, la Direction générale des finances publiques de Migennes actualise ses créances à hauteur de 694 euros et 127 euros.
Aucun créancier n'a comparu.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il convient d'indiquer à titre liminaire que l'appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile. La procédure applicable devant la cour d'appel est donc la procédure orale de droit commun dans laquelle la prise en considération des écrits d'une partie par la cour est subordonnée à l'indication orale à l'audience par cette partie ou son représentant qu'elle se réfère à ses écritures. Dès lors, la cour ne peut prendre en compte les demandes ou observations présentées par écrit par les parties non comparantes.
En l'espèce, bien que régulièrement convoqué à l'audience du 17 mai 2022, M. [D] n'a ni comparu ni ne s'est fait représenter et n'a invoqué aucun motif légitime pour justifier sa non-comparution. Du fait de celle-ci, la cour n'est saisie d'aucun moyen à l'appui de l'appel formé.
Le jugement dont appel conserve donc toute son efficacité.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,
Constate que M. [W] [Z] [N] [D] ne soutient pas son appel et que la cour n'est saisie d'aucune prétention,
Laisse les éventuels dépens à la charge de l'appelant,
Dit que le présent arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement et aux parties par lettre recommandée avec avis de réception.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT
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CAPP/JURITEXT000006948821.xml | X... No 128/D/2006
COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE X... AU FOND
13ème Chambre Prononcé publiquement le LUNDI 23 JANVIER 2006, par la 13ème chambre des appels correctionnels, Sur appel d'un jugement du Tribunal correctionnel de MARSEILLE du 26 SEPTEMBRE 2005 PRÉVENU Monsieur Y...
GROSSE DÉLIVRÉE LE : à Maître :
PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR Monsieur Y... né le... à MARSEILLE (13) de Monsieur C... de nationalité française marié ... demeurant...
13009 MARSEILLE Déjà condamné Détenu au Centre pénitentiaire des BAUMETTES (Mandat de dépôt du 22/08/2005)
Prévenu de RECIDIVE DE VOL FACILITE PAR L'ETAT D'UNE PERSONNE PARTICULIEREMENT VULNERABLE Comparant, assisté de Maître Z... , avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE Appelant, LE MINISTÈRE PUBLIC, appelant, LES APPELS :
Appel a été interjeté par : Monsieur Y... , le 3 Octobre 2005, M. le Procureur de la République, le 3 Octobre 2005 contre Monsieur X... No128/D/2006 DÉROULEMENT DES DÉBATS :
L'affaire a été appelée à l'audience publique du LUNDI 23 JANVIER 2006, Le Président a constaté l'identité du prévenu, Le Conseiller MARCOVICI a présenté le rapport de l'affaire, Le prévenu a été entendu en ses observations et moyens de défense, Le Ministère Public a pris ses réquisitions, Maître Z... a été entendue en sa plaidoirie et a eu la parole en dernier, Enfin, le Président a indiqué que l'arrêt serait prononcé à l'audience de ce jour. DÉCISION :
Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi, Par actes au greffe en date du 3 octobre 2005, Monsieur Y... a interjeté appel, à titre principal, et le Ministère Public a formé appel incident, d'un
jugement contradictoire rendu le 26 septembre 2005, par lequel le Tribunal correctionnel de Marseille, statuant suivant la procédure de comparution immédiate, l'a déclaré coupable d'avoir, à Marseille, le 20 août 2005, frauduleusement soustrait la somme de 160 euros en numéraires au préjudice de Madame D..., cette soustraction ayant été facilitée par son état de particulière vulnérabilité, en l'espèce, son âge, cette personne étant née le 11 décembre 1924 et ce, en état de récidive légale pour avoir déjà été condamné le 12 mars 2001 par la chambre des appels correctionnels de la Cour d'appel de Paris pour des faits similaires ou assimilés, faits prévus et réprimés par les articles 311-4 al.1 5o, 311-1, 311-4 al.1, 311-14 1o, 2o, 3o, 4o, 6o, 132-8 à 132-16 du Code pénal ; l'a condamné à la peine de dix-huit mois d'emprisonnement, a ordonné son maintien en détention, a dit n'y avoir lieu à révocation du sursis mise à l'épreuve antérieurement prononcée. Les appels précités, interjetés dans les formes et délais de la loi, sont recevables. * * * Les faits sont les suivants : Le 20 août 2005, Madame D..., âgée de 80 ans, se présentait au commissariat de police de Marseille et expliquait que, souhaitant retirer une somme de 60 euros au distributeur automatique de billets du Crédit Lyonnais de l'avenue de Mazargues, elle avait dû faire trois demandes, un homme passant à plusieurs reprises son bras devant elle en lui disant que l'appareil était en panne. Elle ajoutait qu'ayant vu un moment le montant de 100 euros inscrit sur l'écran, elle pensait que cette somme, sinon plus, avait été prise par l'homme. .../...
X... No128/D/2006 Les fonctionnaires de police interpellaient, à proximité du distributeur de billets, un homme correspondant à la description donnée par Madame D.... Celui-ci, dénommé Monsieur Y..., expliquait qu'il s'était rendu à ce distributeur pour retirer de l'argent, avoir demandé à la dame de se dépêcher et s'être aperçu, après le départ de celle-ci, qu'elle avait oublié 160 euros qu'il avait alors ramassés, sa seule erreur ayant été de ne pas rappeler la dame pour les lui restituer. Il acceptait de rendre à Madame D... les 160 euros trouvés sur lui ; * * * A l'audience de la Cour : Le Ministère Public a requis le prononcé d'une peine de quatre ans d'emprisonnement. Le prévenu a sollicité l'indulgence de la Cour. SUR QUOI, LA COUR Attendu que c'est à juste titre que le Tribunal, tirant des circonstances de la cause les conséquences juridiques qui s'imposaient, a retenu la culpabilité du prévenu ; Attendu qu'en conséquence, la décision déférée sera confirmée de ce chef ; Attendu, en ce qui concerne la peine à lui infliger, que la nature des faits, le trouble en résultant pour l'ordre public et la personnalité du prévenu, justifient le prononcé d'une peine d'emprisonnement sans sursis ; Que la Cour considère que celle de trois ans d'emprisonnement constituera une sanction bien proportionnée à la gravité des faits et bien adaptée à la personnalité de l'intéressé ; que la décision déférée sera réformée en ce sens ; Attendu que la nécessité d'assurer une exécution continue de la peine justifie le maintien en détention du prévenu ; Attendu que la lecture du casier judiciaire de l'intéressé ne révélant l'existence d'aucune condamnation avec sursis mise à
l'épreuve susceptible de révocation, il y a lieu d'infirmer cette disposition du jugement ; PAR CES MOTIFS : LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière correctionnelle, EN LA FORME, reçoit les appels, AU FOND, Confirme le jugement déféré sur la culpabilité du prévenu, L'infirme sur la répression ; et statuant à nouveau de ce chef : Condamne Monsieur Y... à la peine de trois ans d'emprisonnement. .../...
X... No128/D/2006 Ordonne le maintien en détention du prévenu. LE TOUT conformément aux articles visés au jugement, au présent arrêt et aux articles 512 et suivants du Code de Procédure Pénale. COMPOSITION DE LA COUR : PRÉSIDENT : Monsieur THIBAULT-LAURENT ASSESSEURS :
Monsieur A... et Monsieur MARCOVICI, Conseillers MINISTÈRE PUBLIC : Madame E..., Substitut Général GREFFIER : Monsieur VIOLET Le Président et les assesseurs ont participé à l'intégralité des débats sur le fond et au délibéré. L'arrêt a été lu par le Président conformément à l'article 485 dernier alinéa du Code de Procédure Pénale en présence du Ministère Public et du Greffier. LE GREFFIER LE PRÉSIDENT La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 120 euros dont est redevable le condamné.
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CAPP/JURITEXT000018425719.xml | R.G : 05/00896
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE DE LA FAMILLE
ARRET DU 21 DECEMBRE 2006
DÉCISION DÉFÉRÉE :
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'EVREUX du 28 Septembre 2004
APPELANT :
Monsieur X...
91400 ORSAY
représenté par la SCP COLIN VOINCHET RADIGUET ENAULT, avoués à la Cour
assisté de Me Emmanuelle MARCHAND, avocat au barreau de ROUEN
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 05/4174 du 20/06/2005 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Rouen)
Madame Y... ...
27320 LA MADELEINE DE B...
représentée par la SCP GALLIERE LEJEUNE MARCHAND GRAY, avoués à la Cour
assistée de Me C..., avocat au barreau d'EVREUX
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 05/5894 du 26/04/2005 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Rouen)
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 13 Novembre 2006 sans opposition des avocats devant Madame ROBITAILLE, Conseiller, rapporteur,
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur BRUNHES, Président
Madame ROBITAILLE, Conseiller
Monsieur GALLAIS, Conseiller
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Monsieur HENNART, Greffier
En chambre du conseil, le 13 Novembre 2006, où l'affaire a été mise en délibéré au 21 Décembre 2006
CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 21 Décembre 2006, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile,
signé par Monsieur BRUNHES, Président et par Monsieur HENNART, Greffier présent à cette audience.
FAITS ET PROCÉDURE
M. X... est appelant des dispositions d'un jugement du juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de EVREUX rendu le 28/09/2004 qui a notamment :
Prononcé le divorce des époux aux torts du mari,
Fixé la résidence de l'enfant au domicile de la mère, dans le cadre d'un exercice conjoint de l'autorité parentale
Réservé le droit de visite et hébergement du père,
Fixé à la somme de 243,92 euros soit 121,96 euros par enfant le montant de la part contributive due par M. X... à Y,
Constaté que Y a entendu révoquer les donations et avantages matrimoniaux consentis à son conjoint,
Dit qu'à titre de prestation compensatoire M. X... est condamné à lui payer une somme de 12.200 euros en capital,
Condamné M. X... à payer à Y la somme de 7.500 euros à titre de dommages et intérêts ;
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu les conclusions de M. X... en date du 18/10/2006 et les conclusions de MME.Y du 20/10/2006, auxquelles il est expressément fait référence pour l'exposé des moyens et prétentions des parties,
Vu l'ordonnance de clôture du 27/10/2006,
Attendu que M.X... demande que le divorce soit prononcé aux torts de son épouse, que la part contributive à l'entretien et à l'éducation de Ondo soit supprimée, que la part contributive à l'entretien et à l'éducation de Jules soit fixée à la somme de 75 euros par mois, que Y ne soit pas autorisée à continuer à porter le nom de son mari postérieurement au prononcé du divorce et qu'elle soit déboutée de ses autres demandes,
Que, de son coté, Y demande que la prestation compensatoire soit fixée à la somme de 12.200 euros en capital outre l'attribution de l'immeuble commun sis à LA MADELEINE DE B..., que M. X... soit condamné à lui payer la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Sur le divorce :
Sur la demande en divorce de l'épouse
Attendu que Y fait état à l'appui de la demande en divorce présentée à l'encontre de son conjoint, des griefs suivants :
Comportement violent, abandon du domicile conjugal, non-respect de ses obligations alimentaires,
Que M. X... conteste la réalité des griefs allégués,
Attendu que M. X..., entendu le 28/02/2000 par la gendarmerie d'Evreux, a reconnu avoir "mis deux bonnes gifles" à son épouse, qu'il précise alors que Y est tombée au sol, qu'il lui a également mis d'autres coups au visage car selon lui elle s'accrochait à lui, que son épouse est tombée à plusieurs reprises à terre, que le comportement violent du mari est établi,
Que ces faits constituent une violation grave des devoirs et obligations résultant du mariage rendant intolérable le maintien du lien conjugal, qu'il sera fait droit à la demande en divorce de Y sans qu'il y ait lieu d'analyser les autres griefs allégués par l'épouse, que le jugement sera confirmé en ce qu'il a accueilli la demande en divorce de l'épouse ;
Sur la demande en divorce du mari :
Attendu que M. X... fait état à l'appui de la demande en divorce présentée à l'encontre de son conjoint, des griefs suivants :
Y a négligé les enfants, ne leur faisait pas à manger, qu'elle a abandonné le domicile conjugal à plusieurs reprises Indifférence totale et répétée de l'épouse, caractère acariâtre de l'épouse, humilie son mari,
Que Y conteste les témoignages produits,
Attendu que M. X... produit de nombreuses attestations d'amis du couple, qu'il résulte de ces pièces que Y était fréquemment absente du domicile conjugal, négligeait les tâches ménagères, que Y faisait preuve d'un caractère difficile n'hésitant pas à proférer des insultes visant les parents de son mari en présence de tiers,
Que ces faits constituent une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations résultant du mariage rendant intolérable le maintien du lien conjugal, qu'il sera fait droit à la demande en divorce de M. X..., que le jugement sera infirmé en ce qui concerne la répartition des torts du divorce ;
Sur la prestation compensatoire :
Attendu que les articles 270 à 272 du Code Civil modifiés par la loi du 30 juin 2000 disposent que :
L'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation compensatoire si la rupture du mariage a créé une disparité dans les conditions de vies respectives des époux, qui doit être fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources du débiteur, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle ci dans un avenir prévisible ;
Que doivent être pris en considération, notamment l'age et l'état de santé des époux, le temps déjà consacré ou à consacrer à l'éducation des enfants, la durée du mariage, leurs qualifications et situations professionnelles au regard du marché du travail, leurs droits existants et prévisibles en matière de pensions de reversions, leur patrimoine tant en capital qu'en revenu après liquidation du régime matrimonial ;
Que l'article 275.du code civil dispose que la prestation compensatoire peut prendre la forme du versement d'une somme d'argent, de l'abandon de biens en nature meubles ou immeuble, en propriété, usufruit, pour l'usage ou l'habitation, le jugement opérant cession forcée en faveur du créancier ;
Qu'aux termes de l'article 275-1 du code civil, il est possible, lorsque le débiteur n'est pas en mesure de verser le capital prévu à l'article 275 du code civil, de fixer les modalités de paiement du capital dans la limite de huit années ;
Que la loi du 30 juin 2000 prévoit que le juge peut, en raison de l'age ou de l'état de santé du créancier ne lui permettant pas de subvenir à ses besoins, fixer la prestation compensatoire sous forme de rente viagère ;
Que MME.BONSE MOKETIDI a perçu en 2004 un revenu mensuel de 1287 euros en moyenne, qu'en 2005 son revenu a été de 924 euros, que son salaire est d'environ 600 euros en 2006, qu'elle perçoit par ailleurs des indemnités assedics de 775 euros pour des mois de trente jours, qu'elle a la charge d'un prêt de 298 euros par mois,
qu'elle a les charges courantes à assumer,
Que M. X... a un salaire de 829 euros par mois, que son loyer est de 457 euros, que, dans sa déclaration sur l'honneur M. X... indique n'assumer à ce titre qu'une charge de 200 euros, qu'il tient compte de l'aide au logement perçue, qu'il a à faire face aux charges courantes,
Que M. X... est âgé de 51 ans, que son épouse a 46 ans, qu'ils se sont mariés en 1991 et ont cinq enfants aujourd'hui majeurs comme l'établit la production du livret de famille des époux,
Que Y travaille depuis 1990, que ses périodes d'activité ont cependant été irrégulières, que ses droits à retraite ne sont pas précisés,
que le couple est propriétaire d'un immeuble acheté en 1997, que cet immeuble est évalué entre 43 et 48.000 euros, que l'épouse continue à financer ce bien,
Attendu que, compte tenu de la durée du mariage, du fait que l'épouse n'a pas travaillé régulièrement, qu'elle aura des droits à retraite plus limités mai doit pouvoir améliorer sa situation dans la mesure où elle n'a que 46 ans, que M. X... a, de son coté, des revenus modestes,
Que la rupture du mariage a entraîné une disparité dans les conditions de vie des époux au détriment de l'épouse qu'il convient de réparer par l'octroi d'une prestation compensatoire, qu'au vu des circonstances de la cause, le montant de la prestation compensatoire en capital due à l'épouse sera fixé à la somme de 5.000 euros, que Y sera déboutée de sa demande d'attribution de l'immeuble commun à titre de prestation compensatoire,
Que le jugement sera infirmé du chef de la prestation compensatoire ;
Sur la part contributive à l'entretien et à l'éducation des enfants :
Attendu que la part contributive à l'entretien et à l'éducation des enfants a été fixée à la somme mensuelle de 121,96 euros par mois et par enfant, que M. X... demande que cette pension soit supprimée pour Ondo et réduite à la somme de 75 euros par mois,
que Ondo ne travaille pas, qu'il ne dispose pas d'indemnité assédics, que Jules est étudiant en BTS, qu'il dispose d'une bourse de 3600 euros par an, que sa pension trimestrielle est de 1909 euros,
Que, compte tenu de l'âge des enfants, des ressources et charges des parents la part contributive à l'entretien et à l'éducation des enfants sera fixée à la somme de 200 euros soit 100 euros par mois et par enfant, que l'indexation est quant à elle maintenue ;
Sur l'usage du nom :
Attendu que Y n'a pas demandé à conserver l'usage du nom marital, que la demande de M. X... à ce titre est sans objet ;
Sur les dommages intérêts :
Attendu que Y a présente une demande de dommages et intérêts, que le divorce étant prononcé aux torts partagés des époux cette demande est irrecevable sur le fondement de l'article 266 du code civil,
Que cette demande est par contre recevable sur le fondement de l'article 1382 du code civil, que M. X... a frappé son épouse lors de la vie commune, que M. X... a commis une faute, que Y ne justifiant pas du préjudice qui en résulte, sera déboutée de sa demande à ce titre ;
Attendu que le jugement sera confirmé en ses autres dispositions non contestées par les parties ;
Sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile :
Attendu que l'équité ne justifie pas qu'il soit fait droit à la demande de Y au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, que M. X... sera également débouté de sa demande sur ce même fondement.
Sur les dépens : .
Attendu que chacun des époux supportera la charge de ses propres dépens de la procédure de première instance et d'appel qui seront recouvres par leTrésor conformément aux règles de l'aide
juridictionnelle .
PAR CES MOTIFS,
statuant contradictoirement, publiquement, après débats en chambre du conseil,
Reçoit les appels principal et incident réguliers en la forme,
Confirme la décision déférée, sauf en ses dispositions relatives à la répartition des torts du divorce, les dommages et intérêts, le montant de la prestation compensatoire, le montant de la part contributive à l'entretien et à l'éducation de T et S et les dépens,
Statuant à nouveau,
Dit que le divorce est prononcé aux torts partagés des époux,
Déboute Y de sa demande de dommages et intérêts,
Dit que M. X... est condamné à payer à Y une somme de 5.000 euros à titre de prestation compensatoire en capital,
Dit que la part contributive à l'entretien et à l'éducation de T et S due par M. X... est fixée à la somme mensuelle de 200 euros soit 100 euros par mois et par enfant,
Dit n'y avoir lieu à indemnité sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens de la procédure de première instance et d'appel qui seront recouvrés par le Trésor conformément aux règles de l'aide juridictionnelle.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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CAPP/JURITEXT000020231497.xml | ARRÊT No 534
R.G : 08/00495
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PRIVAS
31 janvier 2008
FÉDÉRATION DES MSA ARDÈCHE LOIRE
C.H.S.C.T. DE LA MSA ARDÈCHE
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
1ère Chambre B
ARRÊT DU 09 SEPTEMBRE 2008
APPELANTE :
FÉDÉRATION DES MSA ARDÈCHE LOIRE
poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés ès qualités au siège social
[Adresse 1]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN, avoués à la Cour
assistée de la SELARL CAPSTAN RHONE ALPES, avocats au barreau de LYON
COMITÉ D'HYGIÈNE, DE SÉCURITÉ ET DES CONDITIONS DE TRAVAIL DE LA MSA ARDÈCHE (C.H.S.C.T. DE LA MSA ARDÈCHE)
prise en la personne de sa secrétaire, Melle [E] [J], domiciliée en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par la SCP P. PERICCHI, avoués à la Cour
assistée de Me Claudine CHABANNES, avocat au barreau de SAINT ETIENNE
Statuant sur appel d'une ordonnance du Président du Tribunal de Grande Instance de PRIVAS statuant en la forme des référés,
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Isabelle THERY, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 786 du Code de Procédure Civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Jean-Gabriel FILHOUSE, Président
Mme Muriel POLLEZ, Conseillère
Mme Isabelle THERY, Conseillère
GREFFIER :
Mme Sylvie BERTHIOT, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.
à l'audience publique du 05 Juin 2008, où l'affaire a été mise en délibéré au 09 Septembre 2008.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Jean-Gabriel FILHOUSE, Président, publiquement, le 09 Septembre 2008, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour.
FAITS et PROCÉDURE – MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES
Vu l'appel interjeté le 11 février 2008 par la fédération des MSA Ardèche Loire de l'ordonnance du 31 janvier 2008 rendue par le président du tribunal de grande instance de Privas statuant en la forme des référés,
Vu les dernières conclusions déposées au greffe le 5 juin 2008 par la fédération des Mutualités sociales agricoles (dites MSA ) Ardèche Loire, appelante et le même jour par le comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail de la MSA Ardèche (C. H. S. C. T.), intimé,
auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé du litige et des prétentions respectives.
Au terme d'un plan d'action stratégique institutionnel national, la Mutualité sociale agricole ( MSA) a décidé de mettre en place une restructuration nationale du réseau par la création de 35 caisses pluri départementales ou fédérations.
Dans ce cadre a été créée à compter du 1er janvier 2006 la fédération des caisses MSA de la Loire et de la MSA Ardèche composée de deux sites spécialisés l'un traitant des cotisations et retraites à [Localité 3] (07), l'autre traitant les maladies et prestations familiales à St Priest en Jarez (42), cette spécialisation ayant été mise en place à compter du 1er décembre 2006.
Compte tenu de ces projets et de leurs conséquences sur les conditions de travail des salariés, le C.H.S.C.T. 07 a voté le 14 septembre 2006 le recours à un expert, le cabinet CELIDE qui a présenté son rapport le 22 novembre 2006 au cours d'une réunion.
Le 11 octobre 2007 le C. H. S. C. T 07 a voté le recours à une nouvelle mesure d'expertise désignant à nouveau le cabinet CELIDE CEFA sur le fondement de l'article L.236 – 9 du code du travail pour établir un nouvel état des lieux de la MSA 07 concernant les conditions de travail.
Par acte d'huissier du 3 décembre 2007, la fédération des MSA Ardèche Loire a saisi le président du tribunal de grande instance de PRIVAS sur le fondement des articles L.236 – 9 et R.236 – 14 du code du travail qui l'a déboutée de sa demande d'annulation de la décision du 11 octobre 2007 par ordonnance du 31 janvier 2008 et l'a condamnée à payer au CHSCT de la MSA d'Ardèche la somme de 900 € pour ses frais irrépétibles.
La fédération MSA Ardèche Loire a régulièrement interjeté appel de cette ordonnance en vue de son infirmation demandant à la cour de prononcer la nullité de la délibération recourant à l'expertise et de dire que le CHSCT a commis un abus manifeste dans cette désignation qui justifie qu'il soit condamné à lui verser la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Elle reproche essentiellement au premier juge un "excès de pouvoir" au motif que le président du tribunal de grande instance a ajouté à l'article L.236 – 9 un cas de recours à l'expert et a interprété à tort la notion de projet en considérant que la GEIDE (gestion électronique de l'information et des documents de l'entreprise) demeurait à l'état de projet alors qu'elle est effective depuis le 1er décembre 2006.
Elle fait valoir en substance l'absence de risque grave, aucune situation de danger susceptible d'avoir une incidence sur la sécurité ou la santé des travailleurs n'ayant été identifiée.
Elle souligne que le C.H.S.C.T. ne s'appuie sur aucune enquête, rapport ou courriers émanant du médecin du travail ou de l'inspection du travail et que les arrêts de travail sont en régression depuis 2004.
Elle conteste le caractère probant des pièces adverses dont certaines sont postérieures à la décision de recourir à l'expertise.
Elle prétend que si la GEIDE n'a pas été généralisée à l'ensemble des services de la fédération, cela ne justifie pas pour autant une nouvelle mesure d'expertise et que la nouvelle activité attribuée au service retraite (GIP retraite) ne constitue pas un projet mais l'application d'une réglementation issue d'une circulaire qui s'impose à elle.
Elle considère enfin que le "projet de rapprochement" de la fédération Ardèche Loire et MSA de la Drôme ne constituait pas un projet important à l'époque de la délibération critiquée puisqu'aucune décision n'a été prise et aucun planning n'a été établie.
Le C.H.S.C.T de la MSA Ardèche conclut à la confirmation de l'ordonnance entreprise sauf en ce qui concerne le montant des frais de défense alloué.
Il réclame la condamnation de l'appelante à lui verser les sommes de 2.942,16 € au titre des frais d'avocat engagés en première instance et 2.597,49 € au titre des frais engagés en appel.
Il réplique qu'aucune mesure efficace n'a été mise en place à la suite de l'expertise et qu'il a été constaté la détérioration de l'ambiance de travail et l'apparition d'un stress important pour les agents consécutif à la mise en place du projet qui caractérise le risque grave.
Il affirme que tous les points importants du projet de restructuration n'ont pas fait l'objet de l'expertise puisque certains éléments ont été révélés postérieurement notamment le projet de la GEIDE et celui concernant le rapprochement avec la MSA de la Drôme, que la mise en place de la nouvelle organisation du travail est toujours à l'état de projet puisqu'elle n'a pas été généralisée à l'ensemble des services du site 07 et les répercussions sur les conditions de travail des agents sur leur santé et sur l'emploi justifient le recours à une expertise.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Aux termes de l'article L.236 – 9 du code du travail alinéa 1er devenu l'article L.4614-12, le comité d'hygiène et de sécurité et des conditions de travail peut faire appel à un expert agréé :
– soit, lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l'établissement,
– soit lorsqu'il existe un projet important modifiant les conditions d'hygiène de sécurité ou les conditions de travail prévu au septième alinéa de l'article L.236 – 2.
Pour critiquer la décision déférée, la fédération des MSA Ardèche Loire soutient essentiellement que le premier juge a excédé ses pouvoirs en ajoutant au texte et a procédé à une mauvaise interprétation de la notion de projet.
Pour examiner le bien-fondé de la délibération du 11 octobre 2007, il est nécessaire de rappeler la mission de l'expert résultant de la délibération du 14 septembre 2006.
Le cabinet CELIDE a eu pour mission :
« d'appréhender le projet de restructuration et de réorganisation dans sa globalité en étudiant ses répercussions sur les conditions de travail des différents personnels impactés et les conséquences sur la santé des agents.
L'appréhension du projet dans sa globalité comprend :
– l'analyse de la pertinence du projet dans l'environnement actuel (GEIDE non implantée ni opérationnelle, contexte de regroupement avec une troisième caisse et fusion à venir selon le schéma directeur institutionnel),
– analyse détaillée de l'existant, dont les charges de travail, les effectifs, les fonctionnements, les modes d'organisation,
– prise en compte de tous les services impactés soit directement soit indirectement,
– analyse des interactions entre les secteurs de production et la relation à l'adhérent (guichet, téléphone, permanences...) et répercussions sur le service à l'adhérent,
– recherche d'un équilibre des effectifs en Ardèche et des missions,
– analyse des postes et des conditions de travail des services directement impactés par le partage des activités,
– prise en compte des problèmes et difficultés liées aux mutations fonctionnelles pour les agents qui changent de poste, pour ceux qui accueillent les nouveaux arrivants (perte de compétences, formation, difficultés liées à l'âge, acquisition de nouvelles compétences et conséquences sur la santé du personnel),
– évaluation de la charge de travail actuelle et nouvelle en intégrant les non remplacement futurs (un poste budgétaire sur 2 voire sur 3 au niveau de la fédération) ainsi que la répartition entre sites 07 et 42,
– conditions de travail avec aménagement et répartition des locaux et des postes de travail, organisation future du travail, contenu des postes de travail, relations avec les services sur le site de [Localité 4] et les autres services de [Localité 3]. »
Le CHSCT a émis le voeu que l'expertise aille jusqu'à un accompagnement des personnels dans le cadre de ce redéploiement des activités jusqu'à son terme et qu'un suivi soit mis en place sur toute l'année 2007 afin de permettre que tout se déroule dans les meilleures conditions possibles.
L'expertise a fait l'objet d'une restitution lors du CHSCT du 30 novembre 2006.
Il est noté dans la conclusion figurant en annexe de la restitution :
« un problème qui dépasse le cadre de notre mission
ouvrir des discussions :
sur le travail (cf. expertise),
sur les préoccupations actuelles des salariés,
sur les fusions à venir. »
Il est encore indiqué en page 27 du rapport d'expertise: « un projet de transformation n'est pas composé d'une décision mais correspond à un processus plus ou moins long de prise de décisions multiples, d'incertitudes levées plus ou moins rapidement et de définition progressive du projet qui va être mis en oeuvre. »
Les experts ont préconisé la mise en place de groupes de suivi, de groupes de travail, de réunions spécifiques du CHSCT à différentes périodes du projet permettant une confrontation des regards sur les problèmes à traiter et un enrichissement du projet en cours.
En ce qui concerne l'impact sur la santé des salariés il a été proposé d'instaurer un droit d'expression sur le travail avec mise en place de groupes de remontée des difficultés.
À la suite de cette expertise, il est constant au vu du procès-verbal de réunion du 8 décembre 2006, de la note de service numéro 2006/24 que des groupes de réflexions ont été mis en place, l'ensemble des salariés s'étant déclaré intéressé, que M. [O] [F] a été nommé pour le service des ressources humaines.
Le CHSCT, estimant que la direction n'avait pas répondu aux attentes de la précédente expertise, ni engagé des démarches de fond a, dans la délibération du 11 octobre 2007, confié au cabinet d'expertise la mission de procéder à un nouvel état des lieux concernant les conditions de travail :
"– contenu des différents postes de travail, méthodes de travail, des différents circuits d'information, du fonctionnement de toutes les chaînes hiérarchiques, ergonomie et aménagement des postes de travail, implantation des services, état des effectifs et organigrammes, rapport d'activité, lien avec la caisse de la Loire,
– afin d'en mesurer toutes les conséquences sur la santé à court et long terme en lien avec le rapport de la première expertise."
Il convient pour apprécier le bien-fondé de cette délibération d'analyser en fait les critères définis à l'article L.236 – 9 du code du travail depuis le dépôt de la dernière expertise.
Sur le risque grave
Le risque grave existe dès que se révèlent dans l'entreprise des possibilités sérieuses de préjudice.
Les courriers échangés avec la direction postérieurement à la décision de recourir à l'expertise sont inopérants pour justifier cette désignation.
Les attestations de membres du CHSCT ( [J] [E], [G] [R] [U], [C] [H]) ne sont pas probantes pour caractériser un risque grave alors qu'elles émanent de membres du CHSCT impliqués dans le conflit qui les oppose à la direction et qui ressort de la lecture des procès-verbaux établis au cours de l'année 2006 et de l'année 2007.
Les attestations [D] et [M] ne sauraient à elles seules caractériser un risque grave alors que le médecin du travail, le docteur [X], a précisé lors du CHSCT du 11 octobre 2007 qu'elle n'a pas eu de « remontées » des problèmes évoqués par Madame [J] (secrétaire du CHSCT) et que M. [A] [W] reconnaît qu'il ne peut affirmer que les douleurs dont il se plaint sont directement lié à la GEIDE.
L'attestation postérieure du docteur [X] ne met pas en évidence un risque particulier mais décrit une activité qui correspond à la mission dévolue au médecin du travail.
Les arrêts de travail n'ont pas connu de hausse significative entre le premier semestre 2006 et le premier semestre 2007 au regard des chiffres antérieurs notamment en 2004 et 2005.
L'intimé ne peut soutenir que la direction n'a rien fait alors qu'elle reconnaît dans ses écritures que les agents n'ont pas souhaité participer au groupe de réflexion par peur de représailles et qu'elle conteste le recrutement d'une personne chargée exclusivement des ressources humaines puisque M. [F] embauché au mois de juillet 2004 a été chargé à la suite du rapport d'expertise d'être un relais entre les agents et la direction.
En l'état des éléments produits, l'expertise ne peut être justifiée sur le fondement de ce critère.
Sur le projet important
Le projet important doit impliquer la modification des conditions de travail , doit concerner un nombre significatif de salariés et conduire sur le plan qualitatif à un changement déterminant des conditions de travail des salariés.
– La mise en place de la GEIDE
La spécialisation des sites est effective depuis le 1er décembre 2006.
Il résulte des documents produits que la gestion électronique de l'information et des documents de l'entreprise (GEIDE) a pour objectif la numérisation de tous les documents adressés à l'entreprise, la conservation des documents adressés par l'entreprise à un adhérent, la mise à disposition de tous ces éléments aux agents de la caisse afin de faciliter le traitement des dossiers, la recherche d'archives et la mise en oeuvre du Workflow.
La mise en place de la GEIDE a fait l'objet d'une présentation aux membres du comité d'entreprise et aux salariés concernés dès le mois de septembre 2006. Cette technique consiste à supprimer tous les supports papier ou un gain de productivité.
L'intimé opère une confusion entre le principe et la mise en place qui est nécessairement progressive. Il ne s'agit plus d'un projet puisque les réorganisations qui s'imposaient ont déjà été faites et qu'elles ont été envisagées dans le cadre de l'expertise.
Ainsi que le relève exactement l'inspecteur du travail dans son courrier du 12 mars 2008, (pièce numéro 60) la GEIDE est un dispositif institutionnel qui a vocation à s'appliquer de façon progressive dans toutes les caisses de MSA.
Le CHSCT du site 07 a été informé de ce dispositif de redéploiement au cours de réunions d'information antérieures à la première expertise de sorte qu'il ne peut être considérée qu'il s'agit au mois d'octobre 2007 d'un projet.
Il est d'ailleurs noté que les agents sont satisfaits du fonctionnement de la GEIDE dans le procès verbal du 30 août 2007.
Enfin, ainsi que l'énonce exactement l'appelante, la nouvelle activité attribuée au service retraite (GIP retraite) constitue l'un des aspects du projet de restructuration et sa mise en oeuvre concrète et non un projet important.
L'expression postérieure des revendications des salariés peut être envisagée dans le cadre de l'intervention du médecin de travail conformément aux articles L.241 – 10 – 1 devenu l'article L.4624-1 et R. 241 – 41 du code du travail.
– le projet de rapprochement avec la MSA 26
Il est observé que l'expertise effectuée au cours du dernier trimestre 2006 a tenu compte du projet de fusion avec le département de la Drôme puisqu'il est expressément indiqué en page 16 sous forme d'interrogation la fusion à venir avec la caisse de la Drôme. Il est rappelé à cet effet (page 16 du rapport)que le plan d'action stratégique a prévu une réorganisation du réseau selon laquelle la région Rhône-Alpes sera composée de trois caisses à l'horizon 2010.
Cette fusion avec la caisse de la Drôme a donc bien été envisagée par les experts et constitue une évolution du projet et non un nouveau projet au sens rappelé supra.
En l'état de cette analyse, les critères de l'article L.4614-12 du code du travail n'étant pas réunis, la délibération du CHSCT du 11 octobre 2007 doit être annulée, la décision déférée étant infirmée en toutes ses dispositions.
Sur les frais de l'instance
Aux termes de l'article L.236 – 9 devenu l'article L.4614-13 du code de travail, l'employeur doit supporter le coût de l'expertise et des frais de la procédure de contestation éventuelle de cette expertise dès lors qu'aucun abus du CHSCT est établi. En l'espèce, il est justifié du montant des frais d'avocat engagés en première instance soit 2.942,16 €.
Aucun abus du CHSCT n'étant établi alors que la délibération a été implicitement confirmée en première instance, il y a lieu de faire droit à sa demande y compris pour les frais exposés en appel.
La fédération des MSA Ardèche Loire devra supporter les dépens de l'instance conformément à l'article L.236-9 devenu l'article L.4614-13 du code du travail.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière civile et en dernier ressort,
Infirme l'ordonnance déféré en toutes ses dispositions,
et statuant à nouveau,
Annule la délibération du CHSCT 07 du 11 octobre 2007 ayant trait à la désignation d'un expert sur le fondement de l'article L.236-9 du code du travail,
Condamne la fédération des MSA Ardèche Loire à payer aux intimés la somme de 2.942,16 € au titre des frais d'avocat exposés en première instance et 2.597,49 € au titre des frais exposés en appel,
Dit que la fédération des MSA Ardèche Loire devra supporter les dépens d'appel dont distraction conformément à l'article 699 du code de procédure civile au profit des avoués de la cause qui en ont fait la demande.
Arrêt signé par M. FILHOUSE, Président et par Madame BERTHIOT, greffier présent lors du prononcé.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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CAPP/JURITEXT000021308021.xml |
R.G. : 08/05323
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'AVIGNON
05 novembre 2008
CHSCT ZONE SUD
S.A. FRANCE TELECOM
[Localité 6]
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
1ère Chambre B
ARRÊT DU 31 MARS 2009
APPELANTE :
CHSCT 'ZONE SUD'
Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'unité d'intervention Rhône et Durance sud de la Direction territoriale sud-est de France Télécom
prise en la personne de son mandataire domicilié en cette qualité au siège social sis
[Adresse 1]
[Localité 5]
représenté par la SCP CURAT- JARRICOT, avoués à la Cour
assisté de Me Samuel GAILLARD, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉES :
S.A. FRANCE TELECOM
prise en la personne de son Président du Conseil d'Administration en exercice, domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par la SCP POMIES-RICHAUD-VAJOU, avoués à la Cour
assistée de la SCP FLICHY & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS
Madame [S] [I]
Directeur, agissant en qualité de président du Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail 'zone sud' de l'Unité d'intervention Rhône Durance de la Direction territoriale sud-est de France Télécom, domiciliée en cette qualité
née le [Date naissance 2] 1956 à [Localité 6] ([Localité 6])
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par la SCP POMIES-RICHAUD-VAJOU, avoués à la Cour
assistée de la SCP FLICHY & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS
Statuant sur appel d'une ordonnance de référé.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
M. Jean-Gabriel FILHOUSE, Président,
Mme Isabelle THERY, Conseiller,
Mme Nicole BERTHET, Conseiller,
GREFFIER :
Mme Sylvie BERTHIOT, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.
à l'audience publique du 20 Janvier 2009, où l'affaire a été mise en délibéré au 31 Mars 2009.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Jean-Gabriel FILHOUSE, Président, publiquement, le 31 Mars 2009, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour.
FAITS ET PROCÉDURE ' MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu l'appel interjeté le 21 novembre 2008 par le comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail de l'unité d'intervention Rhône et Durance sud de la direction territoriale sud-est de France Telecom (CHSCT zone sud) à l'encontre de l'ordonnance prononcée le 5 novembre 2008 par le juge des référés du tribunal de grande instance d'Avignon.
Vu les dernières conclusions déposées au greffe le 20 janvier 2009 par le CHSCT 'zone' sud de la direction territoriale sud-est de France Telecom, appelant et le 16 janvier 2009 par Madame [S] [I] et la SA France Telecom, intimées,
auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé du litige et des prétentions respectives.
L'unité d'intervention Rhône et Durance est un établissement secondaire de la Direction territoriale sud-est, elle-même établissement principal de la société France Telecom, qui emploie 825 personnes et qui a pour mission essentielle d'intervenir physiquement sur le réseau ou chez les clients (construction de lignes support, installation d'équipements terminaux, livraison des services de télécommunications, opérations de maintenance).
Cette unité comporte un comité d'établissement et deux CHSCT dont l'un, le CHSCT Rhône Durance sud pour les sites du Vaucluse, des Alpes de Haute-Provence et des Hautes-Alpes a, par délibération du 8 juillet 2008, décidé le recours à une mesure d'expertise prévue par les dispositions de l'article L. 4614 ' 12 du code du travail.
Cette mesure a été prise à la suite de la mise en place d'un nouveau logiciel dénommé « tigre » , à compter du mois de mars 2007, considéré par le CHSCT comme un nouvel outil de travail dont le déploiement serait constitutif d'un projet important.
Contestant cette décision, la société France Telecom et Madame [I], présidente du CHSCT zone sud ont saisi le président du tribunal de grande instance sur le fondement de l' article L. 4614 ' 13 du code du travail, qui, par ordonnance du 5 novembre 2008, a annulé la résolution n 2 votée le 8 juillet 2008 par le CHSCT de l'unité d'intervention Rhône Durance de France Telecom aux fins de désignation du cabinet [T] et débouté le CHSCT de l'unité d'intervention Rhône Durance de France Telecom de ses demandes, laissant les dépens à sa charge.
Le mandataire du CHSCT zone sud a interjeté appel, par l'intermédiaire de son avoué, le 21 novembre 2008 de cette décision en vue de son infirmation et a été autorisé par ordonnance du 3 décembre 2008 du premier président de la cour d'appel de Nîmes à assigner la SA France Telecom à l'audience du 20 janvier 2009.
Le CHSCT zone sud prie la cour de bien vouloir déclarer valable l'appel formé en son nom et d'infirmer le 'jugement' rendu au fond en la forme des référés en constatant l'existence d'un projet important, à titre subsidiaire de valider le principe de l'expertise en redéfinissant la mission pour la cantonner aux salariés relevant du périmètre du CHSCT et très subsidiairement, d'ordonner la tenue d'une nouvelle réunion extraordinaire du CHSCT afin de redéfinir l'étendue de la mission d'expertise.
Il demande que la société France Télécom soit condamnée à prendre en charge les frais et honoraires de sa défense liée à la présente instance y compris l'honoraire article 10 du tarif des huissiers en cas de recouvrement forcé ainsi que les honoraires de l'avoué soit 8000 € TTC au titre des frais de première instance et 4640,97 € au titre des frais d'appel ainsi que les dépens de première instance et d'appel.
À l'appui de son recours, il fait d'abord valoir l'importance de la souffrance morale constatée par le médecin du travail liée aux multiples réorganisations mal préparé et engendrant d'importants risques sur la santé des salariés de l'entreprise.
En ce qui concerne la régularité de l'appel, il rappelle que les dispositions de l'article 901 du code de procédure civile ne font pas obligation de préciser le nom de la personne incarnant l'organe représentant la personne morale et qu'il n'existe aucune nullité quant à l'indication de l'organe représentant le CHSCT et en tout état de cause aucun grief puisque les conclusions ont été prises par le CHSCT pris en la personne de son mandataire, M. [P] [Z].
Il soutient que le mandat de l'avoué est présumé et que le CHSCT a donné mandat à l'un de ses membres pour agir en justice ce qui emporte le droit d'exercer les voies de recours et de mandater un avoué à cette fin.
Il expose pour démontrer l'importance du projet:
' que parmi les 416 salariés relevant du périmètre du CHSCT Rhône Durance sud, 107 salariés sont concernés par la mise en oeuvre du nouveau logiciel soit plus de 25 % de l'effectif avec un profond changement des conditions de travail de 60 salariés,
' que le concept de ce logiciel est radicalement différent du logiciel 103 puisqu'il permet de rénover totalement la gestion géographique des infrastructures réseaux, de faciliter l'accès aux informations et d'étendre leur domaine d'utilisation, que les chargés d'affaires n'ont plus vocation à concevoir le réseau dans ses détails, ce qui induit un transfert de charges sur les intervenants terrain,
' que la mise en place de ce logiciel se traduit par un véritable changement de métier pour les chargés d'affaires qui deviennent de simples gestionnaires de réseaux mais également pour les autres salariés concernés et s'inscrit dans la mise en oeuvre d'une politique de sous-traitance.
Il conclut que ce projet comporte des modifications des conditions de travail des salariés et des répercussions sur leur santé.
Il se réfère encore aux dispositions de l'article 4612 ' 9 du code de travail pour la définition de la notion de projet important en matière informatique.
Il souligne le fait que la mise en oeuvre de ce logiciel s'est effectuée sans la moindre consultation des CHSCT concernés et que les deux réunions qui se sont tenues à son initiative (3 et 8 juillet 2008 ) n'ont pas permis de répondre à ses interrogations notamment quant aux répercussions sur les conditions de travail.
Il prétend que l'expertise n'est pas conditionnée par une procédure de consultation du comité
Il critique le jugement rendu qui a considéré comme non significatif le nombre de salariés concernés alors qu'il convient de prendre en compte le nombre total de salariés concernés par le projet dans l'entreprise et qui a écarté à tort les attestations mettant en évidence les difficultés rencontrées et l'impact des incidents sur les conditions de travail.
En ce qui concerne l'étendue de la mission, il souligne que l'article L. 4614 ' 12 du code du travail n'impose aucune condition de forme tenant à une définition précise de l'étendue de l'expertise et à titre subsidiaire il explicite les modifications éventuelles de la mission.
Enfin, il rappelle que le CHSCT n'ayant aucun budget les frais d'avocat doivent être intégralement mis à la charge de l'employeur par application des dispositions de l'article L. 4614 ' 13 du code du travail en l'absence d'abus.
Madame [S] [I], présidente du CHSCT, et la société France Telecom soulèvent à titre principal la nullité et l'irrecevabilité de la déclaration d'appel et sollicitent du président de la première chambre de la cour d'appel de Nîmes le renvoi devant le conseiller de la mise en état pour statuer sur ces exceptions.
À titre subsidiaire, elles concluent au prononcé par la cour de la nullité de la déclaration d'appel voire de son irrecevabilité, subsidiairement encore à l'annulation de la résolution numéro 2, au rejet des demandes du CHSCT et à tout le moins à la réduction du montant des frais de procédure laissés à la charge de l'employeur, outre la condamnation de l'appelant aux dépens de première instance et d'appel.
Elles soutiennent que la déclaration d'appel est entachée d'une irrégularité puisque la formulation ne permet pas de connaître le nom de la personne qui a fait appel et constitué avoué et qu'en tout état de cause le secrétaire n'avait pas le pouvoir de faire appel à défaut d'être le représentant légal de cet organisme et de justifier d'une délibération spécifique pour exercer une voie de recours.
Elles prétendent que le comité ne pouvait procéder à la désignation d'un expert selon trois moyens essentiels qu'elles développent, en l'absence de précisions sur l'étendue de la mission confiée à celui-ci, (1) en dehors de toute procédure de consultation (2) et en l'absence de projet important (3).
Sur le premier moyen, elles font essentiellement valoir que le chef d'entreprise ne peut déterminer l'étendue de ses obligations légales en l'absence de précisions sur l'étendue de la mission dévolue à l'expert et qu'il n'appartient pas ni à la cour, ni à l'expert de définir l'étendue de celle-ci.
Sur le deuxième moyen, elles affirment que la désignation de l'expert est un préalable à l'émission d'un avis et que le CHSCT n'a pas été consulté sur le logiciel Tigre.
Elles considèrent qu'il ne s'agit pas d'un projet important mais d'une évolution d'un système informatique déjà existant qui ne transforme pas de manière importante les postes des chargés d'affaires, qu'il n'est pas démontré une modification déterminante des conditions de travail.
Elles rappellent à cet effet que l'existence d'un projet important s'apprécie exclusivement dans le cadre du périmètre du CHSCT ayant procédé à la désignation et selon des critères quantitatifs et qualitatifs.
Elles demandent à la cour d'écarter des débats les témoignages non conformes aux dispositions du code de procédure civile et les attestations dénuées de toute force probante et déloyales puisqu'il n'est pas indiqué de la part de leurs auteurs l'existence d'une communauté d'intérêts avec le CHSCT.
Elles font encore valoir l'absence de pertinence de la demande d'expertise, le CHSCT ne pouvant déléguer ses pouvoirs à un expert et l'absence de difficultés techniques du projet susceptibles d'être résolues par une expertise.
Elles contestent enfin la prise en charge des frais soulignant le caractère abusif des montants réclamés.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Les développements des intimées quant à la nécessité d'un renvoi devant le conseiller de la mise en état sont sans objet, l'affaire ayant été retenue à l'audience du 20 janvier 2009.
I/ sur la régularité et la recevabilité de l'appel
Deux moyens sont avancés au soutien de l'irrégularité de l'appel, d'une part l'absence de précision du nom patronymique de la personne représentant le CHSCT et d'autre part le défaut de pouvoir de ce représentant pour constituer avoué et former appel.
La déclaration d'appel a été remise au greffe par le CHSCT 'pris en la personne de son mandataire'.
Contrairement à ce que prétendent les intimées, l'article 901 du code de procédure civile ne contient pas l'obligation, à peine de nullité, de préciser le nom de la personne incarnant l'organe représentant la personne morale puisque l'article 58 auquel renvoie cet article énonce en ce qui concerne les personnes morales la nécessité d'indiquer l'organe qui les représente légalement.
En l'occurrence, le CHSCT, s'il a la personnalité morale, ne possède pas au sens strict d'organe qui le représente légalement en cas de désaccord avec le chef d'établissement qui le préside mais peut agir en justice si l'un de ses membres bénéficie d'un mandat exprès.
En tout état de cause, à supposer que cette omission puisse être constitutive d'un vice de forme, il n'est pas démontré voire invoqué l'existence d'un grief de sorte que la demande de nullité ne peut prospérer en l'état des dispositions de l'article 114 du code de procédure civile.
L'appel interjeté par le mandataire du CHSCT sans indication du nom de celui-ci est valable sous réserve qu'il justifie de ce mandat.
En ce qui concerne le second grief, précisément relatif au défaut de pouvoir, il résulte de la délibération critiquée (résolution n 2) que le CHSCT a mandaté son secrétaire [P] [Z]: «pour prendre toutes les dispositions nécessaires à l'exécution de cette décision... Et éventuellement engager pour défendre les intérêts du CHSCT toutes les procédures administratives ou judiciaires requises.»
Il n'existe aucune disposition légale qui subordonne la recevabilité d'un appel à la production d'un mandat spécial pour exercer une voie de recours alors même que le mandat dont dispose M. [Z] l'habilite à intenter les voies de recours contre la décision rendue sur cette action,
dans une perspective de défense des intérêts du CHSCT de sorte que les moyens soulevés par les intimées quant à la recevabilité de l'appel ne peuvent qu'être écartés.
L'appel étant régulier et recevable, il convient d'analyser le fond du litige.
II/ sur le bien-fondé de l'appel
La délibération critiquée a été prise au visa de l'article L4614-12 qui dispose que le comité d'hygiène et de sécurité et des conditions de travail peut faire appel à un expert agréé :
' soit, lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l'établissement,
' soit lorsqu'il existe un projet important modifiant les conditions d'hygiène de sécurité ou les conditions de travail prévu au septième alinéa de l'article L. 236 ' 2.
À titre liminaire, il y a lieu d'écarter l'argumentation de l'appelant relative à la souffrance au travail qui constitue l'autre hypothèse prévue par l'article L. 4614 ' 12 précité alors que le vote litigieux du 8 juillet 2008 est fondé uniquement sur l'importance du projet et non sur un quelconque risque grave.
La demande d'annulation de la délibération repose sur plusieurs moyens dont certains nouvellement développés en appel:
' l'absence de définition de l'étendue de la mission
' l'absence de procédure de consultation,
' l'absence de projet important,
' l'absence de pertinence de la demande d'expertise,
' l'absence de difficultés techniques.
Les deux derniers moyens doivent nécessairement être examinés dans le cadre de l'analyse du bien fondé de l'expertise au regard de l'existence d'un projet important.
Sur l'absence de définition de l'étendue de la mission
La résolution litigieuse a désigné le cabinet [T] à [Localité 7] 'pour l'éclairer sur ce nouvel outil' après avoir constaté qu'aucun impact sur la santé n'avait été présenté et que le CHSCT ne pouvait appréhender seul les modifications que cet outil pouvait apporter aux conditions de travail des chargés d'affaires, ni à juger si le contenu de la formation et le suivi ont été suffisants ou pas, ni quelles sont les mesures à mettre en oeuvre pour assurer un passage de tous les chargés d'affaires d'un outil à l'autre.
L'article L. 4614 ' 13 du code du travail permet à l'employeur de saisir le juge judiciaire s'il entend contester la nécessité de l'expertise, la désignation de l'expert, le coût, l'étendue ou le délai de l'expertise.
En l'occurrence, les intimées ont contesté la résolution litigieuse dans son ensemble ce qui implique de statuer préalablement sur la question de la nécessité de l'expertise dont la critique ne peut concerner que le point de savoir si le projet litigieux est un projet important modifiant les conditions d'hygiène et de sécurité ou les conditions de travail.
Ainsi le caractère général de la mission donnée à l'expert (« éclairer le CHSCT sur cet outil » ), s'il permet à l'employeur d'en contester l'étendue selon le texte précité n'a aucune incidence sur la validité et le bien fondé de la délibération ce qui justifie d'écarter le moyen soulevé.
Sur l'absence de procédure de consultation
L'article L. 4612 ' 8 du code du travail dispose que le CHSCT est consulté avant toute décision d'aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail et notamment avant toute transformation importante des postes de travail découlant de la modification de l'outillage, d'un changement de produit ou de l'organisation du travail, avant toute modification des cadences et des normes de productivité liées ou non à la rémunération du travail.
Il est constant au vu du procès-verbal des délibérations du CHSCT du 26 mai 2008 que l'employeur a considéré que le déploiement du logiciel Tigre ne constituait pas un projet important au sens de l'article précité.
Néanmoins, ce projet a finalement été soumis à l'information du CHSCT selon l'ordre du jour du 16 juin 2008 puisqu'il a donné lieu à deux réunions exceptionnelles du CHSCT les 3 et 8 juillet 2008 qui ont permis la présentation du projet Tigre de sorte qu'il doit être considéré qu'il a bien été soumis à l'avis du CHSCT ce qui rend inopérant le moyen.
Sur l'importance du projet
Ainsi qu'il l'a été relevé, la contestation de l'employeur sur la nécessité d'une expertise ne peut concerner que le point de savoir si le projet litigieux est un projet important en modifiant les conditions d'hygiène, de sécurité ou les conditions de travail des salariés concernés.
L'existence d'un projet important au sens de l'article L. 4614 ' 12 du code du travail est déterminée au niveau des personnels concernés uniquement dans le cadre de la sphère de compétence du CHSCT ayant procédé à la désignation.
La pertinence de l'expertise ne s'apprécie pas seulement en fonction du nombre de salariés concernés mais en fonction de l'ampleur du changement sur les conditions de travail ou la santé des salariés.
Au demeurant les parties s'accordent sur le pourcentage de personnes réellement concernées (environ 11 % du personnel de l'unité d'intervention Rhône Durance) qui justifie d'apprécier si le projet constitue un changement déterminant de leurs conditions de travail.
Il s'avère au vu des écritures concordantes des parties sur ce point, que la version en cours du logiciel 'Tigre' (Traitement de l'Information Graphique des Réseaux) en application depuis le mois de mars 2007, est celle dénommée G2R1C4 qui correspond à la deuxième génération, la première ayant été implantée en 2005 à titre uniquement expérimental dans deux unités d'intervention.
Il est prévu une version évolutive G2R2 au mois de mars 2009.
Les pièces communiquées par le CHSCT sur la phase d'expérimentation de la version G1R0 du logiciel tigre sont inopérantes dans le présent litige puisque la première version testée en 2005 n'a pas été déployée et a fait l'objet de modifications qui ont donné naissance à une deuxième génération du logiciel tigre dénommée G2RO et qui fait l'objet de la mise en oeuvre au sein de l'établissement.
L'examen du projet TIGRE qui est destiné à remplacer le logiciel 103 révèle que celui-ci a pour objectif de permettre la rénovation de la gestion géographique des infrastructures réseaux, de faciliter l'accès aux informations et d'étendre leur domaine d'utilisation de façon simultanée par plusieurs milliers de salariés localisés en France métropolitaine et dans les départements d'outre-mer.
Il permet également selon les documents communiqués la mise en oeuvre d'une gestion centralisée des données cartographiques afin de répondre aux besoins des différentes branches et d'en optimiser les coûts d'acquisition.
Il est censé offrir une plus grande fiabilité, sécurité et accessibilité aux informations du réseau.
L'analyse du tableau comparatif du périmètre fonctionnel (pièce 17 des intimées) entre le nouveau et l'ancien logiciel montre que la plupart des fonctionnalités du logiciel Tigre étaient déjà offertes dans le logiciel 103.
L'accès unique notamment pour toutes les fonctionnalités du logiciel auparavant dispersées entre différents modules permet au contraire une simplification des postes de travail.
Contrairement à ce que prétend le CHSCT, il ne s'agit pas seulement d'un logiciel de gestion puisqu'il intègre un logiciel graphique qui comprend des applications de dessins que le logiciel 103 avait déjà défini.
La durée réduite de formation(en moyenne 5,5 journées par salarié concerné) démontre d'ailleurs la portée limitée de ce changement de logiciel sur les conditions de travail.
Pour critiquer la décision déférée et démontrer les modifications dans les conditions de travail des salariés, le CHSCT se prévaut des attestations et des 'témoignages' d'utilisateurs, pièces dont il est sollicité le rejet au regard des dispositions des articles 202 et suivants du code de procédure civile.
Il est rappelé que les dispositions de l'article 202 ne sont pas prescrites à peine de nullité.
Dans la mesure où les intimées ont pu en contester la force probante dans le cadre d'un débat contradictoire, il appartient à la cour d'apprécier souverainement la valeur et la portée de ces pièces.
Force est de constater que l'ensemble de ces attestations et 'témoignages' qui émanent pour la plupart d'utilisateurs du logiciel Tigre font état de dysfonctionnements et de stress induits nécessairement par l'apprentissage d'une nouvelle technique.
Ces pièces ne permettent pas de caractériser un changement significatif des conditions d'exercice du travail notamment de celui des chargés d'affaires au regard de leur mission telle que décrite dans les écritures de l'appelant alors que les fonctionnalités du logiciel ont pour but de faciliter à terme leur activité et d'améliorer la qualité des informations.
Les difficultés rencontrées sont inhérentes à la mise en place de toute nouvelle application informatique au stade de l'appropriation et auront vocation à se réduire au fur et à mesure de l'évolution du logiciel .
Il ne peut pas davantage être soutenu que le déploiement du logiciel constitue l'introduction d'une nouvelle technologie en l'état de l'existence du logiciel 103 et antérieurement du logiciel 102.
Ce projet n'emporte donc aucune conséquence au vu des pièces produites sur la structure de l'emploi et sur la qualification requise du personnel, aucune incidence sur les effectifs et les conditions de travail s'agissant d'un simple perfectionnement du système informatique préexistant et non pas de technologies nouvelles.
En l'état de cette analyse, les critères de l'article L.4614-12 du code du travail n'étant pas réunis, la décision déférée doit être confirmée en ce qu'elle a annulé la délibération du CHSCT du 8 juillet 2008.
Sur les frais de l'instance
Aux termes de l'article L.4614-13 du code de travail, l'employeur doit supporter le coût de l'expertise et les frais de la procédure de contestation éventuelle de cette expertise dès lors qu'aucun abus du CHSCT est établi.
En l'espèce, l'appelant sollicite la prise en charge au titre des frais engagés en première instance à hauteur de 8'000 € tout en produisant un projet de note d'honoraires de 12.150,40€.
Il est également produit un projet de note de frais et honoraires en date du 21 novembre 2008 justifiant des prestations de son conseil en appel à concurrence de 4.640,97 €.
Aucun abus du CHSCT n'étant établi, il y a lieu de faire droit à sa demande y compris pour les frais exposés en appel ce qui justifie d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a rejeté la demande en paiement et de condamner la SA France Telecom à prendre en charge les frais d'avocat afférents à cette procédure, sans que le montant de ces frais puissent être chiffré par la cour à défaut de production d'états de frais définitifs.
La SA France Telecom devra supporter les dépens de l'instance qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La demande de prise en charge des honoraires au titre de l'article 10 du tarif des huissiers ne peut prospérer dans la mesure où il n'appartient pas à la Cour de connaître de l'exécution de ses décisions, ni de statuer par anticipation sur un litige qui n'est pas encore né.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière civile et en dernier ressort,
Déclare l'appel régulier en la forme et recevable,
Confirme l'ordonnance déférée à l'exception de la disposition concernant l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,
Statuant à nouveau,
Condamne la SA France Telecom à prendre en charge les frais et honoraires de la défense de son CHSCT en première instance,
Y ajoutant,
Condamne la SA France Telecom à prendre en charge les frais et honoraires de la défense de son CHSCT exposés en appel,
Rejette la demande de prise en charge des honoraires au titre de l'article 10 du tarif des huissiers,
Condamne la SA France Telecom aux dépens de première instance et d'appel dont distraction conformément à l'article 699 du code de procédure civile au profit des avoués de la cause qui en ont fait la demande.
Arrêt signé par M. FILHOUSE, Président et par Madame BERTHIOT, greffier présent lors du prononcé.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
|
CAPP/JURITEXT000046533753.xml | COUR D'APPEL
DE SAINT- DENIS
Chambre sociale
RG N : No RG 22/01047 - No Portalis DBWB-V-B7G-FW4H
S.A.S. HYDROTECH
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentant : Me Antony VANHAECKE de la SELARL CEOS AVOCATS, avocat au barreau de LYON
CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA REUNION (CGSSR)
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Me Isabelle CLOTAGATIDE KARIM de la SCP CANALE-GAUTHIER-ANTELME- BENTOLILA, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
ORDONNANCE DE RADIATION No
Nous, Alain LACOUR, président, assisté de Monique LEBRUN, greffière,
Vu la procédure en instance d'appel inscrite au répertoire général sous le numéro No RG 22/01047 - No Portalis DBWB-V-B7G-FW4H,
Attendu que ni l'appelante ni son conseil n'étaient présents à l'audience de ce jour ,
En conséquence, qu'il échet d'ordonner la radiation d'office.
PAR CES MOTIFS
Vu l'article 381 du Code de Procédure Civile.
Ordonnons d'office la radiation de l'affaire.
Laissons les dépens exposés à ce jour à la charge de chaque partie, sous réserve d'une éventuelle décision à intervenir sur le fond.
Fait à Saint-Denis, le 04 octobre 2022
Le greffier,
Monique LEBRUNLe président, chargé de l'instruction
Alain LACOUR
Le 4 octobre 2022
Expédition délivrée à :
la SELARL CEOS AVOCATS
la SCP CANALE-GAUTHIER-ANTELME-BENTOLILA
|
CAPP/JURITEXT000047324640.xml |
JUDICIAIRE
No RG 22/56668 - No Portalis 352J-W-B7G-CXOGP
Assignation du :
26 Juillet 2022
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 23 novembre 2022
par Nathalie SABOTIER, 1ère vice-présidente adjointe au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,
Assistée de Minas MAKRIS, Faisant fonction de Greffier.
DEMANDERESSE
S.A.S. TCS
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Albert ANSTETT, avocat au barreau de PARIS - #B1201
DEFENDEURS
Monsieur [I] [V]
[Adresse 4]
[Localité 2]
non comparant
S.A.S. [V] MEDICAL MOTEUR
[Adresse 3]
[Localité 2]
non comparante
A l'audience du 03 Octobre 2022, tenue publiquement, présidée par Nathalie SABOTIER, 1ère vice-présidente adjointe, assistée de Flore MARIGNY, Faisant fonction de Greffier,
Après avoir entendu les conseils des parties,
EXPOSÉ DU LITIGE :
1. La société TCS se présente comme ayant développé un module électronique permettant de réaliser des économies de carburant qu'elle commercialise sous la marque verbale de l'Union européenne "Ecolow" déposée le 9 janvier 2017 pour désigner en classe 7 notamment les économiseurs de carburant.
2. Elle indique avoir découvert l'usage par M. [I] [V], fondateur de la société [V] Médical Moteur en avril 2021, du signe "Eco l'eau" pour commercialiser un kit d'injection d'eau dans le moteur d'un véhicule automobile permettant de réduire sa consommation de carburant, dont le premier fait la promotion sur un site internet accessible à l'adresse <www.auto-eco-leau.fr> depuis à tout le moins 2012.
3. Estimant l'usage de ce signe contrefaisant de sa marque "Ecolow", la société TCS a, par une lettre du 24 février 2022, renouvelée le 6 juillet suivant, mis en demeure M. [V] et la société [V] Medical Moteur d'en cesser l'usage. Ces mises en demeure n'ayant été suivies d'aucun effet, la société TCS a, par actes d'huissier du 26 juillet 2022 fait assigner en référé M. [I] [V] et la société [V] Medical Moteur devant le délégataire du président de ce tribunal siégeant à l'audience du 3 octobre 2022 aux fins d'obtenir, notamment, des mesures d'interdiction d'usage du signe "Eco l'eau" sous astreinte, ainsi que le paiement d'une provision d'un montant de 80.000 euros.
4. Bien que régulièrement cités par dépôt des actes à l'étude de l'huissier (la certitude du domicile étant confirmée par le voisinnage et M. [V] joint par téléphone), M. [I] [V] et la société [V] Medical Moteur n'ont pas comparu.
MOTIFS DE LA DÉCISION
5. Selon l'article 472 du code de procédure civile, "Lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure oùil l'estime recevable, régulière et bien fondée."
6. Aux termes de l'article L.716-4-6 du code de la propriété intellectuelle, "Toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l'encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d'actes argués de contrefaçon. (...) Saisie en référé ou sur requête, la juridiction ne peut ordonner les mesures demandées que si les éléments de preuve, raisonnablement accessibles au demandeur, rendent vraisemblable qu'il est porté atteinte à ses droits ou qu'une telle atteinte est imminente.
La juridiction peut interdire la poursuite des actes argués de contrefaçon, la subordonner à la constitution de garanties destinées à assurer l'indemnisation éventuelle du demandeur ou ordonner la saisie ou la remise entre les mains d'un tiers des produits soupçonnés de porter atteinte aux droits conférés par le titre, pour empêcher leur introduction ou leur circulation dans les circuits commerciaux. (...) Elle peut également accorder au demandeur une provision lorsque l'existence de son préjudice n'est pas sérieusement contestable. (...)"
7. Le caractère vraisemblable de l'atteinte alléguée dépend, d'une part, de l'apparente validité du titre sur lequel se fonde l'action et, d'autre part, de la vraisemblance de la contrefaçon alléguée.
8. En outre, selon le 22ème considérant de la directive no2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle, dont les dispositions précitées constituent la transposition en droit interne, "Il est également indispensable de prévoir des mesures provisoires permettant de faire cesser immédiatement l'atteinte sans attendre une décision au fond, dans le respect des droits de la défense, en veillant à la proportionnalité des mesures provisoires en fonction des spécificités de chaque cas d'espèce, et en prévoyant les garanties nécessaires pour couvrir les frais et dommages occasionnés à la partie défenderesse par une demande injustifiée. Ces mesures sont notamment justifiées lorsque tout retard serait de nature à causer un préjudice irréparable au titulaire d'un droit de propriété intellectuelle."
9. Aux termes de l'article 9 du règlement : « 1. L'enregistrement d'une marque de l'Union européenne confère à son titulaire un droit exclusif.
« 2. Sans préjudice des droits des titulaires acquis avant la date de dépôt ou la date de priorité d'une marque de l'Union européenne, le titulaire de cette marque de l'Union européenne est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d'un signe pour des produits ou services lorsque : (...)
b) ce signe est identique ou similaire à la marque de l'Union européenne et est utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires aux produits ou services pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public; le risque de confusion comprend le risque d'association entre le signe et la marque; (...)"
10. Interprétant les dispositions rédigées en termes identiques de l'article 5 § 1 de la première Directive du Conseil du 21 décembre 1988 rapprochant les législations des États membres sur les marques (89/104/CEE), la Cour de Justice des Communautés européennes a dit pour doit que, constitue un risque de confusion au sens de ce texte, le risque que le public puisse croire que les produits ou services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d'entreprises liées économiquement (voir arrêt Canon, C-39/97, point 29 ; arrêt Lloyd Schuhfabrik, C-342/97). Selon cette même jurisprudence, l'existence d'un risque de confusion dans l'esprit du public doit être appréciée globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce (voir, arrêt SABEL, C-251/95, point 22), cette appréciation globale impliquant une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte (voir arrêt Canon, point 17).
11. Afin d'apprécier le degré de similitude existant entre les marques concernées, la juridiction nationale doit déterminer leur degré de similitude visuelle, auditive et conceptuelle, en tenant compte en particulier de leurs éléments distinctifs et dominants et, le cas échéant, évaluer l'importance qu'il convient d'attacher à ces différents éléments, en tenant compte de la catégorie de produits ou services en cause et des conditions dans lesquelles ils sont commercialisés (voir arrêt Lloyd Schuhfabrik, C-342/97 ).
12. Il résulte en l'occurrence des pièces produites aux débats par le demandeur lui-même que le défendeur fait usage du signe "Eco l'eau" depuis au moins 2012, ayant notamment réservé le nom de domaine correspondant à ce signe.
13. Il est encore observé que la marque, comme d'ailleurs le signe argué de contrefaçon, est constituée de signes pouvant servir à désigner les caractéristiques du produit (réduire la consommation d'énergie fossile).
14. Le public pertinent est en outre constitué ici de professionnels ou de particuliers possédant un ou plusieurs véhicules, ou cherchant à équiper ces véhicules, à la recherche d'un dispositif permettant d'économiser le carburant, lequel n'est pas fourni par le constructeur. Il s'agit d'un public attentif, voire très attentif, aux différences entre les signes et les produits.
15. Les signes sont visuellement relativement similaires, présentant le même signe d'attaque "éco", lequel est néanmoins faiblement distinctif ici au regard des produits désignés. Les signes sont en outre faiblement similaires au plan conceptuel, le second signe renvoyant à un économiseur de carburant selon un procédé utilisant de l'eau, ce qui n'est pas le cas du signe de la société demanderesse. Il n'est d'ailleurs pas allégué par la société demanderesse que ses produits mettent en oeuvre un procédé identique ou similaire utilisant de l'eau. Les signes sont en revanche phonétiquement fortement similaires, la prononciation des signes l'eau [lo] et low [lo ]étant très proche.
16. Il s'en déduit que la forte ressemblance phonétique des signes et la relative similitude produits concernés est compensée ici par les différences, visuelle et surtout conceptuelle, des signes, auxquelles sera sensible le public pertinent en raison de son degré d'attention élevé. Ce public n'attachera pas, en effet, une forte importance au signe d'attaque commun aux deux signes ("éco") en raison de la faible distinctivité de ce terme pour désigner des produits permettant d'économiser le carburant. Il en résulte que la vraisemblance de la contrefaçon n'est pas caractérisée. Il doit donc être dit n'y avoir lieu à référé.
17. Partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, la société TCS sera condamnée aux dépens.
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort,
Le juge des référés,
Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de la société TCS ;
Condamne la société TCS aux dépens ;
Rappelle que la présente décision est de plein droit exécutoire par provision.
Fait à Paris le 23 novembre 2022.
Le Greffier, Le Président,
Minas MAKRIS Nathalie SABOTIER
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CAPP/JURITEXT000047324636.xml |
JUDICIAIRE
3ème chambre
1ère section
No RG 20/12295
No Portalis 352J-W-B7E-CTKZO
No MINUTE :
Assignation du :
20 novembre 2020
rendu le 01 décembre 2022
DEMANDERESSE
Société VLISCO NETHERLANDS B.V.
[Adresse 4]
[Localité 2] (PAYS-BAS)
représentée par Me Sophie MICALLEF de la SAS HOYNG ROKH MONEGIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0512
DÉFENDERESSE
S.A.R.L. BATEX
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Yves CLAISSE de la SELARL CLAISSE & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #P0500 & Me François-Xavier LANGLAIS de l'AARPI QUANTIC AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Nathalie SABOTIER, 1ère vice-présidente adjointe
Elodie GUENNEC, Vice-présidente
Malik CHAPUIS, Juge,
assistés de Caroline REBOUL, Greffière
A l'audience du 06 septembre 2022 tenue en audience publique, avis a été donné aux parties que la décision serait rendue le 03 novembre 2022.
Le délibéré a été prorogé au 17 novembre 2022 puis au 1er décembre 2022.
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
Exposé du litige
1. La société de droit néerlandais Vlisco Netherlands BV (ci-après Vlisco) est spécialisée dans la création et la confection de tissus dits " Wax", qui se caractérisent par des motifs colorés et graphiques, répétés à l'identique sur l'ensemble d'un tissu selon une technique dérivée du batik indonésien, sur lesquels elle revendique des droits d'auteur. Elle commercialise ces tissus, notamment en ligne, sur le site Internet à l'adresse <www.vlisco.com>.
2. Ayant constaté que les sociétés Giltex, Queen Lola et les Coupons de [Localité 3], proposaient à la vente des tissus reproduisant, selon elle, plusieurs de ses créations, la société Vlisco a fait réaliser des opérations de saisie-contrefaçon le 20 octobre 2020 qui ont permis de révéler l'identité d'un fournisseur commun à ces sociétés, à savoir la société de droit français Batex, spécialisée dans le commerce de gros, notamment de tissus wax d'origine chinoise.
3. Par actes d'huissier du 20 novembre 2020, la société Vlisco a fait assigner ces quatre sociétés en contrefaçon de droits d'auteur et en concurrence déloyale.
4. Ces parties étant parvenues à un accord amiable, la société Vlisco s'est désistée de ses demandes dirigées contre les sociétés Les coupons de [Localité 3] et Queen Lola le 23 mars 2021, et contre la société Giltex le 28 septembre 2021.
5. Par une ordonnance du 8 juin 2021, le juge de la mise en état a écarté la fin de non-recevoir tirée du défaut de titularité de la société Vlisco sur les tissus litigieux, soulevée par la société Batex.
6. Dans ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 04 février 2022, la société Vlisco demande au tribunal, au visa des articles L. 111-1, L. 112-1, L. 113-5, L. 122-4, L. 331-1-3 et suivants du code de la propriété intellectuelle, 10 bis de la Convention d'Union de Paris et 1240 du code civil, de :
A titre principal :
? Déclarer la société Batex coupable d'actes de contrefaçon de droit d'auteur à son encontre et à lui payer en conséquence 866.700 euros, ou à tout le moins 577.800 euros au titre des conséquences économiques négatives engendrées par la contrefaçon (à parfaire), 65.000 euros en réparation de son préjudice moral
? Déclarer la société Batex coupable d'actes de concurrence déloyaleet à lui payer en conséquence 470.000 euros au titre du préjudice économique subi (à parfaire) et 235.000 euros en réparation du préjudice moral engendré par ces actes (à parfaire);
A titre subsidiaire :
? Condamner la société Batex au titre des actes de concurrence déloyale commis au préjudice de la société Vlisco, à lui payer 866.700 euros, ou à tout le moins 577.800 euros au titre du préjudice économique subi (à parfaire), et 65.000 euros chacune en réparation de son préjudice moral ;
En tout état de cause :
? Ordonner la communication des noms et adresses des producteurs, distributeurs, fournisseurs et tous autres détenteurs des produits incriminés au titre de la contrefaçon ou de la concurrence déloyale, mais aussi des grossistes, détaillants et clients, des quantité exactes de produits vendus, fournis, reçus ou commandés, à quel prix d'achat et de vente, ainsi que tout document justificatifs et/ou certifiée par un expert comptable, le tout sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé un délai de 8 jours ;
? Interdire la poursuite des actes de contrefaçon, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard ;
? Ordonner le rappel des produits contrefaisant sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard ;
? Ordonner la publication à la charge des défenderesses du jugement à intervenir dans 5 journaux ou revues au choix de la société Vlisco pour un coût fixé à 4.500HT euros ;
? Se réserver la liquidation de l'astreinte ;
? Rejeter la demande de condamnation de la société Vlisco en dommage et intérêts ;
? Condamner les défenderesses à lui verser 70.000 euros au titre de l'article 700 et aux entiers dépens.
7. Dans ses dernières conclusions signifiées par la voie électronique le 10 janvier 2022, la société Batex demande au tribunal, au visa des articles 6 et 700 du code de procédure civile, L. 111-1, L. 121-1 et suivants, L. 113-5, L. 122-4 , L.3316162 et suivants du code de la propriété intellectuelle et 1240 et suivants du code civil, de :
A titre principal :
? Rejeter la revendication de droit d'auteur formulée par la demanderesse sur les dessins en cause et la débouter en conséquence de ses demandes sur ce fondement ;
? Rejeter toute qualification de concurrence déloyale en l'absence de preuve et en conséquence l'ensemble des demandes formulées sur ce fondement ;
A titre subsidiaire :
? Rejeter toute qualification de contrefaçon et en conséquence l'ensemble des demandes formulées sur ce fondement ;
A titre infiniment subsidiaire :
? Déclarer les demandes de documents formulées par la demanderesse injustifiées et disproportionnées et les rejeter ;
? Déclarer que la société Vlisco n'a subi aucun préjufice au titre de la contrefaçon et de la concurrence déloyale ;
? Ramener à de plus justes proportions les demandes indemnitaires formulées par la demanderesse.
En tout état de cause :
? Condamner la demanderesse à lui verser 40.000 euros au titre de l'article 700 et aux entiers dépens.
8. L'instruction a été close par une ordonnance du 10 février 2022 et l'affaire plaidée à l'audience du 06 septembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1) Sur l'imputabilité des faits à la société Batex
Moyens des parties :
9. La société Vlisco soutient que la société Batex a fourni à plusieurs autres sociétés des tissus reproduisant les motifs sur lesquels elle revendique des droits d'auteur, ce à quoi la société Batex réplique qu'aucun lien n'est établi entre elle-même et les tissus litigieux et qu'il ne peut lui être demandé d'apporter la preuve d'un fait négatif.
Appréciation du tribunal :
10. Selon l'article L. 332-1 du code de la propriété intellectuelle, "Tout auteur d'une oeuvre protégée par le livre Ier de la présente partie, ses ayants droit ou ses ayants cause peuvent agir en contrefaçon. A cet effet, ces personnes sont en droit de faire procéder par tous huissiers, le cas échéant assistés par des experts désignés par le demandeur, sur ordonnance rendue sur requête par la juridiction civile compétente, soit à la description détaillée, avec ou sans prélèvement d'échantillons, soit à la saisie réelle des oeuvres prétendument contrefaisantes ainsi que de tout document s'y rapportant.Par principe, la contrefaçon et la concurrence déloyale sont des faits juridiques, qui par conséquent peuvent être prouvés par tout moyens. (...)"
11. En l'occurrence, lors des opérations de saisie-contrefaçon réalisées le 20 octobre 2020 (pièce Vlisco no15.06), le gérant de la société Giltex a répondu en ces termes aux questions de l'huissier : "aucun produit ne fait l'objet d'une référence précise permettant de la distinguer sur les documents comptables et l'achat de ce type de tissus s'effectue systématiquement en grosse quantité, par lot de coupe sans détail". Il a remis à l'huissier une facture de la société Batex, datant de janvier 2020, et à la société Vlisco l'ensemble des factures émises par la société Batex entre janvier 2019 et octobre 2020. Un rapport d'investigation privée avait établi l'offre en vente des tissus objets du litige reproduisant les caractéristiques des tissus de la société demanderesse par la société Giltex, ce que son gérant a reconnu dans le cadre du protocole d'accord transactionnel conclu avec la société Vlisco.
12. De même, lors des opérations de saisie-contrefaçon réalisées le 20 octobre 2020 au sein de la boutique de la société Queen Lola à l'enseigne Manitex (pièce Vlisco no16.6), le gérant de cette société a fourni une facture de la société Batex, datée de janvier 2020, portant sur une commande de tissus "hitarget wax", et a répondu à l'huissier que "chaque achat s'effectue en grande quantité, par lot de 2 à 5 dessins identiques maximum" et que son unique fournisseur de tissu "wax" est la société Batex. L'expert comptable de cette société a confirmé par une attestation que la société Batex était l'unique fournisseur de produits "wax" de la société Queen Lola / Manitex. Cette société a en outre remis à la société Vlisco les 49 factures émanant de cette société. Un constat réalisé en février 2020 (pièce Vlisco no16.3) par un huissier avait également établi que des tissus reproduisant les motifs sur lesquels la société Vlisco invoque un droit d'auteur ont été exposés en vitrine de l'établissement de la société Queen Lola à l'enseigne Manitex, ce que le gérant de cette société a admis dans le cadre du protocole d'accord transactionnel conclu avec la société Vlisco.
13. Lors de la saisie réalisée le 20 octobre 2020 au siège de la société Les Coupons de [Localité 3], son gérant a reconnu la commercialisation de 6 références reproduisant les caractéristiques des tissus sur lesquels la société Vlisco revendique des droits d'auteur. Il a indiqué que son unique fournisseur de tissus "wax" était la société Batex et a remis à la société Vlisco les factures émanant de cette société entre novembre 2017 et février 2020.
14. Il en résulte que la société Vlisco établit que les sociétés Les Coupons de [Localité 3], Queen Lola / Manitex et Giltex ont commercialisé différents textiles reproduisant les caractéristiques de ses produits, et que ces produits textiles leur ont été fournis par la société Batex, laquelle apparait particulièrement mal fondée à se retrancher derrière l'imprécision de ses propres factures pour conclure à l'absence de lien établi entre elle-même et les références arguées de contrefaçon, alors même qu'elle a l'obligation légale d'établir des factures mentionnant la quantité et la dénomination précise de chaque produit vendu (article L. 444-9 du code de commerce) ce qu'elle n'a pas fait ici.
2) Sur l'originalité
Moyens des parties :
15. Pour chaque motif, la société Vlisco fourni une référence, l'identité du créateur, une date certaine, et les caractéristiques de l'oeuvre.
16. La société Batex fait quant à elle valoir que la demanderesse se contente de décrire les caractéristiques des oeuvres revendiquées, sans démontrer en quoi elles seraient originales, tandis que les motifs revendiqués constitue selon elle une reproduction de dessins préexistants appartenant à un fond commun des tissus de ce type.
Appréciation du tribunal :
17. Conformément à l'article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle, l'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. L'article L.112-1 du même code précise que ce droit appartient à l'auteur de toute oeuvre de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination. Il en résulte que la protection d'une oeuvre de l'esprit est acquise à son auteur sans formalité et du seul fait de la création d'une forme originale en ce sens qu'elle porte l'empreinte de la personnalité de son auteur et n'est pas la banale reprise d'un fonds commun non appropriable.
18. En l'espèce, le motif 6/8511 (pièce Vlisco no 2.3 et 2.4) est décrit comme se caractérisant par la répétition d'un motif composé de six disques dont les centres sont évidés, placés en cercle, cinq d'entre eux se situant autour d'un disque central, les cinq disques disposés autour du disque central évoquent des roues dentelées incomplètes et sur deux d'entre eux sont attachés des groupes de deux ou trois formes, dont les contours sont ajourés et l'intérieur composé d'une succession de flèches pleines, évoquant d'épais filaments. L'arrière-plan avec un effet craquelé est parcouru de motifs nervurés ou veineux sombres. Il est produit à ce titre, un extrait du site Internet <www.vlisco.com> exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no 2.1), une facture de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé 8511 (pièce Vlisco no 2.2), ainsi qu'un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. relatif au motif 8511 (pièce Vlisco no 5.4).
19. Le motif "le sac de Michelle Obama", référencé A1106, est issu d'un dessin de 2008 (pièce Vlisco no3.4 et 3.5). Il comporte la représentation d'un sac à main dont le haut est ovale et le fond plat, vu de face et de biais et comportant : une face avant, couverte aux deux tiers de sa hauteur d'un motif en quadrillage ou tressage spécifique, distinct du motif composant la bande supérieure du dernier tiers qui reprend le fond du dessin ; deux anses dont la plus visible dispose d'attaches plates en forme de cloche collées sur la face avant (certaines versions ayant des attaches d'une couleur différentes des anses). Les bords des attaches sont longés d'une surpiqûre fine et sombre ; une des attaches comporte un ?illet, lui-même supportant une languette rectangulaire à laquelle est attachée une fleur d'hibiscus, dont la représentation permet de percevoir les cinq pétales de la corolle ouverte dont la base est plus foncée ainsi que le pistil ; une tranche d'épaisseur homogène allant de bord en bord, découpée en trois bandes dans la longueur, la bande du milieu étant sombre. Les sacs comportent une fermeture allant d'une extrémité à l'autre, ils sont positionnés de biais et superposés les uns aux autres de manière à ce que les côtés avec les fermetures forment une ligne verticale. La société Vlisco produit pour ce motif, un extrait du site internet <www.vlisco.com> exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièces Vlisco no3.1 et 3.2) , des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé A1106 (pièce Vlisco no3.3) , un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V.(pièce Vlisco no 3.4), des publications Instagram du 26 avril 2018 (pièce Vlisco no3.5) et Facebook des 15 mars, 19 et 29 août, 19 octobre 2013, 16 mai 2016, 7 décembre 2017 (pièce Vlisco no3.6) et un extrait du livre "Fabrics" publié en 2012 (pièces Vlisco no3.7).
20. Le dessin "Shoes" créé en 2011, est référencé A1450 (pièce Vlisco no4.1). Il comporte la représentation d'escarpins à talons hauts noirs, vus de l'arrière et dans une orientation en biais, dont on aperçoit la semelle sous la voûte plantaire ornée de stries dégradées, créant un effet d'ombre et dont le contrefort arbore un motif distinct du reste, uni, de la chaussure. L'embout ouvert est orné d'un n?ud plat, un arrière-plan représentant des marches d'escalier, dont les différentes surfaces sont ornées alternativement d'un aplat de couleur ou de motif et de rayures en diagonales. Les escarpins sont disposés par rangées sur les marches de l'escalier, en alternant pour chaque rangée l'orientation vers la gauche ou vers la droite, et l'emplacement des chaussures pour qu'elles soient en alternance en fonction des rangées. Les contreforts présentent des motifs différents, géométriques de cannage ou tressage spécifique, alliant les mêmes couleurs qui rappellent celles de la semelle et du fond du dessin. La société Vlisco communique un extrait du site internet <www.vlisco.com> exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no 4.1), des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé A1450 (pièce Vlisco no 4.2) , un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no 4.3) et un extrait du livre "Fabrics" publié en 2012 (pièces Vlisco no4.4).
21. Le motif "Santana" porte la référence 14/ 3686 comprend une succession de formes oblongues dont deux côtés longs sont concaves et deux côtés courts convexes ; l'extrémité convexe de chaque forme vient se loger dans la cavité de chaque côté long de la forme mitoyenne ; chaque forme a un mouvement produisant un effet de torsion et la juxtaposition de cette forme en trois orientations distinctes permettantleurparfaite imbrication. Il est produit un extrait du catalogue Vlisco (pièce Vlisco no5.1), un extrait du site Internet <www.vlisco.com> exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no 5.2), des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé 14/3686 (pièce Vlisco no 5.3) , un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. relatif au motif 14/3686 (pièce Vlisco no 5.4), des publications Facebook des 25 janvier 2013, 13 avril 2013, 14 mars 2014, 19 juillet 2014, 3 septembre 2016, 9 octobre 2016 (pièce Vlisco no 5.5) et un extrait du livre "Fabrics" publié en 2012 (pièces Vlisco no5.6).
22. Le motif intitulé "bullets" ou "Z'ongles de Mme Thérèse" porte la référence 14/ 1682 (pièceVlisco no6.3). Il est constitué de la répétition par superposition alternative de deux arcs de cercle composés de figures positionnées verticalement, de forme oblongue évoquant des bandes de cartouches avec une extrémité inférieure en pointe ou des ongles peints, reliés par un trait plein à mi-hauteur, dont la taille augmente progressivement vers le sommet de l'arc. Ces figures sont soit de couleur sombre et traversées d'une ligne verticale en pointillés plus clairs dans le premier arc de cercle, soit d'une couleur plus claire et dotées d'un contour épais et sombre dans le second arc de cercle. Pour établir la commercialisation sous son nom, la société Vlisco communique un extrait du catalogue Vlisco (pièce Vlisco no 6.1), des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé 14/1682 (pièce Vlisco no6.2), ainsi qu'un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no6.4).
23. Le dessin dénommé « High-life » élaboré en 1966, créé par Ankersmith, porte la référence 14/69400 (pièce Vlisco no7.4). Il est décliné en différentes couleurs (pièce Vlisco no7.2). Il est constitué de l'empilement de formes ovales de deux couleurs différentes, séparées par deux triangles qui se joignent à leurs sommets par un point, l'ensemble évoquant un n?ud papillon et un plastron, à intervalles réguliers certaines formes ovales présentent en leur centre un rectangle d'une couleur contrastante dans lequel est inscrite la mention HIGH LIFE, des lignes verticales de points de différentes couleurs dans l'axe des sommets des triangles et des petits point de couleurs dans certains ovales. Il est produit un extrait du site Internet www.vlisco.com exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no7.2), des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé 14/69400 (pièce Vlisco no7.3), un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. relatif au motif 14/69400 (pièce Vlisco no7.5) et une publication Instagram du 10 mai 2020 (pièce Vlisco no7.6).
24. Le motif A2156 de 2016, créé en 2016 par T. [D] (pièce Vlisco no 8.3), décliné en différentes couleurs (pièce Vlisco no 8.1), est composé d'une alternance de carreaux comportant deux motifs distincts. Le premier motif consiste ainsi en un fil déroulé de façon irrégulière selon des boucles souples, qui parcourt le carreau dans lequel il est enfermé. L'arrière-plan est composé d'un motif évoquant un maillage très serré. Le second motif représente un empilement de formes rectangulaires ou en équerre en trois dimensions parcourant l'espace du carreau qui le contient et évoquant un labyrinthe. Ces motifs représentent des labyrinthes de formes différentes. La société Vlisco verse au débats, pour ce motif, un extrait du site internet www.vlisco.com exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no8.1), des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé A2156 (pièce Vlisco no8.2), un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. relatif au motif A2156 (pièce Vlisco no8.3) , des publications Instagram des 12 et 22 août 2017 (pièce Vlisco no8.4) et Facebook des 20 et 24 août 2017 (pièce Vlisco no8.5).
25. Le dessin, référencé A2161 se caractérise par la répétition de motifs évoquant des crochets à tête ronde, en contact les uns avec les autres pour former une arborescence. Leurs contours semblent hérissés de petites pointes et ils sont recouverts de toutes petites écailles. Un motif d'oiseau est également apposé de façon répétée dans les trouées de l'arborescence. Cet oiseau est représenté en vol, de profil, doté d'une longue queue, les ailes déployées, composées de trois des motifs de crochets qui l'entourent, avec un fil sortant du bec et disposé en dessous de son corps, au bout duquel est attachée une pierre taillée dont l'éclat des facettes est représenté par huit traits en halo le long descontours. L'arrière-plan est parcouru de lignes pointillées horizontales. La société Vlisco produit un extrait du site internet <www.vlisco.com> exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no9.1), des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé A2161 (pièce Vlisco no9.2) et un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. relatif au motif A2161 (pièce Vlisco no9.3).
26. Le motif référencé 6/8761, créé en 1984 par W.w Heeswijk (pièce Vlisco no10.3), comporte une représentation stylisée de couronnes de pointes hérissées, assemblées deux par deux par leur socle. Sur un fond noir, le socle de la couronne se compose d'un liseré évoquant un galon formés de triangles noirs et rouges, d'une bande rouge , d'un liseré de motifs de triangles jaunes et noirs et d'un liseré évoquant une ligne de jours échelle. Ces couronnes sont surmontées de longues pointes, une impression de perspective étant rendue par le fait que les sept pointes en premier plan sont en noir plein tandis que les six pointes en arrière-plan sont en stries noires obliques, les rendant moins distinctes et les faisait paraître plus éloignées de l'observateur. L'arrière-plan est parcouru de fin motifs rappelant des nuages ou une mousse savonneuse. La société Vlisco communique pour ce dessin, un extrait du site Internet <www.vlisco.com> exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no10.1), une facture de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé 8761 (pièce Vlisco no10.2) et un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. relatif au motif 8761 (pièce Vlisco no10.4).
27. Le dessin portant la référence 14/3739 dénommé « Ampoule électrique » ou « Electric Bulb » créé par A.v.d. Manakker, en 1983 (pièce Vlisco no 11.5), consiste en un motif fantaisiste représentant des ampoules électriques qui sont disposées dans une direction ascendante (au lieu de la direction normale de "suspension") et reliées de manière à ressembler à une plume de paon, décliné en différentes couleurs, l'ampoule étant entourée d'une sorte de contour, dont la couleur varie entre le gris piqueté et le noir. Pour établir la commercialisation de ce dessin, la société Vlisco produit un extrait du catalogue Vlisco (pièce Vlisco no 11.1), un extrait du site Internet <www.vlisco.com> qu'elle exploite (pièce Vlisco no 11.2), des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé 14/3739 (pièce Vlisco no11.3), un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. relatif au motif 14/3739 (pièce Vlisco no11.8) et des publications sur les réseaux sociaux (Instagram des 6, 7 et 8 août 2018 -pièce Vlisco no11.6 et Facebook des 12 janvier 2014, 1er juin 2015, 9 mai 2015, 9 août 2018-pièce Vlisco no11.7).
28. Le dessin Vlisco dénommé « Feuilles » portant la référence 14/4735 (pièce Vlisco no 12.3), créé par M. [T], en 1995, est constitué de feuilles de platane, dont le limbe est coloré en fonction des séparations créées par les nervures principales de la feuille, chaque feuille comportant deux couleurs, l'une étant présente sur une plus grande partie et l'autre sur une ou deux parties uniquement, les nervures étant représentées dans une autre couleur, et des taches noires ou de couleur étant apposées dans le prolongement de certaines nervures. Il est décliné en plusieurs couleurs . La société Vlisco verse aux débats, un extrait de la boutique en ligne www.shop.vlisco.com exploitée par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no12.1), des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du dessin « Feuilles » référencé 14/4735 (pièce Vlisco no12.3) et un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. relatif au motif 14/3739 (pièce Vlisco no12.3).
29. Le motif "Bague", référencé A2257, conçu en 2016, consiste en un dessin se caractérisant par la répétition, selon des orientations variées, de la représentation stylisée d'une bague en trois dimensions consistant en un anneau surmonté d'un disque comprenant une série de cercles, servant de base au montage d'une pierre taillée sertie par six griffes rondes. Deux pierres sont également incrustées dans l'anneau, de part et d'autre du montage de la pierre. Les trois pierres, qui évoquent des diamants, sont d'une couleur contrastant avec le reste de l'objet et leur facettes semblent refléter la lumière en éclats brillants. Des étoiles à huit branches, quatre courtes et quatre longues, et au c?ur rond et plein, parsèment le dessin, de différentes tailles, elles ajoutent à l'impression de scintillement. Il est produit pour ce motif, un extrait de la boutique en ligne <www.shop.vlisco.com> exploitée par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no 13.1), un extrait du site internet <www.vlisco.com> exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no13.2), des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du dessin référencé A2257 (pièce Vlisco no13.3), un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no13.6) et des publications Instagram des 15 novembre et 4 décembre 2017 (pièce Vlisco no13.4) et Facebook des 15 novembre et 4 décembre 2017 et du 4 janvier 2018 (pièce Vlisco no13.5).
30. Le motif, référencé 14/1474, a été réalisé en 1960 (pièce Vlisco no 14.6). Il comporte la répétition de trois ensembles superposés de motifs linéaires évoquant des arabesques et des volutes qui se recroquevillent pour former une arborescence, ces dernières ayant un contour d'une couleur qui se détache du fond. Le premier ensemble comprend deux lignes d'arabesques et volutes horizontales présentant, toutes les huit volutes pour la ligne du haut un bouquet à cinq volutes tournées vers le bas qui s'insèrent toutes les six volutes de la ligne inférieure. Le deuxième ensemble est aussi constitué deux lignes de volutes ; sur la première ligne, après une succession de trois volutes horizontales on trouve un bouquet de sept volutes tournées vers le bas auquel succède quatre volutes horizontales et un bouquet de cinq volutes tournées vers le bas et ainsi de suite, et sur la seconde ligne, les cinq volutes tournées vers le bas du bouquet de la ligne du dessus sont suivies d'une volute horizontale et les sept volutes tournées vers le bas du bouquet de la ligne du dessus sont suivies de trois volutes horizontales et ainsi de suite ; Le dernier ensemble comprend trois lignes d'arabesques et volutes horizontales et de bouquets de volutes tournées vers le bas qui permettent de relier la première à la deuxième ligne et la deuxième à la troisième, la première ligne est constituée de six volutes horizontales dont l'extrémité arrondie est tournée en alternance vers le haut ou le bas, vers la droite ou vers la gauche, suivies d'un bouquet de volutes, l'une horizontale dans la continuité des six volutes précédentes et trois tournées vers le bas pour rejoindre la deuxième ligne. Cette deuxième ligne comprend six volutes horizontales, la première est attachée à la volute du milieu du bouquet de trois volutes descendantes de la première ligne, un bouquet de cinq volutes tournées vers le bas étant inséré entre les quatrième et cinquième volutes. Ce bouquet de cinq volutes rejoint la troisième ligne où il est enserré entre des séries de six volutes horizontales. Pour justifier de l'exploitation sous son nom de ce motif, la société Vlisco produit un extrait du site internet www.shop.vlisco.com exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no 14.1 et 14.2), des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du dessin référencé 14/1474 (pièce Vlisco no14.3), des publications Instagram des 17 et 18 janvier 2019 (pièce Vlisco no14.4) et Facebook des 18 janvier et 25 septembre 2019 (pièce Vlisco no 14.5) et un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. relatif au motif 14/1474 (pièce Vlisco no14.6).
31. La société Vlisco établit donc, pour chaque motif de tissu, l'existence d'un parti pris esthétique singulier au moyen de choix totalement arbitraires, portant dès lors l'empreinte de la personnalité de leur auteur. Il n'est par ailleurs justifié d'aucun tissu dont la création serait antérieure et comportant déjà les caractéristiques de l'une de celles objet du présent litige. Aucun des tissu invoqué ici ne peut donc être regardé comme appartenant à un fonds commun non appropriable.
32. La société Vlisco, qui bénéficie de la présomption prétorienne de tirtularité, ainsi que l'a déjà retenu le juge de la mise en état, peut ainsi revendiquer la protection de ses tissus par le droit d'auteur.
3) Sur la contrefaçon
Moyens des parties :
33. La société Vlisco rappelle que la contrefaçon, en matière de droit d'auteur, s'apprécie aux regard des ressemblances uniquement, les divergences de couleur ne permettent donc pas d'écarter cette qualification. Les dessins sur lesquels elle dispose d'un droit d'auteur sont donc reproduits servilement par les défenderesses.
34. La société Batex prétend qu'aucun acte de contrefaçon n'est démontré à son égard.
Appréciation du tribunal :
35. En application des dispositions des articles L. 122-1 et L. 122-4 du code de la propriété intellectuelle, le droit d'exploitation appartenant à l'auteur comprend le droit de représentation et le droit de reproduction, et toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants-droit ou ayants-cause est illicite.
36. Il en est de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque. La contrefaçon d'une oeuvre protégée par le droit d'auteur, qui n'implique pas l'existence d'un risque de confusion, consiste dans la reprise de ses caractéristiques identifiées comme constitutives de son originalité.
37. La contrefaçon s'apprécie selon les ressemblances et non d'après les différences. Elle ne peut toutefois être retenue lorsque les ressemblances relèvent de la reprise d'un genre et non de la reproduction de caractéristiques spécifiques de l'oeuvre première.
38. Il en résulte que de simples divergences de couleurs ne peuvent permettre d'échapper à la qualification de contrefaçon. De même, l'apposition de la marque de la société demanderesse à l'action en contrefaçon sur le fondement du droit d'auteur, n'est pas une condition à la caractérisation de la contrefaçon. En l'espèce, la comparaison des références de tissus Vlisco avec les constatations de l'huissier de justice, et les éléments saisis lors des opérations de saisie-contrefaçon, établit la copie servile ou quasi servile des 13 références de tissus décrites précedemment, dont les droits sont présumés appartenir à la société Vlisco.
39. Les tissus de la société défenderesse reprennent les mêmes caractéristiques, dans les mêmes dimensions, selon le même agencement. La contrefaçon de droits d'auteur est donc établie, étant rappelé que la bonne foi est indifférente (Cass. Civ. 1ère, 13 novembre 2008, pourvoi no06-19.021, Bull 2008, I, no258).
4) Sur les mesures de réparation
Moyens des parties :
40. La société Vlisco demande 866.700 d'euros au titre des conséquences économiques négatives engendrées par la contrefaçon, 65.000 euros en réparation de son préjudice moral, d'interdire la poursuite des actes de contrefaçon sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard, le rappel de l'intégralité des produits contrefaisants des circuits commerciaux sous astreinte de 1.000 euros, et la publication du présent jugement.
41. La société Afristyle demande le rejet de l'ensemble des demandes.
Appréciation du tribunal :
42. L'article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle dispose que " Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :
1o Les conséquences économiques négatives de l'atteinte aux droits, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2o Le préjudice moral causé à cette dernière ;
3o Et les bénéfices réalisés par l'auteur de l'atteinte aux droits, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de l'atteinte aux droits.
Toutefois, la juridiction peut, à titre d'alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si l'auteur de l'atteinte avait demandé l'autorisation d'utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n'est pas exclusive de l'indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée."
43. La société Vlisco n'a pas fait procéder à des opérations de saisie-contrefaçon concernant la société Batex, tandis que les éléments produits ne démontrent pas que les factures produites ne concernent que des produits contrefaisants.
44. Il convient néanmoins de retenir la vente d'au moins 25.000 coupons de tissus contrefaisants entre 2017 et la constatation de la contrefaçon représentant un chiffre d'affaires de l'ordre de 187.500 euros selon le prix unitaire moyen mentionné sur les factures versées aux débats de l'ordre de 7,5 euros. Il convient d'appliquer à cette somme un taux de report de 50 %, les prix de vente pratiqués par les parties étant très différents et un taux de marge brute de 25%. La perte de la société Vlisco peut ainsi être évaluée à 23.435 euros.
45. La société Vlisco subit en outre un indéniable préjudice moral résultant de la banalisation de ses produits qui sera réparé par le versement de la somme de 5.000 euros.
46. Il convient également de faire droit aux demandes de communication de pièces et d'interdiction, selon les modalités prévues au dispositif de la présente décision. Ces mesures réparant suffisamment le préjudice de la société Vlisco la demande de publication de la présente décision sera rejetée, de même que celle de rappel des produits, qui n'apparaît pas justifiée.
5) Sur la concurrence déloyale
Moyens des parties :
47. D'après la société Vlisco, les défenderesses créent un risque de confusion et un effet de gamme en vendant des produits de même nature à destination du même public. Elle demande une réparation à titre additionnel sur le fondement de la concurrence déloyale.
48. Sur ce point, la société Batex considère qu'aucune faute ne peut être établie à son égard en l'absence de risque de confusion. De même, aucun détournement de clientèle, c'est-à-dire aucun préjudice, n'est selon elle démontré.
Appréciation du tribunal :
49. Est fautif le fait, pour un professionnel, de s'immiscer dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire particulier (Cass. Com., 26 janvier 1999, pourvoi no 96-22.457 ; Cass. Com., 10 septembre 2013, pourvoi no 12-20.933).
50. En outre, l'association par le consommateur de produits précis, peu important leur banalité, peut entrainer un effet de gamme. La répétition de la reprise de ces produits est alors fautive ( Cass. Com., 14 novembre 2018, pourvoi no16-28.091).
51. En l'espèce, la commercialisation d'un très grand nombre de références contrefaisantes (près de 15), est à l'origine d'un effet de gamme, source en lui-même d'un risque de confusion préjudiciable à la société Vlisco, et qui sera réparé par le versement de la somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts.
6) Sur les mesures accessoires
52. Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. L'article 700 du même code permet au juge de condamner en outre la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre, pour les frais exposés mais non compris dans les dépens, une somme qu'il détermine, en tenant compte de l'équité et de la situation économique de cette partie.
53. La défenderesse, qui perd le procès, doit être tenue aux entiers dépens et à indemniser la demanderesse de ses frais, lesquels peuvent être raisonnablement estimés au regard des diligences qui ressortent de ses écritures et des pièces fournies, à 10. 000 euros.
54. Il n'y a pas de motif dans la présente affaire pour écarter l'exécution provisoire, qui est de droit en application de l'article 514 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL
CONDAMNE la société Batex à payer à la société Vlisco Netherlands la somme de 28.437,50 euros en réparation du préjudice causé par la contrefaçon de ses droits d'auteur ;
FAIT DÉFENSE à la société BATEX de poursuivre le débit de tout tissus reproduisant les motifs des tissus référencés 6/8511, 6/8761, A1106, A1450, A2257, A1450, A2156, A2161, 14/3739, 14/3686, 14/4735, 14/1682, 14/1474, 14/69400 de la société Vlisco Netherlands, et ce, sous astreinte provisoire de 100 euros par infraction constatée (c'est à dire par coupon de tissu contrefaisant) courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification de la présente décision et pendant 180 jours ;
ENJOINT à la société BATEX de communiquer à la société Vlisco Netherlands les noms et adresses de son ou ses fournisseurs et de ses clients, les quantités exactes de produits reçus ou commandés et vendus, le tout certifié par un expert comptable, et ce, sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard à exécuter la présente injonction, l'astreinte courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification de la présente décision et pendant 180 jours ;
Se réserve la liquidation des astreintes prononcées ;
CONDAMNE la société Batex à payer à la société Vlisco Netherlands la somme de 3.000 euros en réparation du préjudice causé par la concurrence déloyale créée par la reprise d'un nombre très importants de motifs (effet de gamme) ;
REJETTE les demandes de rappel des produits et de publication de la présente décision ;
CONDAMNE la société Batex aux dépens ;
CONDAMNE la société Batex à payer à la société Vlisco Netherlands la somme de 10.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que la présente décision est de plein droit exécutoire.
Fait et jugé à Paris le 1er décembre 2022.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
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CAPP/JURITEXT000047324637.xml |
JUDICIAIRE
3ème chambre
1ère section
No RG 20/12200
No Portalis 352J-W-B7E-CTKKC
No MINUTE :
Assignation du :
27 novembre 2020
rendu le 01 décembre 2022
DEMANDERESSE
Société VLISCO NETHERLANDS B.V.
[Adresse 3]
[Adresse 3] (PAYS-BAS)
représentée par Me Sophie MICALLEF de la SAS HOYNG ROKH MONEGIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0512
DÉFENDERESSES
S.A.R.L. AFRISTYLE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
S.A.R.L. A&H COMPANY
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentées par Me Yannis JOHN de la SELURL KALIANS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1334
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Nathalie SABOTIER, 1ère vice-présidente adjointe
Elodie GUENNEC, Vice-présidente
Malik CHAPUIS, Juge,
assistés de Caroline REBOUL, Greffière
A l'audience du 06 septembre 2022 tenue en audience publique, avis a été donné aux avocats que la décision serait rendue le 03 novembre 2022.
Le délibéré a été prorogé au 17 novembre 2022 puis au 1er décembre 2022.
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
Exposé du litige
1. La société de droit néerlandais Vlisco Netherlands BV (ci-après Vlisco) se présente comme spécialisée dans la création et la confection de tissus dits "wax", qui se caractérisent par des motifs colorés et graphiques, répétés à l'identique sur l'ensemble d'un tissu selon une technique dérivée du batik indonésien, sur lesquels elle revendique des droits d'auteur. Elle commercialise ces tissus en ligne à l'adresse <www.vlisco.com>.
2. La société Afristyle commercialise, notamment, des tissus dits "wax" sur son site internet accessible à l'adresse <www.african-avenue.com>.
3. Ayant constaté que la société Afristyle proposait à la vente des tissus reproduisant selon elle, plusieurs de ses créations, la société Vlisco a fait procédé à un constat d'huissier le 18 septembre 2020. Après y avoir été autorisée par une ordonnance du délégataire du président du tribunal judiciaire de Paris du 07 octobre 2020, la demanderesse a ensuite fait pratiquer une saisie-contrefaçon le 22 octobre 2020 dans les locaux de la société Afristyle. Ces opérations ont révélé que les marchandises vendues par la société Afristyle étaient expédiées par la société A&H Company située à [Localité 4].
4. Par actes d'huissier signifiés les 27 et 30 novembre 2020, la société Vlisco a fait assigner les sociétés Afristyle et A&H Company devant ce tribunal, en contrefaçon de droits d'auteur et en concurrence déloyale et parasitaire.
5. Par ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 02 septembre 2021, la société Vlisco demande au tribunal, au visa des articles 122 et 789 du code de procédure civile, L. 111-1, L. 112-1, L. 113-5, L. 122-4, L. 331-1-2, L. 331-1-3 et suivants du code de la propriété intellectuelle, 10 bis de la Convention d'Union de Paris et 1240 du code civil, de :
A titre principal :
? Déclarer les sociétés Afristyle et A&H Company coupables d'actes de contrefaçon de droit d'auteur à son encontre et à lui payer en conséquence 2.355.000 euros solidairement au titre des conséquences économiques négatives engendrées par la contrefaçon (à parfaire), 115.000 euros chacune en réparation de son préjudice moral et 600.000 euros solidairement de dommages et intérêts en réparation des actes de concurrence déloyale ;
? Ordonner la communication des noms et adresses des producteurs, distributeurs, fournisseurs et tous autres détenteurs des produits incriminés au titre de la contrefaçon ou de la concurrence déloyale, mais aussi des grossistes, détaillants et clients, des quantité exactes de produits vendus, fournis, reçus ou commandés, à quel prix d'achat et de vente, ainsi que tout document justificatifs et/ou certifiée par un expert comptable, le tout sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé un délai de 8 jours;
A titre subsidiaire :
? Condamner les sociétés Afristyle et A&H Company au titre des actes de concurrence déloyale commis au préjudice de la société Vlisco, à lui payer 2.855.000 euros solidairement de dommages et intérêts provisionnels au titre du préjudice économique subi (à parfaire), et 115.000 euros chacune en réparation de son préjudice moral ;
En tout état de cause :
? Interdire la poursuite des actes de contrefaçon, sous astreinte de 50.000 euros par jour de retard ;
? Ordonner le rappel des produits contrefaisant sous astreinte de 5.000 euros par jour de retard ;
? Ordonner la publication à la charge des défenderesses du jugement à intervenir dans 5 journaux ou revues au choix de la société Vlisco pour un coût fixé à 4.500HT euros.
? Ordonner la publication du jugement à intervenir sur la page d'accueil du site internet de la société Afristyle dans un encadré visible intitulé "publication judiciaire" ;
? Se réserver la liquidation de l'astreinte ;
? Rejeter la demande de condamnation de la société Vlisco en dommage et intérêts ;
? Condamner les défenderesses à lui verser 75.000 euros solidairement au titre de l'article 700 et aux entiers dépens.
6. Par leurs dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 30 septembre 2021, les sociétés Afristyle et A&H demandent au tribunal, au visa des articles L 111-1, L 112-1, L 113-5, L 122-4, L 331-1-3 et suivants du code de la propriété intellectuelle et 1240 du code civil, de :
A titre principal :
? Mettre hors de cause la société A&H ;
? Rejeter la revendication de droit d'auteur formulée par la demanderesse sur les dessins en cause et la débouter en conséquence de ses demandes sur ce fondement ;
? Rejeter toute qualification de concurrence déloyale en l'absence de preuve et en conséquence l'ensembles des demandes formulées sur ce fondement ;
A titre subsidiaire :
? Ramener à de plus justes proportions les demandes indemnitaires formulées par la demanderesse.
En tout état de cause :
? Dire que la société Vlisco a porté préjudice à la société Afristyle du fait de son action et la condamner à lui verser 150.000 euros à ce titre ;
? Condamner la demanderesse à lui verser 5.000 euros au titre de l'article 700 et aux entiers dépens.
7. L'instruction a été close par une ordonnance du 20 janvier 2022 et l'affaire a été plaidée à l'audience du 06 septembre 2022.
1) Sur la mise hors de cause de la société A&H
Moyens des parties :
8. Les défenderesses sollicitent la mise hors de cause de la société A&H dans la mesure où celle-ci ne s'occupe que de l'expédition des colis. Elle ne commet donc selon elles aucun acte de contrefaçon de droits d'auteur.
9. La société Vlisco s'oppose à cette mise hors de cause considèrant que celle-ci, en tant que responsable de la gestion logistique des commandes passées sur le site de la société Afristyle, commet des actes de contrefaçon.
Appréciation du tribunal :
10. Aux termes de l'article L. 335-2 du code de la propriété intellectuelle, "Toute édition d'écrits, de composition musicale, de dessin, de peinture ou de toute autre production, imprimée ou gravée en entier ou en partie, au mépris des lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs, est une contrefaçon et toute contrefaçon est un délit.
La contrefaçon en France d'ouvrages publiés en France ou à l'étranger est punie de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 euros d'amende.
Seront punis des mêmes peines le débit, l'exportation, l'importation, le transbordement ou la détention aux fins précitées des ouvrages contrefaisants."
11. L'article L. 335-3 de ce même code précise qu'"Est également un délit de contrefaçon toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d'une oeuvre de l'esprit en violation des droits de l'auteur, tels qu'ils sont définis et réglementés par la loi."
12. Les demandes de la société Vlisco sont fondées sur le fait que la société A&H Company prépare et expédie les commandes passées sur le site "african-avenue". Il ressort en effet des procès verbaux de constat d'achat sur internet (pièces Vlisco no25.10 et 25.11) que la société A&H Company est mentionnée comme expéditeur sur les colis des commandes passées par l'huissier de justice, et en assure également le suivi.
13. Il s'en déduit la société A&H, en charge de la logistique des commandes de produits contrefaisants, participe au "débit"des ouvrages contrefaisants. Cette société sera donc déboutée de sa demande de mise hors de cause.
2) Sur l'originalité et la titularité des droits
Moyens des parties :
14. Pour chaque motif de tissu, la société Vlisco indique fournir une référence, l'identité du créateur, une date de création et/ou de commercialisation, les caractéristiques de l'oeuvre et la preuve de son exploitation.
15. Selon les sociétés défenderesses, la société Vlisco affirmant elle même commercialiser les tissus du "groupe Vlisco", le véritable auteur des dessins invoqués serait ce "groupe" et non la société demanderesse. Les sociétés défenderesses ajoutent que la société Vlisco ne peut être titulaire d'un droit d'auteur sur les dessins invoqués, car une société ne peut être l'auteur que d'une oeuvre collective. En conséquence, la demanderesse devrait justifier d'une cession de droit pour pouvoir agir. Elle ajoute que les captures d'écran versées aux débats par la société Vlisco doivent être écartées dans la mesure où elles sont dénuées d'une date certaine. De même les factures fournies désignent les tissus par des références de sorte qu'il serait impossible d'identifier à quel produit telle ou telle facture correspond. Ensuite, les croquis présentés par la demanderesse seraient des documents internes qui ne renseignent pas sur des droits qui n'ont fait l'objet d'aucune protection. Enfin, la société Vlisco ne pourrait être auteur car le consommateur ne pourrait l'identifier comme tel sans estampille.
Appréciation du tribunal :
16. Conformément à l'article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle, l'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. L'article L.112-1 du même code précise que ce droit appartient à l'auteur de toute oeuvre de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination. Il en résulte que la protection d'une oeuvre de l'esprit est acquise à son auteur sans formalité et du seul fait de la création d'une forme originale en ce sens qu'elle porte l'empreinte de la personnalité de son auteur et n'est pas la banale reprise d'un fonds commun non appropriable.
17. Aux termes de l'article L.113-1 du code de la propriété intellectuelle, "La qualité d'auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l'oeuvre est divulguée." Cette présomption peut jouer au bénéfice d'une personne morale, à l'égard d'un tiers recherché en contrefaçon, sous réserve que celle-ci justifie d'une exploitation paisible et non équivoque de l'oeuvre sous son nom, et en l'absence de revendication de l'auteur de la création (notamment : Cass. Civ. 1ère, 10 décembre 2014, pourvoi no13-23.076). Cette présomption simple de titularité des droits la dispense d'établir le processus créatif de l'oeuvre revendiquée et les circonstances dans lesquelles les droits lui ont été cédés. Pour en bénéficier, il lui appartient d'identifier précisément l'oeuvre qu'elle revendique, de justifier de la date à laquelle elle a commencé à en assurer la commercialisation, et de rapporter la preuve d'actes d'exploitation à la date des actes litigieux, et non pas à la date de création, par un ensemble d'éléments précis et concordants, qu'aucun élément contraire ne vient sérieusement contredire, ainsi que l'identité des caractéristiques de l'oeuvre qu'elle revendique et de celle dont elle rapporte la preuve de la commercialisation sous son nom.
18. En l'espèce, le dessin portant la référence 14/3739 dénommé « Ampoule électrique » ou « Electric Bulb » créé par A.v.d. [C], en 1983 (pièce Vlisco no 2.5), consiste en un motif fantaisiste représentant des ampoules électriques qui sont disposées dans une direction ascendante (au lieu de la direction normale de "suspension") et reliées de manière à ressembler à une plume de paon, décliné en différentes couleurs, l'ampoule étant entourée d'une sorte de contour, dont la couleur varie entre le gris piqueté et le noir. Pour établir la commercialisation de ce dessin, la société Vlisco produit un extrait du catalogue Vlisco (pièce Vlisco no 2.1), un extrait du site Internet <www.vlisco.com> qu'elle exploite (pièce Vlisco no 2.2), des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé 14/3739 (pièce Vlisco no 2.3), un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. relatif au motif 14/3739 (pièce Vlisco no 2.8) et des publications sur les réseaux sociaux (Instagram des 6, 7 et 8 août 2018 -pièce Vlisco no 2.6 et Facebook des 12 janvier 2014, 1er juin 2015, 9 mai 2015, 9 août 2018-pièce Vlisco no 2.7).
19. Le dessin dénommé "Fleur de mariage" ou "Rolls Royce" est également créé par A.v.D [C], en 1979 et porte la référence 14/3541 (Pièces Vlisco no3.4). Il se caractérise par des pétales de fleurs d'hibiscus comportant une tige, un pistil avec un motif fantaisiste à sa base, en forme d'éventail déplié. Ces pétales sont soit d'une seule couleur, soit de deux couleurs différentes, l'une des deux couleurs ornant davantage de pétales que la seconde, dans différentes orientations, et disposés sur un fond strié. L'exploitation de ce dessin est étayé par un extrait du catalogue Vlisco (pièce Vlisco no 3.1), un extrait du site Internet <www.vlisco.com> (pièce Vlisco no 3.2), des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé 14/3541 (pièce Vlisco no 3.3), un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. relatif au motif 14/3541 (pièce Vlisco no 3.6) et des publications sur les réseaux sociaux (Instagram des 24 novembre 2019, 10 et 14 septembre 2018, 6 août 2018, 3 mai 2015, 1er novembre, 22 septembre, 14 août et 27 juin 2014-pièce Vlisco no 3.7 et Facebook des 21 mars 2019, 12 et 13 septembre 2018, 4 septembre 2017, 27 janvier 2016, 14 novembre, 17 juin, 31 mai, 29 avril et 2 mars 2015, 31 et 21 octobre, 19 septembre, 16 aout, 19 juillet, 2, 19, 26 et 29 juin, 10 mai 2014, 2 et 19 aout 2013 et 7 août 2012 - pièce Vlisco no 3.8). Au surplus, la société Vlisco fournit des extraits du livre "Fabrics" publié en 2012 (pièce Vlisco 3.9 et 1.6).
20. Le motif "[W]" porte la référence 14/ 3686 comprend une succession de formes oblongues dont deux côtés longs sont concaves et deux côtés courts convexes ; l'extrémité convexe de chaque forme vient se loger dans la cavité de chaque côté long de la forme mitoyenne ; chaque forme a un mouvement produisant un effet de torsion et la juxtaposition de cette forme en trois orientations distinctes permettantleurparfaite imbrication. Il est produit un extrait du catalogue Vlisco (pièce Vlisco no 4.1), un extrait du site Internet <www.vlisco.com> exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no 4.2), des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé 14/3686 (pièce Vlisco no 4.3) , un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. relatif au motif 14/3686 (pièce Vlisco no 4.4), des publications Facebook des 25 janvier 2013, 13 avril 2013, 14 mars 2014, 19 juillet 2014, 3 septembre 2016, 9 octobre 2016 (pièce Vlisco no 4.6) et un extrait du livre "Fabrics" publié en 2012 (pièces Vlisco no1.6 et 4.7).
21. Le motif 6/8511 (pièce Vlisco no 5.3 et 5.4) est décrit comme se caractérisant par la répétition d'un motif composé de six disques dont les centres sont évidés, placés en cercle, cinq d'entre eux se situant autour d'un disque central, les cinq disques disposés autour du disque central évoquent des roues dentelées incomplètes et sur deux d'entre eux sont attachés des groupes de deux ou trois formes, dont les contours sont ajourés et l'intérieur composé d'une succession de flèches pleines, évoquant d'épais filaments. L'arrière-plan avec un effet craquelé est parcouru de motifs nervurés ou veineux sombres. Il est produit à ce titre, un extrait du site Internet <www.vlisco.com> exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no 5.1), une facture de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé 8511 (pièce Vlisco no 5.2), ainsi qu'un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. relatif au motif 8511 (pièce Vlisco no 5.4).
22. Le motif "Blocks" ou "1004" référencé 14/3826 (pièce Vlisco no6.4) se caractérise par la répétition d'un assemblage de blocs de différentes tailles et formes à angles droits, dans un ensemble prenant la forme générale d'un losange, par l'usage de plusieurs couleurs dont une dominante, par le maintien d'un espace entre chaque bloc évitant aux côtés de se toucher, par la présence de stries en diagonale de différentes largeurs sur les blocs et par un arrière plan de couleur unie strié de lignes noires horizontales, de longeurs et épaisseurs différentes, discontinues et irrégulières. La société Vlisco produit pour ce motif un extrait du catalogue Vlisco (pièce Vlisco no6.1), un extrait du site internet <www.vlisco.com> exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièceVlisco no 6.3) , des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé A1106 (pièce Vlisco no 3.3) , un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. relative au motif A1106 (pièce Vlisco no 6.5), des publications Instagram des 23 juin et 18 février 2015, et 26 septembre 2014 (pièce Vlisco no6.6) et Facebook des 17 juin et 20 février 2015, 26 septembre et 26 décembre 2014, 27 décembre et 7 juin 2013 (pièce Vlisco no6.7) et un extrait du livre "Fabrics" publié en 2012 (pièces Vlisco no1.6 et6.8).
23. Le motif "Hibiscus", référencé 14/0921 (pièce Vlisco no7.4) se caractérise par la représentation de trois fleurs d'hibiscus, chaque fleur comportant un pistil et des étamines stylisés jaillissant de la corolle, et dont les pétales sont plus foncées à la base, des stries foncés émanantdu centre. L'une des fleurs est représentée d'un point de vue supérieur, avec une corolle de cinq pétales ouverts, l'autre est de côté et sa corolle apparaît en forme d'éventail déplié et la dernière est de profil dans une orientation permettant de percevoir l'intérieur de la corolle. Des tiges supportent les fleurs entrelacées et pourvues de feuilles de forme allongée et aux bords dentelés, dont les nervures sont dessinées en pointillés dans une couleur contrastée. L'ensemble du motif forme un rectangle apposé sur un arrière-plan composé de nervures entrelacées. La demanderesse produit pour ce motif, un extrait du site internet <www.vlisco.com> (pièces Vlisco no 7.1 et 7.2) , des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé 14/0921 (pièce Vlisco no7.3) , un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no 7.5), des publications Instagram des 9 février 2020, 2,3 et 9 juin 2019, 6,8 et 9 août 2018, 20 septembre 2015, 4, 14 et 21 septembre 2014 (pièce Vlisco no7.6) et Facebook des 9 août 2018, 14 août, 15 et 23 juin 2017, 15 septembre, 13 juin, 2 mars 2016, 20 mai, 25 mars 2015, 6 novembre, 4 et 21 septembre, 1er, 12, 25 et 28 mars 2014 (pièce Vlisco no7.7) et un extrait du livre « Fabrics » publié en 2012 (pièces Vlisco no1.6 et 7.8)
24. Le motif "le sac de [Z] [G]", référencé A1106, est issu d'un dessin de 2008 (pièce Vlisco no8.4 et 8.5). Il comporte la représentation d'un sac à main dont le haut est ovale et le fond plat, vu de face et de biais et comportant : une face avant, couverte aux deux tiers de sa hauteur d'un motif en quadrillage ou tressage spécifique, distinct du motif composant la bande supérieure du dernier tiers qui reprend le fond du dessin ; deux anses dont la plus visible dispose d'attaches plates en forme de cloche collées sur la face avant (certaines versions ayant des attaches d'une couleur différentes des anses). Les bords des attaches sont longés d'une surpiqûre fine et sombre ; une des attaches comporte un ?illet, lui-même supportant une languette rectangulaire à laquelle est attachée une fleur d'hibiscus, dont la représentation permet de percevoir les cinq pétales de la corolle ouverte dont la base est plus foncée ainsi que le pistil ; une tranche d'épaisseur homogène allant de bord en bord, découpée en trois bandes dans la longueur, la bande du milieu étant sombre. Les sacs comportent une fermeture allant d'une extrémité à l'autre, ils sont positionnés de biais et superposés les uns aux autres de manière à ce que les côtés avec les fermetures forment une ligne verticale. La société Vlisco produit pour ce motif, un extrait du site internet <www.vlisco.com> exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièces Vlisco no8.1 et 8.2) , des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé A1106 (pièce Vlisco no8.3) , un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V.(pièce Vlisco no 8.4), des publications Instagram du 26 avril 2018 (pièce Vlisco no8.6) et Facebook des 15 mars, 19 et 29 août, 19 octobre 2013, 16 mai 2016, 7 décembre 2017 (pièce Vlisco no8.7) et un extrait du livre "Fabrics" publié en 2012 (pièces Vlisco no1.6 et 8.8).
25. Le dessin "Shoes" créé en 2011, est référencé A1450 (pièce Vlisco no9.3). Il comporte la représentation d'escarpins à talons hauts noirs, vus de l'arrière et dans une orientation en biais, dont on aperçoit la semelle sous la voûte plantaire ornée de stries dégradées, créant un effet d'ombre et dont le contrefort arbore un motif distinct du reste, uni, de la chaussure. L'embout ouvert est orné d'un n?ud plat, un arrière-plan représentant des marches d'escalier, dont les différentes surfaces sont ornées alternativement d'un aplat de couleur ou de motif et de rayures en diagonales. Les escarpins sont disposés par rangées sur les marches de l'escalier, en alternant pour chaque rangée l'orientation vers la gauche ou vers la droite, et l'emplacement des chaussures pour qu'elles soient en alternance en fonction des rangées. Les contreforts présentent des motifs différents, géométriques de cannage ou tressage spécifique, alliant les mêmes couleurs qui rappellent celles de la semelle et du fond du dessin. La société Vlisco communique un extrait du site internet <www.vlisco.com> exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no 9.1), des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé A1450 (pièce Vlisco no 9.2) , un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no 9.3) et un extrait du livre "Fabrics" publié en 2012 (pièces Vlisco no1.6 et 9.5).
26. Le motif "Ventilateur" créé par T. [X] en 1985 et référencé 6/8759 (Pièce Vlisco no10.4) se caractérise par la représentation d'un ventilateur de table avec une élice trois pales et à axe horizontal, vu de face et avec une légère orientation en biais, composé d'un socle en forme de parallélépipède, bordé d'un fin liséré constitué d'une succession de courtes lignes de couleur claire perpendiculaires au bord et dont la face supérieurest ornée de courtes stries foncées alignées sur trois niveau, comportant également un empiècement rectangulaire divisé en trois portions ; un bras vertical présentant également de courtes stries alignées sur neuf niveaux, séparés par une ligne horizontale ; un arbre moteur coloré d'une nuance plus foncée ou d'une couleur distincte orné de motifs en pointillés plus clairs organisés en un alignement de triangles ; une grille avant dont la plaque centrale formant le centre des rayons de la grille est en forme de disque, dont le bord est orné d'une ligne en trait de couleur distincte et présentant une étoile au large ventre rond à huit brances de même longueur atteignant la line de bordure de la plaque de couleur constrastée ; un anneau concentrique apposé sur la grille avant. L'arrière plan du motif est parcouru de lignes sombres partant des bords des ventilateurs dans le prolongement des rayons de leursgrilles, formant des faisceaux, étroits à leur base, entrecoupés par des traits en diagonales, de fonçon homogène. Pour ce motif, la demanderesse fourni des extraits du site internet <www.vlisco.com> (pièce Vlisco no10.1 et 10.2), des factures de commercialisation par elle du motif référencé 8759 (pièce Vlisco no10.3), un extrait du registre des données de la société Vlisco (pièce Vlisco no10.4), des publications Instagram des 20 novembre 2018 et 9 mai 2020 (pièce Vliso 10.5), des publications Facebook des 9 mai 2020, 14 février 2016, 14 février, 25 avril, 10 mai et 7 juin 2014, 15, 19 et 26 mai, 25 juillet 2013, 3 octobre et 19 décembre 2012 (pièce Vlisco no10.6), et un extrait du livre "Fabrics" publié en 2012 (pièce Vlisco no10.7 et 1.6).
27. Le motif intitulé "bullets" ou "Z'ongles de Mme [D]" porte la référence 14/ 1682 (pièceVlisco no11.3). Il est constitué de la répétition par superposition alternative de deux arcs de cercle composés de figures positionnées verticalement, de forme oblongue évoquant des bandes de cartouches avec une extrémité inférieure en pointe ou des ongles peints, reliés par un trait plein à mi-hauteur, dont la taille augmente progressivement vers le sommet de l'arc. Ces figures sont soit de couleur sombre et traversées d'une ligne verticale en pointillés plus clairs dans le premier arc de cercle, soit d'une couleur plus claire et dotées d'un contour épais et sombre dans le second arc de cercle. Pour établir la commercialisation sous son nom, la société Vlisco communique un extrait du catalogue Vlisco (pièce Vlisco no 11.1), des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé 14/1682 (pièce Vlisco no11.2), ainsi qu'un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no11.5).
28. Le motif "Oignon", référencé 14/2921 (pièce Vlisco no12.4 et 12.1) se caractérise par une forme rappelant une jarre ou un oignon dont le col sombre est évasé et se finit par des dents droites et une dent recourbées vers l'extérieur sur chaque côté. Le col de chaque jarre est soit uni, soit pourvu d'un motif consistant en une forme générale rappelant l'agrégation partielle des trois sphères délimitées par des pointillés, une forme identique étant dessinée à l'intérieur et délimitées par des stries formant des rayons, l'intérieur de cette forme étant occupée par un autre en forme de peigne dont l'extrémité supérieure arrondie est évidée. La partie bombée de la jarre arbore un triangle aux côtés irréguliers. Les parties évidées en dehors du triangle présentent soit une longue feuille de palme, soit la représentation stylisée des rainures d'une feuille.Les formes de jarres sont assemblées en groupe de trois ou quatre, de différentes tailles. Chaque groupe est relié par un trait épais et irrégulier dont le fond sombre est parsemé de motifs plus claires de cannage, de cercles et de formes pointillées. Les espaces délimités par ces traits sont remplis de fonds, de couleurs différentes, et parsemés de petites branches sombres émanant des traits, remplies de pointillés clairs, au bout desquelles sont disposées des fins feuilles ou bourgeons. La commercialisation de ce motif par la société Vlisco est étayé par un extrait du site internet <www.vlisco.com> (pièce Vlisco no12.2), des factures de commercialisation du motif référencé 2921 (pièce Vlisco no12.3), un extrait du registre des données de Vlisco (pièce Vlisco no12.5), des publications Facebook des 11 février, 2018, 20 novembre 2017, 29 janvier, 15 mars et 3 septembre 2016, 25 mars 2015, 5 août, 11 et 21 septembre et 5 octobre 2014, 6 octobre et 8 novembre 2013 (pièce Vlisco no12.6), et par un extrait du livre "Fabrics" publié en 2012 (pièces Vlisco no1.6 et 12.7).
29. Le dessin, référencé A2161 se caractérise par la répétition de motifs évoquant des crochets à tête ronde, en contact les uns avec les autres pour former une arborescence. Leurs contours semblent hérissés de petites pointes et ils sont recouverts de toutes petites écailles. Un motif d'oiseau est également apposé de façon répétée dans les trouées de l'arborescence. Cet oiseau est représenté en vol, de profil, doté d'une longue queue, les ailes déployées, composées de trois des motifs de crochets qui l'entourent, avec un fil sortant du bec et disposé en dessous de son corps, au bout duquel est attachée une pierre taillée dont l'éclat des facettes est représenté par huit traits en halo le long descontours. L'arrière-plan est parcouru de lignes pointillées horizontales. La société Vlisco produit un extrait du site internet <www.vlisco.com> exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no13.1), des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé A2161 (pièce Vlisco no13.2) et un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. relatif au motif A2161 (pièce Vlisco no13.3)
30. Le motif référencé 6/8761, créé en 1984 par W.w [S] (pièce Vlisco no14.3), comporte une représentation stylisée de couronnes de pointes hérissées, assemblées deux par deux par leur socle. Sur un fond noir, le socle de la couronne se compose d'un liseré évoquant un galon formés de triangles noirs et rouges, d'une bande rouge , d'un liseré de motifs de triangles jaunes et noirs et d'un liseré évoquant une ligne de jours échelle. Ces couronnes sont surmontées de longues pointes, une impression de perspective étant rendue par le fait que les sept pointes en premier plan sont en noir plein tandis que les six pointes en arrière-plan sont en stries noires obliques, les rendant moins distinctes et les faisait paraître plus éloignées de l'observateur. L'arrière-plan est parcouru de fin motifs rappelant des nuages ou une mousse savonneuse. La société Vlisco communique pour ce dessin, un extrait du site Internet <www.vlisco.com> exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no14.1), une facture de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du motif référencé 8761 (pièce Vlisco no14.2) et un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. relatif au motif 8761 (pièce Vlisco no14.3).
31. Le motif "Bague", référencé A2257, conçu en 2016, consiste en un dessin se caractérisant par la répétition, selon des orientations variées, de la représentation stylisée d'une bague en trois dimensions consistant en un anneau surmonté d'un disque comprenant une série de cercles, servant de base au montage d'une pierre taillée sertie par six griffes rondes. Deux pierres sont également incrustées dans l'anneau, de part et d'autre du montage de la pierre. Les trois pierres, qui évoquent des diamants, sont d'une couleur contrastant avec le reste de l'objet et leur facettes semblent refléter la lumière en éclats brillants. Des étoiles à huit branches, quatre courtes et quatre longues, et au c?ur rond et plein, parsèment le dessin, de différentes tailles, elles ajoutent à l'impression de scintillement. Il est produit pour ce motif, un extrait de la boutique en ligne <www.shop.vlisco.com> exploitée par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no 15.1), un extrait du site internet <www.vlisco.com> exploité par Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no15.2), des factures de commercialisation par Vlisco Netherlands B.V. du dessin référencé A2257 (pièce Vlisco no15.3), un extrait du registre des données de Vlisco Netherlands B.V. (pièce Vlisco no15.4) et des publications Instagram des 15 novembre et 4 décembre 2017 (pièce Vlisco no15.6) et Facebook des 15 novembre et 4 décembre 2017 et du 4 janvier 2018 (pièce Vlisco no15.7).
32. Le motif "Happy family", référencé H628, est crée en 1952 (pièce Vlisco no16.4). Il se caratérise par la représentation de poules, têtes de coqs, poussins et oeufs, disposée : en losange avec deux sommets constitués par deux têtes de coqs de profil se faisant face, les deux autres sommets par des poules de profil, au centre du losange une poule de profil et de taille plus importante dont la tête est tournée vers l'arrière, huit poussins sont positionnés dans les parties supérieure et inférieure du losange, répartis par deux de part et d'autre de l'axe vertval, vers lequel ils sont tournés, et les côtés sont constitués d'une succession de sept oeufs et de quatre courtes lignes contituées de trois oeufs partant des sommets à têtes de coqs vers le centre de la figure. Autour du losange, se trouve un carré constitué de quatre têtes de coqs tournés vers le centre du motif et comportant deux poussins en son centre, carré qui est répété quatre fois autour du losange ; deux ensemble de trois poussins positionnés en léger arc au niveau des deux sommets supérieur et inférieur du losange, chaque possin étant orienté vers le sommet ; et quatre poussins disposés de part et d'autre du losange et lui tournent le dos. Il est produit pour ce motif, un extrait du site internet <www.vlisco.com> (pièce Vlisco no16.1 et 16.2), des factures de commercialisation de ce motif (pièce no16.3), un extrait du registre des données de Vlisco (pièce Vlisco no16.5), des publication Instagram des 23 janvier et 10 avril 2020, 6 août 2018, 8 et 24 juin, 16 juillet, 22 août, 20 septembre 2015 et 11 mai et 27 juin 2014 (pièce Vlisco no16.6), des publications Facebook des 10 avril 2020, 1er avril 2018, 29 juin et 21 juillet 2016, 15 juillet 2015, 30 avril, 26 juin et 19 juillet 2014, 5 et 10 mai 2013 (pièce Vlisco no16.7) et un extrait du livre "Fabrics" publié en 2012 (pièce Vlisco no16.8 et 1.6).
33. Le motif "Flash", référencé 14/1178, créé en 1955 par [U] (pièce Vlisco no17.3), se caractérise par un motif fantaisiste basé sur des flèches qui se chevauchent et s'emboitent en pointant dans deux directions, l'alternance de flèches de couleur uniforme et de flèches à carreaux très fins, l'ajout d'une sphère au milieu de chaque flèche entourée de tirets noirs, la palette de couleurs dans laquelle un groupe de flèche est dans une couleur particulière et puis dans une autre et dans laqulle la sphère d'un groupe a la couleur de l'autre groupe, et par plusieurs colonnes de flèches séparées par une colonne de flèches d'une couleur uniforme dont le centre est un motif tantôt en forme de diamant, tantôt ovale de la couleur de certaines flèches des colonnes. Il est produit pour ce motif, un extrait d'un catalogue Vlisco (pièce Vlisco no17.1), des factures de commercialisation de ce motif par Vlisco (pièce Vlisco no17.2) et un extrait du registre des données de Vlisco relatif à ce motif (pièce Vlisco no17.4).
34. Le motif "Grotto" (pièce Vlisco no18.4), référencé 14/3639, se caractérise par la représentation répétée et stylisée de plantes grimpantes, aux longues tiges se prolongeant par des longues feuilles étroites et pointues. Les tiges sont souples et semblent être tirées, dans un mouvement d'élévation, par les feuilles auxquelles elles donnent naissance à intervalle irrégulier, pour la plupart orientées vers le haut. Leur centre est de la même couleur que la couleur dominante de l'arrière-plan. Ce dernier consiste en une répétition régulière de sphères de même couleur, des lignes droits et parallèles, d'un espacement irrégulier devenant plus étroit au niveau des sphères. Il est produit pour ce motif, des extraits du site internet <www.vlisco.com> (pièces no18.1 et 18.2), des factures de commercialisation par Vlisco de ce motif (pièce Vlisco no18.3), un extrait du registre des données de Vlisco relatif à ce motif (pièce Vlisco no18.5), une publication Instagram du 28 avril 2018 (pièce Vlisco no18.6), des publications Facebook des 30 septembre 2015 et 31 mai 2012 (pièce no18.7) et un extrait du livre "Fabrics" (pièce Vlisco no1.6 et 18.8).
35. Le dessins A2171, créé en 2016 par T. [O] (pièce Vlisco no19.3), se caractérise par la répétition linéaire des cabosses de cacao représentées en trois dimensions ouvertes par la moitié dans la longueur. Chacune est séparée en deux parties, l'une étant remplie de six fèves de cacao et l'autre de sept. Les fèves sont représentées à même hauteur, leurs faces supérieures planes et colorées par un effet craquelé. Les autres faces des fèves se fondent dans l'obscurité du fond de la cabosse et ne sont distinuables que par des stries plus claires qui laissent deviner leurs contours. Le dessin présente également desfeuilles de cacaoyer représentées en bouquet de six et séparant chaque cabosse. Chacun de ces bouquets est plus petit que la cabosse qu'il jouxte. Les feuilles sont séparées en deux sur la longueur, une partie étant striée de nervures régulières et l'autre consistant en un aplat de couleur sombre. L'arrière plan est composé d'un fond à effet craquelé. La société Vlisco produit pour ce motif, un extrait de son site internet (pièce Vlisco no19.1), des factures de commercialisation (pièce Vlisco no19.2) et un extrait du registre des données de la société (pièce Vlisco no19.3).
36. Le motif A2337 se caractérise par une superposition de plusieurs plans composés chacun de la répétition de motifs différents. Le premier plan consiste en la répétition de formes circulaires composées de différents motifs concentriques, pouvant rappeler un mandala ou une corolle de fleurs vue de dessus. Un motif de rosace à neuf branches en marque le coeur. Au second plan, des bouquets de fleurs aux corolles évasées rappellent des arums, ou encore des fleurs sur le point d'éclore. Ces fleurs se joignent sur une même tige formant à chaque fois un ensemble de six fleurs. L'extrémité des fleurs est teinté d'une couleur délavé afin de les différencier de la tige. Au troisième et dernier plan se trouve un maillage de tiges sans fleurs. Il est produit, pour ce motif, un extrait du site de Vlisco (pièce Vlisco no20.1), des factures de commercialisation du motif en cause (pièce Vlisco no20.2) et un extrait du registre des données de Vlisco (pièce Vlisco no20.3).
37. Le dessin A2260 se caractérise par la répétition de motifs linéaires, rappelant des frises, et consistant en deux rubans. Ils sont disposés de telle sorte que le serpentement alterne de façon régulière entre un virage arrondi et un virage en angle pointu. Les deux rubans qui composent la frise s'entremêlent en symétrie et dessinent une succession d'ovales et de carrés. Ces derniers sont rempli d'un applat de couleur uni. L'arrière-plan, dont la couleur reflète un effet craquelé, est parcouru de nervures sombres et resserrées. Cet arrière-plan se retrouve dans une autre couleur au centre des formes ovales de la frises. La société Vlisco produit, pour ce motif, un extrait de son site internet (pièce Vlisco no21.1), des factures de commercialisation (pièce Vlisco no21.2), un extrait du registre des données de la société (pièce Vlisco no21.3), des publications Instagram des 12 et 30 novembre 2017 (pièce Vlisco no21.4) et des publications Facebook des 8 et 13 décembre 2017 (pièce Vlisco no21.5).
38. Le dessin S7020 se caractérise ar une combinaison de motifs végétaux stylisés et disposés en arrangement floral composés de fleurs dont les pétales sont représentées par quatre pointes et leur imbrication par deux lignes dans la longueur ornées de stries, de fleurs dont la corolle légèrement évasée semble sur le point d'éclore, à trois pointes représentant ses pétales, et de feuilles longues et étroites, scindées par une nervure centrale, sur lesquelles figurent de part et d'autre de cette nervure une succession de triangles, la couleur de ceux-ci et du fond alternant sur chaque moitié. Ces élements sont liés entre eux par des tiges souples formant des arabesque, les composants des motifs se regroupant à intervalle régulier dans un mouvement ascendant. L'arrière-plan de couleur unie est parcouru de petit traits. Il est produit, pour ce motif, un extrait du site de la société demanderesse (pièce Vlisco no22.1), des factures de commercialisation (pièce Vlisco no22.2) et un extrait des registres des données de la société (pièce Vlisco no22.3).
39. Le motif "Cerveau de [T] [Y]", référencé 14/5124, créé en 1997 (pièce Vlisco no23.4) se caractérise la répétition d'un motif de forme de croissant, composé de trois arbres joints en leur base, dénués de feuille. Le tronc de l'arbre centrl est perpendiculaire aux deux autres qui l'entourent. Les extrémités de la ramure de l'arbre central semblent toucher celles des deux arbres qui l'entourent, si bien que ces trois élements peuvent être appréhendés comme un ensemble, les pourtours des ramures formant un croissant. L'impression d'unité est renforcée par le fait que les trois arbres se détachent sur un même fond coloré à effet craquelé. Les différents croissants composant le motif sont de couleur, taille et orientation différentes. La société Vlisco produit, pour ce motif, des extraits de son site internet (pièce Vlisco no23.1 et 23.2), des factures de commercialisation (pièce Vlisco no23.3), un extrait du registre des données de la société (pièce Vlisco no23.4), des publications Instagram des 7 et 10 août 2019 (pièce Vlisco no23.5), des publications Facebook des 7 et 10 août 2019 (pièce Vlisco no23.6) et un extrait du livre "Fabrics" (pièces Vlisco no1.6 et 23.7).
40. Le motif "Conseiller", référencé H907, créé en 1955 (pièce Vlisco no24.4) se caractérise par un fond uniforme sur lequel se trouve un enchevêtrement répété d'arabesque et de volutes fines tournées vers l'intérieur. Elles sont orientées tantôt vers le haut, tantôt vers le bas, tantôt à droite, tantôt à gauche, et composées par une succession de petit traits à distance égales. Les contours des volutes se fondent dans un halo flou, mais laissant percer un arrière-plan coloré. Pour ce motif, il est produit des extraits du site internet de la demanderesse (pièces Vlisco no24.1 et 24.2), des factures de commercialisation (pièce Vlisco no24.3) et un extrait du registre de la société (pièce Vlisco no24.5).
41. La société Vlisco établit donc, pour chaque motif de tissu, l'existence d'un parti pris esthétique et totalement arbitraire, portant dès lors l'empreinte de la personnalité de son auteur. La pièce no2 des sociétés défenderesses, qui consiste en des reproductions d'autres tissus "wax", outre qu'elle n'est pas datée, ne comporte aucun tissu reproduisant une ou plusieurs caractéristiques de l'un des dessins objets du présent litige, lesquels ne peuvent en aucun cas être considérés comme relevant d'un fonds commun non appropriable.
42. Force est en outre de constater que la demanderesse fournit tous élements attestant de la commercialisation, antérieure à septembre 2020, paisible et non-équivoque par elle, sous son nom, de l'ensemble des tissus invoqués, sans revendication d'aucun auteur personne physique, peu important à cet égard qu'elle appartienne à un groupe et qu'une autre entité de ce groupe soit en charge de la création.
43. La société Vlisco bénéficie donc de la présomption de titularité des droits d'auteur sur chacun des tissus invoqués, lesquels sont originaux et, partant, éligibles à la protection par le droit d'auteur.
3) Sur la contrefaçon
Moyens des parties :
44. La société Vlisco rappelle que la contrefaçon, en matière de droit d'auteur, s'apprécie aux regard des ressemblances uniquement, les divergences de couleur ne permettent donc pas d'écarter cette qualification. Les dessins sur lesquels elle dispose d'un droit d'auteur sont donc reproduits servilement par les défenderesses.
45. La société Afristyle indique qu'aucun des produits vendus ne portent la marque Vlisco comme cela a pû être le cas dans les précédents procès intentés par la demanderesse.
Appréciation du tribunal :
46. En application des articles L. 122-1 et L. 122-4 du code de la propriété intellectuelle, le droit d'exploitation appartenant à l'auteur comprend le droit de représentation et le droit de reproduction, et toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants-droit ou ayants-cause est illicite.
47. Il en est de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque. La contrefaçon d'une oeuvre protégée par le droit d'auteur, qui n'implique pas l'existence d'un risque de confusion, consiste dans la reprise de ses caractéristiques identifiées comme constitutives de son originalité.
48. La contrefaçon s'apprécie selon les ressemblances et non d'après les différences. Elle ne peut toutefois être retenue lorsque les ressemblances relèvent de la reprise d'un genre et non de la reproduction de caractéristiques spécifiques de l'oeuvre première.
49. Il en résulte que de simples divergences de couleurs ne peuvent permettre d'échapper à la qualification de contrefaçon. De même, l'apposition de la marque de la société demanderesse à l'action en contrefaçon sur le fondement du droit d'auteur, n'est pas une condition de la caractérisation de la contrefaçon. En l'espèce, la comparaison des références de tissus Vlisco avec les copies d'écran effectuées par l'huissier de justice sur le site de la société Afristyle, et les tissus saisis lors des opérations de saisie-contrefaçon, établit la copie servile ou quasi servile des 23 références de tissus décrites précedemment, dont les droits sont présumés appartenir à la société Vlisco. Les tissus des sociétés défenderesses reprennent les mêmes caractéristiques, selon les mêmes dimensions,et un agencement identique. La contrefaçon de droits d'auteur est donc établie, étant rappelé que la bonne foi, quand bien même elle serait établie, est indifférente (Cass. Civ. 1ère, 13 novembre 2008, pourvoi no06-19.021, Bull 2008, I, no258).
4) Sur les mesures de réparation
Moyens des parties :
50. La société Vlisco demande 2.355.000 d'euros au titre des conséquences économiques négatives engendrées par la contrefaçon, 115.000 euros en réparation de son préjudice moral, d'interdire la poursuite des actes de contrefaçon sous astreinte de 50.000 euros par jour de retard, le rappel de l'intégralité des produits contrefaisants des circuits commerciaux sous astreinte de 5.000 euros, et la publication du présent jugement.
51. La société Afristyle demande le rejet de l'ensemble des demande. L'onglet "Vlisco" présent sur son site internet démontre selon elle sa bonne foi et le fait qu'elle n'a aucune intention de générer un risque de confusion dans l'esprit du consommateur.
Appréciation du tribunal :
52. L'article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle dispose que " Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :
1o Les conséquences économiques négatives de l'atteinte aux droits, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2o Le préjudice moral causé à cette dernière ;
3o Et les bénéfices réalisés par l'auteur de l'atteinte aux droits, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de l'atteinte aux droits.
Toutefois, la juridiction peut, à titre d'alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si l'auteur de l'atteinte avait demandé l'autorisation d'utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n'est pas exclusive de l'indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée."
53. Il ressort du procès-verbal de saisie-contrefaçon (pièce Vlisco no25.08) que les coupons de 6 yards de tissus sont proposés à la vente par la société Afristyle à un prix moyen de 12,89 euros le coupon (moyenne du prix des 9 coupons saisis). De plus, d'après les constats réalisés, la société Afristyle propose près de 25 références de tissus contrefaisant à la vente sur son site internet. Le tribunal observe en outre que l'obstruction du gérant de la société Afristyle n'a pas permis de connaître les quantités de produits contrefaisants achetés et vendus par elle et "débités" par la société A&H. Il convient donc de retenir la vente d'au moins 30.000 coupons de tissus depuis la première constatation de l'infraction, pour un chiffre d'affaires global de 386.700 euros, à laquelle il convient d'appliquer un taux de report de 60 % les parties n'étant pas en situation de concurrence directe mais les défenderesses commercialisant également des produits authentiques et un taux de marge brute de 25 %. Il convient donc d'évaluer les pertes subies par la société Vlisco à la somme de 58.000 euros, sans qu'il soit besoin d'ordonner des mesures d'investigation supplémentaires.
54. Il est en outre incontestable que la société Vlisco subit un préjudice moral découlant de la banalisation de ses produits qui sera réparé par le versement de la somme de 20.000 euros.
55. Il sera en outre fait droit à la demande d'interdiction selon les modalités précisées au dispositif de la présente décision. Ces mesures réparant suffisamment le préjudice de la société Vlisco, la demande de publication de la présente décision sera rejetée. En l'absence de preuve que des produits contrefaisants émanant des sociétés défenderesses se trouveraient entre les mains de tiers, la demande de rappel, qui fait double emploi avec la demande d'interdiction, sera rejetée.
5) Sur la concurrence déloyale
Moyens des parties :
56. La société Vlisco invoque des actes distincts de la contrefaçon. D'après la demanderesse, les défenderesses créent un risque de confusion et un effet de gamme en vendant des produits de même nature à l'attention du même consommateur. Elle demande une réparation à hauteur de 600.000 euros.
57. Sur ce point, la société Afristyle prétend qu'il ne peut y avoir d'effet de gamme sur des tissus WAX, ces tissus reposant tous selon elle sur l'association de couleurs et de dessins ou motifs géométiques.
Appréciation du tribunal :
58. Est fautif le fait, pour un professionnel, de s'immiscer dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire particulier (Cass. Com., 26 janvier 1999, pourvoi no 96-22.457 ; Cass. Com., 10 septembre 2013, pourvoi no 12-20.933), ce qui constitue un acte de parasitisme.
59. En outre, l'association par le consommateur de produits précis, peu important leur banalité, peut entrainer un effet de gamme. La répétition de la reprise de ces produits est alors fautive ( Cass. Com., 14 novembre 2018, pourvoi no16-28.091).
60. En l'espèce, la commercialisation d'un très grand nombre de références de tissus wax constituant des copies serviles ou quasi-serviles des tissus créés par la société Vlisco, a permis à la société Afristyle de tiré indûment profit du savoir-faire et des efforts de la société Vlisco et créé un risque de confusion dans l'esprit du public ce d'autant plus que les défenderesses commercialisent aussi des produits Vlisco authentiques.
61. La société Afristyle sera condamnée à ce titre à payer à la société Vlisco la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 1240 du code civil.
62. La société A&H ne peut être considérée comme ayant participé aux faits distincts de concurrence déloyale dont le régime est distinct de celui de la contrefaçon.
6) Sur les mesures accessoires
63. Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. L'article 700 du même code permet au juge de condamner en outre la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre, pour les frais exposés mais non compris dans les dépens, une somme qu'il détermine, en tenant compte de l'équité et de la situation économique de cette partie.
64. Les défenderesses, qui perdent le procès, doivent être tenues aux entiers dépens et à indemniser la demanderesse de ses frais, lesquels peuvent être raisonnablement estimés au regard des diligences qui ressortent de ses écritures et des pièces fournies, à 20 000 euros.
65. Il n'y a pas de motif, dans la présente affaire, pour écarter l'exécution provisoire, qui est de droit en application de l'article 514 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL
REJETTE la demande de mise hors de cause de la société A&H ;
CONDAMNE in solidum la société Afristyle et la société A&H à payer à la société Vlisco Netherlands la somme de 78.000 euros en réparation du préjudice causé par la contrefaçon de ses droits d'auteur sur les tissus référencés 14/3739, 14/3541, 14/3686, 6/8511, 14/3826, 14/0921, A1106, A1450, 6/8759, 14/1682, 14/2921, A2161, 6/8761, A2257, H628, 14/1178, 14/3639, A2171, A2337, A2260, S7020, 14/5124 et H907 ;
FAIT DÉFENSE aux sociétés Afristyle et A&H de commercialiser tout tissu reproduisant les caractéristiques originales des tissus de la demanderesse référencés ci-dessus, et ce, sous astreinte de 100 euros par infraction constatée (c'est à dire par coupon de tissu contrefaisant) courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification de la présente décision et pendant 180 jours ;
SE RÉSERVE la liquidation de l'astreinte ;
CONDAMNE la société Afristyle à payer à la société Vlisco la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts au titre des faits distincts de concurrence déloyale (effet de gamme) ;
REJETTE les demandes de publication de la présente décision, de rappel de produits et de production de pièces supplémentaires, de la société Vlisco Netherlands ;
CONDAMNE in solidum la société Afristyle et la société A&H aux dépens ;
CONDAMNE in solidum la société Afristyle et la société A&H à payer à la société Vlisco Netherlands la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que la présente décision est de plein droit exécuoire.
Fait et jugé à Paris le 1er décembre 2022.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
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CAPP/JURITEXT000047324635.xml |
JUDICIAIRE
3ème chambre
3ème section
No RG 20/12527 -
No Portalis 352J-W-B7E-CTLZC
No MINUTE :
Assignation du :
02 décembre 2020
rendu le 06 décembre 2022
DEMANDERESSE
Société VITRY FRERES
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Maître Delphine BRUNET-STOCLET de la SELARL SCHMIDT BRUNET LITZLER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #L0183
DÉFENDERESSE
S.A.S. LABORATOIRES INNOXA
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Maître Stéphanie CALERO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R0204
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Jean-Christophe GAYET, premier vice-président adjoint
Linda BOUDOUR, juge
Arthur COURILLON-HAVY, juge
assistés de Lorine MILLE, greffière,
A l'audience du 22 septembre 2022, tenue en audience publique devant Jean-Christophe GAYET et Linda BOUDOUR, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenu seuls l'audience, et, après avoir donné lecture du rapport et entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné aux avocats que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 06 décembre 2022.
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
____________________________
EXPOSE DU LITIGE
La SA VITRY FRERES a notamment pour activité la fabrication et la vente de tous articles et accessoires dans le domaine de l'hygiène et beauté.
Elle est titulaire de deux modèles communautaires sur des coupe-ongles déposés le 8 avril 2003 sous les numéros 000019187-0001 et 000019187-0002 et publiés le 8 juillet 2003.
La SAS LABORATOIRES INNOXA a pour activité la fabrication de parfums et de produits pour la toilette.
Elle a, par acte sous seing privé du 25 février 2020, fait l'acquisition partielle du fonds de commerce de la SAS VISIOMED, comprenant notamment des coupe-ongles de manucure et de pédicure.
Ayant découvert la commercialisation en pharmacie et sur les sites internet <www.innoxa.fr> et <www.santediscount.com> de coupe-ongles référencés « Coupe-Ongles Manucure Extra-Plat 3700609709959 » et « Coupe-Ongles Pédicure Extra-Plat 3700609709973 », dont elle estime qu'ils reproduisent les caractéristiques de ses modèles de coupe-ongles spatule manucure et pédicure, la société VITRY FRERES a effectué des achats dans une pharmacie sise à [Localité 4] selon tickets de caisse des 15 février et 30 juin 2020, et fait procéder à un constat d'huissier sur ces sites internet selon procès-verbal du 30 juin 2020.
Puis, autorisée par ordonnance du 12 octobre 2020, la société VITRY FRERES a fait procéder à une saisie-contrefaçon au siège social de la société LABORATOIRES INNOXA selon procès-verbal du 3 novembre 2020.
Par courrier recommandé du 16 novembre 2020, la société VITRY FRERES a ensuite mis en demeure la société LABORATOIRES INNOXA de :
- reconnaitre ses droits antérieurs sur les modèles opposés ;
- reconnaitre ses droits d'auteur sur les modèles opposés ;
- cesser l'exploitation des coupe-ongles argués de contrefaçon ;
- procéder au retrait et à la destruction des stocks de coupe-ongles litigieux ;
- lui verser la somme forfaitaire de 75.000 euros en réparation de son préjudice.
La société VITRY FRERES a fait procéder à un second constat d'huissier sur le site internet <www.santediscount.com> selon procès-verbal du 27 novembre 2020.
Estimant que ses demandes n'étaient pas satisfaites, la société VITRY FRERES a, par acte d'huissier du 2 décembre 2020, fait assigner la société LABORATOIRES INNOXA devant le tribunal judiciaire de PARIS en contrefaçon de droit d'auteur et de modèles communautaires, et en concurrence déloyale.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 janvier 2022 et l'affaire fixée à l'audience de plaidoirie du 22 septembre 2022.
Les parties ayant régulièrement constitué avocat, le présent jugement, rendu en premier ressort, sera contradictoire en application de l'article 467 du code de procédure civile.
PRETENTIONS DES PARTIES
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 21 octobre 2021, la société VITRY FRERES demande au tribunal, au visa des articles 4, 19, 82 83 et 90 du Règlement no6/2002 du 12 décembre 2001, des articles L. 112-1, L. 112-2, L.122-4, L.331-1-2, L. 515-1, L.521-4 ; L. 521-7, L. 522-1 et R. 221-1 du code de la propriété intellectuelle, des articles 1240 et 1241 du code civil, de :
« - DECLARER la société VITRY FRERES recevable et bien fondée en ses demandes formées à l'encontre de la société LABORATOIRES INNOXA ;
- VALIDER le procès-verbal des opérations de saisie-contrefaçons effectué le 3 novembre 2020 au siège social de la société LABORATOIRES INNOXA ;
- DIRE ET JUGER que la création et le modèle de coupe-ongles spatule revendiqué par la société VITRY FRERES bénéficient de la protection des Livres I, III et V du code de la propriété intellectuelle et du règlement no6/2002 du 12 décembre 2001 ;
- DIRE ET JUGER que la société LABORATOIRES INNOXA s'est rendue coupable d'actes de contrefaçon de droit d'auteur et de modèle communautaire no000019187-0001 et no000019187-0002 en acquérant, stockant, mettant sur le marché, offrant en vente, vendant et commercialisant les produits contrefaisants référencés Coupe-Ongles Manucure Extra-Plat 3700609709959 et Coupe-Ongles Pédicure Extra-Plat 3700609709973 ;
- DIRE ET JUGER que la société LABORATOIRES INNOXA s'est rendue coupable d'actes de concurrence déloyale et parasitisme en dénigrant la société VITRY FRERES et en présentant ses coupe-ongles litigieux de manière à créer un risque de confusion dans l'esprit du public, avec les produits de la société VITRY FRERES ;
- CONDAMNER la société LABORATOIRES INNOXA à payer, à la société VITRY FRERES la somme de 122 277,25 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice né des actes de contrefaçon de ses droits d'auteur et de ses modèles communautaires no000019187-0001 et no000019187-0002 ;
- CONDAMNER la société LABORATOIRES INNOXA à payer, à la société VITRY FRERES la somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice né des actes de concurrence déloyale ;
- FAIRE INTERDICTION à la société LABORATOIRES INNOXA de poursuivre la commande, l'acquisition, le stockage, la mise sur le marché, l'offre en vente, la vente et la commercialisation des coupe-ongles contrefaisants sur quelque territoire de l'Union Européenne que ce soit sous astreinte de 1.500 euros par infraction soit par modèle de coupe-ongles fabriqué, importé, exporté, offert en vente ou vendu ;
- ORDONNER la destruction, aux frais de la société LABORATOIRES INNOXA de l'intégralité du stock de produits jugés contrefaisants, sous astreinte de 1.500 euros par jour de retard passé le délai de 30 jours suivants la signification du jugement à intervenir ;
- SE RESERVER la liquidation des astreintes ordonnées ;
- AUTORISER la société VITRY FRERES à publier, en français et en anglais, le jugement à intervenir, par extraits, dans cinq revues ou journaux français ou internationaux de son choix et aux frais de la société LABORATOIRES INNOXA sans que le coût de chaque insertion ne puisse excéder la somme de 8.000 euros H.T ;
- AUTORISER la société VITRY FRERES à diffuser, en toutes langues de son choix, la décision à intervenir sur son site Internet www.vitry.com ;
- CONDAMNER la société LABORATOIRES INNOXA à verser à la société VITRY FRERES la somme de 20.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- ORDONNER l'exécution provisoire du jugement à intervenir ;
- CONDAMNER la société LABORATOIRES INNOXA aux entiers dépens de l'instance en ce compris les frais d'huissier exposés par la société VITRY FRERES au titre des opérations de saisie-contrefaçon du 3 novembre 2020, et des constats d'huissier ».
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 5 janvier 2022, la société LABORATOIRES INNOXA demande au tribunal, au visa des articles L. 111-1 et L. 112-1 du code de la propriété intellectuelle, des articles 4, 5, 6, 7 et 8 du Règlement (CE) 6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins et modèles communautaires, des articles 1240 et 1241 du code civil, de :
« A titre principal,
- DIRE ET JUGER que la saisie-contrefaçon pratiquée dans les locaux de Laboratoires Innoxa le 3 novembre 2020 est nulle ;
- DIRE ET JUGER que les modèles de coupe-ongles spatule revendiqués par Vitry Frères ne sauraient constituer une création originale protégée au titre du droit d'auteur par les Livres I, III et V du code de la propriété intellectuelle ;
- DIRE ET JUGER que les modèles communautaires no000019187-0001 et no000019187-0002 déposés par Vitry Frères le 8 avril 2003 ne répondent pas aux conditions de validité prévus par le Règlement (CE) no6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins et modèles communautaires ;
- DIRE ET JUGER qu'aucun prétendu acte de contrefaçon et de concurrence déloyale ne saurait pouvoir être retenu à l'encontre de Laboratoires Innoxa ;
En conséquence,
- ANNULER l'intégralité de la saisie pratiquée le 3 novembre en exécution de l'ordonnance du 12 octobre 2020 et des actes subséquents :
* Ordonner sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir, la restitution à Laboratoires Innoxa des éléments saisis en suite de ces opérations et détenus tant par Vitry Frères que par l'huissier instrumentaire ;
* Faire défense à Vitry Frères de se prévaloir dans ses écritures dans la présente procédure, et dans toute autre action judiciaire ou extrajudiciaire qu'elle viendrait à engager et en tout état de cause de manière générale, du contenu des procès-verbaux de l'huissier instrumentaire, des pièces appréhendées lors des opérations de saisie, et des informations, pièces et documents dont elle a obtenu la communication dans le cadre de la saisie opérée le 3 novembre 2020 ;
- DEBOUTER Vitry Frères de l'intégralité de ses demandes ;
- PRONONCER la nullité des modèles communautaires no000019187-0001 et no000019187-0002 déposés par Vitry Frères relative à son modèle de coupe-ongles spatule pour raison d'absence de nouveauté et de caractère individuel ;
A titre subsidiaire,
- DIRE ET JUGER que les modèles de coupe-ongles commercialisés par Vitry Frères et Laboratoires Innoxa présentent des différences nombreuses et substantielles excluant tout risque de confusion entre eux ;
En conséquence,
- DEBOUTER Vitry Frères de son action en contrefaçon ;
A titre infiniment subsidiaire,
- DIRE ET JUGER que Vitry Frères n'apporte aucune démonstration des préjudices dont elle demande la réparation au titre d'actes de contrefaçon et de concurrence déloyale ;
En conséquence,
- DEBOUTER Vitry Frères de l'intégralité de ses demandes indemnitaires ;
Et en tout état de cause,
- CONDAMNER Vitry Frères à verser à Laboratoires Innoxa la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- CONDAMNER Vitry Frères aux entiers dépens par application de l'article 699 du code de procédure civile ».
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'originalité du coupe-ongles spatule
La société VITRY FRERES revendique l'originalité de la combinaison des caractéristiques suivantes de son coupe-ongles spatule :
« - le corps et le levier du coupe-ongles sont courbés et se superposent parfaitement ;
- le levier a pour caractéristique originale une forme de spatule (rétrécissement central, bout élargi et arrondi) ;
- le levier, une fois retourné, présente par sa courbure un angle d'ouverture à 45o ;
- le coupe-ongles spatule présente un point de contact entre le levier et le corps de forme arrondie et bombée ».
Elle soutient que cette combinaison est un parti pris esthétique qui n'est pas imposé par la fonction technique du coupe-ongles et porte l'empreinte de la personnalité de son auteur.
La société LABORATOIRES INNOXA, qui conteste l'originalité alléguée, fait valoir que les caractéristiques revendiquées par la demanderesse ne révèlent aucun effort créatif portant l'empreinte de la personnalité de leur auteur, qu'elles sont au contraire banales et dictées par la fonction classique d'un coupe-ongles. Elle ajoute que de nombreux coupe-ongles commercialisés sur le marché et de nombreux modèles déposés présentent des caractéristiques similaires.
Aux termes de l'article L. 111-1 alinéas 1 et 2 du code de la propriété intellectuelle, l'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d'ordre patrimonial.
Selon l'article L. 112-1 du même code, ce droit appartient aux auteurs sur toutes les oeuvres de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination.
L'originalité d'une oeuvre résulte notamment de partis pris esthétiques et de choix arbitraires de son auteur qui caractérisent un effort créatif portant l'empreinte de sa personnalité, et n'est pas la banale reprise d'un fonds commun non appropriable.
Lorsque la protection par le droit d'auteur est contestée en défense, l'originalité d'une oeuvre doit être explicitée par celui qui s'en prétend l'auteur, seul ce dernier étant à même d'identifier les éléments traduisant sa personnalité. En effet, le principe de la contradiction prévu à l'article 16 du code de procédure civile commande que le défendeur puisse connaître précisément les caractéristiques revendiquées de l'oeuvre qui fondent l'atteinte alléguée et apporter la preuve de l'absence d'originalité de l'oeuvre.
En l'espèce, la société VITRY FRERES revendique l'originalité de la combinaison des caractéristiques suivantes :
- le corps et le levier du coupe-ongles sont courbés et se superposent parfaitement ;
- le levier est en forme de spatule ;
- le point de contact entre le corps et le levier est de forme arrondie et bombée ;
- le levier, une fois retourné, présente par sa courbure un angle d'ouverture à 45o.
Or, elle n'explicite pas en quoi la combinaison de ces caractéristiques du coupe-ongles spatule porte l'empreinte de la personnalité de son auteur. Elle se borne à effectuer une simple description objective qui ne permet pas de démontrer l'originalité qu'elle allègue tandis que celle-ci est contestée.
Dans ces conditions, le coupe-ongles spatule ne peut bénéficier d'une protection par le droit d'auteur.
En conséquence, la société VITRY FRERES sera déboutée de l'ensemble de ses demandes fondées sur la contrefaçon de droit d'auteur.
Sur la validité des modèles communautaires no000019187-0001 et no000019187-0002
La société LABORATOIRES INNOXA sollicite la nullité des modèles communautaires no000019187-0001 et no000019187-0002 :
- pour défaut de nouveauté en ce que des modèles français, japonais et américains déposés antérieurement présentent les mêmes caractéristiques ;
- pour défaut de caractère individuel en ce que deux modèles japonais déposés antérieurement produisent une impression globale quasi-identique ;
- pour apparence exclusivement imposée par leur fonction technique en ce que la présence d'un levier est nécessaire pour actionner les lames coupantes ; la forme de spatule du coupe-ongles est indispensable pour un meilleur maintien de l'appareil au moment de la prise en main du coupe-ongles ; les fabricants de coupe-ongles sont techniquement contraints de respecter la présence d'un emboîtement du corps et du levier du coupe-ongles une fois replié ; la superposition parfaite entre le levier et le corps du coupe-ongles a vocation à permettre une bonne rotation du levier ; un levier présentant, par sa courbure, un angle d'ouverture à 45o permet d'obtenir une meilleure amplitude au moment de la découpe.
En réplique, la société VITRY FRERES fait valoir que :
- la nouveauté et le caractère individuel de ses modèles résident dans les caractéristiques suivantes : « le corps et le levier du coupe-ongles sont courbés et se superposent parfaitement » ; « le point de contact entre le levier et le corps de forme arrondie et bombée », et qu'aucun des modèles de coupe-ongles produits par la défenderesse à titre d'antériorité de toutes pièces ne présente la combinaison de ces caractéristiques et ne produit une impression globale identique à ses modèles ;
- l'apparence de ses modèles, qui n'est pas imposée par leur fonction technique, est esthétique.
L'article 4.1 « conditions de protection » du Règlement (CE) no6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires dispose que « la protection d'un dessin ou modèle par un dessin ou modèle communautaire n'est assurée que dans la mesure où il est nouveau et présente un caractère individuel ».
Aux termes de l'article 5 « nouveauté » du même règlement, « 1. Un dessin ou modèle est considéré comme nouveau si aucun dessin ou modèle identique n'a été divulgué au public :
a) dans le cas d'un dessin ou modèle communautaire non enregistré, avant la date à laquelle le dessin ou le modèle pour lequel la protection est revendiquée a été divulgué au public pour la première fois ;
b) dans le cas d'un dessin ou modèle communautaire enregistré, avant la date de dépôt de la demande d'enregistrement du dessin ou modèle pour lequel la protection est demandée ou, si une priorité est revendiquée, la date de priorité.
2. Des dessins ou modèles sont considérés comme identiques lorsque leurs caractéristiques ne diffèrent que par des détails insignifiants ».
L'article 6 « caractère individuel » dudit règlement énonce que « 1. Un dessin ou modèle est considéré comme présentant un caractère individuel si l'impression globale qu'il produit sur l'utilisateur averti diffère de celle que produit sur un tel utilisateur tout dessin ou modèle qui a été divulgué au public :
a) dans le cas d'un dessin ou modèle communautaire non enregistré, avant la date à laquelle le dessin ou le modèle pour lequel la protection est revendiquée a été divulgué au public pour la première fois ;
b) dans le cas d'un dessin ou modèle communautaire enregistré, avant la date de dépôt de la demande d'enregistrement ou, si une priorité est revendiquée, avant la date de priorité.
2. Pour apprécier le caractère individuel, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l'élaboration du dessin ou modèle ».
Selon l'article 7 « divulgation » du même règlement, « 1. Aux fins de l'application des articles 5 et 6, un dessin ou modèle est réputé avoir été divulgué au public s'il a été publié à la suite de l'enregistrement ou autrement, ou exposé, utilisé dans le commerce ou rendu public de toute autre manière, avant la date visée à l'article 5, paragraphe 1, point a), et à l'article 6, paragraphe 1, point a), ou à l'article 5, paragraphe 1, point b), et à l'article 6, paragraphe 1, point b), selon le cas, sauf si ces faits, dans la pratique normale des affaires, ne pouvaient raisonnablement être connus des milieux spécialisés du secteur concerné, opérant dans la Communauté. Toutefois, le dessin ou modèle n'est pas réputé avoir été divulgué au public s'il a seulement été divulgué à un tiers sous des conditions explicites ou implicites de secret.
2. Aux fins des articles 5 et 6, il n'est pas tenu compte d'une divulgation si un dessin ou modèle pour lequel la protection est revendiquée au titre de dessin ou modèle communautaire enregistré a été divulgué au public :
a) par le créateur ou son ayant droit ou par un tiers sur la base d'informations fournies ou d'actes accomplis par le créateur ou son ayant droit, et ce,
b) pendant la période de douze mois précédant la date de dépôt de la demande d'enregistrement ou la date de priorité, si une priorité est revendiquée.
3. Le paragraphe 2 est également applicable lorsque le dessin ou modèle a été divulgué au public à la suite d'une conduite abusive à l'égard du créateur ou de son ayant droit ».
L'article 8.1 « dessins ou modèles imposés par leur fonction technique et dessins ou modèles d'interconnexions » dudit règlement précise que « un dessin ou modèle communautaire ne confère pas de droits sur les caractéristiques de l'apparence d'un produit qui sont exclusivement imposées par sa fonction technique ».
La Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que « l'article 8, paragraphe 1, du règlement (CE) no6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires doit être interprété en ce sens que, pour apprécier si des caractéristiques de l'apparence d'un produit sont exclusivement imposées par la fonction technique de celui-ci, il y a lieu d'établir que cette fonction est le seul facteur ayant déterminé ces caractéristiques, l'existence de dessins ou modèles alternatifs n'étant pas déterminante à cet égard. Afin de déterminer si les caractéristiques concernées de l'apparence d'un produit sont exclusivement imposées par la fonction technique de celui-ci, au sens de cette disposition, il incombe au juge national de tenir compte de toutes les circonstances objectives pertinentes de chaque cas d'espèce. Il n'y a pas lieu, à cet égard, de se fonder sur la perception d'un « observateur objectif » (CJUE, 8 mars 2018, C-395/16).
Sur la nouveauté
En l'espèce, la société LABORATOIRES INNOXA oppose les antériorités suivantes :
- le point de contact arrondi et bombé et l'angle à 45o du modèle français no 56307 déposé le 14 mai 1957 ;
- le levier courbé du modèle français no984708 déposé le 11 août 1998 ;
- le levier en forme de spatule du modèle français no016664 déposé le 15 novembre 2001 ;
- la superposition parfaite des corps et levier courbés et le point de contact arrondi et bombé du modèle japonais no D1119484 déposé le 6 février 1998 ;
- le levier courbé en forme de spatule et le point de contact arrondi et bombé du modèle japonais no D2001 1054 déposé le 22 janvier 2001 ;
- le point de contact arrondi et bombé du modèle américain D437457 déposé le 13 décembre 2001.
Or, aucune de ces antériorités, prises individuellement, ne présente toutes les caractéristiques des modèles communautaires no000019187-0001 et no000019187-0002, de sorte qu'aucune d'elles ne constitue une antériorité de toutes pièces. Au contraire, chacune d'elles présente des caractéristiques différentes dans ses lignes et formes qui ne peuvent être qualifiées de détails insignifiants. Dès lors, aucune des antériorités opposées par la société LABORATOIRES INNOXA n'est destructrice de nouveauté.
Sur le caractère individuel
A l'examen des deux antériorités opposées par la société LABORATOIRES INNOXA, force est de constater que les modèles communautaires no000019187-0001 et no000019187-0002 suscitent une impression visuelle globale différente de chacune d'elles chez l'observateur averti qui est une personne qui s'intéresse au marché des accessoires de manucure et pédicure et se tient régulièrement informée, de sorte que le caractère individuel n'est mis à mal ni par le modèle japonais no D1119484 déposé le 6 février 1998 ni par modèle japonais no D2001 1054 déposé le 22 janvier 2001. Au contraire, en dépit du degré de liberté restreint dans l'élaboration des modèles eu égard aux contraintes imposées par la fonction technique du produit, le créateur a conféré aux coupe-ongles des lignes et formes qui se détachent des antériorités opposées, de sorte que ceux-ci présentent un caractère individuel. Dès lors, les modèles communautaires no000019187-0001 et no000019187-0002 n'encourent pas davantage la nullité pour ce motif.
Sur les caractéristiques de l'apparence du produit imposées par sa fonction technique
Contrairement à ce qu'affirme la défenderesse, les caractéristiques de l'apparence des coupe-ongles objet des modèles communautaires no000019187-0001 et no000019187-0002, en particulier la superposition parfaite du corps et du levier formant une courbe harmonieuse, la forme en spatule du levier et sa courbure lorsqu'il est retourné, la forme arrondie et bombée du point de contact entre le corps et le levier, ne sont pas imposées par leur fonction technique mais résultent d'une recherche esthétique.
En conséquence, au regard de tout ce qui précède, la société LABORATOIRES INNOXA sera déboutée de sa demande en nullité des modèles communautaires no000019187-0001 et no000019187-0002.
Sur la validité de la saisie-contrefaçon
La société LABORATOIRES INNOXA soutient que la saisie-contrefaçon du 3 novembre 2020 est nulle en ce que :
- il n'est pas démontré que la requête et l'ordonnance lui ont été signifiées préalablement aux opérations de saisie-contrefaçon et qu'elle a disposé du temps nécessaire pour en prendre connaissance ;
- il n'est pas établi qu'elle s'est vue remettre une copie du procès-verbal de saisie-contrefaçon à l'issue des opérations ou dans un délai raisonnable postérieurement à celles-ci, de sorte que cela lui a nécessairement causé un grief en ce qu'elle n'a pu ni organiser utilement sa défense préalablement à l'assignation ni agir en rétractation devant le président du tribunal judiciaire autorisé la saisie-contrefaçon par ordonnance du 12 octobre 2020.
La société VITRY FRERES répond que l'huissier instrumentaire a signifié la requête et l'ordonnance à la société LABORATOIRES INNOXA vingt-quatre (24) minutes avant le début des opérations de saisie-contrefaçon du 3 novembre 2020, et lui a signifié une copie du procès-verbal de saisie-contrefaçon le même jour à l'issue des opérations.
Aux termes de l'article 114 du code de procédure civile, aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public. La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.
L'article 495 du code de procédure civile dispose que l'ordonnance sur requête est motivée. Elle est exécutoire au vu de la seule minute. Copie de la requête et de l'ordonnance est laissée à la personne à laquelle elle est opposée.
Selon l'article R. 521-3, alinéa 2 du code la propriété intellectuelle, à peine de nullité et de dommages-intérêts contre l'huissier, celui-ci doit, avant de procéder à la saisie, donner copie aux détenteurs des objets saisis ou décrits de l'ordonnance. Copie doit être laissée aux mêmes détenteurs du procès-verbal de saisie.
Le respect du principe de la contradiction, qui fonde l'exigence posée à l'alinéa 3 de l'article 495 du code de procédure civile, requiert que copie de la requête et de l'ordonnance soit remise à la personne à laquelle elle est opposée antérieurement à l'exécution des mesures d'instruction qu'elle ordonne (Cass. 2e civ., 10 février 2011, no10-13.894 et 1er septembre 2016, no15-23.326).
En l'espèce, il ressort tant de l'acte de « signification d'une ordonnance rendue sur requête » que du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 20 novembre 2020 (pièce VITRY FRERES no24) que seule la copie de l'ordonnance du 12 octobre 2020 a été signifiée par l'huissier instrumentaire. Il n'est aucunement fait état de la remise d'une copie de la requête.
Par ailleurs, aucun acte de l'huissier instrumentaire ne fait état de la signification du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 3 novembre 2020.
Dès lors, contrairement à ce qu'affirme la société VITRY FRERES, il n'est aucunement établi que la requête aux fins de saisie-contrefaçon et le procès-verbal de saisie-contrefaçon ont été signifiés à la société LABORATOIRES INNOXA.
Ces irrégularités, constitutives d'un vice de forme, lui font nécessairement grief dès lors qu'elle n'a pu ni prendre connaissance contradictoirement, tel que requis à l'alinéa 3 de l'article 495 du code de procédure civile, des droits revendiqués, moyens et pièces de la requête ayant déterminé la décision du juge, ni prendre connaissance contradictoirement, tel que requis à l'alinéa 2 de l'article R. 521-3 du code de la propriété intellectuelle, du contenu du procès-verbal de saisie-contrefaçon à l'issue des opérations ou dans un délai raisonnable, et ainsi apprécier en toute connaissance de cause l'opportunité d'un éventuel recours.
En conséquence, le procès-verbal de saisie-contrefaçon du 3 novembre 2020 sera déclaré nul.
La restitution à la société LABORATOIRES INNOXA des éléments saisis au cours des opérations de saisie-contrefaçon sera ordonnée.
Sur la contrefaçon de modèles communautaires
La société VITRY FRERES soutient que les coupe-ongles litigieux dégagent la même impression d'ensemble que ses modèles communautaires no000019187-0001 et no000019187-0002 dès lors que les dimensions, les proportions et la courbure du corps et du levier sont identiques, et que le point de contact bombé et arrondi, la matière et la couleur sont également repris.
La société LABORATOIRES INNOXA fait valoir que les coupe-ongles litigieux présentent des différences permettant d'écarter la contrefaçon en ce que « la courbure est moins accentuée ; la superposition entre le corps et le levier n'est pas parfaite ; le point de contact est plus petit, plus bombé et plus prononcé ; l'épaisseur du levier n'est pas la même ; l'absence de lime oblongue ». Elle indique avoir puisé dans le fond commun dont elle a proposé son interprétation.
L'article 10 du Règlement (CE) no6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires dispose que : 1. La protection conférée par le dessin ou modèle communautaire s'étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l'utilisateur averti une impression visuelle globale différente. 2. Pour apprécier l'étendue de la protection, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l'élaboration du dessin ou modèle.
Aux termes de l'article 19, 1o du même règlement, le dessin ou modèle communautaire enregistré confère à son titulaire le droit exclusif de l'utiliser et d'interdire à tout tiers de l'utiliser sans son consentement. Par utilisation au sens de la présente disposition, on entend en particulier la fabrication, l'offre, la mise sur le marché, l'importation, l'exportation ou l'utilisation d'un produit dans lequel le dessin ou modèle est incorporé ou auquel celui-ci est appliqué, ou le stockage du produit à ces mêmes fins.
Selon l'article L. 515-1 du code de la propriété intellectuelle, toute atteinte aux droits définis par l'article 19 du Règlement (CE) no6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur.
La Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que :
- « la notion d'utilisateur averti s'entend comme une notion intermédiaire entre celle de consommateur moyen, applicable en matière de marque, auquel il n'est demandé aucune connaissance spécifique et qui en général n'effectue pas de rapprochement direct entre les marques en conflit, et celle de l'homme de l'art expert doté de compétences techniques approfondies. Ainsi, la notion d'utilisateur averti peut s'entendre comme désignant un utilisateur doté non d'une attention moyenne mais d'une vigilance particulière, que ce soit en raison de son expérience personnelle ou de sa connaissance étendue du secteur considéré » ;
- « S'agissant du niveau d'attention de l'utilisateur averti, il y a lieu de rappeler que, si celui-ci n'est pas le consommateur moyen normalement informé et raisonnablement attentif et avisé qui perçoit habituellement un dessin ou un modèle comme un tout et ne se livre pas à un examen de ces différents détails, il n'est pas non plus l'expert ou l'homme de l'art capable d'observer dans le détail les différences minimes susceptibles d'exister entre les modèles ou dessins en conflit. Ainsi, le qualificatif « averti » suggère que, sans être un concepteur ou un expert technique, l'utilisateur connaît différents dessins ou modèles existant dans le secteur concerné, dispose d'un certain degré de connaissance quant aux éléments que ces dessins ou modèles comportent normalement, et du fait de son intérêt pour les produits concernés, fait preuve d'un degré d'attention relativement élevé lorsqu'il les utilise » (CJUE, 20 octobre 2011, C-281/10, points 53 et 59).
La reproduction des caractéristiques essentielles d'un modèle enregistré, engendrant la même impression visuelle globale, en constitue la contrefaçon (en ce sens, Cass. com., 26 mars 2008, no06-22.013).
En l'espèce, l'utilisateur averti pour apprécier l'existence d'une contrefaçon est une personne qui s'intéresse au marché des accessoires de manucure et pédicure et se tient régulièrement informée. Son niveau d'attention est élevé.
Il ressort de l'examen comparatif que les coupe-ongles litigieux référencés « coupe-ongle manucure extra-plat 5,7 cm 3700609709959 » et « coupe-ongles pédicure extra-plat 9 cm 3700609709973 » reproduisent les caractéristiques essentielles des modèles communautaires no000019187-0001 et no000019187-0002, en particulier la courbure et la superposition parfaite du corps et du levier, la forme arrondie et bombée du point de contact entre le corps et le levier ainsi que la forme en spatule du levier, et produisent sur l'utilisateur averti sus-défini la même impression visuelle globale.
Contrairement à ce qu'affirme la société LABORATOIRES INNOXA, les différences qu'elle invoque ne sont pas de nature à écarter la contrefaçon. Celles-ci sont minimes et ne confèrent pas aux coupe-ongles litigieux une impression visuelle globale différente sur l'utilisateur averti.
La contrefaçon de modèles communautaires est alors caractérisée.
Sur la concurrence déloyale
La société VITRY FRERES soutient que la défenderesse a commis des actes de concurrence déloyale en ce que :
- les représentants de la société LABORATOIRES INNOXA l'ont dénigrée auprès de plusieurs pharmaciens « en laissant entendre que sa situation économique serait critique » dans l'unique but de détourner sa clientèle ;
- la reprise de la mention « garantie à vie » sur l'emballage des coupe-ongles litigieux et les catalogue de la marque INNOXA « génère incontestablement un risque de confusion dans l'esprit du public, lequel sera porté à croire que ces coupe-ongles litigieux proviennent de la société VITRY FRERES, ou sont issus d'un partenariat avec cette dernière ».
La société LABORATOIRES INNOXA, qui conteste avoir commis des actes de dénigrement, fait valoir que l'attestation d'une pharmacienne produite par la demanderesse n'est pas probante et que la mention « garantie à vie », dont la demanderesse n'établit pas les investissements réalisés pour que cette mention constitue une valeur économique et dont elle ne saurait priver un concurrent, est utilisée par de nombreuses sociétés dans la description de leurs produits. Elle souligne que la demanderesse ne rapporte pas la preuve d'un préjudice.
L'article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Aux termes de l'article 1241 du code civil, chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.
Selon l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce, ce qui implique qu'un signe ou un produit qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit sous certaines conditions tenant à l'absence de faute, laquelle peut être constituée par la création d'un risque de confusion sur l'origine du produit dans l'esprit de la clientèle, circonstance attentatoire à l'exercice paisible et loyal du commerce.
L'appréciation de cette faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté de l'usage, l'originalité et la notoriété de la prestation copiée.
En l'espèce, la société VITRY FRERES, qui procède par voie d'affirmation dans ses écritures, échoue à établir les actes de dénigrement auprès de plusieurs pharmaciens qu'elle allègue. Elle se borne à produire une seule attestation d'une opératrice conseillère en pharmacie dénuée de valeur probante dès lors que ni la pharmacie qui l'emploie ni la prétendue « représentante du laboratoire Innoxa » ne sont identifiées (sa pièce no17).
En outre, la mention « garantie à vie », souvent utilisée par les opérateurs économiques, n'est pas appropriable. Surtout, la société VITRY FRERES ne produit aucune pièce pour établir qu'elle utilise elle-même cette mention sur les emballages de ses coupe-ongles spatule et ses catalogues, et se borne à produire une page de son site internet <www.vitry.com> expliquant ce qu'est la garantie à vie qu'elle propose (ses pièces no20.1 et 20.2). Enfin, même à supposer qu'elle utilise cette mention, le risque de confusion tel qu'elle l'allègue n'est pas établi dès lors qu'il n'est pas démontré que la clientèle identifie l'origine de ses coupe-ongles spatule par la seule mention « garantie à vie », prise isolément.
En conséquence, la société VITRY FRERES sera déboutée de sa demande formée au titre de la concurrence déloyale.
Sur les mesures réparatrices au titre de la contrefaçon
La société VITRY FRERES, qui soutient que les chefs de préjudice visés à l'article L. 521-7 du code de la propriété intellectuelle sont cumulatifs, expose avoir subi un préjudice économique et un préjudice moral à hauteur de la somme totale de 122.277,25 euros.
La société LABORATOIRES INNOXA répond que la société VITRY FRERES ne rapporte pas la preuve de la réalité et du quantum de son préjudice et que ses demandes indemnitaires sont disproportionnées.
Selon l'article L. 521-7 du code de la propriété intellectuelle, pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :
1o Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2o Le préjudice moral causé à cette dernière ;
3o Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.
Toutefois, la juridiction peut, à titre d'alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l'autorisation d'utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n'est pas exclusive de l'indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.
L'article L. 521-8 du même code prévoient qu'en cas de condamnation civile pour contrefaçon, la juridiction peut ordonner, à la demande de la partie lésée, que les produits reconnus comme produits contrefaisants, les matériaux ou instruments ayant principalement servi à leur création ou fabrication soient rappelés des circuits commerciaux, écartés définitivement de ces circuits, détruits ou confisqués au profit de la partie lésée. La juridiction peut aussi ordonner toute mesure appropriée de publicité du jugement, notamment son affichage ou sa publication intégrale ou par extraits dans les journaux ou sur les services de communication au public en ligne qu'elle désigne, selon les modalités qu'elle précise. Ces mesures sont ordonnées aux frais du contrefacteur.
Selon l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
A titre liminaire, il sera rappelé qu'un préjudice hypothétique ne donne pas lieu à indemnisation et que le principe de la réparation intégrale implique une indemnisation du préjudice sans perte ni profit.
En outre, l'article L. 521-7 du code de la propriété intellectuelle, lequel emploie l'adverbe « distinctement » et non « cumulativement », commande une appréciation distincte des chefs de préjudice et non pas cumulative.
En l'espèce, le préjudice économique allégué par la société VITRY FRERES, tiré des prétendus bénéfices réalisés par la défenderesse et de son prétendu manque à gagner, n'est pas établi dès lors que les éléments du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 3 novembre 2020 annulé ne peuvent être pris en considération et que les autres pièces versées aux débats ne permettent pas de l'établir.
En outre, force est de constater qu'en dépit des contestations de la défenderesse à cet égard, la société VITRY FRERES, qui procède par voie d'affirmation dans ses écritures, n'établit aucunement que les investissements qu'elle allègue correspondent à ses coupe-ongles spatule manucure et pédicure.
Elle n'est pas davantage fondée à solliciter le remboursement des frais de dépôt et de renouvellement des modèles communautaires no000019187-0001 et no000019187-0002 et le remboursement du coût des présentoirs de ses produits en pharmacies et parapharmacies, lesquels ne constituent pas un préjudice résultant de la contrefaçon.
En revanche, en tout état de cause, la commercialisation des coupe-ongles contrefaisants référencés « coupe-ongle manucure extra-plat 5,7 cm 3700609709959 » et « coupe-ongles pédicure extra-plat 9 cm 3700609709973 » entraîne une banalisation et l'avilissement des coupe-ongles spatule manucure et pédicure causant ainsi un préjudice moral à la société VITRY FRERES qui sera indemnisé à hauteur de la somme de 10.000 euros au titre de la contrefaçon des modèles communautaires no000019187-0001 et no000019187-0002.
Des mesures d'interdiction et de destruction seront ordonnées selon les modalités précisées au dispositif de la présente décision. Le préjudice étant entièrement réparé par l'indemnité pécuniaire, la demande de publication du jugement apparait disproportionnée et sera alors rejetée.
Sur les demandes accessoires
Sur les dépens
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge de l'autre partie.
La société LABORATOIRES INNOXA, qui succombe à l'instance, sera condamnée aux dépens à l'exclusion des frais d'huissier exposés au titre de la saisie-contrefaçon du 3 novembre 2020 annulée.
Les dépens ne comprennent que les seuls débours relatifs à des actes ou procédures judiciaires.
Dès lors, les procès-verbaux de constat d'huissier sur internet des 30 juin 2020 et 27 novembre 2020 (pièces VITRY FRERES no12 et 22) n'ayant pas été dressés sur autorisation judiciaire, les frais exposés ne constituent pas des dépens au sens de l'article 695 du code de procédure civile, mais des frais irrépétibles indemnisés au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
L'article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.
L'équité commande de condamner la société LABORATOIRES INNOXA à payer à la société VITRY FRERES la somme de 8.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, en ce compris les frais des procès-verbaux de constat d'huissier sur internet des 30 juin 2020 et 27 novembre 2020.
Sur l'exécution provisoire
Aux termes de l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.
En l'espèce, la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire et il n'y a pas lieu d'y déroger.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,
DEBOUTE la société VITRY FRERES de l'ensemble de ses demandes fondées sur la contrefaçon de droit d'auteur ;
DEBOUTE la société LABORATOIRES INNOXA de sa demande en nullité des modèles communautaires no000019187-0001 et no000019187-0002 ;
DECLARE nul le procès-verbal de saisie-contrefaçon du 3 novembre 2020 ;
ORDONNE la restitution à la société LABORATOIRES INNOXA des éléments saisis au cours des opérations de saisie-contrefaçon ;
CONDAMNE la société LABORATOIRES INNOXA à payer à la société VITRY FRERES la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice résultant de la contrefaçon des modèles communautaires no000019187-0001 et no000019187-0002 ;
FAIT INTERDICTION à la société LABORATOIRES INNOXA d'offrir à la vente et de commercialiser, sur le territoire de l'Union européenne, les coupe-ongles référencés « coupe-ongle manucure extra-plat 5,7 cm 3700609709959 » et « coupe-ongles pédicure extra-plat 9 cm 3700609709973 », et ce dans un délai de 15 jours à compter de la signification du présent jugement, puis sous astreinte de 200 euros par jour de retard qui courra pendant 180 jours ;
ORDONNE la destruction, sous le contrôle d'un commissaire de justice, des coupe-ongles référencés « coupe-ongle manucure extra-plat 5,7 cm 3700609709959 » et « coupe-ongles pédicure extra-plat 9 cm 3700609709973 », restant en stock à la société LABORATOIRES INNOXA, aux frais de cette dernière, à charge pour elle d'en justifier à la société VITRY FRERES, et ce dans un délai de 30 jours une fois le jugement devenu définitif, puis sous astreinte de 200 euros par jour de retard qui courra pendant 180 jours ;
DIT que le tribunal se réserve la liquidation des astreintes prononcées ;
REJETTE la demande de publication du jugement ;
DEBOUTE la société VITRY FRERES de sa demande formée au titre de la concurrence déloyale ;
CONDAMNE la société LABORATOIRES INNOXA aux dépens, à l'exclusion des frais d'huissier exposés au titre de la saisie-contrefaçon du 3 novembre 2020 annulée ;
CONDAMNE la société LABORATOIRES INNOXA à payer à la société VITRY FRERES la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en ce compris les frais des procès-verbaux de constat d'huissier sur internet des 30 juin 2020 et 27 novembre 2020 ;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire.
Fait et jugé à Paris le 06 Décembre 2022
La Greffière Le Président
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JUDICIAIRE
3ème chambre
1ère section
No RG 21/00313
No Portalis 352J-W-B7F-CTRXK
No MINUTE :
Assignation du :
17 décembre 2020
rendu le 08 décembre 2022
DEMANDERESSE
S.A.S. EHEALTH FWD
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Guillaume DAUCHEL de la SELARL CABINET SEVELLEC DAUCHEL, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #W0009 & Me Myriam JEAN de la SELARL JEAN LOUVEL SAOUDI, avocat au barreau de METZ, avocat plaidant
DÉFENDERESSE
S.A.R.L. MEDIATHLETE
[Adresse 3]
[Localité 1]
représentée par Me Diane RATTALINO de la SELARL PONTHIEU AVOCATS , avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #C1352 & Me François PONTHIEU de la SELARL PONTHIEU AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Nathalie SABOTIER, 1ère vice-présidente adjointe
Elodie GUENNEC, Vice-présidente
Malik CHAPUIS, Juge,
assistés de Caroline REBOUL, Greffière
A l'audience du 06 septembre 2022 tenue en audience publique, avis a été donné aux avocats que la décision serait rendue le 03 novembre 2022.
Le délibéré a été prorogé au 17 novembre puis au 08 décembre 2022.
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
EXPOSÉ DU LITIGE :
1. La société Ehealth se présente comme spécialisée dans la conception et l'exploitation de solutions dans le domaine de la santé connectée adaptée au sport. Elle est titulaire de deux marques de l'Union européenne :
- La marque verbale "Dr Sport" enregistrée le 18 avril 2013, sous le no 11750692 et désignant des produits et services en classes 9, 10, 35, 38, 41 et 44, et notamment, en classe 35 les services de publicité et en classe 41 la "mise à disposition gratuite ou payante de contenus à caractère informatif, éducatif ou de type mode d'emploi dans le domaine du sport, de la santé, de la forme, de l'hygiène, de la nutrition" ;
- La marque semi-figurative "Dr Sport" enregistrée le 23 juin 2015 sous le no14287395 pour désigner des produits et services des classes 5, 10, 28, 35, 38, 41 et 44 :
2. La société Mediathlète se présente quant à elle comme une société d'édition publiant des revues dédiées à la santé des sportifs.
3. La société Ehealth expose avoir constaté que la société Mediathlète exploite un site internet de vente de magazines et de diffusion en ligne d'informations spécialement dédiés aux soins et à la santé des sportifs, sous l'appellation et le nom de domaine <www.docdusport.com>.
4. Aussi, par une lettre du 29 novembre 2019, la société Ehealth a mis en demeure la société Mediathlète de cesser tous usages du signe "docdusport" pour désigner une activité d'information et de conseil en matière de santé et de sport. Par une lettre du 18 décembre 2019, la société Mediathlète a contesté toute atteinte aux droits de la demanderesse et n'a pas donné suite aux demandes.
5. C'est dans ce contexte que, par acte d'huissier du 17 décembre 2020, la société Ehealth a fait assigner la société Mediathlète devant le tribunal judiciaire de Paris, en contrefaçon de marques et subsidiairement en concurrence déloyale.
6. Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 8 octobre 2021, la société Ehealth demande au tribunal de :
- DIRE la demande de la société Ehealth recevable et bien fondée,
En conséquence et à titre principal,
- DIRE que la société Mediathlete a accompli des agissements de contrefaçon par imitation des marques européennes no 11750692 et no 14287395 appartenant à la Société EHealth,
- PRONONCER la radiation et l'interdiction pour la société Mediathlete d'avoir à utiliser le nom de domaine www.docdusport.com pour désigner un site internet spécialisé dans la santé des sportifs et de cesser toute exploitation de cette dénomination sous astreinte de 10.000 € par jour de retard et par infraction constatée suite à la signification de la décision à intervenir,
- ORDONNER la cessation de l'utilisation de l'expression "Doc du Sport" pour désigner tout produit, support ou média ayant pour objet la diffusion d'informations ou de conseils liés à la santé et le sport sous astreinte de 2.000 € par jour de retard et par infraction constatée suite à la signification de la décision à intervenir,
- ENJOINDRE à la défenderesse de communiquer le chiffre d'affaire réalisé dans le cadre de la publication et la diffusion en ligne et sur les réseaux sociaux des produits, supports et magazines litigieux, sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir,
- CONDAMNER la société Mediathlete à payer à la société Ehealth la somme de 200.000 € à titre de provision à valoir sur le préjudice économique du fait des agissements de contrefaçon de marque,
- CONDAMNER la société Mediathlete à payer à la société Ehealth la somme de 20.000 € en réparation du préjudice d'image subi fait des agissements de contrefaçon de marque,
A titre subsidiaire,
- DIRE que la société Mediathlete a accompli des agissements de concurrence déloyale en imitant et reproduisant les signes distinctifs au préjudice de la société Ehealth,
- PRONONCER la radiation et l'interdiction pour la société Mediathlete d'avoir à utiliser le nom de domaine www.docdusport.com et d'une manière générale l'expression "Doc du Sport" pour désigner un site internet, un blog, un revue ou un média, quel que soit le support spécialisé dans la santé des sportifs et de cesser toute exploitation de cette dénomination sous astreinte de 500 € par jour de retard ou d'infraction constatée à compoter de la signification de la décision à intervenir,
- CONDAMNER la société Mediathlete à payer à la société Ehealth la somme de 200.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des agissements de confusion et de parasitisme,
- CONDAMNER la Société Mediathlete à payer à la société Ehealth la somme de 20.000 € en réparation du préjudice d'image subi fait des agissements de concurrence déloyale,
Quoi qu'il en soit,
- ORDONNER la publication de la décision à intervenir dans deux périodiques aux choix de la société Ehealth et aux frais de la société Mediathlete dans la limite de 5.000 € par parution,
- ORDONNER la publication de la décision à intervenir sur la première page du site de la défenderesse pendant une période minimale de 6 mois à intervenir et sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,
- CONDAMNER la société Mediathlete à payer à la société Ehealth la somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens de la procédure en ce y compris les frais de constats d'huissier.
7. Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 29 octobre 2021, la société Mediathlete demande quant à elle au tribunal de :
- Rejeter comme non fondées les demandes de Ehealth, tant au titre de la contrefaçon qu'à celui de la concurrence déloyale,
- Permettre à la société Mediathlete de continuer à utiliser le nom de domaine "docdusport" pour sa revue en ligne,
- Ne pas prononcer l'exécution provisoire de la décision à intervenir,
- Condamner la société Ehealth à payer à la société Mediathlete la somme de 7.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
8. L'instruction a été clôturée par une ordonnance du 14 décembre 2021 et l'affaire plaidée à l'audience du 6 septembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Moyens des parties
9. La société Ehealth soutient que la marque et le signe désignent des activités similaires voire identiques et, en particulier, que le signe "DrSport" désigne à l'enregistrement les services de publication d'articles et de livres qui correspondent à l'activité exercée par la société défenderesse. La société Ehealth ajoute que les similitudes visuelle, phonétique et conceptuelle des signes sont fortes, de sorte que le public pertinent, d'attention moyenne à élevée, est nécessairement selon elle amené à attribuer à leurs produits et services une origine commune, ce qui caractérise une contrefaçon de marque. La société Ehealth précise que l'Office européen de la propriété intellectuelle a reconnu à la marque "DrSport" une distinctivité normale.
10. Subsidiairement, pour le cas où le tribunal estimerait qu'aucne contrefaçon de marque n'est caractérisée, la société Ehealth soutient que les agissements de la société Mediathlete sont fautifs, s'agissant selon elle d'actes de concurrence déloyale et parasitaire.
11. La société Mediathlete conclut pour sa part au rejet des demandes fondées sur la contrefaçon de marque. Elle fait valoir en substance que la distinctivité de la marque est faible et que la société demanderesse ne peut revendiquer aucun monopole sur un signe aussi générique pour désigner tous types d'activités dans le domaine de la santé des sportifs dans lesquelles les parties sont l'une et l'autre actives, encore que selon la défenderesse, les services qu'elles proposent sont différents, la demanderesse commercialisant une application d'aide au diagnostic dédiée aux sportifs, tandis qu'elle même exerce une activité de vente de supports publicitaires dans des revues (papier et en ligne, ces dernières étant accessibles par le nom de domaine <www.docdusport.com> ) dédiées à la santé des sportifs et dans lesquelles paraissent des interviews et des articles.
12. La société Mediathlete conclut de la même manière au rejet des demandes basées sur les mêmes faits au titre de la concurrence déloyale et parasitaire.
Appréciation du tribunal
a - Sur la contrefaçon de marque
13. Aux termes de l'article 9 du règlement "1. L'enregistrement d'une marque de l'Union européenne confère à son titulaire un droit exclusif.
« 2. Sans préjudice des droits des titulaires acquis avant la date de dépôt ou la date de priorité d'une marque de l'Union européenne, le titulaire de cette marque de l'Union européenne est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d'un signe pour des produits ou services lorsque: (...)
b) ce signe est identique ou similaire à la marque de l'Union européenne et est utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires aux produits ou services pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public; le risque de confusion comprend le risque d'association entre le signe et la marque; (...)"
14. Interprétant les dispositions rédigées en termes identiques de l'article 5 § 1 de la première Directive du Conseil du 21 décembre 1988 rapprochant les législations des États membres sur les marques (89/104/CEE), la Cour de Justice des Communautés européennes a dit pour doit que, constitue un risque de confusion au sens de ce texte, le risque que le public puisse croire que les produits ou services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d'entreprises liées économiquement (voir arrêt Canon, C-39/97, point 29 ; arrêt Lloyd Schuhfabrik, C-342/97). Selon cette même jurisprudence, l'existence d'un risque de confusion dans l'esprit du public doit être appréciée globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce (voir, arrêt Sabel, C-251/95, point 22), cette appréciation globale impliquant une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte (voir arrêt Canon, point 17).
15. Afin d'apprécier le degré de similitude existant entre les marques concernées, la juridiction nationale doit déterminer leur degré de similitude visuelle, auditive et conceptuelle et, le cas échéant, évaluer l'importance qu'il convient d'attacher à ces différents éléments, en tenant compte de la catégorie de produits ou services en cause et des conditions dans lesquelles ils sont commercialisés ainsi que de leurs éléments distinctifs et dominants (voir arrêt Lloyd Schuhfabrik, C-342/97 ). Enfin, pour apprécier la similitude entre des produits ou des services, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre ces produits ou ces services ; ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire (voir arrêt Canon, C-39/97, point 23).
16. La partie initiale des marques verbales est susceptible de retenir l'attention du consommateur davantage que les parties suivantes (voir par exemple les arrêts du tribunal du 17 mars 2004, El Corte Inglés/OHMI – González Cabello et Iberia Líneas Aéreas de España (MUNDICOR), aff. T-183/02 et T-184/02, Rec. p. II-965, point 81, du 16 mars 2005, L'Oréal/OHMI – Revlon (FLEXI AIR), T-112/03, points 64 et 65, du 13 février 2008, Sanofi-Aventis SA,/ OHMI - GD Searle LLC (URION /ATURION), aff. T146/06, point 49).
17. Force est en l'occurrence de constater que les services désignés à l'enregistrement sont, au moins pour partie, identiques à ceux exploités sous le signe argué de contrefaçon.
18. Même s'il n'est guère contestable que la marque sera prononcée "docteur sport" par le public pertinent, les signes ("Dr Sport" et "Doc du sport") ne sont néanmoins, visuellement et phonétiquement, que moyennement similaires, leurs signes d'attaques ("dr" ou "docteur" dans le cas de la marque et "doc" s'agissant du signe) étant distincts.
19. Les signes sont en revanche conceptuellement fortement similaires renvoyant l'un et l'autre sous une forme abrégée à un "docteur du sport", encore que le second signe "doc" apparaisse plus familier que le signe "Dr" qui constitue l'abréviation usuelle du mot "docteur".
20. Comme le relève à juste titre la société défenderesse les signes sont faiblement distinctifs pour désigner des services en lien avec la santé des sportifs, le risque de confusion étant d'autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s'avère important (voir par exemple l'arrêt BSH Bosch und Siemens Hausgeräte GmbH, C-45/16, point 62).
21. Le public pertinent, enfin, est d'attention élevée s'agissant des personnes à la recherche d'informations dans le domaine de la santé en lien avec la pratique d'un sport. Aussi, il sera sensible à la différence entre les signes.
22. Il en résulte que la forte similitude entre une partie des services concernés et la forte ressemblance conceptuelle entre les signes sera ici compensée par leurs différences visuelle et auditive qui, même faibles dans le cadre d'une comparaison purement verbale, seront nécessairement perçues par le public pertinent dont l'attention est élevée, ce d'autant plus ici que la partie verbale des marques est faiblement distinctive et que les signes sont principalement exploités sous leurs formes semi-figuratives lesquelles sont sensiblement différentes. Il s'en déduit que le public pertinent ne sera pas amené ici à attribuer une origine commune aux produits et services de sorte que la contrefaçon n'est pas établie.
b - Sur la concurrence déloyale et parasitaire
23. Selon les articles 1240 et 1241 du code civil « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence. »
24. La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce et de l'industrie, qui implique qu'un signe ou un produit qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit sous certaines conditions tenant à l'absence de faute, laquelle peut être constituée par la création d'un risque de confusion. L'appréciation de cette faute doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté de l'usage, l'originalité et la notoriété du produit copié.
25. Le parasitisme, qui n'exige pas de risque de confusion, consiste dans le fait pour une personne physique ou morale de profiter volontairement et sans bourse délier des investissements, d'un savoir-faire ou d'un travail, produisant une valeur économique individualisée et générant un avantage concurrentiel. Il incombe à celui qui allègue de parasitisme d'établir le savoir-faire ainsi que les efforts humains et financiers consentis par lui, ayant permis la création d'une valeur économique individualisée.
26. En l'absence de risque de confusion la concurrence déloyale apparaît exclue. Il en va de même de la concurrence parasitaire, la demanderesse ne pouvant revendiquer aucune valeur économique individualisée résultant de l'usage d'un signe verbal descriptif de son activité dans le domaine de la santé des sportifs. La demande subsidiaire ne peut donc qu'être rejetée.
27. Partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile la société Ehealth sera condamnée aux dépens, ainsi qu'à payer à la société Mediathlète la somme de 5.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
28. Aucune circonstance ne justifie d'écarter l'exécution provisoire de droit dont est assortie la présente décision conformément aux dispositions de l'article 514 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement rendu contradictoirement et en premier ressort,
LE TRIBUNAL,
REJETTE les demandes de la société Ehealth fondées sur la contrefaçon de marques comme la concurrence déloyale et parasitaire ;
CONDAMNE la société Ehealth aux dépens ;
CONDAMNE la société Ehealth à payer à la société Mediathlète la somme de 5.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que la présente décision est de plein droit assortie de l'exécution provisoire.
Fait et jugé à Paris le 08 décembre 2022.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
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CAPP/JURITEXT000047324633.xml |
JUDICIAIRE
3ème chambre
2ème section
No RG 20/00616
No Portalis 352J-W-B7E-CRPNF
No MINUTE :
Assignation du :
14 Janvier 2020
rendu le 18 Novembre 2022
DEMANDERESSE
Madame [Y] [X] épouse [K]
[Adresse 2]
[Localité 10]
représentée par Maître Thibault LENTINI de l'AARPI ARENAIRE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #G252
DÉFENDEURS
S.A.R.L. GALERIE D'ART CASTIGLIONE
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Maître Maryse CASSAN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1495
Monsieur [S] [J]
[Adresse 1]
[Localité 5]
représenté par Maître Constance DELACOUX, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #G0804
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Irène BENAC, Vice-Présidente
Mme Elodie GUENNEC, Vice-présidente
Monsieur Arthur COURILLON-HAVY, Juge
assisté de Monsieur Quentin CURABET, Greffier
A l'audience du 23 Septembre 2022 tenue en audience publique devant Irène BENAC et Arthur COURILLON-HAVY, juges rapporteurs, qui sans opposition des avocats ont tenu seuls l'audience, et après avoir entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile.
Avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 18 Novembre 2022.
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Mme [Y] [X], épouse [K], se présente comme une sculptrice, auteure notamment d'une série de sculptures dénommées "Baby Bouddha" en 2008 et d'une sculpture dénommée "Lapin Doudou", en septembre 2012.
La SARL Galerie d'art Castiglione, immatriculée au RCS de Paris depuis le 6 janvier 1977 et dont le gérant est M. [V] [Z], a pour activité l'achat et la vente d'objets d'art, notamment dans ses neuf galeries [V] [Z].
Elle a exposé et vendu certaines sculptures de Mme [K], parmi lesquelles 7 exemplaires en bronze de 2,20 mètres de la sculpture Lapin Doudou et 24 exemplaires de 38 centimètres de deux déclinaisons de Baby Bouddha, réalisés en Thaïlande en 2013 et 2014.
M. [S] [J] se présente comme un peintre-sculpteur, auteur notamment d'une sculpture "Lapin qui court" en 2015. Il indique avoir créé en 2008 une société thaïlandaise nommée [J]bronze Co. Ltd dont il a été, jusqu'à sa retraite, artiste designer salarié.
Soutenant que la SARL Galerie d'art Castiglione avait fait éditer et mis en vente, d'une part, des sculptures Lapin Doudou en laiton (et non en bronze) et Baby Bouddha d'une qualité d'exécution médiocre et, d'autre part, des sculptures contrefaisant son Lapin Doudou, signées de M. [J], Mme [K], après une vaine tentative d'accord amiable, a fait procéder à une saisie-contrefaçon au sein de la galerie [V] [Z] de [Localité 12] le 19 décembre 2019.
Par acte du 14 janvier 2020, Mme [K] a assigné M. [J] et la SARL Galerie d'art Castiglione devant le tribunal judiciaire de Paris en réparation de ses préjudices résultant des atteintes à ses droits d'auteur sur les sculptures Lapin Doudou et Baby Bouddha.
Par ordonnance du 17 décembre 2021, le juge de la mise en état a rejeté les fins de non-recevoir soulevées par M. [J] tirées du défaut de qualité à agir de Mme [K] et de son propre défaut de qualité à défendre à la demande incidente de la SARL Galerie d'art Castiglione et condamné M. [J] à payer à Mme [K] la somme de 3.000 euros en réparation de son préjudice moral du fait du caractère dilatoire de l'incident.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 23 décembre 2021, Mme [K] demande au tribunal, au visa des articles L.111-1 et suivants, L.121-1 et suivants, L.122-1 et suivants, L.122-4 et L.331-1-4 du code de la propriété intellectuelle, de :
- rejeter la demande de nullité de la saisie-contrefaçon formée par la SARL Galerie d'art Castiglione ;
- condamner la SARL Galerie d'art Castiglione à lui payer la somme 50.000 euros en réparation de l'atteinte à son droit moral sur son oeuvre Lapin Doudou, du fait de la fabrication, de l'offre à la vente et de la vente de sculptures défectueuses et présentée à tort comme étant en bronze ;
- condamner la SARL Galerie d'art Castiglione à lui payer la somme 50.000 euros en réparation de l'atteinte à son droit moral sur son oeuvre Baby Bouddha, du fait de la fabrication, de l'offre à la vente et de la vente de sculptures de qualité médiocre ;
- condamner solidairement la SARL Galerie d'art Castiglione et M. [J] à lui payer :
- la somme 170.000 euros en réparation de l'atteinte à ses droits patrimoniaux d'auteur,
- la somme 30.000 euros en réparation de son préjudice moral,
- la somme 50.000 euros en réparation de l'atteinte à son droit moral,
du fait des actes de contrefaçon de son oeuvre Lapin Doudou ;
- faire interdiction à la SARL Galerie d'art Castiglione et à M. [J] de fabriquer, d'exposer, d'offrir à la vente et de vendre la sculpture litigieuse contrefaisante sous astreinte définitive de 10.000 euros par infraction constatée, à compter de la signification de la décision à intervenir ;
- ordonner le rappel des circuits commerciaux et la destruction dans le délai d'un mois à compter de la signification de la décision à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard de la totalité des sculptures grand Lapin Doudou défectueuses, la totalité des sculptures Baby Bouddha de qualité médiocre et la totalité des sculptures contrefaisantes de la sculpture Lapin Doudou ;
- dire que le tribunal judiciaire de Paris sera compétent pour connaître de la liquidation des astreintes qu'il aura ordonnées ;
- ordonner la publication dans cinq journaux et sur la page d'accueil du site Internet de M. [J] aux frais des défendeurs de la décision rendue ;
- condamner solidairement la SARL Galerie d'art Castiglione et M. [J] aux dépens (comprenant les frais de saisie-contrefaçon) qui seront recouvrés par Me Thibault Lentini, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile, et à lui payer la somme de 28.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- rejeter la demande formée par M. [J] sur le fondement de la procédure abusive.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 13 janvier 2022, la SARL Galerie d'art Castiglione demande au tribunal, au visa des articles L. 111-1 et suivants, L. 121-1 et suivants, L. 122-4, L. 331-3-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle et 1156, 1231, 1240, 1302-1 et 1998 du code civil, de :
A titre principal :
- débouter Mme [K] de l'intégralité de ses demandes à son encontre,
- débouter M. [J] de l'intégralité de ses demandes,
- annuler la saisie-contrefaçon du 19 décembre 2020 et en donner mainlevée,
A titre reconventionnel :
- à titre principal, condamner M. [J] à lui payer la somme de 67.450 euros en remboursement des sommes payées pour la fonte des 7 Lapin Doudou défectueux, ainsi que la somme 100.000 euros réglée à la galerie RJD Gallery au titre des préjudices causés par la vente de deux Lapin Doudou défectueux ;
- à titre subsidiaire, condamner M. [J] au remboursement de la somme de 167.450 euros en vertu de la théorie du mandat apparent, ainsi que de la double confusion de patrimoine et de dénomination avec "[J] Bronze",
- à titre infiniment subsidiaire, condamner M. [J] au remboursement de la somme de 67.450 euros au titre de la répétition de l'indu,
En tout état de cause :
- condamner solidairement Mme [K] et M. [J] à lui payer la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'intégralité des dépens.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 20 janvier 2022, M. [J] demande au tribunal, au visa des articles 122 du code de procédure civile, L. 112-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle et 1353 du code civil, de :
A titre principal :
- débouter Mme [K] de l'ensemble de ses demandes formulées à son encontre en l'absence de protection par le droit d'auteur du Lapin Doudou,
A titre subsidiaire :
- débouter Mme [K] de l'ensemble de ses demandes formulées à son encontre pour absence de caractère contrefaisant du Lapin qui court par rapport au Lapin Doudou,
A titre principal :
- le mettre hors de cause,
- débouter la SARL Galerie d'art Castiglione de ses demandes à son encontre,
A titre subsidiaire :
- débouter la SARL Galerie d'art Castiglione de ses demandes à son encontre, en l'absence de preuve tant d'une défectuosité que de son origine,
En tout état de cause :
- condamner Mme [K] à lui payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son action abusive,
- condamner solidairement Mme [K] et la société SARL Galerie d'art Castiglione à lui payer la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Pour un exposé complet de l'argumentation des parties il est renvoyé à leurs dernières conclusions précitées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 février 2022.
MOTIVATION
Les demandes des parties de "dire et juger" ne sont pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile mais constituent en réalité le rappel des moyens invoqués ; en conséquence, elles ne sont pas rappelées dans le résumé des demandes et le tribunal ne statuera pas sur celles-ci.
I . Sur la sculpture "Lapin Doudou"
1 . Sur la qualité d'oeuvre protégée
Moyens des parties
Mme [K] fait valoir que la notion d'oeuvre au sens de l'article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle ne recoupe pas celle, plus restrictive, d'oeuvre d'art au sens du code général des impôts et que la notion d'oeuvre originale au sens de l'article L. 122-8 du code de la propriété intellectuelle est distincte de celle d'exemplaire original.
Elle justifie l'originalité de la sculpture Lapin Doudou dans les termes suivants :
"ces sculptures Lapin Doudou évoquant un lapin en peluche mais nettement plus grandes que la taille réelle d'une peluche (la version la plus grande atteignant 2,20 mètres) (...) le paradoxe produit par la représentation en grande taille de cet objet intime, normalement toujours de petite taille car à destination des enfants.
Les yeux figurent un regard à la fois affectueux et étonné. Ils sont matérialisés par deux disques en relief, pour affirmer le regard, et apposés sur un visage ovale totalement lisse. L'extrémité basse du visage figure le museau par une forme ovale. Les oreilles, longues et fines, s'élargissent au fur et à mesure pour former en leur extrémité une masse oblongue. Elles comportent une brisure en leur début, peu après la tête, de sorte que les oreilles retombent vers le dos du lapin.
Le lapin se tient debout, très droit, comme sur la pointe des pieds, ce qui produit une nette sensation de verticalité. Il adopte une posture humaine. Les bras sont tendus, en retrait du buste. Le buste est élancé et adopte la forme schématisée d'un buste humain. Les jambes sont courtes et aboutissent sur des longs pieds de forme oblongue. La sculpture est lisse et monochrome.
L'aspect lisse de la sculpture est une invitation à caresser l'objet pour créer une intimité avec lui, comme pour l'enfant avec sa peluche.
La forme générale des terminaisons (pattes, bras, mains, oreilles) est arrondie, afin de produire un effet de douceur. Cet effet de douceur est renforcé par l'aspect totalement lisse de la sculpture et son caractère monochrome".
La SARL Galerie d'art Castiglione fait valoir que la description de l'oeuvre correspond au genre "bestiaire monochrome", qui n'est pas protégeable au titre du droit d'auteur.
M. [J] soutient que, en application du code général des impôts et de l'article 122-8 du code de la propriété intellectuelle, le nombre des reproductions du Lapin Doudou, dépassant 8, empêche sa qualification d'oeuvre d'art et celle d'oeuvre originale et que le Lapin Doudou, tel que décrit par Mme [K], n'a que des caractéristiques banales et usuelles pour représenter un lapin.
Réponse du tribunal
L'article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que l'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création et dès lors qu'elle est originale, d'un droit de propriété incorporelle exclusif comportant des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d'ordre patrimonial.
L'originalité de l'oeuvre, qu'il appartient à celui invoquant la protection de caractériser, suppose qu'elle soit issue d'un travail libre et créatif et résulte de choix arbitraires révélant la personnalité de son auteur.
La reconnaissance de la protection par le droit d'auteur ne repose donc pas sur un examen de l'oeuvre invoquée par référence aux antériorités produites, même si celles-ci peuvent contribuer à l'appréciation de la recherche créative.
L'originalité de l'oeuvre peut résulter du choix des couleurs, des dessins, des formes, des matières ou des ornements mais également, de la combinaison originale d'éléments connus.
La protection du droit d'auteur bénéficie à toute oeuvre originale.
Il est indifférent que celle-ci soit une oeuvre d'art au sens du code général des impôts.
Elle n'est pas plus limitée aux exemplaires originaux des oeuvres graphiques ou plastiques dont l'article 122-8 du code de la propriété intellectuelle réglemente le droit de suite.
Les défendeurs font observer à juste titre que la représentation sculpturale du lapin, surdimensionné, fortement stylisé, monochrome et traité en matériaux lisses, est courante dans l'art depuis le XXème siècle.
Cela n'exclut pas l'originalité d'oeuvres appartenant à ce genre, qui s'apprécie au cas par cas.
S'agissant du Lapin Doudou, Mme [K] a choisi de représenter non pas un lapin mais un objet transitionnel destiné aux petits enfants, le doudou, caractérisé par des formes simples, non articulées et dépourvues de détails figuratifs.
Il s'agit d'un objet et non d'un animal, réalisé en très grand format.
Elle lui a aussi donné une posture inattendue, en élongation verticale, qui le distingue à la fois des doudous et des lapins qui l'inspirent.
Les caractéristiques de cette sculpture, à savoir :
- la représentation surdimensionnée d'un objet intime destiné aux enfants,
- prenant la forme d'un lapin à silhouette humanoïde en posture verticale,
- des formes simples, arrondies, douces et lisses, sans détails figuratifs, à l'exception des yeux,
- des membres à peine ébauchés et des oreilles sans aucun détail retombant sur le dos du lapin après une brisure,
- la monochromie (rouge, blanc ou chocolat),
ne sont ni banales, ni usuelles pour représenter tant un doudou qu'un lapin.
La sculpture Lapin Doudou résulte de choix esthétiques et d'un travail créatif propres de Mme [K]. Elle doit donc bénéficier de la protection par le droit d'auteur.
2 . Sur la qualité d'auteur
Moyens des parties
Mme [K] fait valoir que :
- elle est auteur pour avoir imaginé la sculpture et réalisé des maquettes avant de faire exécuter un moule et tirer des exemplaires ;
- la qualité d'auteur n'est pas soumise à la preuve d'être à l'origine du moulage du premier exemplaire de l'oeuvre et, en toute hypothèse, ce premier moulage a été fait sous sa direction ;
- les oeuvres ont été divulguées sous son nom de sorte qu'elle bénéficie de la présomption de l'article L. 113-1 du code de la propriété intellectuelle .
M. [J] fait valoir que Mme [K] ne rapporte pas la preuve de sa qualité d'auteur du premier exemplaire, qui a été réalisé par la SARL Fathec.
Réponse du tribunal
L'article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que : "L'oeuvre est réputée créée, indépendamment de toute divulgation publique, du seul fait de la réalisation, même inachevée, de la conception de l'auteur." et aux termes de l'article L. 113-1 du même code "La qualité d'auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l'oeuvre est divulguée."
Mme [K] verse aux débats plusieurs factures à partir du 25 septembre 2012 portant sur la réalisation de moules de la sculpture "doudou lapin" ou "lapin" dans divers formats ainsi que du coulage et de la peinture des pièces.
Elle produit aussi des catalogues à son nom faisant figurer le Lapin Doudou et des attestations, démontrant que cette oeuvre est divulguée exclusivement sous son nom.
Mme [K] est donc titulaire du droit d'auteur sur cette sculpture.
3 . Sur l'atteinte au droit moral par les reproductions défectueuses
Moyens des parties
Mme [K] fait grief à la SARL Galerie d'art Castiglione d'avoir fait réaliser et mis en vente des reproductions de mauvaise qualité, en laiton et non en bronze conduisant à ce qu'elles, "se fissurent et se détériorent au contact des intempéries" sans le révéler préalablement aux clients de sorte que "son oeuvre Lapin Doudou est ainsi détériorée aux yeux du public".
Elle fait valoir que les exemplaires en grande taille de son Lapin Doudou ont été réalisés à l'initiative de la SARL Galerie d'art Castiglione, qui en est maître d'ouvrage, par un prestataire qu'il a choisi et rémunéré, et que, de l'aveu même de la SARL Galerie d'art Castiglione, 5 des 7 exemplaires coulés ont dû être remplacés ce qui démontre leur caractère défectueux, également établi par les photographies envoyées par la galerie RDJ Gallery.
La SARL Galerie d'art Castiglione fait valoir que
- les reproductions ont été faites à partir d'une pièce originale que Mme [K] a envoyée en Thaïlande à ses frais et sous sa supervision ;
- elle a appris, en même temps que l'artiste, que les reproductions étaient en laiton, métal qu'il n'est pas aisé de différencier du bronze car ce sont tous deux des alliages de cuivre ;
- Mme [K] a quand même signé deux exemplaires de ces sculptures, les sachant en laiton,
- elle a pris en charge l'indemnisation des clients ayant acheté des sculptures dégradées et un seul des sept exemplaires est encore chez un client ;
- les oeuvres en bronze coulées en Italie présentent aussi des dégradations de surface ;
- l'absence de cote de Mme [K] au marché de l'art justifie de ne pas lui reconnaître une atteinte à son droit moral.
M. [J] souligne que les prétendues défectuosité de ces lapins ne sont pas prouvées et ne reposent que sur les déclarations de M. [H], sans aucune expertise. Il précise que des fissures peuvent avoir de multiples causes, et notamment des chocs, et que toutes les parties connaissaient les particularités du "bronze thaï".
Réponse du tribunal
L'article L.121-1 du code de la propriété intellectuelle prévoit : "L'auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son oeuvre."
Le respect de l'oeuvre implique qu'elle ne soit ni altérée ni déformée, conditions qui s'apprécient en fonction notamment de la destination de l'oeuvre.
La réalisation de l'oeuvre dans un matériau inadapté ou ne permettant pas d'assurer son intégrité est susceptible d'affecter le droit moral de l'auteur s'il l'altère ou la dénature.
Les pièces du dossier démontrent que la reproduction du Lapin Doudou dans le format 2,20 mètres par une entreprise thaïlandaise a été commandée sans aucun formalisme contractuel.
Ni la SARL Galerie d'art Castiglione, ni Mme [K] n'ont formulé de spécifications particulières quant à la réalisation du modèle à la cire, du moule, de la composition du matériau de coulage et du traitement des finitions.
Sur le plan technique, Mme [K] a envoyé une de ses propres réalisations dans le format 1,60 mètres et a donné des instructions à M. [J] pour l'agrandissement du modèle et la réalisation du moule en visioconférence, mais aucune quant au matériau à utiliser, ni aux exigences de durabilité, notamment en cas de conservation en plein air. A l'issue, elle a validé la réalisation ainsi qu'en témoignent les termes de son courriel du 5 octobre 2013 à M. [J] : "La sculpture est validée. Merci beaucoup pour ton travail." (pièce 46 de M. [J]).
S'agissant du matériau, il est constant que les sept exemplaires de 2,20 mètres du Lapin Doudou ont été réalisé en laiton, alors que leur facturation, les 9 août 2013 et 28 octobre 2014, est intitulée "bronze sculpture" et mentionne des "sculptures originales en bronze".
Les courriels échangés entre Mme [K] et la SARL Galerie d'art Castiglione montrent que toutes deux savaient, au plus tard le 15 avril 2015, que les sculptures étaient en laiton. En effet, dans son courriel de cette date, Mme [K] indique qu'elle préfère faire couler les pièces moyennes et petites en Italie "c'est le même prix qu'[S], voire peut-être moins cher et c'est à 4 heures de [Localité 10], c'est du bronze pas du laiton" et elle n'a fait aucune réserve sur ce point.
Ces éléments démontrent que le choix de couler les statues en laiton et la qualité du résultat final permettant la mise en vente ont été validés par Mme [K] aussi bien que par la SARL Galerie d'art Castiglione.
Dans ces conditions, Mme [K] est mal fondée à le reprocher à la SARL Galerie d'art Castiglione.
Trois ans plus tard, le 25 avril 2018, Mme [K] a écrit à la SARL Galerie d'art Castiglione : "Des clients m'ont contacté pour se plaindre de leurs sculptures, me demandant d'intervenir, de réparer leurs lapins, qu'il m'est impossible d'identifier numérotage etc. Ils m'indiquent que les sculptures se sont abîmées.
Cette fabrication est décidément un mauvais choix, quand tu m'as annoncé que ce n'était pas du bronze mais du laiton et quand on voit tous les problèmes que cela occasionne.
La sculpture est belle, mais d'avoir choisi des matériaux de mauvaise qualité, cela finit par coûter plus cher en fin de course plus que le bronze.
Si cela jette le discrédit sur mon propre travail et me décrédibilise, ce n'est pas ce qui m'inquiète le plus, c'est l'état des sculptures chez les clients."
et le 16 juillet 2019, son conseil en a demandé le retrait.
L'étendue et la gravité des défauts de ces statues ressort d'un courriel du 1er juin 2018 de M. [H], directeur de la galerie RJD Gallery ayant acheté, le 28 janvier 2017 "two original sculptures by artist Veronique [K] (...) Media : BRONZE painted in white" indiquant que les deux lapins se fissurent et comportent beaucoup de petites fractures comme si ces sculptures avaient été faites en morceaux et non moulée, assorti de quelques photographies en gros plan des fissures.
La SARL Galerie d'art Castiglione indique elle-même dans ses conclusions qu'elles a dû rembourser ces deux sculptures et que la troisième vendue a dû être remplacée, sans préciser les causes de ce remplacement.
Dès lors, s'il apparaît que les sculptures sont altérées, il n'est pas établi que les dégradations résultent de la fabrication en laiton plutôt qu'en bronze, ni en quoi elles seraient imputables à la SARL Galerie d'art Castiglione. Mme [K] ne saurait donc reprocher à cette dernière d'avoir porté atteinte à son droit moral d'auteur.
La facture de vente de deux exemplaires du grand Lapin Doudou de la SARL Galerie d'art Castiglione à la galerie RJD du 28 janvier 2017 indique "two original sculptures by artist Veronique [K] (...) Media : BRONZE painted in white" (pièce 9.3 de Mme [K]), ce qui démontre que la SARL Galerie d'art Castiglione a vendu ces sculptures comme du bronze (bronze) à cette galerie américaine alors qu'elle savait qu'elles étaient en laiton (brass).
Si cette indélicatesse était susceptible d'entacher la réputation de probité de Mme [K], elle n'a pas altéré ou dénaturé la représentation de son oeuvre qu'elle a toujours jugé très belle, et n'a pas porté atteinte à son droit moral.
Il y a lieu de débouter Mme [K] de l'ensemble de ces demandes au titre de son droit moral sur son oeuvre Lapin Doudou.
4 . Sur la contrefaçon par le Lapin qui court de M. [J]
Moyens des parties
Mme [K] soutient que :
- la sculpture "Lapin qui court" signée [J] exposée, offerte à la vente et vendue par la SARL Galerie d'art Castiglione constitue une adaptation non autorisée, et donc la contrefaçon de sa sculpture Lapin Doudou ;
- la contrefaçon s'apprécie selon les ressemblances et non les différences ;
- les différences entre la sculpture lapin de M. [J] et sa sculpture lapin Doudou (l'une est en mouvement et l'autre immobile) sont insignifiantes et n'écartent pas l'impression d'ensemble identique dégagée par les ressemblances de "la forme ovale du visage et les deux disques sobres figurant les yeux sur un visage totalement lisse" la forme générale des oreilles, des bras, du buste et des jambes, les extrémités arrondies, la position "debout sur la pointe des pieds", l'aspect général "lisse et monochrome" et le grand format de réalisation ;
- elle déclinait le Lapin Doudou dans d'autres sculptures de sorte que le Lapin qui court semblait s'inscrire dans ce mouvement ;
- M. [J] a réalisé cette pièce, très différente du reste de sa production, immédiatement après avoir travaillé sur son Lapin Doudou et les deux oeuvres, dans le même coloris blanc, ont été présentées ensemble dans la galerie [V] [Z] de [Localité 6] en janvier 2016, puis le Lapin qui court seul à [Localité 12] ;
- en fabricant, en offrant à la vente et en vendant la sculpture Lapin qui court signée [J], la SARL Galerie d'art Castiglione et M. [J] portent atteinte à ses droits patrimoniaux et moraux d'auteur sur son oeuvre Lapin Doudou.
La SARL Galerie d'art Castiglione soutient que :
- le Lapin qui court d'[S] [J] ne contrefait pas le Lapin Doudou en l'absence de reprise des éléments caractéristiques portant l'empreinte de la personnalité de Mme [K] que sont la forme du visage, des yeux, des oreilles et des membres ;
- le bestiaire monochrome aux formes simplifiées relève d'un genre que Mme [K] ne saurait revendiquer ;
- il n'existe aucun risque de confusion.
M. [J] fait valoir que le seul point commun des deux sculptures est qu'elles sont inspirées d'un lapin, mais l'une est une peluche et l'autre un lapin anthropomorphe. De plus, les yeux et les oreilles sont bien différents, de même que les proportions du corps (les cuisses sont charnues et musclées, les fesses galbées) et il y a une queue. Enfin, la posture du Lapin qui court est dynamique tandis que le Lapin Doudou est inerte.
Réponse du tribunal
En application des dispositions des articles L122-1 et L122-4 du code de la propriété intellectuelle, le droit d'exploitation appartenant à l'auteur comprend le droit de représentation et le droit de reproduction, et toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque.
La contrefaçon d'une oeuvre protégée par le droit d'auteur, qui n'implique pas l'existence d'un risque de confusion, consiste dans la reprise de ses caractéristiques reconnues comme étant constitutives de son originalité.
La contrefaçon s'apprécie selon les ressemblances et non d'après les différences. Elle ne peut toutefois être retenue lorsque les ressemblances relèvent de la reprise d'un genre et non de la reproduction de caractéristiques spécifiques de l'oeuvre première.
La SARL Galerie d'art Castiglione a commandé à M. [J], qui venait de réaliser la reproduction de 2,20 m du Lapin Doudou de Mme [K], une sculpture Lapin qui court (en 4 exemplaires de 2,40 mètres et 6 exemplaires de 1,20 mètres).
Elle a ensuite exposé cette sculpture en décembre 2015 dans sa galerie de [Localité 6], avec un exemplaire du Lapin Doudou dans le même coloris mais non le même format, et en novembre 2019 dans sa galerie de [Localité 12].
La sculpture Lapin qui court de M. [J] présente des ressemblances avec la sculpture Lapin Doudou : le sujet du lapin plus ou moins humanoïde, sa taille, son traitement lisse et monochrome en blanc, rouge ou chocolat et l'absence de détails figuratifs à l'exception des yeux, soit certains des traits retenus supra pour caractériser l'originalité de l'oeuvre mais dont deux sont typiques du genre bestiaire monochrome.
Toutefois, le Lapin Doudou est figuré comme un objet - inerte - dont la position verticale est paradoxale au regard de ses membres inférieurs fléchis et ses pieds superposés, tandis que le Lapin qui court représente une créature en mouvement, animée.
De plus, le Lapin Doudou présente une forme humanoïde à peine ébauchée, sans queue, sans articulation des bras avec des membres inférieurs très courts et des oreilles sans aucun détail alors que les oreilles du Lapin qui court sont creusées, ses coudes, ses poignets et ses membres inférieurs sont bien marqués, notamment les cuisses et les fesses, et il porte une queue.
Le Lapin qui court est donc dépourvu de trois des caractéristiques essentielles (représentation d'un objet inerte, aux formes à peine ébauchées et aux oreilles tombantes) dont la combinaison a été jugée originale.
Enfin, si Mme [K] avait effectivement représenté le Lapin Doudou dans plusieurs autres sculptures auparavant, elle n'invoque pas la contrefaçon de ces autres oeuvres.
En toute hypothèse, le tribunal observe que, dans ces autres représentations, le doudou lapin n'était ni animé, ni plus détaillé, ni surdimensionné, mais apparaissait seulement en tant que jouet entre les mains d'enfants.
Il y a donc lieu de rejeter toutes les demandes de Mme [K] relatives à la contrefaçon de son oeuvre par celle de M. [J], tant à titre de dommages et intérêts que les mesures d'interdiction et de publication du jugement.
La demande de la SARL Galerie d'art Castiglione à la fois d'annuler la saisie-contrefaçon du 19 décembre 2020 et d'en donner mainlevée n'est aucunement motivée.
Or, aucun grief de nullité n'entache la mesure et sa mainlevée est sans objet, s'agissant d'une saisie-contrefaçon descriptive.
Il y a donc lieu de rejeter ces demandes.
II . Sur la série de sculptures Baby Bouddha
1 . Sur l'originalité
Moyens des parties
Mme [K] fait valoir que la notion d'oeuvre originale au sens du code de la propriété intellectuelle est distincte de celle d'exemplaire original.
Elle justifie l'originalité de la série de sculptures "Baby Bouddha" dans les termes suivants : "cette sculpture reprend les formes rondes des bouddhas japonais (en particulier concernant le crâne, les yeux, le nez et le buste) afin de donner une impression de douceur, de bonté et de sagesse et les mélange avec la forme générale d'un bébé (dont on retrouve l'aspect joufflu, ainsi que les petits pieds et les petites mains dépassant de la tunique) (...) : le bouddha (symbole d'expérience, de sagesse et de savoir) se retrouve dans le corps d'un bébé (par définition inexpérimenté, fragile et vierge de toute connaissance) (...) Ces sculptures Baby Bouddha étaient déclinées en différentes attitudes (dormant, souriant, en position du lotus, distrait)"
La SARL Galerie d'art Castiglione soutient que la sculpture Baby Bouddha ne se distingue pas des multiples sculptures de bébés Bouddha vendues sur Internet, de même forme et même posture, ni des jizos japonais qui l'inspirent, et ne porte pas d'empreinte de créativité propre à l'artiste, de sorte qu'elle est dépourvue d'originalité.
Réponse du tribunal
L'article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que l'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création et dès lors qu'elle est originale, d'un droit de propriété incorporelle exclusif comportant des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d'ordre patrimonial.
La SARL Galerie d'art Castiglione souligne à juste titre que la représentation sculpturale de bébés Bouddah aussi bien que de Jizô, Bouddha protecteur, est courante.
Cela n'exclut pas l'originalité d'oeuvres appartenant à ces genres, qui s'apprécie au cas par cas.
S'inspirant de statuettes de Jizô observées au Japon, Mme [K] a choisi de représenter fidèlement un bébé assis, enveloppé dans un manteau ne laissant voir que ses pieds et ses mains aux doigts croisés, et dont la physionomie et le léger sourire évoquent la douceur, la bonté et la sagesse. Le corps est traité sans autres détails que les doigts et les orteils tandis que le visage détaille les yeux, le nez, la bouche et les oreilles. L'ensemble est monochrome et réalisé dans des matériaux lisses.
La série de sculptures Baby Bouddha représente un bébé, et non un Bouddha auquel il emprunte seulement l'expression de sérénité et de bonté, dans différentes attitudes (orientation de la tête, yeux ouverts ou fermés et jambes plus ou moins fléchies) mais conservant la même position du corps et des bras, assise et stable, et s'inscrivant dans un volume identique.
Ces caractéristiques traduisent une source d'inspiration ayant guidé des choix arbitraires, lesquels portent l'empreinte personnelle de leur créatrice.
Mme [K] fait justement valoir que les différents exemples de bébés Bouddha et de Jizô présentés en défense sont très différents en ce que les têtes de bébé sont disproportionnées aux corps, leurs positions ne sont pas celles d'un bébé, leurs pieds ne sont pas représentés et leurs dos sont différents. De plus, aucun ne présente l'aspect lisse et coloré de la série Baby Bouddha.
Ces différences avec les différentes représentations de bébés Bouddha et de Jizô versées aux débats démontrent de plus fort l'existence de choix esthétiques propres à Mme [K].
La série de sculptures Baby Bouddha, et particulièrement ses déclinaisons baby distracting et baby king doit donc bénéficier de la protection par le droit d'auteur.
2 . Sur l'atteinte au droit moral
Moyens des parties
Mme [K] fait grief à la SARL Galerie d'art Castiglione d'avoir fait réaliser et mis en vente des reproductions de mauvaise qualité de l'oeuvre Baby Bouddha dans ses déclinaisons baby king et distracting baby et présentant des défauts par rapport au modèle : "les doigts des mains sont effacés, les yeux sont absents et sans pupille, les oreilles sont écrasées, le nez a perdu le volume de ses narines et le dessin en relief de la bouche est effacé", portant atteinte à son droit moral sur cette oeuvre.
Elle soutient que la réalisation des 24 exemplaires de ses sculptures Baby Bouddha a été réalisé à l'initiative de la SARL Galerie d'art Castiglione, qui en est maître d'ouvrage, par un prestataire qu'il a choisi et rémunéré et que ces exemplaires ont été commercialisés malgré ses réserves et offres de reprise.
Elle évalue son préjudice à 50.000 euros.
La SARL Galerie d'art Castiglione conteste le défaut de qualité allégué. Elle ajoute que la comparaison est faite entre un modèle en résine et un moulage en bronze, nécessairement moins précis.
Elle fait valoir que les reproductions ont été faites à partir d'une pièce originale que Mme [K] a envoyée en Thaïlande à ses frais et sous sa supervision, qu'elle pouvait assurer elle-même les finitions comme c'est l'usage et qu'elle ne s'est pas opposée à leur vente.
Réponse du tribunal
L'article L.121-1 du code de la propriété intellectuelle prévoit : "L'auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son oeuvre."
Le respect de l'oeuvre implique qu'elle ne soit ni altérée ni déformée.
Il n'est pas contesté que l'auteur de cette oeuvre est Mme [K].
La notoriété de l'artiste est sans incidence sur l'étendue à la protection par le droit d'auteur.
Mme [K] avait été d'emblée très réticente à faire réaliser ces petites sculptures en Thaïlande et l'a exprimé dans les termes suivants à M. [Z] le 24 juillet 2014 : " j'ai réfléchi faire des bb en Thailande , c'est pas une bonne idée faisons d'autres sculptures la-bas.
Après réflexion cela va galvauder mes pièces, elles ont bien marché ici en France et continuent encore . quand tu les vendras, elles seront pas très belles pas bien peintes avec des coulures ou des manques de peinture (...) Tandis qu'ici en France je contrôle la qualité de la fabrication elles sont bien faites bien peintes et aussi belles que je le souhaite, fidèles à l'original.".
M. [Z] s'étant borné à lui répondre "Merde", elle a accepté de faire réaliser les sculptures en Thaïlande et a envoyé les pièces ayant servi de modèle.
12 exemplaires de baby king et 12 de distracting baby de 38 centimètres ont été réalisés sur la base d'une offre de prix du 23 juillet 2014 de la société thaïlandaise [J]bronze Co. Ltd. Ils ont été facturés le 28 octobre 2014 à la SARL Galerie d'art Castiglione qui les a mis en vente.
Après avoir vu ces reproductions à [Localité 8], Mme [K] a écrit à M. [Z], le 27 janvier 2015, que les pièces étaient défectueuses (yeux et narines mal dessinés, volumes insuffisants) et a proposé de les reprendre une à une avant vente, ce qu'il a refusé.
Par courriel du 8 octobre 2015, elle a demandé l'arrêt de la production, la destruction des moules de ces deux oeuvres et la restitution des modèles, en vain.
Pour preuve des altérations alléguées, Mme [K] verse seulement deux photographies d'un distracting baby réalisé en résine par elle-même et d'un autre réalisé par la société thaïlandaise [J]bronze Co. Ltd permettant de constater des finitions beaucoup moins nettes sur le second que sur le premier. M. [Z] n'a pas contesté ce fait lorsque Mme [K] lui en a fait le reproche par courriel du 27 janvier 2015 et en a poursuivi la commercialisation.
De plus les 24 pièces ont été réalisées à partir de seulement deux moules, de sorte que le tribunal retient comme suffisamment établi que l'ensemble des 24 exemplaires sont affectés des mêmes défauts.
Il a été retenu supra que l'association de formes globalement lisses et indistinctes avec des yeux, un nez, une bouche, des oreilles, des doigts et des orteils bien détaillés est une caractéristique de l'originalité de l'oeuvre.
Dès lors, le caractère indistinct de ces détails dans les 24 exemplaires coulés en Thaïlande caractérisent une mauvaise exécution altérant la forme de l'oeuvre dont la destination est purement esthétique.
En ne déferrant pas à la demande de Mme [K] du 8 octobre 2015 de cesser la vente de ces pièces malgré leurs défauts, la SARL Galerie d'art Castiglione a porté atteinte à son droit moral au respect de l'intégrité de l'oeuvre.
Mme [K] ne donne aucune explication à sa demande de 50.000 euros.
24 exemplaires ont été réalisés. Ils étaient encore en vente à [Localité 9] au printemps 2016 et à [Localité 11] le 18 avril 2019.
Au regard de ces éléments, le tribunal fixe à 12.000 euros la réparation de l'atteinte portée à son droit moral par la SARL Galerie d'art Castiglione, qui sera condamnée à lui payer cette somme.
La gravité de l'atteinte ne justifie cependant pas d'ordonner le rappel et la destruction des 24 exemplaires litigieux des sculptures Baby Bouddha mais seulement de ceux restant à ce jour dans les stocks de la SARL Galerie d'art Castiglione. Au vu des très nombreuses demandes formées en ce sens par Mme [K] et restées sans suite, il est justifié de prononcer une astreinte.
Il y a également lieu de rejeter la demande de publication du jugement.
III . Sur la demande incidente de la SARL Galerie d'art Castiglione contre M. [J]
Moyens des parties
La SARL Galerie d'art Castiglione soutient qu'elle a confié à M. [J], et non à la société thaïlandaise [J]bronze Co. Ltd, l'exécution des sept exemplaires du « Lapin Doudou » de 2,20 mètres qu'elle lui a payés selon factures des 9 août 2013 et 28 octobre 2014, de sorte qu'il est responsable de leur mauvaise qualité et des coûts qu'elle a subis de ce fait.
Subsidiairement, elle invoque, d'une part, le mandat apparent de M. [J] et, d'autre part, la confusion de patrimoine entre M. [J] et la société thaïlandaise [J]bronze Co. Ltd.
Très subsidiairement, elle invoque la répétition de l'indû.
M. [J] fait valoir que le co-contractant de la SARL Galerie d'art Castiglione est la société thaïlandaise [J]bronze Co. Ltd et que lui-même est tiers à ce contrat. Il indique avoir été salarié de cette société, qui a travaillé plusieurs années avec la SARL Galerie d'art Castiglione, dont il était l'interlocuteur dès lors qu'il parlait la langue fraçaise
Il conteste la défectuosité des sculptures réalisées, déniée par le fait que la SARL Galerie d'art Castiglione a continué à travailler avec la société thaïlandaise [J]bronze Co. Ltd et ajoute qu'elle savait, tout comme Mme [K], à quoi correspond la qualité « bronze thaï ».
Réponse du tribunal
L'article 1156 du code civil invoqué par la SARL Galerie d'art Castiglione n'était pas entré en vigueur à la date de la réalisation de la prestation litigieuse et ne saurait donc être appliqué au litige.
Les articles 1231, 1240 et 1302-1 du code civil ne l'étaient pas plus mais le tribunal retient que la SARL Galerie d'art Castiglione pouvait invoquer les articles 1147, 1382 et 1376 dans leur rédaction en vigueur lors de l'exécution des prestations et qui prévoient :
- "Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part." ;
- "Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer." ;
- "Celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu.".
L'article 1998 du code civil dispose : "Le mandant est tenu d'exécuter les engagements contractés par le mandataire, conformément au pouvoir qui lui a été donné.
Il n'est tenu de ce qui a pu être fait au-delà, qu'autant qu'il l'a ratifié expressément ou tacitement."
La réalisation des sept exemplaires du Lapin Doudou de 2,20 mètres n'a pas fait l'objet d'un contrat écrit.
La SARL Galerie d'art Castiglione est malvenue de faire grief à M. [S] [J] de ne pas produire la preuve de ce contrat, la charge de la preuve d'une obligation pesant sur le prétendu créancier.
La prestation a été facturée par la société thaïlandaise [J]bronze Co. ltd à la société Galerie d'art Castiglione les 9 août 2013 (modèle de cire, moule et 3 exemplaires) et 28 octobre 2014 (4 exemplaires) pour un total de 103.575 euros.
Les factures sont libellées en français et en anglais, elles sont intitulées "bronze sculpture" et mentionnent des "sculptures originales en bronze", elles sont détaillées et assorties de photographies.
La SARL Galerie d'art Castiglione affirme avoir réglé 67.475 euros à ce titre à M. [S] [J], et non à la société thaïlandaise [J]bronze Co. Ltd. Elle n'en justifie cependant pas dès lors que sa pièce no29, présentée comme la preuve de ce paiement, fait état de deux virements respectivement de 52.300 euros le 14 février 2013 et 50.000 euros le 20 juin 2013, soit pour un total différent de celui allégué et réglé bien avant la facturation des sculptures litigieuses.
Les allégations de la SARL Galerie d'art Castiglione selon lesquelles M. [J] aurait personnellement et seul reçu la commande, réalisé les sculptures et encaissé leur prix ne sont donc corroborées par aucune pièce.
En revanche, M. [S] [J] produit de nombreux courriels envoyés en 2014 de [J] [S] < [Courriel 13] > à [V] [Z] < [Courriel 7] > au sujet de la réalisation de ces sept exemplaires du Lapin Doudou et leur paiement, signés par [D] [O], nom suivi de [J]bronzeCo. Ltd ainsi que l'adresse et le numéro de téléphone de cette société.
Il est par ailleurs démontré par une attestation du 21 février 2019 du ministère du commerce de Thaïlande que cette société, enregistrée le 24 juillet 2008, a pour objet, notamment, la "vente de produits manufacturés en fer, en cuivre, en laiton", le "coulage et moulage de métaux" et la "fabrication, achat, importation, exportation d'objets décoratifs".
Une attestation de son general manager du 12 septembre 2018 établit que M. [J] en était salarié.
Il est donc démontré que la société thaïlandaise [J]bronze Co. Ltd, et non M. [S] [J], était titulaire du contrat de reproduction de l'oeuvre Lapin Doudou.
La responsabilité contractuelle de M. [S] [J] au titre de l'exécution de ce contrat ne saurait donc être engagée, sans qu'il y ait lieu d'examiner l'éventuel manquement contractuel et ses conséquences.
Sur le premier des moyens subsidiaires, M. [J] oppose à juste titre que la théorie du mandat apparent peut être invoquée par un créancier pour obtenir que le mandant exécute une obligation contractée par son mandataire apparent, mais non afin que le mandataire soit tenu des obligations du mandant.
Ce mandat apparent – à le supposer démontré – n'est donc pas de nature à engager la responsabilité de M. [J].
Sur le second moyen subsidiaire, la confusion de patrimoine permet d'étendre une procédure collective d'une entreprise à une autre, en cas de mélange inextricable des patrimoine et non de substituer un débiteur à un autre.
En toute hypothèse, le fait que la SARL Galerie d'art Castiglione ait parfois effectué des paiements à M. [J], artiste à qui elle a commandé des oeuvres, pas plus que la circonstance qu'il soit enregistré en tant qu'entrepreneur individuel en France et ait nommé sa galerie d'[Localité 5] "[J] Bronze" ne caractérise pas la confusion des patrimoines entre M. [J] et la société thaïlandaise [J]bronze Co. ltd.
Aucune demande ne saurait donc prospérer sur ce fondement.
Quant à la répétition de l'indû, la SARL Galerie d'art Castiglione ne peut s'en prévaloir dès lors qu'elle ne démontre pas avoir réglé les factures précitées à M. [S] [J].
Il y a donc lieu de rejeter la demande incidente de la SARL Galerie d'art Castiglione contre M. [J].
IV . Sur la demande reconventionnelle de M. [J] contre Mme [K]
Moyens des parties
M. [J] soutient que Mme [K] a agi en justice de mauvaise foi car elle n'avait aucune doléance quant à la réalisation de la sculpture Lapin Doudou.
Mme [K] conclut au rejet
Réponse du tribunal
L'article 32-1 du code de procédure civile dispose : "Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés."
Mme [K] a été reconnue titulaire d'un droit d'auteur sur les trois oeuvres en litige et de réelles ressemblances ont été observées entre le Lapin Doudou et le Lapin qui court, réalisé par M. [J] peu après l'agrandissement et l'exécution de sept exemplaires du Lapin Doudou.
Elle a donc pu légitimement se méprendre sur l'étendue de ses droits et aucune intention de nuire, dilatoire ou abusive n'est démontrée.
La demande est rejetée.
VI . Sur les autres demandes
Mme [K] et la SARL Galerie d'art Castiglione, qui succombent chacune partiellement, sont condamnées aux dépens de l'instance.
L'équité justifie de condamner la SARL Galerie d'art Castiglione à payer à Mme [K] la somme de 4.000 euros et à M. [J] celle de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner Mme [K] à payer à M. [J] la somme de 2.000 euros au même titre.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort,
DIT que les sculptures "Lapin Doudou" et la série "Baby Bouddha", dont Mme [Y] [X], épouse [K], est l'auteure, sont des oeuvres protégées par le droit d'auteur ;
DIT que la SARL Galerie d'art Castiglione a porté atteinte au droit moral de Mme [Y] [X], épouse [K], sur les déclinaisons king baby et distracting baby de l'oeuvre Baby Bouddha ;
CONDAMNE la SARL Galerie d'art Castiglione à payer à Mme [Y] [X], épouse [K], la somme de 12.000 euros en réparation de cette atteinte ;
CONDAMNE la SARL Galerie d'art Castiglione à détruire, à ses frais, dans le délai de deux mois à compter de la signification de la décision à intervenir, les sculptures Baby Bouddha réalisées par la société [J]bronze Co. Ltd en 2014 et d'en justifier auprès de Mme [Y] [X], épouse [K], sous le même délai sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard durant 3 mois ;
DIT que le tribunal se réserve la liquidation de l'astreinte ;
CONDAMNE Mme [Y] [X], épouse [K], et la SARL Galerie d'art Castiglione aux dépens de l'instance ;
CONDAMNE la SARL Galerie d'art Castiglione à payer à Mme [Y] [X], épouse [K], la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Mme [Y] [X], épouse [K], à payer à M. [S] [J] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la SARL Galerie d'art Castiglione à payer à M. [S] [J] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Fait et jugé à Paris le 18 Novembre 2022
Le Greffier La Présidente
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