id
stringlengths
3
248
text
stringlengths
433
1.85M
Revue des Deux Mondes - 1854 - tome 8.djvu/941
politique occidentale, à laquelle tous les hommes qui ont le sentiment de l’honneur et de la grandeur de l’Allemagne ambitionnaient de voir leur pays associé. Bien des gens osaient dire maintenant ce qu’ils n’auraient pas osé penser plusieurs mois avant. Dans les chambres, les libéraux modérés, les amis du prince de Prusse, s’étaient entièrement rapprochés du parti bureaucratique et conservateur dont M. de Manteuffel est le chef, sous l’influence de la nouvelle direction imprimée à la politique extérieure par le rejet des propositions russes. Ce parti, qui nous était autrefois hostile, revenait à la France grâce à notre union avec l’Angleterre. M. de Pourtalès, collaborateur de M. de Manteuffel aux affaires étrangères, repartait pour Londres, où il allait remplir une nouvelle mission de confiance. L’alliance occidentale avait ses partisans déclarés, et, chose plus extraordinaire, la fermeté de la politique autrichienne, le rôle indépendant et élevé que cette politique rendait à l’Allemagne, gagnaient à l’Autriche des sympathies prussiennes. Le parti de la croix, le parti russe, en butte aux défiances de l’opinion, semblait être devenu impuissant à la cour. La mort venait de lui enlever, dans la personne du comte de Stolberg, un de ses meilleurs appuis auprès de Frédéric-Guillaume. Le général de Gerlach, qui avait essayé de prêter son entremise à des communications directes de M. de Budberg au roi, s’était vu renvoyé par ce prince à M. de Manteuffel. Le roi traitait très froidement les amis de la Russie, et ne leur permettait plus de l’entretenir d’affaires. Le jeu de la diplomatie russe était compromis; décidément elle avait perdu à Berlin la première partie, Après l’affaire de Sinope, exécutée contrairement à la promesse de la Russie de ne point entreprendre d’opération offensive contre la Turquie tant que dureraient les négociations, la France et l’Angleterre, qui avaient leurs escadres au Bosphore, durent interdire à la flotte russe la navigation de la Mer-Noire. A la suite de la déclaration des puissances maritimes à ce sujet, la Russie rompit avec elles les relations diplomatiques. La France et l’Angleterre étaient donc entrées dans une situation plus tranchée vis-à-vis du cabinet de Pétérsbourg que celle où se trouvaient encore l’Autriche et la Prusse. L’attitude active et militante qu’allaient prendre les nations maritimes n’était cependant que la conséquence naturelle et nécessaire des principes proclamés en commun à Vienne par les quatre puissances. L’intégrité de l’empire ottoman, l’indépendance du sultan, la participation de la Turquie à la sécurité générale qui résulte de cette solidarité collective que l’on appelle l’équilibre européen, tels <references/>
Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 3.djvu/551
{{nr||ÆNEAS SYLVIUS.|545}}ne me soient retirées. Si donc je le quittais, il ne me serait plus possible de vivre avec toi d’une manière convenable à ton rang, à tes goûts, à ton éducation. Que si, au contraire, je reste à la cour, nous n’aurions plus alors un instant de repos, tant Sigismond, par son goût belliqueux, a contracté l’habitude de ne jamais rester dans la même ville. Nulle part il n’a fait un si long séjour qu’à Sienne. Il ne me resterait donc pour ressource que de te traîner à ma suite dans les camps, ce qui ne pourrait convenir à aucun de nous deux. Consulte-toi donc, ma chère Lucrèce, et pèse mes avis ! Un autre amant qui fermerait les yeux sur l’avenir, et qui chercherait surtout à satisfaire sa passion aux dépens de ton repos, te tiendrait un autre langage que le mien ; mais il ne t’aimerait pas, puisqu’il ne craindrait pas de sacrifier ta réputation à ses goûts. Je te tiens ici le langage d’un honnête homme : reste dans ton pays ! — Cependant, ne doute pas que je n’y revienne bientôt, car je ferai en sorte que toutes les affaires que Sigismond a à régler en Toscane me soient confiées. Alors je pourrai profiter des bontés que tu as pour moi, sans te porter aucun préjudice. Adieu, ma chère âme ! aime-moi toujours bien, et sois certaine que mon amour n’est pas moindre que le tien ; que notre séparation momentanée ne me coûte pas moins qu’à toi. Adieu, encore une fois, mon bonheur et ma vie ! » La fin du roman est fort triste et empreinte de vérité. Après avoir écrit la lettre que l’on vient de lire, où l’amant du Nord exprime si bien cette passion septentrionale toujours tempérée par le raisonnement, Euriale part avec Sigismond, et le suit jusqu’en Hongrie. Là, il apprend la mort de-Lucrèce, qui s’était laissé consumer peu à peu par le chagrin. Enfin le dernier trait frappant de cette histoire est la consolation lente, il est vrai, d’Euriale, mais qui lui permet cependant, secondé par le désir de plaire à son empereur et le besoin d’assurer sa fortune, d’épouser une jeune personne fort belle et de la plus haute distinction, que lui propose le César. Le bon Æneas Sylvius finit ainsi son récit, en s’adressant à l’un de ses amis : « Voilà, mon cher Mariano, la fin des amours d’Euriale et de Lucrèce. Cette histoire est triste ; mais elle est véritable. Ainsi, que ceux qui la liront en fassent leur profit, et qu’ils tâchent de ne pas boire dans la coupe d’amour, car elle contient plus d’absinthe que de miel. « Portez-vous bien, mon ami. {{g|« De Vienne, ce 5 de juillet, l’an de grâce 1444. »|4}} Cette nouvelle, écrite en latin, eut un succès extraordinaire en Europe : on la traduisit dans presque toutes les langues, et {{tiret|particulière|ment}} <references/>
Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 72.djvu/276
leurs rhythmes. Demandez à M. Auber, le connaisseur par excellence dont le dilettantisme raffiné devait, au couronnement de sa carrière, produire ce chef-d’œuvre de musique chorégraphique, hommage exquis d’Anacréon à Terpsichore, qu’on appelle le ballet de ''Marco Spada''. Ce monde des théâtres a des mystères qui en vérité vous déconcertent. Inabordable pour les uns, il s’ouvre à d’autres avec une facilité qui tient du prodige. Le ''Roland à Roncevaux'' de M. Mermet a battu l’estrade au moins vingt-cinq ans avant de trouver moyen de se produire ; combien a-t-il fallu de temps à M. Jules Cohen pour faire représenter sa partition des ''Bleuets'', et cela dans des conditions qu’un maître aurait à peine le droit de réclamer ? On le donne en pleine affluence, on met dans son enjeu la perle du théâtre, Mlle Nilsson, dont les dernières représentations comptent double, et qui plante là son rouet de ''Martha'' pour s’en aller ''cueillir des bleuets dans les blés''. Quel bouquet ! Vous chercheriez en vain je ne dirai pas un morceau, une phrase, mais une simple intention ayant en soi quelque originalité, dans cette partition empanachée de tous les styles et qu’il eût été si facile de ne point écrire et surtout de ne point représenter. Pour le ''poème'', c’est une ballade de Victor Hugo accommodée au goût de l’âge d’or du mélodrame, des abbesses de Pigault-Lebrun dans une berquinade ! Je me figure l’auteur des ''Orientales'' assistant à cette bouffonne mise en scène de sa poésie et s’écriant, comme le géomètre : « Qu’est-ce que cela prouve ? A quoi cela peut-il bien servir d’amalgamer ainsi des notes et des mots pour ne rien dire ? » Il se peut en effet que ces sortes de choses ne nous profitent guère à nous autres, public bénévole, qui ne demanderions qu’à nous divertir un peu ; mais tout le monde là-dessus n’est pas du même avis, l’auteur tout le premier, qui, je suppose, ne se plaint pas de la malechance. Au théâtre, il n’y a pas que le succès qui réussisse., les chutes et les demi-chutes habilement ménagées tournent aussi par occasion à bénéfice. Il s’agit de tomber avec grâce, comme le gladiateur antique, et sur tout de savoir s’arranger de manière à tomber partout et souvent. Le public imbécile et distrait ne se soucie, la plupart du temps, ni de qui l’ennuie, ni de qui l’amuse. Pourvu qu’on prononce votre nom, qu’on l’imprime, qu’importe le reste ? A l’âge où tant de pauvres diables, qui peut-être un jour seront des grands maîtres, en sont encore à gueuser leur malheureux premier ''libretto'', M. Jules Cohen a déjà parcouru toute une carrière. Sans parler de cette œuvre nouvelle qui ne vaut ni plus ni moins que celles qui l’ont précédée, on lui doit à l’Opéra-Comique un ''Maître Claude'' en un acte, et un ''José Maria'' en trois. Ajoutons à ce bagage fort honnête la musique des chœurs d’''Athalie'', oui, les chœurs d’''Athalie'' après Mendelssohn ! Et c’est naturellement ceux-là qu’aux jours solennels le Théâtre-Français exécute. Il faut bien faire quelque chose pour les jeunes compositeurs. Il ne manque plus désormais à l’auteur des ''Bleuets'' que de s’installer avec un ouvrage en cinq actes dans le répertoire de l’Opéra. Le temps aidant, nous l’y verrons, et de l’Académie de musique à l’Institut il n’y a qu’un pas. L. BULOZ. <references/>
Melegari - Le Livre de l'espérance, 1916.djvu/209
{{tiret2|atti|tude}} a eu pour cause déterminante la peur sincère de ne pas voir leurs compatriotes à la hauteur de l’héroïsme qu’on leur demandait. C’est pourquoi dans la triste cohorte des coupeurs d’ailes il faut admettre que des esprits droits pussent s’être égarés. Mais chez la plupart, c’est l’épouvante des sacrifices personnels qu’ils pourraient être forcés d’accomplir qui a prévalu ; cette crainte a étouffé dans leurs cœurs l’élan patriotique et obscurci dans leur intelligence la vue nette des événements et de leurs conséquences. Aussi serait-il injuste de les mesurer tous à la même aune. Certes, le manque de foi dans son peuple est une mortelle offense pour ce peuple, mais la foi ne se commande pas et elle manquait à certains cœurs. L’intuition aussi faisait défaut, leur intelligence n’avait pas saisi la menace du « fléau dont il faut se défendre, afin que la vie haute ne périsse pas sur la terre<ref>Émile Verhaeren.</ref>. » Même {{tiret|poli|tiquement}} <references/>
Darien, Bas les coeurs, Albert Savine éditeur, 1889.djvu/328
avaient établi un dépôt de charbons. Mon père pousse le plus possible les travaux de cette ambulance ― qui doit lui rapporter gros. ― Une chose, pourtant, le désole ; c’est de ne pas pouvoir employer des piles entières de planches pourries qui moisissent dans le chantier de la rue Saint-Jacques. ― Ç’aurait été si facile de placer ça ici. Ça aurait passé comme une lettre à la poste. De belles planches toutes neuves !... Est-ce assez malheureux ! Il a une peur, aussi : c’est que la Commune ne dure pas assez pour qu’il ait le temps d’achever sa construction. ― C’est qu’on me ferait une réduction sur le prix convenu... Pourvu que les communards se défendent encore un mois !... Mais, bientôt, une crainte encore plus terrible le saisit. Germaine est venue nous voir, en cachette. ― Elle a appris à mon père que le père Toussaint, depuis le départ des Allemands, mène une vie de polichinelle. ― Et, depuis que les femmes de Paris sont venues ici, depuis qu’il y a des cocottes dans la ville, il ne se contente pas d’aller les voir. <references/>
Revue des Deux Mondes - 1882 - tome 50.djvu/735
promené en char à bancs dans la forêt de Saint-Germain. Auguste Prus était d’une santé délicate; il eut froid et fut pris d’un rhume qui dégénéra en fluxion de poitrine. Un journal de l’opposition déclara que l’on avait fait avaler un breuvage malfaisant à ce « jeune lauréat » parce que l’on était jaloux d’un succès qui avait rejeté un fils de roi au second plan. L’affaire fit du bruit, on en glosa. Qui s’en souvient, si ce n’est le héros de l’histoire, qui me l’a racontée en riant ? ''Le Charivari'', qui menait le branle de l’opposition infatigable, se terminait par de petits « entrefilets » que l’on appelait des carillons. Lorsque, au moment de mettre sous presse, on s’apercevait qu’il manquait quelques lignes au journal, le prote prévenait les rédacteurs présens, qui se mettaient à confectionner des carillons. Laurent Jan, qui fut un loup à dent de vipère et qui alors écrivait au ''Charivari'', me disait : « Quand nous étions pris de court et sans calomnie inédite au bout de la plume, nous disions que le maréchal Bugeaud était un voleur, et cependant nous savions tous que c’était le plus honnête homme du royaume. » Pendant dix ans, ''le Charivari'' a ressassé cette vieille histoire des boudjous que le maréchal aurait mis dans sa poche, et personne n’y a jamais cru. J’estime que l’on attribue aux journaux plus d’importance qu’ils n’en ont. Cherchons les articles qui ont laissé trace dans le souvenir : en juillet 1830, au moment de la promulgation des ordonnances, l’exclamation d’Etienne Becquet : « Malheureuse France ! malheureux roi ! » et au mois de mars 1848, le « Confiance! confiance! » d’Emile de Girardin. Ainsi, parmi des milliers d’articles de journaux publiés depuis cinquante ans, une phrase et un titre. Le journal d’hier est oublié demain : ''verba volant'' ! Laissez-les voler et s’anéantir par leur multiplicité même. On m’accusera de n’être pas pratique. Je n’ai nulle prétention à l’être. Les hommes politiques de la restauration étaient pratiques sans doute; ce qu’ils ont fait de la presse, nous le savons : ils aboutissent à 1830. Louis-Philippe, écoutant l’homme qui se disait pratique par excellence, s’arme des lois de septembre 1835 que lui forge M. Thiers et il arrive à 1848; le général Cavaignac veut « museler » la presse après l’insurrection de juin, il tombe devant le plébiscite du 10 décembre ; et les autres, qui n’avaient que peu de tendresse pour les journaux, Napoléon III en 1870, et Thiers en 1873, et le maréchal Mac-Mahon en 1878 : tous étaient des hommes pratiques. Les journaux ne précipitent aucune chute et ne maintiennent aucun pouvoir. Les gouvernemens qui ont restreint l’action de la presse se sont effondrés; les gouvernemens qui ont accordé toute liberté à la presse se sont écroulés. L’influence que la presse exerce sur le sort des états est nulle; elle taquine les ministres et secoue la torpeur <references/>
Sade, Bourdin - Correspondance inédite du marquis de Sade, 1929.djvu/191
}} chose, et où il y avait des corps m... ! » S’il l’a dit, ce qui est probable puisqu’on le répète, qu’on me cite pour témoins le chanoine Vidal, le curé, le consul, les brigadiers ; il fallait qu’il fût ivre ; car, sans entrer dans la discussion du faux ou du vrai, on n’est pas excusable de tenir de pareils propos en pareille circonstance. Je m’en suis plainte ; on vérifie la manière dont il s’est conduit et, si elle est telle, il sera certainement puni pour avoir insulté contre son devoir et la modération qui lui avait été prescrite par le ministre qui l’avait chargé d’exécuter les ordres du roi...... La personne m’avait écrit formellement du château contre vous. Il parlait de ''fourbe'', de ''traître'', qu’il en avait les preuves, me priait cependant de n’en rien dire. Je ne sais quels contes ou calomnies on avait pu lui faire ou s’il voulait altérer notre confiance en vous, crainte que vous ne m’instruisiez de tout ce que vous pouviez savoir...... {{brn|2}} {{a|''Madame de Montreuil craint que la présence de mademoiselle de Rousset ne vienne tout gâter ; elle met Gaufridy en garde contre ses intrigues et lui fait savoir qu’il a été lui-même accusé d’avoir fait sauver M. de Sade à Valence''. (3 ''novembre'' 1778).}} {{brn|1}} ......Mademoiselle Rousset avec son zèle excessif, et par tout ce qu’elle aura été chargée sans doute de dire à madame de S. par monsieur au moment de la séparation, va achever de lui tourner la tête au lieu de la calmer. Je ne sais si elle vous aura montré ma réponse à une grande lettre qu’elle m’écrivit. Au moment elle a pu et dû la montrer. Elle était telle que je crois qu’elle devait être et lui faisait sentir avec politesse qu’elle se mêlait mal à propos de ce qui ne la regardait pas et me jugeait sans me connaître. Je doute qu’elle vienne à moi. En tous cas, prévenue, je ne crains pas ses tournures et j’aurai une franchise discrète qui ne satisfera guère sa curiosité ni celle de ceux dont elle pourrait être l’émissaire. Il y a longtemps que je voulais vous prévenir de ne pas avoir de confiance, mais vous me paraissiez si peu disposé que je crus l’avis inutile. Mais, puisque vous me le demandez, je vous dis : « Ne vous y fiez pas. » Si elle vous captivait, c’était pour mieux pénétrer, et en instruire. Je ne sais si elle était simple confidente, copiste ou agent, mais, à quel de ces titres qu’elle agisse, elle a donné certainement, avec ou d’après M. de S., dans la cabale ou dans l’opinion personnelle, vraie ou simulée, de M. de S. à votre égard. Voyez comme on éprouve des calomnies d’espèces opposées. On m’a assuré ici, et cela nullement des agents de madame de S., mais par les connaissances des personnes ayant part à l’administration, que c’était vous qui l’aviez fait sauver à V.l{{loop|3|{{sp|0.01em|.}}}} en lui donnant les facilités. Enfin madame de S., par son mouvement naturel, par les raisons de M. le prévôt de Saint-Victor et même les miennes, quoique produites avec ménagement, a paru écarter toute idée de défiance sur vous, monsieur, et votre administration, et regarder ce qui avait été dit comme l’effet d’une cabale qui <references/>
Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 3.djvu/950
abrutissement. Quand l’Autrichien et l’Espagnol furent arrivés, on se mit à table. Encore si le vieux prince de Nipperg s’était borné à manger tout le fond d’esprit qui aurait pu revenir à son fils ; mais il lui avait laissé par son nom une écrasante dette. Le prince actuel de Nipperg, par sentimens de famille, par pitié filiale, voulait absolument faire, vis-à-vis des artistes et des gens du monde, les frais qu’aurait faits son père. Toujours il se trouvait à court ; c’est une justice à lui rendre : Il supportait parfaitement sa pauvreté ; on pouvait croire qu’il ne la soupçonnait pas. Lorsqu’il sut que William Simpton était sculpteur, il voulut parler statuaire. Il s’extasia sur les narines de l’Apollon du Belvédère. Ce qu’il dit, lord Damville allait le dire. Lord Damville et le prince de Nipperg étaient faits pour s’entendre merveilleusement. Toutefois le prince de Nipperg avait quelque chose de plus léger dans ses prétentions, cela va sans dire. Représentant de la cour de Vienne (Vienne avait une cour alors ; la civilisation n’y avait pas encore élevé des barricades), il avait un tour moins constitutionnel dans le discours et dans les idées. Le beau Lionel, qui, lui, s’était fait le représentant de la cour de Charles II, était d’une légèreté étourdissante. Il jetait au milieu de toute conversation sérieuse le rire dont les marquis, autrefois assis sur la scène, le dos tourné au parterre, interrompaient les tirades de tragédie. Le duc de Penarez mangeait avec application et buvait avec solennité. La tristesse envahissait William Simpton. Par son nom, il n’avait aucune infériorité ; par son esprit, il avait même une supériorité incontestable vis-à-vis de tous ceux qui étaient là ; mais il n’était pas de leur monde, car William Simpton n’était d’aucun monde, à bien dire. S’il avait eu de vrais châteaux, comme ceux de son oncle le marquis de Colbrige, peut-être Simpton aurait-il beaucoup moins habité les châteaux d’Oberon et de Titania. Faute des magnificences de la vie réelle, il s’était jeté dans les splendeurs de la vie imaginaire. De là lui venaient cette fierté rêveuse, ces dédains mélancoliques avec lesquels les hôtes des pays enchantés traversent cette vie. De là lui venaient aussi parfois un ennui très précis, une très positive amertume. On est condamné à errer seul dans les palais de la fantaisie avec les fées et les génies ; on n’y reçoit pas ceux qu’on aime. William Simpton aimait fort cet Espagnol, — c’était le comte de Villa-Médina, — ''qui brûla sa maison pour embrasser sa dame'' ; mais il lui manquait une maison à brûler. Il s’apercevait en ce moment que miss Jane sentait au moins aussi vivement que lui combien cela lui manquait. Cette femme, qui semblait hier si abandonnée aux charmes de l’art, de la poésie, était aujourd’hui tout entière à la magie du luxe, de la fortune, de toutes les grandeurs sociales. Elle caressait Norforth par un petit sourire grondeur dans ses prétentions à l’étourderie ; elle caressa le prince de Nipperg par un sourire de fine approbation dans <references/>
Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 109.djvu/631
leurs héros. Jeanne aime Pierre, ils ne nous en disent pas plus long ; et ils nous racontent les aventures de Pierre et Jeanne. Stendhal a longuement expliqué pourquoi Mathilde aime Julien. Mais son explication laisse étonné. Pourquoi Mathilde aime ce plébéien forcené ? C’est précisément parce qu’il est plébéien et qu’elle le sent forcené. Au moins il ne ressemble pas aux autres, aux jeunes gens fades qui l’entourent. Lui, c’est peut-être un Danton. « Serait-ce un Danton ? » Voilà pourquoi Mathilde aime Julien. Et alors vient une analyse fort savante et singulièrement intéressante de l’amour de tête, de l’amour d’imagination, de cet amour qui loge un personnage vivant dans un cadre longuement préparé à l’avance par une suite de rêveries, de méditations et d’''idéalités''. L’analyse est bonne ; mais le cas de Mathilde n’en est pas éclairci ; car l’orgueil de Mathilde, c’est l’orgueil nobiliaire, et Stendhal l’a marqué de traits si forts qu’il n’y a pas à s’y tromper ; c’est de ses aïeux que Mathilde est fière et amoureuse, des La Môle qui ont été décapités sous Charles IX ou Louis XIII. Dès lors, dans le rêve préalable qui l’a préparée à l’amour auront pu entrer, sans doute, et dû entrer, des figures de grands hommes d’action et de grands ambitieux, mais tous gentilshommes, tous grands seigneurs ; et il ne lui sera jamais venu à l’esprit qu’un plébéien pût être un grand homme. Si elle devient amoureuse d’un plébéien, ce ne sera donc pas ''par suite de'' son rêve antérieur, par suite du travail antérieur de son imagination ; ce sera pour une autre raison. En d’autres termes, ce n’est pas un amour de tête, ce n’est pas un amour d’imagination qu’il fallait donner à Mathilde ; mais, au contraire, un amour tout autre, sensuel ou sentimental, par exemple, ''contrariant'' en elle toute l’œuvre de son imagination, comme aussi de son éducation et de ses préjugés. De là vient ce qu’il y a d’un peu artificiel et factice dans ces commencemens des amours de Mathilde. Stendhal avait à placer une étude de l’amour de tête ; il l’a mal placée. — Il faut ajouter qu’à partir du moment où l’amour de Mathilde s’est déclaré et est tenu par le lecteur comme chose acquise quand nous n’avons plus qu’à suivre la lutte de son orgueil contre son amour, il n’y a plus qu’à admirer. — Le dénoûment de ''Rouge et Noir'' est bien bizarre, et, en vérité, un peu plus faux qu’il n’est permis. L’impression d’un lecteur français de 1890, ou même de 1860, est qu’à la fin de ''Rouge et Noir'' tous les personnages perdent la tête. Vous vous rappelez la situation : Julien est devenu l’amant de {{Mlle}} de La Môle, et {{Mlle}} de La Môle est enceinte. Ce n’est pas tout : secrétaire favori de M. de La Môle, Julien a été fait confident, complice et ministre d’une conspiration politique, qui, du reste, est la chose la plus inextricable comme la plus <references/>
Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 36.djvu/57
dont il se défiait, et de ne confier ses véritables pensées qu’à des agens auxquels il n’accordait pas le pouvoir nécessaire pour la faire prévaloir. Le comte de Broglie ne se dissimulait sans doute pas la vanité du rôle clandestin que lui réservait son maître ; mais il lui convenait d’autant moins de s’y dérober qu’il ne restait plus à sa famille que cette chance de salut. De même que les années précédentes, la correspondance royale allait le chercher à l’armée et sous la tente, les dépêches des agens secrets et du roi lui parvenaient sous un nom d’emprunt, dans sa solitude de Broglie, et lui procuraient encore l’illusion, si douce aux exilés, de la faveur du souverain. L’active imagination du comte, excitée encore par la solitude et par l’absence d’occupations, se donnait de nouveau carrière. Il essaya d’abord de revenir à son projet primitif et de diriger tous les efforts des agens secrets vers la reconstitution d’un parti national en Pologne, sous la protection de la France ; mais il se heurta aux instructions positives du gouvernement français, qui prescrivaient d’abandonner la république à elle-même et d’y entretenir au besoin l’anarchie. Une des illusions de l’histoire est d’avoir cru jusqu’ici que le duc de Choiseul s’intéressait à la Pologne ; il la livra, au contraire, plus complètement qu’on ne l’avait fait avant lui, aux convoitises de ses puissans ennemis en se persuadant à tort que la Russie, l’Autriche, la Prusse, la Turquie se tiendraient mutuellement en échec et garantiraient en commun contre toute tentative de conquête isolée l’intégrité du territoire polonais. Cette politique à courte vue n’avait pas deviné que les puissances rivales pourraient un jour s’entendre, comme le craignait depuis longtemps le comte de Broglie, pour se partager les dépouilles d’un état faible et divisé. Il n’y avait de salut pour la Pologne que dans la fin de l’anarchie qui la consumait, et le duc de Choiseul la condamnait à mourir en travaillant à entretenir dans son sein cette cause inévitable de ruine. Battu encore une fois du côté de la Pologne, le comte se rejeta sur un plan gigantesque dont l’énoncé seul nous remplit aujourd’hui d’étonnement. Qui se douterait qu’au lendemain de la guerre de sept ans, après nos désastres maritimes et la perte de nos colonies, un officier général, isolé dans ses terres et en apparence disgracié, mais ayant conservé la confiance du souverain, ait pu faire accepter par le faible Louis XV le projet d’une descente en Angleterre ? Le comte ne se borna pas à une simple ébauche ; il obtint les moyens de pousser les préparatifs de l’entreprise jusqu’aux limites les plus voisines de l’exécution. On aura peine à croire qu’à l’insu du ministère français et de l’Angleterre, la diplomatie secrète ait réussi à faire sortir ce travail des spéculations vagues et <references/>
Verne - Mathias Sandorf, Hetzel, 1885, tome 2.djvu/193
{{nr||{{sc|ce qui se passait à raguse.}}|187}} {{Séparateur|l}}{{tiret2|Sar|cany}}, il ne dit rien. Pour lui, Sava jouait un jeu, et il s’attachait simplement à voir clair dans ce jeu. « Je ne sais, Sava, reprit Silas Toronthal, impatienté par les froides réparties de la jeune fille, je ne sais ce que signifient tes paroles ni ce qui a pu te les dicter ! D’ailleurs, je ne viens pas ici discuter droit et jurisprudence ! Tu es sous ma tutelle, tu n’as pas qualité pour refuser ou accepter ! Donc, tu voudras bien te soumettre à l’autorité de ton père, que tu ne contestes pas, j’imagine ?... — Peut-être ! répondit Sava. — Vraiment, s’écria Silas Toronthal, qui commençait à perdre quelque peu de son sang-froid, vraiment ! Mais tu parles trois ans trop tôt, Sava ! Quand tu auras atteint ta majorité, tu feras ce qu’il te conviendra de ta fortune ! Jusque-là, c’est à moi que tes intérêts sont confiés, et je les défendrai comme je l’entends ! — Soit, répondit Sava, j’attendrai. — Et qu’attendras-tu ? répliqua le banquier. Tu oublies sans doute que ta situation va changer, dès que les convenances le permettront ! Tu as donc d’autant moins le droit de faire bon marché de ta fortune que tu n’es plus seule intéressée dans l’affaire... <references/>
Zola - Les Trois Villes - Rome, 1896.djvu/109
D’heure en heure, tout évolue, le monde change. — Mais ce n’est pas vrai ! s’écria le cardinal ; le monde est immobile, à jamais !... Il piétine, il s’égare, s’engage dans les plus abominables voies ; et il faut, continuellement, qu’on le ramène au droit chemin. Voilà le vrai... Est-ce que le monde, pour que les promesses du Christ s’accomplissent, ne doit pas revenir au point de départ, à l’innocence première ? Est-ce que la fin des temps n’est pas fixée au jour triomphal où les hommes seront en possession de toute la vérité, apportée par l’Évangile ?... Non, non ! la vérité est dans le passé, c’est toujours au passé qu’il faut s’en tenir, si l’on ne veut pas se perdre. Ces belles nouveautés, ces mirages du fameux progrès, ne sont que les pièges de l’éternelle perdition. À quoi bon chercher davantage, courir sans cesse des risques d’erreur, puisque la vérité, depuis dix-huit siècles, est connue ?... La vérité, mais elle est dans le catholicisme apostolique et romain, tel que l’a créé la longue suite des générations ! Quelle folie de le vouloir changer, lorsque tant de grands esprits, tant d’âmes pieuses en ont fait le plus admirable des monuments, l’instrument unique de l’ordre en ce monde et du salut dans l’autre ! Pierre ne protesta plus, le cœur serré, car il ne pouvait douter maintenant qu’il avait devant lui un adversaire implacable de ses idées les plus chères. Il s’inclinait, respectueux, glacé, en sentant passer sur sa face un petit souffle, le vent lointain qui apportait le froid mortel des tombeaux ; tandis que le cardinal debout, redressant sa haute taille, continuait de sa voix têtue, toute sonnante de fier courage : — Et si, comme ses ennemis le prétendent, le catholicisme est frappé à mort, il doit mourir debout, dans son intégralité glorieuse... vous entendez bien, monsieur l’abbé, pas une concession, pas un abandon, pas une lâcheté ! <references/>
Marguerite de Navarre - L’Heptaméron, éd. Lincy & Montaiglon, tome III.djvu/43
{{nr||{{rom-maj|XLIJ|42}}{{e}} NOUVELLE|29}}{{t|se povoyt nommer la forte femme. Puis que vous estimez la grandeur de la vertu par la mortisfication de soy mesmes, je dictz que ce Seigneur estoyt plus louable qu’elle, veu l’amour qu’il luy portoyt, la puissance, occasion & moïen qu’il en avoyt, & toutesfoys ne voulut poinct offenser la reigle de vraie amytié, qui esgalle le Prince & le pauvre, mais usa des moïens que l’honnesteté permect.|90}} {{t|— Il y en a beaucoup, » dist Hircan, « qui n’eussent pas faict ainsy.|90}} {{t|— De tant plus est il à estimer, » dist Longarine, « qu’il a vaincu la commune malice des hommes, car qui peut faire mal & ne le faict poinct, cestuy là est bien heureux.|90}} {{t|— À ce propos, » dist Geburon, « vous me faictes souvenir d’une qui avoyt plus de craincte d’offenser les œilz des hommes qu’elle n’avoyt Dieu, son honneur ne l’amour.|90}} {{t|— Or je vous prie, » dist Parlamente, « que vous nous la comptiez, & je vous donne ma voix.|90}} {{t|– Il y a, » dist Geburon, « des personnes qui n’ont poinct de Dieu, ou, s’ilz en croyent quelcun, l’estiment quelque chose si loing d’eulx qu’i ne peult veoir ny entendre les mauvaises œuvres qu’ilz font ; &, encores qu’ilz les voient, pensent qu’il soyt nonchaillant qu’il ne les pugnisse poinct, comme ne se soucyant des choses de çà bas. Et de ceste opinion mesmes estoit une Damoiselle, de laquelle, pour l’honneur de la race, je changeray le nom & la nommeray Jambicque. Elle disoit souvent que la personne qui n’avoyt à faire que de Dieu estoit bien heureuse, si au demeurant elle povoyt bien conserver son honneur devant les hommes. Mais|90}} <references/>
Revue des Deux Mondes - 1888 - tome 87.djvu/660
Au contraire, Voyez comme l’accentuation de cette résolution, à science égale, donne à chaque œuvre toute sa saveur et toute sa portée. C’est là, nous l’avouons, le système classique, le vieux jeu, comme on dit ; mais ce vieux jeu reposant sur l’expérience et ayant fait ses preuves depuis Hobbema jusqu’à Millet, il est probable que c’est le bon. Je n’en veux pour preuve que la bonne tenue gardée, même à leur déclin, même en leur vieillesse, au milieu de nos impressionnistes affolés, par les sérieux travailleurs de l’ancienne génération. Sans parler de MM. Lavieille, Curzon, Benouville, Bellel, Guillon, dont les œuvres, doucement et sincèrement pénétrantes dans leur harmonie savante et discrète, prouvent toujours la force de l’enseignement classique, n’est-il pas consolant de retrouver sur la brèche des vétérans, longtemps oubliés ou méprisés, comme MM. Cabat et Paul Flandrin, dont les petites études peuvent encore en apprendre à plus d’un jeune, soit pour la ferme chaleur des colorations, soit pour la belle distribution de la lumière ? Ce regret une fois exprimé que les paysagistes actuels ne joignent pas assez en général la réflexion à l’observation, qu’ils exagèrent trop souvent les dimensions de leurs cadres, et qu’ils ne comprennent pas toujours la nécessité d’une concentration et d’une simplification, il est juste de reconnaître qu’ils étudient le monde sous toutes ses latitudes, en toutes saisons, dans tous ses accidens, avec une curiosité et une sincérité qui ne sont pas toujours infructueuses. Il y en a vraiment au Palais pour tous les goûts. Ceux qui aiment les verdures grasses, la prairie calme et paisible, avec une population de bons animaux, une chaleur douce et bienfaisante, un agréable repos d’été sous un ciel uni, n’ont qu’à suivre sur les ''Bords de l’Isole'' M. Bernier, qui, en réduisant ses cadres, donne plus de force à sa sensation. Ceux qui ne détestent point des spectacles plus mouvementés, le pressentiment, la menace, l’explosion ou l’apaisement de l’orage, n’ont qu’à suivre M. Guillemet et M. Yon dans la ''Plaine de Cayeux'', M. Delpy sur les bords de la Seine, ou bien à gravir, avec M. Jean Desbrosses, l’un des paysagistes les plus intrépides, les plus audacieux, les plus francs de notre temps, les pentes du ''Plateau de Badaillac'', dans le Cantal. Les amoureux du mélancolique automne et du triste hiver s’arrêteront avec plaisir ''Sur les bords de la Sauldre'' avec M. Lemarié des Landelles, en ''Franche-Comté'' avec M. Boudot, dans la ''Vallée des Ardoisières'' avec M. Joubert, à ''Vauharlin, un soir d’hiver'', avec M. Binet. Cette dernière peinture, très grave, très simple, est d’une puissance d’impression assez vive. De très beaux couchers de soleil sont dus à M. Rapin, dont le talent délicat et poétique s’affirme avec plus de fermeté qu’autrefois dans son ''Soir à Druillat'', et à M. Japy, qui <references/>
Dumont - Éloge de Malesherbes, 1821.djvu/14
<poem> Là, tu fus accueilli d’une voix unanime, Tant pour toi l’on avait une éclatante estime. La France tressaillit à ce glorieux choix, Qui vraiment honorait les lettres et les lois. Nul n’entra dans la lice en voyant {{Sc|Malesherbes}} Venir porter ses pas sous ces voutes superbes ; Tout lui céda la palme et voulut applaudir À ce choix qui faisait la vertu resplendir. {{em|1}}{{Sc|Lamoignon}}, ta mémoire appartient à la terre : Ainsi donc, en peignant ton noble caractère, Je crois devant mes yeux voir l’univers entier Venir ceindre ton front d’un auguste laurier, De ce laurier de paix, simbole d’alégresse, Que dans l’élysée même y reçoit la sagesse. Le sceptre de Thémis a reçu de tes mains Un éclat qui te rend le premier des humains. {{em|1}}Quelle noble vertu distinguait ce grand homme ! Jamais rien de plus grand ne se trouva dans Rome. Jamais l’antique Grèce, en ses temps si fameux, Ne put montrer au monde un cœur plus généreux. Il voyait s’avancer le progrès des lumières, Il voulait qu’on ouvrît d’impuissantes barrières Qu’on osait opposer à la marche du temps ; Il voulait préparer les vastes fondemens Où l’on allait asseoir l’édifice des âges. Il savait pressentir les plus grands avantages Qui devaient résulter de toute liberté Devenant le lien de la société ; Mais il savait prévoir que trop de résistance Causerait des malheurs funestes à la France. </poem> <references/>
Doyle - La bataille de Sedgemoor, trad. Savine, 1911.djvu/259
êtes capables de prier, si vos conciliabules mortels pour l'âme n'ont pas chassé de vous toute grâce, tombez à genoux, et exprimez votre gratitude en apprenant de moi qu'il vous est accordé à tous un pardon entier. Alors le juge se leva de son siège, comme s'il allait descendre du tribunal, et nous échangeâmes des regards stupéfaits sous l'impression de ce dénouement si inattendu du procès. Les soldats et les gens de loi ne furent pas moins ébahis, pendant qu'un murmure de joie et d'approbation se faisait entendre, parmi les quelques campagnards qui avaient eu la hardiesse de s'aventurer dans cette enceinte maudite. -Toutefois, reprit Jeffreys, en se tournant, un malicieux sourire sur les lèvres, ce pardon est subordonné à certaines conditions et réserves. Vous serez tous conduits d'ici à Poole, enchaînés, et vous y trouverez un navire qui vous attend. Vous serez enfermés avec d'autres dans la cale dudit navire et transportés aux frais du Roi dans les Plantations, pour y être vendus comme esclaves. Puisse Dieu vous donner des maîtres qui sachent faire un usage libéral du bâton et du cuir pour amollir vos esprits obstinés et vous porter à de meilleures pensées. Il était de nouveau sur le point de se retirer, lorsqu'un des conseillers de la Couronne lui dit un mot à demi-voix. -Une bonne idée! s'écria le juge. J'avais oublié. <references/>
Revue des Deux Mondes - 1882 - tome 52.djvu/722
simple ; il n’a pas même obtenu cette modeste satisfaction. Il s’est trouvé, au contraire, dans ce parlement tout républicain, une majorité pour lui déclarer avec une sorte de brutalité que la chambre, « opposée à la création d’une mairie centrale à Paris, » espérait que le gouvernement se tiendrait pour averti. Le coup était rude autant qu’imprévu. M. le ministre de l’intérieur a donné sa démission, le cabinet tout entier a donné sa démission. On s’est bientôt ravisé cependant ; on s’est expliqué. Un vote de confiance préparé par les tacticiens est venu le lendemain relever le ministère, sans rétracter toutefois le vote de la veille contre la mairie centrale, et on s’est cru sauvé. Malheureusement, on avait compté sans le conseil municipal, qui à son tour est entré en scène, qui a voulu relever le défi de la chambre en opposant, lui aussi, un ordre du jour à l’ordre du jour du palais Bourbon. M. le préfet de la Seine Floquet, qui avait donné sa démission comme le ministre de l’intérieur, a fait cause commune avec le conseil municipal et a déclaré plus que jamais qu’il n’avait accepté la préfecture que pour conquérir la mairie ; « sinon, non, » a-t-il dit fièrement : de sorte qu’on était entre deux camps : d’un côté, la chambre, qui représente le pays tout entier, se déclarait opposée à la création de cette fameuse mairie centrale ; d’un autre côté, le conseil municipal votait son ordre du jour contre la chambre, et M. le préfet de la Seine, après avoir donné sa démission, ne consentait à la retirer que s’il recevait une nouvelle investiture de ce conseil en insurrection. Le gouvernement s’est trouvé fort embarrassé et, une fois de plus, il a essayé de se tirer d’embarras en éludant tout, en confondant tout. Il a donné satisfaction à la chambre en annulant l’ordre du jour du conseil municipal, qui était une illégalité, une usurpation, et il a donné satisfaction au conseil municipal en lui laissant son préfet, qui, par un vote de confiance, est devenu une sorte de maire. C’est ce qu’on appelle gouverner ! L’incident est assurément bizarre, et sans avoir une importance démesurée, il a cependant sa signification, sa moralité. Il révèle une fois de plus cette situation étrange, absolument irrégulière et à peu près révolutionnaire où Paris se trouve placé depuis quelques années. Ainsi voilà un conseil municipal qui prétend se mettre en antagonisme avec l’assemblée souveraine du pays et se substituer à tous les pouvoirs. Il tient ses assises, il vote des ordres du jour de censure ou de confiance, il a son journal ; il a aussi son préfet qui n’est resté que sur son invitation ; pour M. le préfet de la Seine, le gouvernement ne compte pas. Le conseil municipal prétend régir à son gré, selon ses passions, une ville comme Paris qui est la capitale de la France et disposer souverainement d’un budget de deux cents millions. Pour le conseil municipal il n’y a ni lois, ni constitution, ni pouvoirs nationaux : Paris lui appartient, et, chose plus bizarre que tout le reste, le <references/>
Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 19.djvu/311
des exemples non moins curieux de ce servilisme imitateur. Plus tard, la réaction catholique et moyen-âge prend chez nous la place du philosophisme, et notre dandisme religieux et féodal supplante aussitôt, auprès de nos Sosie ultra-pyrénéens, ''le Bon Sens du curé Meslier''. Otez de la faction carliste ses élémens accidentels : — les moines qui espéraient, comme par le passé, agrandir leur influence dans la lutte ; les ''guérilleros'' que tout drapeau insurrectionnel ralliera, quel qu’il soit ; les Basques enfin, qui, effrayés sur l’avenir de leurs privilèges, faisaient arme du premier moyen de résistance qui leur tombait aux mains ; — et ce qui reste, c’est-à-dire le noyau du parti, la petite cour et l’administration du prétendant, n’est qu’une variété du type afrancesado à sa seconde incarnation. Ceci n’est point un paradoxe. Quel principe, quel intérêt sérieux pouvait rallier ce groupe autour de don Carlos ? Le principe ultra-monarchique ? Il n’était pas menacé ; nul n’avait poussé si loin que Ferdinand VII la théorie du ''rey neto''. L’intérêt des vieilles idées ? Encore moins : de 1814 à 1830, tous les actes de Ferdinand VII ne sont qu’un long duel contre les idées nouvelles, duel inégal où l’agresseur avait la trahison pour armure. Cependant le noyau du parti carliste n’a pas attendu, pour se constituer au nom de cet intérêt et de ce principe, que Marie-Christine vînt jeter la lueur de sa jeunesse et de ses caprices semi-libéraux dans les ténèbres inquisitoriales de la vieille cour. Ce parti n’avait donc pas, à l’origine, de raison d’être. On n’y peut voir qu’un non-sens de l’esprit d’imitation. Don Carlos, outre qu’il avait pour lui les couvens, cet accompagnement obligé de la fantasmagorie romantique du jour, don Carlos, avec ses allures ascétiques et sombres, se prêtait bien mieux aux nécessités du cadre de convention où la mode s’était placée que la trivialité narquoise de Ferdinand, et le goût afrancesado l’adopta, comme il avait adopté les pages en maillot orange et les moisissures ogivales de notre littérature de 1827. M. Victor Hugo a sur la conscience sept ans de guerre civile. Dieu sait où l’épidémie carliste se fût arrêtée si notre littérature-régence n’était venue faire diversion aux ravages d’''Ivanhoë'' et de ''Notre-Dame de Paris''. A son apparition, nos afrancesados ont bien vite oublié moines et croisades pour le genre Louis XV, dont ils se sont mis à parodier, avec toute la conscience possible, les petites prétentions criminelles : mots légers, hâbleries scélérates, petits soupers faits avec tout le mystère de rigueur chez un cabaretier catalan ou savoyard, qui, sous prétexte de cuisine française, inflige à ces martyrs de l’imitation une nourriture impossible ; tripots de bel air, où des marquises, des comtesses authentiques remplacent, de la meilleure foi du monde, nos comtesses de louage et nos marquises d’occasion. Laissons ces types au futur Molière de la Péninsule. Il me suffit d’avoir fait remarquer que le groupe novateur ou soi-disant tel s’est trouvé deux fois conduit, <references/>
Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 2, 1838.djvu/323
Bahauder ; et alors ne va pas recourir à l’intercession de ceux qui habitent des palais et qui portent des joyaux à leurs turbans, mais cherche la cellule de ton frère dans la grande cité, qui est Seringapatam, et le pauvre fakir, avec son manteau percé, appuiera mieux ta demande près du nabab (Hyder ne prenait pas le titre de sultan) que ceux qui sont assis sur des sièges d’honneur dans le divan. » Ce fut avec de telles expressions d’intérêt qu’il exhorta Hartley à venir dans le Mysore, pour voir la face du grand prince, dont le regard inspirait la sagesse, dont un signe de tête conférait l’opulence, de sorte que la folie et la pauvreté ne pouvaient paraître devant lui. Il lui offrit en même temps, pour reconnaître les bontés que lui avait témoignées Hartley, de lui montrer tout ce qui était digne de l’attention d’un sage dans la terre du Mysore. Hartley n’hésita point à promettre qu’il entreprendrait le voyage proposé, si la continuation de la bonne intelligence entre leurs gouvernements le rendait exécutable, et réellement il regardait la possibilité d’un tel événement avec beaucoup d’intérêt. Les amis se quittèrent en se souhaitant mille prospérités, après avoir fait échange, suivant la coutume orientale, de présents qui pouvaient convenir à des sages auxquels la science était plus chère que la richesse. Barak el Hadgi fit cadeau à Hartley d’une petite quantité de véritable baume de la Mecque, dont on ne pouvait guère se procurer que des imitations ou falsifications, et lui donna en même temps un passe-port écrit en caractères particuliers, en l’assurant qu’il serait respecté par tout officier du nabab, si son ami se trouvait disposé à faire un voyage dans le Mysore. « La tête de celui qui ne respecterait point ce sauf-conduit, ajouta-t-il, ne serait pas plus en sûreté que celle du brin d’orge que le moissonneur tient dans sa main. » Hartley répondit à ces civilités en lui faisant cadeau de quelques remèdes peu employés dans l’Orient, mais tels qu’il croyait pouvoir les confier sans péril, avec des instructions convenables, à un homme aussi intelligent que son ami le musulman. Ce fut plusieurs mois après que Barak était retourné dans l’intérieur de l’Inde que Hartley fut frappé d’étonnement par une rencontre inattendue. Les vaisseaux d’Europe venaient d’arriver, et avaient amené leur cargaison habituelle de jeunes gens avides de devenir commandants, et de jeunes femmes qui n’avaient nullement l’intention <references/>
Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 3.djvu/259
M. Saint-Marc Girardin dans la spirituelle analyse qu’il en a donnée<ref>''Journal des débats'' du 9 juin 1852.</ref>, que de filles qu’on veut faire religieuses, de femmes déguisées en cavaliers, de ruses pour enlever la fille sous les yeux mêmes du père, toutes scènes de comédie. Pourquoi les personnages qui figurent dans ces scènes de comédie s’appellent-ils les Horaces et les Curiaces ? Je n’en sais rien en vérité. Ils pourraient aussi bien s’appeler don Gusman, don Pèdre, don Gomez. L’histoire n’y perdrait rien ; car l’histoire n’est pour rien dans tout cela. » Néanmoins, bien qu’on ne trouve dans cet ouvrage aucune intention de peindre le caractère romain, Lope ramasse dans Tite Live divers détails matériels qui servent plutôt à la bigarrure qu’à la vérité du tableau. Tels sont l’''interregnum'', ce régime bizarre qui en attendant une élection définitive donnait la royauté à une suite de sénateurs, souverains chacun pendant cinq jours ; les pillages dans les campagnes albaines, conséquence de cette anarchie ; deux ou trois ambassades d’Albe et de Rome, conduites tout autrement que dans Tite Live ; la harangue de Metius entre les deux armées pour proposer le combat des six ; l’appel au peuple conseillé par Tullus après la condamnation d’Horace ; enfin sa défense par son père, faible imitation du magnifique thème oratoire fourni par l’historien. Ce n’était pas la peine d’exposer sur la scène le triple duel pour en retrancher, faute d’espace sans doute, la poursuite inégale des champions blessés, la fuite simulée de l’Horace survivant, qui accomplit sur place sa triple victoire avec une jactance de matamore. Le dénoûment de cette ''tragi-comédie'' exigeait un mariage à l’espagnole, qui s’entremêle à la scène du forum sans en abaisser le ton bien sensiblement. Horace a chez lui une fille de sénateur, qu’il prétend toutefois avoir respectée. Le père exige qu’il l’épouse avant de subir son supplice. On va la chercher, et pendant ce temps Horace est absous par une acclamation populaire. À coup sur, ici encore, nous ne trouvons rien qui puisse nous faire supposer chez Corneille une imitation, un souvenir direct ; la pièce de Lope de Véga ne présente avec la tragédie de notre poëte d’autres ressemblances que celles qui naissent <references/>
Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 3.djvu/301
Deux voies s’offraient au Crédit mobilier pour faire face à l’éventualité de l’insuffisance de ses ressources : ou l’augmentation immédiate du capital, ou l’emprunt. Il a préféré l’emprunt à l’augmentation immédiate du capital. Il est autorisé par ses statuts à émettre des obligations pour une somme qui pourrait atteindre à dix fois le chiffre de son capital, c’est-à-dire à 600 millions. La vulgarisation des titres qui, sous le nom d’obligations, représentent les emprunts des grandes compagnies anonymes, est récente en France. Elle provient de la combinaison financière qui, depuis 1851, a été adoptée chez nous, à l’exemple de l’Angleterre, pour l’établissement des chemins de fer. Le succès avec lequel il s’est placé depuis lors plus d’un milliard de francs en obligations a sans doute décidé la préférence du Crédit mobilier pour ce mode de crédit. La combinaison des obligations est, pour les affaires de chemins de fer, très ingénieuse et tout à fait conforme aux principes économiques. Avant d’examiner l’imitation que se propose d’en faire le Crédit mobilier, il ne sera peut-être pas inutile de rappeler sur quels principes elle repose et dans quelles limites elle est contenue en matière de chemins de fer. Un chemin de fer est d’un côté une affaire industrielle qui donne des revenus variables, progressifs, aléatoires, et d’un autre côté sa construction et son installation exigent des sommes considérables. C’est pour réunir ces sommes considérables que l’on est obligé de recourir à l’association des capitaux ; mais chez les détenteurs de capitaux qu’il s’agit d’entraîner à faire leurs placemens dans les affaires de chemins de fer, il y a deux tendances diverses et pour ainsi dire deux sortes de tempérament. Il y a des capitalistes prudens qui mettent la sécurité du placement, la certitude et la fixité du revenu au-dessus d’une perspective de bénéfices compensée par des risques ; d’autres, au contraire, sont alléchés par les gros profits, et acceptent volontiers les chances aléatoires au prix desquelles on peut les obtenir. Pour gagner le concours de ces deux classes de capitalistes à la construction des chemins de fer, on a cherché, dans la combinaison financière de ces entreprises, à donner satisfaction à leurs diverses humeurs. Une fois la somme nécessaire à la construction d’une ligne évaluée, on en fait deux parts. La première forme le capital de la compagnie : elle est représentée par les actions, lesquelles courent toutes les chances bonnes ou mauvaises de l’entreprise, et jouissent d’un revenu variable comme ces chances ; la seconde est demandée au public sous forme d’emprunt : elle est représentée par des obligations auxquelles est attaché un revenu fixe et qui ont pour gage, pour hypothèque privilégiée, le chemin de fer lui-même. De <references/>
Audoux - L Atelier de Marie Claire.djvu/156
Maintenant que nous avions approché nos chaises très près du poêle, {{Mlle}} Herminie parlait encore de son amour. Ses souvenirs s’échappaient un à un et me faisaient penser à de jolis oiseaux s’envolant par la chambre. Elle-même prenait par instant une forme merveilleuse dans ma pensée, tant elle mettait de nuances dans le son de sa voix et tant elle m’apparaissait loin du présent. Elle ne s’apercevait pas que le froid entrait en sifflant sous la porte et qu’il cherchait à nous mordre aux jambes. Elle n’entendait pas grandir la colère du vent qui charriait une neige dure et la poussait par rafales dans les vitres. Et elle ne vit pas davantage l’obscurité se lever de tous les coins pour venir lentement s’étendre sur nous. Elle ne regardait que le petit poêle rond qui rougissait par en haut. Et lorsque le couvercle fut devenu semblable à une boule de feu, et qu’on ne vit plus que lui et la lueur qu’il mettait au plafond, {{Mlle}} Herminie cessa de parler et s’endormit. Je me levai sans bruit pour aller jusqu’à la fenêtre. Sur le boulevard bien éclairé, des groupes de gens se hâtaient en riant et parlant haut. Leurs ombres se mêlaient en se traînant à leurs pieds et leurs parapluies recouverts de neige semblaient d’énormes fleurs qu’un grand vent aurait balancées. Au-dessus des toits la nuit n’était pas encore complète, mais le ciel était si bas que j’imaginais pouvoir le toucher rien qu’en étendant un peu la main. Et là-bas, très loin, {{tiret|par|-dessus}} <references/>
Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/157
à la statue Humanité ? Il est vrai que le Progrès, d’après Spencer, est inévitable. Mais ou bien l’individu n’a rien à faire et toute considération éthique devient futilité ; ou bien, la direction du Progrès étant déterminée, l’individu doit, ne fût-ce que pour son propre bonheur, se jeter dans ce courant irrésistible et marcher volontairement dans cette fatalité. La morale spencérienne semble condamnée à disparaître ou, perdant toute indépendance, à se fondre dans une sociologie et dans une politique. Mais voici qu’il me plaît, rejetant, dès qu’elles me sont devenues inutiles, les sévérités de la méthode, d’étudier en elle-même, et non plus seulement en fonction de ma conduite, la question du Progrès. Lorsque j’écrivais les premiers manuscrits de ce livre, je niais qu’il y eût rien à attendre d’aucune époque humaine. Je viens, dans la réfutation du rêve spencérien, d’adoucir bien des expressions, de détourner vers le seul progrès passif ce qui était dit d’abord contre tout progrès possible. N’est-ce pas pour des raisons pragmatiques, par crainte de laisser diminuer, troubler ou détourner ma puissance de travail, que je m’installais par delà l’espoir ? Tout en protégeant dans <references/>
Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1878-1879, 1886.djvu/124
<poem> Joint à la terre, et joint à l’eau le feu s’atteste. Or, les vrais éléments n’engendrent l’Univers Que par un fond occulte et des moyens couverts, Pour que nul, n’élevant une hostile puissance, Ne rompe dans les corps leur unité d’essence. Ces sages font venir du céleste foyer Le feu, qui doit en air se changer le premier ; Puis l’onde sort de l’air, et la terre de l’onde ; À l’inverse renaît de la terre le monde, L’eau, puis l’air, puis le feu, par un flux éternel Des astres à la terre et de la terre au ciel, Sans que leur changement réciproque s’arrête. Mais il ne se peut pas que l’élément s’y prête : Pour sauver, en effet, le monde du néant, Il faut bien qu’un principe invariable y dure, Car la mutation qui franchit la nature, C’est la mort de l’objet qui fut auparavant. Or, puisque les objets énoncés tout à l’heure Se viennent tous entre eux convertir, il faut bien Que le fond, qui n’y peut se transformer, demeure. Sans quoi tout l’Univers se résoudrait à rien. Que n’admettons-nous donc des corps de cette espèce, Qui, les mêmes toujours, ayant créé le feu, Dès que leur nombre augmente ou diminue un peu, Font l’air, en variant leur ordre et leur vitesse, Et d’objets en objets transforment tout sans cesse ? Mais tout, me diras-tu (le fait aux yeux est clair), Puise au sol, croît et monte aux régions de l’air. Si la pluie aux saisons favorables n’abonde Pour distiller la nue aux feuillages mouvants, </poem> <references/>
Revue des Deux Mondes - 1851 - tome 9.djvu/848
Mantoue, tout souverain qu’il était. Jamais les Françaises n’ont aimé à s’expatrier ; d’ailleurs, le refus de Mme de Lesdiguières s’expliquait facilement par la réputation du duc. Sans être déjà vieux, il était usé par la débauche ; avec les impôts dont il écrasait son petit pays, il entretenait un sérail asiatique. En outre, sa première femme venait de mourir d’une manière assez brusque, et ceux qui en parlaient le plus favorablement pour ce prince, assuraient qu’elle était morte de chagrin. Les Lorrains, à l’affût de toutes les occasions, résolurent de profiter de ce qu’ils appelaient sans doute la folie de Mme de Lesdiguières. Une des princesses de la maison de Guise, la duchesse d’Elbeuf (Françoise de Navailles), avait alors une fille à marier. Mme d’Elbeuf était une femme brusque, ignorante<ref> « J’ai trouvé Mme d’Eleuf toujours à l’agonie, et il est étonnant qu’elle vive encore ; je l’ai vue dans une grande résignation pour la vie ou pour la mort, mais la même brusquerie que vous lui connaissez en pleine santé ; elle répond à ceux qui lui parlent de Dieu comme elle grondait ses laquais ; en voici un trait. Elle se comparait à Job ; le curé, lui dit : « Il y a de la différence en ce que vous avez eu la consolation de recevoir Notre-Seigneur. » Elle lui répondit : « Et pourquoi diable le bonhomme job n’a-t-il pas reçu l’extrême-onction ? Je ne trouve pas cela bien. » Mettez à cela son ton. Elle en dit beaucoup de même force. » (''Lettres de Maintenon'', t. VII, Amsterdam, 1757.) </ref> et grossièrement ambitieuse. Bien différente de sa mère, la jeune Suzanne était douée d’un caractère très doux, et, si l’on en juge par ses portraits, d’un extérieur séduisant. Ce n’était pas une de ces figures à la Mignard, dont la coquetterie semble l’expression naturelle, mais, ce qui est rare au XVIIe siècle, une beauté mélancolique et touchante. Sa mère, tous ses parens lui proposèrent le duc de Mantoue, ou plutôt lui signifièrent l’ordre de l’épouser. À cette nouvelle, elle frémit. L’horrible réputation de Gonzague se présenta à son esprit : elle essaya de refuser à son tour. Alors toute la maison de Lorraine se mit après Mlle d’Elbeuf, et vainquit sa résistance. Suzanne obéit. Un seul espoir lui restait. Louis XIV avait été contraire à ce mariage ; peut-être ne lui déplaisait-il que par la vieille raison d’état, qui s’opposait aux alliances des Guise dans les cours étrangères ; peut-être aussi et c’est le plus probable, le roi, avait-il reçu l’aveu des répugnances de Mlle d’Elbeuf. De tout temps, Louis XIV avait aimé les confidences. Quoique désintéressé par la dévotion et par l’âge, il accueillait encore volontiers les belles affligées. Il ne les consolait plus ; il les écoutait toujours. Cependant l’opposition royale ne tarda pas à être levée par les intrigues et les instances des Lorrains. Pour assurer, pour hâter le mariage projeté ils n’épargnèrent rien : ils se servirent de tous les moyens, selon l’usage constant de leur maison. À la vérité, le temps pressait ; le péril était imminent. D’autres amours avaient fait oublier à M. de Mantoue sa belle fiancée. Léger, inconstant, peu curieux de sa parole, le duc avait quitté Paris, ne songeant plus qu’il devait s’y marier dans quelques jours. Mlle d’Elbeuf se croyait <references/>
Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 157.djvu/267
n’était en droit de le faire) que son souverain n’y consentirait jamais, parce qu’il craignait tout ce qui engagerait la liberté de sa politique personnelle : « Soyez certain, dit-il, que mon maître ne brûlera pas une amorce, ne fera pas verser une goutte de sang et ne dépensera pas un sou pour redresser les fautes commises en France. » Repoussé par cette fin de non recevoir un peu hautaine, mais ne voulant pourtant pas retourner les mains tout à fait vides, Metternich saisit, non sans en laisser voir son dépit, un lambeau de papier où il traça de sa propre main le programme qu’il aurait présenté à la signature des Alliés. Voici en quels termes il était conçu : Adopter pour la base générale de notre conduite de ne point intervenir dans les démêlés intérieurs de la France, mais de ne point souffrir, d’un autre côté, que le gouvernement français porte atteinte aux intérêts matériels de l’Europe tels qu’ils sont établis et garantis par les transactions générales, ni à la paix intérieure des divers États qui la composent. C’est ce qu’on a pris l’habitude, dit toujours Metternich, d’appeler le ''chiffon'' de papier de Carlsbad. Correcte, ajoute-t-il, mais faible manifestation de principes ! Effectivement, elle ne contenait rien que d’inoffensif, et, en la portant à Berlin, Nesselrode ne devait avoir aucune difficulté à l’y faire accepter<ref> ''Mémoires de Metternich'', t. V, p. 17 et 62. </ref>. Pour un habile homme que M. de Metternich prétendait être, il avait, cette fois, trop peu déguisé sa pensée et trop laissé voir qu’au milieu de l’ébranlement général, son soin principal était de renouer la série, interrompue à Vérone, de ces réunions princières et ministérielles où il avait si longtemps tenu le premier rôle et exercé une influence prédominante. S’il voulait refaire la coalition, c’était surtout pour réinstaller sa présidence. Il se voyait déjà ouvrant la première séance du nouveau congrès par un de ces exposés dogmatiques d’allure solennelle, dont il recherchait volontiers l’apparat ; car c’était là un trait singulier de ce vieux praticien politique, qui, pendant sa longue carrière, avait dû faire face à tant de phases diverses, sans opposer jamais aux changemens de la fortune ni fermeté de conviction bien arrêtée, ni surtout de rigueur puritaine, dont la souplesse, l’art de plier à propos et de se retourner à temps était au contraire un des mérites. Il aimait pourtant toujours à donner à l’expression de sa <references/>
Dumesnil - De l'abolition des droits féodaux et seigneuriaux au Canada, 1849.djvu/49
{{nr||49}}du peuple devra infailliblement lui obtenir la réalisation de sa juste demande ; car il sera alors du devoir impérieux du Ministère de faire réussir cette grande mesure de justice et de réparation ; il sera alors du devoir impérieux des mandataires du peuple de ne pas reculer, ''à moins de trahison'', devant cette œuvre d’équité, de progrès, de civilisation et de liberté ; la majorité du parti Anglais, détestant les vestiges de l’esclavage féodal, sa co-opération pour détruire à jamais des droits avilissants ne fera pas défaut, et le Canada, à l’avenir, n’aura plus à souffrir et à gémir des abus et de tous les maux que cause la tenure seigneuriale. Tous ceux qui mettront la main à cette œuvre de destruction acquerront des titres glorieux, et à toujours mémorables, à la reconnaissance de tout le pays ; titres qui seront inscrits dans les fastes historiques du Canada, et qui seront gravés, en caractères ineffaçables dans tous les cœurs reconnaissants. {{-}} {{c|'''FIN.'''|fs=150%}} {{AN|{{sc|'''de l’état déplorable des descendants des anciens naturels du Canada, et du moyen de les civiliser.'''}}}} Après avoir réclamé contre les droits oppressifs qui tyrannisent les Canadiens dans cette partie de l’Amérique Britannique, nous nous sentons entraînés irrésistiblement, avant de déposer la plume, à jeter un regard {{corr|philantrophique|philantropique}} sur le sort déplorable des descendants les anciens naturels du Canada, dont la condition malheureuse, si digne de pitié et d’intérêt, n’a pu, néanmoins, jusqu’à présent, attirer, d’une manière efficace, la sollicitude paternelle du gouvernement colonial. Notre but n’est point d’entrer dans de longues observations, de représenter le génie et les mœurs des sauvages qui occupent plusieurs territoires au Canada ; mais seulement de faire quelques remarques particulières au sujet des sauvages Montagnais du Saguenay, remarques qui pourront aussi s’appliquer <references/>
Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 12.djvu/596
rayon qui ne se développe pas, on arrivera à cette conclusion, qui fait sourire les ''vieilles barbes'' en Égypte, que le sol est fatigué et appauvri, et que les eaux du fleuve, répandues au loin, perdent de leur fertilité. Il en est pourtant ainsi. Dans les crues moyennes, les terres mal situées reçoivent peu d’eau nouvelle, partant peu de limon ; malgré cela, la culture générale continue sur le même pied que pendant les bonnes années, au détriment de la quantité et de la qualité des produits. En ce qui concerne l’ensemencement, le terrain n’est pas en Égypte, comme en Europe, recouvert d’engrais que la charrue enterre pour le mieux assimiler. Après une irrigation complète et prolongée du champ, suivie d’une façon de labour, de petits creux sont pratiqués à la main, où les graines de coton sont déposées avec une poignée de fiente de pigeon. La germination ainsi forcée envoie le long pivot de la plante dans un sol à peine détrempé et qui ne reçoit pas une particule d’engrais, car la charrue arabe, qui effleure à peine le sol, ne l’a pas même dérangé. L’arbuste, placé dans une terre que rien n’a préparée ni amendée, y vit donc par un pivot de 45 centimètres de longueur que rien ne nourrit et qui absorbe promptement tous les sucs. Le terrain égyptien est homogène dans toute la vallée du Nil, et l’alluvion nilotique y est déposée sur un sous-sol sablonneux en couches variant de 3 à 6 mètres d’épaisseur ; mais, quelle que soit la richesse de cette alluvion, elle diminue à la longue, et la terre perd peu à peu par l’appauvrissement des eaux et la multiplicité des cultures son pouvoir fertilisant. Aux États-Unis, dans les bassins de l’Ohio et du Mississipi, formés des plus riches alluvions connues, le sol a fini par s’épuiser, et les planteurs de coton, n’ayant plus le choix de terrains qu’ils abandonnaient pour d’autres encore vierges, en sont arrivés aux engrais appropriés à la production de l’article. L’Égypte doit en faire autant, car l’épuisement du sol fera des progrès, et plus on tardera, moins le remède sera efficace. Dans les meilleures conditions de cette culture, avec de l’engrais et de l’eau en abondance, le rendement des terres à coton s’élèvera à une moyenne de 5 quintaux (225 kilog.) au minimum, et la qualité y trouvera des garanties qui n’existent plus ; mais ce qui est facile ailleurs, où les nations savent accomplir ce qui est pour elles d’un intérêt vital, qui le fera en Égypte, où les populations n’ont pas de vie politique, où la conviction et l’élan manquent absolument ? Les 4 millions de fellahs que nourrit la terre des pharaons s’agitent et travaillent pour un homme, le khédive, qui représente et absorbe à lui seul l’Égypte tout entière. L’agriculteur, race antique qui a résisté aux révolutions des siècles, ne s’appartient pas plus que le sol n’est à lui ; né pour obéir, payer et produire sans cesse, il n’a plus de volonté. On ne <references/>
Austen - Orgueil et Prevention 1.djvu/186
{{nr|182|ORGUEIL|}}peut être n’en trouverai-je pas une autre occasion. » — Dieu me garde de vous priver du moindre plaisir », reprit-il d’un ton froid. Elle ne parla plus ; la contredanse finit, et ils se quittèrent en silence, tous deux mécontens, mais non pas au même degré, car déjà un sentiment vif entraînait Dracy vers elle et, le forçant à lui pardonner, ne fit qu’accroître son ressentiment contre Wickham. À peine furent-ils séparés, que miss Bingley s’approcha d’Élisabeth, et d’un air poliment dédaigneux lui dit : « Ah, ah ! {{Mlle}} Élisa, j’apprends que Georges Wickham a su vous plaire ; votre sœur vient de me faire cent questions à son sujet, et je vois aussi que malgré toute sa confiance en vous, il a oublié de vous dire qu’il était fils du vieux Wickham, intendant de feu M. Darcy. En amie, je dois vous avertir de ne point ajouter foi à toutes les belles paroles de ce jeune homme ; ses rapports sur M. Darcy sont faux. M. Darcy, loin de lui nuire, l’a <references/>
D’Argens - La philosophie du bon sens.djvu/285
qu’il y ait des Espaces immenses vuides de tous Corps, & capables de recevoir ceux que Dieu voudrait-créer de nouveau. Car, si la Substance corporelle remplit tous les Espaces possibles, ou plûtôt est elle-même l’Espace, il faut donc qu’elle soit infinie dans son Etendue, & Dieu se trouve dans l’Impossibilité de pouvoir créer & annihiler la moindre Partie de cette Substance : & cet Etre puissant, qui, de rien, a fait tout le Monde, a borné lui-même si fort sa puissance, qu’il ne peut plus former un Atome ni l’annéantir. {{sc|Si}}, pour prouver qu’il peut y avoir du Vuide, on demande à un Cartésien, si Dieu ne pourroit point ôter l’Air qui se trouve entre les quatre Murailles d’une Chambre, empêcher qu’aucun Corps ne succédât à sa Place, & faire que ces quatre Murailles ne se brisassent point,<ref follow=p260>''Alter utrum fatearis enim, sumasque necesse est... Ast sive est aliquid quod prohibeat, officiarque Quominu quo missum si veniat, finique locet se, Sive foras fertur, non est ea fini profecto. Hoc pacto sequar, atque Oras ubicumque locaris Extremas, quæram quid Telo denique fiat ? Fiet, uti, nunquam possit consistere Finis. '' {{droite|{{sc|Lucretius}} de Rerum Naturâ, ''Libr. {{rom-maj|I|1}}, Vers. 970 & seqq.''}}</ref><section end="L4C9"/> <references/>
Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 162.djvu/187
seulement l’acier américain, c’est le capital accumulé de l’autre côté de l’Océan qui vient alimenter les marchés de l’Ancien Monde. Une des conditions favorables de l’industrie métallurgique américaine est la grandeur des débouchés. Cette question est vitale en matière industrielle, puisque c’est la possibilité d’écouler le même objet un nombre de fois considérable qui permet d’en abaisser le prix de revient. Une usine organisée pour fabriquer des poutrelles d’un certain profil et qui travaillera du 1{{er}} janvier au 31 décembre sans modifier ses trains, réalisera de tout autres bénéfices que celle qui sera obligée de modifier sans cesse ses types au gré d’acheteurs qui exigeront chacun des modèles différens pour le même objet. Sa supériorité sera encore bien plus marquée par rapport à une entreprise obligée de se livrer à un grand nombre de fabrications diverses<ref> La récente circulaire du ministre des Travaux publics aux Compagnies de chemins de fer français au sujet des types de locomotives répond bien à cette préoccupation. </ref>. Une fois les données industrielles résolues, une fois l’emplacement de l’usine, à proximité du minerai et du charbon, déterminé, une fois la force motrice installée, les appareils construits, le problème devient commercial : la question est de savoir combien de centaines ou de milliers de tonnes de produits fabriqués pourront être écoulés chaque jour. Des époques de grande activité comme celle que nous venons de traverser peuvent faire illusion ; la demande est si forte que, pendant une certaine période, personne ne semble plus se préoccuper de la question capitale de la vente ; les métallurgistes ne reçoivent plus la houille en quantités suffisantes ; à leur tour, ils ne servent pas la totalité des commandes de leurs acheteurs ; 720 millions de tonnes de charbon, 40 millions de tonnes de fonte, ne suffisent pas à l’appétit dévorant de l’humanité : mais cette fièvre est passagère, et la consommation ne tarde pas à reprendre une allure normale, à laquelle les mines et les établissemens de fonte et de fabrication suffisent d’autant plus aisément que beaucoup d’entre eux, sous l’influence de la poussée, ont augmenté leurs moyens d’action. Si le fer est, sans comparaison possible, le métal qui représente le tonnage le plus considérable, il n’en est pas moins <references/>
Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 9.djvu/1041
été impuissans à maintenir les religions de l’antiquité. Tous les ressorts ont été tendus ; on a essayé des moyens matériels, des persécutions et des supplices ; on a essayé des moyens spirituels, de la transformation du paganisme par la philosophie ; on a essayé de l’abrutissement systématique des chrétiens ; on a invoqué le patriotisme, la superstition, la force brutale, la tradition, tout ce qui a une puissance parmi les hommes : rien n’y a fait. Pourquoi cela ? Pourquoi toutes les religions de l’antiquité portaient-elles au cœur un germe de mort inévitable ? Parce qu’aucune religion avant le christianisme n’avait réussi à déterminer les conditions essentielles de la vie morale et religieuse du genre humain. Pourquoi le christianisme a-t-il remplacé toutes les religions ? Parce qu’il a résolu ce problème. Le christianisme contient en effet toutes les vérités essentielles ; il a hérité de toutes les religions et de tous les systèmes philosophiques ; il a fondu ensemble tous ces élémens en apparence discordans, Moïse et Platon, la sagesse de Memphis et de Delphes à la sagesse d’Athènes et d’Alexandrie ; il a emprunté à la Grèce sa métaphysique, au stoïcisme sa morale, à la Judée ses traditions, à l’Orient son souffle mystique, à Rome son esprit de gouvernement, et c’est ainsi qu’il est parvenu à réunir ensemble tous les élémens de la vie morale et religieuse dans un corps de doctrine incomparable. Cet enfantement merveilleux n’a pas été l’œuvre d’un jour : cinq siècles ont été nécessaires pour constituer le christianisme dans des conditions d’organisation durable. Le dogme a été fixé sous le feu des hérésies par la sagesse des conciles. L’église s’est constituée ; les dogmes ont été précisés, définis, coordonnés, enfermés dans des formules indestructibles. En accomplissant cette œuvre magnifique, le christianisme a sauvé le genre humain ; il a pour jamais assuré ses destinées. Le genre humain s’ignorait lui-même avant le christianisme ; le christianisme lui a donné le sentiment de son unité. Voilà pourquoi le christianisme a triomphé des religions de l’antiquité, pourquoi le christianisme est une religion qui ne ressemble à aucune autre, pourquoi le christianisme dure tandis que tout tombe autour de lui, pourquoi le christianisme est destiné à embrasser tout le genre humain, pourquoi le christianisme est la dernière des religions ; voilà enfin pourquoi il a pu dire : Le ciel et la terre passeront, mais ma parole ne passera point. Ceux qui parlent d’une religion nouvelle ne s’aperçoivent pas que le christianisme n’est pas une religion comme les autres. Le christianisme a déterminé les conditions essentielles de la vie morale et religieuse du genre humain. Il a donc résolu le problème religieux. <references/>
Revue des Deux Mondes - 1863 - tome 43.djvu/1007
{{tiret2|gou|vernement}} ni la société russe, si l’on continue à vouloir traiter la Pologne comme les empereurs romains traitaient les premiers chrétiens. La société russe et son gouvernement ont montré surtout dans ces derniers temps pour la France une inclination qui nous honorait, dont nous leur étions reconnaissans. De quelle sympathie n’avons-nous pus accompagné l’empereur Alexandre dans ses sincères et vertueux efforts pour l’abolition du servage ! avec quelle joie ne l’avons-nous pas vu renoncer à l’affreux et funeste système de l’empereur Nicolas ! On a toujours, même en la combattant, rendu justice à l’esprit dont le prince Gortchakof animait la diplomatie russe. Les Russes n’ont jamais été accueillis en France avec plus de cordialité et de bonne grâce. L’empereur Alexandre, la société russe veulent-ils donc creuser de nouveau en Pologne un abîme entre eux et la France ? Comment la diplomatie russe pourrait-elle prendre devant l’Europe la cause des chrétiens d’Orient, si la situation actuelle de la Pologne devait durer ? Les Turcs ont-ils jamais fait de notre temps rien de pareil à ce que le gouvernement russe vient de tenter en Pologne ? Mais quoiqu’il y ait en Russie une sorte de vieux parti turc, le parti des anciens amis de l’empereur Nicolas, quoique les hommes de ce parti relèvent la tête, et à Moscou, à Saint-Pétersbourg, osent comparer l’insurrection polonaise à la révolte des ci payes, nous ne croyons pas que les horribles sentimens qui portent ces gens-là à comparer le patriotisme d’une nation chrétienne au fanatisme des instrumens de Nana-Sahib puissent prévaloir dans la généreuse jeunesse militaire, dans la société cultivée de Russie et dans le cœur de l’empereur Alexandre IL La Pologne est un grave problème pour la politique russe ; elle n’en viendra pas à bout avec les cruelles boutades du marquis Wielopolski ; elle ne peut le résoudre qu’en écoutant les inspirations les plus élevées de libéralisme et d’humanité. N’est-il pas possible d’aider du dehors le gouvernement russe à sortir de cette difficulté d’une façon conforme aux sentimens de la civilisation européenne ? Nous aimerions à nous le persuader. Après avoir fait sentir à la Russie la puissance de la France, l’empereur Napoléon III a tendu une main amie à l’empereur Alexandre. L’état de la Pologne fournit à l’empereur Napoléon III l’occasion de rendre un service éminent à son allié, et de lui faire entendre des conseils vraiment amicaux. L’empereur Alexandre et la société russe pourraient profiter beaucoup à de tels conseils cordialement demandés. En tout cas, il leur importe plus de conserver leur place dans l’Europe civilisée que d’exercer sur la malheureuse Pologne les cruautés d’une nouvelle conquête ; ils feront donc mieux de ménager les sentimens unanimes de la France que de chercher une fragile sécurité dans des conventions militaires avec la Prusse, qui choqueraient le principe des nationalités, violeraient le principe de non-intervention, offenseraient notre droit public, et inquiéteraient la France dans ses intérêts et dans son honneur. {{d|e. forcade.|sc}} <references/>
Eyma, Les peaux noires, Lévy, 1857.djvu/255
— Oui... J’étais allé jusqu’à la Croix du Pêcheur dire ma prière en pèlerinage, balbutia Joséfa ; mais y a-t-il longtemps que tu es ici ? — À peine cinq minutes. Joséfa respira. Elle craignait que Tobine ne fût arrivée avant le départ d’André, et qu’elle ne l’eût vu peut-être sortir. — Pauvre enfant, reprit la nourrice, mais comment se fait-il que tu viennes me demander l’hospitalité ? T’es-tu donc sauvée de la maison du marquis ? T’a-t-on battue ? Que t’est-il arrivé, enfin ? — Rien de tout cela nourrice ; seulement j’ai à causer avec toi. Ne veux-tu pas que nous entrions ? — Certainement si, répondit Joséfa, en affectant de cette rencontre une joie qu’elle ne ressentait pas. Elle ouvrit la porte ; les deux femmes entrèrent. Joséfa s’arrêta dans la première chambre où il y avait de la lumière, et regardant aussitôt Tobine : — Bon Dieu du ciel ! qu’as-tu donc ? s’écria-t-elle. Tu es froide comme la pierre d’un tombeau. Tes yeux sont noyés de larmes ; es-tu malade ? — Oui, répondit Tobine, et bien malade. — Où souffres-tu ? demanda Joséfa, devenue tendre et tout à fait sérieusement prévenante. — Là ! fit la jeune mulâtresse en portant la main à soit cœur. J’aime, ma bonne Joséfa, j’aime ! Et en disant ces mots, elle se laissa tomber sur une chaise, tout émue et palpitante. — Tu aimes donc sans espoir d’être aimée, que tu souffres ainsi ?... — Sans espoir ! répondit Tobine en cachant sa tête dans le sein de sa nourrice. — Pauvre enfant ! murmura Joséfa. Voyons, chère petite, continua-t-elle, tu es belle comme pas une fille <references/>
Austen - Orgueil et Prevention 2.djvu/207
{{nr||ET PRÉVENTION|203}}soyez servie d’expressions aussi fortes ; elles paraissent maintenant si mal fondées. » — Certainement ; mais ce langage si outré est une conséquence naturelle des injustes préventions que je m’étais fait un plaisir à encourager ; il y a un point sur lequel vos conseils me sont nécessaires : il faut me dire si je dois, ou ne dois pas faire connaître le vrai caractère de M. Wickham ? » {{Mlle}} Bennet réfléchit quelques instans, puis elle répondit : « Il n’y a, ce me semble, nulle raison de rendre ses torts publics ; et quelle est votre opinion ? » — Qu’on ne le doit pas faire. M. Darcy ne m’a pas autorisée à parler de ce qu’il m’a confié ; au contraire, il désire que l’événement qui regarde sa sœur soit tenu sous le plus grand secret ; et si je voulais désabuser le monde sur le reste de sa conduite, qui est-ce qui me croirait ? La prévention contre M. Darcy est si générale et si forte, qu’essayer même de le représenter comme un homme <references/>
La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 6.djvu/215
midi et le visage vers l’occident. On le couvre de planches, et l’on jette de la terre par-dessus. Ensuite toutes les personnes de l’assemblée vont se laver les mains dans un lieu préparé pour cet usage. Les prêtres et les assistans reviennent former un cercle autour du tombeau, la tête couverte, les mains jointes, le visage tourné vers le ciel, et font une courte prière : après quoi chacun reprend son rang pour suivre les parens jusqu’à la maison du deuil. Là, sans perdre la gravité qui convient à cette triste scène, l’assemblée se sépare, et chacun se retire d’un air sérieux. Ces usages, qui sont communs à tous les mahométans de l’empire, mettent beaucoup de ressemblance entre eux dans toutes les provinces, malgré la variété de leur origine et la différence du climat. Mais l’on ne trouve pas la même conformité dans les sectes idolâtres, qui composent encore la plus grande partie des sujets du grand-mogol. Les voyageurs en distinguent un grand nombre. Ici, pour ne s’arrêter qu’aux usages civils, les principales observations doivent tomber sur les banians, qui, faisant sans comparaison le plus grand nombre, peuvent être regardés comme le second ordre d’une nation dont les mahométans sont le premier. Suivant le témoignage de tous les voyageurs, il n’y a point d’Indiens plus doux, plus modestes, plus tendres, plus pitoyables, plus civils, et de meilleure foi pour les étrangers que <references/>
Curie - Traité de radioactivité, 1910, tome 2.djvu/457
{{tiret2|admet|tant}} que le radium n’est pas produit par l’actinium, mais par une substance qui se trouve mélangée à celui-ci. M. Rutherford a d’ailleurs vérifié directement qu’on n’obtient pas de production de radium sur une lame exposée pendant longtemps à l’émanation de l’actinium. La production de radium s’est montrée la même, avec le produit étudié, en absence ou en présence de l’actinium X qui pouvait être séparé par l’ammoniaque. La substance mère du radium ne faisait donc pas partie des dérivés de l’actinium et l’on pouvait penser qu’elle fait partie du même groupe que l’actinium et le thorium. Cette supposition a été confirmée par les travaux de M. Boltwood<ref>{{sc|Boltwood}}, ''Ann. Journ. of Sc'', 1907.</ref> qui a montré qu’on peut séparer de l’actinium la substance mère du radium en précipitant la solution des deux substances par l’hyposulfite de sodium. Dans ces conditions la substance cherchée précipite avec le thorium, tandis que l’actinium, d’après M. Boltwood, ne précipiterait pas. Le produit précipité ne donnait plus l’émanation de l’actinium, et sa teneur en radium augmentait régulièrement pendant 600 jours. La substance nouvelle a été caractérisée par une émission de rayons <math>\alpha</math> dont le parcours mesuré par la méthode des scintillations est environ 2{{e|cm}},8 ; ce parcours est donc plus petit que ceux qui ont été observés pour tous les autres groupes de rayons <math>\alpha</math> connus. Cette substance a reçu le nom d’''ionium''. L’ionium se rapproche surtout du thorium par ses propriétés chimiques. Sa présence dans les sels de thorium du commerce est rendue probable par les expériences de M. Hahn<ref>{{sc|Hahn}}, ''Berichte'', 1907.</ref>, d’après lesquelles la teneur de ces sels en radium augmente avec le temps. Les minerais de thorium contenant toujours de l’uranium, l’ionium qui accompagne ce dernier se trouve entraîné avec le thorium dans le traitement. D’après M. Hahn l’ionium précipite complètement par l’acide oxalique en présence du thorium, mais n’est pas entraîné dans la précipitation du baryum par l’acide sulfurique. Les propriétés chimiques de l’ionium sont extrêmement voisines de celles du thorium ; plusieurs modes de fractionnement ont été <references/>
Gautier - Spirite (Charpentier 1886).djvu/58
{{tiret2|mer|veilleux}} en coupe réglée, et il avait refusé de voir le célèbre Home dont un instant s’occupa tout Paris. La veille encore, il vivait en garçon insouciant, de belle humeur, assez heureux en somme d’être au monde, où il ne faisait pas trop mauvaise figure, renfermé dans le cercle des choses visibles et ne s’inquiétant pas si la planète entraînait avec elle dans sa ronde autour du soleil une atmosphère animée ou non d’un peuple d’êtres invisibles et impalpables. Cependant il ne pouvait s’empêcher d’en convenir, les conditions de sa vie étaient changées ; un élément nouveau, sans qu’il l’eût appelé, cherchait à s’introduire dans son existence jusque-là si paisible et dont il avait banni avec soin tous les sujets probables de trouble. C’était peu de chose encore : un soupir faible comme un gémissement de harpe éolienne, une substitution de pensée dans une lettre machinalement écrite, trois mots soufflés à l’oreille, la rencontre d’un baron swedenborgiste à l’air solennel et fatidique ; mais il était évident que l’esprit tournait autour de lui ''quærens quem devoret'', comme dit la Bible dans son éternelle sagesse. Tout en rêvassant de la sorte, Guy de Malivert était arrivé au rond-point des Champs-Élysées sans avoir eu l’intention d’aller de ce côté-là plutôt que d’un autre. Son corps l’avait porté en ce sens, et il l’avait laissé faire. Il y avait peu de <references/>
Thresor de la langue francoyse - 1606 - 1 - Nicot.djvu/349
A ieun, ou Iun, Ieiunus. Ne à ieun, ne apres manger, Neque ieiuno, neque cœnato vomendum est. B ex Celso. Qui est à ieun, Ieiuni oris saliua. Ieuner, ou Iuner, à Ieiunare, per aphæresim primæ syllabæ. Estre malade de ieuner, Laborare ieiunio. Iuneur. Vn Ieune garson, Iuuenis. Rectius Iuene, Expuncto secundo u, superest Iuenis. Picard Iouene. Vn ieune fils depuis douze ans iusques à vingt & vn, Adolescens. Vn petit ieune fils, Adolescentulus. Vne petite ieune fille, Adolescentula. Le plus ieune & le puisné, Minor filius. Qui estoit vn peu plus ieune, Paulò ætate posterior. Le plus ieune de tous, Minimus natu. Ieune de meurs, Adolescens moribus. Estre trop ieune pour faire quelque chose, Per ætatem non posse. De son ieune aage, Ineunte ætate. Estant encore ieune, Teneris adhuc annis. Qui appartient à ieunes gens, Iuuenilis. A la façon de ieunes gens, Iuueniliter. Vne assemblée de ieunes gens, Iuuentus. Ieunes Aduocats, Sacramento rogati tyrones. B. Ieunesse, ou Iunesse, Aetas iuuenilis, Iuuenta, Iuuentus, Prætextati anni, Prætextata ætas. Cependant que le temps de ma ieunesse s'y est addonné, Dum ætatis tempus tulit. Ieunesse qui n'arreste en place, Vaga iuuentus. Toute la ieunesse ensemble, Cuncta pubes. Ieunesse est plus subiecte à maladie, Acutis morbis adolescentia magis patet. Addonné aux plaisirs de ieunesse, Affinis rerum quas fert adolescentia. A quoy la ieunesse s'addonne, Quæ fert adolescentia. Entre la ieunesse, Studiis militaribus apud iuuentutem obsoletis. De ieunesse, A tenero, & A teneris, Sub. annis, Ab iuuenta. Par ieunesse commettre quelque faute, Tyrocinio ætatis labi. Sur la fin de sa ieunesse il fut, &c. Extrema pueritia miles fuit Imperatoris. Passer ieunesse en prenant ses plaisirs, Indulgere ætatulæ. B. ex Suet. Apprendre de ieunesse, A paruis discere. Ils enseignent à la ieunesse beaucoup de choses de la nature des choses, Multa de rerum natura iuuenturi tradunt. Pardonner à la ieunesse de quelqu'vn, Adolescentiæ alicuius remittere. Prenez garde à la ieunesse, Intuemini paulisper animis iuuentutem. Ieunement, Iuueniliter. {{T3|'''I F'''}} If If, Arbor, Smilax, Taxus. {{T3|'''I G'''}} Ignominie Ignominie, Ignominia. Ignominieux, Ignominiosus. Ignorer Ignorer, Ignorare. Ie n'ignore point, ie sçay bien, Non ignoro, Haud mihi sum falsus, Non me latet, Fugit, Præterit, Non clàm me est, Non sum inscius, Non sum nescius. Ignorance, Error, Errans opinio, Ignorantia, Ignoratio, Inscientia, Inscitia, Imperitia. Par l'ignorance des gens qui estoient en ce temps la, Inscitia temporum. Ignorant Ignorans, Rudis, Ignarus, Imperitus. Qui n'est ignorant de rien, Nulla in re peregrinus, atque hospes. Vn homme ignorant le fait de plaidoirie, Qui ne sçait que c'est de plaider, Homo rerum forensium insolens. B. Ignoramment, Inscienter. {{T3|'''I L'''}} Il Il, m. Pronom demonstratif de la tierce personne, Ille. Dont il vient par apocope, Is, Ipse. Il est venu, Ille, is, ipse venit. Quelquefois est vne partie expletiue, & tantost se met deuant, comme, Il est besoing qu'il face cela, Opus est hoc ab illo fieri. Ce qui aduient à ce mot Italien Egli. Et tantost est postposé, sçauoir est en maniere de parler interrogatiue, comme, Faut il que ie meure ? Mè ne mori necesse est ? Il, ab Ille, Is, Ipse, Ipsum, Illud. Il est ainsi, Sic est. Il faut, Oportet. Il ne s'en faut rien que ie ne soye miserable, Nihil abest quin sim miserrimus. Ou est il ? Vbi is est ? C'est bien d'aduenture s'il n'est en la maison, Mirum ni domi sit. Ie m'enquerray s'il y a point aucun qui cognoisse le ieune compagnon, Percontabor ecquis adolescentem nouerit. Ie demande s'il y a point aucunes lettres, Quæro ecquid literarum. Ie luy demande s'il veut rien mander, Rogo num quid velit. On ne sçait s'il retournera auiourd'huy, Num quid redeat incertum hodie. Ilico Ilico. Obtenir vn relief d'Ilico, Diplomate veniam procrastinatæ prouocationis impetrare. B. Illec Illec, acut. Aduerbe local de tierce personne, Illîc. Dont il est fait Mais se prend & pour le repos, comme, Vous verrez illec, Illîc videbis. Et pour le mouuement de place en autre, comme, D'illec vous irez à Lyon, Illinc Lugdunum proficiscêris, &, ;Vous irez illec, Illuc perges. Les anciens en vsoient à tous propos. Mais les autheurs modernes ne l'ont en si frequent vsage : Ains en lieu de Illec, vsent de cet autre aduerbe Là, qui est local aussi, & pour le repos & pour le mouuement, disants, Il est là, Illîc est. Partez de là, Illinc abscede. Allez là, Illuc perge. Par illec, Illac. Illegitime Illegitime, Non legitimus. Illiaque passion Vne douleur qu'on appelle vulgairement, Illiaque passion, & Miserere mei, quand vn patient rend ses excremens par la bouche, Ileos, Chordapson, Morbus tenuioris intestini. Illicite Illicite, Illicitus. Assemblées illicites, Coitiones. B. Illuminer Illuminer, Illustrare, Illuminare. Illusion Illusion, Visum, Phantasma. Illustre Illustre, Illustris. Illustrer, Illustrare. Illustration, Illustratio. {{T3|'''I M'''}} Image Image, ou resemblance & pourtraict fait sur le vif, Effigies, Expressa imago, Icon. Image & semblance ou representation de quelque chose, Idolum idoli. Image & semblance d'aucun, Imago imaginis. Vne statue & image de pierre ou de bois, Statua. Image donnée pour ramenteuoir quelque chose à ceux qui viendront apres nous, Prodita imago ad memoriam posteritatis. Image enleuée, Simulachrum, Monimentum, Imago eminens. ¶ Images, Signa. Petites images enleuées faites de bois, Sigilla putealia. Faire quelques images enleuées sur vaisselle d'or ou d'argent, Sigillare. Petites images d'os, que les anciens offroyent à Saturne pour leurs pechez, & les pechez de leurs gens, Oscilla. Petites images de paste, laides & difformes Maniæ. Images si semblables à la personne qu'on ne sçauroit discerner l'image d'auec la personne, Effigies indiscretæ. Miroir où on void beaucoup d'images & semblances, Speculum imaginosum. Tailleur d'images enleuées & semblables, Fictor, Statuarius. Imagette enleuée, Sigillum. Imagier, Scalptor. Imaginer, Imaginari Imaginer veoir aucun, Aliquem mente conspicere. Imaginer en son esprit quels sont les Dieux, Informare Deos coniectura. Penser & imaginer en son esprit la forme & semblance de quelque chose, Depingere cogitatione, Animo fingere. Il imagine son ennemy, comme s'il estoit desia venu, Spe iam percipit hostem. A ce qu'on peut manger, Quod adhuc coniectura prouideri possit. Imagination, Imaginatio. Imagination rude, qui n'est pas du tout façonnée, Informatio. L'imagination & fantasie du peuple, Populi sensus. B. ex Cic. Imbecille Imbecille, & debile, Imbecillis, & hoc imbecille : vel Imbecillus imbecilla imbecillum, Infirmus, Debilis. Imbecillité & foiblesse ou debilité, Imbecillitas, Infirmitas. Imbecillement, Imbecilliter. Imbu Imbu, Imbutus. Imcompetence Imcompetence, Cependant qu'il est question d'incompetence de iuge, Dum in dubium reuocatur iusta ac legitima causæ disceptatio. Bud. Proposer ou alleguer incompetence de iuge, Decliner la iurisdiction, Imperium iudicis vt non sui abnuere, Iudicis imperium iurisdictionémque aspernari, vt nihil ad se pertinentia, Fundamenta iudicij subruere. B. Où il est question d'incompetence de iurisdiction, ou recusation de iuge, Vbi agitur translatio fori, aut iudicis reiectio. B. Debatre d'incompetence de iurisdiction, Translationem causæ disceptare. Bud. Iuge incompetent, Non legitimus iudex. Imiter Imiter, Imitari. Imitation, Imitatio. Imitateur, Assectator alicuius, Imitator. Imitatrice, Imitatrix. Imitable, Imitabilis. Immaculé Immaculé, Expers maculæ, Intemeratus. Immatriculer Immatriculer, id est, Escrire & enregistrer en la matricule. Immediatement Immediatement de sa main, & non par personne interposée, Protinus. Immedicable Immedicable, Qu'on ne peut guarir par quelque medicament que ce soit, Immedicabilis, Insanabilis. Immemoriale Immemoriale possession, Possessio secularis. Bud. <references/>
Austen - Orgueil et Prevention 2.djvu/87
{{nr||ET PRÉVENTION|83}}de son cabinet qui donnait sur la route. L’appartement où se tenaient ces dames était sur le derrière ; Élisabeth avait d’abord été surprise que Charlotte préférât cette pièce à la salle à manger, qui était plus grande et mieux située ; mais bientôt elle s’aperçut qu’une raison très-sage avait en cela dirigé le choix de son amie ; car M. Colins aurait été moins souvent dans son appartement si celui de sa femme eût été aussi agréable, et elle approuva fort l’arrangement de Charlotte ; du salon on ne pouvait rien distinguer sur la route, mais M. Colins prenait soin de les instruire du nombre de voitures qui la traversaient, n’oubliant point surtout de les avertir chaque fois que {{Mlle}} de Brough y passait, bien que cela arrivât presque tous les jours ; souvent elle s’arrêtait au presbytère pour discourir quelques instans avec Charlotte, mais bien rarement on la pouvait décider à y entrer. Peu de jours s’écoulaient sans que M. Colins allât à Rosings, et le plus {{tiret|sou|vent}} <references/>
Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 15.djvu/398
des hiéroglyphes est un fait acquis à la science, un fait qu’ont reconnu, parmi les illustres morts, de Sacy et Cuvier, qu’un des plus illustres vivans, M. Arago, a proclamé dans l’éloge du rival de Champollion. Tant pis pour qui ne se rangera pas avec ces hommes célèbres du côté de l’évidence et de la justice. Je devais commencer par cette profession de foi, car le principal objet du voyage qu’on va lire a été d’aller appliquer la méthode, et, s’il se pouvait, étendre la découverte de Champollion, d’aller étudier les principaux monumens de l’Égypte et de la Nubie à la lueur de ce flambeau éteint depuis quinze siècles qu’il a rallumé pour le monde. Avant lui, il était souvent impossible de connaître l’âge et la destination des monumens, les savans les plus respectables s’y trompaient. Si on n’accordait qu’une médiocre antiquité aux monumens élevés par Sésostris ou ses prédécesseurs, on reportait à l’époque la plus reculée le portique du temple de Dendéra, bâti sous Tibère ; c’est qu’on n’avait pas lu sur les premiers les noms des anciens Pharaons, sur le second les noms des empereurs. Les peintures et les bas-reliefs étaient mal interprétés, faute d’entendre l’inscription hiéroglyphique, souvent très claire, qui les explique : on prenait un triomphe pour un sacrifice, un dieu pour un prêtre, ''le Pyrée pour un homme'' ; mais, grace à la lecture des hiéroglyphes, si incomplète qu’elle soit encore, on sait quel est l’âge historique des monumens, à quelle divinité ils sont consacrés, de quel roi ils ont reçu les restes, car les monumens de l’Égypte sont à la fois des tableaux et des manuscrits ; ce sont des tableaux avec une légende qui énonce le sujet comme dans les peintures du moyen-âge, ce sont des manuscrits éclaircis par des figures comme les livres ''illustrés'' de nos jours. Avec ce double secours, jamais de doute possible sur la destination d’un monument. On peut dès aujourd’hui lire sans nulle chance d’erreur les noms des dieux et même les formules dédicatoires de leurs temples, les noms des rois, ceux des particuliers, les termes qui expriment les professions, les degrés de parenté ; on sait donc toujours à quelle divinité appartient le temple dans lequel on se trouve, quel roi l’a fait construire, souvent même en quelle année de son règne il a été élevé. Quand un édifice renferme des parties d’origine diverse, on sait à quelle époque elles se rapportent, quel souverain a construit ou réparé chacune d’elles. Tout cela est indiqué avec une clarté parfaite par des formules bien connues et faciles à comprendre ; si on pénètre dans les tombeaux des rois, des reines, des princes, des prêtres, des juges, des grands dignitaires du palais ou des chefs de l’armée, on sait toujours quels furent le nom et le rang du mort auquel on rend visite. Le défunt est représenté entouré de sa famille, qui lui offre ses hommages ; les noms, les professions, les rapports de parenté de tous les membres, souvent très nombreux, de cette famille, sont écrits à côté <references/>
Dumas - Les Quarante-Cinq, 1888, tome 3.djvu/54
Remy n’hésita point : il tira son couteau, coupa une branche de saule, l’introduisit entre la porte et la serrure, et pesa sur le pêne. Remy entra vivement. Il mettait à toutes ses actions depuis une heure l’activité d’un homme travaillé par la fièvre. La serrure, produit grossier de l’industrie d’un forgeron voisin, avait cédé presque sans résistance. Remy poussa précipitamment sa compagne dans la maison, poussa la porte derrière lui, tira un verrou massif, et, ainsi retranché, respira comme s’il venait de gagner la vie. Non content d’avoir abrité ainsi sa maîtresse, il l’installa dans l’unique chambre du premier étage, où, en tâtonnant, il rencontra un lit, une chaise et une table. Puis, un peu tranquillisé sur son compte, il redescendit au rez-de-chaussée, et, par un contrevent entr’ouvert, il se mit à guetter par une fenêtre grillée les mouvements du comte, qui, en les voyant entrer dans la maison, s’en était rapproché à l’instant même. Les réflexions de Henri étaient sombres et en harmonie avec celles de Remy. — Bien certainement, se disait-il, quelque danger inconnu à nous, mais connu des habitants, plane sur le pays : la guerre ravage la contrée ; les Français ont emporté Anvers ou vont l’emporter : saisis de terreur, les paysans ont été chercher un refuge dans les villes. Cette explication était spécieuse, et cependant elle ne satisfaisait pas le jeune homme. D’ailleurs elle le ramenait à un autre ordre de pensées. — Que vont faire de ce côté Remy et sa maîtresse ? se demandait-il. Quelle impérieuse nécessité les pousse vers ce danger terrible ? Oh ! je le saurai, car le moment est enfin venu de parler a cette femme et d’en finir à jamais avec tous mes doutes. Nulle part encore l’occasion ne s’est présentée aussi belle. <references/>
Henri IV - Lettres Missives - Tome4.djvu/114
{{nr|.96 |LETTRES MISSIVES|}} cipiés a l'advis qu'il me donne de la reduction de ma ville de Lyon en mon obéissance. Celuy qui m’a apporté les dictes lettres m’a rend u ` compte de toutes les particularitez qui se sont passées en cest effect ; [ par lesquelles`, encores que je voye que mes serviteurs ayent apporté beaucoup de debvoir et de diligence en cest alfaire, `neantmoins je recognois que fheureux succés d’iceluy provient de la seule grace de Dieu, auquel en ayant rendu graces publiques au mesme instant que la nouvelle m’en a esté apportée, je vous ay aussitost fait la presente, afin que vous donniés ordre que le semblable se face par toutes les villes de vostre gouvernement ; et que les liabitans d’icelles cognoissent avoir ceste nouvelle autant agreable comme elle est utile au bien de mon Royaume : quoy nfasseurant que vous ne ferés faulte, ` je prieray, Dieu qu’il vous ayt, Mons' de,. . . . .. en sa saincte garde. Escript à Melun, le x11_]" jour de febvrier 15gli. _ . HENRY. navet. _ l59l1. — 20 FÉVMEB. U L Orig. - Papiers provenant des anciennes archives de Lyon et conservés dans cette ville. Copie _ transmise par M. Dupasquier, architecte. A NOS TRES CHERS ET BIEN AMEZ LES MAIRE ET ESCHEVINS, MANANS ET HABITANS DE LA VILLE DE LYON. .i _ Tres chers et bien amez, La resolution que vous avés faicte de vous tirer du maulvais party où vous vous estes laissé aller et de reco- ' gnoistre l’obligation que vous avés à nostre service, nous a donné un singulier contentement, non seulement parce qu’elle apporte beau- coup d’avancement et de reputation à nos affaires, mais aussy parce qu’elle nous ouvre le chemin de faire paroistre à nostre ville de Lyon Yinclination que nous avons de tout temps eue à l’aimer, et que nous ' tenons meilleurcompte de ce qu’elle a merite soubs les feus Roys nos , predecesseurs'que'de ce’qu’el.le peut avoir demerité contre nous de- puis ces derniers troubles, dont nous rejetons toute la faulte sur les <references/>
Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 58.djvu/966
{{nr|960|REVUE DES DEUX MONDES.}}{{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|La Théologie et le Symbolisme dans les catacombes de Rome, à propos d’une publication récente}}, par M. [[Auteur:Benjamin Aubé|B. AUBÉ]] |page={{pli|362|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|Les Vétemens et les Habitations dans leurs rapports avec l’atmosphère}}, par M. [[Auteur:Rodolphe Radau|R. RADAU]] |page={{pli|396|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|Revue musicale. — Théâtre de l’Opéra-Comique, M. Léo Delibes et}} ''Lakmé'', {{sc|Félicien David et}} ''la Perle du Brésil'', {{sc|Bizet et}} ''Carmen'', {{sc|les Débuts de}} {{Mlle}} {{sc|Nevada}}, par M. [[Auteur:F. de Lagenevais|F. DE LAGENEVAIS]] |page={{pli|440|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|Revue dramatique. — Comédie-Française}}, ''Mademoiselle du Vigean'', {{sc|de {{Mlle}} Simone Arnaud}}, par M. [[Auteur:Louis Ganderax|Louis GANDERAX]] |page={{pli|453|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre=[[Chronique de la quinzaine - 14 juillet 1883|{{sc|Chronique de la quinzaine, histoire politique et littéraire}}<includeonly> - 14 juillet 1883</includeonly>]] |page={{pli|467|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|Le mouvement financier de la quinzaine}} |page={{pli|478|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|Cinquante Années d’histoire contemporaine. — Monsieur Thiers. — VII. — La Crise politique de la France après la guerre. — M. Thiers, l’Assemblée de Versailles et la République. — 19 février 1871, 24 mai 1873}}, par M. [[Auteur:Charles de Mazade|Charles DE MAZADE]], de l’Académie française |page={{pli|481|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|Mon frère Yves}}, première partie, par M. [[Auteur:Pierre Loti|Pierre LOTI]] |page={{pli|529|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|La Charité privée à Paris. — IV. — L’Orphelinat des apprentis, l’Abbé Roussel}}, par M. [[Auteur:Maxime Du Camp|Maxime DU CAMP]], de l’Académie française |page={{pli|578|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|Le Palais de Schifanoia à Ferrare}}, par M. [[Auteur:Gustave Gruyer|Gustave GRUYER]] |page={{pli|613|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|Le Crime de Bernardin}}, par M. [[Auteur:Albert Delpit|Albert DELPIT]] |page={{pli|642|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|Coligny. — I. — La Première Guerre de religion en France}}, par M. [[Auteur:Auguste Laugel|Auguste LAUGEL]] |page={{pli|656|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|L’Affaire de Tisza-Eszlar}}, par M. [[Auteur:G. Valbert|G. VALBERT]] |page={{pli|681|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|Revue littéraire. — Une Nouvelle Histoire de la littérature anglaise}}, par M. [[Auteur :Ferdinand Brunetière|F. BRUNETIÈRE]]|page={{pli|693|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre=[[Chronique de la quinzaine - 31 juillet 1883|{{sc|Chronique de la quinzaine, histoire politique et littéraire}}<includeonly> - 31 juillet 1883</includeonly>]] |page={{pli|706|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|Le mouvement financier de la quinzaine}} |page={{pli|717|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|Mon Frère Yves}}, deuxième partie, par M. [[Auteur:Pierre Loti|Pierre LOTI]] |page={{pli|721|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|L’Insurrection militaire en Egypte. — I. — Le Triomphe du parti militaire}}, par M. [[Auteur:Gabriel Charmes|Gabriel CHARMES]] |page={{pli|757|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|La Solidarité humaine et les Droits de l’individu}}, par M. [[Auteur:Alfred Fouillée|Alfred FOUILLÉE]] |page={{pli|803|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|Pauline de Montmorin, comtesse de Beaumont. — III. — La Comtesse de Beaumont et sa Famille pendant la terreur}}, par M. [[Auteur:Agénor Bardoux|A. BARDOUX]] |page={{pli|835|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|Poètes et Humoristes de l’Allemagne. — Joseph-Victor von Scheffel}}, par M.[[Auteur:Jean Bourdeau| J. BOURDEAU]] |page={{pli|863|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|Mœurs financières de la France. — Les Banquiers et les Banques}}, par M. [[Auteur:Alexis Bailleux de Marisy|A. BAILLEUX de MARISY]] |page={{pli|898|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|La Question musicale en Italie, d’après un livre récent}}, par M. [[Auteur:Henri Blaze de Bury|Henri BLAZE DE BURY]] |page={{pli|918|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|Revue dramatique. — Le Conservatoire de déclamation}}, par [[Auteur:Louis Ganderax|Louis GANDERAX]] |page={{pli|934|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre=[[Chronique de la quinzaine - 14 août 1883|{{sc|Chronique de la quinzaine, histoire politique et littéraire}}<includeonly> - 14 août 1883</includeonly>]] |page={{pli|945|6}}}} {{table|indentation=-2|largeurp=30|titre={{sc|Le mouvement financier de la quinzaine}} |page={{pli|955|6}}}}<br/>{{—}} {{Centré|Paris. — Impr. A. Quantin, 7, rue Saint-Benoît.|fs=80%}}
Chevalier - Les voyageuses au XIXe siècle, 1889.pdf/63
{{nr||MADAME HOMMAIRE DE HELL|53}}mon extrême satisfaction, qu’elle me recevrait aussitôt sa toilette terminée. Je comptai les minutes jusqu’au moment où un officier, suivi d’une vieille femme voilée, vint me prendre pour m’introduire dans le palais mystérieux. « Chose convenue entre nous, mon mari essaya de me suivre, et, voyant qu’on n’y mettait nul obstacle, franchit sans plus de cérémonie la petite porte donnant entrée dans le parc, traversa ce dernier, monta hardiment sur une terrasse attenant au palais, et finit par se trouver, non sans être surpris de cette bonne fortune, dans un petit salon faisant partie des appartements intérieurs de la princesse. Mais tout se borna là. L’officier qui nous avait introduits, après nous avoir servi de l’eau glacée, des confitures et des pipes, vint prendre mon mari par main, et le conduisit hors du salon avec une promptitude significative. À peine eurent-ils disparu, qu’une portière soulevée au fond de la pièce donna passage à une femme d’une beauté éclatante, vêtue d’un riche costume, laquelle s’avança vers moi avec un air de dignité remarquable, me prit les mains, m’embrassa sur les deux joues, et s’assit à mon côté en me faisant mille signes d’amitié, avant que j’eusse le temps de me reconnaître. Elle portait beaucoup de rouge ; ses sourcils, peints en noir, selon la mode orientale, et réunis au bas du front, donnaient à sa physionomie quelque chose de sévère, sans nuire pourtant à la grâce toute féminine de son visage. Une veste en velours garnie de fourrures serrait sa taille encore élégante. Tout, dans son ensemble, surpassait l’idée que je m’étais faite de sa beauté. Nous restâmes plus d’un quart d’heure à nous considérer mutuellement, échangeant tant bien que mal quelques mots russes, insuffisants pour traduire nos pensées. Mais, en pareil cas, le regard supplée à la parole, et le mien dut faire comprendre à la princesse l’admiration que me causait sa vue. Quant au sien, je dois avouer humblement qu’il paraissait plus surpris que charmé de mon costume de voyage : il me vint même un véritable scrupule de m’être présentée à elle sous un vêtement qui devait lui donner une singulière idée des modes européennes. « Malgré mon désir de voir ses filles, la crainte d’être indiscrète me décida à prendre congé d’elle ; mais un geste gracieux me retint, tandis qu’elle me disait avec beaucoup de vivacité : ''Pastoy ! Pastoy !'' (attendez !) tout en frappant dans ses mains à diverses reprises. À ce signal, une esclave s’empressa d’accourir et d’ouvrir, sur l’ordre de sa maîtresse, une porte à deux battants. <references/>
Massé - Mena’sen, 1922.djvu/14
Or, Monseigneur, qui n’est encore qu’administrateur, brigue l’office de gouverneur, ambition bien légitime, après tout. Voilà pourquoi, Monseigneur le Marquis fait des frais d’amabilité et est aux petits soins avec les diverses coteries. Il ménage les susceptibilités des uns sans décourager les prétentions des autres. Il pratique des intelligences dans tous les camps. Il se commet à tout le monde mais avec personne. Il a adopté la devise de Catherine de Médicis : il divise pour régner. C’est un équilibriste par nécessité ; ne se sentant pas solidement assis dans la faveur du Ministre, il bascule. Des contestations et des disputes des autres, il règle sa conduite. Monseigneur — on le monseigneurise par anticipation — a petit esprit et grande ambition, de quoi vraiment édifier sa fortune. C’est une salamandre florissant au milieu des discordes qui consument autrui. C’est un vice-roi qui a interverti les rôles ; il flatte ses courtisans. Entre la chèvre et le chou, il ne manifeste aucune prédilection à moins, bien entendu, qu’il ne s’agisse d’une toute petite chèvre et d’un gros gros chou, car Monseigneur le Marquis, quand il lui faut prendre parti — et il ne s’y résout qu’à la dernière extrémité — a toujours soin de se ranger avec les plus forts. Ainsi donc, si Monseigneur a convenu, ce soir, les notabilités de la colonie, vous pouvez être assuré qu’il n’obéit nullement à une tradition d’hospitalité mais bien à un motif sordide, dût-il, pour sauver les dehors, invoquer la raison d’État. On pourra bien, au cours de la soirée, faire de l’esprit, se flagorner les uns les autres, casser du sucre sur le dos des absents, trinquer à l’année nouvelle, raisiner et raisonner, mais on finira, à coup sûr, par parler politique et c’est précisément pour pressentir ces messieurs sur pareil <references/>
Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/231
venaient du théâtre du Vaudeville, où l’on avait joué, quelques jours auparavant, le ''Sergent Mathieu'', pièce qui avait exigé l’armement d’une compagnie d’acteurs. M.{{lié}}Charles Teste distribua ces armes et ces Uniformes dans sa maison, surnommée La ''petite Jacobinière''. Les élèves de l’École polytechnique, de leur côté avaient, pendant la nuit, forcé les salles d’escrime et enlevé les fleurets dont ils firent sauter les boutons et aiguisèrent les lames sur les dalles des corridors<ref>Sous la Restauration, les élèves de l’École polytechnique étaient sans armes, à l’exception des sergents, qui portaient l’épée.</ref>. Ayant appris vers dix heures du matin l’ordonnance qui licenciait l’École, ils en étaient sortis, portant pour la plupart l’uniforme de grande tenue. Des cris de ''Vive l’École polytechnique !'' les accueillirent dans la rue de la Montagne-Sainte-Geneviève. Ils répondirent par les cris de ''Vive la Liberté ! Vive la Charte !'' Et l’un d’eux élevant son chapeau en l’air, en arracha la cocarde blanche, la foula aux pieds, et fit retentir ce cri terrible : ''À bas les Bourbons !'' Cet exemple fut promptement suivi. Mais l’École se dispersa, et les efforts des élèves devinrent à peu près individuels ; il en résulta que beaucoup purent être retenus par leurs familles ou leurs correspondants ; de sorte qu’au lieu de deux cent cinquante qui, n’étant point légitimistes, auraient pris part au combat, soixante seulement combattirent. Vers dix ou onze heures, MM.{{lié}}Charras et Lothon se présentèrent chez Lafayette on leur dit qu’il était absent. Une autre députation, qui les avait précédés, avait reçu du général cette étrange réponse : <references/>
Topffer - Nouveaux voyages en zigzag Grande Chartreuse, 1854.djvu/441
moment où l’on se sépare d’eux est toujours agréable, soit à cause des scrupules qui peuvent toujours leur survenir, soit à cause de cette belle carabine qui est au service de tous leurs scrupules. Au surplus, s’ils se montrent polis avec M.{{lié}}Töpffer, ce n’est, après tout, de leur part, qu’un rendu, puisque, du plus loin qu’il les voit, M.{{lié}}Töpffer ne manque jamais de leur faire des avances de physionomie et des avant-propos de civilité. C’est que si M.{{lié}}R*** a sur les haltes des théories personnelles, M.{{lié}}Töpffer a sur les autorités constituées des principes, personnels aussi, auxquels il s’efforce d’assortir sa conduite et ses manières. Dans les pays où la loi et l’autorité sont deux choses distinctes, M.{{lié}}Töpffer se contente d’être en règle, puis, mettant son chapeau un peu de côté, en façon de dignité de l’homme, si une autorité vient à passer, il salue ou ne salue pas, selon qu’elle a l’air rogue ou bon enfant. Mais dans les pays où la loi et l’autorité sont si peu distinctes, que la loi n’y est au fait que l’autorité en personne, M.{{lié}}Töpffer s’y prend tout autrement. Droits de l’homme, dignité de l’homme, il laisse tout cela à la frontière ; puis, renversant un peu son chapeau sur l’arrière de l’occiput, à la façon des ingénus, si un carabinier royal vient à se montrer, il salue doux, il approche empressé et se livre reconnaissant. Que si au contraire c’est un curé qui le toise, il s’empreint de dévote vénération, et fait bien voir à son air qu’il est plein de bon vouloir pour l’Église. Que si c’est un conscrit qui le fixe, il fait le tour de cet Achille comme pour admirer la propreté du fourniment et la belle taille de ce cagneux. En un mot, purgeant son esprit par la terreur, selon le précepte d’Aristote, il courtise ces malotrus, et là où il aimerait le plus, toutes choses égales d’ailleurs, à rosser son homme ou à l’envoyer à tous les diables, là surtout, toutes choses n’étant pas du tout égales d’ailleurs, il lui témoigne soumission respectueuse, et il lui marque de toutes les façons la bonne envie qu’il a de lui être parfaitement agréable. Et c’est bien pourquoi, lorsqu’au retour d’une tournée en Italie M.{{lié}}Töpffer franchit de nouveau les Alpes, ce n’est jamais sans éprouver un vif sentiment d’aise et de bonheur qu’en touchant à la terre de Suisse il dépose le lourd fardeau d’hypocrisie, et recouvre, avec la liberté d’allure, la liberté plus précieuse encore d’être droit, franc, ouvert avec des autorités qui ne sont plus dès lors que les agents désintéressés d’une loi souveraine... Bon gendarme de Gondo, sorte de pâtre en uniforme qui suffis, à toi tout seul, pour garder la frontière du Simplon, rien que ton accoutrement bonhomme, rien que ta figure honnête, au sortir des repaires d’où je sors, tout sinistres de défiance, tout souillés de police, tout {{tiret|formi|dables}} <references/>
Revue des Deux Mondes - 1870 - tome 85.djvu/345
dans un rayon peu étendu, il existe des gisemens nombreux. A Sio, point situé sur la route directe de Yunan-sen, le fer est très abondant. A 16 kilomètres de la ville, on trouve de l’or. Les mines qui le renferment, abandonnées à l’industrie privée, sont exploitées par des misérables qui grelottent sur la montagne où ils ont établi leur campement ; ils creusent au hasard et extraient l’or de la roche en broyant celle-ci et en soumettant à un lavage la poussière produite par cette opération. — Ce travail paraît rapporter d’assez minces profits, et il n’est guère possible d’apprécier ce que pourrait tirer de ce gisement l’intelligence européenne. Pendant longtemps, les lois de l’empire ont interdit de rechercher et d’ouvrir les mines de métaux précieux, de peur que l’attrait d’une fortune rapide ne détournât le peuple des travaux agricoles. Le désir de préserver leurs sujets des atteintes de la ''fièvre de l’or'' fait honneur aux empereurs philosophes qui s’en sont inspirés. Cependant, aujourd’hui que la Chine est à la veille d’entrer dans le concert commercial du monde, on peut regretter que la plus grande partie de ses richesses métalliques soient encore inconnues, ou demeurent inutiles. Ainsi que leurs collègues ont toujours fait depuis notre entrée en Chine, les mandarins de Talan ne veulent pas nous laisser partir sans escorte. Nous longeons extérieurement l’enceinte de la ville ; les femmes étonnées suspendent, afin de nous regarder, les soins de leur toilette ; les gamins nous suivent de loin en poussant des cris, mais sans oser nous approcher. Nous n’avions pas encore dépassé la dernière maison de la ville que déjà nous étions dans la montagne. Sur le bord du chemin, une tête humaine proprement ajustée dans une cage en bois enrayait le vice en rassurant la vertu. La montagne aux mines d’or nous apparut dans le lointain, hautaine comme une parvenue fière de sa richesse et nue comme si elle dédaignait les vains ornemens. Un ruisseau qui en sort et que nous eûmes à traverser roule dans ses eaux des paillettes recueillies par les habitans du village où nous prenons quelque repos. Bien que nous soyons accoutumés à exercer pendant les haltes une certaine surveillance sur nos porteurs de bagage, un d’eux avait trouvé le moyen, en s’abritant derrière une natte, d’allumer sa pipe d’opium. Quand on lui remit son fardeau sur l’épaule, il vacilla comme un homme ivre et refusa d’avancer. Les menaces le trouvaient indifférent, les coups le faisaient gémir, rien ne l’arrachait à son engourdissement. Je ne crois pas qu’il ait jamais existé dans le monde un fléau plus terrible que l’opium. L’alcool employé par les Européens pour détruire les sauvages, la peste qui ravage un pays, ne sauraient lui être comparés. Il exerce sur tous un attrait invincible ; le plus pauvre mendiant fumera avant de songer à manger, et, chose <references/>
Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/98
futaies, Courtomieu vante ses prairies et ses eaux jaillissantes. On y arrivait alors par une longue et étroite chaussée mal pavée, très-laide, et qui gâtait absolument l’harmonie du paysage. Elle avait cependant coûté au marquis les yeux de la tête, à ce qu’il disait, et, pour cette raison, il la considérait comme un chef-d’œuvre. Quand la voiture qui amenait Martial et son père quitta la grande route pour cette chaussée, les cahots tirèrent le duc de la rêverie profonde où il était tombé dès en quittant Sairmeuse. Cette rêverie, le marquis pensait bien l’avoir causée. — Voilà, se disait-il, non sans une secrète satisfaction, le résultat de mon adroite manœuvre !... Tant que la restitution de Sairmeuse ne sera pas légalisée, j’obtiendrai de mon père tout ce que je voudrai... oui, tout. Et s’il le faut, il invitera Lacheneur et Marie-Anne à sa table. Il se trompait. Le duc avait déjà oublié cette affaire ; ses impressions les plus vives ne duraient pas ce que dure un dessin sur le sable. Il abaissa la glace de devant de sa voiture, et après avoir ordonné au cocher de marcher au pas : — Maintenant, dit-il a son fils, causons !... Vous êtes décidément amoureux de cette petite Lacheneur ?... Martial ne put s’empêcher de tressaillir. — Oh !... amoureux, fit-il d’un ton léger, ce serait peut-être beaucoup dire. Mettons qu’elle m’inspire un goût assez vif, ce sera suffisant. Le duc regardait son fils d’un air narquois. — En vérité, vous me ravissez !... s’écria-t-il. Je craignais que cette amourette ne dérangeât, au moins pour l’instant, certains plans que j’ai conçus... J’ai des vues sur vous, marquis !... — Diable !... — Oui, j’ai mes desseins et je vous les communiquerai plus tard en détail... Je me borne pour aujourd’hui à vous recommander d’examiner {{Mlle}} Blanche de Courtomieu. <references/>
Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 60.djvu/527
{{C|II. }} L’élévation des prix, autrement dit l’amoindrissement des valeurs monétaires, semble un fait naturel dans l’ordre commercial : on le constate en tout temps et en tout pays. Ordinairement la progression est lente et à peine sensible, mais elle se manifeste quelquefois par de brusques secousses qui occasionnent des souffrances particulières ou des embarras publics : c’est ce qui arrive aujourd’hui. Le mal dont on se plaint a-t-il pour cause une surabondance de monnaie métallique? Non; le métal monnayé, instrument des échanges, facilite la distribution des revenus particuliers, mais il n’augmente le revenu national qu’au moment où il est introduit à l’état de marchandise importée et dans la mesure de sa valeur commerciale ; c’est une très faible addition à l’énorme total du revenu collectif qui règle le niveau des prix, — et d’ailleurs les autorités les plus compétentes sont d’accord pour déclarer que le stock du métal monnayé a été plus faible en ces dernières années qu’il y a vingt ans<ref> Il a été publié, dans le ''Journal officiel'' du 10 mai 1883, un tableau des espèces d’or et d’argent fabriquées en France depuis l’introduction du système décimal en 1795 jusqu’au 31 décembre 1882. Il se résume ainsi : |----- | Or | 8,651,264,340 francs. | Argent | 5,297,679,864 » |----- | Bronze | 63.591,224 » | Ensemble... | 14,012,535,428 francs. |} Beaucoup de personnes ont dû croire que ce total exprimait la somme des monnaies métalliques circulant actuellement en France : ce serait une grande erreur. Ce chiffre de 14 milliards représente l’ensemble de la fabrication dans le cours de quatre-vingt-huit ans La plus grande partie des pièces ont disparu par l’exportation commerciale, la refonte, l’emploi pour la bijouterie, les pertes par accident. On ne peut pas savoir avec certitude ce qu’il en reste dans la circulation. Les personnes expérimentées en ces matières estiment à 5 milliards de francs environ le résidu actuellement disponible, et malgré cette énorme déperdition, la richesse en monnaie métallique de la France dépasse encore, et de beaucoup probablement, celle de tous les autres pays. </ref>. La frappe de l’argent a été suspendue, et l’or s’est écoulé au point de donner parfois des inquiétudes. La monnaie fiduciaire, les billets de banque sont, pour la plus grande partie, la représentation des matières précieuses retirées de la circulation pour former l’encaisse. Les billets en excédent de l’encaisse correspondent à des escomptes commerciaux, c’est-à-dire <references/>
Revue des Deux Mondes - 1854 - tome 5.djvu/1001
grecque, qu’il ne fut imposé aux Latins aucune condition blessante pour l’honneur et les intérêts de la France<ref> Corresp., part I, n° 113.</ref>. » M. de Nesselrode se hâta de répondre à cette dépêche de lord Clarendon et n’épargna rien pour entretenir l’Angleterre dans sa fausse sécurité. Il écrivit le 7 avril au baron Brunnow : « Il nous a été bien agréable, monsieur le baron, de voir par cette pièce (la réponse de lord Clarendon), comme par le résumé de vos entretiens avec les ministres britanniques, que tous les faux bruits répandus à Constantinople à l’égard de nos intentions n’avaient causé aucune alarme ou appréhension au cabinet de Londres, convaincu, par les assurances personnelles qu’il a reçues à ce sujet de l’empereur, que le désir et la résolution de sa majesté sont de respecter l’indépendance et l’intégrité de l’empire turc, et que si ses vues à cet égard venaient à subir un changement quelconque, notre auguste maître serait le premier à en avertir le gouvernement anglais. « Veuillez assurer les ministres de la reine, dans les termes les plus positifs, que les intentions de l’empereur sont toujours les mêmes, et que toutes les vaines rumeurs auxquelles a donné lieu dans la capitale ottomane l’arrivée du prince Menchikof : — occupation des principautés, agrandissement de territoire du côté de nos frontières asiatiques, prétention de nous assurer la nomination du patriarche grec de Constantinople, langage hostile et comminatoire tenu a la Porte par notre ambassadeur, — sont non-seulement exagérées, mais dénuées même de toute espèce de fondement ; qu’en un mot la mission du prince Menchikof n’a jamais eu et n’a encore d’autre but que celui dont votre excellence a été chargée de faire part au gouvernement britannique. » En même temps que la Russie renouvelait ses promesses et redoublait ses protestations à l’Angleterre, elle employait toutes les flatteries, toutes les ruses pour la séparer de la France. Exciter contre nous les défiances de l’Angleterre, empêcher l’alliance des deux grandes nations libérales de l’Occident, tel était dès le principe le but du gouvernement russe. On va voir le langage que la Russie tenait sur notre compte, langage où l’acrimonie se cachait mal sous des grimaces de dédain, langage que par modération nous ne voulons point qualifier, mais qu’il nous suffit de reproduire pour faire comprendre à des lecteurs français la vraie situation d’intérêt et d’honneur où la France est placée dans cette question vis-à-vis de la Russie, M. de Nesselrode continuait en ces termes : « Quant à la recommandation qui nous est faite de ménager autant que possible l’amour-propre de la France, dans la question délicate des lieux-saints, et, tout en revendiquant les droits de l’église grecque, de chercher à ne rien imposer aux Latins qui pût blesser trop directement l’honneur et les intérêts de cette puissance, vous pouvez assurer également les ministres anglais <references/>
Revue des Deux Mondes - 1859 - tome 23.djvu/509
lui présentait une adresse, maintenant qu’après des années d’apathie profonde, la volonté d’accroître la force et la grandeur nationales, d’assurer notre puissance au dehors et notre union au dedans, se réveille encore dans le peuple, tout patriote doit saluer avec de joyeuses espérances ce mouvement patriotique. Quels que soient les moyens par lesquels nous atteindrons le but désiré, quelle que soit la forme de la constitution future de l’Allemagne, une chose est certaine, c’est que princes et peuples doivent être également prêts à faire des sacrifices. Quant à moi, il y a longtemps que, d’un mouvement spontané, j’ai apporté mon offrande sur l’autel de la patrie. » Il s’en faut que les autres princes allemands prêtent une oreille favorable à cet appel du duc de Saxe-Cobourg à l’esprit de sacrifice. Se croyant menacés de médiatisation dans l’avenir et se voyant exposés à être dépouillés dans le présent de l’importance stérile du rôle diplomatique et militaire qui flatte leur vanité, les petits princes et les cours secondaires se rallient à l’Autriche, protectrice du ''statu quo''. Ainsi, tandis qu’un courant porte les populations vers la Prusse, un contre-courant entraîne les cours vers l’Autriche. C’est un phénomène qui n’est point sans analogie avec ce qui se passe en Italie. Seulement la Prusse n’a pas la témérité ardente du Piémont. De nombreuses pétitions émanées de cette agitation unitaire ont été présentées au gouvernement prussien. — Quelle attitude ce gouvernement prendrait-il en présence d’un mouvement si favorable à l’expansion naturelle de la Prusse ? C’est M. de Schwerin qui a été chargé de dessiner cette attitude en répondant à la pétition de la ville de Stettin. Le ministre prussien a pris acte du mouvement national, il en a constaté l’existence, il a donné à comprendre que le gouvernement du prince-régent jugeait au fond que l’état actuel n’est point le plus satisfaisant pour les intérêts de l’Allemagne ; mais il a décliné au nom de la Prusse l’initiative à laquelle on la convie en se fondant sur deux raisons, sur le respect des droits des autres états confédérés et sur l’inopportunité qu’il y aurait à entreprendre en ce moment la réforme du pacte fédéral. Ce n’est point là une fin de non-recevoir absolue. Au contraire M. de Schwerin, s’il ajourne les espérances des pétitionnaires, n’a garde de les décourager. Il réclame pour le gouvernement prussien la confiance publique, se réservant de concilier en temps opportun les vœux de la nation allemande avec les devoirs de la Prusse. On devait s’attendre à cette politique expectante de la Prusse en face d’un mouvement d’opinion encore trop récent pour être franchement épousé par un gouvernement circonspect. Quoi qu’il en soit, cette agitation unitaire annonce le réveil d’une vie politique énergique en Allemagne, et l’on peut croire que l’hiver prochain ne se passera point sans qu’elle ait produit des résultats intéressans. Tandis que l’Europe, encore tout émue de ses luttes intestines, fait de vains efforts pour se rassurer contre l’éventualité de nouveaux conflits, à l’extrémité de l’Orient un accident tragique vient tout à coup lui rappeler qu’au lieu de se déchirer elle-même dans des guerres qui, au degré de civilisation où elle est arrivée, ne sont plus que des guerres civiles, sa vraie mission est de détruire ou de transformer l’épaisse barbarie qui couvre encore une si vaste partie de la terre. L’effort que la France et l’Angleterre avaient fait ensemble contre la Chine n’avait malheureusement pas été assez <references/>
Langevin - La physique depuis vingt ans, 1923.djvu/332
aura permuté les directions OM et ON. Inversement, la permanence d’aspect du phénomène optique, pendant la rotation, montre l’équivalence des diverses directions au point de vue de la propagation. Un fait remarquable est que cette expérience, réalisée par Michelson et Morley dans des conditions de précision telle qu’on aurait pu déceler une différence de l’ordre du milliardième entre les deux durées de propagation, a toujours donné, en toute saison, un résultat complètement négatif au point de vue d’une influence de l’orientation de la plate-forme sur l’aspect des franges d’interférence dans le champ de la lunette. Montrons que ce résultat est en contradiction avec les conceptions habituelles de l’espace et du temps si l’on conserve la théorie des ondulations en optique. ''Raisonnement II.'' — Prenons une première position de la Terre pour laquelle l’expérience a montré que la lumière se propage de la même manière dans toutes les directions et examinons, au point de vue du système de référence lié à la Terre à ce moment de sa course, l’expérience faite six mois plus tard par des observateurs O' qui se meuvent par rapport aux premiers O, avec une vitesse ''v'' égale à 60 kilomètres par seconde. Supposons d’abord l’appareil orienté de manière que la direction ON soit parallèle à cette vitesse ''v''. La source S se meut, à présent, par rapport aux observateurs O ; mais dans la théorie des ondulations, la lumière qu’elle émet doit se propager de manière indépendante du mouvement de la source, c’est-à-dire, toujours
Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, I.djvu/389
precibus et victimis ingratæ virgini petit nuptias et maritum. Sed Apollo, quamquam Græcus et Ionicus, propter Milesiæ conditorem, sic Latina sorte respondit : <poem>Montis in excelsi scopulo desiste puellam Ornatam mundo funerei thalami : Nec speres generum mortali stirpe creatum : Sed sævum atque ferum, vipereumque malum : Qui pennis volitans super æthera, cuncta fatigat, Flammaque et ferro singula debilitat : Quem tremit ipse Jovis : quo numina terrificantur, Fluminaque horrescunt, et Stygiæ tenebræ.</poem> Rex olim beatus, affatu sanctæ vaticinationis accepto, piger tristisque retro domum pergit, suæque conjugi præcepta sortis enodat infaustæ. Mœretur, fletur, lamentatur diebus plusculis. Sed diræ sortis jàm urgent tetri effectus. Jàm feralium nuptiarum miserrimæ virgini choragium struitur, jàm tedæ lumen atræ fuliginis cinerem arcessit : et sonus tibiæ Zygiæ mutatur in querulum Lydium modum : cantusque lætus Hymenæi lugubri finitur ululatu : et puella nuptura deterget lacrymas ipso suo flammeo. Sic affectæ domûs triste fatum, cuncta etiam civitas congemebat, luctuque publico confestim congruens edicitur justitium. <references/>
Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/105
« Je mentirais si je disais que je n’ai pas souffert de ce brusque changement... Mais j’ai du courage, je saurai me résigner. J’aurai, je l’espère, la force d’oublier, car il faut que j’oublie !... Le souvenir des félicités passées rendrait peut-être intolérables les misères présentes... » {{Mlle}} de Courtomieu referma brusquement la lettre. — Vous l’entendez, monsieur le marquis, dit-elle... concevez-vous cette fierté ? Et on nous accuse d’orgueil, nous autres filles de la noblesse ! Martial ne répondit pas. L’altération de sa voix l’eût trahi, il le sentit. Combien cependant, il eût été plus touché encore s’il lui eût été donné de lire les dernières lignes de la lettre. « Il faut vivre, ma chère Blanche, ajoutait Marie-Anne, et je n’éprouve aucune honte à vous demander de m’aider. Je travaille fort joliment, comme vous le savez, et je gagnerais ma vie à faire des broderies si je connaissais plus de monde... Je passerai aujourd’hui même à Courtomieu vous demander la liste des personnes chez lesquelles je pourrais me présenter en me recommandant de votre nom. » Mais {{Mlle}} de Courtomieu s’était bien gardée de parler de cette requête si touchante. Elle avait tenté une épreuve, elle n’avait pas réussi : tant pis ! Elle se leva, et accepta le bras de Martial pour rentrer. Elle semblait avoir oublié « son amie, » et elle babillait le plus gaiement du monde, quand, approchant du château, elle fut interrompue par un grand bruit de voix confuses montées à leur diapason le plus élevé. C’était la discussion de l’Adresse au roi, qui s’agitait furieusement dans le cabinet de M. de Courtomieu. {{Mlle}} Blanche s’arrêta. — J’abuse de votre bienveillance, monsieur le marquis, dit-elle, je vous étourdis de mes enfantillages, et vous voudriez sans doute être là-haut. <references/>
Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 62.djvu/510
lui a dit : « Ce n’est pas pour négocier, comme bien vous pensez. » Vous voyez par là le cas que ces messieurs font de Voltaire, et la récompense qu’il peut en attendre<ref> Mme de Tencin au duc de Richelieu, 18 juin 1743. </ref>. » La comédie était ainsi percée à jour avant même qu’on eût commencé la représentation. Il devint nécessaire d’y rendre quelque vraisemblance au moyen d’un supplément d’artifice : on résolut donc de donner à Voltaire un nouveau grief, bien formel cette fois, et bien public, le touchant en apparence au point le plus sensible, qui lui permît de jeter avec ostentation feu et flamme et d’être cru sur parole partout où il irait porter l’expression de son mécontentement. L’occasion ne fut pas difficile à trouver, car avec l’incroyable fécondité dont il était doué, à peine avait-il pris le temps de jouir du triomphe de ''Mérope'' qu’il sollicitait déjà l’autorisation de faire jouer une autre pièce, ''la Mort de César'', cette imitation heureuse bien qu’affaiblie de l’admirable tragédie de Shakspeare. Le censeur de la Comédie-Française, qui n’était autre que le célèbre Crébillon, s’était prononcé contre la permission demandée par ce motif que l’auteur mettait le meurtre du tyran romain sous les yeux mêmes du spectateur, au lieu d’en faire un récit à la mode classique, ce qui était contraire à la décence de la scène. « Il soutient, disait assez gaîment Voltaire, que Brutus a tort d’assassiner César : il a raison ; il ne faut assassiner personne. Mais il a bien mis lui-même sur la scène un père qui boit le sang de son enfant, et une mère amoureuse de son fils, et je ne vois pas qu’Atrée ni Sémiramis en aient éprouvé le moindre remords. » Effectivement, on n’avait tenu aucun compte de cette raison, qui n’en était pas une : la pièce était montée, les rôles appris par les acteurs, lorsqu’à la fin d’une répétition, arriva de la police une interdiction inattendue de passer outre. Nul doute que ce coup de théâtre n’eût été combiné avec Voltaire, car ce fut le 10 juin à minuit que fut envoyé l’ordre de la police, et, l’avant-veille encore, le 8, il écrivait à d’Argenson : « Je pars vendredi pour l’affaire que vous savez: c’est le secret du sanctuaire, ainsi n’en sachez rien. » Il n’en donna pas moins à sa colère tout l’éclat qu’on pouvait désirer, et avant la fin de la semaine, il était parti, secouant la poussière de ses pieds contre cette ''terre de Visigoths'', où le génie n’avait pas liberté de se produire<ref> Voltaire à d’Argenson, 8 juin 1743. (''Correspondance générale''.)— Desnoiresterres. </ref>. C’est à La Haye qu’il se rendit en droiture, dans le dessein, disait-il, d’attendre que le roi de Prusse lui eût envoyé les permis de poste et les passeports qui étaient nécessaires pour traverser l’Allemagne en sécurité, au milieu des troubles de la guerre. Le lieu <references/>
Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 82.djvu/389
ignorer sa responsabilité, les assassins sortant chaque année des sociétés secrètes l’en avertissaient par leurs attentats ; mais ce goût d’avoir sa part au gouvernement de son pays, ce goût qu’il tenait de sa nature et des épreuves de sa vie, il le renfermait soigneusement dans le cercle de la charte de 1830, purgée des ambiguïtés de l’article 14. Jamais roi n’a été plus fidèle que lui à la procédure constitutionnelle. Aussi, quand il est tombé, la procédure constitutionnelle est tombée avec lui. Les détails que M. Guizot donne, soit dans ses ''Mémoires'' soit dans la nouvelle préface de ses ''Mélanges'', sur la part d’influence que le roi Louis-Philippe voulait avoir dans son gouvernement, sans vouloir jamais changer cette influence en dictature ou en droit au gouvernement personnel, ces détails sont très curieux et même très piquans. « Le roi Louis-Philippe, dit-il dans sa nouvelle préface, a quelquefois fourni lui-même de spécieux prétextes à cette idée, qu’il voulait trop dominer et qu’il dominait trop en effet dans son gouvernement. La patience et le silence sont souvent d’utiles et convenables habiletés royales. Le roi Louis-Philippe n’en faisait pas assez d’usage. Il avait sur toutes choses une surabondance d’idées, d’impressions, de velléités qu’il ne prenait pas assez soin de contenir et pour ainsi dire de tamiser assez sévèrement, il se baissait trop aller à manifester soudainement, impatiemment, son avis et son désir, et aussi à manifester trop d’avis et de désirs dans de petites affaires qui ne méritaient pas son intervention. Il était de plus si profondément convaincu de la sagesse de la politique pacifique, conservatrice et libérale qu’il pratiquait de concert avec les chambres, il croyait le succès de cette politique si important pour le bien du pays, qu’il lui en coûtait un peu d’en voir attribuer à d’autres le mérite, et qu’il ne pouvait se résoudre à n’en pas réclamer hautement sa part. Ce désir et l’intarissable fécondité, la vivacité, et je me permettrai de dire l’intempérance de sa conversation, lui donnaient des airs d’ingérence continue et de prétention exclusive qui dépassaient quelquefois les convenances constitutionnelles. Je suis convaincu que son gendre, le roi Léopold, infiniment plus réservé dans son attitude et son langage, a exercé dans le gouvernement de la Belgique, au dedans et au dehors, plus d’influence personnelle que le roi Louis-Philippe dans celui de la France ; mais l’un en évitait avec soin l’apparence, que l’autre se montrait trop souvent préoccupé de la crainte que justice ne fût pas rendue à ses desseins et à ses efforts. » Je ne puis pas me retenir d’interrompre cette citation par une réflexion que n’auront pas manqué de faire toutes les personnes qui, de près ou de loin, ont vu et ont connu le roi Louis-Philippe. Dans un pays comme la France, où l’on réussit autant et peut-être <references/>
Tolstoï - Anna Karénine, 1910, tome 1.djvu/544
J’exige que vous vous comportiez de telle sorte que ''ni le monde ni nos gens'' ne puissent vous accuser ; j’exige, en un mot, que vous ne le receviez plus. Il me semble que ce n’est pas beaucoup demander. Je n’ai rien de plus à vous dire ; je dois sortir et ne dînerai pas à la maison. » Il se leva et se dirigea vers la porte. Anna se leva aussi ; il la salua sans parler, et la laissa sortir la première. {{t3|XXIV}} Jamais, malgré l’abondance de la récolte, Levine n’éprouva autant de déboires que cette année et ne constata plus clairement ses mauvais rapports avec les paysans. Lui-même n’envisageait plus ses affaires au même point de vue, et n’y prenait plus le même intérêt. De toutes les améliorations introduites par lui avec tant de peine, il ne résultait qu’une lutte incessante, dans laquelle lui, le maître, défendait son bien, tandis que les ouvriers défendaient leur travail. Combien de fois n’eut-il pas à le remarquer cet été ? Tantôt c’était le trèfle réservé pour les semences qu’on lui fauchait comme fourrage prétextant un ordre de l’intendant, mais uniquement parce que ce trèfle semblait plus facile à faucher ; le lendemain, c’était une nouvelle machine à faner qu’on brisait, parce que celui qui la conduisait trouvait ennuyeux de sentir une paire d’ailes battre <section end="s2"/> <references/>
Widor - Initiation musicale.djvu/91
{{nr|||''LE CONTREPOINT''}}depuis les débuts de la polyphonie instrumentale, jusqu’à Haendel et Bach. Et c’est le génie de Bach qui, se trouvant à l’étroit dans ces conventionnelles formes, a cherché autre chose et conçu d’autres projets. Philippe Emmanuel, son fils, s’en inspira et après lui Haydn, Mozart, Beethoven et tous ceux qui voulurent faire œuvre durable<ref>Un fait à constater : tous les grands musiciens, vers la fin de leur vie, reviennent à la fugue ou au style fugué... Mozart, Beethoven, Mendelssohn, Schumann, Saint-Saëns, etc.</ref>. Quand, après avoir terminé ses études d’harmonie, l’élève a subi toutes les épreuves du contrepoint, quand il sait écrire, on l’initie à l’art de construire, de faire un plan, de « composer ». L’échafaudage d’une fugue doit reposer sur quatre fortes assises, dont les deux principales sont l’''exposition'' et la ''strette'' ; les deux autres, le ''relatif'' et la ''sous-dominante''. Dans l’exposition, le sujet passe successivement d’une voix à l’autre par une sorte de balancement entre ''tonique'' et ''dominante''. S’il va d’''ut'' en ''sol'' (supposons-le imposé par le soprano), l’alto le reprend de ''sol'' en ''ut'' ; repris d’''ut'' en ''sol'' par le ténor, de ''sol'' en ''ut'' lui répond la basse. C’est alors un premier épisode modulant et la transposition du ''sujet'' et de la ''réponse'' dans le ''ton relatif''. Puis un second épisode modulant du ''relatif'' à la ''sous-dominante'', et la réapparition du ''sujet'' à cette ''sous-dominante''. Enfin un troisième épisode préparant le retour au ton initial, conduisant à la péroraison, la ''strette''. La strette est, en raccourci, la reprise de {{tiret|l’ex|position}}{{nr||(89)|}} <references/>
Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/506
{{tiret2|se|cond}} chasseur, car il est bon d’être deux à cette chasse, sortît doucement de la loge, et, contournant de loin les oiseaux, s’approchât courbé, et comme une vache qui paît, pour les pousser doucement vers le filet, où il les forceroit à propos de se précipiter, en leur jetant son chapeau. On brise la tête des pluviers pris ; on nettoie la place des plumes qui peuvent y être restées, et l’on retend. Au lieu de filets tendus en rets saillans, d’autres chasseurs se servent de nappes tendues en pantaine ou rideau, au bord d’un champ où l’on a eu soin de s’assurer, la veille, que couchoient les pluviers. Alors, au moment de leur rassemblement, un grand nombre de chasseurs entourent le champ et se couchent à plate terre ; lorsque les cris d’appel se font entendre, ils laissent les oiseaux se réunir, puis se levant tous à la fois, et les poussant à grands cris et en jetant des bâtons vers le filet, ils y font une bonne capture. Si l’on n’est pas assez de monde pour exécuter cette chasse de cette manière, on se sert de l’appeau à pluvier, et l’on imite le cri d’appel de derrière le filet, vers lequel ce cri les attire. Si on veut les tirer au fusil, on se sert ''d’appeaux'', d’''entes'' et d’''appelans'', comme dans les chasses précédentes. On dispose ses machines dans un pré ou lieu jugé convenable ; on fait jouer l’appeau et l’on attire les pluviers. Les chasseurs ont soin de se munir de ''huttes ambulantes'', ou du moins de se couvrir de feuillages. Lorsqu’ils voient les pluviers abattus, deux des chasseurs les mieux placés les contournent et les approchent, et lorsqu’ils ont fait feu sur la bande, les autres les secondent en tirant sur ceux qui s’échappent et qui passent à leur portée. Il est une autre manière de les chasser, qui convient aux pays de vastes plaines. Il faut, pour cela, se réunir en très-grand nombre et cerner les pluviers de loin. Cette première fois, il est presque certain qu’on ne les approchera pas ; mais on remarque l’endroit où ils s’abattent, qu’on cerne encore, et ainsi de suite, jusqu’à ce qu’on les ait lassés. Cette espèce de battue dure quelquefois deux heures ; mais, au bout de ce temps, et souvent dans un plus court délai, on parvient à les joindre à bonne portée. On les approche aussi avec la {{sc|Vache Artificiele.}} (''Voyez'' ce mot.) Enfin, on les prend la nuit au traîneau, ou même on les tire à coups de fusil, en se servant de feu. (''Voyez'' {{RozierL|PERDRIX.}}) La vue de la lumière force les pluviers à se rassembler et à se blottir ; mais il faut observer un grand silence. De quelque manière qu’on les chasse, les époques de leur arrivée et de leur départ sont toujours les plus favorables. Les guignards sont une sorte de petits pluviers de la grosseur d’un merle ; ils ont la tête bigarrée de noir, de gris et de blanc, le dos d’un gris brun lustré de vert, la poitrine d’un gris ondé, le ventre noirâtre, blanc vers la queue, le bec et les pieds noirs. Ils sont très-communs sur plusieurs points de la France, notamment vers Chartres, aux environs d’Amiens, de Falaise, etc. En avril et mai, ils paroissent voyager vers le nord, et en revenir au midi après les chaleurs. Ils fréquentent les guérets, les pelouses et les friches, se retirent dans les marais, volent par bandes de quinze, vingt et trente, plus ou moins, et se laissent assez approcher. Lorsqu’on en tue un, on le laisse sur la place, et les autres volent long-temps autour de lui, sur-tout si on contrefait leur cri avec un petit sifflet de terre cuite ; cette habitude donne la facilité de les tuer. Le guignard est un très-bon gibier. Il mange, comme le pluvier, les scarabées, les vers de terre, les limaçons, etc. ; mais il paroît plutôt un<section end="PLUVIERS"/> <references/>
Revue des Deux Mondes - 1896 - tome 135.djvu/864
encore ''français'', comme on disait alors, les ''Phosphoristes'' ou indépendans n’étaient pas loin d’être ''allemands'', c’est-à-dire de subir aussi une influence étrangère, celle de la littérature allemande, du romantisme de Schiller greffé sur la philosophie de Schlegel. Ce furent donc vraiment les ''Gothiques'' qui imprimèrent au mouvement littéraire suédois son caractère national, en substituant aux dieux de l’Olympe, aux héros de l’antiquité, la mythologie Scandinave et la légende populaire. Le sentiment national se plaisait à retrouver dans les chants de Geier, dans l’épopée symbolique de Ling, le reflet de ses plus intimes aspirations. Il la retrouvait plus expressément encore dans l’œuvre entière de Tegnér, dans la rêverie mélancolique et les hardiesses aventureuses des Vikings de la ''Saga de Frithiof'', dans ''Axel'', l’épopée guerrière des compagnons de Charles XII, dans le piétisme, le mysticisme naïfs d’un étrange poème religieux : les ''Enfans de la Première Communion''. Et malgré la légère teinte d’archaïsme que leur donnent le changement des temps et le progrès des idées, ces œuvres de Tegnér resteront à jamais les œuvres classiques de la littérature suédoise. De l’autre côté de la Baltique, dans la patrie de Franzén, la Finlande, séparée désormais politiquement de la Suède, mais unie encore à elle par une entière communauté de langue et de traditions, le poète Runeberg continuait ce mouvement national, lui faisant subir seulement une forte poussée vers le réalisme. Les poèmes patriotiques dédiés à son compatriote Franzén, ses ''Dictons de l’enseigne Stal'', devenus classiques sur les deux rives du golfe, chantaient les luttes des Finlandais, lorsqu’ils combattaient encore sous le drapeau suédois, et peignaient des épisodes des campagnes menées en commun contre les Russes. Sa poésie pleine d’un ardent patriotisme, portait avec cela une empreinte de réalité qui contrastait fort avec le pur idéalisme des poèmes de Tegnér. Aussi n’est-il pas étonnant que l’on fasse aujourd’hui une gloire à Runeberg d’avoir le premier, avec le poète danois Œhlenschlager, introduit le réalisme dans les littératures Scandinaves. Il ne faudrait pas cependant se méprendre sur le sens des mots, et celui de réalisme, en littérature, est arrivé à signifier tant de choses qu’il est difficile de l’employer sans parfois dépasser le but. Le réalisme de Runeberg consiste à rejeter de la poésie l’élément purement imaginaire ; mais il ne comporte nullement l’absence de spiritualité et de sentiment religieux. Runeberg n’a rien fait que d’admettre dans son œuvre la peinture de la vie directement observée, à la place « les faits tout fictifs où s’étaient <references/>
Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/280
— Comme vous le voyez, je me débarrasse de tout ce chanvre, qui me gênait extraordinairement. Il y en a bien soixante livres, n’est-ce pas ?... Et quel volume ! Je tremblais qu’on ne le devinât sous mon manteau. — Et pourquoi ces cordes ?... interrogea le survenant. — Je vais les faire passer à M. le baron d’Escorval, à qui j’ai déjà jeté une lime. Il faut qu’il s’évade cette nuit... Si invraisemblable était cette scène, que le baron n’en voulait pas croire ses oreilles. « — Il est clair que tout en me croyant fort éveillé, je rêve, » se disait-il. Cependant le nouveau venu avait à demi étouffé un terrible juron, et d’un ton presque menaçant, il poursuivait : — C’est ce qu’il faudra voir !... Si vous devenez fou, j’ai toute ma raison, Dieu merci !... Je ne permettrai pas... — Pardon !... interrompit froidement l’homme à la corde, vous permettrez... Ceci est le résultat de votre... crédulité. C’est quand Chanlouineau vous demandait à recevoir la visite de Marie-Anne, qu’il fallait dire : « Je ne permets pas ! » Savez-vous ce qu’il voulait, ce garçon ? Simplement remettre à {{Mlle}} Lacheneur une lettre de moi, si compromettante que si jamais elle arrivait entre les mains de tel personnage que je sais, mon père et moi n’aurions plus qu’à retourner à Londres. Alors, adieu les projets d’union entre nos deux familles... Le dernier venu eut un gros soupir accompagné d’une exclamation chagrine, mais déjà l’autre poursuivait : — Vous-même, marquis, seriez sans doute compromis... N’avez-vous pas été quelque peu chambellan de Bonaparte, du vivant de votre seconde ou de votre troisième femme ? Ah ! marquis, comment un homme du votre expérience, pénétrant et subtil, a-t-il pu se laisser prendre aux simagrées d’un grossier paysan !... <references/>
Revue des Deux Mondes - 1890 - tome 101.djvu/641
A côté de la chapelle, s’élève un musée renfermant quelques rares débris de la sculpture carthaginoise, une poste et un télégraphe confiés à un père blanc, des couvens, et, comme à dessein pour déshonorer une vue unique au monde, sur le versant d’un coteau admirable de verdure, une rangée de bicoques blanches, couvertes en tuiles rouges ; quelque chose comme un troupeau d’oies transformant en basse-cour une belle pelouse. {{c|II. — L’ESCLAVAGE DES NOIRS DANS LA REGENCE EN 1890. }} En parlant, dans le précédent chapitre, de l’odieuse captivité à laquelle avant 1830 les corsaires des états barbaresques soumettaient les Européens qui avaient le malheur de tomber entre leurs mains, je ne pensais pas avoir à dire que l’esclavage, un esclavage occulte, celui de la domesticité, subsistait encore en Tunisie. Si l’on n’y voit plus de blancs ramant sur des galères, on y trouve des nègres et des négresses venus en captivité des régions où les hommes de couleur se vendent comme ailleurs on vend des ânes et des mulets. Arrivés à leur destination, c’est-à-dire à Tunis, ces nègres et négresses ne seraient pas libérés. Le fait paraît si monstrueux, tellement en opposition avec le rôle que dans l’œuvre antiesclavagiste le cardinal Lavigerie joue en Afrique, sans parler des sentimens libéraux de notre résident général, que l’on répugne à y croire. Et cependant, avant de pousser plus loin cette étude, je tiens, quand je songe à l’astuce des détenteurs d’esclaves, à la polygamie permise en Tunisie, aux harems tunisiens, à leurs eunuques et aux sources claires où j’ai puisé mes informations, à dire ce que je sais. Si ce dire est vrai, — et une dépêche récente de M. Ribot à notre résident paraît le confirmer, — il faut se hâter de l’ébruiter, car il entache non l’honneur, ce qui est un gros mot, du drapeau protecteur flottant sur Tunis, mais sa bonne renommée. C’est l’article que j’ai écrit le 15 novembre dernier à cette même place au sujet du congrès antiesclavagiste de Bruxelles, qui m’a valu, d’un avocat du barreau de Tunis, M. Gaston Jobard, une intéressante communication. D’après notre compatriote, l’esclavage existe en Tunisie, et il en donne la preuve en citant le récent décret qui interdit la vente des noirs dans toute l’étendue de la régence ; toujours d’après lui, le meilleur moyen de mettre un terme à la traite des noirs serait de fermer les débouchés ou les marches qui se trouvent dans le nord de l’Afrique. La communication de mon honorable correspondant ne s’applique pas à un fait nouveau isolé, car dans un ouvrage publié par M. Duveyrier sur la Tunisie, <references/>
Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/414
''sache et qu’ayant été sa fiancée je ne serai plus celle de personne ici-bas. Je lui garderai jusqu’au tombeau la foi que je lui ai jurée, quoique d’une manière qui n’est pas celle du monde. Mais je peux dire de moi-même ce que disait de ses disciples le divin ami, le consolateur dont j’ai l’image devant moi : « Je ne suis plus du monde. » Si je n’avais à remplir mon devoir envers ma sainte et douce mère, je pourrais dire ces mots avec plus de réalité encore, sinon avec plus de vérité. C’est dans cet esprit que j’essayerai d’écrire ces pages, et je désirerais qu’elles fussent lues ainsi par la personne à qui elles seront remises dans quelques heures, avec ce sentiment particulier qui rend le vœu d’une morte plus respectable et plus solennel. Peut-être ai-je le droit de demander qu’il en soit de la sorte, car, si c’est la souffrance qui donne à la mort ce caractère sacré pour tous, je crois que j’ai souffert autant qu’une créature humaine peut souffrir. Du moins je n’avais ni connu, ni seulement imaginé une telle douleur''. « ''Quoiqu’une telle parole soit dure à entendre et bien dure à prononcer, il faut que j’y insiste, car je dois parler comme avec moi-même, comme je parle devant ma conscience. Oui, cette douleur a été affreuse, parce que j’ai été contrainte de reconnaître tout d’un coup et sans aucune préparation, que je vivais depuis des mois dans une chimère, et que je ne connaissais rien du passé de celui que j’aimais, je peux presque dire rien de son caractère. Il avait eu, '' <references/>
Bernanos - L’Imposture.djvu/39
{{nr||L’IMPOSTURE|29}}{{tiret2|demi|-torpeur}} que dissipera soudain le coup de tonnerre de l’angoisse, l’angoisse, forme hideuse et corporelle du remords. Vous vous réveillerez dans le désespoir qu’aucun repentir ne rédime, car à cet instant même expire votre âme. C’est alors qu’un malheureux écrase d’une balle un cerveau qui ne lui sert plus qu’à souffrir. Quelques-uns des lecteurs de l’abbé Cénabre parmi ceux qu’il irrite, que sa gentillesse, son goût de plaire n’ont point désarmés, recherchent dans ses derniers livres, avec clairvoyance, cet accent singulier, douloureux qui semble marquer une blessure de l’orgueil, un doute de soi. L’ironie, toujours un peu pédante, grince maintenant. Peut-être échappe-t-elle au contrôle de l’auteur ? Jadis asservie au texte, alignée, elle le déborde parfois, pousse au dehors un coup furieux, reprend sa place avec contrainte... L’art, ou plutôt la formule heureuse de l’auteur, exploitée à fond, peut se définir ainsi : écrire de la sainteté comme si la charité n’était pas. L’homme Renan, de qui le blasphème est toujours un peu scolaire, s’est contenté d’une simple transposition d’un ordre à l’autre, insérant l’être miraculeux dans un univers sans miracles, charge facile, dont sa vanité n’a jamais perçu le comique énorme. Pour celui qui sait lire, la ''Vie de'' ''Jésus'' est un vaudeville, a tous les éléments d’un bon vaudeville, moins le naturel et la facilité. L’abbé Cénabre, lui, n’a jamais nié le miracle, et même il a le goût du miraculeux. Il n’approche les grandes âmes que dans un sentiment de vénération, et sa curiosité même a un tel élan qu’on la prendrait pour l’amour. Il lui est simplement donné d’imaginer un ordre spirituel découronné de la charité. <references/>
Beaugrand - Jeanne la fileuse, 1878.djvu/103
nous allions sortir et que nous pourrions alors causer avec lui, avec plus de facilité. Il est fort probable que le mouchard anglais prit ces paroles comme acte de soumission, car nous l’entendîmes qui disait à ses compagnons : — {{lang|en|" We’ve got them allright, Jack. "}} — Attends, un peu mon bonhomme, murmurai-je entre mes dents, et nous allons voir si tu es {{lang|en|"allright "}}. Et nous sortîmes tous les trois, armés jusqu’aux dents, au grand étonnement des Anglais qui pensaient nous avoir pris comme dans une souricière. Il y eut un moment d’hésitation, de part et d’autre, lorsque nous nous rencontrâmes face à face, et je fus le premier à rompre le silence. — Que nous voulez-vous ? leur dis-je en français, et en les apostrophant avec rudesse. — Êtes-vous les nommés Marion et Girard, de Contrecœur ? me répondit celui qui nous avait déjà parlé et que je reconnaissais par le timbre de sa voix. — Admettant que nous soyons Marion et Girard, répondis-je, que prétendez-vous faire ? nous arrêter ? — Oui ! au nom de la reine, notre gracieuse souveraine, je vous arrête, comme traîtres et rebelles au gouvernement de sa gracieuse majesté. <references/>
Verne - Le Superbe Orénoque, Hetzel, 1898.djvu/306
{{nr|276|LE SUPERBE ORÉNOQUE.|}}Ils ont hâte d’être arrivés à la Mission de Santa-Juana, et fasse le ciel que le Père Esperante les mette sur la bonne route, que des renseignements plus précis les conduisent enfin au but ! Puissent-ils aussi éviter une rencontre avec la bande d’Alfaniz, qui risquerait de compromettre le sort de la campagne ! Ce matin-là, presque à l’heure du départ, Jeanne de Kermor avait dit à Jacques Helloch, alors qu’ils se trouvaient seuls : « Monsieur Helloch, non seulement vous m’avez sauvé la vie mais vous avez voulu joindre vos efforts aux miens... Mon âme est pleine de reconnaissance... Je ne sais comment je pourrai jamais m’acquitter envers vous... — Ne parlons pas de reconnaissance, mademoiselle, répondit Jacques Helloch. De compatriote à compatriote, ces services sont des devoirs, et ces devoirs, rien ne m’empêchera de les accomplir jusqu’au bout ! — De nouveaux, de graves dangers nous menacent peut-être, monsieur Jacques... — Non... je l’espère ! D’ailleurs, c’est une raison pour que je n’abandonne pas {{Mlle}} de Kermor... Moi... vous abandonner... car, ajouta-t-il en regardant la jeune fille qui baissait les yeux, c’est bien cela que vous avez eu la pensée de me dire... — Monsieur Jacques... oui... je voulais... je devais... Je ne puis abuser ainsi de votre générosité... J’étais partie seule pour ce long voyage... Dieu vous a mis sur mon chemin, et je l’en remercie du fond du cœur... Mais... — Mais votre pirogue vous attend, mademoiselle, comme m’attend la mienne, et elles iront ensemble au même but... J’ai pris cette résolution, sachant à quoi je m’engageais, et ce que j’ai résolu de faire, je le fais... Si, pour que je vous laisse continuer seule cette navigation, vous n’avez pas d’autre raison que les dangers dont vous parlez... — Monsieur Jacques, répondit vivement {{Mlle}} de Kermor, quelles autres raisons pourrais-je avoir ?... <references/>
Annales de mathématiques pures et appliquées, 1814-1815, Tome 5.djvu/106
Pour le démontrer généralement, considérons la fonction monôme {{c|<math>\mathcal{f}\ldots\operatorname{f}\varphi\psi\operatorname{F}\ldots z</math>}} {{SA|on pourra, sans en changer la valeur, permuter entre elles deux lettres fonctionnaires consécutives quelconques <math>\varphi,\psi,</math> par exemple. Car, soit}} {{c|<math>\operatorname{F}\ldots z=t,</math>}} {{SA|on aura}} {{c|<math>\varphi\psi\operatorname{F}\ldots z=\varphi\psi t\,;</math>}} {{SA|or, par hypothèse,}} {{c|<math>\varphi\psi t=\psi\varphi t\,;</math>}} {{SA|donc}} {{c|<math>\varphi\psi\operatorname{F}\ldots z=\psi\varphi\operatorname{F}\ldots z\,;</math>}} {{SA|et, en prenant, de part et d’autre, la fonction composée,}} {{c|<math>\mathcal{f}\ldots\operatorname{f}\varphi\psi\operatorname{F}\ldots z=\mathcal{f}\ldots\operatorname{f}\psi\varphi\operatorname{F}\ldots z.</math>}} {{SA|Il suit de là que chaque lettre fonctionnaire peut être amenée à quelle place on veut de la combinaison première, et partant qu’on peut faire subir aux lettres fonctionnaires toutes les permutations possibles, sans altérer la valeur de la fonction composée.}} On conclut évidemment de ce théorème que si, avec les lettres fonctionnaires cornmutatives entre elles deux à deux <math>\operatorname{f},\mathcal{f},\varphi,\ldots</math> on forme, à volonté, de nouvelles fonctions, composées de deux, de trois,... lettres, telles que <math>\operatorname{f}\mathcal{f}z,\ \varphi\psi\operatorname{F}z,\ldots,</math> toutes celles-ci seront aussi commutatives entre elles et avec la première. 8. Si <math>\operatorname{f}</math> et <math>\mathcal{f}</math> sont commutatives entre elles, elles le seront avecr leurs inverses qui seront aussi oommutatives entre elles, c’est-à-dire, que, si l’on a {{c|<math>\operatorname{f}\mathcal{f}z=\mathcal{f}\operatorname{f}z,\qquad</math>(15)}} {{SA|on aura aussi}} {{c|<math>\operatorname{f}\mathcal{f}^{-1}z=\mathcal{f}^{-1}\operatorname{f}z\,;\quad \mathcal{f}\operatorname{f}^{-1}z=\operatorname{f}^{-1}\mathcal{f}z\,;\quad \operatorname{f}^{-1}\mathcal{f}^{-1}z=\mathcal{f}^{-1}\operatorname{f}^{-1}z\,;\quad(16)</math>}} {{SA|En effet, on a (1)}} <references/>
Le Braz - La légende de la mort chez les Bretons vol 2 1902.djvu/402
PARADIS lannik se crut transporté dans les bois de Kerbeulven, par une jolie matinée de printemps. — A la bonne heure ! murmura-t-il, voilà qui vous met le cœur en joie ! Et il reprit sa route, avec une vaillance nouvelle. Il lit ainsi des lieues et des lieues. Soudain se dressa devant lui un Menez si grand qu'il barrait tout le ciel, comme une immense et sombre muraille. Le pied du mont était tapissé de mousse fine, plus douce que le velours. La brise répandait dans Fair une odeur suave, émanée on ne savait d'où, lannik eut bien envie de s'allonger là, dans la mousse, pour respirer plus longtemps cette odeur. Gomme si ce n'eût pas élé assez de ce charme, des voix exquises se mirent à chanter. Il y en avait des cent mille et des cent mille, et elles chantaient bellement, mais sur un ton un peu triste. L'enfant serait volontiers demeuré des années, immobile, à les entendre. Il ne put que s'en délecter au passage. La baguette le tirait par la main. Il dut la suivre. L'escalade du Menez fut pénible et longue. Il fallait se raccrocher à des buissons, se cramponner à des roches. Une fois au sommet, lannik détourna la tôle. Il vit derrière lui, sur la pente, une multitude d'enfants de son âge qui essayaient de grimper, comme il avait fait, en s'aidant des aspérités du sol. Mais ils roulaient en bas à mesure qu'ils s'efforçaient de monter. Les touffes d'herbes ou de genêts auxquelles ils se raccrochaient leur restaient dans les mains ; les pierres où ils se cramponnaient lesentrainaientdans leur chute. <references/>
Sand - La comtesse de Rudolstadt, 2e série.djvu/64
{{Numérotation||60|}}{{tiret2|entre|tenu}}, et récemment abandonné sans grande précaution. Effrayée de cette circonstance qui lui révélait la présence d’un hôte, Consuelo qui ne voyait pourtant pas trace de mobilier autour d’elle, retourna vivement vers l’escalier et s’apprêtait à le descendre, lorsqu’elle entendit des voix en bas, et des pas qui faisaient craquer les gravois dont il était semé. Ses terreurs fantastiques se changèrent alors en appréhensions réelles. Cette tour humide et dévastée ne pouvait être habitée que par quelque garde-chasse, peut-être aussi sauvage que sa demeure, peut-être ivre et brutal, et bien vraisemblablement moins civilisé et moins respectueux que l’honnête Matteus. Les pas se rapprochaient assez rapidement. Consuelo monta l’escalier à la hâte pour n’être pas rencontrée par ces problématiques arrivants, et après avoir franchi encore vingt marches, elle se trouva au niveau du second étage où il était peu probable qu’on aurait l’occasion de la rejoindre, car il était entièrement découvert et par conséquent inhabitable. Heureusement pour elle la pluie avait cessé ; elle apercevait même briller quelques étoiles à travers la végétation vagabonde qui avait envahi le couronnement de la tour, à une dizaine de toises au-dessus de sa tête. Un rayon de lumière partant de dessous ses pieds se projeta bientôt sur les sombres parois de l’édifice, et Consuelo, s’approchant avec précaution, vit par une large crevasse ce qui se passait à l’étage inférieur qu’elle venait de quitter. Deux hommes étaient dans la salle, l’un marchant et frappant du pied comme pour se réchauffer, l’autre penché sous le large manteau de la cheminée, et occupé à ranimer le feu qui commençait à monter dans l’âtre. D’abord elle ne distingua que leurs vêtements qui annonçaient une condition brillante, et leurs chapeaux qui lui cachaient leurs visages ; mais la clarté du foyer s’étant répandue, <references/>
Bulwer-Lytton - Ernest Maltravers.pdf/422
de moi ? « Nous apprenons que des changements importants vont avoir lieu dans le gouvernement ; on dit que les ministres reconnaissent enfin la nécessité de fortifier leur cause en s’assurant le concours de talents nouveaux. Parmi les nominations, dont on parle avec certitude dans les réunions le mieux informées, nous apprenons que lord Vargrave doit avoir la place de... Cette nomination obtiendra l’assentiment général. Lord Vargrave n’est pas un orateur qui éblouit ; ce n’est pas un rhétoricien déclamateur. C’est un homme qui a des vues saines et pratiques, qui possède l’entente des affaires, et qui jouissait d’une grande considération à la Chambre des communes. Il possédait aussi l’art de s’attacher des amis, et son caractère mâle et franc ne peut manquer de produire un bon effet sur l’esprit du public anglais. Nos lecteurs trouveront dans une autre colonne de ce journal la reproduction entière de l’excellent discours de réception qu’il a prononcé à la Chambre des lords, vendredi dernier. Les sentiments qui y sont exprimés font le plus grand honneur au patriotisme et au jugement de lord Vargrave » « Voilà qui est bien !... très-bien, vraiment ! » dit Lumley en se frottant les mains. Il revint à ses lettres, et son attention fut attirée par l’une d’elles, revêtue d’un énorme cachet, et portant ces mots : « personnelle et confidentielle. » Il savait, sans l’ouvrir, qu’elle contenait l’offre de la nomination dont parlait le journal. Il la lut, et se leva d’un air triomphant. Il passa dans le jardin, pour aller rejoindre lady Vargrave et Évelyn sur la pelouse. Là, tandis qu’il souriait à la mère et caressait l’enfant, cette scène et ce groupe formaient un charmant tableau du bonheur domestique d’un intérieur anglais. {{...|25}} Ici se termine la première partie de cet ouvrage ; elle a pour bornes l’horizon qu’on aperçoit, lorsqu’on regarde le monde pratique avec les yeux extérieurs plutôt qu’avec ceux de l’esprit, et que l’on considère une vie dont la justice n’est point satisfaite : car la vie ne se voit ainsi que par fragments ; l’influence de la destinée semble bien peu de chose sur l’homme qui n’a que des torts d’égoïste, et qui sait toujours faire tourner le mal lui-même à son profit personnel. Mais le destin jette une ombre bien vaste sur le cœur qui ne s’égare qu’en se hasardant au dehors, et ne trouve que dans les autres les sources de la douleur et de la joie. Va ! Maltravers, va seul, sans amis, loin de ta patrie, toi <references/>
Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/146
{{nr|24|TRAITÉ DU CIEL.}}mouvement contraire<ref>Il a été démontré dans la ''Physique'', livre {{rom-maj|VIII|8}}, {{abréviation|ch.|chapitre}} 12, § 41, tome {{rom-maj|II|2}}, page 547 de ma traduction, que le mouvement circulaire n’a pas de contraire.</ref> au mouvement circulaire, il faut nécessairement que le mouvement en ligne droite soit le plus contraire au mouvement en cercle. § 3. Les mouvements qui se passent en ligne droite sont opposés les uns aux autres par les lieux<ref>Voir la ''Physique'', livre {{rom-maj|VIII|8}}, {{abréviation|ch.|chapitre}} 12, § 4, tome {{rom-maj|II|2}}, page 530 de ma traduction.</ref> ; car le haut et le bas<ref>Seuls mouvements qui puissent se faire en ligne droite.</ref> sont une différence et une contrariété du lieu<ref>L’expression est assez singulière en notre langue ; mais j’ai tenu à conserver l’analogie de Contraire et de Contrariété, qui répond davantage au texte grec.</ref>. § 4. Secondement<ref>Le texte dit précisément : Ensuite.</ref>, on pourrait croire que le raisonnement qui s’applique au mouvement en ligne droite<ref>Dans le mouvement en ligne droite, il y a des contraires ; on pourrait croire aussi qu’il y en a dans le mouvement circulaire ; mais cela n’est pas.</ref> s’applique également bien au mouvement circulaire. Ainsi l’on peut dire que le mouvement de A en B<ref>Il faut imaginer que c’est un mouvement sur un simple arc de cercle, et non pas encore sur une demi-circonférence, ni sur un cercle entier.</ref> sur la ligne droite est contraire au mouvement de B en A. Mais cette ligne est déterminée et finie<ref>Il n’y a qu’un seul mot dans le texte. Voir sur le mouvement contraire, la ''Physique'', livre {{rom-maj|VIII|8}}, {{abréviation|ch.|chapitre}} 2, § 14, tome {{rom-maj|II|2}}, page 530 de ma traduction, et livre {{rom-maj|VIII|8}}, {{abréviation|ch.|chapitre}} 14, § 4.</ref>, tandis que des lignes circulaires<ref name="p146">On ne voit pas très-bien la force de cet argument, et l’expression n’est pas suffisante. Aristote veut dire sans doute qu’entre deux points donnés on ne peut mener qu’une seule ligne droite, tandis qu’on y peut faire passer un nombre infini de lignes courbes. Il s’ensuit que le mouvement fait sur une de ces courbes, ne peut pas être aussi directement </ref> pourraient en nombre infini passer par les mêmes points. <references/>
Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 5, 1797.djvu/127
résulter que des malheurs. O vous ! qui vous mêlez de gouverner les hommes, gardez-vous de lier aucune créature. Laissez-la faire ses arrangemens toute seule, laissez-la se chercher elle-même ce qui lui convient, et vous vous appercevrez bientôt que tout n’en ira que mieux. Quelle nécessité y a-t-il donc, diront tous les hommes raisonnables, que le besoin de perdre un peu de semence me lie à une créature que je n’aimerai jamais ; de quelle utilité peut-il être que ce même besoin enchaîne à moi cent infortunées que je ne connais seulement pas ? Pourquoi faut-il que ce même besoin avec quelque différence pour la femme, {{sic2|l’assujetisse}} à une contrainte, et à un esclavage perpétuel ? Eh quoi, cette malheureuse fille brûle de tempérament, le besoin de se rassasier la consume, et vous allez, pour la satisfaire, lier son sort à celui d’un homme... peut-être fort loin du goût de ces plaisirs, et qui, on ne la verra pas quatre fois dans sa vie, on ne se servira d’elle que pour la soumettre à des plaisirs dont le partage deviendra impossible à cette jeune personne. Quelle injustice de part et d’autre, et comme elle est évitée en abrogeant vos <references/>
Stendhal - Vie de Henri Brulard, t1, 1913, éd. Debraye.djvu/77
je suis si loin d’être blasé sur leurs ruses et petites grâces qu’à mon âge, cinquante-deux [ans]*, et en écrivant ceci, je suis encore tout charmé d’une longue ''chiacchierata'' qu’Amalia a eue hier soir avec moi au Th[éâtre] Valle. Pour les considérer le plus philosophiquement possible et tâcher ainsi de les dépouiller de l’auréole qui me fait ''aller les yeux,'' qui m’éblouit et m’ôte la faculté de voir distinctement, j’''ordonnerai'' ces dames (langage mathématique) selon leurs diverses qualités. Je dirai donc, pour commencer par leur passion habituelle : la vanité, que deux d’entre elles étaient comtesses et une, baronne. La plus riche fut Alexandrine Petit, son mari et elle surtout dépensaient bien 80.000 francs par an. La plus pauvre fut Mina de Grisheim, fille cadette d’un général sans nulle fortune et favori d’un prince tombé, dont les app[ointement]s faisaient vivre, la famille, ou {{Mlle}} Bereyter, actrice de l’Opera-Buffa. Je cherche à distraire le charme, le ''dazzling'' des événements, en les considérant ainsi militairement. C’est ma seule ressource pour arriver au vrai dans un sujet sur lequel je ne puis converser avec personne. Par pudeur de tempérament mélancolique (Cabanis), j’ai toujours été, à cet égard, d’une discrétion incroyable, folle. Quant à l’esprit, Clémentine l’a emporté sur toutes les autres. Métilde l’a emporté par les sentiments nobles, espagnols ; <references/>
Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 109.djvu/141
se faisaient sur place, dans un rayon extrêmement restreint ; ils étaient d’ailleurs rudimentaires comme les premiers besoins à l’enfance de l’humanité. Peu à peu ces besoins devinrent plus nombreux et le cercle des échanges s’agrandit. Pour se procurer des armes ou des vêtemens, pour modifier ou embellir sa maison, l’homme dut se déplacer et entreprendre de longues et périlleuses excursions. L’industrie était cantonnée sur certains points du sol dont elle transformait sur place les produits. Ainsi, le pasteur du Liban venait à Damas échanger la laine de ses troupeaux contre des lames de sabre que l’on ne forgeait que là, puis il poussait jusqu’à Beyrouth pour acquérir ces belles étoffes de soie ou de laine que tissaient les femmes du pays. A la longue, une classe d’hommes se forma dont l’unique occupation consistait à se charger des échanges que les diverses classes de producteurs et de consommateurs se faisaient directement entre eux. Dès lors producteurs et consommateurs devinrent plus sédentaires, préférant livrer leurs produits à des marchands qui venaient les trouver chez eux, plutôt que de s’exposer aux ennuis et aux risques de lointaines pérégrinations. Et alors on vit se former ces caravanes qui, parties des points les plus reculés du monde, s’arrêtaient dans les principaux centres de population pour y vendre et y acheter des produits. Bientôt ces caravanes de marchands exécutèrent leurs voyages à des intervalles réguliers suivant un itinéraire déterminé. Leur arrivée était connue d’avance, et les habitans des contrées environnantes accouraient en foule pour se procurer, en échange de marchandises ou de métaux précieux, les produits que leur sol ou leur industrie ne leur donnaient pas. Telle fut l’origine des foires, dont l’importance a été si grande chez les peuples en formation et qui se sont perpétuées chez les nations où les moyens de transport sont encore imparfaits. Ces foires, ou plutôt ces haltes de caravanes, très rares et très courtes au début, devinrent fréquentes. De plus en plus les populations s’y portèrent. L’abondance des produits exposés, leur variété, les usages nouveaux qu’ils révélaient, les distractions qui étaient l’accompagnement obligé de ces manifestations, tout était fait pour attirer l’acheteur. Mais en même temps ce dernier apprenait à connaître la valeur des produits par la comparaison qu’il en faisait et il n’était plus obligé de subir les conditions d’un vendeur ou d’un acquéreur unique. Déjà la concurrence faisait son œuvre, et, sous l’influence de cette quantité de marchandises accumulées, les prix se nivelaient et la valeur des choses se régularisait. De leur côté, les négocians nomades apprenaient à connaître le goût des acheteurs et s’ingéniaient à satisfaire <references/>
Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 10.djvu/161
d’eux, le délégué des fondeurs en caractères, va jusqu’à dire que l’on ne devrait admettre comme apprentis que les fils d’ouvriers de la profession et non ceux des hommes déclassés de tous les métiers. La plupart toutefois sont plus modérés, ils se contentent de regretter que les travaux des champs soient de plus en plus abandonnés pour ceux des villes : poétique sentiment, s’il était absolument spontané et s’il n’était pas inspiré par un intérêt personnel. Les rapports sont plus justes et plus intéressans quand ils dépeignent la triste condition faite à l’apprenti. Généralement il n’y a pas de contrat écrit : les courses en ville, le nettoyage de l’atelier, quelquefois les services personnels envers le patron, prennent la plus grande partie du temps de l’enfant ou du jeune hommes le reste n’est pas employé d’une manière plus fructueuse pour lui. Ses occupations sont beaucoup trop spécialisées : on lui donne un détail à faire, toujours le même, parce qu’au bout de peu de temps il arrive à l’exécuter plus facilement, ce qui profite au patron ; s’il est apprenti mécanicien par exemple, on lui fait polir des vis ou ébaucher des pièces, rien de plus pendant des années. Un apprenti en optique, d’après le délégué des opticiens, n’aurait été employé pendant quatre ou cinq ans qu’à faire des biseaux soit aux verres de boussoles, soit à des boutons de verre, c’est-à-dire le travail d’un apprenti lapidaire, et il ignorait ce qu’est un objectif. Les conseils des prud’hommes on le sait, sont chargés aujourd’hui de faire respecter les contrats d’apprentissage : s’acquittent-ils bien de cette tâche ? Le délégué des marbriers l’assure ; tous les autres déclarent que cette surveillance est insuffisante ; si un apprenti viole son contrat, c’est-à-dire quitté le patron avant le temps déterminé, il est condamné par le conseil ; mais, si un patron ne remplit pas ses obligations, c’est-à-dire s’il n’a donné aucune instruction sérieuse à l’apprenti, comme cette violation ne se manifeste pas par un fait précis et déterminé, elle n’entraîne aucune peine et aucune indemnité. La réforme de l’apprentissage est absolument nécessaire ; il y a là plus qu’un intérêt industriel, il y a un intérêt social. Les ouvriers déclarent qu’eux seuls, par leurs chambres syndicales, peuvent accomplir cette réforme. Ils ont déjà commencé : dans quelques corporations, ils ont fondé soit des cours professionnels, soit des bureaux de placement, c’est le délégué des ouvriers en voitures qui nous l’apprend. Les chambres syndicales des patrons aussi se sont occupées de la même question. Assurément les associations ouvrières des divers corps d’état, si elles parvenaient à s’organiser, pourraient rendre l’apprentissage plus fécond et plus moral à la fois. Il semble que les ouvriers soient enfin pénétrés de la doctrine du ''selfhelp'', aide-toi toi-même : ils veulent tout faire par leurs propres <references/>
Tailhade - Quelques fantômes de jadis (1920).djvu/163
au nez des importuns, en attendant le mariage final, couronnement habituel de tous ces menus soins. La santé de Naquet, ruinée et défaite brusquement, comme si les rouages de cet organisme discord s’arrêtaient sur le champ, à la façon d’une horloge dont on a tordu quelque roue, était l’objet d’une inquiétude permanente. Il ne sortait guère, mais il recevait, chaque après-midi, ses camarades, ses amis, Charles Malato, le D<sup>r</sup> Max Hulmann, et ce génie inconnu, Jacques Vieilh de Boisjoslin. Un grand et lumineux salon, aux quatre fenêtres donnant sur la rue du Docteur-Blanche et ses derniers arbres puis, en retour, sur le parc des Assomptionnistes, permettait aux visiteurs assez nombreux, nihilistes de passage, révolutionnaires étrangers, littérateurs et fidèles quotidiens, de se grouper ou de causer avec le maître de la maison. Étendu sur une chaise longue, enveloppé, dans toute saison, d’une large robe grise, le dos appuyé sur des coussins, on ne voyait de lui que sa belle tête aux cheveux argentés, sa barbe non moins blanche, ses yeux vifs, son nez d’une courbe <references/>
Laberge - Images de la vie, 1952.djvu/81
Le jeudi de la semaine avant le mariage, le vieux Boyer regardant le firmament après le déjeuner déclara : « Je crois que c’est un bon temps pour chasser les outardes. Il n’y a rien qui presse. Je vais prendre une journée de congé. » Ce disant, il rentra dans la maison, prit son fusil accroché derrière le poêle, mit dans sa poche une douzaine de cartouches qu’il gardait dans le haut de l’armoire de la cuisine. — Je ne sais pas si je reviendrai pour le dîner. Fais-moi donc une couple de beurrées, dit-il à sa femme. La vieille lui tailla une couple de tartines qu’elle enveloppa dans un sac de papier et les lui remit. Avec son fusil, ses cartouches et son pain, le père s’éloigna dans les champs. À l’heure du repas, il n’était pas rentré. Alors, le fils et sa mère prirent le dîner sans lui. Dans les champs, le vieux allait à l’aventure espérant rencontrer une volée d’outardes. Comme le gibier tardait à faire son apparition et que l’appétit se faisait sentir, il s’assit au revers d’un fossé et dévora ses tartines. Tout en mangeant, il songeait qu’il s’était dépouillé de sa terre mais il estimait que c’était logique et que son père à lui avait autrefois agi de la même façon à son égard. Comme il avalait ses dernières bouchées, il aperçut une douzaine d’outardes qui volaient en triangle dans le ciel gris en faisant entendre leur funèbre mélopée. Le vieux ne se hâtait pas d’épauler et de tirer. Sa connaissance de ces oiseaux lui faisait supposer qu’ils s’arrêteraient un moment dans une pièce de sarrasin qui avait été récolté quelques jours auparavant. Il avait deviné juste et comme les voyageurs ailés allaient s’abattre à l’endroit qu’il avait prévu, il visa et tira. Au bruit de l’explosion, les outardes reprirent précipitamment leur vol mais l’une d’elles, mortellement atteinte, resta sur le sol. Le vieux Boyer était certain de ne pas rentrer bredouille. Tout de même, il n’était pas satisfait et voulait faire mieux encore. La chance le servit et, au cours de l’après-midi, il abattit deux canards sauvages. Après cet exploit, il estima qu’il avait fait une bonne journée et que c’était le temps de rentrer chez lui. Lors donc, il attacha ses trois pièces de gibier à la ceinture de sa blouse et il allait prendre le chemin <references/>
L’Hypnotisme et les Religions.djvu/73
{{taille|les médications avaient échoué. Une neuvaine fut commencée le 8 novembre. Le soir à dix heures, la jeune fille imbiba d’eau de Lourdes un bandeau de toile et le plaça sur ses yeux. Le lendemain à son réveil, quand elle enleva le bandeau, l’œil malade avait recouvré la santé, l’œil mort était ressuscité.|90}} {{taille|» ''On sait qu’il existe des amblyopies et des amauroses complètes, de nature hystérique, même en dehors des attaques d’hystérie. On verra dans nos observations<ref>Voir la note 2, page 70.</ref> des amblyopies rapidement guéries par l’application d’un aimant ou par la suggestion. Braid relate aussi un cas remarquable d’amblyopie nerveuse d’origine traumatique, guérie presque après une seule séance d’hypnotisme.''|90}} {{taille|» {{Mlle}} de Fontenay, âgée de vingt-trois ans, avait depuis près de sept ans une paralysie des membres inférieurs, développée à la suite de deux chutes de voiture et de cheval qui avaient ébranlé son organisation et provoqué un désordre utérin. Les divers traitements institués, deux saisons à Aix, l’homéopathie, l’hydrothérapie, la cautérisation actuelle, avaient échoué. Depuis la fin de janvier 1873, elle ne pouvait plus se tenir sur ses jambes. De plus elle avait de vives douleurs internes et des accidents d’exaspération nerveuse. Elle alla à Lourdes le 21 mai 1873. Peu à peu, durant le cours d’une neuvaine, les forces lui|90}} <references/>
Leblanc - Ceux qui souffrent, recueil de nouvelles reconstitué par les journaux de 1892 à 1894.pdf/35
Toute sa rage jalouse se dissipait, il ne lui restait plus qu’un désespoir sans bornes. Il observa ses camarades. Comme lui, certains étaient mal proportionnés, trop gras ou trop maigres. Il les plaignit. D’autres attendaient, fiers inconsciemment de leur santé visible et de l’harmonie de leurs lignes. Il les envia, mais d’une envie apaisée, dépourvue d’amertume. Enfin, il se tourna vers Paul Brancourt. Le major l’examinait. Tout de suite, il ressentit une admiration involontaire et un peu douloureuse. Et des idées nouvelles, qu’il ne songeait pas à analyser, entrèrent de force dans son esprit. De la comparaison que le hasard lui imposait, il concluait nécessairement à son infériorité. Il comptait parmi les faibles et les désarmés, son rival parmi les forts et les beaux, parmi ceux que la nature a choisis pour perpétuer l’espèce. Dans la lutte d’{{corr|àmour|amour}}, il était voué à la défaite. Son rôle lui commandait de s’effacer, de disparaître. S’il était blessé, il n’avait qu’à s’en prendre qu’à lui. Pourquoi entamer un combat inégal en épousant une femme toute de luxe et de passion ? Il la comprit. Il comprit que les désirs et les caresses de cette exquise créature devaient aller vers ce mâle superbe. Sa chair, à elle, réclamait une chair jeune et savoureuse, et non sa chair, à lui, malsaine et flétrie. L’union de son corps et du corps de Suzanne était indigne, monstrueuse même. Mais qu’elle se donnât à cet amant, était juste et légitime. Une résignation attristée le pénétra. Il se sentit bon, généreux, indulgent, sans colère ni haine. Et du fond de son être rasséréné, il excusa la faute de sa femme, il excusa toutes ses fautes futures. On l’appelait. Il se dirigea vers la table, tremblant de froid, honteux de sa nudité ridicule. Il courbait la tête, pris <references/>
Rodenbach - Le Carillonneur, Charpentier, 1897.djvu/288
l’étape du soir. On aurait dit qu’un cimetière avait marché — et abouti là ! Cela semblait toutes les croix inégales d’un cimetière, ayant quitté les morts qui sont les vivants d’hier pour appartenir un peu aux vivants qui sont les morts de demain. Ce soir seulement, elles étaient vacantes de la foule et se reposaient. Envahi par trop d’afflux funèbres, Borluut s’enfuit, chercha du bruit, des passants, d’autres images. Il arriva sur la Place, historiée de quelques fines architectures, presque un coin de Bruges, réduit et plus humble, pittoresque néanmoins, avec cette façade d’une ancienne châtellenie et l’Hôtel de Ville, au péristyle ajouré, aux sveltes colonnades. En face, le vieux clocher d’une église, plus émouvant d’être inachevé. Ô beauté des tours interrompues, qui se continuent dans du rêve et que chacun termine en soi ! Malheureusement une foire était installée au centre, des baraques, des toiles peintes, des manèges pleins de verroterie, où meuglent des orgues et des cuivres. Absurde anomalie, consentie par l’autorité, de mêler cette kermesse à la procession et les farces des pitres au drame sacré de la Passion. Ne faudrait-il pas que les pénitents apparussent dans du vide et dans du silence ? Borluut s’offensa ici encore du mauvais goût des modernes qui ne peuvent rien harmoniser. Il se promit bien de voir défiler le cortège ailleurs, dans quelque rue lointaine et <references/>
Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 30.djvu/577
Les fonctions les plus élevées, comme les plus basses de l’organisme, ont leur principe dans le mécanisme des élémens moléculaires. Nos sensations, nos images, nos pensées, nos volontés n’ont pas seulement pour conditions les phénomènes physico-chimiques ; elles sont, avec les phénomènes vitaux proprement dits, de pures résultantes de forces primitives et simples dont la complication à l’infini fait sortir ces merveilles de la vie psychique que la conscience nous révèle, mais que la science seule peut nous expliquer. Voilà une explication à laquelle on ne contestera pas le mérite de la simplicité. Est-elle aussi vraie, aussi conforme à l’exacte interprétation des faits, aussi réellement intelligible qu’elle en a l’air ? Ceci est une autre question. Ce qui n’est pas douteux, c’est qu’elle fait des conquêtes dans le monde savant. Presque aussi ancienne que la philosophie elle-même, elle semble regagner tout le terrain qu’elle avait perdu depuis la philosophie grecque. Alors déjà, avec Démocrite, Épicure et toute l’école atomistique, elle était devenue plus populaire dans la science antique qu’aucune autre doctrine, même que celles qui avaient le prestige des noms de Pythagore, de Socrate, de Platon, d’Aristote, de Zenon. De même aujourd’hui il ne suffirait plus de lui opposer les plus grands noms de la philosophie moderne, Descartes, Malebranche, Leibniz, Kant, Hegel, Maine de Biran. Cette école a reparu avec des noms moins connus, mais avec des méthodes d’apparence plus sévère ; elle a semblé recevoir des découvertes de la science contemporaine une sorte de confirmation scientifique. Fière de sa nouvelle popularité, confiante dans la clarté de ses enseignemens, elle brave l’autorité du sens commun, la lumière de la conscience, aussi bien que le génie des systèmes métaphysiques. On a beau lui répéter que le sentiment de l’individualité, de la spontanéité, de la liberté de l’être humain, est invincible, que la morale entière repose sur la foi à ces immortelles vérités ; on a beau l’accabler sous le poids des conséquences pratiques de ses doctrines, elle répond imperturbablement qu’un sentiment même invincible ne peut prévaloir contre une démonstration ou une analyse scientifique, qu’il peut n’être qu’une illusion, et que tel est le cas de toutes les affirmations psychologiques qui ne peuvent se concilier avec les explications de la science positive. En sorte que le spiritualisme de notre temps s’épuise vainement en belles analyses des faits de conscience et en éloquens discours sur la portée morale et sociale de pareilles négations. La philosophie mécanique n’en continue que plus intrépidement son œuvre d’explication dite scientifique. Il ne suffit même pas, pour arrêter ses progrès, d’opposer à ses affirmations non justifiées, à ses expériences mal faites ou peu <references/>
Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 20.djvu/378
malade, 235 ; obtient du régent quelques logements au château neuf de Meudon pour l’entier rétablissement de sa santé, 235 ; il assiste chez ce prince à la lecture d’un mémoire sur la taille proportionnelle, présenté par M. d’Allemans et le petit Renaud, 241 ; fait nommer Pezé gouverneur de la Muette, 243 ; comment il fait renoncer le régent à rembourser toutes les charges de justice avec le papier de Law, 253 et suiv. ; lui envoie une seconde fois un mémoire sur ce sujet, et le projet est entièrement abandonné, 2575 voyant le discrédit où est tombé le conseil de régence, il propose à M. le duc d’Orléans de se choisir un conseil de quatre personnes pour traiter et régler les affaires importantes ; raisons qu’il lui donne à ce sujet ; il déclare qu’il ne veut point être de ce conseil privé, s’il en choisit un, 286 et suiv. ; fait obtenir la survivance de la lieutenance générale de Provence au fils du marquis de Brancas, 290 ; comment il se lie avec l’abbé de Fleury ; genre de cette liaison, 308 et suiv. ; méthode d’instruction qu’il lui propose pour le roi, 310 ; il s’occupe de lui faire avoir le chapeau de cardinal, 312 ; sa conduite avec le régent à l’occasion de la promotion de M. de Mailly au cardinalat ; comment il est la dupe dans cette affaire de l’abbé Dubois et du régent lui-même, 331 et suiv. ; son entretien avec le régent sur la proposition que lui fait ce prince de la place de gouverneur du roi ; il combat la résolution du régent de chasser le maréchal de Villeroy et refuse l’offre qui lui est faite, 365 et suiv. ; obtient 12 000 livres d’augmentation pour son gouvernement de Senlis, 384 ; il presse plusieurs fois et en vain le régent de nommer un conseil étroit et demande à en être ; pourquoi, 384 et suiv. ; son entrevue avec le duc de Noirmoutiers à la suite de laquelle il découvre une friponnerie de l’abbé d’Auvergne, 389 et suiv. ; sa plaisanterie au conseil de régence au sujet d’un petit chat, 419, 420 ; dans quels termes il est avec l’abbé Dubois, 426 ; il exhorte le régent à ne pas aller au sacre de cet abbé, 427 ; promet au prince d’y aller quoique le seul non invité, si le prince n’y assiste pas, 427 ; pourquoi il n’y va point, 428 ; sollicite le régent, au nom des parents du comte de Horn, assassin, d’épargner le supplice de la roue au coupable et de lui faire trancher la tète ; raisons qu’il lui fait valoir, 457 et suiv, ; en tire la promesse du prince ; Law et Dubois font changer la résolution du régent, 448 ; sa colère en apprenant que le duc de Lorges, son beau-frère, veut épouser la fille du premier président de Mesmes ; l’éclat qu’il fait arrête le mariage pour un temps, 459 ; refuse les sceaux que le régent veut lui donner, XVIII, 10 et suiv. ; il reçoit la visite de MM. de La Force et Canillac qui le pressent de la part du régent de les accepter ; leur discussion à ce sujet, 12 et suiv. ; M. de Saint-Simon persiste à refuser, 15 ; ses motifs, 16 ; il s’oppose vivement à ce que le régent renvoie le maréchal de Villeroy et Trudaine, prévôt des marchands, 24 ; refuse la place de gouverneur du roi, 25 ; tire du régent la promesse qu’il ne chassera ni M. de Villeroy ni M. de Trudaine, 26 ; par qui ce dernier lui témoigne sa recon naissance, 27 ; sa conférence avec le régent sur l’état des affaires, 35 ; il assiste à un petit conseil où la translation du parlement de Paris est résolue, 38 et suiv. ; le régent le prie de ne point assister au grand conseil où il se propose de faire enregistrer la constitution ''Unigenitus'', 49 ; M. de Saint-Simon expose en deux mots au prince l’invalidité de cet enregistrement, 50 ; obtient pour le cardinal de Mailly l’abbaye de Saint-Étienne de Caen, et pour le fils du duc d’Uzès la survivance des gouvernements de Saintonge et d’Angoumois, 69 ; sa colère en apprenant le mariage du duc de Lorges avec la fille du premier président, 77 et suiv. ; il fait à la conservation de Mme de Saint-Simon le sacrifice de son ressentiment et se réconcilie peu à peu avec M. de Lorges et avec le premier président, 79 et suiv. ; s’oppose de nouveau à ce que le régent ôte la place de gouverneur du roi au maréchal de Villeroy, 101 et suiv. ; refuse obstinément cette place malgré les instances du régent et de M. le Duc, 102 et suiv. ; ses longs entretiens avec Millain à ce sujet, 103 et suiv. ; comment il met un terme à la persécution qu’il éprouve à cet égard de la part des deux princes, 104 ; sa conduite envers le maréchal de Villeroy qui, au lieu de lui savoir gré de lui avoir sauvé sa place, redouble de jalousie contre lui, 110 ; son entretien avec le régent sur l’abbé Dubois ; il prouve au prince que Dubois, pour se procurer le chapeau de cardinal, a sacrifié à l’Angleterre les plus chers intérêts de la France ; vive impression que produit son discours sur <references/>
Mousseau - Les Vermoulures.djvu/79
— Tu te trouves donc à admettre le progrès ; Eh ! bien, laisse monter la vague du progrès et de la civilisation. D’autres que nous, d’autres gouvernements pareils au gouvernement actuel travailleront à extirper le patriotisme et à amoindrir ce que nous aurons voulu grand. Il y en aurait un fameux nettoyage, si le gouvernement tombait, dit Ricard. — Pas tant que cela. — Les parasites, qui grugent le gouvernement, et les employés publics devraient faire leur paquet. — Non ; tu nous supposes trop extrémistes. Les parasites, on leur ferait comprendre qu’ils auront à se contenter de profits honnêtes ; les bons fonctionnaires, on leur donnera de l’avancement ; et les autres ne seraient congédiés, j’en suis sûr, qu’après avoir prouvé à l’évidence une nullité ou un mauvais vouloir absolus. — De sorte que, d’après toi, il n’y aurait rien de changé. — Non ; pour paraphraser un mot historique, il n’y aurait au parlement de la province de Québec qu’un Canadien-Français de plus. L’esprit plein des graves pensées qu’avait agitées leur conversation, le cœur et les yeux pleins de printemps, les deux amis redescendirent la pente ombragée, — qui a vu passer tant de gens en deuil, — pendant que le soleil couchant, là-bas, par delà les arbres, dorait les rapides de Lachine. {{—|lh=1}} {{T3|'''Struggle for Life'''|CHAPITRE {{rom-maj|XXIV|24}}.}} Reçu avocat depuis quatre mois seulement, Édouard faisait son chemin rapidement et sûrement. Au palais, il était très écouté des juges, auxquels il plaisait par la manière habile et claire avec laquelle il savait exposer une question et par le soin qu’il mettait à préparer ses causes. Cette satisfaction des juges et des plaideurs et l’estime grandissante de ses confrères avaient leur retentissement dans la bienveillance de ses patrons. Ils venaient de lui en donner une preuve substantielle en augmentant son salaire. Désormais, il gagnerait cent dollars par mois. Cette augmentation, il la méritait bien, car il travaillait consciencieusement : le premier arrivé au bureau, il se mettait vite à l’ouvrage ; toujours empressé et de bonne humeur, il plaisait à tous par son entrain infatigable ; étudiant les questions de droit avec calme et prudence, il faisait rarement fausse route ; quand il partait du bureau, un des derniers, le soir, il avait généralement une bonne journée à son actif. Loin de se laisser tourner la tête par son succès naissant, Édouard ne s’abandonnait pas à cet infécond et paralysant contentement, où se perdent un trop grand nombre : il ne croyait pas n’avoir plus rien à faire et que le succès qui couronnait ses premiers efforts fût la consécration de la gloire et de la fortune. Il ne s’enorgueillissait pas outre mesure, non plus, de ce qu’il lui arrivait d’heureux et accueillait les premiers sourires de la fortune en garçon d’esprit. Pour l’avocat qui réussit, il y a deux écueils : la satisfaction prématurée de soi et la cessation de tout travail ou l’abandon de tout le reste pour l’étude trop exclusive et étroite de l’étude du droit. Édouard fuyait également ces deux écueils, il travaillait d’autant plus qu’il réussissait mieux. Il demeurait aussi l’esprit ouvert à tous les courants intellectuels. Il ne voulait pas devenir uniquement une <section end="s2"/> <references/>
Abgrall - Et moi aussi j ai eu vingt ans.djvu/93
Il bredouille quelques termes à prétention technique et les autres acquiescent en baissant la tête. Je souris avec une évidente insolence. — Vous vous trompez, Monsieur ! L’autre se hérisse. — Comment, je me trompe ? Vous savez mieux que moi ? Parfaitement. — Ça, c’est trop fort ! daigne-t-il ajouter en riant. Après tout, c’est possible. Mademoiselle, voulez-vous l’ausculter. Vous serez meilleur juge. Mademoiselle va m’ausculter ? Ah ! non, par exemple. Le sang m’afflue aux tempes. Sèchement, je refuse. — Pardon, Monsieur, vous m’avez déjà ausculté hier. Je suis très fatigué et je ne vois pas l’utilité d’un autre examen aujourd’hui. Il s’incline, bon garçon. — Mauvaises têtes, ces Bretons ! Heureusement qu’ils ne sont pas tous de vos compatriotes, Mademoiselle de Kergar ! Non, heureusement ! mais quel nom a-t-il dit ? de Kergar ? Non, je me trompe. {{Mlle}} de Kergar, Luc Gorman ?... — Picrate, comment s’appelle-t-elle ? — {{Mlle}} de Kergar. T’as donc pas entendu ? — Tu es sûr ? — Archi-sûr, s’pèce de loufoque ! ... Picrate, une fois de plus, ne comprend rien de cet héritage qui vient de lui échoir. Sur son lit, j’empile mes réserves : des victuailles, des œufs, des fruits, une bouteille de Graves, des bouquins. — Tiens ! prends toujours mon bazar. Ça te consolera si jamais je ne te trouve point de ferme à gérer. Cet après-midi, je pars. — Où ? <references/>
Reclus - L'Homme et la Terre, tome II, Librairie universelle, 1905.djvu/443
long rempart difficile à franchir et force les voyageurs à faire un long détour à l’est par les cols de la montagne ou à se glisser dans l’étroit défilé du littoral conduisant à la Rivière de Gênes. À l’est, l’arête apennine se maintient avec une parfaite régularité en se rapprochant de la mer Adriatique, puis, au sud de l’Étrurie, elle se ramifie par des chaînes latérales qui constituent aussi un certain obstacle aux migrations des peuples ; cependant les passages naturels de vallée à vallée sont très nombreux dans cette direction, et c’est par ce côté de leur domaine que les Étrusques avaient surtout à porter leurs efforts d’attaque ou de résistance : de ce côté leur vint la mort. Ainsi l’immense amphithéâtre de l’Étrurie, si bien limité de trois côtés par la mer et les monts, est heureusement disposé pour servir de résidence commune à un même peuple, mais à l’intérieur il se divise en de nombreux compartiments distincts déterminant une diversité correspondante dans le corps de la nation. Des centres importants de population étaient nés spontanément dans toutes les parties de l’hémicycle favorisées par la richesse naturelle des campagnes, par le voisinage des mines, par une position heureuse pour le commerce, grâce à la convergence des vallées ou à l’existence d’un port. Aussi parmi les cités occupant un emplacement où l’attraction du sol devait appeler les hommes en grand nombre, nous apparaissent de distance en distance des points vitaux tels que Clusium (Chiusi), située sur le seuil à double versant du Tibre et de l’Arno, Perusia, Arretium, qu’enrichissent leurs anciens lacs comblés par les alluvions, Fæsolae (Fiesole), dont la belle Florence hérita, Pise, qui joignait à la fécondité de ses champs l’avantage de posséder un entrepôt maritime. L’importance exceptionnelle que l’histoire de Rome a prise dans le récit des événements humains a fait, pour ainsi dire, pencher l’Étrurie vers les bouches du Tibre, et c’est pour cela que l’on voit tant de noms étrusques se presser sur la carte entre Tarquinii et Véii, la voisine de Rome ; mais, dans son ensemble, la force politique était assez également distribuée en différents points sur toute l’étendue de la Toscane, et nulle part ne s’était développée de cité capitale assez puissante pour concentrer toutes les énergies nationales à son profit. La forme fédérative entre cités égales en droit paraît être celle qui prévalut le plus longtemps pendant les âges de la civilisation <references/>
Mirbeau - Le Jardin des supplices.djvu/80
{{Tiret2|quoti|dien}}, je gagnais, oui, je gagnais de l’estime envers moi-même. Toute la boue de mon passé se transformait en lumineux azur... et j’entrevoyais l’avenir à travers la tranquille, la limpide émeraude des bonheurs réguliers... Oh ! comme Eugène Mortain, {{Mme}} G... et leurs pareils étaient loin de moi !... Comme toutes ces figures de grimaçants fantômes se fondaient, à toutes les minutes, davantage, sous le céleste regard de cette créature lustrale, par qui je me révélais à moi-même un homme nouveau, avec des générosités, des tendresses, des élans que je ne m’étais jamais connus. Ô l’ironie des attendrissements d’amour !... Ô la comédie des enthousiasmes qui sont dans l’âme humaine !... Bien des fois, près de Clara, je crus à la réalité, à la grandeur de ma mission, et que j’avais en moi le génie de révolutionner toutes les embryologies de toutes les planètes de l’Univers... Nous en arrivâmes vite aux confidences... En une série de mensonges, habilement mesurés, qui étaient, d’une part, de la vanité, d’autre part, un bien naturel désir de ne pas me déprécier dans l’esprit de mon amie, je me montrai tout à mon avantage en mon <references/>
Revue des Deux Mondes - 1871 - tome 92.djvu/740
Villepreux ; je ne suis pas contente, Gilberte a passé une mauvaise nuit. Elle a eu le délire, et, solide comme je la sais, cela m’a bouleversée. Elle va mieux à présent. Allez la voir. M. de Porny, plus ému qu’il n’aurait voulu l’être, entra dans une pièce voisine, où il trouva Gilberte étendue sur une chaise longue, pâle à faire peur, l’œil fiévreux. — Je vous attendais, mon ami, j’ai à vous parler, dit-elle. — Je sais, je sais, répliqua-t-il doucement en s’emparant d’une main fluette et brûlante qu’elle laissait pendre à son côté, vous aimez M. de Varèze comme M. de Porny vous aime. Gilberte devint pourpre. — Oui, reprit-il, le mot est dit, et je ne le retire point, d’autant plus que c’est la vérité. Avec l’âge que j’ai et mes cheveux qui grisonnent, c’est absurde, si vous voulez ; mais rassurez-vous, cela ne changera rien aux sentimens d’estime et d’amitié que vous m’inspirez. Ce sera une nuance de plus, une nuance inutile du reste, et que vous oublierez en voyant quel bon garçon je suis quand les personnes que j’aime ont besoin de moi. — Je puis donc user de vous aujourd’hui comme j’en aurais usé hier ? reprit Gilberte, qui avait déjà recouvré tout son sang-froid. — Sans aucun doute ! — Eh bien ! je vais vous mettre à l’épreuve. M. de Porny sourit. — Vous désirez que j’aille chez lui ? dit-il. — Vous y refusez-vous ? — Apprenez-moi seulement ce qu’il faudra que je dise. — J’ai promis de ne pas l’abandonner, même après une chute, surtout après une chute ; ma conscience me dit qu’il est en péril, mon cœur me le crie. J’ai besoin de le voir. Cependant je ne veux pas lui écrire. Il me répugne de penser que d’autres yeux que les siens pourraient lire ma lettre. Rencontrez-le, et dites-lui qu’il vienne ici demain. — Demain ! répéta M. de Porny. — Rassurez-vous, je serai forte, je me connais. Le coup m’a ébranlée, mais il n’y paraîtra rien. Est-ce dit ? — Je verrai M. de Varèze, et il viendra. — Merci... M. de Porny mit i’entretien sur un autre sujet, parla des bruits du jour en galant homme qui glisse sur les confidences et n’appuie pas, fit sourire Gilberte, et, la voyant reposée et rafraîchie, se leva. — Je viendrai vous rendre compte ce soir de la commission que vous m’avez donnée, lui dit-il d’un air tranquille. On courait un prix ce jour-là sur le terrain tapageur de La Marche. Ce que M. de Porny savait des habitudes de {{Mlle}} Perthuis lui fit penser qu’il trouverait M. de Varèze sur la pelouse, et à deux heures il s’y rendit. <references/>
Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 15.djvu/649
des trois ligues grises & de la comté de Neuchatel. Ils composent tous le louable corps helvétique, & jouissent tous en France des mêmes privileges sans aucune distinction. L’entrée des toiles étrangeres n’est permise dans le royaume que par les villes de Rouen & de Lyon, en prenant pour cette derniere des acquits à caution aux bureaux de Gax ou de Coulonge, suivant un arrêt du 22 Mars 1692. Mais, en faveur des ''Suisses'' seulement, le bureau de Saint-Jean-de Losne est ouvert comme les deux autres, par un arrêt de 1698. La position du territoire des ''Suisses'' & de celui de leurs alliés, ne leur permet pas de faire entrer leurs toiles par Rouen ; ainsi ce n’est qu’à Lyon qu’ils exercent leurs droits, après avoir rempli néanmoins certaines formalités. Ils sont obligés de faire inscrire leurs noms & enregistrer leurs marques au bureau de la douane. Chaque particulier n’y est admis qu’après avoir constaté son origine devant le président en la jurisdiction de la douane, par des certificats authentiques des magistrats des lieux de sa naissance. La vérité de ces certificats doit être attestée avec serment par deux négocians ''suisses'' déja inscrits. Ensuite le procureur du roi & le directeur de la douane sont entendus ; & enfin lorsque rien ne s’y oppose, on expédie des lettres d’inscription, dans lesquelles il est défendu au nouvel inscrit de prêter son nom & sa marque, à peine d’être déchu de son privilege. Il n’y a que ceux des marchands ''suisses'' qui ont rempli ces formalités, qui puissent faire entrer leurs toiles à Lyon sans payer des droits. On exige même que les balles de toiles portent l’empreinte de la marque inscrite (qui par conséquent a été envoyée à un correspondant), & qu’elles soient accompagnées des certificats des lieux d’où elles viennent, portant que ces toiles sont du cru & de la fabrique du pays des ''Suisses'', conformément aux arrêts de 1692 & 1698. Il semble que de la teneur de ces deux arrêts, les ''Suisses'' pourroient inférer que leurs basins doivent être exempts de droits d’entrée comme leurs toiles. Mais il est constant que leurs basins payent les droits ordinaires ; peut-être est-ce parce que tout privilege est de droit étroit, & que les basins ne sont point nommés dans ces privileges, ou bien parce que le coton dont ces basins sont en partie composés, empêche que l’on ne puisse les regarder comme marchandises du cru du pays des ''Suisses''. Par une concession de François I. en l’année 1515, qui est motivée ''pour services rendus, & entr’autres prêt d’argent'', les marchands des villes impériales avoient obtenu quinze jours de délai, au-delà des quinze jours suivant immédiatement chaque foire, pendant lesquels, conformément aux édits de Charles VII. & de Louis XI. les marchandises ne payent à la sortie de Lyon aucun des droits dûs dans les autres tems. Les ''Suisses'' qui n’avoient que dix jours de grace, en demanderent quinze comme les Allemands, ce qui leur fut accordé par Henri II. le 8 Mars 1551. Pour jouir de cette faveur, ils doivent se faire inscrire à l’hôtel-de-ville comme ils le sont à la douane pour l’affranchissement des droits d’entrée. La raison en est que ces droits de sortie, qui sont domaniaux, ont été aliénés à la ville de Lyon en 1630. ''Voyez'' sur tout cet objet les ''différentes histoires'' des ''Suisses'', ou au moins le ''recueil de leurs privileges'', imprimé chez Saugrain en 1715 ; le ''mémoire'' de M. d’Herbigny, intendant de Lyon ; dans l’''état de la France'', par le comte de Boulainvilliers ; & le ''recueil des tarifs'', imprimé à Rouen en 1758. Il peut être important d’ajouter ici que les toiles de ''Suisse'', que l’on envoie de France aux îles & co{{DeuxColonnes|-}}lonies françoises, sont assujetties, par l’''article 14''. du réglement du mois d’Avril 1717, concernant le commerce de nos colonies, aux différens droits dûs à la sortie & dans l’intérieur du royaume d’une province à l’autre. ''Voyez'' {{EncL|Provinces|PROVINCE|P|13}} ''réputées étrangeres''. L’''article 3''. du même réglement, a exempté de tous ces droits, dans le cas de l’envoi aux colonies, les marchandises & les denrées du cru & de la fabrique de France. Mais comme les toiles de ''Suisse'' une fois sorties de leurs ballots, n’ont plus rien qui les caractérise, il paroît qu’il seroit aisé de les envoyer à-travers tout le royaume de Lyon à la Rochelle, pour passer à nos colonies comme toiles françoises. Afin de prévenir tout abus à cet égard, on pourroit exiger que les toiles de ''Suisse'' reçussent dans leur pays, ou lors de l’ouverture des balles en France, une marque particuliere & distinctive. Cette idée s’est présentée si naturellement, que j’ai cru devoir l’ajouter à cet ''article'' avant de le terminer. ''Article de M. {{sc|Brisson}}, inspecteur des manufactures, & académicien de Ville-Franche en Beaujollois''. <section end="SUISSE"/> <section begin="SUITE"/><nowiki/> SUITE, s. f. (''Gram''.) enchaînement, liaison, dépendance, qui détermine un ordre successif entre plusieurs choses. On dit les ''suites'' d’une affaire ; la ''suite'' de la débauche ; la ''suite'' d’un raisonnement ; la ''suite'' d’un prince ; c’est à la ''suite'' d’une affaire ; une ''suite'' d’événemens fâcheux ; une ''suite'' de sottises ; la ''suite'' de l’histoire ecclésiastique ; une ''suite'' de médailles de poëtes. {{sc|Suite}}, ''en Algebre'', est la même chose que ''serie. Voyez'' {{EncL|Serie|SERIE ou SUITE|S|15}}. {{sc|Suite}}, (''Jurisprud''.) signifie la continuation ou la poursuite d’une chose. Suivre le barreau, c’est le fréquenter, y assister. Etre à la ''suite'' de la cour ou du conseil, c’est se tenir auprès & à ses ordres. Faire ''suite'' d’une demande ou procédure, c’est continuer les poursuites commencées. ''Suites de bêtes'', dans la coutume de Berry & autres coutumes, c’est proprement une revendication que fait celui qui a donné du bétail à cheptel, lorsqu’il est vendu à son insçu par le preneur. ''Suite'' se prend quelquefois pour le croît du bétail. On dit ''croît'' & ''suite ;'' la coutume de Touraine, ''article 100'', dit que ceux qui ont droit de faultrage & préage, avec faculté de mettre dans les prés dont ils jouissent des vaches & bêtes chevalines avec leur ''suite'', n’y peuvent mettre que le croît & ''suite'' de l’année seulement, c’est-à-dire, les veaux & poulins de l’année. ''Suite de dixme'', ou ''dixme de suite. Voyez'' {{EncL|Dixme|DIXME|D|4}}. ''Suite par hypotheque'', est lorsqu’en vertu de l’hypotheque on poursuit le détenteur d’un bien qui est hypothéqué à une créance. On dit communément que les meubles n’ont pas de ''suite'' par hypotheque, c’est-à-dire, que quand ils sont déplacés du lieu où on les avoit donnés en nantissement, on ne les peut pas saisir entre les mains d’un tiers, si ce n’est en cas de banqueroute ou par droit de revendication. ''Voyez l’article 270'' de la coutume de Paris. ''Suite de personnes serves'', c’est la revendication que peut faire le seigneur de ses hommes serfs, lorsque sans son consentement ils vont demeurer hors de sa seigneurie. ''Voyez'' les coutumes de Berry, Nivernois, Bourbonnois, Bourgogne, Comté. ''Droit de suite du châtelet de Paris'', est un droit particulier, en vertu duquel lorsqu’un commissaire du châtelet de Paris a apposé le scellé, il doit être par lui apposé par droit de ''suite'' dans tous les lieux où il peut se trouver des effets du défunt, & l’inventaire doit être fait de même par les notaires du châtelet, ou par ceux des lieux auxquels les officiers du châtelet délivrent des commissions à cet effet.<section end="SUITE"/> </div> </div>
Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 15.djvu/1037
ou de grand seigneur. Pourtant ce qui faisait le fonds de cette ame, c’était un grand besoin de se répandre et de rencontrer dans les autres la sympathie qu’elle éprouvait. Turgot ressentit et inspira les affections les plus fortes et les plus durables. Son esprit n’éprouvait pas un moins haut degré le besoin d’être compris. La contradiction le trouvait peut-être sensible à l’excès ; il ne s’en irritait pas, mais il paraissait en souffrir. La vérité était pour lui une véritable passion ; c’est dire qu’avec de vifs plaisirs elle lui causa de vives peines. L’amour qu’elle lui inspirait avait peut-être le tort de se montrer trop ombrageux. Ce ne fut que par la grande habitude que Turgot put prendre sur lui d’entendre en silence une certaine suite de faux raisonnemens, Encore, si l’on en doit croire son ami et son biographe Dupont de Nemours, sa physionomie ne cessa jamais de parler pour lui. Ainsi ses défauts même, si l’on doit appeler de ce nom les imperfections qui ne font souffrir que nous-mêmes, tenaient encore aux plus nobles qualités de son ame. Historien, Turgot avait montré l’accord de la puissance active de l’homme et de la nécessité des lois générales. C’est au nom des mêmes principes qu’il résoudra les grands problèmes d’organisation sociale. Publiciste, il enseignera le libre développement des facultés humaines et ces immuables principes qui leur servent de lumière et de règle, il soutiendra en politique l’alliance de l’autorité et de la liberté. Quand il se fait l’apôtre du principe de liberté, Turgot suit le mouvement du XVIIIe siècle, quand il prend la cause de ces règles absolues, qui seules conservent la société et qui seules l’expliquent, il en devient l’adversaire. Jamais il ne sépare le devoir du droit. Jamais, en plaidant pour l’affranchissement des ames, il n’oublie ces lois de la raison et de la morale, les plus puissantes de toutes, puisqu’elles fondent les autres ou qu’elles les condamnent à mourir lorsqu’elles ne les ont pas fondées. Il sait que des forces qui dirigent le genre humain, les unes le poussent en avant, les autres le retiennent au contraire, et que celles-ci ne sont pas moins nécessaires à la véritable indépendance et au véritable progrès. C’est ainsi qu’en réclamant en faveur de la philosophie et de l’esprit d’examen une liberté illimitée, il défend la religion qui seule peut assurer régler le mouvement des sociétés, à la fois contenir et développer la nature humaine. Ce mot de ''droit'' que le XVIIIe siècle fait si haut retentir, il est vrai de dire que le XVIIIe siècle ne le comprend qu’à demi ou même s’en forme une idée fausse. Philosophiquement il le tire de l’utilité, sur laquelle il fonde l’origine de la société, c’est-à-dire qu’il l’ébranle en même temps qu’il l’établit Quel rapport y a-t-il entre le devoir et l’utilité essentiellement variable, et, si l’intérêt est la seule règle, qu’est-ce donc que l’obligation ? Mais le XVIIIe siècle va plus loin. Ce droit, il veut que chacun le respecte et le défende en soi non <references/>
Sarcey - Quarante ans de théâtre, t. 6, 1901.djvu/414
{{nr|400|QUARANTE ANS DE THÉATRE}}grâce sans avoir l’air d’y prendre garde. Ces messieurs y ont pleinement réussi, et c’est un enchantement pour l’oreille que leur partition musicale. Il faut que ces vers soient dits ; tous ne l’ont pas été. Il y a par exemple, au second acte, un morceau superbe où le diable convie toute la nature à griser d’amour Alain et la marquise de Saluce ; Coquelin cadet ne lui a pas donné assez d’ampleur et de relief. Je souhaiterais que M^^^ Bartet, qui est si admirable comédienne, sentît plus la nécessité de chanter le vers, surtout lorsqu’il est lyrique. Elle le jette d’une voix trop sèche, on dirait qu’elle en veut faire de la prose. Silvain a dit les siens avec une accentuation merveilleuse. Lambert fils a joué avec beaucoup de sensibilité et de grâce la scène de la séduction ; Leloir et Laugier contribuent au bon ensemble dans des rôles épisodiques. {{Mlle}} Ludwig a récité, avec une gentillesse très crâne, son petit prologue, et {{Mlle}} Moreno soupire d’une voix très juste et harmonieuse une chanson, dont l’air paraît horriblement difficile. 18 mai 1891. <references/>
Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 109.djvu/47
{{numérotation|{{sm|LES DUPOURQUET.}}||41}} une question de principes. Il ne faut pas que le mauvais exemple parte d’en haut ; les masses ne sont que trop disposées à s’affranchir, et à profiter pour cela des faiblesses et des erreurs de ceux qui sont la tête... Alice se releva, calmée soudain, les yeux secs ; sa douleur, son repentir s’abîmaient du coup dans l’amertume profonde d’avoir été entendue sans être comprise : — Monsieur le curé, répliqua-t-elle avec une dignité hautaine, vous pouvez calmer vos inquiétudes ; je me suis confiée à Dieu seul, cela suffit ; j’espère qu’il m’enverra quelques consolations dans ma détresse. Elle s’arrangeait très vite pour partir, entrechoquait sans pouvoir les agrafer les boucles de sa mante, rabattait de ses mains tremblantes les pans de son fichu de laine sur son front ; et il y avait, dans la fièvre de ces préparatifs, un tel affolement de souffrance, un reproche si direct à son adresse que l’abbé Roussillhes en resta tout interdit. L’homme indulgent et bon qui était en lui reparut : — Allons, ma chère fille, du courage ! la miséricorde de Dieu est infinie... Couvrez-vous bien, je vais vous faire donner un parapluie et les socques de la Mariette... Puis, sur le pas de la porte où il l’avait accompagnée tête nue : — À demain matin, n’est-ce pas ? Nous avons à recauser de tout cela, à prendre une décision... Aujourd’hui je suis trop troublé, j’ai besoin de me recueillir... Et d’un geste paternel, de ses mains tendues comme pour une bénédiction, il la congédia. {{c|XXXV.|lh=3}} Huit jours plus tard, Alice quittait Mazerat en compagnie de son père et de l’abbé Roussillhes, qui la conduisaient à Cahors chez les dames de la croix où elle avait été élevée. — Elle devait entreprendre là une retraite, se préparer par le jeûne et les prières au postulat dans l’ordre des petites sœurs des pauvres. Elle avait choisi cette voie de salut par humilité et aussi pour mériter davantage, pour mieux se vaincre dans sa frayeur des maladies, et son dégoût de la misère. Elle, qui malgré sa charité se détournait des mendians, ne pouvait supporter l’aspect de loques au travers desquelles saignent des plaies, elle allait se dévouer à soigner les vieillards et les infirmes, passer sa vie dans la fade puanteur des salles, à voir agoniser et mourir. Et l’abbé Roussillhes l’encourageait, l’exaltait dans cette idée, lui <references/>
Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 13.djvu/28
supporta avec l’apathique résignation des âmes véritablement désespérées. Chaque matin, la servante qui faisait sa chambre le trouvait levé et assis devant sa fenêtre, les yeux machinalement tournés vers la maison voisine, qui dominait celle où il demeurait de la hauteur de ses six étages, et lui interceptait tout à la fois l’air et le soleil. La maritorne en jupon de siamoise se hâtait d’arranger le lit, de rapprocher les tisons qui brûlaient bout à bout sur une poignée de cendres ; puis elle jetait un regard oblique sur le pauvre jeune homme, dont elle observait avec un secret dédain les sobres habitudes, et lui criait d’une voix enrouée : — Monsieur prendra-t-il sa tasse de lait ce matin, et faut-il aussi monter pour lui une flûte de six blancs ? — Oui, je vous serai bien obligé, répondait Gaston sans tourner la tête. Un moment après, l’affreuse chambrière revenait avec le déjeuner, et, avant de le poser sur la table, elle allongeait sa main rapace pour prendre les gros sous que le cadet de Colobrières avait déposés d’avance sur la cheminée. Ensuite elle jetait un regard de travers à Lambin, qui se hérissait à son aspect, saluait Gaston de la formule banale : N’y a-t-il plus rien pour votre service ? Et, sans attendre sa réponse, s’en allait en grommelant : — Qui sait lequel des deux mange ce gros déjeuner ? Sur ma foi, je crois que c’est le chien. Et elle ne se trompait pas. La maîtresse du logis, qui était une femme dévote, stricte à remplir ses devoirs et d’une exacte politesse, monta un matin pour s’informer de la santé de son locataire. Comme il assura qu’il se portait bien, elle ne demanda pas mieux que de le croire, et s’en alla de ce pas à l’église dire ses patenôtres. La semaine sainte s’écoula ainsi. Le beau jour de Pâques, Gaston se leva un peu ranimé par la pensée que le soir il irait au couvent de la Miséricorde, et qu’il trouverait Anastasie et la mère Angélique au parloir. Il était douteux pourtant que les forces ne lui manquassent pas pour arriver jusque-la ; la fièvre avait pâli ses joues, et il se soutenait à peine sur ses jambes affaiblies. Lorsque la servante eut achevé de ranger sa chambre, il traîna son fauteuil devant la fenêtre ouverte, et s’accouda sur le balcon, les yeux levés vers la ligne d’azur que lui laissaient entrevoir les hautes maisons de la rue de la Parcheminerie. Une tiède bouffée de vent passa sur son visage et fit frissonner une chétive pluie qui croissait au balcon d’une fenêtre voisine. Il comprit que le joyeux printemps était de retour, et que le soleil, dont il ne pouvait apercevoir le disque radieux, brillait sur les toits noirs de la moderne Babylone. Alors son imagination le ramena vers le doux <references/>
Proudhon - Théorie de l impôt, Dentu, 1861.djvu/208
{{Centré|{{t|PROJETS DE RÉFORME|90}}}} La lourdeur et l’iniquité de l’impôt ont de tout temps fait crier les populations. De tout temps aussi les projets ont pullulé, tant au point de vue de l’allégement qu’à celui d’une plus juste répartition. C’est de ces projets que nous avons à nous occuper maintenant. Notre étude sera complète, et nous pourrons formuler des conclusions motivées, quand nous aurons examiné avec une même attention les institutions existantes et les institutions proposées, appelons les choses par leur nom, la routine et l’utopie. Nous connaissons la première, voyons la seconde. Je ramène tous les projets de réforme à quatre principaux : <poem> L’impôt progressif ; L’impôt sur le capital ; L’impôt sur le revenu ; L’impôt sur la rente foncière. </poem> {{Centré|{{t|§ 1{{er}}. — DE L’IMPÔT PROGRESSIF.|90}}}} Une des choses qui ressortent le plus clairement de notre critique, c’est que toutes les différentes sortes d’impôts, quels que soient leur assiette, leur nature,
Revue des Deux Mondes - 1851 - tome 9.djvu/1125
compilant dans son grenier un recueil de causes célèbres, traduisant en allemand les essais philosophiques de l’éditeur-auteur, et tenant, par surcroît, le sceptre de la critique dans la ''revue'' agonisante : ce sont là des tableaux déchirans dont la réalité trop stricte, trop rigoureuse, a quelque chose qui nous révolte et nous repousse. Nous aimons mieux suivre Lav-Engro dans ses promenades sur le pont de Londres, où il lie des relations suivies avec une marchande de pommes établie en plein vent. Cette femme, en échange d’une légère aumône, lui avait d’abord donné de mauvais conseils, offrant au pauvre garçon qu’elle voyait entraîné par la misère jusqu’au suicide de receler et de vendre ce qu’il parviendrait à dérober. Le fait est qu’elle n’avait pas sur le droit de propriété des notions fort exactes, et cela tenait tout simplement à un, livre mal lu, mal compris, d’où elle extrayait, au sérieux, une morale dont l’ironie était trop subtile pour sa faible intelligence. À force de méditer les aventures scandaleuses de « ''Sainte Marie Flanders''<ref> ''Moll Flanders'' ; roman picaresque de Daniel de Foe. « ''Moll Flander, shop-lifter and prostitute''... » Ainsi la définit. Walter Scott.</ref>, et d’y croire comme à l’Évangile, la fruitière ambulante s’est familiarisée avec le crime, les galères et la potence. Or, il arrive qu’un beau jour, de méchans garnemens lui volent, quoi ? .. l’histoire de la voleuse, son bréviaire, son unique distraction. Quelle indignation ! quels cris ! quelle poursuite acharnée ! .. Ah ! les misérables ! quelle rancune elle leur garde ! Elle voudrait, jusqu’au dernier, les voir pendus. — Pendus ! et pourquoi ? lui demande Lav-Engro. — Pour m’avoir volé mon livre. — Mais... vous ne détestez pas le vol en lui-même !...N’avez-vous pas un fils condamné ?... — Eh bien ? — Eh bien ?... Voler un mouchoir, une montre, la première chose tenue, — ou voler un livre ! — croyez-vous qu’il n’y’ a pas une grande différence ? Le livre volé, Lav-Engro le remplace par une bible, une bible qu’il achète, bien pauvre alors, pour l’offrir à sa vieille amie. O prodige ! la bible défait l’œuvre dit romancier : la marchande de pommes se convertit peu à peu. Que son fils revienne, son fils le transporté, elle lui prêchera le respect du bien d’autrui. Borrôw, on l’aura remarqué, ne néglige jamais l’occasion de recommander sa bible au prône. À bout de toute ressource, Lav-Engro manqua l’occasion (rare et précieuse occasion) d’utiliser son érudition arménienne. Il avait échangé quelques mots, sur le pont de Londres, avec un étranger, pratique assidue <references/>
Revue des Deux Mondes - 1874 - tome 1.djvu/178
ces voies étaient la condition vitale et indispensable de l’avenir du Pérou ; mais le général Castilla était absorbé par les préoccupations de sa politique, et, lorsqu’en 1868 le général don Pedro Diaz Cameco, qu’une révolution venait de placer à la tête des destinées du pays, rendit une loi pour l’étude des différens chemins de fer intéressant la république, sa courte apparition au pouvoir fut bientôt suivie du régime le plus néfaste par lequel un pays ait jamais passé. L’esprit borné et l’administration corrompue du colonel Balta firent de ce qui devait être le salut du pays l’instrument même de sa ruine. Le remède fut pire que le mal. On voulait des chemins de fer en moins de quelques mois ; sans se préoccuper des ressources dont on pouvait disposer ni de l’utilité qu’ils pouvaient avoir, on en décréta une dizaine qui tous plus ou moins furent immédiatement entrepris pour le compte de l’état. Un budget équilibré de 150 millions de francs, et dont les recettes provenaient pour les deux tiers des revenus épuisables du guano, se trouva de la sorte grevé tout à coup d’un passif excédant un demi-milliard, auquel il fallut faire face par des emprunts. C’est là l’origine des lourdes charges qui pèsent aujourd’hui sur le pays et menacent de paralyser à jamais ceux de ces importans travaux qui étaient réellement utiles. Le principal de ces railways, le seul peut-être qui méritait un sacrifice aussi grand, c’était, comme nous l’avons dit, le chemin de fer central transandin. À la construction de cette ligne se rattache en effet, en dehors des intérêts commerciaux, un intérêt politique de premier ordre. Les principales richesses du Pérou, celles qui forment pour lui les véritables garanties de l’avenir, résident de l’autre côté des Andes. Là, sous un climat délicieux, l’émigration étrangère semble appelée à un degré de prospérité dont ceux qui, comme nous, ont visité ces contrées peuvent seuls se rendre compte ; mais, si ces provinces restent isolées de la côte, n’est-il pas naturel que peu à peu, le centre de leurs intérêts se trouvant déplacé, elles ne tardent plutôt à se rapprocher du Brésil, vers lequel les conduit le plus beau bassin fluvial qui se rencontre dans le monde ? Lorsque furent mis à l’étude les différens tracés, l’importance de Lima, capitale de la république, et du Callao, son principal port, mettait hors de discussion le point de la côte par où devaient s’exécuter les travaux de la ligne. Trois vallées convergent vers ce point, et appelèrent l’attention des ingénieurs, c’étaient celles de Chancay, du Rimac et de San-Damian, toutes trois également fertiles et reliant la côte à des points importans : la première mène en droite ligne au Cerro de Pasco, qui est un centre minier fort riche, un lieu d’activité et de production qui ne peut que gagner ; la seconde conduit plus directement au Chanchamayo, pays aujourd’hui peu connu, mais dont j’ai pu constater l’incroyable richesse forestière et <references/>
Restif de la Bretonne - Mes inscripcions, éd. Cottin, 1889.djvu/65
plus que dans le souvenir des hommes et dans la ''Lorgnette philosophique''<ref>Titre d’un ouvrage de Grimod de La Reynière. </ref> » ; le 27 mars 1785, où ils se sont promenés jusqu’à la Grève, où l’on tirait le canon pour la naissance du duc de Normandie<ref>''Drame de la vie'', appendice. </ref> ; le 16 novembre, le 4 décembre 1786 et surtout les 22 et 23 mars 1787. Il ne s’explique point sur ces dernières dates relatives à la visite, à Domèvre, de plusieurs « belles dames<ref>''Ibid''. </ref> » dont l’une pourrait bien avoir été {{Mlle}} Feuchère, l’actrice du théâtre de Lyon qu’il épousa trois ans après. Il va jusqu’à rédiger les inscriptions à faire : « Vous marquerez surtout, dans votre île, le 3, le 8 et le 10 juin, ainsi : ''3 vel. 8 vel. 10 jun. dieb. felic. dilect. amb. luco Domaprensi'' », etc. Parfaite imitation du style de Restif. Quelle dut être sa douleur en apprenant qu’il demandait l’impossible, — que la réalisation de son désir eût constitué un ''sacrilège'', que les dates devaient être inscrites le jour même ou l’anniversaire du jour de l’événement ! La Reynière se résigne et se contente d’écrire docte et philosophe » demoiselle Marion ; il la supplie de rappeler ses inscriptions à son père, lors des anniversaires. Les dernières lettres de Domèvre laissent percer un refroidissement vis-à-vis de Restif. La politique ne les accordait pas aussi bien que la littérature. Après avoir déclaré à celui qu’il appelait autrefois son « illustre ami », <references/>
Colet - Enfances celebres, 1868.djvu/158
béant et s’est écrié au récit d’une tuerie : » J’aurais voulu être là ! » — Brave enfant ! murmura le duc. — Il ne nous a quittés que lorsque celui qui parlait s’est endormi de lassitude, là, près des cendres chaudes, où il dort encore. En nous quittant, M. de Turenne a dit : » Je vais voir ce qui se passe à l’autre bivouac. » Le père se remit en marche ; les canons des remparts allongeaient sur la neige leur long cou noir comme autant de crocodiles sur une plage d’Éthiopie. Le duc en passant les caressait de la main : » Ils dorment, disait-il, mais ils se réveilleront quand apparaîtra l’ennemi. » Quelque chose tout à coup sembla se mouvoir dans l’ombre. » Est-ce un soldat appuyé sur sa pièce ? » s’écria le duc de Bouillon. Les torches que portaient les serviteurs s’inclinèrent, et le duc reconnut son fils qui dormait sur le canon couvert de neige, comme il l’eût fait sur son lit dans la chambre de son précepteur. Le duc de Bouillon sourit d’orgueil en reconnaissant son enfant. » Ohé ! ohé ! voici l’ennemi, cria-t-il en éteignant les torches et en tirant le petit Henri par la jambe. — L’ennemi ! répéta Turenne à moitié éveillé. Eh bien ! qu’il arrive, je me battrai ! » Et il se mit dans une posture guerrière, les poings serrés et tendus en avant. Son père l’entoura de ses bras et l’y serrant. » Prisonnier ! prisonnier de guerre ! s’écria-t-il. [Illustration : Turenne dormant sur un canon] — Vous, mon père ! vous ! dit le jeune vicomte en reconnaissant la voix. — Oui, oui ! Vous ne songez pas, petit malheureux, à l’inquiétude de votre mère durant cette belle équipée ; et pourquoi, <references/>
Anonyme - Courte esquisse des livres de la Bible.djvu/96
être jugés, non pour la vie, non pour juger. Ensuite le ciel et la terre s’enfuient, la mort et le hadès sont détruits et Dieu est tout en tous dans les nouveaux cieux et la nouvelle terre. Ici, l’Esprit revient en arrière pour donner une description de la céleste Jérusalem (comme il en avait donné une de Babylone et de ses relations avec la terre) durant le millénium. Après des avertissements à ceux qui vivent dans le temps du livre et à tous, le Christ se présente de nouveau comme Celui qui a donné cette révélation. Cela réveille dans l’épouse, avec laquelle est l’Esprit, le désir de sa venue ; et tout l’ensemble de sa position — envers le Christ, envers ceux qui entendent la Parole et envers les pécheurs — est vivement exprimé. Jean scelle de ses propres dé sirs ceux de l’Église, que Jésus vienne. La réintroduction du gouvernement de Dieu dans ce monde, en Christ, et la manifestation de la position relative de l’Église sont, dans ce livre, pleines d’intérêt. Il ferme, dans ce sens, le canon des Écritures (ainsi entièrement complètes) par la doctrine de l’Église. Mais comme celle-ci devait encore exister et qu’elle était céleste — le jugement déjà révélé et le cours des dispensations dans ce monde (de la part de Dieu qui y conduit) sont confiés à l’Église pour clore le livre historiquement, comme l’Église le fermait doctrinalement, étant elle-même au-dessus du monde. {{c|'''— FIN. —'''}} <references/>